Bref, Mâtho, toujours poussé par les épaules, après avoir traversé en tremblant des scènes de fantasmagorie bizarre dignes de la franc-maçonnerie, se saisit du voile impossible appelé Zaïmph, que Spendius a osé décrocher le premier et qu’il a jeté à terre.
Cette moralité, on la trouverait dans la réflexion très-sensée qu’adresse M. de Férias à sa petite-fille en voyant les mobiles extraordinaires auxquels elle obéit dans toute sa conduite : « Ma chérie, vous voulez toujours monter sur le cygne ; vous voulez l’impossible : ce sera, je le crains, l’écueil de votre vie. » Le dernier mot du livre serait alors un conseil d’institutrice : « Mesdemoiselles, plaignez Sibylle et ne l’imitez pas : avec toutes ses belles qualités, une seule, poussée trop loin, a failli la perdre. » Mais ce n’est pas là ce qu’a fait l’auteur, et, dans la suite de l’histoire, il paraît bien, au contraire, vouloir nous présenter Sibylle comme une sorte de type de perfection, un modèle ; et c’est bien ainsi que l’ont prise cette quantité d’admiratrices qui se sont écriées en la voyant : « Voilà comme nous sommes, voilà comme nous voudrions être, et comme nous serions à coup sûr si c’était à recommencer !
Si nous avions été prudents et sages, si une première chevalerie ne nous avait pas emportés, ou si nous avions su y joindre (ce qui semble contradictoire et presque impossible, ce qui pourtant ne l’est pas absolument) une clairvoyance rapide et positive, nous serions moins déçus et moins étonnés après coup.
Le roi de Suède Gustave III, qui voyageait en Italie incognito, fut initié et prit intérêt à la situation, à la relation, désormais impossible, du comte d’Albany et de la comtesse, et il se chargea de la régler à l’amiable.
Malgré tout et dussé-je trahir mon côté profane, mon côté faible, il m’est impossible, à parler franc, d’admirer autant qu’on le fait cette sécheresse extrême de la première partie du Discours sur l’Histoire universelle ; elle serait un vrai défaut, si cette première partie était capitale et le fonds même du Discours.
N’hésitons pas à le reconnaître : il est presque impossible au critique, fût-il le plus modeste, le plus pur, s’il est indépendant et sincère, de vivre en paix avec le grand poëte régnant de son époque : l’amour-propre du potentat, averti sans cesse et surexcité encore par ses séides, s’irrite du moindre affaiblissement d’éloges et s’indigne du silence même comme d’un outrage.