Il y a bien des intelligences plus fortement ébranlées que la sienne par les images et dont les déterminations morales sont asservies à ces images devenues des idées. […] Toutes les images sont vives, tous les contours sont harmonieux et purs. […] Qu’est-ce que la figure, l’image poétique ? […] C’est avec des images vivantes que Dieu nous a parlé sa pensée. […] Mais l’image ne nous émeut néanmoins qu’à cause de la pensée ; plus l’image a de relief, de couleur, de mouvement, plus elle agit sur nous ; pas d’expressions énergiques sans images, mais pas d’image éloquente sans idée.
Les Croquis Parisiens, qu’il a réédités, sont une galerie d’images affinées, brillantes, restituant les odeurs et les teintes et les bruits des choses. […] Il enfante les images, toujours réelles et magnifiques, d’âmes harmonieuses : il recrée leurs actes et leurs visions : il éprouve les angoisses et les joies de leurs émotions. […] Le mot est une image : à chaque mot doit répondre une image, une notion nette, unique. […] Les termes ne sont plus des images, dans notre esprit, mais suggèrent, au plus, de lointains fantômes d’images. […] J’ai admiré, encore, quelques images très légères et vraies, par Madame Morizot, et un très beau tableau de M.
Pour ne prendre que les génies lyriques, c’est-à-dire ceux qui excellent à revêtir toutes les émotions de leur âme par l’image et par le nombre, leur faculté n’est jamais plus grande, plus au complet qu’après la jeunesse et durant le milieu de la vie. […] Quelques pages enfin des Paroles d’un Croyant, quelques-unes des images touchantes et non politiques, pourraient se rapporter à cette poésie de curé de campagne en Bretagne. […] Jocelyn, remarquons-le bien, chante, tant qu’il n’est pas tout à fait guéri encore ; il chante, tant que l’image de Laurence le trouble et continue de partager son cœur. […] comme il l’habituera à associer l’idée de joie à l’image de la nuit, comme il veut lui donner en toutes choses, pour compagne de jeux, la nature ! […] La parabole de la Caravane, qui terminera heureusement cette comparaison avec Wordsworth, va nous offrir trente vers qui ne me semblent pouvoir être surpassés, pour l’image et pour l’idée, en aucune poésie : La Caravane humaine un jour était campée Dans des forêts bordant une rive escarpée.
ô douces veillées Dont les images mouillées Flottent dans l’eau de nos yeux ! […] Les bras tendus vers vous, je crois vous ressaisir, Comme on croit dans les eaux embrasser des visages Dont le miroir trompeur réfléchit les images, Mais glace le baiser aux lèvres du désir. […] Il est venu au printemps un colporteur qui vendait des images de vous dans le pays, comme celles d’un grand de la république ; et puis il en est venu en automne qui vendaient des chansons contre vous, comme celles de Mandrin. […] Chaque source balbutiait, comme autrefois, sa note que j’avais reproduite ; chaque rayon sur l’herbe, son image que j’avais repeinte ; chaque arbre, son ombre, ses nids, ses brises dans ses feuilles vertes ou ses frissons dans ses feuilles mortes, que j’avais goûtés, recueillis et répercutés dans mes propres harmonies : tout y était encore, excepté l’écho mort et le miroir terni en moi. […] Je marchai vers la fosse avec eux, et je jetai à mon tour les gouttes d’eau, image des gouttes de larmes, sur le cercueil de la jeune fille, et je rentrai sans avoir osé regarder le pauvre père !
Vainement y chercheroit-on de l'enthousiasme, de la Poésie, du dessin dans le plan, du coloris dans les images, de l'énergie dans l'expression, qualités indispensables au genre lyrique, duquel on peut dire, Qu'il n'est point de degrés du médiocre au pire. […] Depuis la derniere édition de cet Ouvrage, l'Abbé de Reyrac semble s'être fait justice sur son peu de talent pour la versification : il a publié une Hymne au Soleil ; mais il l'a écrite en prose ; & si cette prose sur la source de la lumiere & du feu est dépourvue de verve & de chaleur, elle ne l'est point de clarté, de correction, ni d'images grandes & noblement exprimées.
Son ode à Louis XIII partant pour la Rochelle (1627), qu’il a faite à soixante-douze ans, est la plus complète de toutes, la plus hardie de composition, de style, d’images, et vers la fin la plus virilement touchante : Je suis vaincu du temps, je cède à ses outrages, Mon esprit seulement, exempt de sa rigueur, A de quoi témoigner en ses derniers ouvrages Sa première vigueur. […] Horace, même quand il célèbre la campagne, est plus brillant, plus travaillé ; il y porte cette curiosité heureuse, cette ciselure de diction qui ne l’abandonne jamais dans ses odes et qui rappelle l’art ; son expression est vive et concise, son image serrée et polie jusqu’à l’éclat : elle luit comme un marbre de Paros, comme un portique d’Albano au soleil. […] Ce n’est donc pas tout à fait un désavantage pour Racan de s’en être tenu dans sa peinture à des images plus générales et plus larges : il y a gagné de produire une inspiration plus uniment champêtre, et sa pièce, moins curieuse pittoresquement que celle d’Horace, a bien plus de naïveté. […] Or, Racan applique ainsi cette image à M. de Termes, mort dans les combats : Il voit ce que l’Olympe a de plus merveilleux ; Il y voit à ses pieds ces flambeaux orgueilleux, Qui tournent à leur gré la Fortune et sa roue ; Et voit comme fourmis marcher nos légions Dans ce petit amas de poussière et de boue, Dont notre vanité fait tant de régions13. […] Il a couronné toutes les images d’Horace par la plus vaste image funèbre, et c’est ainsi encore que, dans cet art des imitations combinées et fondues au sein d’une inspiration vive, il s’est montré un digne élève de Malherbe.