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1147. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

Nous retrouvons alors le Lemonnier d’Un mâle, mais moins farouche, plus troublé, plus prosterné devant cette Nature qu’il adore religieusement comme une Divinité, que seule il croit capable de régénérer l’humanité. […] Gilkin est obsédé par les idées de débauche et de mort ; il aperçoit partout la ruse, la haine et décrit une bien triste humanité. […] Le Cloître est une minuscule humanité en marge de la grande, composée, comme elle, de puissants et de faibles, avec, comme en elle, plus de tares que de vertus. […] Le Cloître, nous l’avons dit, est une humanité réduite ; elle a sa morale à elle, sa justice à elle. […] Malgré l’avis des médecins, il continue ses recherches scientifiques, dans l’intérêt de l’humanité.

1148. (1930) Le roman français pp. 1-197

Elle pense à son salut aussi quotidiennement et avec autant de curieuse passion que nous en mettons à penser aux possibilités d’améliorer, sur le plan matériel, le sort de l’humanité ; mais il ne lui viendrait jamais à l’esprit de mêler le « divertissement » littéraire aux choses de la foi. […] Avant la date légale, Madame Bovary est entrée de la sorte plus que dans le domaine public : dans le domaine commun de l’humanité. […] N’a-t-il pas écrit, dans un de ces aveux délibérés, où il mêlait la hauteur désabusée d’un Chateaubriand à une ironie qui lui était propre : « Si j’avais pensé le monde comme j’ai pensé la Lorraine, je serais vraiment un citoyen de l’humanité. » On sait qu’il n’est pas allé jusque-là. […] Pour que ce concept d’humanité devienne à son tour émotionnel, il faudrait un événement extraordinaire, chimérique : l’invasion de la Terre par des êtres non humains et dangereux ; les Martiens de Wells ou les Xipéhus de J. […] Or, après tout, l’humanité tout entière, même représentée par ses cerveaux les plus intelligents, est un peu comme Jenny l’Ouvrière qui dévore chaque matin son feuilleton ; elle veut savoir « ce qui arrivera ».

1149. (1888) Études sur le XIXe siècle

Si on parvient à le saisir, on découvre tantôt une de ces notions toutes générales, comme la justice, l’humanité, Dieu, en elles-mêmes insaisissables et fluides et défiant la pensée, tantôt une simple opposition d’idées ou de mots. […] Qu’ils se nomment Eviradnus, Olivier, Charlemagne, Barberousse, Napoléon ; qu’ils luttent dans les défilés des Pyrénées ou dans les plaines de Waterloo, ses héros, en action comme en paroles, crèvent presque toujours les bornes de l’humanité. […] Fatigues, peines, privations, qu’est-ce que cela, quand on combat pour la sainte cause de son propre pays et de l’humanité ?  […] Quel bien pourrais-je faire à l’humanité hors de mon pays ? […] « La cause que vous défendez, lui écrit-il par exemple à propos de l’abolition de la peine de mort, est celle de l’humanité, de la civilisation.

1150. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

Sans doute l’intérêt bien entendu des coalisés serait encore aujourd’hui même d’accord avec celui de la France et de l’humanité ; mais est-ce une raison pour oser se flatter qu’il sera écouté ? […] XV Quant à son rôle de patriote et de citoyen, le voici : il aime si peu sa patrie et l’humanité qu’il l’abandonne dès qu’il est sorti de l’enfance.

1151. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Imaginez, si vous le pouvez sans épouvante, un homme au sortir du seizième siècle, après tant d’esprits qui viennent de recueillir toutes les traditions de l’esprit humain, et dont les plus hardis n’ont pensé qu’à la suite des deux antiquités ; un homme qui se sépare de toutes ces traditions, des deux antiquités, du présent, de l’humanité tout entière, regardant comme provisoires toutes les notions qui ont fait la croyance des temps écoulés jusqu’à lui, n’en voulant croire aucune définitivement qu’après l’avoir reconnue vraie par une opération de son libre jugement ; un homme qui, sans autre contrôle ni témoignage que sa raison, soutenu par le seul amour de la vérité dans ce laborieux affranchissement de sa pensée, se pose hardiment le triple problème de Dieu, de l’homme et des rapports qui lient l’homme à Dieu, du monde extérieur et de ses rapports avec l’homme ! […] Les langues sont comme l’humanité, qui, tout entière en chacun de nous, s’y personnifie néanmoins par des traits individuels.

1152. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Les autres ne sauront jamais ce que ces vieilles écoles de silence, de sérieux et de respect renferment de trésors pour la conservation du bien dans l’humanité. […] Je perdis de bonne heure toute confiance en cette métaphysique abstraite qui a la prétention d’être une science en dehors des autres sciences et de résoudre à elle seule les plus hauts problèmes de l’humanité.

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