Dans l’auteur espagnol, on a une expédition de terre, le brillant départ de Rodrigue, son courtois et galant entretien avec l’infante qui rêve au balcon de son palais d’été, de jolies scènes, de jolis motifs ; on a même un léger grotesque, ce berger qui, à la vue des Maures ravageant la plaine, s’enfuit dans la montagne, au plus haut des rochers, et qui, le combat terminé, ayant assisté à la victoire de Rodrigue et aux grands coups d’épée dont il pourfend les infidèles, s’écrie : « Par ma foi ! […] Rodrigue refait ce qu’il a déjà fait une fois ; il va droit au danger et à l’attrait ; il est chez Chimène, en tête-à-tête avec elle : et cette fois ce n’est pas à la dérobée, c’est tête haute et en plein jour qu’il s’y est rendu. […] Le Cid et Polyeucte, même lorsqu’on a Horace et Cinna présents, ce sont aujourd’hui les deux pièces de Corneille qui, relues, tiennent le mieux toutes les promesses qu’excite et que renouvelle incessamment cette haute renommée immortelle. […] Ce que Chimène a en elle de femme, d’éternellement femme, d’éternellement cher et sympathique aux jeunes cœurs, s’accuserait mieux encore par contraste, si on la suivait en détail dans cette comparution maussade devant la Chambre du haut syndicat littéraire et devant le Conseil des Prudents.
Sir Henry Bulwer est un peu doux et poli dans ses appréciations, comme il sied à un Anglais qui a tant vécu dans la haute société française ; mais voici un de ses compatriotes qui est plus haut en couleur et plus mordant : ce jugement parut dans le Morning-Post, à l’époque de la mort de Talleyrand ; je crois qu’il ne déplaira pas à cause de quelques traits caractéristiques qu’on chercherait vainement ailleurs : « Lorsque Talleyrand, nous dit l’informateur anonyme, était ici engagé dans les protocoles, lui qui dormait peu, il avait coutume de mettre sur les dents ses plus jeunes collègues, et nous avons trop bien éprouvé qu’au temps de la quadruple alliance et en plus d’une autre occasion, ses yeux étaient ouverts tandis que lord Palmerston sommeillait. […] Royer-Collard, qu’il proclamait bien haut son maître. […] Il fit des avances : Mme de Dino, avec son attrait de haute distinction et sa coquetterie d’esprit, l’y secondait puissamment.
Les statues qu’on adorait ne sont pas moins hautes, parce que des rosiers qui embaument, et des touffes épanouies dont l’odeur fait rêver, nous en déroberont la base. […] En fait de hauts talents, Lamartine n’en était que parce qu’on l’y introduisait religieusement en effigie ; Béranger n’en était pas. […] La pensée dramatique à laquelle nous faisions allusion plus haut, et qui est la sienne, préexistait déjà à sa pensée lyrique ; elle a traversé elle-ci sans s’y attiédir, et en est sortie impétueuse, inflexible, comme d’un lac où, à sa source, elle était tombée. […] Pardon et la Crainte, l’idée religieuse se mêle tendrement au poids de la faute, à l’amertume du calice : Mme Valmore n’a jamais proféré en poésie de plus hautes paroles.
Et il comprit aussi que l’enseignement supérieur, plus qu’à tout autre régime, importe au démocratique, lequel est plus visiblement fondé sur la raison ; que d’ailleurs tous les ordres d’enseignement se tiennent secrètement et influent les uns sur les autres, soit que l’ordre supérieur fasse descendre dans les autres son esprit et leur fournisse leurs méthodes, soit qu’il se recrute continuellement et se renouvelle en eux, par la facilité offerte à tous ceux que ces méthodes ont éveillés de s’élever à un degré plus haut de la connaissance. […] Il écrivait encore à l’empereur : « Assurons à ceux qui, par leurs qualités naturelles, leur naissance ou leur fortune, sont appelés à marcher au premier rang de la société… la culture de l’esprit la plus large… afin de fortifier l’aristocratie de l’intelligence au milieu d’un peuple qui n’en veut pas d’autre… » — Et c’est pourquoi il supprima la bifurcation en études scientifiques et littéraires, « qui sépare, disait-il, ce qu’on doit unir lorsqu’on veut arriver à la plus haute culture de l’intelligence » ; introduisit dans les lycées l’histoire contemporaine et quelques notions économiques ; restaura la classe de philosophie, si prospère aujourd’hui et suivie avec tant de passion par les mieux doués de nos enfants. Et pour l’enseignement supérieur, il fit tout ce qu’il put : mais assurément il fit beaucoup en créant l’École pratique des hautes études, si féconde et si vite illustre. […] Du moins elle pensait ainsi, ou plutôt (car elle ne saurait penser autrement), ce que la nécessité l’oblige à taire aujourd’hui, elle pouvait encore, il y a trente ans, le crier très haut.
Sociabilité, finesse et moquerie, tels étaient les principaux traits de ce charmant esprit, qui y mêlait, dans la pratique, de cette bonté facile et de cette indulgence assez ordinaire à ceux qui n’ont point placé trop haut l’idéal de la nature humaine. […] Là même où il pourrait paraître quelque charge, comme dans le proverbe de Madame Sorbet, la limonadière coquette et sentimentale, qui se pose en veuve désolée et qui ne pleure si haut son premier mari que pour en mieux attirer un second, que de traits pris sur la nature ! […] Théodore Leclercq a très bien peint sa douce paresse et son humeur peu ambitieuse, qui laissait à son observation tout son jeu et toute sa lucidité : « Assez bon observateur, dit-il, positivement parce que je reste en dehors des prétentions actives, je regarde faire, et j’écris sans remonter plus haut que le ridicule, qui est mon domaine, laissant des plumes plus fortes que la mienne combattre ce qui est odieux. » Là où il est le plus charmant et le plus naturellement dans son domaine, c’est quand il peint les légers ridicules dont il ne s’irrite point, mais dont il sourit et dont il jouit, les ridicules des gens qu’on voit et qu’on aime à voir, avec qui l’on joue la comédie sans qu’ils se doutent qu’ils la jouent doublement eux-mêmes. […] Il n’a jamais connu cet effort combiné qui consiste à monter une pièce, à la construire, à la faire sortir plus ou moins sauve de toutes les embûches des coulisses, à la faire marcher droit et haut devant la rampe redoutable ; il n’a jamais eu à consommer, comme dit Voltaire, cette œuvre du démon.
Jusqu’à l’âge de quarante-huit ans, il vécut en France, à la Cour, à l’armée, d’une existence brillante et active ; estimé des plus grands généraux, il était en passe d’une assez haute fortune militaire. […] Saint-Évremond, averti à temps, quitta la France, se réfugia en Hollande, puis en Angleterre, et vécut quarante-deux ans encore d’une vie de curieux et de philosophe, très goûté, très recherché dans la plus haute société, voyant ce qu’il y avait de mieux dans les pays étrangers, et supportant avec une fierté réelle et une nonchalance apparente sa disgrâce. […] Tout se passait chez elle avec un respect et une décence extérieure que les plus hautes princesses soutiennent rarement avec des faiblesses. […] Et Mme de Maintenon, très liée dans sa jeunesse avec Ninon, mais déjà en pied à la Cour et dans la plus haute faveur, lui écrivait, en lui recommandant son frère (Versailles, novembre 1679) : « Continuez, mademoiselle, à donner de bons conseils à M. d’Aubigné ; il a bien besoin des levons de Leontium 18.