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399. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Houssaye, Arsène (1815-1896) »

Cet octogénaire semblait n’avoir pas donné prise au temps : Sa barbe d’or jadis, de neige maintenant gardait les reflets d’autrefois.

400. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

Louis XIV avait eu toutes les qualités d’un maître de maison, le goût de la représentation et de l’hospitalité, la condescendance et la dignité, l’art de ménager l’amour-propre des autres et l’art de garder sa place, la galanterie noble, le tact et jusqu’à l’agrément de l’esprit et du langage. « Il parlait parfaitement bien222 ; s’il fallait badiner, s’il faisait des plaisanteries, s’il daignait faire un conte, c’était avec des grâces infinies, un tour noble et fin que je n’ai vu qu’à lui. » — « Jamais homme si naturellement poli223, ni d’une politesse si mesurée, si fort par degrés, ni qui distinguât mieux l’âge, le mérite, le rang, et dans ses réponses et dans ses manières… Ses révérences, plus ou moins marquées, mais toujours légères, avaient une grâce et une majesté incomparables… Il était admirable à recevoir différemment les saluts à la tête des lignes de l’armée et aux revues. […] Même quand ils en gardent la charge, elle ne leur pèse guère. […] Non seulement il fallait ne pas heurter, mais encore il fallait plaire ; on était tenu de s’oublier pour les autres, d’être toujours pour eux empressé et dispos, de garder pour soi ses contrariétés et ses chagrins, de leur épargner les idées tristes, de leur fournir des idées gaies. « Est-ce qu’on était jamais vieux en ce temps-là ! […] Rien n’étouffe cette gaieté, ni l’âge, ni l’exil, ni le malheur ; en 1793, elle durait encore dans les prisons de la République  Un homme en place n’est point alors gêné par son habit, raidi par son emploi, obligé de garder l’air important et digne, astreint à cette gravité de commande que l’envie démocratique nous impose comme une rançon. […] Jusqu’en 1789, le ciel est trop beau, l’air est trop tiède, pour qu’on se résigne à se boutonner jusqu’au cou. « Liberté, facilité, monsieur l’abbé, disait le cardinal de Rohan à son secrétaire ; sans cela nous ferions de ceci un désert282. » C’est de quoi le bon cardinal s’était bien gardé ; tout au contraire il avait fait de Saverne un monde enchanté d’après Watteau, presque « un embarquement pour Cythère ».

401. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre troisième »

Mais Malebouche l’a dénoncé à Jalousie ; celle-ci fait bâtir un château fort, et y enferme Bel-Accueil dans une tour dont une vieille a les clefs ; Honte, Peur, Malebouche et Dangier gardent les quatre portes principales. […] Sans doute les censures ajoutent au succès d’un livre et c’est une sage maxime qu’il faut se bien garder de censurer : les écrits qu’on ne veut pas faire lire. […] Il gardait le souvenir d’une grande lumière qui avait brillé sur l’antiquité, et qu’il savait renfermée dans ses livres. […] Toutefois, il garda jusqu’à la fin les goûts délicats qu’il tenait de Valentine de Milan, sa mère, et ce tour d’esprit, plus léger que vif, qui le portait à rimer tous les incidents de sa vie. […] Il en a la qualité suprême, la mesure, le goût ; il sait n’exprimer de ses sentiments que ceux qui lui sont communs avec tout le monde, et garder pour lui ce qui n’est propre qu’à lui.

402. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Ils se sont ainsi écartés de plus en plus ; pourtant ils gardent des traces de leur lointaine communauté d’origine. […] Ce qui est du moins indiscutable, c’est qu’en certaines circonstances la pénétration de la poésie par la musique peut se produire et qu’en pareil cas les œuvres poétiques d’une dizaine d’années en gardent l’ineffaçable empreinte. […] Grâce à quelque vieil air, resté dans les mémoires, telle piécette de vers a gardé une popularité qu’elle n’avait pas le droit d’espérer. […] Les manières ont gardé aussi une certaine désinvolture martiale. […] Les valets (le mot a gardé le sens qu’il avait au moyen âge) portent des noms empruntés à l’histoire et à nos plus célèbres romans de chevalerie.

403. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VII, seconde guerre médique. »

Il le fit garder par un Immortel, et suspendit, en partant, à ses branches, comme aux bras d’une femme, des bracelets et des colliers d’or. […] Les Perses le gravirent pendant la nuit, dispersèrent, à coups de flèches, mille Phocéens qui gardaient les cimes, et retombèrent sur les Grecs cernés par cette marche tournante. […] Apollon leur défendit de les déplacer, disant qu’il saurait bien les garder lui-même. […] Ce serpent hiératique gardait l’ancien temple de Pallas, blotti dans le rocher qui le supportait. […] Son foyer souillé n’en gardait plus qu’une pâle étincelle.

404. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Habitant en quelque sorte dans deux atmosphères, il portait et gardait, sans y songer, de l’une dans l’autre. […] L’homme d’esprit et l’homme du monde gardaient encore à vue le théoricien, et le sentiment du réel ne l’abandonnait pas. […] M. de Barante en fut très-frappé, et dit qu’il le voulait garder pour le donner comme article à M.  […] Guizot, dont il se plaît à dire qu’aucun esprit n’a plus agi sur le sien, M. de Rémusat garda, comme on peut croire, sa propre originalité. […] Il est bien peu d’hommes, depuis vingt-cinq ans, dont le libéralisme ne se soit usé, découragé ou perverti ; le sien a tenu bon et a gardé de sa flamme.

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