Les peines édictées, qui sont « la mort et la confiscation des biens » au profit des hôpitaux, pour les DEUX combattants, pouvaient être d’autant plus sévères que, dans cet édit de 1679, le législateur créait ce fameux tribunal d’honneur composé des maréchaux de France, qui devaient juger en dernier ressort et punir les injures de l’honneur outragé… Le législateur avait fait de sa loi une espèce de filet, tissé de précautions et de peines, dans lequel il pût prendre tous ceux qui participaient à un duel d’une manière quelconque : combattants, seconds, témoins, porteurs de cartels ou d’appels, même jusqu’aux laquais qui, le sachant, porteraient une lettre de provocation de leurs maîtres, — condamnés par ce fait seul au fouet et à la fleur de lys, et, si récidive, aux galères à perpétuité !
Les mille fleurs de l’imagination et de la fable s’enroulent autour des moindres faits, sous des mains divinement artistes, et il faut ôter ces voiles brillants, cette floraison de vigne enivrante d’autour du rameau sec et nu, pour nous le montrer tel qu’il est, travail difficile qui demande une main habile, un esprit ferme.
En effet, si, dans son livre sur les Césars, où il s’agit bien moins de ces hommes, qui totalisèrent dans leur personnalité monstrueuse les vices et les grandeurs de leur temps, que de la société même qu’ils dominaient, de cette plante sanglante et pourrie par le sang qui l’avait abreuvée et dont eux, les Césars, étaient la fleur immense, éclatante et vénéneuse, Champagny, pour nous en montrer les racines, creuse plusieurs civilisations ; si, dans son livre, l’érudit ne défaille jamais ; si l’antiquaire, aux yeux de lynx, voit ce qu’il y a de faits inobservés derrière un bas-relief ou un lambeau d’inscription ; s’il y a tour à tour en lui, pour les besoins de son histoire, du Champollion et du Cuvier ; et si, enfin, planant sur le tout, pénétrant tout, le moraliste achève de clarifier un sujet où l’énormité des choses les rend presque incompréhensibles, pouvons-nous dire que l’homme politique se montre, dans ce beau livre, au même degré que l’antiquaire, le moraliste et l’érudit ?
Grâce à lui, il n’y avait pas « dans toutes les mers de l’Orient — dit Georges Chastelain en ses chroniques — mât de vaisseau revêtu, sinon des fleurs de lys de France. » Il réalisait enfin au pied de la lettre la fière devise d’un blason nouvellement conquis : « À cœurs vaillants rien d’impossible !
… Seulement, pour ceux qui ne croient pas que la solution du problème économique soit à fleur de terre, mais à fond d’âme, dire simplement et superficiellement que les maux qui affligent l’homme, et par l’homme l’enfant et la femme, viennent uniquement de ce que la richesse n’est pas encore montée au degré qu’elle atteindra plus tard et qu’elle doit nécessairement atteindre, c’est répondre à une question morale par une raison économique, et c’est là bouleverser, en les mêlant, toutes les notions.
Quand il lisait les premières élucubrations du jeune Ampère, alors à la fleur de son printemps : « Ampère, — dit-il page 158, — tellement supérieur que les préjugés nationaux, que les appréhensions de l’esprit borné d’un grand nombre de ses compatriotes sont bien loin derrière lui et « que par son génie il est cosmopolite… » II crut, à la force qu’il vit en ces élucubrations de M.