Et, de dix ans en dix ans, les jupes, tour à tour trop amples et trop étroites, s’étalent sur des contours artificiels et démesurés, ou épousent du plus près possible les contours réels : deux façons diverses de nous communiquer une même impression. […] D’une façon générale, la femme a été à la fois considérablement amplifiée — et coupée par le milieu.
Mais pour ceux qui savent combien était haut le sentiment de la responsabilité chez ce parfait honnête homme, il paraîtra que ses dernières préoccupations, — celles où il puisa la paix suprême, — ont été pour un examen de conscience plus intime et où il s’arrêta moins à peser les idées auxquelles il avait lié sa vie qu’à venfier la façon même dont il avait usé de la vie. […] Nous n’entendons plus que comme une belle poésie la façon dont il confond le sentiment religieux et la curiosité scientifique.
C’est qu’à son endroit les philosophes du siècle se sont mépris de deux façons. […] Contre leurs débordements et leurs dévastations, il a fallu installer une force égale à leur force, graduée selon leur degré, d’autant plus rigide qu’elles sont plus menaçantes, despotique au besoin contre leur despotisme, en tout cas contraignante et répressive, à l’origine un chef de bande, plus tard un chef d’armée, de toutes façons un gendarme élu ou héréditaire, aux yeux vigilants, aux mains rudes, qui, par des voies de fait, inspire la crainte et, par la crainte, maintienne la paix. […] Je n’ai pas le droit d’élever mes enfants chez moi et de la façon qui me semble bonne. « Comme on ne laisse pas la raison445 de chaque homme unique arbitre de ses devoirs, on doit d’autant moins abandonner aux lumières et aux préjugés des pères l’éducation des enfants, qu’elle importe à l’État encore plus qu’aux pères. » — « Si l’autorité publique, en prenant la place des pères et en se chargeant de cette importante fonction, acquiert leurs droits en remplissant leurs devoirs, ils ont d’autant moins de sujet de s’en plaindre qu’à cet égard ils ne font proprement que changer de nom et qu’ils auront en commun, sous le nom de citoyens, la même autorité sur leurs enfants qu’ils exerçaient séparément sous le nom de pères. […] Au nom de la raison que l’État seul représente et interprète, on entreprendra de défaire et de refaire, conformément à la raison et à la seule raison, tous les usages, les fêtes, les cérémonies, les costumes, l’ère, le calendrier, les poids, les mesures, les noms des saisons, des mois, des semaines, des jours, des lieux et des monuments, les noms de famille et de baptême, les titres de politesse, le ton des discours, la manière de saluer, de s’aborder, de parler et d’écrire, de telle façon que le Français, comme jadis le puritain ou le quaker, refondu jusque dans sa substance intime, manifeste par les moindres détails de son action et de ses dehors la domination du tout-puissant principe qui le renouvelle et de la logique inflexible qui le régit. […] Morelly, Code de la nature . « À cinq ans, tous les enfants seront enlevés à la famille et élevés en commun aux frais de l’État d’une façon uniforme. » On a trouvé un projet analogue et tout spartiate dans les papiers de Saint-Just.
Boileau se moque de Clélie, « cette admirable fille, qui vivait de façon qu’elle n’avait pas un amant qui ne fût obligé de se cacher sous le nom d’ami ; car autrement ils eussent été chassés de chez elle. « Certes la subtilité n’est pas le vrai : mieux vaut pourtant être ridicule que vulgaire, et c’est un moyen trop commode pour échapper au ridicule que de se réfugier dans la banalité. […] Qui n’a senti, à certains moments de calme, que les doutes qu’on élève sur la moralité humaine ne sont que façons de s’agacer soi-même, de chercher au-delà de la raison ce qui est en deçà et de se placer dans une fausse hypo-thèse, pour le plaisir de se torturer ? […] Il n’erre que parce qu’il exclut tout ce qui n’est pas lui, parce qu’il participe de la faiblesse humaine, qui ne peut tout embrasser à la fois et crée la science d’une façon analytique et successive. […] Les quelques bribes de philosophie allemande qui ont passé le Rhin, combinées d’une façon claire et superficielle, ont fait une meilleure fortune que les doctrines elles-mêmes. […] Puis je me dis : « Ce n’est pas leur faute s’ils sont laids ; c’est une façon de vivre. » Il est d’un petit esprit, me disais-je, de moraliser la nature et de lui imposer nos jugements.
13 septembre La Haye… À une seconde séance devant La Leçon d’anatomie de Rembrandt, Saint Victor et nous, nous tombons sur le collectionneur La Caze, un parleur enthousiaste de tableaux, un esthéticien loquace, un conférencier indétachable de votre bouton d’habit, une façon de Diderot épileptique, qui a des crises d’admiration presque inquiétantes, devant toute bonne toile ancienne. […] C’était tout à la fois une mélodie lointaine et proche, s’élevant, montant, mourant parmi nos sensations et nos pensées encore endormies, et qui nous berçait comme dans le rêve d’une musique flottante, aérienne, amoureusement divine et vague, à la façon de la lumière d’une apparition en train de disparaître. […] Maintenant très original dans sa façon de s’exprimer, il l’est assez peu dans sa façon de penser, n’ayant une impression de la beauté et du caractère des choses, que lorsqu’il en est averti par un livre bon ou mauvais, croyant, à la façon d’une intelligence inférieure, à l’imprimé, et par cette servitude assez soumis dans le fond à l’opinion générale.
Il y a lieu maintenant de voir de quelle façon nos conteurs brodent sur leurs divers thèmes. […] L’art de se débarrasser d’un cadavre gênant est pratiqué de la même façon dans Le tailleur et le bossu (1001 Nuits) et dans Le fils adoptif du guinnârou. […] Ce symbolisme reste forcément assez obscur car les interprètes qui traduisent les termes abstraits de la langue indigène ne possèdent que rarement le français d’une façon suffisante pour rendre exactement l’idée. […] Diêgui) qui, pour annoncer d’une façon moins brutale à son frère que ses troupeaux ont été enlevés, lui fait apporter pour son repas un couscouss uniquement composé d’herbes, sans le moindre morceau de viande, lui donnant ainsi à entendre qu’à moins de reconquérir ses bestiaux dérobés, il n’aura plus désormais que les produits du sol pour le nourrir. […] L’oreille des noirs ne perçoit pas, semble-t-il, les sons de la même façon que la nôtre, sinon, il faudrait conclure qu’ils interprètent leurs perceptions d’une manière très différente de nous.