*** Je me rappelais ces paroles en lisant, l’autre jour, dans un journal la phrase que voici : « La politique est un art d’expérience et d’observation, appliqué à créer, pour les hommes, la plus grande source de bonheur possible ». […] On ne vient pas arracher violemment un homme à la vie ; on ne jette pas le deuil dans sa maison ; on ne le réduit pas à la misère, en lui prenant son gagne-pain sur quoi subsistent aussi trois innocentes créatures, élues de sa tendresse ; cet homme d’apparence tranquille, d’esprit élevé, de culture rare, on ne le traîne pas, entre deux gardes, des cellules infâmes de Mazas aux sinistres antichambres des juges d’instruction ; on ne le soumet pas, comme un voleur et comme un assassin, aux dégradantes mensurations du service anthropométrique, le conseil de révision des bagnes ; de son corps, dévêtu par les lourdes mains des gendarmes, on ne fait pas un objet d’expériences pour les manipulations et le calcul d’un criminaliste officiel ; on ne se livre pas enfin à toute cette série de violations humaines, sans qu’il y ait à cela des raisons supérieures, un droit immédiat d’intérêt public et de défense sociale.
Ils sont allés dans le passé, loin, bien loin, copier avec une puérilité servile de déplorables erreurs, et se sont volontairement privés de tous les moyens d’exécution et de succès que leur avait préparés l’expérience des siècles.
parce que le bon sens a fait, durant ces trente dernières années, justice des ridicules préjugés de quelques voltigeurs de la Tragédie il faudrait se désoler de n’avoir plus ces adversaires à combattre, jeter la pierre au progrès et reprocher à notre génération d’avoir profité de l’expérience !
Fata canit, foliisque notas et nomina mandat ; ………… Illa manent immota locis………… Virgil., Æn., lib. iii. Théâtre-Français Racine Andromaque I 10 messidor an 10 (29 juin 1802) Racine a des pièces plus parfaites qu’Andromaque, aucune où il y ait plus d’élan et de verve ; partout on reconnaît le jet d’un talent jeune et vigoureux : tout est en mouvement ; tout est en feu ; les intérêts se croisent, les passions se heurtent : deux amants furieux qui poursuivent des ingrates ; deux princesses désespérées, l’une de ce qu’on l’aime, l’autre de ce qu’on ne l’aime pas ; une mère tremblante pour les jours de son fils ; une veuve prête à s’immoler aux cendres d’un époux ; l’héroïsme de la tendresse maternelle, le sublime de la foi conjugale, parmi les fureurs et les vengeances, au milieu des crimes de l’amour. Où sont ces sophistes qui disaient que Racine n’était pas théâtral ?
Il est même certain, pour quelqu’un qui a un peu l’expérience des typographies, typographiarum cuidam perito, que c’est l’f bas de casse de frères qui a amené l’f bas de casse de français. […] Une dure expérience le lui avait souvent appris, le lui avait souvent fait sentir.
Mais ce que je puis vous répéter, c’est de ne pas venir demander à nos modes un mot d’ordre et des recettes d’originalité ; c’est de n’aliéner jamais en vous la plus précieuse des possessions, la propriété de votre pensée. » Comme il est aisé de le voir, il y a loin de ces conseils qui laissent l’artiste maître de ses tendances, à la discipline soi-disant infligée aux pensionnaires de Rome ; loin d’imposer un joug à l’élève, elle lui apprend à savoir user de sa liberté, loin de paralyser son génie, s’il en a, elle en favorise l’expansion et lui apprend à se servir de toutes ses forces en l’enrichissant de l’expérience des maîtres. […] C’est là sans doute une des raisons majeures des succès obtenus pendant les guerres de la Révolution : les généraux étaient jeunes, ils avaient cette vertu suprême de n’avoir point l’expérience — c’est-à-dire l’âge — et d’oser.