On ne prouve pas qu’on existe, on le sent. […] Mais s’il a nié surtout que les Idées pussent exister à part et indépendamment des êtres que nos sens nous révèlent, il n’a jamais nié qu’elles existassent. […] Considérons ce qu’elle peut devenir, lorsque, se livrant tout entière à cette poursuite, elle s’élève par ce noble élan du fond des flots qui la couvrent aujourd’hui, et qu’elle se débarrasse des cailloux et des coquillages qu’amasse autour d’elle la vase dont elle se nourrit, croûte épaisse et grossière de terre et de sable10. » Puis, dans cette sage conciliation que Platon a tentée entre le sensualisme ionien et l’idéalisme de Mégare, il employait la douce ironie qu’il avait apprise de Socrate, à se moquer « de ces hommes semés par Cadmus, de ces vrais fils de la terre, qui soutiennent hardiment que tout ce qu’ils ne peuvent pas palper n’existe en aucune manière ; de ces terribles gens qui voudraient saisir l’âme, la justice, la sagesse, ou leurs contraires, comme ils saisissent à pleines mains les pierres et les arbres qu’ils rencontrent, et qui n’ont que du mépris, et n’en veulent pas entendre davantage, quand on vient leur dire qu’il y a quelque chose d’incorporel11 ».
Faust existait avant lui, mais à l’état d’embryon que le génie moderne n’avait pas encore regardé. […] S’il existait sur terre un homme capable d’écrire Faust, et qui eût besoin d’un écho, je me ferais muraille pour répercuter cette voix d’en haut ! […] Cela n’existait pas dans ce monde avant l’épopée dramatique de Weimar.
Nous possédons des documents très complets à ce sujet, car, outre le livret d’opéra, la Mort de Siegfried, il exista, de la même année, une esquisse d’un drame : les Nibelungen. […] Mais pour les artistes son œuvre — où l’art prend droit d’exister — est le roman exemplaire de l’âme athénienne. […] J’indiquerai, plus tard, dans un troisième article, comment la musique fut amenée, par Beethoven et Wagner, à ne pouvoir plus exister sans le concours des autres arts : comment, aussi, l’union ne peut être décisive, les différents arts n’étant point parvenus au même degré de développement.
Il ne peut y avoir que deux sortes d’esprits, qui se suffisent à eux-mêmes en se jugeant ; l’extrême génie qui n’existe point, et l’extrême sottise qui n’existe que trop : l’impuissance où se trouve celle-ci de connaître ce qui lui manque, supplée à ce qui lui manque en effet ; d’où il résulte que dans la distribution du bonheur les sots n’ont pas été les plus mal partagés. […] On regardait comme une chose décidée qu’un géomètre transporté hors de sa sphère, ne devait pas avoir le sens commun : il était facile de se détromper par la lecture de Descartes, de Hobbes, de Pascal, de Leibnitz, et de tant d’autres ; mais on ne remontait pas jusque-là ; combien de gens pour qui ces grands hommes n’ont jamais existé !
Le second volume, qui se replie sur Vendémiaire pour s’arrêter au 18 Fructidor, le prodrome éclatant de Brumaire, contient l’échange de Madame Royale, la conspiration de Babeuf, la sordide trahison de Pichegru, et l’histoire, à travers tous les faits, de cette anarchie entre des pouvoirs rivaux que nous avons vue exister depuis dans des gouvernements détruits parce qu’ils étaient impossibles. […] Mais, préalablement à tout examen, nous dirons qu’il ne pouvait l’être ; car la difficulté qu’on signalait n’existe pas. […] Établi sur une négation, — la haine des Bourbons de la branche aînée, — ce gouvernement d’antipathie, qui créa pour tout le monde une position fausse, laquelle a duré dix-huit ans, fut l’expression de la plus universelle absence de confiance qui ait jamais existé.
. — Mercure a donc mis dans tout son jour la vieille ligue qui existe entre Folie et Amour, bien que celui-ci n’en ait rien su jusqu’ici. […] « Il existe dans une bibliothèque peu connue un exemplaire des œuvres de Louise Labé (édition de Rouen, 1556), qui paraît avoir appartenu à La Monnoye.