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1215. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

Si l’on pouvait voir dans une sorte d’aquarium la formation et le progrès de la fable de Psyché à ses divers états d’éclosion et de croissance, je me persuade que l’on reconnaîtrait que cela a commencé bien simplement, par un conte qui s’est grossi peu à peu, mais que ni la philosophie ni la théologie n’ont présidé à l’heureuse venue du germe ; ç’a été, si j’ose ainsi parler en naturaliste, un globule, une cellule qui a prêté au développement et qui a réussi. […] Quelque conteur de belle imagination y aura passé, y aura soufflé la vie et la couleur, aura rejoint les divers anneaux du récit, mais un conteur amusé et amusant, un vrai Milésien encore, soucieux avant tout de plaire, un digne habitant de cette cité qui avait pour devise : « Défense à personne céans d’être sage et sobre : sinon, qu’on le bannisse ! 

1216. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Je ne veux, entre ses divers romans, citer ici que les Souffrances du professeur Delteil, ce pauvre souffre-douleur de ses méchants écoliers, cet amoureux muet et désespéré d’une des trois sœurs modistes, et recommander la figure de ce docteur indulgent et tendre qui épouse celle même qui s’est rendue coupable d’une faute et qui le lui avoue. […] Non content, dans ses ouvrages, de reproduire et de décrire les objets et les scènes qui étaient à sa portée, il s’est attaché d’une égale ardeur à rechercher curieusement dans le passé les maîtres desquels il pouvait relever, et qui, en suivant la même route, avaient laissé des traces remarquables dans les divers arts ; et c’est ainsi qu’en remontant dans l’École française de peinture, après avoir traversé les brillantes séries du xviiie  siècle, où la nature elle-même, la plus simple, la plus inanimée ou la plus bourgeoise, a son éclat et sa vivacité de couleur dans les toiles de Chardin, il est allé s’arrêter de préférence devant des artistes bien moins en vue et moins agréables, devant les frères Le Nain, appartenant à la première moitié du xviie  siècle, qui lui ont paru chez nous les premiers peintres en date de ce qu’il appelle la réalité.

1217. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

des choses impossibles sans doute, et d’ailleurs fort diverses. […] L’assemblage de tels esprits, dans ces conditions variables et diverses, ne pouvait être que passagère, on devait, chacun marchant en avant, s’éloigner peu à peu et se séparer.

1218. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Cependant les années s’écoulaient, et l’observateur impartial des diverses réalités humaines mûrissait en Gavarni, tandis que de son côté le dessinateur aussi se fortifiait de plus en plus et s’enhardissait. […] Il entrelaçait ces diverses suites et les menait de front.

1219. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Ceux qui l’ont connu à cet âge de première jeunesse et à cette heure de transition nous le dépeignent le plus charmant jeune homme, d’une figure agréable, très-distingué de tournure, très-élevé de sentiments, tout à fait de race ; tel d’ailleurs de caractère et d’humeur qu’on le voit encore aujourd’hui dans l’intimité, avec des intermittences de gaieté et de sérieux, habituellement doux comme un enfant, naïf même, et, quand il le faut, d’une audace, d’une vaillance et d’une intrépidité rares ; ayant naturellement le goût du bien, mais subissant l’influence des divers milieux. […] Il imagina et entreprit coup sur coup plusieurs journaux et publications de divers genres qui répondaient à des besoins du temps, à des besoins encore vagues qu’il était l’un des premiers à deviner et à pressentir.

1220. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

Il existe dans ces caractères, avec des nuances diverses, une base d’orgueil infernal qui se complique de recherche sensuelle, une férocité d’amour-propre, de vanité, et une sécheresse de cœur jointes au raffinement des désirs, et c’est ainsi qu’ils en viennent vite à introduire la méchanceté, la cruauté même et une scélératesse criminelle, jusque dans le plus doux des penchants, dans la plus tendre des faiblesses. […] Sous le premier Empire, la joie était redevenue une pure joie, une joie naturelle, pétillante, sans arrière-pensée, la joie du Caveau et des enfants d’Épicure ; mais après 1830, aux environs de cette date nouvelle, l’imagination reprit son essor ; le plaisir ne se produisait lui-même que sous air de frénésie et dans un déguisement qui le rendait plus vif, plus divers, plus éperdu, donnant l’illusion de l’infini ; il fallait, même en le poursuivant, satisfaire ou tromper une autre partie de soi-même, une partie plus ambitieuse et plus tourmentée.

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