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754. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Introduction. Le problème des idées-forces comme fondamental en psychologie. »

La psychologie devient ainsi, comme la biologie, une étude d’organisation et d’évolution ; au lieu de rester à un point de vue purement statique, elle s’élève au point de vue dynamique. […] Un plaisir ne devient pas une douleur parce que tous les deux sont définis états de conscience. […] Le subjectif y existe partout, mais il y est toujours incorporé dans l’objectif et devient objet de science parce côté « représentable ». […] Une dernière raison corrobore les précédentes : si nous voyons des actes, d’abord accomplis sous l’influence de la sensation et de l’appétit, devenir mécaniques par l’habitude et se changer en réflexes, nous n’avons pas un seul exemple de réflexes devenus volontaires par une évolution progressive. C’est donc bien le réflexe qui est de la volonté rendue automatique et descendue dans la moelle : ce n’est pas la volonté qui est du mécanisme devenu intelligent par miracle.

755. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Des variétés nouvelles et plus parfaites supplanteront et extermineront inévitablement les variétés plus anciennes, moins parfaites et intermédiaires, et il en résultera que les espèces deviendront ainsi mieux déterminées et plus distinctes. […] Il est pareillement compatible avec la rétrogression organique de quelques formes qui n’en deviennent pas moins, à chaque variation rétrogressive, mieux adaptées à leurs habitudes de vie, devenues inférieures. Enfin, la loi de permanence des formes alliées sur le même continent, comme on le voit pour les Marsurpiaux en Australie, les Édentés en Amérique et autres exemples, devient compréhensible ; car dans une contrée isolée les espèces récentes doivent naturellement être alliées aux espèces éteintes par un lien généalogique. […] Nos classifications deviendront, autant qu’il se pourra, des généalogies, et retraceront alors véritablement ce qu’on peut appeler le plan de la création. Les règles de classement systématique deviendront sans nul doute plus simples, quand nous aurons un objet bien déterminé en vue.

756. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Comme c’est aujourd’hui le seul peuple qui dispute l’empire aux Français, les moindres détails sur lui deviennent intéressants. […] Quand on le verra devenir pair et passer à la chambre haute, sa carrière politique sera finie. […] Que sont devenus ces personnages qui firent tant de bruit ? […] « Bois sauvages, qu’est devenue votre verdure ? […] Sa pensée elle-même a besoin d’une douce union pour devenir féconde.

757. (1904) Zangwill pp. 7-90

Par de tels retours suivies historiens antérieurs, notre ami Pierre Deloire croyait bien signifier que les historiens d’aujourd’hui, dont il est, sont devenus modestes ; et peut-être a-t-il raison ; peut-être les historiens, personnellement et comme historiens, sont-ils devenus modestes ; mais je me demande justement si tout l’ancien orgueil ne s’est pas réfugié dans la méthode, agrandi, porté à la limite, à l’infini ; je demande s’il n’est pas vrai que les méthodes scientifiques modernes, transportées en vrac dans l’histoire et devenues les méthodes historiques, exigent de l’historien des facultés qui dépassent les facultés de l’homme. […] Les montagnes étaient devenues collines, les bois n’étaient plus guère que des bosquets, les ondulations du terrain recevaient, sans discontinuer, les cultures. […] C’est ainsi que l’esprit reproduit la nature ; les objets et la poésie du dehors deviennent les images et la poésie du dedans. […] Nous autres, nous disons : “Donc cela sera” ; et ce raisonnement a sa légitimité, puisque nous avons vu que les rêves de la conscience morale peuvent fort bien devenir un jour des réalités. […] Le langage devient impossible, si l’on pousse à l’excès le purisme à cet égard.

758. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Ce fut lui que Bonaparte, avant de quitter Milan pour Rastadt (16 novembre 1797), chargea, avec le général Andréossy, de porter le drapeau de l’armée au Directoire, et il confirma cette mission d’honneur par un magnifique éloge qui est devenu la récompense historique suprême : Je vous envoie le drapeau dont la Convention fit présent à l’armée d’Italie, par un des généraux qui ont le plus contribué aux différents succès des différentes campagnes, et par un des officiers d’artillerie les plus instruits de deux corps savants qui jouissent d’une réputation distinguée dans l’Europe. […] Entré au Directoire où il avait tout d’abord assisté à l’expulsion des collègues qui le gênaient, il était devenu maître du terrain et comme l’arbitre des combinaisons qui s’essayaient journellement. […] M. de Sémonville, que nous avons connu de tout temps si actif, si empressé à se mêler du jeu des événements publics et de leurs chances, avait enlacé Joubert par le plus sûr des liens ; une jeune personne charmante, sa belle-fille32, avait fait impression sur le cœur du général, et allait devenir sa femme. […] Si l’on essaye pourtant (car la pensée va d’elle-même) de se figurer ce qu’eût été Joubert devenu maréchal d’Empire, il me semble que l’illustre maréchal Suchet nous en donne assez bien l’idée : un militaire brave, instruit, progressif, un parfait lieutenant, capable de conduire à lui seul des opérations circonscrites, administrateur habile et intègre, combinant des qualités militaires et civiles, se faisant aimer même dans les pays conquis. […] Devenue veuve, elle épousa le maréchal Macdonald.

759. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Les Contes de Perrault »

Chaque enfant est-il devenu un Dauphin de France ? […] Par lui, Racine certainement, Molière lui-même, je n’ose ajouter La Fontaine, ont été et sont devenus plus correct ? […] Là aussi, « dans cet ordre littéraire comme dans l’ordre religieux, a dit un pieux et savant Anglais44, un peu de foi et beaucoup d’humilité au point de départ sont souvent récompensés de la grâce et du don qui fait aimer, c’est-à-dire comprendre les belles choses. » Je n’irai pourtant pas jusqu’à dire, avec un autre critique de la même nation, « qu’il faut feindre le goût que l’on n’a pas jusqu’à ce que ce goût vienne, et que la fiction prolongée finit par devenir une réalité. » Ce serait donner de gaîté de cœur dans la superstition et l’idolâtrie. […] Qu’on ne vienne plus tant parler de grandes œuvres, de productions solennelles : le bon Perrault, pour avoir pris la plume et avoir écrit couramment sous la dictée de tous, et comme s’il eût été son jeune fils, est devenu ce que Boileau aspirait le plus à être, — immortel ! […] Renan disait, l’autre jour, de ce brave et digne baron d’Eckstein, lequel semblait se ressouvenir confusément des origines scythiques et alpestres de notre race, qu’on le puisse dire, et plus agréablement, de l’enfance ; que plus tard l’homme, le jeune homme ait toujours en lui, par un coin de son passé, une réminiscence de l’âge d’or et des premiers printemps de l’imagination humaine, dût-il ensuite devenir positif, polytechnique, encyclopédique, dût-il être élevé comme le voulait Arago, ou plutôt et mieux comme le voulait Rabelais.

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