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1931. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff (suite) » pp. 317-378

Le vieux professeur allemand, admirablement étudié et destiné à jouer un rôle ingrat et touchant dans le roman, est ainsi décrit : Christophe-Théodore-Gottlieb Lemm était né en 1786 d’une famille de pauvres musiciens qui habitait la ville de Chemnitz, dans le royaume de Saxe. […] Lavretzky conduisit son hôte jusqu’à la chambre qui lui était destinée, revint dans son cabinet et s’assit devant la fenêtre.

1932. (1886) Le naturalisme

Il entra comme pion dans un collège, se destina ensuite au journalisme, et dans sa chambre d’étudiant, commença à travailler modestement et courageusement pour gagner de la réputation. […] Zola croit que Daudet est providentiellement destiné à réconcilier le public avec l’école naturaliste, grâce aux qualités par lesquelles il s’attire les sympathies du lecteur et aux dons qui lui ouvrent des portes fermées à Zola : celle du foyer domestique, celle de l’élégante bibliothèque de bois de rose qui orne le boudoir des dames. […] La Fortune des Rougon avec son amoureux duo d’adolescents ; la Curée avec sa superbe serre d’hiver, ses intérieurs somptueux poétisés par l’art et par le luxe ; Une page d’amour avec ses cinq descriptions de la même ville, vue tantôt aux rougeoiements du crépuscule, tantôt à la lueur de l’aube, descriptions qui sont un pur caprice de compositeur, une série de gammes ascendantes destinées à montrer l’agilité des doigts et la puissance du clavier ; enfin, même Nana et l’Assommoir dans certaines pages, prouvent l’inclination de Zola à faire beau artificieusement en dominant le vulgaire, le laid et l’horrible du sujet.

1933. (1940) Quatre études pp. -154

Lamartine ne peut se résoudre à croire que les négations que Byron a prodiguées dans Childe Harold soient définitives ; et puisqu’aussi bien le poème anglais est demeuré inachevé, il le reprend ; il en fait une harangue morale, destinée à laisser quelque espoir, à permettre de croire que Byron n’est pas mort en athée. […] « Je me souviens qu’à mon entrée dans le monde il n’y avait qu’une voix sur l’irrémédiable décadence, sur la mort accomplie et déjà froide de cette mystérieuse faculté de l’esprit humain », dit Lamartine, dans les belles pages qu’il consacre aux Destinées de la poésie. […] Si au contraire le soleil vient à manquer avant qu’elle soit totalement embrasée, elle peut continuer à perdre ses eaux… Mais quelle que soit sa destinée et celle de ses habitants, il y a lieu de croire que dans la multitude innombrable des globes que renferme ce vaste univers, les uns enflammés et les autres opaques, dont nous n’apercevons que la moindre partie, il y en a toujours qui seront dans une augmentation d’eaux et de matières, tandis que la diminution continuera dans les autres.

1934. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre II. L’Âge classique (1498-1801) — Chapitre III. La Déformation de l’Idéal classique (1720-1801) » pp. 278-387

Ne rompons pas, n’essayons pas de briser ou de relâcher les liens qui nous rattachent à elle. « Plongeons-nous dans son sein », comme dira bientôt le poète, et rendons-lui la conduite d’une destinée dont le malheur n’a été fait jusqu’ici que de notre rage de la vouloir soumettre au raisonnement ou à la raison. […] 2º Le Moraliste. — Une destinée mélancolique ; — et un type de transition. — Le caractère propre et original de Vauvenargues est d’avoir uni en lui quelques traits du pessimisme de Pascal à l’optimisme de J. […] VII. — Claude-Adrien Helvétius [Paris, 1715 ; † 1771, Paris] Fils et petit-fils de médecin ; — fermier général et protecteur des lettres ; — maître d’hôtel ordinaire de la reine Marie Leczinska ; — enragé de célébrité, il débute par se faire la réputation d’un petit-maître accompli. — Il s’essaie ensuite dans la poésie ; — et soumet ses essais à Voltaire ; — qui les encourage en lui rappelant qu’Atticus était fermier général ; — mais qui les trouve d’ailleurs plutôt médiocres. — Helvétius se tourne alors du côté des mathématiques ; — et finalement du côté de la philosophie. — Il se démet de sa charge de fermier général, et compose laborieusement son livre De l’esprit, 1758. — Médiocrité générale du livre, — où les pires paradoxes s’autorisent de preuves ; — qui ne sont la plupart que des « anecdotes » scandaleuses ; — ce qui n’empêche qu’aucun livre, en son temps, n’ait fait plus de bruit ; — ni répandu plus d’idées destinées à faire fortune. — C’est Helvétius qui a proclamé le premier « que la morale devait être traitée comme une physique expérimentale » [Cf. 

1935. (1896) Études et portraits littéraires

En plein rêve d’adolescence, d’une adolescence dont il peint trop vivement peut-être les troubles de sens et d’imagination, il lui fallut se lever homme, la destinée abrégeant pour lui « ce stage de l’inutilité ». […] Mais, ce mystère avoué, reste une question qui nous sollicite bien davantage ; car elle intéresse moins notre ambition spéculative que notre pratique journalière, l’estime que nous faisons de nous-même et des autres, enfin notre destinée. […] Ollé-Laprune condamne les nouveaux Narcisses, occupés à se mirer « dans l’eau transparente des choses », aussi vains que l’autre et, comme lui, destinés à en mourir. […] Leur destinée ne l’agite ni ne l’inquiète ; tout au moins n’en laisse-t-il rien paraître, Regardez-le pendant les discours de ses contradicteurs, moment propice pour observer un homme.

1936. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

III Ce serait peut-être exagérer que de vouloir montrer encore des adversaires du romantisme dans l’auteur des Destinées, 1843-1863, ou dans celui d’Émaux et Camées, 1852. […] 3º Les Œuvres. — Les Œuvres d’Alfred de Vigny comprennent : 1º Ses Poésies, dont il a lui-même sacrifié quelques-unes des premières ; et qui se composent en tout de deux recueils : les Poésies, divisées en trois livres, le Livre mystique, le Livre antique, le Livre moderne, 1822-1826 ; — et Les Destinées, 1863 [Les Destinées n’ont été réunies sous ce titre qu’en 1863, mais la plupart des poèmes qui en font partie sont de 1843, 1844, 1845, 1854, et ont paru sous ces dates dans la Revue des Deux Mondes]. […] Schuré, Le Drame musical, Paris, 1875]. — Et, en dépit de la résistance d’un certain patriotisme, — aucune influence n’est destinée depuis lors à exercer plus d’action, — comme n’étant pas uniquement « musicale » ; — mais philosophique ; — et surtout comme étant jusqu’ici, — dans la composition totale de l’esprit européen — l’un des principaux éléments de résistance qu’il y ait — à l’envahissement du naturalisme — et d’un naturalisme encore plus superficiel que grossier.

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