Les lettres précédentes à la maréchale sont toutes remplies de détails domestiques, de calculs et de chiffres, tendant à faire augmenter sa pension, qu’elle juge insuffisante « pour la première princesse de Rome, née sujette d’un grand roi comme le nôtre. » Elle est gueuse, dit-elle, mais elle est fière ; ce qui ne l’empêche pas de demander bien souvent. Il est vrai qu’elle demande avec un grand air, avec un tour et des révérences qui ne sont qu’à elle : on n’a jamais crié misère plus noblement. […] C’est, madame, que M. de Torcy, de son chef, et sans y intéresser le nom du roi en rien, voulût, par manière de conversation, demander à l’ambassadeur de Savoie, qui est à Paris, quelle est la personne que son maître destine ù cet emploi, et qu’il voulût bien me nommer comme m’y trouvant assez propre. […] Vous verrez, madame que je ne me suis point trop flattée quand j’ai avancé qu’ils seraient très contents, en ce pays-là, que le roi me fît l’honneur de me confier l’emploi que je prends la liberté de lui demander. […] Celles que j’ai prises devraient réussir ; je ne sais cependant quel effet elles produiront, étant bien difficile de demander des résolutions d’un prince tel qu’est celui-là.
Quand Mme Elliott éprouvait toutes ses émotions, ses indignations, ses loyales colères, elle n’en allait pas demander l’expression à sa langue maternelle ; elle répondait à l’injure dans la même langue, elle avait son cri en français. […] Ne lui demandez pas d’être raisonnable, elle est passionnée. […] On ne peut demander à Mme Elliott des jugements bien mûrs sur les personnes, il ne faut chercher avec elle que des impressions ; et, comme les siennes sont fort sincères, elles ont du prix. […] Un jour (c’était dans l’après-midi même du 3 ou 4 septembre), revenant à sa maison de Monceaux et passant devant la maison de Mme Elliott dont il vit les portes ouvertes, il demanda si elle était en ville, et s’arrêta pour lui faire visite. […] J’y arrivai à sept heures et demie, et je trouvai M. de Biron et toute la compagnie fort tristes : on lui envoyait toutes les demi-heures une liste des votes, et nous voyions tous avec désespoir que beaucoup de ces votes demandaient la mort du roi.
C’est ainsi que, pris à partie le 31 juillet 1830, c’est-à-dire au lendemain des trois journées, par un jeune homme qui lui demande résolûment ce qui est à faire, il répond par ce sincère aveu : « Je ne suis pas orléaniste, et vos amis paraissent disposés à me donner ce nom. […] Dînant chez le peintre Guérin (1812) avec Arnault, Roger et Auger, tous deux rédacteurs alors du Journal de l’Empire, on lui fit chanter de ses chansons, et il obtint un petit triomphe : « Je n’en ai chanté que des gaillardes ; toutes ont obtenu des applaudissements extraordinaires ; Auger, surtout, me les a demandées avec instances ; et, si grands que soient les éloges que tous m’ont donnés, il m’a semblé qu’ils y mettaient de la bonne foi. […] Un jour, en 1815, au milieu de l’effervescence des passions politiques, entrant chez des amis, comme on lui demandait ce qu’il avait vu en venant, il lui arriva de répondre : « Ça va mal, ils chantent la Marseillaise ! […] Laffitte ; il demande s’il ne doit pas apporter ses 50 francs, comme s’il avait déjà les embarras de la richesse. […] Nous serions, en vérité, la plus légère et la plus ingrate des nations, si Béranger était un sujet qu’il ne fallût désormais aborder qu’en hésitant, et pour lequel on eût à demander grâce.
Un critique pur est entièrement à la merci de son examen, du moment qu’il y a apporté toutes les conditions d’exactitude et toutes les précautions nécessaires ; il trouve ce qu’il trouve, et il le dit tout net : le chimiste nous montre le résultat de son expérience, il n’y peut rien changer : Letronne, dans sesleçons, appliquait son esprit d’analyse à une question archéologique, biblique quand il avait bien prouvé l’impossibilité de telle ou telle solution qu’il combattait, quand il avait mis l’opinion de son adversaire en pièces et en morceaux, — en tout petits morceaux comme avec un canif, — il n’en demandait pas davantage, il se frottait les mains d’aise et il s’en allait content. […] Je me suis demandé quelquefois combien il fallait de défauts joints à un talent pour former un grand orateur : il semble que M. Renan se soit fait une question analogue, et qu’il se soit demandé de combien de qualités et de dons supérieurs il fallait être dépourvu pour faire un grand prédicateur unitairien. […] Émile de Girardin, à qui l’on demandait, au retour d’un voyage d’Italie, comment il avait trouvé Rome, répondait : « Je n’aime pas Rome, ça sent le mort. […] Je ne lui donne ni tort ni raison ; je poursuis chez lui une intime et délicate nuance, je la saisis dans sa ligne originelle et dans son pli, et je me demande si elle gagne ou si elle diminue avec les années.
Après avoir commencé par demander un Lexique de Molière, l’Académie a mis au concours, en 1858, un Lexique de Corneille, indiquant assez par là même que le Commentaire de Voltaire sur le grand tragique était remis en question, et entièrement à refaire. […] Dans Cinna, acte I, scène iii, Cinna, racontant à Émilie comment il s’y est pris pour échauffer les conjurés et les animer contre le tyran, lui redit une partie de son discours et des sanglants griefs qu’il a étalés devant eux : d’abord le tableau des guerres civiles et de ces batailles impies, les horreurs du triumvirat et les listes de proscription, les plus grands personnages de Rome immolés ; puis il a ajouté : « ……… Toutes ces cruautés, La perte de nos biens et de nos libertés, Le ravage des champs, le pillage des villes, Et les proscriptions, et les guerres civiles Sont les degrés sanglants dont Auguste a fait choix Pour monter dans le trône et nous donner des lois. » Je vous le demande, suffira-t-il de rétablir « dans le trône », au lieu de « sur le trône », sans dire le pourquoi ? […] Pensez-y, belle Marquise : Quoiqu’un grison fasse effroi, Il vaut bien qu’on le courtise Quand il est fait comme moi. » Il semble, après la lecture de ces vers si naturels, si francs, si bien dans le ton et dans le tour des sentiments de Corneille, qu’il n’y ait plus qu’une question à se faire : c’est de se demander quelle est cette marquise. […] » aurait demandé malignement la marquise dans le jeu qui se jouait, et chacun de répondre : « Le lierre. » Tous les regards se seraient portés alors sur Mme de Motteville qui avait du lierre dans ses cheveux. […] Vanter les Athéniens parmi les Athéniens, ce n’est peut-être pas ce qu’il y a de plus difficile, disait Socrate ; mais louer les Athéniens devant les gens du Péloponèse, et réciproquement, cela demande un plus grand art et un plus grand effort.
M. de Girardin se prononça bientôt contre les demandes de toute sorte qui se succédaient en procession à l’Hôtel de Ville, contre l’augmentation des salaires, contre l’idée de guerre ; il s’éleva très-courageusement surtout contre le parti des démocrates purs, des républicains de la veille, de ceux qui auraient voulu faire de la République si fortuitement conquise une secte à leur dévotion, un régime à leur profit, doctrinaires d’un nouveau genre et qui prêchaient à leur tour l’exclusion, l’épuration. […] demandait-il et demandait-on de toutes parts dans le public : « On l’a arrêté, répondit-on de guerre lasse et pour unique raison, parce que si l’on se fût borné à suspendre ou à supprimer son journal, il eût exécuté ce qu’il avait annoncé ; il eût protesté, ne fût-ce que sur le plus petit carré de papier. […] Ce système, qui ne comporterait guère une application partielle et qui demanderait à être expérimenté tout d’un coup et d’ensemble, n’est pas le système parlementaire ou libéral au sens ordinaire : M. de Girardin va beaucoup plus loin et plus à fond. […] Il y a des mots qui sont vivants comme des hommes, redoutables comme des conquérants, absolus comme des despotes, impitoyables comme le bourreau ; enfin il y a des mots qui pullulent, qui, une fois prononcés, sont aussitôt dans toutes les bouches… « Il est d’autres mots qui, pris dans une mauvaise acception, énervent, glacent, paralysent les plus forts, les plus ardents, les plus utiles, les plus éminents, tous ceux enfin sur qui ils tombent, mots plus funestes au pays qui ne les repousse pas que la perte d’une bataille ou d’une province… 70» Je ne demande rien de plus, et, cela dit et réservé, je conçois, j’admets volontiers que dans un pays aguerri au feu des discussions, chez un peuple de bon sens solide, raisonneur, calculateur, entendant ses intérêts, d’oreille peu chatouilleuse, qui ne prend pas la mouche à tout propos, une grande part de ce qui n’est qu’imaginaire dans le danger d’une presse libre disparaisse et s’évanouisse ; que les inconvénients puissent même s’y contre-balancer de manière à laisser prévaloir grandement les avantages.