Aujourd’hui le débat peut être considéré comme à peu près clos ; et, sans parler de l’état des esprits qui ont assez à faire ailleurs, toutes les raisons, tous les arguments sont sortis tour à tour, tellement que la question semble épuisée. […] Vinet lui-même, considéré dans son œuvre et dans sa vie, qu’il offrait en quelque sorte l’image d’un Pascal réduit et modéré, d’un Pascal plus aisément circoncis dans ses essors et dans ses désirs, mais dont le centre moral était le même et dont le cœur était comme taillé sur le cœur de l’autre. […] Il n’aurait point sans doute, comme le fit plus tard l’illustre auteur du Génie du Christianisme, porté ses principales couleurs sur le côté magnifique ou touchant du catholicisme, considéré surtout dans ses rapports avec la société ; il n’aurait pas cependant négligé les grandeurs et les beautés aimables de la religion.
La bienfaisance remplit le cœur comme l’étude occupe l’esprit ; le plaisir de sa propre perfectibilité s’y trouve également, l’indépendance des autres, le constant usage de ses facultés ; mais ce qu’il y a de sensible dans tout ce qui tient à l’âme, fait de l’exercice de la bonté une jouissance qui peut seule suppléer au vide que les passions laissent après elles ; elles ne peuvent se rabattre sur des objets d’un ordre inférieur, et l’abime que ces volcans ont creusé, ne saurait être comblé que par des sentiments actifs et doux qui transportent hors de vous-même l’objet de vos pensées, et vous apprennent à considérer votre vie sous le rapport de ce qu’elle vaut aux autres et non à soi ; c’est la ressource, la consolation la plus analogue aux caractères passionnés, qui conservent toujours quelques traces des mouvements qu’ils ont domptés. […] Si vous rencontrez Almont, quand votre âme est découragée, sa vive attention à vos discours vous persuade que vous êtes dans une situation qui captive l’intérêt, tandis que, fatigué de votre peine, vous étiez convaincu, avant de le voir, de l’ennui qu’elle devait causer aux autres ; vous ne l’écouterez jamais sans que son attendrissement pour vos chagrins, ne vous rende l’émotion dont votre âme desséchée était devenue incapable ; enfin, vous ne causerez point avec lui, sans qu’il ne vous offre un motif de courage, et qu’ôtant à votre douleur ce qu’elle a de fixe, il n’occupe votre imagination par un différent point de vue, par une nouvelle manière de considérer votre destinée ; on peut agir sur soi par la raison, mais c’est d’un autre que vient l’espérance. […] Sans vouloir méconnaître le lien sacré de la religion, on peut affirmer que la base de la morale, considérée comme principe, c’est le bien ou le mal que l’on peut faire aux autres hommes par telle ou telle action.
Certaines opérations purement intellectuelles, telles que la mémoire, dépendent des actions matérielles ; fait qui a été admis, quoique à regret, par les partisans d’un principe immatériel. » On en est donc venu à considérer l’union de l’esprit et du corps comme de plus en plus intime et à dire « que l’esprit et le corps agissent l’un sur l’autre ». […] Bain lui adresse plusieurs reproches : 1° Cette doctrine suppose que nous avons le droit de considérer l’esprit comme isolé du corps et d’affirmer que, comme tel, il a encore des facultés et propriétés. […] Il n’y a donc rien que de naturel à considérer les forces mentales comme convertibles en forces nerveuses et celles-ci en forces physiques.
De la physiologie poétique Les poètes théologiens, dans leur physique grossière, considérèrent dans l’homme deux idées métaphysiques, être, subsister. […] Ils considérèrent animus comme mâle, anima comme femelle, parce que animus agit sur anima ; le premier est l’ igneus vigor dont parle Virgile ; de sorte qu’animus aurait son sujet dans les nerfs, anima dans le sang et dans les veines. […] Corollaire relatif aux descriptions héroïques Les premiers hommes ayant peu ou point de raison, et étant au contraire tout imagination, rapportaient les fonctions externes de l’âme aux cinq sens du corps, mais considérés dans toute la finesse, dans toute la force et la vivacité qu’ils avaient alors.
Eh bien, quand je dis cela, quand je considère ce phénomène gigantesque qui n’a peut-être eu aucun témoin, puisque les satellites de cette étoile n’ont peut-être pas d’habitants, quand je dis que ce phénomène est antérieur à la formation de l’image visuelle de l’île d’Española dans la conscience de Christophe Colomb, qu’est-ce que je veux dire ? […] J’entends le tonnerre, et je conclus qu’il y a eu une décharge électrique ; je n’hésite pas à considérer le phénomène physique comme antérieur à l’image sonore subie par ma conscience, parce que je crois qu’il en est la cause. […] Pour ne pas nous perdre dans cette infinie complexité, faisons une hypothèse plus simple ; considérons trois astres, par exemple, le Soleil, Jupiter et Saturne ; mais, pour plus de simplicité, regardons-les comme réduits à des points matériels et isolés du reste du monde. […] Dès lors pourquoi ne pas regarder l’un de ces ensembles comme la cause de l’autre, ce qui conduirait à considérer comme simultanés l’instant t de Jupiter et l’instant t + a de Saturne ?
Nous sommes tellement accoutumés à ne décerner cette épithète qu’à un petit nombre d’objets, autorisés et catalogués, que nous détournons la tête avec dédain, si l’on veut nous insinuer que telle création considérée par tous comme vulgaire n’est peut-être pas inférieure en beauté, à tel chef-d’œuvre devant lequel nous passons, comme en prière, des heures d’extase. […] Découvrir de la beauté en dehors de la région où elle doit exclusivement éclore, loin d’être considéré comme l’indice d’une conception esthétique plus large et plus profonde que celle dont se nourrit la corporation des esthètes, ne dénote à leurs yeux que grossièreté, vulgarité de goût. […] Une autre conséquence en surgit, celle-ci, qu’une matière autrefois considérée comme inesthétique en architecture et par conséquent dissimulée, le fer par exemple, demeure apparente dans l’édifice de Horta et devient elle-même un élément de beauté. […] Une des principales raisons qui me font considérer Horta comme un artiste de premier ordre, c’est qu’il conçoit lui-même en même temps que l’édifice, tout ce qui en dépend : décoration, ameublement, vitraux, étoiles, objets d’art, etc.