Il n’a pas voulu paraître lui-même, craignant d’être un peu gêné devant vous deux, et voulant éviter les scènes… Il m’envoie vous dire que Ion est bien son fils et celui de Créuse… Apollon a tout conduit avec beaucoup de sagesse : il t’a fait accoucher sans douleur, Créuse, pour que ta famille ne devinât rien. […] », car ils savent que c’est Dumas qui les conduit. […] On est tranquille ; on sait où l’on va, avec la petite surprise de découvrir, à mesure, comment on y sera conduit. […] Là, vous trouverez une voiture que je vais y envoyer, et vous vous ferez conduire où vous avez affaire. » (Texte primitif, acte III, scène 8.) […] Un omnibus des pompes funèbres attend les joyeux touristes pour les conduire à la gare.
» Mme de Lambert disait de son côté : « Puisque ce sentiment est si nécessaire au bonheur des humains, il ne faut pas le bannir de la société, il faut seulement apprendre à le conduire et le perfectionner. […] Pour porter un genre à sa perfection, ou pour le mettre seulement en pleine possession des moyens qui doivent plus tard l’y conduire, ce n’est pas trop d’une suite ininterrompue d’efforts et d’une longue succession d’écrivains. […] Lorsque parut la troisième partie de Marianne, quelqu’un fit observer que c’était beaucoup peut-être qu’un volume tout entier pour conduire l’héroïne depuis midi jusqu’à six heures du soir. […] Ces dispositions expliquent suffisamment le vif intérêt qu’il dut prendre à l’Histoire des voyages, et comment, en moins de vingt ans, il conduisit cet énorme recueil au quatorzième volume. […] Le fait est que Rousseau a connu la misère, puisqu’il note lui-même dans ses Confessions le jour où il a cessé de sentir la faim, et puisque, d’ailleurs, on a pu prétendre que la détresse de ses dernières années le conduisit au suicide.
J’estime qu’il faut bénir cette oisiveté rêvasseuse et ce malaise qui le conduisirent jusqu’à la trentaine. […] Tous deux se conduisirent avec générosité ; car Maria-Anna Birsch, qui était protestante, abjura en secret pour pouvoir être à son grand homme ; et lui, c’est après la publication des Méditations et quand déjà la gloire lui était venue, soudaine et enivrante, qu’il épousa cette fille médiocrement belle et médiocrement riche. […] Il me conduisit au milieu des vignes, qui sont parsemées de cerisiers. […] Dans l’Hymne de la nuit je lis cette strophe : Ces chœurs étincelants que ton doigt seul conduit, Ces océans d’azur où leur foule s’élance, Ces fanaux allumés de distance en distance, Cet astre qui paraît, cet astre qui s’enfuit, Je les comprends, Seigneur ! […] De l’asile où leurs jours de joie étaient cachés, Des bourreaux, le matin, les avaient arrachés : Conduits séparément dans l’enceinte céleste, Ils tremblaient l’un pour l’autre : ils ignoraient le reste.
Je vais tâcher de prouver à mon tour que, si la méthode expérimentale conduit à la connaissance de la vie physique, elle doit conduire aussi à la connaissance de la vie passionnelle et intellectuelle. […] Quand un rhétoricien a du génie, il est le maître incontesté des foules, il les prend par leur chair et les conduit où il veut. […] Conduisez donc notre jeunesse en classe chez les savants, et non chez les poètes, si vous voulez avoir une jeunesse virile. […] Nous ne sommes plus au temps où un sonnet, lu dans un salon, faisait la réputation d’un écrivain et le conduisait à l’Académie. […] Cela est terrible, car une question se pose tout de suite : comment la postérité se conduira-t-elle devant une œuvre si considérable que la Comédie humaine ?
Addison, en amateur délicat des curiosités morales, suit complaisamment les bizarreries aimables de son cher sir Roger de Coverley, sourit, et d’une main discrète conduit l’excellent chevalier dans tous les faux pas qui peuvent mettre en lumière ses préjugés campagnards et sa générosité native, pendant qu’à côté de lui le malheureux Swift, dégradant l’homme jusqu’aux instincts de la bête de proie et de la bête de somme, supplicie la nature humaine en la forçant à se reconnaître dans l’exécrable portrait du Yahou. […] » Nul outrage ne vient à bout de sa soumission ; il lui a si fort serré le bras que ce bras est « tout noir et tout bleu » ; il a essayé pis : il s’est conduit comme un charretier et comme un coquin ; par surcroît, il la calomnie longuement devant les domestiques ; il l’insulte, et redouble, il la provoque à parler ; elle ne parle pas, elle ne veut pas manquer à son maître. « Monsieur, répond-elle doucement, vous avez le droit de dire ce qui vous plaît ; moi, mon devoir est de dire seulement : Dieu bénisse votre honneur1040 ! […] conduirai-je Votre Seigneurie en bas de l’escalier ? […] Il pourra être balourd comme le capitaine Booth, joueur même, dépensier, incapable de conduire ses affaires, capable par tentation d’être un jour infidèle à sa femme ; mais il sera si sincère dans son repentir, son erreur sera si involontaire, il sera si soigneusement, si véritablement tendre, qu’elle l’aimera avec excès1084, et qu’en bonne foi il le mérite.
Tout cela serait fort bon si nous étions des dieux, ou, pour parler exactement, tout cela serait fort bien si nous étions Dieu ; car si nous voulons évaluer les qualités, les capacités, les amplitudes que de telles méthodes nous demandent pour nous conduire à l’acquisition de quelque connaissance, nous reconnaissons immédiatement que les qualités, capacités, amplitudes attribuées aux anciens dieux par les peuples mythologues seraient absolument insuffisantes aujourd’hui pour constituer le véritable historien, l’homme scientifique, — vir scientificus, — le savant moderne ; il ne suffît pas que le savant moderne soit un dieu ; il faut qu’il soit Dieu ; puisque l’on veut commencer par la série indéfinie, infinie du détail ; puisque l’on veut partir d’un point indéfiniment, infiniment éloigné, étranger, puisqu’avant d’arriver au texte même on veut parcourir un chemin indéfini, infini, pour épuiser tout cet indéfini, tout cet infini, l’infinité de Dieu même est requise, d’un Dieu personnel ou impersonnel, d’un Dieu panthéistique, théistique ou déistique, mais absolument d’un Dieu infini ; et nous touchons ici à l’une des contrariétés intérieures les plus graves du monde moderne, à l’une des contrariétés intérieures les plus poignantes de l’esprit moderne. Pendant que les démagogues scientistes modernes se congratulent, se décorent, boivent et triomphent dans des banquets, le monde moderne est intérieurement rongé, l’esprit moderne est intérieurement travaillé des contrariétés les plus profondes ; et l’humanité aurait aussi tort de se river à ce que nous nommons aujourd’hui le monde moderne et l’esprit et la science modernes qu’elle a eu raison de ne pas se river aux formes de vie antérieures, aujourd’hui prétendûment dépassées ; dans l’ordre de la connaissance, de l’histoire, de la biographie et du texte, nous sommes en particulier conduits à la singulière contrariété suivante. […] Car vraiment si l’historien est si parfaitement, si complètement, si totalement renseigné sur les conditions mêmes qui forment et qui fabriquent le génie, et premièrement si nous accordons que ce soient des conditions extérieures saisissables, connaissables, connues, qui forment tout le génie, et non seulement le génie, mais à plus forte raison le talent, et les peuples, et les cultures, et les humanités, si vraiment on ne peut rien leur cacher, à ces historiens, qui ne voit qu’ils ont découvert, obtenu, qu’ils tiennent le secret du génie même, et de tout le reste, que dès lors ils peuvent en régler la production, la fabrication, qu’en définitive donc ils peuvent produire, fabriquer, ou tout au moins que sous leur gouvernement on peut produire, fabriquer le génie même, et tout le reste ; car dans l’ordre des sciences concrètes qui ne sont pas les sciences de l’histoire, dans les sciences physiques, chimiques, naturelles, connaître exactement, entièrement les conditions antérieures et extérieures, ambiantes, qui déterminent les phénomènes, c’est littéralement avoir en mains la production même des phénomènes ; pareillement en histoire, si nous connaissons exactement, entièrement les conditions physiques, chimiques, naturelles, sociales qui déterminent les peuples, les cultures, les talents, les génies, toutes les créations humaines, et les humanités mêmes, et si vraiment d’abord ces conditions extérieures, antérieures et ambiantes, déterminent rigoureusement les conditions humaines, et les créations humaines, si de telles causes déterminent rigoureusement de tels effets par une liaison causale rigoureusement déterminante, nous tenons vraiment le secret du génie même, du talent, des peuples et des cultures, le secret de toute humanité ; on me pardonnera de parler enfin un langage théologique ; la fréquentation de Renan, sinon de Taine, m’y conduit ; Renan, plus averti, plus philosophe, plus artiste, plus homme du monde, — et par conséquent plus respectueux de la divinité, — plus hellénique et ainsi plus averti que les dieux sont jaloux de leurs attributions, Renan plus renseigné n’avait guère usurpé que sur les attributions du Dieu tout connaissant ; Taine, plus rentré, plus têtu, plus docte, plus enfoncé, plus enfant aussi, étant plus professeur, surtout plus entier, usurpe aujourd’hui sur la création même ; il entreprend sur Dieu créateur. […] Nous sommes ainsi conduits au seuil du plus grand débat de toute la pensée moderne ; au cœur de la plus grande contrariété moderne ; et c’est sur ce seuil que nous nous arrêterons, pour aujourd’hui, car il est évident que ce simple avant-propos ne peut devenir ni un traité, ni même un essai de la manière d’écrire l’histoire ; c’est déjà beaucoup, peut-être, que d’avoir commencé de contribuer à la position du débat ; et nous reconnaissons ici que ce débat n’est autre que le vieux débat de la science et de l’art ; mais c’est un cas nouveau, et particulièrement éminent, de ce vieux débat général ; d’un côté ceux que nous avons nommés les historiens modernes, c’est-à-dire, exactement, ceux qui ont voulu transporter, en bloc, les méthodes scientifiques modernes dans le domaine de l’histoire et de l’humanité ; nous avons aujourd’hui recherché leurs intentions, mesuré leur présomption, non pas seulement sur des exemples éminents, sur deux exemples capitaux, mais sur les deux exemples qui commandent tout le mouvement, étant à l’origine, au commencement, au moment de la franchise enfantine, et le dominant tout ; de l’autre côté, en face des historiens modernes, et non pas contre eux sans doute, car il s’agit d’un débat, et non pas d’un combat sans doute, en face des historiens modernes tous ceux de nous qui ne transportons point en bloc les méthodes scientifiques modernes au domaine de l’histoire et de l’humanité, qui ne transmutons point servilement les méthodes scientifiques modernes en méthodes historiques ; tous ceux de nous qui croyons qu’il y a, pour le domaine de l’histoire et de l’humanité, des méthodes historiques et humaines propres ; des méthodes humainement historiques ; nous nous arrêterons, pour aujourd’hui, au seuil de ce débat ; c’est assez écrit pour un cahier, pour l’avant-propos d’un cahier ; gardons-nous quelque travail pour les veillées de cet hiver ; en outre, je parviens au point de nos recherches où il me serait presque impossible de continuer sans commencer à parler de Chad Gadya !