Ainsi, dans les illusions d’une âme sensible, il composait ses romans du bonheur des autres, et jouissait d’avance d’une félicité qui n’était point encore. […] Les noms du duc de Bourgogne et de Fénelon marchent ensemble à l’immortalité, et le genre humain reconnaissant ne sépare plus deux âmes vertueuses et sensibles qui s’étaient unies pour le bonheur des hommes.
Ces grandes vues d’un ministère qui s’occupe de projets d’humanité et du bonheur des nations, et qui veut tirer le plus grand parti possible et de la terre et des hommes, lui étaient entièrement inconnues : il ne paraît pas même qu’il en eût le talent. […] On ne peut douter que les deux oraisons funèbres de Le Tellier, où Fléchier et Bossuet le représentent comme un grand homme et comme un sage, le jour et le lendemain qu’elles furent prononcées, n’aient été fort applaudies à la table et dans l’antichambre de Louvois, qui était son fils, et qui était tout-puissant ; mais si elles avaient été lues à ceux qui avaient suivi la vie entière de Le Tellier, qui l’avaient vu s’élever par degrés, et qui, si l’on en croit les mémoires du temps, n’avaient jamais vu en lui qu’un courtisan adroit, toujours occupé de ses intérêts, rarement de ceux de l’État, courant à la fortune par la souplesse, et l’augmentant par l’avarice, flatteur de son maître, et calomniateur de ses rivaux ; si elles avaient été lues à Fouquet dans sa prison, à ce même Fouquet dont Le Tellier fut un des plus ardents persécuteurs, qu’il traita avec la basse dureté d’un homme qui veut plaire, et qu’il chercha à faire condamner à mort, sans avoir cependant le bonheur cruel de réussir ; si elles avaient été lues en Allemagne, en Hollande, en Angleterre, à toutes ces familles de Français que la révocation d’un édit célèbre, révocation pressée, sollicitée et signée avec transport par Le Tellier, fit sortir du royaume, et obligea d’aller chercher un asile et une patrie dans des contrées étrangères ; qu’auraient pensé tous ces hommes, et des oraisons funèbres, et de l’éloquence, et des orateurs ?
Mais cette atmosphère, on doit la créer soi-même ; il est prudent de « faire bon visage aux à peu près », d’en jouir comme de bonheurs parfaits et même souvent de bâtir la maison de bonheur sans autres matériaux que des rêves. […] Réfugiée dans le rêve, elle sent tout ce que son bonheur a d’inquiet et de flottant. […] Les amoureux de Juliette Lamber ont le bonheur bavard et rabâcheur, vite ennuyeux pour qui les écoute. […] J’ai lu d’elle deux volumes : Pour le bonheur, Aimer ou vivre. […] Elle va à la ligne au petit bonheur, hache les développements les plus suivis, rapproche les choses les plus opposées.
Hollande imprime : J’ai connu que la vie est un rêve et fait peur, À moins d’y découvrir le Dieu qui la pénètre ; J’ai connu que ce Dieu c’est la Beauté, dont l’être Se dérobe aux cœurs froids indignes du bonheur.
Les uns meurent à la fleur de la jeunesse, au printemps des espérances ; on leur rêvait tout un avenir de bonheur ou de gloire, et ils disparaissent : leur image continue de nous sourire de loin, à demi voilée, du haut d’un nuage. […] Dieu me fasse réussir avec le même bonheur au concours d’agrégation ! […] Dans cet ordre de succès réguliers et paisibles, où il ne s’agit point de feux d’artifice à tirer à de certains jours, mais de fruits à produire durant des années, le bonheur calme et pur est un meilleur conseiller encore que l’amour-propre. […] Ces études font mon bonheur et mon tourment ; je m’y passionne et m’y consume. […] Il le rappelait assez ingénument lorsque, présentant le premier de ces deux volumes au concours de l’Académie et ayant cru devoir faire visite à quelques-uns de ses juges, il écrivait : « (31 décembre 1866.)… J’ai profité de l’intervalle de mes leçons pour aller frapper aux portes ; mais Bossuet m’a jusqu’à présent porté bonheur.
Il se passionne pour les vertus qui se trouvent en ses amis ; il s’échauffe en parlant de ce qu’il leur doit, mais il se sépare d’eux sans peine, et l’on serait tenté de croire que personne n’est absolument nécessaire à son bonheur. […] Il semblait, en effet, qu’une inquiétude secrète se fût logée au cœur de la tendre Aïssé, et qu’elle n’osât jouir de son bonheur. […] Ils changeraient bien leur prétendu bonheur contre vos infortunes. » Un trait bien honorable pour Mlle Aïssé, c’est l’antipathie violente et comme instinctive qu’elle inspirait à Mme de Tencin. […] Ses affaires le forçaient à des voyages en Périgord ; son service, comme officier des gardes, le retenait à Versailles près du roi ; il accourait dès qu’il avait une heure, et surprenait bien agréablement, jouissant du bonheur visible qu’il causait. […] Elle le sera si elle vous ressemble : c’est de notre humeur que dépend notre bonheur.