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312. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XVI. Mme de Saman »

Voilà pourquoi elle étale sans dignité, dans un livre passionné et plus que passionné, les souvenirs qu’elle devait garder au fond d’elle, puisqu’elle avait le bonheur ou le malheur de les avoir. […] Mme Sand, qui est la reine indiscutée du bas-bleuisme contemporain, a voulu faire le bonheur d’une de ses sujettes.

313. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIV. Panégyrique de Trajan, par Pline le jeune. »

Tous deux également célèbres, et tous deux jouissant de la gloire l’un de l’autre, ils goûtaient ensemble dans le commerce de l’amitié et des lettres, ce bonheur si pur que ne donnent ni les dignités, ni la gloire, et qu’on trouve encore moins dans ce commerce d’amour-propre et de caresses, d’affection apparente et d’indifférence réelle, qu’on a nommé si faussement du nom de société, commerce trompeur qui peut satisfaire les âmes vaines, qui amuse les âmes indifférentes et légères, mais repousse les âmes sensibles, et qui sépare et isole les hommes, bien plus encore qu’il ne paraît les unir. […] Ceux qui ont reçu de la nature une âme forte, ceux qui ont le bonheur ou le malheur de sentir tout avec énergie, ceux qui admirent avec transport et qui s’indignent de même, ceux qui voient tous les objets de très haut, qui les mesurent avec rapidité et s’élancent ensuite ailleurs, qui s’occupent beaucoup plus de l’ensemble des choses que de leurs détails, ceux dont les idées naissent en foule, tombent et se précipitent les unes sur les autres, et qui veulent un genre d’éloquence fait pour leur manière de sentir et de voir, ceux-là sans doute ne seront pas contents de l’ouvrage de Pline ; ils y trouveront peut-être peu d’élévation, peu de chaleur, peu de rapidité, presqu’aucun de ces traits qui vont chercher l’âme et y laissent une impression forte et profonde ; mais aussi il y a des hommes dont l’imagination est douce et l’âme tranquille, qui sont plus sensibles à la grâce qu’à la force, qui veulent des mouvements légers et point de secousses, que l’esprit amuse, et qu’un sentiment trop vif fatigue ; ceux-là ne manqueront pas de porter un jugement différent.

314. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Voilà leur bonheur ! […] Son bonheur a-t-il duré un jour ou des milliards de siècles ? […] Un bonheur sans mélange ne saurait être mesuré. […] Elle lui enseigna à préférer le bonheur au plaisir. […] Chateaubriand ne lui laissa même pas l’illusion du bonheur.

315. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Son élève, qui, on aime à le croire, eût fait le bonheur de la France, fut durant sa vie mal accueilli de son aïeul. […] Il eut le bonheur de choisir pour son héros le plus romanesque et le plus aventureux des souverains. […] L’Europe presque entière accueillit avec une sorte d’enthousiasme les systèmes de bonheur public des Économistes. […] Au contraire : du jour où il était monté sur le trône, il n’avait pas eu une autre pensée que le bonheur de la France. […] S’ils avaient eu le bonheur d’arracher Louis XVI au supplice, ce n’est pas une seule vie qu’ils auraient préservée.

316. (1888) Études sur le XIXe siècle

Mais la simple présence de l’amour procure à l’homme plus de bonheur que les heureux n’en connurent aux meilleurs temps du monde. […] — Oui, j’ai le bonheur de posséder une de ses toiles dans ma petite collection de choix.” […] Holman Hunt paraît avoir poursuivi le même but, mais avec un bonheur moins complet. […] C’est un grand bonheur qu’il n’ait pas exécuté son projet d’attaquer le pape. […] Il l’a fait quelquefois, avec une extrême application, mais pas toujours avec bonheur.

317. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

C’est un grand charme que d’obliger et de secourir des amis, des hôtes, des compagnons ; et ce n’est que la propriété individuelle qui nous assure ce bonheur-là. […] « Il a beau interdire tous plaisirs à ses guerriers, il n’en prétend pas moins que le devoir du législateur est de rendre heureux l’État tout entier ; mais l’État tout entier ne saurait être heureux, quand la plupart ou quelques-uns de ses membres, sinon tous, sont privés de bonheur. C’est que le bonheur ne ressemble pas aux nombres pairs, dans lesquels la somme peut avoir telle propriété que n’a aucune des parties. En fait de bonheur, il en est tout autrement ; et si les défenseurs mêmes de la cité ne sont pas heureux, qui donc pourra prétendre à l’être ? […] C’est donc un grand bonheur que les citoyens aient une fortune modeste, mais suffisant à tous leurs besoins.

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