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488. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

faisons la paix, il est temps. » En levant les yeux sur moi, elle s’aperçut que je repoussais mes larmes et que j’étais violemment ému : elle y parut sensible, mais n’ajouta que ces deux mots : « Du courage !  […] Il y aurait bien des idées, bien des aperçus à développer en ce sens ; je dois me borner ; mais je maintiens, en finissant, que Mme Roland, par cet ensemble de raison et de chaleur, d’enthousiasme et de justesse, qui la distingue, par cette impulsion féconde qui part d’elle et qu’on ressent quand on est plébéienne (et même en ne se l’avouant pas), est et restera dans l’avenir le Jean-Jacques Rousseau des femmes. […] si l’on pouvait faufiler un peu de surnaturel et un aperçu de révélation dans cette mort si fière et si claire, comme bien des gens seraient disposés à s’adoucir envers la noble femme et à changer de langage !

489. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

C’est qu’il y a des choses qu’on n’aperçoit et qui ne prennent au vif que du jour où elles sont dites d’une certaine manière. […] Dans l’histoire qu’on a tracée jusqu’à présent de la littérature des deux derniers siècles, on ne s’est pris qu’à des œuvres éminentes, à des monuments en vue, à de plus ou moins grands noms : les intervalles de ces noms, on les a comblés avec des aperçus rapides, spirituels, mais vagues et souvent inexacts. […] Jusqu’ici encore, on a, par-ci par-là, rencontré et coupé des veines au passage ; il y a à suivre ces veines elles-mêmes dans leur longueur, et bien des rapports constitutifs et des lois de formation ne s’aperçoivent qu’ainsi.

490. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Mais voilà que M. de Saint-Priest, dans ses loisirs du Nord, s’est aperçu de la lacune et a conçu le dessein de la combler. […] Ce qui me frappe surtout dans le cours de l’ouvrage, c’est la quantité d’esprit que l’auteur y a versée, je veux dire la quantité de vues, d’aperçus, d’ouvertures de toute sorte et de rapprochements. […] Plus d’un aperçu ingénieux aurait gagné, je le crois bien, à être rendu d’une manière plus simple, plus purement spirituelle, et avec l’habitude si française de l’auteur.

491. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

On en retrouve le regret en même temps que l’expression en plus d’une page des Mémoires de M. de Ségur ; car combien, sous cette plume facile, d’aperçus historiques profonds et vrais ! […] Un jour, à cette heure même de la promenade impériale, M. de Ségur imagina de se trouver dans la seconde des allées au moment du détour, et de ne pas s’y trouver seul, mais de se faire apercevoir, comme à l’improviste, prenant ou recevant une légère, une très-légère marque de familiarité d’une des jolies dames de la cour qu’il n’avait sans doute pas mise dans le secret. — Au dîner qui suivit, le front de Sémiramis apparut tout chargé de nuages et silencieux ; vers la fin, s’adressant au jeune ambassadeur, elle lui fit entendre que ses goûts brillants le rappelaient dans la capitale, et qu’il devait supporter impatiemment les ennuis de cette retraite monotone. […] La dictée s’achevait et le secrétaire finissait d’écrire, lorsque tout d’un coup il aperçut le vieillard de soixante-dix-huit ans qui s’était levé du canapé où il reposait et qui s’approchait de lui en tâtonnant : « Mon ami, je vous ai fait tout à l’heure de la peine, pardonnez-moi. » Ce furent ses paroles.

492. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Au fond, toutes les fois qu’il a cru pouvoir le faire sans qu’on s’en aperçût, et avec quelque utilité théâtrale, Corneille a travesti la vérité historique. […] Il a aperçu et décrit des états d’âme qui sont devenus de plus en plus fréquents et universels, des sensitifs et des impulsifs, des nerveux et des femmes. […] Le poète était assez fier d’avoir fondé dans cette pièce une nouvelle sorte de tragédie, sans terreur ni pitié, avec l’admiration pour unique ressort : il ne s’apercevait pas qu’il la fondait dans le vide.

493. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Il hanta les bohèmes, les inconscients fantasques du Chat maigre, et il s’aperçut à quel point le monde est réjouissant pour qui sait le regarder. […] Un pauvre garçon qui aime une actrice et qui, après quelques années de vie difficile, est tué par hasard pendant la Commune, voilà Jean Servien  Un bon garçon d’Haïti qui, sous la direction bizarre d’un professeur mulâtre, manque plusieurs fois son baccalauréat ; qui, vivant avec une bande de fous, n’est pas même étonné, tant il est irréfléchi ; qui, ayant remarqué une jeune fille dans la maison d’en face, s’aperçoit qu’il l’aime le jour où elle quitte Paris, s’élance en pantoufles à sa poursuite et l’épouse à la dernière page : voilà le Chat maigre  Un vieux savant envoie du bois, pendant l’hiver, à sa voisine, une pauvre petite femme en couches. […] Je m’aperçois en finissant que je n’ai pas dit du tout ce que j’avais dessein de dire.

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