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30. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre I : Qu’est-ce qu’un fait social ? »

Voilà donc des manières d’agir, de penser et de sentir qui présentent cette remarquable propriété qu’elles existent en dehors des consciences individuelles. […] S’agit-il de maximes purement morales ? […] Voilà donc un ordre de faits qui présentent des caractères très spéciaux : ils consistent en des manières d’agir, de penser et de sentir, extérieures à l’individu, et qui sont douées d’un pouvoir de coercition en vertu duquel ils s’imposent à lui. […] Quand on regarde les faits tels qu’ils sont et tels qu’ils ont toujours été, il saute aux yeux que toute éducation consiste dans un effort continu pour imposer à l’enfant des manières de voir, de sentir et d’agir auxquelles il ne serait pas spontanément arrivé. […] En effet, certaines de ces manières d’agir ou de penser acquièrent, par suite de la répétition, une sorte de consistance qui les précipite, pour ainsi dire, et les isole des événements particuliers qui les reflètent.

31. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Conclusion »

. — Intensité, durée, détermination volontaire, voilà les trois idées qu’il s’agissait d’épurer, en les débarrassant de tout ce qu’elles doivent à l’intrusion du monde sensible et, pour tout dire, à l’obsession de l’idée d’espace. […] Recherchant alors pourquoi cette dissociation de la durée et de l’étendue, que la science opère si naturellement dans le monde extérieur, demande un tel effort et excite une telle répugnance quand il s’agit des états internes, nous n’avons pas tardé, à en apercevoir la raison. […] Mais quand il s’agit de nos états de conscience, nous avons tout intérêt à entretenir l’illusion par laquelle nous les faisons participer à l’extériorité réciproque des choses extérieures, parce que cette distinction, et en même temps cette solidification, nous permettent de leur donner des noms stables, malgré leur instabilité, et distincts, malgré leur pénétration mutuelle. […] Notre existence se déroule donc dans l’espace plutôt que dans le temps : nous vivons pour le monde extérieur plutôt que pour nous ; nous parlons plutôt que nous ne pensons ; nous « sommes agis » plutôt que nous n’agissons nous-mêmes. Agir librement, c’est reprendre possession de soi, c’est se replacer dans la pure durée.

32. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre IV. L’ironie comme attitude morale » pp. 135-174

Les autres sont autour de nous, et ils nous influencent, ils sont en nous aussi et ils y agissent. […] Et, en fait, il n’y agit pas toujours. […] Et il est ainsi porté à n’agir que pour lui. […] Même sans le vouloir il agira pour les autres, selon les suggestions qui lui sont imposées. Même sans le savoir il agira pour lui-même, car il ne peut agir que selon sa propre nature.

33. (1907) L’évolution créatrice « Chapitre IV. Le mécanisme cinématographique de la pensée  et l’illusion mécanistique. »

S’agit-il d’un mouvement simple ? […] S’agit-il d’un mouvement complexe ? […] Agir, c’est se réadapter. […] S’agit-il d’un corps qui tombe ? […] Mais de quel temps s’agit-il ?

34. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

Cela prouverait-il qu’il faut absolument agir par l’intermédiaire du nerf ? […] C’est d’après cela que j’ai dit, il y a déjà longtemps, que la salive acidulée n’agit plus sur l’amidon. […] On peut, en effet, agir sur celles-ci sans que le type physiologique de leur sécrétion soit changé ni sa composition altérée. […] Nous avons ensuite essayé l’action de l’acide azotique, et nous avons vu que cet acide agissait parfaitement pour manifester la matière colorante rouge, et qu’alors on pouvait substituer l’acide azotique au chlore, avec d’autant plus d’avantage, que l’acide azotique agissait dans certains cas où le chlore n’agit pas. […] Tandis que la salive n’a pas agi sensiblement sur la monobutyrine.

35. (1870) La science et la conscience « Chapitre IV : La métaphysique »

Ce n’est plus alors la conscience et la raison qui parlent, c’est Dieu même, et non-seulement Dieu parle, mais c’est lui qui agit réellement en nous et par nous. […] Cela posé, de quoi s’agit-il dans la question qui nous occupe ? […] C’est donc bien d’une vérité objective qu’il s’agit ; par conséquent d’un problème métaphysique et non purement psychologique. […] Alors il faudrait dire que l’animal a la conscience aussi bien que l’homme ; car il est évident qu’il ne sent, ne perçoit, n’agit pas sans savoir qu’il sent, perçoit et agit. […] Ce mot ne convient point aux phénomènes de l’esprit, soit qu’il s’agisse de la conscience, soit qu’il s’agisse de l’histoire.

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