Elle était assez jeune et belle toujours, délicieuse de grâce ; petite, blanche, blonde, de ces cheveux d’un blond cendré qui ne sont qu’à Valérie, avec des yeux d’un bleu sombre ; une voix tendre, un parler plein de douceur et de chant, comme c’est le charme des femmes livoniennes ; une walse enivrante, une danse admirée. […] en même temps qu’alors, près d’une personne admirée et aimée, il se plaignait d’une certaine rigueur habituelle, qu’il eût voulu attendrir, il se faisait l’organe d’une certaine sainteté mystique qu’il essayait de suggérer.
Quand soudain, se levant, un sage d’Italie, Maigre, pâle, pensif, qui n’avait point parlé, Pieds nus, la barbe noire, un sectateur zélé Du muet de Samos qu’admire Métaponte, Dit : « Locriens perdus, n’avez-vous pas de honte ? […] On ne se figure pas jusqu’où André a poussé l’imitation, l’a compliquée, l’a condensée ; il a dit dans une belle épître : Un juge sourcilleux, épiant mes ouvrages, Tout à coup, à grands cris, dénonce vingt passages Traduits de tel auteur qu’il nomme ; et, les trouvant, Il s’admire et se plaît de se voir si savant.
XXIV On remonte de ces entonnoirs des gorges du Jura sur d’autres plateaux d’où l’on redescend de nouveau pour admirer des scènes semblables et pour remonter encore à d’autres plateaux, jusqu’au nœud principal et culminant de ces montagnes aux trois grandes et profondes vallées, divergeant et serpentant, comme des rayons de roue divergent du moyeu, en courant vers la plaine. […] Nous les avons lues une fois nous-même, d’emprunt, sans pouvoir jamais, depuis, retrouver cette délicieuse cassette, pour en extraire un des bijoux ciselés patiemment sur les hauts lieux du Jura natal, et pour les faire admirer à ceux qui goûtent encore les beaux vers, ces médailles d’une monnaie d’or qui n’a plus cours dans le monde actuel, mais qui a toujours son prix dans le monde du beau.
Relisons-le pour en contempler la puissance souvent colossale, pour en admirer la verve plus bouillante encore que dans la jeunesse, dans cette nature qui a déjà bouillonné soixante ans, tant il y a d’eau dans ce vase et de combustible dans ce foyer. […] Puis le coup d’État, trop appelé par la panique de la France, est venu, puis la confusion des langues, puis les exils, puis les amnisties, puis des pamphlets que nous déplorons, puis des poésies vengeresses, dont nous n’admirons que la verve, diatribes du génie qui stigmatisent des noms propres, que la colère peut écrire d’une main, mais que l’autre main doit raturer : car, en politique, on peut combattre, jamais insulter !
Mais peut-on admettre, d’ailleurs, que le poète qui a pu faire les vers de Childe Harold soit en même temps assez absurde et assez aveugle à toute évidence pour ne pas rendre une éminente justice à ce que tout le monde entier reconnaît et admire ? […] XLIX Je m’arrêtai à Pise pendant quelques jours pour y admirer les beautés de la cathédrale et du Campo Santo, ce monument de marbre du xiiie siècle, et les quais magnifiques et solitaires, témoins aujourd’hui muets d’une grandeur évanouie.
La prétention n’en est que le masque : ce masque, au lieu de montrer un homme racontant simplement les pensées et les événements de sa vie, montre sans cesse un personnage en attitude de pose devant le lecteur, pour se faire admirer ; voilà pour la naïveté, il n’y en avait point, il ne pouvait y en avoir, l’attitude est l’inverse de la nature, la volonté tue le génie : c’est de la naïveté de commande, c’est-à-dire de la naïveté voulue. […] Admirez le poëte, mais ne donnez au philosophe qu’un crédit d’admiration.