/ 1418
309. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIIe entretien. Littérature latine. Horace (1re partie) » pp. 337-410

Recherché par elles pour sa jeunesse, récompensé pour son talent, redouté pour ses épigrammes, il était le modèle et l’envie des jeunes débauchés de Rome, une espèce d’Alcibiade latin, un Voltaire dans sa jeunesse, à l’époque où Voltaire, étourdi, satiriste et libertin, vivait dans la société des Vendôme, des Ninon de l’Enclos, des Chaulieu et des abbés Courtin, ces épicuriens du Temple à Paris. […] Voltaire, à quatre-vingt-trois ans, adressa à l’ombre d’Horace une de ses plus juvéniles épîtres ; il ne manqua à ces vers que l’accompagnement du murmure des Cascatelles de Tivoli, qui mouillaient de leur écume les tablettes du poète latin quand il écrivait d’une main si légère ses propres épîtres badines à Mécène. Écoutez Voltaire ; vous croiriez entendre Horace encore. […] Voltaire, à cet égard, il faut en convenir, fut aussi désintéressé dans ses cajoleries à Frédéric et à Catherine qu’Horace. […] Voltaire, dans ses dernières années, fut aussi spirituel dans ses vers familiers qu’Horace ; mais, quoiqu’il fût plus grand que le solitaire de Tibur, il ne fut jamais aussi gracieux ni aussi aimable.

310. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

D’une absolument contraire à celle que Voltaire avance pour son excuse. […] Que nous écrit Voltaire lui-même dans son essai sur la poésie épique ? […] À quoi bon attiser le feu de sa propre imagination au souvenir des licencieux épisodes de Voltaire ? […] Dans toutes ces parties, Voltaire est à mille lieues de lui !  […] Voltaire prolonge sa fiction très ingénieusement.

311. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « QUELQUES VÉRITÉS SUR LA SITUATION EN LITTÉRATURE. » pp. 415-441

On n’avait, en 1743, presque aucun des grands monuments de l’époque, pas encore l’Esprit des Lois (1748), pas encore l’Histoire naturelle (1749), pas l’Encyclopédie (1751), rien de Jean-Jacques ; et Voltaire, déjà si brillant, n’était pas encore arrivé, par les années et par l’exil, à cette sorte de dictature universelle dont ses licences et ses ricanements purent à peine atténuer la majesté. […] Voltaire avait son armée, et toute armée traîne ses goujats : ceux-ci étaient rejetés à l’arrière-garde du moins, toutes les premières lignes restaient imposantes, honorables. […] De nos jours, je le crains, Voltaire aurait dû héberger à Ferney Fréron. […] J’ai vu à Ferney un portrait de Voltaire, qui avait alors à peu près quarante ans, mais dont l’œil velouté et encore tendre montrait tout ce qu’il avait dû avoir de charmant, tout ce qui allait disparaître et s’aiguiser, faute dé mieux, dans le petit regard malicieux du vieillard.

312. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre III. Montesquieu »

Au moment où Voltaire se fixe aux Délices, et va commencer une nouvelle vie, Montesquieu disparaît (1755). Il n’avait pas fait autant de tapage que Voltaire, il s’était moins agité : mais il avait fait plus de besogne, au point de vue de la philosophie du siècle. Rien à cette date, dans l’œuvre de Voltaire, ne saurait contre-peser les Lettres persanes, les Considérations sur les Romains, et l’Esprit des Lois : il y a là une raison qui sait démolir et construire, un esprit qui peut guider son siècle, quand Voltaire en est encore à faire des niches au gouvernement, et à faire partir des fusées pour l’amusement des badauds.

313. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Le Huron de Voltaire et le Chactas de Chateaubriand sont là pour rappeler le temps où le drapeau français flottait au Canada et dans la Louisiane. […] Voltaire, obligé de vivre à Londres quelques années, en rapporte, entre autre choses, l’incrédulité méthodique de Bolingbroke, la philosophie de Locke, les théories de Newton sur la gravitation, les drames de Shakespeare. […] Que d’efforts n’a-t-il pas fallu, depuis le jour où Voltaire risquait dans Zaïre une pâle réminiscence de la jalousie d’Othello, pour que le grand dramaturge anglais forçât les portes de nos théâtres ! […] Si vous voyez la critique se prosterner devant Bossuet et traîner Voltaire dans la boue, grand symptôme de réaction cléricale.

314. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

« Si cette mode continue, disait Voltaire, il y aura bientôt autant d’histoires de Ninon que de Louis XIV. » Tallemant des Réaux, depuis, a donné la chronique toute nue et des détails très circonstanciés. […] S’il veut profiter de ce qui nous reste d’honnêtes abbés en l’absence de la Cour, il sera traité comme un homme que vous estimez. » Ces abbés de distinction étaient en effet assez nombreux, vers la fin, dans le cercle de Ninon : c’étaient l’abbé de Châteauneuf, le parrain de Voltaire, l’abbé Regnier-Desmarais, l’abbé Fraguier, l’abbé Gédoyn, et d’autres encore, tous gens de savoir et à la fois gens du monde et de goût. […] Est-il besoin de rappeler que l’abbé de Châteauneuf, un jour, lui présenta son filleul Voltaire, âgé de treize ans et déjà poète ? […] De Montaigne et de Charron à Saint-Évremond et à Ninon, et de Ninon à Voltaire, il n’y a que la main, comme on voit.

/ 1418