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183. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

Despréaux le prit en aversion, parce que son ami Molière avoit à s’en plaindre. […] Pour comble d’infortune, cet abbé, poëte & prédicateur, déplut à Molière, qui le joua dans les Femmes sçavantes sous le nom de Trissotin. […] Elle s’étoit passée chez madame de Nemours, pour qui Cotin avoit fait le sonnet de la princesse Uranie, que Molière rapporte.

184. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

J’en appelle à vos mémoires, quoi de plus sonore que la prose de Rabelais, de Montaigne, de l’ancien Balzac, de Bossuet, de Saint-Simon, de Massillon, de Mirabeau, que la poésie de Villon, des hommes de la Pléiade, d’Agrippa d’Aubigné, de Maynard, de Corneille, de Rotrou, de Molière, de Victor Hugo ? […] En effet, au siècle des Pascal et des Corneille, tous les peuples tenaient leurs yeux attachés sur la France ; ils contemplaient Versailles où triomphaient Molière et Racine, comme on contemple le soleil. […] Actuellement la France de Rabelais et de Pascal, de Molière et de Montesquieu, de Bossuet et de Voltaire, n’est pas descendue de ce piédestal où pendant trois siècles toutes les nations l’ont honorée comme la grande statue exemplaire !

185. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXIII. Des éloges ou panégyriques adressés à Louis XIV. Jugement sur ce prince. »

Racine le loua indirectement dans ses tragédies et dans quelques pièces détachées ; Molière dans ses comédies aujourd’hui peu connues, qu’il fit pour les fêtes de Versailles. […] Ainsi, après s’être occupé de ses grands desseins avec ses généraux et ses ministres, il se délassait quelquefois en conversant avec Racine : il ordonnait qu’on représentât devant lui les chefs-d’œuvre du vieux Corneille : il sentait de l’orgueil à se voir servir dans son palais par l’auteur du Misanthrope et du Tartufe, et donnant à Molière son roi pour défenseur, empêchait qu’une cabale d’autant plus terrible, qu’on y mêlait le nom de la vertu, n’opprimât un grand homme. […] Là on verrait Turenne et Condé, Catinat et Vauban ; Lamoignon tiendrait à la main le code des ordonnances ; Colbert, ses plans de marine et de commerce ; Racine s’avancerait sur les pas de Corneille ; Molière et La Fontaine suivraient : après eux viendraient les artistes célèbres.

186. (1824) Épître aux muses sur les romantiques

Corneille, que soutient une vieille énergie, S’il n’était inégal n’aurait point de génie ; Et Molière lui-même eût été réformé, Si le Welche et l’Anglais ne l’avaient estimé. […] C’est ainsi que pensaient et Molière et Regnard ; Mais notre romantisme a brisé ces barrières, Confondu tous les goûts, les styles, les manières.

187. (1910) Propos de théâtre. Cinquième série

C’est le triomphe de Molière. […] Sully, la moitié de Molière disparaîtrait si cette théorie était vraie. […] Comment voulez-vous appeler Molière humoriste ? […] C’est le mariage de Molière avec Armande Béjart, et puis la mort de Molière. […] , Molière y est représenté en tragique.

188. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIIe entretien » pp. 87-159

Supposez qu’on trouve après mille ans, dans une catacombe, un volume de Corneille, et qu’on se demande de quelle nation était ce poète enflé comme un Castillan, tendu comme un Latin, sublime comme un Africain, pompeux comme un Gascon, raisonneur comme un Anglais, à coup sûr on ne devinera pas en mille que ce grand homme était du pays de la Fontaine, de Molière ou de Boileau ! […] La raison de cette complète originalité de Molière est toute simple. […] Aussi, malgré le caractère éminemment classique et souvent latin de sa diction en vers, Molière devint-il dans ses comédies complétement Français, et par cela même complétement original. […] Molière n’est si grand que parce qu’il fut lui-même. […] On peut en dire autant, quoiqu’à une immense distance, de la Bruyère, ce Molière en maximes et ce Saint-Simon en miniature.

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