., pleins de ténèbres et de clartés vives, d’un langage à lui comme le langage des solitaires… Intuitif et visionnaire tout à la fois, Carlyle est également mystique et grossier, ivre de ses idées comme on l’est de gin, mais voyant dans l’ivresse comme tous les ivrognes, qui ont dans l’ivresse détonnantes et d’inexplicables perceptions.
Il y a celle qui soutient que l’homme est bon et que la société le déprave ; celle qui prétend qu’il est également propre au bien comme au mal ; et enfin celle qui pose, comme le catholicisme, avec sa netteté souveraine, que l’homme est en chute, mais qu’il peut glorieusement se relever !
II Quand Ballanche les publia, ces lettres, pour la première fois, non seulement il donnait à ce qui restait de cœurs purs en France, après les impuretés du xviiie siècle, une sensation divine bien au-dessus de toutes les sensations que le Génie lui-même peut donner, mais en plus il préservait Mademoiselle de Condé des derniers outrages de ce xviiie siècle expirant… L’amour de Mademoiselle Louise de Condé pour La Gervaisais, d’une princesse du sang de France pour un petit officier des carabiniers de Monsieur, cet admirable et chaste amour, discret, englouti dans deux âmes d’élite qui eurent également leur renoncement dans l’amour, cette chose rare qui achève l’amour dans ce qu’il a de plus sublime, avait transpiré comme un parfum qu’on percevrait mieux dans une atmosphère empestée, et cette transpiration d’un sentiment ineffablement pur au milieu d’une société corrompue, cette société avait dû en faire ce qu’elle faisait de tout.
En effet, les doctrines matérialistes sont scientifiquement ce que sont, politiquement, les doctrines démagogiques, troublant également la tradition, et les unes violant aussi bien l’histoire, dans le monde des idées, que les autres, dans le monde des faits !
Charles de Rémusat, qui, en sa qualité de philosophe, aurait dû plus que personne se préoccuper de l’ordre et de la déduction nécessaires à toute œuvre de l’esprit, a oublié également l’un et l’autre dans la sienne… Au lieu de nous construire et de nous équilibrer un drame avec ses proportions harmonieuses, il s’est laissé couler et tomber dans le drame anarchique, grossier, élémentaire, qui lâche tout et ne s’astreint à rien, et est bien moins l’ensemble qu’on appelle un drame digne de ce nom, qu’une puérile succession de spectacles.
On se rappelle ce livre fou, on ne sait déjà plus quel bas-bleu russe, intitulé : L’appel au Christ, auquel, tous les deux, dans des lettres qu’ils ne s’attendaient pas à voir publier, ils donnaient également une approbation galante et charmante.