Comme tous les aigus, il était sec, et il semble le père de toute une race d’esprits secs comme lui : Goethe, cette âme de plâtre, Charles de Brosse, l’épicurien latin, Stendhal, qui avait au moins du feu dans sa sécheresse, et Mérimée qui n’avait rien, en descendent. […] Une pareille éducation, qui commençait même avant que la tête de l’enfant fût ouverte aux premières impressions de l’existence, mais dont il devait plus tard recevoir, en apprenant cela, l’enseignement, n’a peut-être agi qu’à la mort sur l’âme de Montesquieu. Le stoïcien avait traversé toute la vie dans le respect historique et social des institutions et des idées chrétiennes, mais sans aller plus loin du côté du ciel, et il retrouva peut-être, à l’heure de mourir, sur son âme, la bénédiction paternelle du mendiant qui avait répondu de lui devant Dieu. Jusque-là, il dut opposer au Christianisme l’imperméable et native sécheresse d’une âme sans enthousiasme et d’un esprit à peu près sans foi. […] … Cette sécheresse n’était pas que dans son âme.
Et en le lisant, ce chapitre, on comprendra enfin que ce qui semblait un vulgaire sentiment humain, traînant encore dans une grande âme dévorée de Christianisme, était, au contraire, tout ce qu’il y avait au monde de plus chrétien, puisque c’était le sentiment exaspéré d’un apostolat impossible ! […] Il s’occupe bien plus des erreurs de l’intelligence que des vices de l’âme. […] IV Faits de dix-neuf chapitre s, ou, comme on dit maintenant, dans ce temps de journalisme et d’éparpillement, d’articles qui peut-être ont passé dans quelque Revue catholique où leur beauté, cette beauté fatale des choses chrétiennes, a été étouffée dans l’obscurité qui est présentement leur destin, ces Plateaux de la balance n’ont pas d’autre unité que l’âme de leur auteur, et c’est cette âme, enthousiaste comme on ne l’est plus et qui palpite partout en cette dispersion de sujets différents, qui les relie entre eux et en fait un livre. […] Il ne s’en tient ni à la simple observation des choses humaines, si formidable qu’il puisse l’exercer, ni au sévère plaisir du penseur qui pénètre dans le fond de l’âme et lui arrache sa vérité, ni à l’art qui enchâsse cette vérité, arrachée de l’âme, dans des pages plus ou moins dignes d’être immortelles. […] Dans les chapitres de son livre, qui n’a que des chapitres et dont l’unité n’existe que dans la personnalité très particulière de l’auteur, ceux-là qui sont intitulés : La Lumière et la Foule, Les Ténèbres et la Foule, Les Sables mouvants, Les Préjugés, Les Caractères, Les Passions et les Âmes, La Charité intellectuelle, sont de ces choses qu’il est difficile dénommer, parce qu’elles n’ont pas d’analogue en littérature… Le côté que j’oserai appeler le côté divin de cette critique, échappera sans nul doute à ceux qui ont le mépris insolent et bestial du mysticisme de l’auteur.
À la page 76 du présent volume, n’a-t-il pas écrit : « La vertu de cette âme enjouée… » ? […] Mais cette Sévigné de reflet lui a suffi, et il en tient aussi pour elle : Vous en êtes un peu, dans votre âme, entiché. […] On les trouvait jolis, scintillants, dardants, agaçants ; ils plaisaient à l’esprit ; mais ils ne disaient rien à l’âme ! […] Elle sauva sa réputation quand madame de Maintenon, une bien autre âme et une bien autre vertu qu’elle, perdait la sienne ! […] Or, parmi ces femmes vertueuses dont Babou nous a donné les images, il y en a une qui fut une sainte, et qui n’est un sujet d’histoire que dans le livre des Anges, si, comme je le crois, ils suivent du ciel les mouvements de nos âmes et sont, là-haut, nos historiens !
Quant à Madame Récamier, elle avait de l’esprit comme la rose de Rivarol et de l’âme comme un ananas. […] Toutes deux purent suffire au besoin de Lettres de ce siècle aux grandeurs publiques, qui avait autre chose à faire que de se regarder dans l’âme, pour raconter ce qu’il y voyait, à la première personne, dans des épanchements ou des chuchotements particuliers. […] Frivole et libertin, le xviiie siècle peut avoir, malgré son libertinage et sa frivolité, quelques amours violents et vrais, — comme ceux de Mademoiselle de Lespinasse, par exemple, — mais l’effrayante et inexplicable fidélité qui apparaît comme la fatalité du cœur, n’était pas possible avec les âmes de cette époque corrompue. […] L’âme de cette femme brûle sans flamber, elle se déchire sans faire de bruit, et tout ce que je connais de plus cruel, le sourire de la résignation, retrouvée toujours quand elle croit l’avoir perdue, revient bientôt planer au-dessus de toutes ses douleurs et de toutes ses agitations ! […] Ils y tombent de la plume d’une femme qui ne se doute même pas de leur beauté, tant elle est vraie, et spontanée, et naturelle, cette femme qui n’écrit que pour apaiser son âme, dans ce siècle faux et déclamatoire qui n’avait que l’hypocrisie de la nature dans ses déclamations et qui procédait déjà par avance à l’ampoulé de la Révolution Française !
Il a laissé, presque dès son début, des traces trop vives et trop profondes dans l’opinion contemporaine, pour qu’on pût oublier de réunir les écrits dus à cette plume brillante que la mort a si tôt brisée, et qu’il eût brisée lui-même, s’il avait vécu davantage, tant elle satisfaisait peu son âme sainte ! […] Mais avec le catholicisme, son génie a commencé dans son âme. […] Saint Augustin l’attire par sa tendresse, la grande qualité de son esprit et de son âme. […] C’est le contraire d’un autre Éclatant, de Chateaubriand, sur lequel il l’emporte par la pureté, le calme et la beauté de l’âme, s’il ne l’emporte pas par la beauté de son génie. […] Au premier rang de ce monde par les titres et les relations, Donoso Cortès, marquis de Valdegamas, n’y exerça pas toute l’influence à laquelle, de talent et d’âme, il avait droit, et la faute en fut justement au monde de ce temps, haïsseur de toute vigueur et de toute vérité complète !
J’en ignore l’auteur : mais c’est quelque bonne âme ; Et je veux que ce soit votre unique entretien. […] Par de pareils objets les âmes sont blessées, Et cela fait venir de coupables pensées. […] Que si vous contemplez d’une âme un peu bénigne. […] Je vous écoute dire, et votre rhétorique En termes assez forts à mon âme s’explique. […] Dès lors, l’issue du combat qui se livre dans l’âme de Tartuffe n’est plus douteuse.