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509. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hugo, Victor (1802-1885) »

Tous les génies sont frères et forment, à travers les espaces et les siècles, une famille rayonnante et sacrée. […] À l’heure qu’il est, Les Contemplations sont dans toutes les mains ; on dirait que le lecteur, dégoûté des rapsodies qui ont vu végéter ces dernières années si stériles, ait voulu se retremper dans ce grand fleuve qui prend sa source aux derniers jours de la Restauration et qui n’a cessé de rouler, à travers tous les événements heureux ou malheureux, glorieux ou funestes, ses flots de belles pensées et de beaux vers. […] Nous ne l’entrevoyons encore aujourd’hui cette œuvre-là qu’à travers la poussière des combats qu’elle a soulevés. […] La mort vénérable est ton apothéose ; Ton esprit immortel chante à travers les temps.

510. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « H. Forneron » pp. 149-199

Éblouissants, ils avaient passé à travers l’Histoire dans le même tourbillon de lumière. […] Il a aimé Dieu et l’Église du premier amour de sa vie et à travers tous les sentiments de sa vie, s’il en eut d’autres, ce qui est douteux. […] Très au-dessous de Charles-Quint, son père, dont il n’avait, si on en croit ses portraits, que la mâchoire lourde et les poils roux dans une face inanimée et pâle, ce Scribe qui écrivait ses ordres, défiant qu’il était jusque de l’écho de sa voix, ce Solitaire, noir de costume, de solitude et de silence, et qui cachait le roi net, le rey netto, au fond de l’Escurial, comme s’il eût voulu y cacher la netteté de sa médiocrité royale, Philippe II, ingrat pour ses meilleurs serviteurs, jaloux de son frère don Juan, le vainqueur de Lépante, jaloux d’Alexandre Farnèse, jaloux de tout homme supérieur comme d’un despote qui menaçait son despotisme, Forneron l’a très bien jugé, réduit à sa personne humaine, dans le dernier chapitre de son ouvrage, — résumé dont la forte empreinte restera marquée sur sa mémoire, — comme il a bien jugé aussi Élisabeth, plus difficile à juger encore parce qu’elle eut le succès pour elle et qu’on ne la voit qu’à travers le préjugé de sa gloire. […] L’homme politique que j’ai tant signalé dans Forneron, le modéré, le libéral, dont on aperçoit l’opinion à travers le goût et l’estime qu’il a pour Louis XVIII, l’auteur de la Charte future, laisse échapper que la modération, avec laquelle seule on puisse gouverner les peuples, a pour destinée d’être écrasée toujours… Pour ma part, je le crois aussi, mais c’est, précisément, parce que ce n’est pas avec elle seule qu’on peut gouverner les peuples… Véritablement, ils ne sont pas si faciles à mener que cela !

511. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Victor Hugo. Les Contemplations. — La Légende des siècles. »

Ce sont partout des petites choses innocentes et béates comme celles-ci : Et partout nos regards lisent, Et dans l’herbe et dans les nids ; Des petites voix nous disent : « Les aimants sont les bénis. » ou de petites choses prétentieuses, moins innocentes parce qu’elles sont fatigantes : La nuit étale aux yeux ses pourpres et ses cuivres ; Les arbres tout gonflés de parfums sont comme ivres ; Les branches, dans leurs doux ébats, Se jettent des oiseaux du bout de leurs raquettes ; Le bourdon galonné fait aux roses coquettes Des propositions tout bas Enfin l’amour, l’amour, l’amour trouble et affaiblit tellement la raison du poète, qu’il le répand sur la nature, à tort et à travers, non plus comme un vase qui déborde, mais comme un vase qui a une fêlure et qui coule : J’aime (s’écrie-t-il), j’aime l’araignée et j’aime l’ortie,             Parce qu’on les hait, Et que rien n’excuse et que tout châtie             Leur morne souhait. […] Du reste, quand nous avons parlé de ces quelques beaux cris paternels passant à travers l’emphase et la poussée d’images qui obsèdent l’esprit de M.  […] Hugo autrefois, et par les vers heureux semés ça et là, de temps en temps, à travers toutes ces poésies. […] Hugo, comme en Hegel il avait eu son philosophe, quoiqu’il y ait quelque chose de bien tonitruant dans la voix du poète, l’Antiquité, pourtant, qu’il a chantée, est une antiquité de seconde main saisie à travers la Renaissance ; une suite de tableaux splendides, mais incorrects aussi et versés (ce qui devient de plus en plus le faire poétique moderne) de toiles connues dans des vers !

512. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

, les démêlent à travers tous les mauvais offices dont de tels gens sont d’ordinaire accablés ! […] Villars commande le détachement qui doit tout faire pour forcer les obstacles et se mettre en mesure de joindre l’électeur : il s’agit d’abord de traverser le Rhin en présence de l’ennemi, puis de s’ouvrir malgré lui et à travers ses postes retranchés l’entrée des montagnes Noires. […] La lettre, d’ailleurs, se terminait par un post-scriptum plus grave et qui montrait qu’à travers les bouffées et les saillies de la vanité, on avait affaire à un chef réfléchi, ayant la conscience de ses hauts devoirs militaires.

513. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre II. Deuxième élément, l’esprit classique. »

Quand Corneille et Racine, à travers la pompe ou l’élégance de leurs vers, nous font entrevoir des figures contemporaines, c’est à leur insu ; ils ne croyaient peindre que l’homme en soi ; et, si aujourd’hui nous reconnaissons chez eux tantôt les cavaliers, les duellistes, les matamores, les politiques et les héroïnes de la Fronde, tantôt les courtisans, les princes, les évêques, les dames d’atour et les menins de la monarchie régulière, c’est que leur pinceau, trempé involontairement dans leur expérience, laissait par mégarde tomber de la couleur dans le contour idéal et nu que seul ils voulaient tracer. […] C’est par elle qu’on a pu découvrir les droits de l’homme. » Comme en mathématiques, on les a déduits d’une seule définition primordiale, et cette définition, pareille aux premières vérités mathématiques, est un fait d’expérience journalière, constaté par tous, évident de soi. — L’école subsistera à travers la Révolution, à travers l’Empire, jusque pendant la Restauration383, avec la tragédie dont elle est la sœur, avec l’esprit classique qui est leur père commun, puissance primitive et souveraine, aussi dangereuse qu’utile, aussi destructive que créatrice, aussi capable de propager l’erreur que la vérité, aussi étonnante par la rigidité de son code, par l’étroitesse de son joug, par l’uniformité de ses œuvres, que par la durée de son règne et par l’universalité de son ascendant.

514. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre Premier »

Le mal pourtant ne disparut pas, il est inhérent à la nature humaine ; sous les formes les plus diverses, il reparaît à travers les siècles. […] La passion ose à peine élever la voix devant elle, et son amour ne fait pas plus de bruit, sous la pudeur rigide et taciturne dont elle le couvre, que le battement d’un cœur à travers une armure. […] On le voit à travers notre analyse, ce qui manque au drame de M. 

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