Shakespeare a failli avoir le sort d’Eschyle. […] Ce rêve, d’où sortait l’art d’Égine, était au seuil de la philosophie ionienne dans Thalès aussi bien qu’au seuil de la philosophie italique dans Pythagore. […] Il sort des Dionysiaques, ou de l’Aschosie, ou de la grande Orgie triétérique, et l’on croit voir un furieux des mystères. […] Le mot pour rire sort de l’abîme. […] Gutenberg, au quinzième siècle, sort de l’obscurité terrible, ramenant des ténèbres ce captif racheté, l’esprit humain.
Je voudrais être en lieu d’où je pusse aisément Contempler la foule importune De ceux qui cherchent vainement Cette fille du Sort de royaume en royaume, Fidèles courtisans d’un volage fantôme. » Quand ils sont près du bon moment, L’inconstante aussitôt à leur désir échappe. […] Je ne crois point que la Nature Se soit lié les mains, et nous les lie encor Jusqu’au point de marquer dans les cieux notre sort : Il dépend d’une conjoncture De lieux, de personnes, de temps, Non des conjonctions de tous ces charlatans. […] De deux choses l’une ; et très méthodiquement La Fontaine va examiner d’abord l’hypothèse du hasard et ensuite celle de la Divinité providentielle : Or, du hasard il n’est point de science : S’il en était, on aurait tort De l’appeler hasard, ni fortune, ni sort, Toutes choses très incertaines. […] Du reste, en quoi répond au sort toujours divers, Ce train toujours égal dont marche l’univers ? […] Etudier l’homme, toujours l’homme, ne pas sortir de l’étude de l’homme et de la peinture de l’homme tel qu’il est ; étant toujours permis, du reste, d’ajouter un peu d’imagination pour faire rayonner, en quelque sorte la vérité, pour donner le radium à la vérité.
Taine, Stendhal, dont il est beaucoup sorti, autant qu’un professeur peut sortir d’un observateur homme du monde, Stendhal, le piquant et le pervers, n’a-t-il pas dit « qu’il ne faut jamais se repentir » ? […] Ici, plus rien d’Hegel et de Condillac, cette affreuse copulation dont il est sorti. […] Toujours est-il que, dans son histoire des Origines de la France contemporaine, il n’est et ne veut être que l’anatomiste impassible de la société dont nous sommes sortis avec la maladie héréditaire qu’engendre toute race et qu’elle lègue à la race dont elle est la mère et qui la suit. […] Pour toutes ces raisons, il semblait cacher dans les entrailles de son esprit quelque chose comme un révolutionnaire en puissance, qui devait, un jour, en sortir. […] Il faut se risquer dans cette jungle de faits où il y a des tigres, et n’en pas sortir.
Leur effet ne sortira pas de cet arcane littéraire où le vieux langage dans lequel ils sont écrits doit nécessairement les retenir. […] Que de fois elle a laissé, avec une sublime indulgence, le Conte drolatique, sorti de la fantaisie d’un artiste aux intentions pures, s’enlacer aux frises de ses cathédrales et rire aussi sur ses portails ! […] V De tous les livres sortis du fécond cerveau de Balzac, j’estime, comme lui, qu’artistement c’est le premier… L’inspiration n’en est pas personnelle à l’auteur, dira-t-on. […] Ici, l’artiste ne manque jamais cet accent ineffable qui fit mourir le pauvre Jean-Paul de chagrin, car il l’entendait en lui, comme Beethoven, le sourd, entendait sa musique, mais il ne put jamais le faire sortir de sa pensée. […] Pourquoi ne sont-ils pas sortis du vague des annonces et des prospectus, ces attrape-minettes éternelles ?
Sous le précédent Empire, il y a près de cinquante ans déjà, lorsque l’Université eut sa fondation et sa renaissance, bien des débris vivaient encore, bien des germes fermentaient qu’il suffisait de rapprocher et de mettre en contact pour qu’il en sortît des productions variées et puissantes. […] Il faut toutefois reconnaître que le genre d’ardeur qui animait les générations de ce temps-là est depuis longtemps épuisé, et que tout le bien ou même le mal qu’on en pouvait attendre en est sorti. […] Lui-même né et sorti des lettres, il n’aurait pu leur faire la moindre injure sans manquer à son passé ; il a donc, dans une combinaison qui est son œuvre, concilié son culte pour elles, le culte de la tradition, avec la part légitime que réclamaient des sœurs rivales, et qui, si elles n’étaient admises, allaient devenir impérieuses. […] Le volume intitulé : Étude sur Virgile, en est sorti.
Telles sont les grâces de Louis le Grand, grâces semblables aux influences du plus beau des astres, et qui me donnent droit de dire avec plus de justice, à l’honneur du roi, que Tertullien n’écrit pour flatter les princes de l’Afrique : l’État et le ciel ont le même sort, et doivent leur bonheur à deux soleils… À ces mots, le voisin de Racine dut se pencher vers lui et lui rappeler à l’oreille la harangue de maître Petit-Jean : Quand je vois le soleil, et quand je vois la lune… Et le voisin de La Bruyère reçu l’année d’auparavant et avec un si éloquent discours, put lui dire : « Ah ! […] Le style de Saint-Simon, dans ces notes rapides, est plus pétulant, plus pressé, plus heurté que nulle part ailleurs ; on y sent quelqu’un qui veut trop dire, qui veut tout dire à la fois C’est comme une source abondante qui a à sortir par un goulot trop étroit, et qui s’y étrangle. […] Son âme, qui est toute de feu et toute céleste, se ressent du lieu d’où elle sort. […] Il n’est pas sacerdotal par rapport à lui, car il n’a pas dit un seul mot de l’Écriture sainte, des Pères de l’Église, ni des Conciles œcuméniques, et ce sont les seules paroles qui doivent sortir de la bouche d’un prêtre.
Voltaire, qui en avait pris connaissance dès l’année 1739, l’appelait un « ouvrage d’Aristide », et Rousseau, qui s’en autorisa plus tard dans son Contrat social, a dit : « Je n’ai pu me refuser au plaisir de citer quelquefois ce manuscrit, quoique non connu du public, pour rendre honneur à la mémoire d’un homme illustre et respectable qui avait conservé jusque dans le ministère le cœur d’un vrai citoyen, et des vues droites et saines sur le gouvernement de son pays. » M. d’Argenson n’était pas encore ministre lorsqu’il composa cet ouvrage, et il était sorti du ministère lorsqu’il le revit pour y mettre la dernière main. […] Il s’y occupa aussitôt des moyens d’améliorer le sort des peuples, le bien-être des troupes. […] Il fut alors le premier à proposer et à mettre à exécution l’idée de distribuer simplement le grain aux troupes, pour être ensuite donné par les soldats mêmes à la mouture et converti en pain : On cria contre mon idée, comme on fait toujours en toute nouveauté ; les vieux commissaires des guerres disaient que c’était parce que je sortais du collège et que j’y avais lu que les Romains donnaient ainsi le blé à leurs légions. […] Voici maintenant en quels termes vrais et non mitigés le fils nous peint la jeunesse de son père ainsi confiné en province, avant de voir jour à en sortir, mais ne s’y laissant point engourdir ni étouffer : M.
Il avait donc voulu ne sortir de la scène que sur un retour de fortune et après s’être montré encore une fois chef d’armée et capitaine. […] Après donc avoir donné ses soins à réparer ses affaires, à les régler une dernière fois et à les remettre sur un pied suffisant, il se retirait en prudent et en sage sur un dernier bon semblant de fortune, sur un succès modeste, sans pousser plus avant les chances, sans trop demander au sort, et, sans se soucier d’ailleurs des discours et propos, mêlés de sourire, qu’en tiendraient immanquablement entre eux les ennemis et les jaloux. […] N’allons pas nous figurer cependant sous un trop triste aspect le grand empereur du xvie siècle, au moment où il sortait de cette séance de renonciation solennelle et attendrissante. […] Grave et piquante question, fort agitée entre les historiens, et qui pour les uns tient déjà, à la légende, tandis que pour les autres elle ne sort ni de la vraisemblance ni de la vérité !
Il eut fort affaire pour se tirer de cette position très aventurée ; mais il paraît bien qu’il sortit de la mêlée et de la lutte, sa thèse intacte, et victorieux. […] L’évêque de Cour entra dans son rôle pour n’en plus sortir. […] Déjà les auditeurs se levaient pour sortir : il les retient du geste et les avertit de vouloir bien rester ; après un court instant, un éclair de recueillement, il monte lui-même en chaire, reprenant l’ordre de division adopté et annoncé par le récollet, il remplit les deux points qui restaient, et prêche une heure durant, à l’admiration, à l’émerveillement de tous. […] Quant aux vices du brillant prélat, il n’y aurait pas à les dissimuler, ce serait peine inutile : en regrettant de les trouver dans un homme de son rang et de sa condition à l’état d’affiche et de scandale, il n’y aurait pas non plus à les exagérer, et la leçon morale qui sortirait d’elle-même de ce désaccord criant parlerait assez haut.
C’est ainsi que, dans un cœur fier et un esprit profond, s’accumulaient contre Louis XIV et son ministre des trésors de rancune qui devaient sortir à leur moment. […] Poussé à cette extrémité, Victor-Amédée a pris son parti ; il feint une dernière irrésolution, endort un instant Catinat, et cependant il fait appel à son peuple, il fortifie Turin ; il tentera le sort des batailles. […] Entré le dernier dans la coalition, Victor-Amédée en sortit aussi le premier ; il fit sa paix particulière avant tous les autres, et pourvut à ses intérêts comme souverain. […] Ayant senti de bonne heure tous les inconvénients de la faiblesse, il aspirait à en sortir par tous les moyens, et il s’était fait un principe de l’infidélité.
« Faire, disait-elle, le bonheur d’un seul et le lien de beaucoup par tous les charmes de l’amitié, de la décence, je n’imagine pas un sort plus beau que celui-là. » Elle disait encore en ces années dans une lettre à Bosc, l’un de ses jeunes amis, — et dans ce tableau d’une de ses journées elle offrait l’image de toutes les autres : « Vous me demandez ce que je fais, et vous ne me croyez pas les mêmes occupations qu’à Amiens (elle venait de s’établir à Ville franche) ; j’ai véritablement moins de loisir pour m’y livrer ou pour les entremêler d’études agréables. […] Je ne fais de visites que celles d’une absolue nécessité ; je sors quelquefois, mais ç’a été rare jusqu’à présent, pour me promener un peu l’après-dîner avec mon ami et Eudora. […] Mais les preuves manquaient : elles sortent aujourd’hui, elles se produisent ; et c’est ici véritablement un trait essentiel, caractéristique, qu’on est heureux de ressaisir et de voir se dessiner avec éclat. […] Naturellement elle aurait dû le plaindre ; mais la passion de Mme Roland, doublée et cuirassée de cette vertu dont elle se montre si fière, et encore exaltée par les orages d’alentour, ne songe qu’à l’héroïsme et sort tout à fait de la gamme naturelle.
depuis qu’il fut sorti des ministres de son choix et selon son cœur, des Turgot, des Malesherbes, sa faiblesse le fit presque toujours double. […] Mon sort est de porter malheur ; et si des machinations infernales le font encore manquer ou qu’il fasse reculer l’autorité du roi, on m’en détestera davantage. » D’un autre côté, le roi en subissant le choix de M. […] L’idée fixe, il faut le dire, dès le lendemain des journées d’octobre et pendant toute l’année suivante et au-delà, est de fuir et de sortir des griffes où l’on est tombé. […] L’un et l’autre, dans leur état d’enchaînement et de contrainte, ne visaient qu’au plus pressé, — à en sortir.
remy, qui, jeune, ne trouva pas à ouvrir sa voie dans les tentatives d’alors, et qui dissipa ses premiers efforts dans les conceptions les plus hasardées, fit preuve, à un certain moment, d’une volonté forte et d’un bien rare courage : il rompit brusquement avec cette imagination qui ne lui répondait pas, avec ce passé qu’il avait fini par réprouver ; il aborda les études sévères, les hautes sources du savoir et du goût, et il en sortit après plusieurs années comme régénéré. […] il ne vous suffit pas qu’un poëte ait déjà subi ce premier retard, cette quarantaine obscure de vingt-cinq années de laquelle il est sorti jeune et encore très-contemporain ; vous voulez en plus lui en supposer, lui en imposer une seconde. […] Qu’un jeune homme, agité d’une flamme inconnue, S’écrie aux doux tableaux de ma muse ingénue : « Ce poëte amoureux qui me connaît si bien, Quand il a peint son cœur, avait lu dans le mien. » Voilà le vœu d’André Chénier exprimé en toute occasion : joignez-y celui d’être agréable et cher aux initiés des Muses : il ne demandait pas plus, et le sort, après bien des injures cruelles, l’a enfin tardivement exaucé. […] Il a même, dans ces dernières années, obtenu un redoublement de succès, imprévu, croissant, et que ses premiers admirateurs n’auraient osé lui présager. — » Mais il a fait faire bien de mauvais vers, » dites-vous. — Tous les poëtes qui réussissent en sont là ; et puis ces mauvais vers se seraient faits autrement sans lui, croyez-le bien ; sous un pavillon ou sous un autre, les mauvais vers trouvent toujours moyen de sortir.
Une jeune fille qui sort pour la première fois du couvent où elle a passé toute son enfance ; un beau lord élégant et sentimental, comme il s’en trouvait vers 1780 à Paris, qui la rencontre dans un léger embarras et lui apparaît d’abord comme un sauveur ; un très-vieux mari, bon, sensible, paternel, jamais ridicule, qui n’épouse la jeune tille que pour l’affranchir d’une mère égoïste et lui assurer fortune et avenir ; tous les événements les plus simples de chaque jour entre ces trois êtres qui, par un concours naturel de circonstances, ne vont plus se séparer jusqu’à la mort du vieillard ; des scènes de parc, de jardin, des promenades sur l’eau, des causeries autour d’un fauteuil ; des retours au couvent et des visites aux anciennes compagnes ; un babil innocent, varié, railleur ou tendre, traversé d’éclairs passionnés ; la bienfaisance se mêlant, comme pour le bénir, aux progrès de l’amour ; puis, de peur de trop d’uniformes douceurs, le monde au fond, saisi de profil, les ridicules ou les noirceurs indiqués, plus d’un original ou d’un sot marqué d’un trait divertissant au passage ; la vie réelle, en un mot, embrassée dans un cercle de choix ; une passion croissante qui se dérobe, comme ces eaux de Neuilly, sous des rideaux de verdure, et se replie en délicieuses lenteurs ; des orages passagers, sans ravages, semblables à des pluies d’avril ; la plus difficile des situations honnêtes menée à fin jusque dans ses moindres alternatives, avec une aisance qui ne penche jamais vers l’abandon, avec une noblesse de ton qui ne force jamais la nature, avec une mesure indulgente pour tout ce qui n’est pas indélicat : tels sont les mérites principaux d’un livre où pas un mot ne rompt l’harmonie. […] Cette Adèle de Sénange parut dans ses habits de fête, comme une vierge de Verdun échappée au massacre, et ignorant le sort de ses compagnes. […] je sors bien vite de cette barrière pour empêcher qu’on n’y pénètre ; si par hasard on s’avance vers mon asile, j’ai peine à contenir ma mauvaise humeur ; je voudrais qu’on s’en allât. » Mme de Flahaut, en sa chambre du Louvre, dut se faire une retraite assez semblable à celle de Mme de Candale, d’autant plus qu’elle avait dans son isolement une intimité toute trouvée. […] Comme on était mariée au sortir du couvent, par pure convenance, il arrivait que bientôt le besoin du cœur se faisait sentir ; on formait alors avec lenteur un lien de choix, un lien unique et durable ; cela se passait ainsi du moins là où la convenance régnait, et dans cet idéal de dix-huitième siècle, qui n’était pas, il faut le dire, universellement adopté.
Mariant ainsi cette culture d’esprit aux soins les plus réguliers de sa famille et de sa maison, elle prétendait que cela s’entr’aide, qu’on sort d’une de ces occupations mieux préparé à l’autre, et elle allait jusqu’à dire en plaisantant que d’apprendre le latin sert à faire les confitures. […] Cependant, au milieu de cet éclat extérieur du monde, la santé de Mme de Duras était depuis plusieurs années altérée, sans qu’elle changeât sa vie ; mais vers 1820 elle dut cesser à peu près de sortir. […] Rien n’est mieux pris sur le fait que le mal et l’idée fixe d’Ourika, une fois éclairée sur sa couleur : « J’avais ôté de ma chambre tous les miroirs, je portais toujours des gants ; mes vêtements cachaient mon cou et mes bras ; et j’avais adopté, pour sortir, un grand chapeau avec un voile que souvent même je gardais dans la maison. […] Ce mal qui date de la Terreur, mais qui sort de bien d’autres causes, qui s’est transmis à toutes les générations venues plus tard, ce mal de Delphine, de René, elle l’a donc, elle le peint avec nuance, elle le poursuit dans ses variétés, elle tâche de le guérir en Dieu.
Sorti d’une île à demi sauvage, placé dans une école militaire et appliqué aux études mathématiques, ne retrouvant point dans le français la langue de sa nourrice, le jeune Bonaparte, en s’emparant de cet idiome pour rendre ses idées et ses sentiments, dut lui faire subir d’abord quelques violences et lui imprimer quelques faux plis. […] Comment la fertile Égypte, la sainte Arabie, sont-elles dominées par des peuples sortis du Caucase ? […] Il essaya d’en sortir, et de s’ouvrir la grande route d’Orient par la Syrie. […] Pourtant, malgré l’amertume du sort, Napoléon ne dut pas, en somme, regretter de vivre, de supporter les années dévorantes de l’exil, ne fût-ce que pour avoir le temps de consigner dans la mémoire les actes du passé.
De bonne heure, il a considéré ce xixe siècle comme son sujet, comme sa chose ; il s’y est jeté avec ardeur et n’en est point sorti. […] Il venait, il causait avec vous ; lui, si enivré de son œuvre, et, en apparence, si plein de lui-même, il savait interroger à son profit, il savait écouter ; mais, même quand il n’avait pas écouté, quand il semblait n’avoir vu que lui et son idée, il sortait ayant emporté de là, ayant absorbé tout ce qu’il voulait savoir, et il vous étonnait plus tard à le décrire. J’ai dit qu’il était comme enivré de son œuvre ; et, en effet, dès sa jeunesse, il n’en sortait pas, il y habitait. […] On sent d’abord le besoin d’aller s’y retremper, d’aller se jeter dans quelque lecture limpide et saine au sortir des Parents pauvres, — de se plonger dans quelque chant de Milton, in lucid streams , dans les purs et lucides courants , comme dit le poète.
Aujourd’hui il s’agit de sortir une bonne fois des petites idées d’une rhétorique par trop littéraire, de retrouver l’homme et le roi dans l’écrivain, et de saluer en lui l’un des meilleurs historiens que nous possédions. […] Ayant à raconter la campagne de 1679, où le Grand Électeur chassa, en plein hiver, les Suédois qui avaient envahi la Prusse, il dira : « La retraite des Suédois ressemblait à une déroute ; de seize mille qu’ils étaient, à peine trois mille retournèrent-ils en Livonie, ils étaient entrés en Prusse comme des Romains, ils en sortirent comme des Tartares. » Il a de ces mots qui résument tout un jugement sur les hommes et sur les nations. […] Si l’on joint à cette narration si noble et si unie les lettres qu’il écrivait à Voltaire durant le même temps, on assistera au plus beau moment de Frédéric, à la crise d’où il sortit avec la persévérance la plus héroïque et la plus glorieuse. […] On reconnaît là un ressouvenir de Lucrèce en quelques-uns de ses plus beaux vers : « Usque adeo res humanas vis abdita quaedam… » Napoléon, entreprenant la campagne de 1812, écrivait à l’empereur Alexandre : « J’ai compris que le sort en était jeté, et que cette Providence invisible, dont je reconnais les droits et l’empire, avait décidé de cette affaire comme de tant d’autres. » C’est la même pensée ; mais il y a dans l’expression de Napoléon un éclair de plus, il y a comme un reflet mystérieux rapporté du Thabor, et que la pensée de Frédéric n’a jamais.
On sent à tout moment qu’elle excède son cadre de surintendante de l’intérieur royal, et elle ne craint pas de paraître en sortir, de laisser voir quelque chose de l’autorité politique dont elle tient les ressorts. […] Mme de Maintenon au contraire, une fois son cercle fait, n’en sort pas ; elle s’y enferme et s’y resserre le plus qu’elle peut, et ne craint rien tant que de faire de nouvelles connaissances : chez elle, c’est à la fois tactique, méthode industrieuse pour échapper aux ennuyeux, aux importuns, et pour ne voir que ceux qu’elle préfère ; et c’est preuve aussi d’une nature exclusive, qui ne prend plus aux choses et qui a sa fatigue intérieure. […] Quoi qu’il en soit, il était bien permis, en ces temps de malheur, d’être d’avis différent sur le remède et sur les moyens de sortir des maux accablants. Mme de Maintenon aspirait à en sortir comme une femme et comme beaucoup trop d’hommes alors, comme une femme de sens qui voit de près le mal, qui en souffre en elle et pour ceux auxquels elle est attachée, qui n’a rien d’une héroïne, qui est toute résignée et chrétienne, qui voit la main de Dieu non seulement dans les revers redoublés et les défaites, mais encore plus directement dans les fléaux naturels, dans les hivers tels que celui de 1709 (dont on n’avait point eu d’exemples depuis plus d’un siècle), et dans la famine qui s’ensuivit.
Dans cette famille de greffiers et d’avocats dont il était sorti, un génie satirique circulait en effet. […] Le mérite original de Nicolas Boileau, étant de cette famille gaie, moqueuse et satirique, fut de joindre à la malice héréditaire le coin du bon sens, de manière à faire dire à ceux qui sortaient d’auprès de lui ce que disait l’avocat Mathieu Marais : « Il y a plaisir à entendre cet homme-là, c’est la raison incarnée. » Le dirai-je ? […] Il y a là une cinquantaine de vers à la Juvénal qui peuvent se réciter sans pâlir, même quand on vient de lire Eugénie Grandet, ou lorsqu’on sort de voir une des pages éclatantes d’Eugène Delacroix. […] Despréaux et Racine y allèrent aussi vers le soir, et, entrant de chambre en chambre, enfoncés ou dans leur curiosité ou dans leur douce conversation, ils ne prirent pas garde qu’on fermait les premières chambres ; de sorte que, quand ils voulurent sortir, ils ne le purent.
Ils demeureront toujours ainsi, immobiles et debout, la bouche entrouverte comme pour laisser échapper une parole qui ne sortira point — devant une porte qui restera inflexiblement fermée ! […] c’est le sort commun. […] Sortent-ils, ils rentrent bien vite et bien vite ils remontent sur leur tabouret. […] Vous ne les voyez pas sans cesse occupés à se comprimer le front pour en faire sortir, à force de méditation, des idées avant terme.
De ces Lettres à une inconnue sortent, comme d’un merveilleux tombeau entrouvert, deux poétiques oiseaux blancs, deux tourterelles, deux âmes mélancoliques et plaintives ; l’âme, inconnue jusque-là, de feu Mérimée, et l’âme de l’inconnue, qui le restera par-delà ! […] on ne retrouve, à l’état de revenant sorti de la tombe, que ce grand maigre, planté assez sinistrement sur ses échalas, que nous avons connu vivant, dans sa sécheresse de parchemin et de papyrus et sa face pâle de cheval de l’Apocalypse (qui était une rosse), et auquel il s’est lui-même comparé. […] Des lettres, qu’on écrit dans les négligences de l’intimité et au jet de la plume, sortent plus immédiatement de nous, laissent mieux voir le fond de l’âme, quand on en a, et l’aridité du fond si le fond est aride. […] C’est parce qu’il est, dans tout ce que nous abhorrons le plus, — la haine et la négation des choses religieuses, — un esprit des plus bas, quand Stendhal garde encore, dans cette haine et dans cette négation, une âme élevée… Stendhal, qui est sorti par les années bien plus du xviiie siècle que Mérimée, Stendhal, qui avait été soldat de l’empereur Napoléon, a pour le catholicisme qu’il n’a pas étudié et qu’il ne connaît pas, mais qu’il aurait adoré s’il l’avait connu, un mépris soldatesque mêlé de voltairianisme ; mais dans ce mépris et dans cette haine, Stendhal n’a jamais été un goujat, tandis que Mérimée, sans excuse, en a été un d’expression et de pensée qui aurait répugné à la noblesse fondamentale de l’âme de Stendhal !
Si la fâcheuse idée le prenait de sortir de son bourg et de jouer au bourgeois, on pouvait trouver et l’on trouva souvent qu’il était lourd, maladroit, prétentieux et grotesque ; mais il fallait le voir en sabots, dans sa vigne qu’il émondait, dans sa maison natale, auprès de sa femme qui filait la quenouille, de ses filles qui cuisaient le pain, de ses fils qui attelaient à la charrue, avec un bel orgueil terrien, huit bœufs au lieu de quatre ; il fallait le voir chez lui, parmi ses pairs, vivant en honnête homme, mourant en chrétien résigné. Là il n’était pas ridicule, il était admirable, il sortait du domaine comique, il devenait un acteur du grand drame qu’est la vie d’une nation : il était un bon serviteur de la France. […] Et si, par exemple, vous allez au mois d’août dans les marais salants de la Loire-Inférieure, vous assisterez à un mariage, un seul, en grand costume local, à un vrai mariage de paludier et de paludière, mais qu’on peut dire toujours le même, car les costumes, en nombre limité, jamais renouvelés, servent à toute la paroisse, se prêtent entre voisins et voisines, entre parents ou camarades, et ne sortent des coffres qu’un seul jour d’été, sous les yeux agrandis des badauds qui payent les frais de la noce. […] Je regrette les ailes blanches que le vent soulevait, les châteaux ajourés des Normandes, casques de la douce guerre, les capuchons rouges des Béarnaises, les mouchoirs multicolores noués sur la nuque des Provençales, les coquilles enroulées, les bandeaux transparents qui laissaient deviner la blancheur de leur front, et ces fleurs merveilleuses, marguerites, cyclamens, digitales, pensées, qu’avaient imitées nos grand-mères inconnues quand elles inventaient la coiffe de leur bourg natal, poème féminin, l’un des plus exquis et des plus profonds qui soient sortis du génie anonyme de la foule.
Et cependant, sous cette glace d’un désolant système, quelle tendresse émue dans les vers du poëte, lorsqu’après avoir affermi l’homme par l’indifférence sur le sort futur de ses restes matériels devenus insensibles à la souffrance, il affecte de répondre par le même espoir d’impassibilité à d’autres craintes et à d’autres douleurs ! […] Songeons, pour être justes, en dépit des grossières peintures échappées au chantre délicat du Moineau de Lesbie, que du même foyer est sorti le grand lyrique de Rome, demeuré tel pour le monde moderne. […] Adieu175, réunions aimables de compagnons, qui, sortis ensemble du pays, y retournez également par des chemins divers ! […] il n’est pas à craindre que femme plus belle ait vu la lumière du jour sortir du sein de l’Océan.
Il est attentif à ne pas laisser passer vainement ces plaintes, ces allégresses, ces terreurs, qui sortent tour à tour d’une âme profonde, ces échos fréquents par lesquels elle répond aux grands événements du dehors. […] Le souffle harmonieux y sort comme une plainte vague, abondante ; la plainte monte à chaque stance comme une marée sans étoile sur quelque grève de Bretagne : Quand la nuit n’est pas étoilée, Viens te bercer aux flots des mers ; Comme la mort elle est voilée, Comme la vie ils sont amers. […] Oui, à l’origine, au moment voisin de la fusion du métal, au sortir du baptême de la cloche, l’homme et l’œuvre se ressemblent, la pureté du son répond à celle de l’instrument.
On ne passe point indifféremment sans doute par ces divers systèmes ; on en garde des impressions, des teintes, un pli ; mais enfin l’on en sort quand on a un talent capable de maturité. Ce qui est bon à rappeler, c’est qu’on n’en sort jamais, après tout, qu’avec le fond d’enjeu qu’on y a apporté, je veux dire avec le talent propre et personnel : le reste était déclamation, appareil d’école, attirail facile, à prendre, et que le dernier venu, eût-il moins de talent, portera plus haut en renchérissant sur tous les autres. La plus sûre manière de sortir du raisonnement systématique et de la fougue esthétique est de faire, de s’appliquer à une œuvre particulière ; on y entre avec le système qu’on veut vérifier et illustrer ; mais, si l’on a quelque talent propre, original, ce talent se dégage bientôt à l’œuvre, et, avant la fin, il marche tout seul, il a triomphé.
On peut sortir en toute saison, vivre dehors sans trop pâtir ; les impressions extrêmes ne viennent point émousser les sens ou concentrer la sensibilité ; l’homme n’est point alourdi ni exalté ; pour sentir, il n’a pas besoin de violentes secousses et il n’est pas propre aux grandes émotions. […] Ils les façonnent pourtant, et les différences des peuples européens, tous sortis d’une même souche, le prouvent assez. […] Vous êtes remonté à la source de l’esprit gaulois ; vous y avez vu le grand réservoir primitif d’où tous les courants sortent, et vous avez trouvé que l’eau est la même dans le réservoir et dans les courants.
Le sort nous a réduits à compter nos salaires, Toi des jours, moi des nuits, tous les deux mercenaires ; Mais le pain bien gagné craque mieux sous la dent : Gloire à qui mange libre un sel indépendant ! […] Quand sous le fer trompé César fut abattu, Antoine eut peur en lui d’un reste de vertu ; Fulvie aux triumvirs mendia cette tête ; Octave marchanda ; Lépide, un jour de fête, Ne pouvait refuser ce bouquet au festin ; La courtisane obtint ce plaisir clandestin ; La meute des soldats, qu’un délateur assiste, Sortit de Rome en arme et courut sur la piste. […] Le sort garde-t-il mieux à ses grands favoris ?
Il eut à la défendre aussi dans la séance où neuf membres de la Faculté argumentèrent contre lui : ces soutenances de thèse, autrefois, duraient huit heures et plus ; le nouveau docteur en sortait glorieux parfois, toujours fourbu, souvent malade ; c’étaient des jeux féroces. […] De cette alliance de Benoist et de Sainte-Beuve en son esprit — l’un consolidant l’autre, et celui-ci élargissant celui-là — sortit la thèse sur Marivaux. […] Nous étions sortis de l’École Normale, mes camarades et moi, très admirateurs des grandes constructions d’art littéraire que Taine avait édifiées, mais au fond très décidés à ne point nous mettre au service d’un système, tout préparés par nos maîtres, Fustel de Coulanges, Tournier, Boissier, Lavisse, qui nous avaient donné l’idée des méthodes exactes, à essayer d’adapter à l’histoire littéraire de la France les procédés de la critique ancienne et de l’histoire.
Ce lui fut l’occasion toute naturelle de revoir ses classiques anciens, et de ces études d’homme sortit une traduction de Théocrite et d’Anacréon, dont la savoureuse littéralité fut un régal pour les délicats et mit hors de l’ombre ce nom que d’incessants travaux allaient rendre glorieux. […] Il ne se demande pas alors si un beau vers est une illusion dans l’éternelle illusion et si les images qu’il forme au moyen des mots et de leurs sons rentrent dans le sein de l’éternelle Maïa avant même d’en être sortis. […] On ne sort jamais de soi-même.
Ceux qui ne sortent pas d’eux-mêmes sont tout d’une pièce… M. […] Saint-Marc Girardin est trop ennemi de la fadeur, pour ne pas nous permettre de sortir avec lui des termes d’un éloge continu. […] Pour en sortir, préférez à tous les plaisirs des mœurs régulières et simples, des devoirs et des intérêts de tous les jours.
Il en sort avec fracas des mots graves et sententieux. […] Il falloit donc que les éclats de rire redoublez retentissent dans la bouche du masque, de maniere qu’il en sortit un son désagréable. […] D’un autre côté, Cassiodore dit dans l’épitre cinquante et une du livre premier, que la voix de ceux qui joüent des tragédies, étant fortifiée par les concavitez, rendoit un son tel qu’on avoit peine à croire qu’il pût sortir de la poitrine d’un mortel.
Ils craignent de s’aventurer dans un désert, parce qu’ils ne peuvent pas faire sortir du milieu d’eux un guide, et ils restent ainsi isolés et dépourvus de la force d’ensemble. […] Les générations se succédant les unes aux autres, sans aucune interruption, ils ne voient pas d’instant où une génération puisse sortir, d’elle-même, par ses propres forces, et tout à coup, des liens dont elle est entourée, puisse adopter simultanément d’autres règles que celles qui ont régi les générations précédentes. […] Le dépôt des connaissances humaines est peu à peu sorti du lieu mystérieux où les sages le tenaient caché pour en tirer des trésors qu’ils dispensaient aux peuples dans le temps, et autant que le besoin s’en faisait sentir.
Mais ce nom, comme celui de tant d’autres vaincus du sort, le Temps l’enveloppera bientôt de son ombre et l’arrachera peu à peu à la Renommée. […] Après 1848, il partit pour la Californie, sans dessein arrêté que d’agir encore, et c’est là qu’une idée qui pouvait valoir un empire s’empara de lui et lui fit jouer sur le dé pipé qu’on appelle le sort des armes une vie qu’il y a laissée ! […] Mais c’est un chrétien et non pas un giaour, un chrétien profond, resté tel dans les abîmes de son être, — dans le cours de son sang, — par-delà et par-dessous tous les doutes, toutes les mauvaises pensées, toutes les tentations du xixe siècle ; c’est un chrétien naïf de foi, qui écrit à son frère, avant de mourir comme il convient, disait-il, à un gentilhomme ; « Le curé de Guaymas sort d’ici : c’est un homme intelligent et doux, un homme comme il en faut pour adoucir ce qu’il y a de trop léonin et d’indompté en moi.
Jamais personne n’avait plongé plus avant dans la notion de cette religion domestique dont l’ancien monde était sorti, et c’était là une découverte magnifique de simplicité ! […] Comme ailleurs, comme partout, ennemis entre eux, ils se battirent entre eux, et la royauté des Francs sortit même de ces guerres de Barbares à Barbares. […] Fustel de Coulanges, il est impossible de ne pas conclure que tout, pour nous autres Français, est sorti de l’Empire Romain.
Malgré ses grands défauts, cette œuvre méritait mieux que le sort que lui fit le public, un peu étonné des audaces qu’il y trouvait. […] … Il sortit de son lit en jurant comme un païen et s’approcha de la fenêtre. […] comment allons-nous sortir d’ici ? […] Charles cherchait sa perruque ; on riait de tous côtés ; le scandale était à son comble : il se leva furieux et sortit. […] Pailleron au sortir d’une représentation du Théâtre-Français.
Et je restai longtemps, longtemps sans la comprendre, Et longtemps à pleurer son secret sans l’apprendre, A pleurer de sa mort le mystère inconnu, Le portant tout scellé dans mon cœur ingénu… Et ce cœur, d’avance voué en proie à l’amour, où pas un chant mortel n’éveillait une joie, voilà comme elle nous le peint en son heure d’innocente et muette angoisse : On eût dit, à sentir ses faibles battements, Une montre cachée où s’arrêtait le temps ; On eût dit qu’à plaisir il se retînt de vivre ; Comme un enfant dormeur qui n’ouvre pas son livre, Je ne voulais rien lire à mon sort ; j’attendais, Et tous les jours levés sur moi, je les perdais. […] » Sous la paternelle puissance, Veux-tu reprendre un calme essor, Et dans des parfums d’innocence Laisser épanouir ton sort ?
……………………………………………………… Comme sort du satin une épaule charnue, La lune à l’horizon sort des nuages bruns, Et plus languissamment s’élève large et nue sur ce décor de silence velouté.
La loi suivant laquelle cette force varie en fonction de la distance n’est peut-être pas la loi de Newton, mais c’est une loi analogue ; au lieu de l’exposant −2, nous avons probablement un exposant différent, et c’est de ce changement d’exposant que sort tout la diversité des phénomènes physiques, la variété des qualités et des sensations, tout le monde coloré et sonore qui nous entoure, toute la Nature en un mot. […] Utilité de l’ancienne Physique. — Telle est la seconde phase de l’histoire de la Physique Mathématique et nous n’en sommes pas encore sortis.
La philosophie du xviiie siècle tenait pour maxime que c’était par l’amélioration des rois qu’il fallait commencer l’amélioration du sort des peuples, et j’ai entendu d’Alembert excuser par ce motif les paroles adulatrices de Voltaire au grand Frédéric et à l’impératrice de Russie. […] — Hé, seigneur, dès ce jour, sans sortir de l’Épire, Du matin jusqu’au soir qui vous défend de rire ?
Ses ouvrages eurent le sort de bien d’autres. […] Mon triste sort est votre histoire : Oiseaux !
Enfoncés dans le bourbier de l’Hélicon Anglois, ils en firent sortir des exhalaisons affreuses, dont Pope fut la victime. […] Il ne se contenta pas de faire imprimer un Avis au public, où il attestoit qu’il n’étoit pas sorti de sa maison le jour marqué dans la relation ; il voulut encore, pour se venger de ses ennemis, retoucher la Dunciade & y ajouter de nouveaux traits.
Il n’est rien sorti de ses mains qui ne respire l’amour du vrai & de l’humanité, une philosophie lumineuse, les graces du stile, le bon goût, une grande connoissance du cœur humain. […] Rousseau ne pardonna jamais au jeune poëte de l’avoir éclipsé, & de lui avoir fait sentir à son âge le danger qu’il y a de sortir de sa sphère.
Tous, en effet, ces fourmillants et ces frétillants dans le champ de la pensée, comme ils disent agréablement, procèdent de Jean-Jacques et en sont sortis. […] Ou encore sortant d’un œuf ; — et l’œuf lui-même, d’où sort-il ?
Elle doit sortir le moins possible ; elle ne doit pas deviser avec les jeunes gens. […] Pourtant, il va s’y décider, quand sa mère le sort d’embarras en frappant elle-même le tyran. […] » Il ne saurait guère sortir de là. […] Sors, cadavre vengeur, et parais devant tous. […] Ambroise Thomas n’a pas eu à sortir ses foudres.
La vérité est qu’on ne sort jamais de soi-même. […] Nous en sortirons fous. […] Mais c’est le point d’où tout sort, c’est le principe universel. […] Mais qu’est-ce qui sortira de notre philosophie ? […] Oui, notre langage sort des blés, comme le chant de l’alouette.
Il la regarda par-dessous ses lunettes avec des yeux tout ronds qui lui sortaient de la tête. […] J’aime la Révolution parce que nous en sortons, et j’aime l’ancienne France parce que la Révolution en est sortie. […] Zola fut de ne pouvoir sortir d’une époque qui s’enfonce de plus en plus dans les profondeurs du passé. […] Spuller) qu’il n’est pas sorti du giron catholique pour faire la guerre à l’Église. […] Ingres, avec un palmier qui semble sortir de la tête du prince des apôtres.
on en sort ébloui, assourdi ; les sens défaillent sous cette inondation de magnificences ; mais en rentrant chez soi, on se demande ce qu’on a appris, ce qu’on a senti, si véritablement on a senti quelque chose. […] Des lords anglais qui sortent d’une guerre acharnée contre la démocratie française doivent entrer avec zèle dans cette commémoration de leurs aïeux. […] À son seul nom, les voilà qui apparaissent en foule ; qui ne les voit sortir de tous les coins de sa mémoire ? […] Il n’y a pas jusqu’au major Dalgetty, tueur de profession, sorti de l’atroce guerre de Trente ans, dont il ne couvre l’odieux sous le ridicule. […] La perce-neige, puis la violette, — sortaient du sol, humides de pluie tiède, — et leur haleine se mêlait aux fraîches senteurs — du gazon, comme la voix à l’instrument.
Jonas, sorti en cachette de sa chambre, a tué en trahison son ennemi, et croit dorénavant respirer en paix ; mais le souvenir du meurtre, comme un poison, désorganise insensiblement son esprit. […] Il ressent par sympathie le mouvement de la voiture ; elle l’emporte avec elle ; il entend le galop des chevaux dans sa cervelle, et part en lançant cette ode, qui semble sortir de la trompette du conducteur : En avant sous l’obscurité qui s’épaissit ! […] Sans sortir du coin du feu ou de l’omnibus, nous voilà tremblants, les yeux pleins de larmes ou secoués par les accès d’un rire inextinguible. […] For the night-wind has a dismal trick of wandering round and round a building of that sort, and moaning as it goes ; and of trying, with its unseen hand, the windows and the doors ; and seeking out some crevices by which to enter. […] But, that it was a good thing for that same paved yard to have such a delicate little figure flitting through it ; that it passed like a smile from the grimy old houses, and the worn flag-stones, and left them duller, darker, sterner than before ; there is no sort of doubt.
Il vit grâce à l’air ambiant, il prend des idées qui volent autour de lui ; jamais une idée ne lui sort directement du cerveau. […] ce ne sera pas commode d’en sortir ! […] tu ne sortiras pas. […] Laisse-moi sortir ! […] Tu ne sortiras pas !
Un homme entra, marchanda un livre, le marchanda longtemps, sortit, rentra, le marchanda encore. […] À un entracte je sors. […] Nous sortons, nous allons au hasard dans Paris ; enfin, fatigués, nous nous attablons à une table de café. […] La porte s’entrouvre au bout de quelque temps, et il en sort une tête de boucher, le brûle-gueule à la bouche : une tête où le belluaire se mêle au fossoyeur. […] Je suis sorti de là, rasséréné, délivré de l’horrible pensée qu’elle avait eu l’avant-goût de la mort, la terreur de son approche.
Il me dit qu’il lui faut un certain courage pour sortir dans la rue, suivi de ses cinq enfants, qu’on s’étonne, qu’on rit, qu’on les compte tout haut, derrière lui. […] Pas de chance, Daudet, l’ami qui m’apportait, tous les deux ou trois jours, tantôt sur le bras d’Ebner, tantôt sur le bras d’Hennique, un peu de vie intellectuelle, est souffrant, et ne peut sortir de sa chambre. […] Elle ne miaulait pas, mais c’étaient des contractions colères de la gueule, comme si, elle en voulait faire sortir de la parole. […] Aujourd’hui, je suis entré dans la tendue, et arrivé à un rejet où une mésange, les pattes brisées, se débattait, en jetant de petits cris de douleur, j’ai rebroussé chemin, et suis sorti du bois. […] Daudet, qui sort tout enthousiasmé de la lecture de la Correspondance de Goethe et de Schiller, me disait : — Ah !
Elle avait coutume de dire qu’une période retranchée d’un ouvrage valait un louis d’or, et un mot vingt sous : cette parole a toute valeur dans sa bouche, si l’on songe aux romans en dix volumes dont il fallait avant tout sortir. […] La Princesse de Montpensier, la Princesse de Clèves, la Comtesse de Tende, ne sortent pas de ces règnes, dont les vices et les crimes ont trop éclipsé peut-être à nos yeux la spirituelle culture. […] Ils rencontrent à l’improviste sur le bord de la mer des princesses infortunées, étendues et comme sans vie, qui sortent du naufrage en habits magnifiques, et qui ne rouvrent languissamment les yeux que pour leur donner de l’amour. […] Ainsi je ne vous répondrai qu’en vous disant que M. le comte de Saint-Paul sort de céans, et que nous avons parlé de vous, une heure durant, comme vous savez que j’en sais parler. […] Tout concorde jusqu’au bout et tout s’achève : Mme de Sévigné écrit à Mme de Guitaud, le 3 juin 1693, deux ou trois jours après le jour funeste, et déplore la mort de cette amie de quarante ans : « … Ses infirmités, depuis deux ans, étoient devenues extrêmes ; je la défendois toujours, car on disoit qu’elle étoit folle de ne vouloir point sortir.
Tout ce que l’oreille entend, tout ce que l’œil contemple sur ce superbe théâtre n’existe que par une pensée de la tête puissante qui fit sortir d’un marais tant de monuments pompeux. […] Qui pourrait croire qu’un tel être ait pu sortir dans cet état des mains du Créateur ? […] Dès que vous sortez du règne insensible, vous trouvez le décret de la mort violente écrit sur les frontières mêmes de la vie. […] On dirait que, comme certaines fontaines de son pays qui pétrifient en un moment ce qu’on jette dans leur bassin, il a le don de pétrifier en un instant ce qui tombe dans sa pensée, tant ce qui en sort est moulé sur nature, revêtu d’une surface impérissable, immortelle. […] Il les portait toutes sur son beau visage d’inspiré, d’où semblait sortir d’un recueillement sacré un perpétuel oracle.
Ce n’est pas d’un raisonnement, mais de tout l’ensemble des sciences modernes que sort cet immense résultat : il n’y a pas de surnaturel. […] C’est le sort de tous ceux qui combattent les préjugés d’être oubliés, sitôt que le préjugé n’est plus. […] Que si l’on pouvait craindre que l’humanité, ayant épuisé ses réserves, n’éprouvât un jour le sort de chaque nation en particulier et ne fût condamnée à la décadence, je répondrai qu’avant cette époque l’humanité sera sans doute devenue plus forte que toutes les causes destructives. […] Le bon sens est partiel ; il n’envisage son opinion que par le dedans et n’en sort jamais pour la juger du dehors. […] Elle le fait sortir de ses gonds, et, s’il n’est très intimement philosophe, il ne peut s’empêcher de concevoir quelque sentiment d’humeur contre ceux qui abusent ainsi de leur privilège contre sa délicate et faible voix.
Les idées sortent des livres, s’animent, courent les rues. […] Mais, sans sortir de la littérature pure, il est un genre qui a souvent pâti de l’humeur intolérante des hommes au pouvoir. […] Il s’écria, en s’adressant à l’auteur, comme si l’auteur eût été présent : « Sortez de mon Empire, si mes lois ne vous conviennent pas. » Et, quant au malheureux discours, voici ce qu’en dit Chateaubriand : « M. […] Tacite devient un ennemi personnel des Napoléon : Labiénus sort du tombeau pour faire la leçon au neveu de César, ressuscité maître de Paris. […] Lorsqu’un de nos frères, sorti depuis quelques mois du collège, reparaissait en uniforme de housard et le bras en écharpe, nous rougissions de nos livres et nous les jetions à la tête des maîtres.
De la sorte, l’enfant sortira du collège ignorant les institutions du pays où il doit vivre ; il ne saura pas ce que sont les Parlements ou les États généraux ; mais en revanche il pourra expliquer ce qu’étaient les éphores et les tribuns, raconter dans le plus grand détail ce qu’ont fait les Gracques ou César. […] Tous ces héros futurs en sont-ils sortis ; adieu tribune, éloquence, liberté ! […] Vous avez là sous une forme plaisante l’image de ce qui se passe dans ces jeunes esprits, quand, au sortir du collège, ils se trouvent aux prises avec la réalité. […] A plus forte raison en est-il ainsi pour une Compagnie, où l’on entre déjà mûr et d’où l’on ne sort que par la mort. […] Ce sont en général de bonnes petites Académies modestes et discrètes, qui, comme les honnêtes filles, ne font pas parler d’elles ; mais il leur arrive de sortir de l’ombre par un coup d’éclat.
Le sort et la défection d’Henri IV, ce dupeur de Dieu et des hommes, avaient donné la victoire au parti de l’Église romaine. […] Ainsi, quand vous voyez M. le Duc passer souvent des heures entières avec moi, vous seriez étonné, si vous étiez présent, de voir que souvent il en sort sans que j’aie dit quatre paroles : mais peu à peu je le mets en humeur de causer, et il sort de chez moi encore plus satisfait de lui que de moi. » Mme de Maintenon avait triomphé de sa rivale ; Mme de Montespan était reléguée loin de la cour, dans un de ces splendides oublis qui sont le supplice des favorites-mères. […] Il sortit de la chambre de Boileau pour écrire le plan et les scènes d’Esther. […] …………………………………………………… …………………………………………………… Cependant, mon amour pour notre nation A rempli ce palais de filles de Sion, Jeunes et tendres fleurs par le sort agitées, Sous un ciel étranger comme moi transplantées. […] Son génie, transformé par sa piété, ne sort plus de son imagination, mais de son âme.
Darwin, corroborant la Bible, n’a fait qu’au sixième jour sortir des limbes le couple humain. […] Les succès s’élaborent dans la rue ; la gloire sort des cénacles. […] Quand l’enfant, vers six ou sept ans, sort des mains de la femme, l’homme est fait. […] Il devient à moitié fou ; la terre s’ouvre devant lui et il voit sortir de la fente des flammes et des diables. […] Il n’a même pas besoin de sortir et de hochéner sa queue hiéroglyphique ; — d’écrire, encore moins.