Elle tient à ce que nous nous servons de l’espace pour mesurer et symboliser le temps.
Mme de Verdelin mérite d’être distinguée entre les diverses dames amies de Rousseau, en ce qu’elle n’était nullement bel esprit ni bas-bleu, ni rien qui en approche70 ; qu’avec un esprit fin elle n’avait nulle prétention à paraître ; qu’elle aimait l’écrivain célèbre pour ses talents et pour son génie sans doute, mais pour lui surtout, pour ses qualités personnelles, non pour sa réputation et sa vogue : elle n’apporta dans cette liaison aucun amour-propre ni ombre de susceptibilité, lui resta activement fidèle tant qu’il le lui permit, et elle ne cessa, elle ne renonça à la douceur de le servir que lorsqu’il n’y eut plus moyen absolument de l’aborder ni de l’obliger ; et alors même elle garda intact son sentiment d’amitié, comme un trésor, hélas ! […] Il ne me faut rien de plus que votre amitié, avec une petite assurance que vous n’êtes pas fâché du détail que je viens de vous faire. » Mettez en regard de cet amant mortifiant et froid un mari jaloux, l’esprit toujours en éveil, qui se sent d’autant mieux servi par sa femme qu’il en est moins aimé, et qui s’en inquiète ; placez entre les deux une âme délicate, sensible, tendre à l’excès, qui elle-même a ses scrupules, ses réserves et ses réticences, qui est toute douloureuse en dedans, et vous aurez idée du petit roman qui se file, se mêle et se démêle, sans se dénouer jamais, dans la vie de Mme de Verdelin. […] Tout ce que je désire comme eux, c’est de ne pas rompre. » Ainsi éprouvée et ne luttant plus, se sentant née pour la peine et s’y résignant, elle faisait à Rousseau des offres de service si vrais, si évidemment sincères, et d’un ton si doux, qu’il finit par en être persuadé et touché, et par lui accorder cette préférence qu’elle réclamait, qu’elle implorait en termes si soumis : « Vous êtes persuadé de mon amitié, mon voisin ; vous me permettez d’éprouver la vôtre, voilà la preuve que je vous demanderais : tout ce qui vous connaît a le désir de vous servir et de vous être utile ; peu y trouveraient autant de plaisir que moi : je voudrais donc que vous me fournissiez quelque occasion d’avoir du plaisir ; je voudrais que vous disposassiez de mon temps, de mes soins et de tout ce que j’ai, comme d’un bien à vous ; que ce qui vous manque là-bas, vous m’indiquassiez un moyen de vous le faire parvenir d’ici, où on trouve tout ; je voudrais que vous me traitassiez comme votre sœur : voilà comme je désire être avec vous ; c’est ainsi que je vous suis attachée, en y ajoutant la confiance et la vénération qu’on a pour le père le plus chéri. » C’est sur cette offre confiante et où elle avait mis toute son âme, que Rousseau ému lui répondait, en regrettant pour elle qu’elle eût été obligée de rester plus longtemps qu’elle n’avait compté à Paris (27 mars 1763) : « Une ville où l’amitié ne résiste ni à l’adversité ni à l’absence ne saurait plaire à votre cœur. […] Du moins elle lui resta inviolablement fidèle et attachée ; la dernière lettre qu’on ait d’elle, à la date du 24 août 1771, nous la montre n’ayant rien perdu de son enthousiasme ni de sa sensibilité : « Je voudrais pouvoir vous donner des preuves de tous ces sentiments, mais je connais si bien les vôtres que, pour vous servir à votre mode, je m’en tiens à vous être inutile… Mais non, j’ose croire que je ne suis pas inutile à votre bonheur : le premier, le seul pour un cœur tel que le vôtre, c’est de savoir qu’il en existe un bien vrai, bien sensible, sur lequel vous pouvez compter à la vie et à la mort ; et vous savez en moi ce cœur. » Elle lui adresse cette dernière lettre d’une terre où elle est, en Brenne, au sortir d’une maladie qui paraît avoir été assez grave : « Actuellement, lui dit-elle en finissant, je suis en pleine convalescence et je n’ai plus que des forces à reprendre. […] Dans sa jeunesse, il avait servi avec distinction dans le régiment d’Auvergne et dans le régiment de Verdelin, et avait perdu un œil d’un coup d’épée.
» Le jardinier ne comprend pas ; le légionnaire renouvelle sa demande avec humeur ; seulement, au lieu d’employer quorsum, il se sert de ubi, se rappelant sans doute quelles sont à cet égard les habitudes du langage populaire : Ergo igitur œgre subjiciens miles : ubi, inquit, ducis asinum istum ? […] Permettez-moi de vous en expliquer la cause : c’est qu’il a existé, il y a plus de dix siècles, une langue qui, née du latin corrompu, a servi de type commun à ces langages. […] Cette classification naturelle, qui répond à des diver-silés fondamentales, et que Génin a eu la légèreté de railler, a servi de base, quinze ans plus tard, aux travaux si précis et si solides de M. […] Car, en beaucoup de cas, les mots ne dérivent que médiatement du latin, et il a existé un mot qu’on peut appeler bas-latin et qui sert d’intermédiaire. […] Dans ce système, dont il a été le principal défenseur (je me sers de l’exposition qu’en a donnée M.
Pétrarque reçut le jour à Arezzo, petite ville de Toscane, qui servait de refuge aux exilés. […] Ces Mécènes ecclésiastiques ou laïques rivalisaient alors, en Italie, de patronage pour les grands talents susceptibles de servir leur propre gloire ; le palais du cardinal Colonna était la cour du génie italien. […] » XIII Redoutant de retomber dans les charmes de son idole, mécontent des papes et de leur cour, qui semblait le négliger dans sa captivité politique et le reléguer dans sa vaine poésie, il prit le parti de fuir un monde qui ne lui offrait que le désespoir dans l’amour, l’ingratitude dans l’ambition ; il se souvenait d’un site à la fois sauvage et délicieux, où l’ombre des forêts, le murmure des eaux courantes, la fraîcheur des étés, la tiédeur des hivers, lui avaient autrefois servi d’abri contre les tumultes de son âme ; il résolut d’y fixer pour jamais sa vie. […] « Cette couronne, écrit-il lui-même dans son âge refroidi, ne m’a rendu ni plus poète, ni plus savant, ni plus éloquent ; elle n’a servi qu’à irriter la jalousie contre moi et à me priver du repos dont je jouissais ; ma vie, depuis ce temps, n’a été qu’un combat ; toutes les langues, toutes les plumes, se sont aiguisées contre moi, mes amis sont devenus mes ennemis ! […] Dans un tel état de choses, les facultés de ses grands hommes ne servent qu’à les torturer davantage par le spectacle de l’impuissance de leurs destinées ; de là des rêves, seule consolation des imaginations héroïques emprisonnées dans l’impossible.
Sa famille était noble ; son père servait le duc Hercule d’Este dans l’administration et dans la magistrature ; ses fonctions l’appelèrent à Ferrare, où il finit ses jours dans la faveur du prince. […] Il ne négligeait pas cependant les fonctions plus graves qu’il remplissait comme administrateur à Ferrare ou dans les provinces ; c’était un de ces esprits multiples, mais précis, qui disposent à volonté de leurs facultés diverses, et qui savent tantôt se servir de leur imagination, tantôt la dompter pour la réduire à son rôle dans la vie : le charme, l’ornement ou l’amusement de l’existence. […] Cet excellent homme adorait sa nièce, et surtout sa petite-nièce ; il gouvernait la fortune et servait tout à la fois de père spirituel et de père temporel à la maison. […] Il nous fit apercevoir autant de sinets pendants en bas des pages qu’il y en a ordinairement dans un livre d’église à demi couché sur le pupitre à gauche de l’autel. « Voilà vos limites, dit-il avec un sourire grave au professeur, à la comtesse Léna, à Thérésina et à moi ; vous ne les franchirez pas : mais, entre ces limites, vous pourrez vous promener à votre aise à travers les plus riants paysages, les plus merveilleuses aventures et les plus poétiques badinages qui soient jamais sortis de l’imagination d’une créature de Dieu. » Nous promîmes tous de respecter religieusement les sinets sacrés que le canonico avait certainement empruntés à un de ses vieux bréviaires, et nous prîmes séance dans les attitudes diverses du plaisir anticipé de la curiosité et du repos : le chanoine sur un grand fauteuil de chêne noir sculpté, adossé au fond de la grotte, et qu’on avait tiré autrefois de la chapelle pour préparer au bonhomme une sieste commode dans les jours de canicule ; le professeur sur une espèce de chaise de marbre formée par deux piédestaux de nymphes sculptés, dont les statues étaient depuis longtemps couchées à terre, toutes mutilées par leur chute et toutes vernies par l’écume verdâtre de l’eau courante ; la comtesse Léna à demi assise, à demi couchée sur un vieux divan de paille qu’on transportait en été du salon dans la grotte, les pieds sur le torse d’une des nymphes qui lui servait de tabouret, le coude posé sur le bras du canapé, la tête appuyée sur sa main ; sa fille Thérésina à côté d’elle, laissant incliner sa charmante joue d’enfant sur l’épaule demi-nue de sa mère ; moi couché aux pieds des deux femmes, à l’ouverture de la grotte, sur le gazon jauni par le soleil, le bras passé autour du cou de la seconde nymphe et le front élevé vers le professeur, pour que ni parole, ni physionomie, ni geste, n’échappassent à mon application. […] Elle fit plus ; triomphant de l’amour qu’elle ressentait pour l’ingrat duc d’Albanie, Olinde servit l’amour ambitieux qu’il avait conçu pour la princesse.
— Non, non, faisait-il avec bonté, ne crains rien, mon enfant ; tu ne pourrais réellement pas servir. […] À trois heures, la tante nous servit les küchlen à la cannelle ; nous y mordions ensemble, en riant comme des bienheureux, et la tante quelquefois s’écriait : « Allons, allons, est-ce qu’on ne dirait pas de véritables enfants ? […] mais ils ne l’auront pas tout de même ; leurs méchancetés ne serviront à rien : ce soir, Joseph sera déjà dans la montagne, en route pour la Suisse. » M. […] Au lieu de tous ces cris et de tous ces reproches qui ne servent à rien, vous feriez mieux de consoler et de soutenir Joseph. […] XII Voilà ce roman, vrai comme la nature ; ce roman photographique, si j’ose me servir de cette expression.
Je vois le joli garçon frisé et leste qui nous servait. […] * * * — Idée d’une insertion dans les petites affiches à propos d’un dîneur qui n’est plus amusant : « À céder un parasite qui a servi. » 28 mai Notre pièce des Hommes de lettres va être finie — des châteaux en Espagne — et nous nous disons que, si elle nous rapportait de l’argent, beaucoup d’argent, nous nous amuserions à blaguer cet argent, à le fouler aux pieds, à en rire, à en faire abus, à le jeter et à le faire rouler dans l’absurde. […] Là, le vieux père Maire, servait lui-même en personne, et dans de la vraie argenterie, aux gens dont il estimait le goût culinaire, servait un haricot de mouton aux morilles, un macaroni aux truffes inénarrable : le tout arrosé de plusieurs bouteilles de ces jolis petits bourgognes, venant de la cave du roi Louis-Philippe, dont il avait acheté la cave presque tout entière. […] Une servante nous sert à dîner à Lamarche, une servante dont les deux rigides bouts de seins ont usé l’indienne de son casaquin, et font deux petits ronds à claire-voie dans la trame effiloquée.
VI Qu’il nous suffise de savoir qu’Alighieri, qu’on nommait déjà familièrement Dante, servit dans la cavalerie florentine contre les Guelfes de la petite ville toscane d’Arezzo, et qu’il se montra vaillant soldat avant de se montrer politique et poète ; bien différent en cela d’Horace, jetant son bouclier à Philippes, et de Virgile, fuyant, un chalumeau à la main, sous les hêtres, pendant que la guerre civile déchire sa patrie. […] VIII Dante ne trouvait donc rien d’épique autour de lui dans l’histoire d’Italie qui pût servir de texte à son imagination ; mais le monde théologique était plein de dogmes nouveaux, de foi savante ou de foi populaire, de croyances surnaturelles, de vérités morales ou de fantômes imaginaires, flottant pêle-mêle dans le vide de l’esprit humain, comme les figures tronquées des rêves au moment d’un réveil. […] La lyre, pour nous servir de l’expression antique, n’est pas une tenaille pour torturer nos adversaires, elle n’est pas une claie pour traîner des cadavres aux gémonies ; il faut laisser cela à faire au licteur, ce n’est pas œuvre de poète. […] « Nous sommes tous des serviteurs inutiles », écrit-il en sentant déjà défaillir sa vie, « mais nous servons un maître souverainement économe et qui ne laisse rien perdre, pas plus une goutte de nos sueurs qu’une goutte de ses rosées. […] Je sais que j’ai une femme jeune et bien aimée, une charmante enfant, d’excellents frères, une seconde mère, beaucoup d’amis, une carrière honorable, des travaux conduits précisément au point où ils pouvaient servir de fondement à un ouvrage longtemps rêvé.
Aussi n’est-ce point son histoire que je donne aujourd’hui mais des notes pour servir à l’histoire de ses commencements. […] Aussi m’embarquai-je un beau jour avec une flopée de mes concitoyens pour aller servir ma patrie dans les Afriques. […] Elles servent plus tard singulièrement à clarifier l’histoire littéraire. […] Encore là, concrétion et affinement du symbole qui sert de thème au conte de Ligeia. […] et ce luxe, résultat d’habitudes invétérées, et encombrement d’inutilités, à quoi sert-il ?
Bientôt cette curiosité raffinée et délicate le conduisit aux médailles. « Il y a une parenté, dit-il, entre elles et la poésie », car elles servent à commenter les anciens auteurs ; telle effigie des Grâces rend visible un vers d’Horace. […] Lorsqu’il fut dans les emplois, son intégrité resta entière ; il servit les gens, souvent sans les connaître, toujours gratuitement, refusant les présents même déguisés. […] Ainsi je recommande fort particulièrement mes méditations à toutes les familles bien réglées, qui chaque matin réservent une heure au déjeuner de thé, pain et beurre, les engageant, pour leur bien, à se faire servir ponctuellement cette feuille, comme un appendice des cuillers et du plateau926. » Vous voyez ici un demi-sourire ; une petite ironie est venue tempérer l’idée sérieuse ; c’est l’accent d’un homme poli qui au premier signe d’ennui tourne, s’égaye, même à ses dépens, finement, et veut plaire. […] Partout de justes oppositions qui ne servent qu’à la clarté et ne sont point trop prolongées ; d’heureuses expressions aisément trouvées qui donnent aux choses un tour ingénieux et nouveau ; des périodes harmonieuses où les sons coulent les uns dans les autres avec la diversité et la douceur d’un ruisseau calme ; une veine féconde d’inventions et d’images où luit la plus aimable ironie. […] Nous ne trouvâmes rien de remarquable dans l’œil, sinon que les musculi amatorii, ou, comme on peut traduire, les muscles qui lorgnent, étaient fort diminués et altérés par l’usage, tandis que l’élévateur, c’est-à-dire le muscle qui tourne l’œil vers le ciel, ne paraissait pas avoir du tout servi. » Ces détails anatomiques, qui nous dégoûteraient, amusent un esprit positif ; la crudité n’est pour lui que de l’exactitude ; habitué aux images précises, il ne trouve point de mauvaise odeur dans le style médical.
Il y défendait le gouvernement du « juste-milieu » et y servait la bourgeoisie qu’il haïssait instinctivement. […] Il ne se fit pas uniquement catholique pour orner et sauver son âme, mais pour servir le plus d’âmes possible, propager le bienfait qu’il avait reçu, et leur donner la foi qui seule assure à tous la vie heureuse ou supportable, même en ce monde-ci, en inspirant la bonté aux puissants autant que la patience aux déshérités. […] Pour servir ses ambitions, la bourgeoisie a ôté Dieu du coeur des souffrants ; puis elle s’étonne qu’un jour les souffrants se révoltent contre elle. […] La foi n’est pas faite pour nous servir de règle uniquement dans la conduite privée : nul ordre d’action ne demeure en dehors d’elle. […] , vous ne le surprendrez jamais, je le répète, à se servir contre ses victimes d’autre chose que leurs paroles et leurs actes publics, d’autre chose que ce qui le blesse et l’outrage, lui, dans sa foi.
Au fond j’ai beaucoup lu, avant d’être homme de lettres, et très peu, depuis que je le suis, ne lisant guère que les livres documentaires, qui peuvent me servir pour mes travaux, et je me demande, si mon originalité ne vient pas un peu de cela, qui ne me fait pas du tout un réminiscent. — Je suis bien plus un méditant qu’un liseur. […] Aujourd’hui il m’a invité à dîner chez lui, et m’a servi comme curiosité : Yvette Guilbert. […] Samedi 29 juillet Soudain, au milieu du silence de nous tous, Léon, jetant en bas d’une chaise ses pieds, sur laquelle ils sont posés, s’écrit, se parlant à lui-même, dans un mouvement de révolte intérieure : « Je n’ai qu’un regret, je me trouve emberlingué de trop de philosophie… À quoi, ça sert ? […] Aujourd’hui, il me reste comme un souvenir de rêve de cette visite : le Flammarion avec sa tête de saint Jean-Baptiste, qu’offre dans un plat d’argent, la peinture italienne à Hérodiade, le monsieur qui a découvert la dernière planète, à la chevelure qui pourrait servir d’enseigne à la pommade du Lion, un jeune homme bancroche, qui nous est présenté par Flammarion, comme l’humain de toute la terre ayant la vue la plus longue. […] Maintenant il aurait l’idée — je trouve l’idée malheureuse — de faire graver en double, et bourgeoisement par un buriniste, les dessins de Jeanniot, qui auraient servi à ses eaux-fortes.
Conséquent dans ses doctrines, il a réclamé pour tous l’usage et la protection des lois ; il entendait que chacun pût librement exprimer son amour ou sa haine, et que la faction même qui avait voulu anéantir la presse s’en servit pour sa défense.
Vous est-il arrivé de vous asseoir à une table délicatement servie, où les mets rares et excitants, les gibiers, les truffes, les sauces veloutées et légères s’arrosent des grands crus de Bourgogne, de Champagne et du Rhin !
L’Eloge lui en tiendra lieu, & nous ne craignons pas d’ajouter que ce monument historique, gravé dans la mémoire des Lorrains, est encore plus flatteur, & ne sera pas moins durable que le marbre & l’airain, pour nous servir de l’expression d’Horace.
Laus de Boissy a fait huit ou dix Comedies, dont aucune n’a été jugée digne des honneurs de la représentation ; des Drames, des Proverbes, des Opuscules, des Opéra-comiques, des Contes moraux, & d’autres Ouvrages qui n’eussent jamais vu le jour, s’il ne les eût fait imprimer à ses frais, & qui n’ont servi qu’à le couvrir de ridicule aux yeux de tous ceux qui ont eu la patiente curiosité de les parcourir.
Le sacrifice d’Abraham, par exemple, est aussi touchant, et d’un goût plus simple que celui d’Iphigénie : il n’y a là ni soldats, ni groupe, ni tumulte, ni ce mouvement qui sert à distraire de la scène.
Ils ne vous donneront pas le génie, parce qu’on l’apporte en naissant ; mais ils vous remueront, ils élèveront votre esprit, ils dégourdiront un peu votre imagination ; vous y trouverez des idées et vous vous en servirez.
A quoi donc sert le critique ?
Le moment où vint Molière servit tout à fait cette liberté qu’il eut et qu’il se donna. […] Les poètes dont nous parlons transposent, utilisent, si l’on peut se servir de ce mot, certains morceaux une fois faits ; ainsi, Don Garcie de Navarre n’ayant pas eu de succès, des tirades entières ont passé de ce prince jaloux au Misanthrope et ailleurs. […] Je me servis pour cela de toutes les forces de mon esprit ; j’appelai à mon secours tout ce qui pouvoit contribuer à ma consolation. […] N’est-ce pas là le dernier point de folie, et n’admirez-vous pas que tout ce que j’ai de raison ne sert qu’à me faire connoître ma foiblesse, sans en pouvoir triompher12 ? […] Notre jeune siècle, en recevant cette gloire qu’il n’a jamais révoquée en doute, s’en est surtout servi quelque temps comme d’un auxiliaire, comme d’une arme de défense ou de renversement.
Telles sont par exemple les grandes mâchoires dont certains insectes se servent exclusivement pour ouvrir leurs cocons ou l’extrémité cornée du bec des jeunes oiseaux, qui les aide à briser leur œuf pour en sortir. […] Des exemples analogues se présentent à l’état sauvage : ainsi la touffe de poils pectoraux du Dindon mâle ne saurait ni lui être de quelque avantage, ni lui servir d’ornement. […] Je n’en citerai qu’un, non qu’il soit des plus remarquables, mais parce qu’il servira de plus à montrer comment peut s’effectuer par degrés la séparation des sexes dans les plantes dont nous allons avoir à parler. […] C’est également dans l’eau douce que nous trouvons quelques-unes des formes les plus anormales qu’on connaisse dans le monde : telles sont l’Ornithorynque et le Lépidosirène, sortes de fossiles vivants qui servent, jusqu’à un certain point, de liens de transition entre des ordres zoologiques aujourd’hui profondément séparés dans l’échelle naturelle. […] Or, plus la diversité organique est grande et plus les termes extrêmes de l’échelle des êtres vivants sont éloignés, plus les degrés de la série des êtres qui vivent aux dépens les uns des autres sont nombreux et plus, par conséquent, la quantité de vie possible s’accroît, puisque c’est une loi presque générale que les êtres d’organisation inférieure servent de proie aux êtres d’organisation supérieure.
Ainsi, à les bien considérer, les Splendeurs et Misères des Courtisanes peuvent nous servir, tout comme un autre livre médiocre, à inaugurer un système d’indulgence envers le roman-feuilleton. […] La lutte s’engage : tour à tour vainqueurs et vaincus les trois amants servent de jouets à la jeune enthousiaste et M. de Canalis éprouve largement ce que c’est qu’une vengeance féminine. […] Dans de pareilles mœurs intellectuelles, il y avait peut-être de la grossièreté et comme un dernier vestige de la barbarie mourante ; à la grossièreté la force sert quelquefois de noyau, et ici c’était le cas. […] Heine seul appartient de nous satisfaire, en octroyant le plus tôt possible une édition française du Conte d’hiver, digne de servir de pendant à son Allemagne et à ses Récits de voyages. […] Sainte-Beuve l’avait exorcisé pour servir de patriarche aux générations romantiques.
Les circonstances servirent admirablement Fontenelle. […] Sous prétexte de donner une suite naturelle aux raisonnements, elle ne sert qu’à les interrompre à tout moment, et à les faire languir. […] Le prince qu’il a servi monte sur le trône. […] Ce sont des mémoires pour ne pas servir à l’histoire de son temps. […] C’est plaider pour Dieu en prenant à l’inverse les arguments mêmes dont on s’est servi pour lui faire procès.
Les adversaires et les critiques qui se servent volontiers d’une supériorité pour en combattre une autre dans tout grand individu trop complet à leurs yeux33, qui prennent acte du talent déjà prouvé contre le talent nouveau auquel il prétend, rendent sur ce point à Mme de Staël un hommage intéressé et quelque peu perfide, égal, quoi qu’il en soit, à celui de ses admirateurs. […] Il n’y a sur cette terre que des commencements,… et cette pensée si applicable à ses propres ouvrages : « Oui, il a raison le livre qui donne seulement un jour de distraction à la douleur ; il sert aux meilleurs des hommes. » Mais ce genre d’inspiration sentimentale, ce mystérieux reflet sorti des profondeurs du cœur, éclaire tout entier le livre de l’Influence des Passions, et y répand un charme indéfinissable qui, pour certaines natures douloureuses, et à un certain âge de la vie, n’est surpassé par l’impression d’aucune autre lecture, ni par la mélancolie d’Ossian, ni par celle d’Oberman. […] — d’autre part, ceux dont on ne doit pas moins récuser le témoignage à son sujet, ce sont les Conventionnels, plus ou moins ardents, qui, favorables eux-mêmes au 18 fructidor, puis adhérents au 18 brumaire, ont finalement servi l’Empire : ils n’ont jamais rencontré cette femme insoumise que dans des rangs opposés. […] Je reçus dix billets d’excuses à cinq heures ; je reçus assez bien le premier, le second ; mais à mesure que ces billets se succédaient, je commençai à me troubler. » L’homme qu’elle avait si généreusement servi s’éloigna d’elle alors de ce ton parfaitement convenable avec lequel on s’excuse de ne pouvoir dîner. […] Un écrit n’est suffisamment moral, à son gré, que lorsqu’il sert par quelque endroit au perfectionnement de l’âme.
Qu’il lui serve d’introduction auprès du lecteur. […] Je crois que c’est bien de cette façon qu’il faut comprendre l’artifice dont s’est servi Laclos. […] Laclos se serait donc servi d’originaux pour son roman. […] Il vécut, si l’on peut dire, dans un continuel état d’esprit poétique, et sa prose lui servit à exprimer cet état aussi bien et même peut-être mieux que les vers. […] Il s’agit du poème intitulé Portail et qui sert comme de frontispice à la Comédie de la Mort, de Gautier.
Ainsi, ayant servi l’espèce, tu t’augmentes et tu montes plus haut. […] Oui, ça sert d’os à moelle à quelques-uns. […] À quoi me servirait-elle ? […] Voici justement un aérolithe qui passe et qui nous servira de véhicule. […] Des laquais, vêtus de livrées couleur feu, servent, desservent, versent à boire.
Que de valets servis par leurs camarades, et peut-être demain par leurs maîtres ! […] Les romans de Prévost lui-même ou les comédies de la Chaussée : La Fausse Antipathie, 1733, Le Préjugé à la mode, 1735, Mélanide, La Gouvernante, en peuvent ici servir d’assez bons exemples ! […] C’est cependant ce qui arrive, et c’est comme si l’on disait que l’observation psychologique et morale, qui depuis cent cinquante ans avait servi de base ou de support à l’idéal classique, se change en observation sociale. […] On pouvait rire un moment du libelle impuissant de l’avocat Moreau : Mémoire pour servir à l’histoire des Cacouacs, 1757, sans discerner d’ailleurs très nettement si l’on y riait de l’auteur ou de ceux qu’il attaquait. […] Nisard, Les Ennemis de Voltaire]. — Voltaire compose entre temps ses Mémoires pour servir à l’histoire de sa vie [Cf. édition Beuchot, t.
Avec des qualités aussi propres à attirer le respect des hommes, Descartes eut des foiblesses ; mais la Philosophie chez lui n’employa pas ses ressources à les déguiser ou à les justifier ; au contraire, elle servit à l’en guérir, & à élever son ame au dessus de ce cercle de miseres, autour duquel on voit ramper tant de ses prétendus imitateurs.
Le critique suisse salue cet effort de classement des émotions, inscrit dans le sillage de Spencer et de Wundt, qui a contribué à faire passer l’étude des phénomènes de conscience du « dogmatisme » à « l’observation » ; il signale en outre que « l’auteur ne se sert que modérément de la doctrine de l’évolution, et s’abstient de toute métaphysique ».
De plus, il y a dans le nom de Dieu quelque chose de superbe, qui sert à donner au style une certaine emphase merveilleuse, en sorte que l’écrivain le plus religieux est presque toujours le plus éloquent.
Il s’en sert comme de signes pour remonter inductivement à une réalité psychique plus profonde et plus masquée. […] Mais comme méthode, dont il faut se servir le plus longtemps qu’on peut, le déterminisme est inattaquable. […] Et pour le pénétrer il se sert de tout ce qui peut les avoir accompagnés, ces mots, comme signes involontaires. […] Mais ceux que faisait couramment Odette l’étaient moins et servaient à empêcher des découvertes qui auraient pu lui créer avec les uns ou les autres, de terribles difficultés. […] C’est parce que rien ne peut nous servir à mieux souligner le genre de résultats, la sorte de constatations auxquels il parvient en appliquant son merveilleux et cruel soupçon aux sentiments.
Ils l’ont aimée, je le veux bien, le jour où elle les a incommodés, tout comme le jour où elle les a servis. […] Le petit champ n’a rien à craindre du parc auquel il confine, et la pierre qui lui sert de borne suffit pour arrêter même le souverain. […] dit Dupin, on ne se sert pas de l’eau du baptême pour les usages domestiques. […] Je quittais ma chaire pour des fonctions où je pouvais plus utilement servir les lettres et l’Université. […] Une même méthode, servie par les mêmes moyens de vérification, produit partout les mêmes résultats.
Il n’est pas jusqu’à ces convenances tant décriées et tant moquées qui n’aient servi à l’œuvre commune. […] Néanmoins on peut se servir de ce genre avec originalité. […] Mais toutes les raisons ne servent de rien pour nous donner du plaisir. […] Mæterlinck se sert de procédés sommaires qui affectent une naïveté de primitifs. […] Et ne devons-nous pas plutôt nous applaudir d’avoir de cette façon servi aux fins de la nature ?
dit-il, j’ai eu de la peine à me déshabituer de la plume et de ceux qui s’en servent ! […] C’est le moment ou la vieille servante Julienne dit « la soupe est servie », pour la première fois depuis « le malheur ». […] Dans la vie de cet homme si ignoré, je trouve un fait qui peut servir à prouver l’exquise bonté de son cœur. […] Comparées à ses exubérantes épaules, celles de la comédienne auraient pu servir à un cours d’ostéologie. […] Aucun sujet ne pouvait d’ailleurs mieux servir son auteur.
Un libraire chez qui MmeGoëzman allait fréquemment servit d’intermédiaire et demanda pour elle deux cents louis. […] Le grand-duc de Russie dut aussi la solliciter, et Grimm servit d’intermédiaire. […] Il ressemble (pour lui servir d’autres images) à un automédon grec domptant et asservissant au char de sauvages étalons d’Afrique ou d’Asie. […] Le saint, personnage insignifiant, passif, presque muet, n’est là que pour servir de prétexte à une suite de visions et de tableaux. […] La connaissance du crime et du vice peut être utile à l’intelligence qu’elle développe, mais elle ne sert à rien pour former le cœur.
En faisant de lui un monstre, Shakespeare a vraiment servi sa gloire. […] F. ne servent qu’à souligner ce néant. […] « Depuis plus de sept mille ans qu’il y a… » des imbéciles, les mêmes appâts servent à prendre les goujons et les hommes. […] Les dentelles et les bottes de Barbey d’Aurevilly sont célèbres et ont plus servi que son talent à la célébrité de ses ouvrages. […] Cela lui servit à vendre quelques tableaux.
Il n’y a qu’un mot qui serve. […] Or le hasard sert souvent, mais non pas toujours ; c’est un bienfaiteur essentiellement intermittent. […] Seulement, comme tout pouvoir qui ne serait pas imité, pour me servir des idées mêmes de M. […] J’en suis débarrassé et c’est honorable pour la France. » Autant ce que Napoléon avait pour lui que ce qu’il avait contre servit Bernadotte en cette circonstance. […] Tout, la façon dont il avait été nommé, le fait que Charles XIII vivait encore, la demi-malveillance même de l’empereur, tout servait à point le favori du destin Bernadotte.
Je rompis mon épée pour m’en servir à creuser ; mais j’en tirais moins de secours que de mes mains. […] La science exige de qui la veut servir une certaine abnégation… Et l’on me dira : qu’importe ? […] Ne confondez pas toutes choses et ne croyez pas servir la pensée religieuse au détriment de la littérature : vain sacrifice ! […] Nuit, matin, tout était servi sur les mêmes nappes radieuses. […] Pierre Hamp voudrait qu’une hagiographie du travail servît à l’enseignement de la morale.
Comme il était prédestiné d’abord à retentir dans la trompette éclatante de la renommée., puis à servir d’emblème, comme un nouvel Icare, aux poètes orgueilleux et « trébuchés de haut » ! […] » Mais le mot de Dalembert demeure vrai, et l’œuvre de MM. de Goncourt pourrait bien elle-même servir plus tard à le justifier historiquement. […] Un jeune homme est réellement aussi incapable de les trouver tout seul que d’inventer les beautés du texte, et ce sont ces jugements, et presque uniquement eux, qui servent à mesurer son degré de culture littéraire. […] Le papier était bon, la reliure était solide, et il semblait qu’elle dût protéger les feuillets contre toute velléité de les faire servir à des usages médiocres qui ne valaient pas même le léger effort qu’on a dû faire pour les séparer d’elle. […] Mais l’idée utile que nous aurons développée, le fait nouveau que nous aurons éclairci, la vérité qui aura servi, grâce à nous, à l’instruction de la jeunesse studieuse, cela ne mourra point.
Il ne faut pas une grande sagacité pour le deviner : le lecteur a déjà sur les lèvres le nom du livre qui doit servir de modèle aux futurs historiens, le type qui doit servir à juger toutes les œuvres destinées à nous retracer le développement moral et politique des nations : c’est l’Histoire des Girondins. […] À quoi sert cette nouvelle complication ? […] Ou la poésie n’est qu’un pur enfantillage, un passe-temps, un hochet, ou elle doit servir à populariser des idées vraies en même temps que des sentiments généreux. […] Sans cette dentelle, la fleur bleue ne servirait à rien, et Marie de Neubourg serait encore à deviner le nom de son amant. […] Encore moins est-il permis de croire qu’un laquais s’engage par écrit à servir fidèlement son maître.
On ne saurait dire mieux ni plus juste, et l’apparition des ballades du poète peut servir à l’appréciation des aquarelles du peintre. […] Nous nous trouvâmes très honorés qu’un personnage de notre invention ait été jugé digne d’être mis au théâtre et de servir de pivot à un drame de l’auteur d’Henri III et de Christine à Fontainebleau. […] Il croyait que c’était arrivé, pour nous servir de la formule moderne, et bien heureux en art celui qui a cette foi, car il la communique aux autres, et domine son public. […] Les figures elles-mêmes ont des costumes, des draperies, des armes et des accessoires significatifs qui ne pourraient servir à d’autres. […] En 1812, la conscription le prit et il servit quelque temps dans la brigade du génie topographique.
Molière s’en est servi un peu, plus tard, pour George Dandin. […] Je suis bien malheureux de souffrir cette atteinte ; Et que me sert d’aimer comme je fais, hélas ! […] C’est aussi par paresse que je me suis servi de l’Avare de Molière. » Il faut se garder de l’excès des meilleures choses et le patriotisme lui-même peut faire dire parfois des sottises. […] Dans la composition de son personnage du trompeur, Molière a été gêné, servi aussi, mais tout compte fait plus gêné que servi, par la nécessité qu’il fût comique en même temps qu’odieux et il y a peut-être un léger flottement. […] Tout y est, je le reconnais ; mais c’est pour cela que c’est clef à toutes portes et c’est de ces clefs qu’il ne faut pas se servir, parce que ce qui peut tout prouver ne prouve lien.
Il ne croyait pas à la durée de l’empire et il le servait comme un maître qui passe. […] L’enseignement qu’on y donne ne sert à rien ; aussi garde-t-il une noblesse incomparable. […] En vieilles chansons comme en vieille vaisselle la fraude est venue servir la vanité. […] Elle s’use même plus vite, puisqu’elle sert davantage. […] Par ce moyen, il évitait tout péril et servait le prochain sans crainte de nuire à soi-même.
Quant à la science sérieuse et philosophique, qui répond à un besoin de la nature humaine, les bouleversements sociaux ne sauraient l’atteindre, et peut-être la servent-ils en la portant à réfléchir sur elle-même, à se rendre compte de ses titres, à ne plus se contenter de jugement d’habitude sur lequel elle se reposait auparavant.
Je ne doute pas, Monsieur, que cet Ouvrage n'obtienne l'approbation de tous les Connoisseurs : il servira de guide, dans un labyrinthe jusqu'ici impénétrable aux Etrangers.
Or de tous les organes du corps humain, les plus délicats sont ceux qui servent à l’ame spirituelle à faire ses fonctions.
Mais à part ce mérite, partagé par tant de savants d’alors, de déterreurs d’une société finie et de langues mortes, quoi donc pourrait recommander, à l’attention et même à la curiosité, l’existence imperceptiblement domestique ou publique d’hommes perdus dans des études effrayantes sur des vocables latins ou grecs, et dont les travaux, utiles comme le mortier et les pierres qui ont servi à bâtir un monument, ne sont pas plus regardés que ce mortier et ces pierres, quand le monument est debout ?
Quand un livre qui a la prétention de raconter et d’expliquer les cent dernières années qui viennent de s’empreindre si profondément sur l’Europe ne renferme que les connaissances les plus superficielles, et les moins sûres encore dans leur superficialité, et, de plus, quand c’est l’inconséquence, non pas seulement d’une tête faible, mais d’un distrait, qui se sert de ces connaissances pour en tirer de ces jugements sans cesse contredits et abolis les uns par les autres, la Critique peut passer outre avec moins de dédain que de pitié.
L’idée qu’il y aurait moyen de se servir de cet esprit un jour, pour subvenir à des gênes sacrées, dut mouiller à l’instant ses yeux de nobles larmes. […] et il semblera que, trop heureuse qu’on lui trouve des défenseurs, on l’abandonne aux mains qui daignent la servir ! […] Au reste, la raison de Mme Guizot, qui a pied dans le fait même, admet, pressent les cas d’insuffisance et en avertit : « Je le vois plus clairement chaque jour, dit Mme d’Attilly, la jeunesse est de tous les âges de la vie celui que l’enfance nous révèle le moins ; une influence indépendante du caractère la domine avec un empire contre lequel on peut d’avance lui donner des forces, mais sans prévoir de quelle manière elle aura à s’en servir. » Mme Guizot relève en un endroit une assertion de mistress Hannah More sur la nature déjà corrompue des enfants, et elle la combat. […] Je lis dans un morceau d’elle (17 juillet 1810) : Notre flambeau s’allume au feu du sentiment, a dit le poëte de la Métromanie, et je crois bien qu’on peut en effet regarder la sensibilité comme l’aliment de la poésie ; mais c’est lorsqu’elle n’est pas employée à autre chose, et que, tout entière au service du poëte, elle sert à éveiller son imagination, non à l’absorber.
Je dis quel chemin on a fait ; et sans sortir même de ce cercle spécial des thèses soutenues devant la Faculté de médecine, je citerai un exemple qui peut servir de mesure. […] Monsieur Sainte-Beuve, permettez que je vous interrompe et vous prie de ne pas vous servir d’expressions qui ne doivent pas se faire entendre dans une assemblée comme la nôtre. […] Le mot est dans la circulation, et je m’en sers. […] On s’en sert comme d’une chose reçue.
Si parfois le propriétaire les transporte à l’étage inférieur, il ne s’en sert qu’à demi ; des habitudes établies, des intérêts ou des instincts antérieurs et plus forts en restreignent l’usage. […] Ils font des livres qu’on ne lit guère ; on ne dispute plus, on se rit de tout, et l’on persiste dans le matérialisme. » Horace Walpole508 qui en 1765 revient en France et dont le bon sens prévoit le danger, s’étonne de tant d’imprudence : « J’ai dîné aujourd’hui, dit-il, avec une douzaine de savants ; quoique tous les domestiques fussent là pour nous servir, la conversation a été beaucoup plus libre, même sur l’Ancien Testament, que je ne le souffrirais à ma propre table en Angleterre, n’y eût-il pour l’écouter qu’un valet de pied. » On dogmatise partout. « Le rire est aussi démodé que les pantins ou le bilboquet. […] Et je ne parle pas seulement ici des abbés de salon, courtisans domestiques, colporteurs de nouvelles, faiseurs de petits vers, complaisants de boudoir, qui dans une compagnie servent d’écho, et de salon à salon servent de porte-voix ; un écho, un porte-voix ne fait que répéter la phrase, sceptique ou non, qu’on lui jette517.
Victor Hugo, qui a, dit-on, une charmante épouse, des fils de talent, des filles de vertu dans sa famille, voulût accorder leur main aux fils ou aux filles de son héros Jean Valjean, si Jean Valjean, malgré son trésor dont le premier centime était l’argenterie de son évêque ou la pièce de quarante sous du pauvre enfant qui lui avait servi de guide, était de condition égale à la condition d’un honnête homme de génie. […] Ce n’est rien, bien que ce soit aussi vil que contre nature ; il ôte ses souliers pour n’être pas entendu, il s’arme d’un levier de fer bien aiguisé qu’il tire de son sac, pouvant servir au triple usage, dit l’auteur, de forcer la porte de l’armoire où l’on a eu l’imprudence héroïque de serrer sous ses yeux l’argenterie, de percer le sein ou d’assommer le crâne de l’évêque. […] Si la maison ne payait pas, il faudrait en forcer les portes pour loger les dix millions de prolétaires qui n’en ont pas, pour abriter leur famille, car c’est l’impôt payé par le propriétaire de murailles, de portes et de fenêtres, qui sert à salarier le travail du prolétaire, et qui lui permet de payer son loyer sans faire violence à personne. […] Misère qui cloue un infirme sur le matelas d’un hôpital, qui lui fait sentir la répugnance que les infirmités inspirent à ceux qui le servent par salaire ou par charité, et qui lui font implorer contre lui-même une mort qui s’annonce toujours comme une illusion et qui ne vient jamais !
Elle s’y prit ainsi : la blanchisseuse vint de bonne heure, ce qui lui était déjà arrivé plusieurs fois ; et la reine, suivant ce qui avait été convenu, mit la coiffe de cette femme, se chargea d’un paquet de linge, et se couvrant la figure de son manteau, elle sortit du château et entra dans la barque qui sert à passer le loch. […] Tout le secret de la temporisation d’Élisabeth est dans cette impossibilité d’avouer une politique qui la servait, mais qui la déshonorait devant l’Europe. […] Un jeune homme du comté de Derby, nommé Babington, élevé chez le comte de Schrewsbury, où il avait connu la reine pendant qu’elle y était prisonnière, avait résolu de la servir et de la sauver. […] Tu es cependant un bon mime, mais tu es un meilleur serviteur. » Revenant bientôt à cette pensée que sa mort était un martyre, et s’adressant à Bourgoing, son médecin, qui la servait, Melvil, son maître d’hôtel étant retenu aux arrêts, ainsi que Préau, son aumônier : « Bourgoing, dit-elle, n’avez-vous pas entendu le comte de Kent ?
Il n’avait pas le temps d’avoir du goût, et cela, d’ailleurs, lui eût peu servi. […] Voltaire, au nom d’un admirable bon sens, proclame que l’on blasphème Dieu quand on croit servir sa cause en prêchant la haine. […] Que sa folie lui serve d’excuse devant Dieu. […] Ils se servent d’épithètes et d’images, ils ont des alliances de termes et des surprises de rimes, des tours de phrases et des formes de pensée qui sont des réminiscences inconscientes de Victor Hugo.
Toute théologie ne répond au sentiment religieux qu’autant que son Dieu possède la nature et les attributs qui permettent de « le connaître, de l’aimer, de le servir », pour emprunter les mots du catéchisme. […] Si le savant veut en outre expliquer ces phénomènes, en chercher, comme on dit, la cause, il n’y a pour lui qu’une cause intelligible : la succession de deux ou plusieurs phénomènes étant donnée, c’est le phénomène antécédent qui sert de condition aux autres. […] Enfin nous n’aimons pas le mot dont se sert la science contemporaine pour exprimer le résultat de cette révolution qu’elle tente d’opérer dans le domaine entier des connaissances humaines. […] Si l’on persiste à s’en servir pour mieux marquer le progrès scientifique des recherches morales, il importe de distinguer la nécessité morale de la nécessité physique, afin de maintenir la ligne profonde de démarcation qui séparera toujours le monde moral du monde physique.
Dans le monde, il ne faut se servir de l’amour-propre des autres que pour le traverser, afin d’arriver au pays de l’amitié, où, comme dans les montagnes des tropiques, il y a mille nuances de climat à choisir. […] Cela sera plus difficile qu’on ne croit, parce que en Russie on est engoué du français, et que chacun, se croyant capable d’écrire sa langue, refuse de reconnaître la supériorité d’un auteur qui sait s’en servir avec talent. […] Tous les ans d’ailleurs, un ou deux voyages servaient à convaincre l’actif vieillard « qu’il n’appartenait pas encore à la glèbe, que ses ailes n’étaient pas coupées, et que le grand livre de la nature n’était pas encore réduit pour lui à un simple feuillet. » Dans la solitude de son cabinet, quand il y trouvait la solitude, Bonstetten s’occupait continuellement de deux projets que la multitude de ses distractions et le caractère désultoire de ses goûts l’empêchèrent d’exécuter î l’un était d’écrire les mémoires de sa vie, l’autre de mettre en ordre ses papiers.
Mais honte, confusion, humiliation profonde, au misérable qui si longtemps a fui devant son divin maître, et avec une si horrible obstination s’est refusé au bonheur de le servir ! […] Carron) n’ose déclarer encore si je suis appelé à servir l’Église dans le clergé séculier ou régulier, c’est-à-dire dans la Compagnie de Jésus ; mais il pense que, quoi qu’il en soit de cette vocation, je dois me hâter de marcher vers le sacerdoce et de m’approcher de l’autel d’où mes péchés me repoussent, mais où l’incomparable miséricorde du Seigneur m’ordonne de monter. […] La seule manière de me servir véritablement est de ne s’occuper de moi en aucune façon.
On exclut du discours la plupart des mots qui servent à l’érudition spéciale et à l’expérience technique, les expressions trop latines ou trop grecques, les termes propres d’école, de science, de métier, de ménage, tout ce qui sent de trop près une occupation ou profession particulière et n’est pas de mise dans la conversation générale. […] D’après ces caractères du style, on devine ceux de l’esprit auquel il a servi d’organe Deux opérations principales composent le travail de l’intelligence humaine. […] I.) — « Ces longues chaînes de raisons, toutes simples et faciles, dont les géomètres ont coutume de se servir pour parvenir à leurs plus difficiles démonstrations, m’avaient donné occasion de m’imaginer que toutes les choses qui peuvent tomber sous la connaissance des hommes s’entresuivent de même. » (Descartes, Discours de la méthode, I, 142.) — Au dix-septième siècle, on construit a priori avec des idées, au dix-huitième siècle avec des sensations, mais toujours par le même procédé, qui est celui des mathématiques et qui s’étale tout entier dans l’Éthique de Spinosa.
On dit que ce sont tous des habitants de la campagne qui, n’y pouvant plus tenir par les vexations qu’ils y essuient, viennent se réfugier dans la ville, … préférant la mendicité au labeur. » — Pourtant le peuple des villes n’est guère plus heureux que celui des campagnes. « Un officier dont la troupe est en garnison à Mézières m’a dit que le peuple est si misérable dans cette ville, que, dès qu’on avait servi le dîner des officiers dans les auberges, le peuple se jetait dessus et le pillait. » — « Il y a plus de douze mille ouvriers mendiants à Rouen, tout autant à Tours, etc. […] Dans le Quercy et ailleurs, point de bas, ni de souliers, ni de sabots. « Impossible, dit Young, pour une imagination anglaise de se figurer les animaux qui nous servirent à Souillac, à l’hôtel du Chapeau Rouge ; des êtres appelés femmes par la courtoisie des habitants, en réalité des tas de fumier ambulants. […] On l’assujettit s’il est bon et facile ; on l’aigrit et l’on l’irrite s’il est méchant… Il est tenu dans la misère, dans l’abjection, par des hommes qui ne sont rien moins qu’inhumains, mais dont le préjugé, surtout dans la noblesse, est qu’il n’est pas de même espèce que nous… Le propriétaire tire tout ce qu’il peut et, dans tous les cas, le regardant lui et ses bœufs comme bêtes domestiques, il les charge de voitures et s’en sert dans tous les temps pour tous voyages, charrois, transports.