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1288. (1896) Le IIe livre des masques. Portraits symbolistes, gloses et documents sur les écrivains d’hier et d’aujourd’hui, les masques…

Mais que de visions émues, que de jolies imaginations, et comme les mots viennent doucement écrire des pages dont la fraîcheur fait envie ! […] Transporté dans les œuvres d’imagination, l’aristocratisme de M.  […] Cet écrivain est d’ailleurs apte à nous surprendre de plus d’une manière avec tout ce qu’il y a en lui de liberté d’esprit, d’imaginations audacieuses. […] C’est un descriptif purement pictural ; son imagination est visuelle, très rarement auditive : il voit, dessine, dispose, et colore ce qu’il voit. […] A partir donc du moment où il assuma cette charge, sa littérature a été tout en actes ; il n’a plus exercé qu’une imagination pratique, une critique à conséquences immédiates et certaines.

1289. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Appendice. — [Jouffroy.] » pp. 532-533

une belle illusion de sa poétique imagination.

1290. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Note »

Il est resté pour moi un grand écrivain, un grand et surtout un vigoureux esprit dominé par une imagination forte, et plus que tout encore une âme de douleur, d’angoisse et de tourment.

1291. (1874) Premiers lundis. Tome I « Le vicomte d’Arlincourt : L’étrangère »

Quant au but moral, de semblables productions ne sont bonnes qu’à égarer les imaginations affaiblies ; elles ne s’adressent pas aux esprits sains, et ne font que leur révéler une profondeur de démence qu’ils ont peine à croire et qu’ils ne comprennent pas.

1292. (1874) Premiers lundis. Tome I « Mémoires de madame de Genlis sur le dix-huitième siècle et la Révolution française, depuis 1756 jusqu’à nos jours — I »

D’une part, engagée par les sollicitations de votre mémoire, disons mieux, de votre conscience ; de l’autre retenue par les scrupules de votre amour-propre, ou du moins de votre délicatesse, il vous faudra, et j’adopte ici la supposition la plus douce, il vous faudra tout ménager, tout prévoir, conter avec apprêt et réserve, fausser presque à votre insu vos réminiscences, prendre à propos vos rêves pour des souvenirs, en un mot, par un officieux et perpétuel mensonge d’imagination, reconstruire le passé en croyant le reproduire ; à moins toutefois, ce que je ne redoute guère, qu’il ne vous advienne l’orgueilleux caprice de nous confesser voire vie pleine et entière, à la mode de saint Augustin, sinon de Jean-Jacques.

1293. (1874) Premiers lundis. Tome I « Charles »

Toujours l’auteur se prépare à la composition par la solitude ; il s’y exalte longuement de ses souvenirs, de ses espérances, et de tout ce qui a prise sur son âme ; il se crée un monde selon son cœur, et le peuple d’êtres chéris ; le nombre en est petit ; il leur prête toutes les perfections qu’il admire, tous les défauts qu’il aime ; il les fait charmants pour lui : mais trop souvent, si son imagination insatiable ne s’arrête à temps, s’élevant à force de passion à des calculs subtils, et raisonnant sans nn sur les plus minces sentiments, il n’enfantera aux yeux des autres que des êtres fantastiques dans lesquels on ne reconnaîtra rien de réel que cet état de folle rêverie où il s’est jeté pour les produire.

1294. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XII. Du principal défaut qu’on reproche, en France, à la littérature du Nord » pp. 270-275

Ce que l’homme cherche dans les chefs-d’œuvre de l’imagination, ce sont des impressions agréables.

1295. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Augier, Émile (1820-1889) »

Jean-Jacques Weiss La comédie des Effrontés appartient au second Augier, celui qui est de son temps plus que de sa race et sur qui les influences de l’air moral ambiant ont eu plus d’action et de pénétration que les instincts de son imagination et de son cœur.

1296. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Vicaire, Gabriel (1848-1900) »

Certains titres de ses volumes : Au Bois-Joli, le Clos des Fées, indiquent, à eux seuls, les tendances de son imagination.

1297. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 189-194

Ses Fables, fruits d’une imagination riante & séconde, & du don d’inventer heureusement un sujet, eussent mérité la seconde palme de l’Apologue, s’il eût eu autant d’attention à consulter la Nature & le goût, que de facilité à s’abandonner à son génie.

1298. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Racan, et Marie de Jars de Gournai. » pp. 165-171

Née Gascone, elle avoit toute l’imagination & tout le feu de son pays.

1299. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Théâtre français. » pp. 30-34

Quelle porte n’ouvre-t-on pas aux railleries des profanes, lorsqu’on ose se faire des martyrs de cette nature, et qu’on expose nos mystères à des idées d’une imagination aussi dépravée !

1300. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre II. Amour passionné. — Didon. »

Comment s’est-il évanoui, cet édifice de bonheur, dont une imagination exaltée avait été l’amoureux architecte ?

1301. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre XVI. Le Paradis. »

Nous pouvions trancher la question d’une manière simple et péremptoire ; car, fût-il certain, comme il est douteux, que le christianisme ne pût fournir un merveilleux aussi riche que celui de la fable, encore est-il vrai qu’il y a une certaine poésie de l’âme, une sorte d’imagination du cœur, dont on ne trouve aucune trace dans la mythologie.

1302. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre III. Massillon. »

Ainsi, nous ne ferons paraître à l’appui de nos raisonnements ni Fénélon, si plein d’onction dans les méditations chrétiennes, ni Bourdaloue, force et victoire de la doctrine évangélique : nous n’appellerons à notre secours ni les savantes compositions de Fléchier, ni la brillante imagination du dernier des orateurs chrétiens, l’abbé Poulle.

1303. (1761) Salon de 1761 « Peinture —  Doyen  » pp. 153-155

Il a voulu que ces figures fussent aériennes ; et cette imagination me paraît de génie.

1304. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Doyen » pp. 244-247

Si vous ne connaissez pas cet éloquent, impérieux et adroit scélérat, lisez Homere et Virgile, jusqu’à ce que les idées de ces deux grands poètes, fermentant dans votre imagination, vous aient donné la vraie physionomie de ce personnage.

1305. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 11, des ouvrages convenables aux gens de génie et de ceux qui contrefont la maniere des autres » pp. 122-127

J’ajoûterai encore une consideration touchant les ouvrages qui ne demandent pas beaucoup d’invention, c’est que les faussaires en peinture les contrefont bien plus aisément qu’ils ne peuvent contrefaire les ouvrages où toute l’imagination de l’artisan a eu lieu de se déploïer.

1306. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 20, de la difference des moeurs et des inclinations du même peuple en des siecles differens » pp. 313-319

Si l’on me repliquoit que ces scélerats étoient catholiques ou huguenots par persuasion, mais que c’étoit des cerveaux brûlez, des imaginations forcenées, en un mot des fanatiques de bonne foi, ce seroit adhérer à mon sentiment.

1307. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Eugène Chapus »

Il a été écrivain d’instinct, naïvement, comme « de l’eau est de l’eau », dirait Diderot encore ; — il a été écrivain d’imagination et de sentiment comme on doit l’être quand on veut élargir sa renommée et donner au talent qu’on a l’air et l’espace, sans lesquels il n’est jamais qu’une fleur rare, dans un vase précieux, étiolée !

1308. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Mercier » pp. 1-6

Échappant aux règles du goût par l’excentricité même de sa nature intellectuelle, — car c’est un excentrique que Mercier, et il a je ne sais quoi dans l’esprit qui rappelle la bizarrerie de certaines imaginations anglaises, — méconnaissant l’autre règle de la vie, plus importante que le goût, c’est-à-dire la religion, qui, en nous éclairant le cœur, fait monter la lumière jusqu’à la pensée, Mercier s’adapte exactement à l’époque qu’il a plutôt inventoriée que peinte.

1309. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « L’abbé Cadoret »

Chaque époque de l’histoire a ses analogies, ses ressemblances de situation, d’événements, de caractères, et c’est de tout cela que l’imagination, frappée plus que la réflexion encore, fait une espèce de miroir dans lequel l’esprit d’un temps s’observe, se retrouve et s’admire.

1310. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre IV. De la morale poétique, et de l’origine des vertus vulgaires qui résultèrent de l’institution de la religion et des mariages » pp. 168-173

Cette innocence n’était autre chose qu’une superstition fanatique qui, frappant les premiers hommes de la crainte des dieux que leur imagination avait créés, leur faisait observer quelque devoir malgré leur brutalité et leur orgueil farouche.

1311. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre VII » pp. 278-283

Dans un temps où la mémoire et l’imagination étaient pleines de force, où la puissance d’invention était si grande, il ne pouvait être philosophe.

1312. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Ce qui les agace le plus, c’est le romanesque, c’est-à-dire l’imagination dans le faux ; le burlesque, c’est-à-dire l’imagination dans l’extravagant ; le précieux, c’est-à-dire l’imagination dans le subtil ou le frivole. […] Il a voulu le naturel, la vérité, l’observation exacte, et s’est défié de l’imagination : oui, le voilà en gros. […] Ils se disent que ce n’est qu’une chance, en quoi ils ont raison, et que, par conséquent, compter ainsi est une imagination, et ils n’aiment point l’imagination. […] Sa place dans la composition lui prouve où cette irrévérence peut conduire un homme de goût et d’imagination. […] C’est qu’il est homme d’imagination, non d’abstraction et de dialectique.

1313. (1913) Les idées et les hommes. Première série pp. -368

Ou lui imposent-ils leurs imaginations, gaillardement ? […] Les romantiques interrogeaient leur imagination, comme le vieil Homère consultait la muse. […] L’étincelle qui la peut embraser : l’imagination. Seulement, une imagination qui ne se livre point à ses velléités ; une imagination docile aux réalités et qui réussisse le paradoxe d’unir à la libre intuition l’obéissance la plus dévouée. […] Il est un art d’imagination ; mais cette imagination, très érudite et soumise, ne se livre point à son démon : elle invente de la vérité, du moins le veut-elle.

1314. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Chateaubriand — Chateaubriand, Mémoires »

Le mois passé (et de spirituelles indiscrétions l’ont déjà ébruité par mille endroits), quelques auditeurs heureux ont goûté une de ces vives jouissances d’imagination et de cœur qui suffisent à embellir et à marquer, comme d’une fête singulière, toute une année de la vie. […] Littérairement, il n’y avait qu’une voix pour saluer le fondateur, parmi nous, de la poésie d’imagination, le seul dont la parole ne pâlissait pas dans l’éclair d’Austerlitz. […] Si tout, dans ce brillant assaut, n’était pas également solide, si les preuves qui s’adressaient surtout à des cœurs encore saignants et à des imaginations ébranlées par l’orage ne suffisent plus désormais, l’esprit de cette inspiration se continue encore ; c’est à l’œuvre et au nom de M. de Chateaubriand que se rattache le premier anneau de cette renaissance.

1315. (1824) Observations sur la tragédie romantique pp. 5-40

Notre imagination ne sera pas si complaisante et n’obéira point au sifflet du machiniste. […] laissons aux poètes le droit d’oser tout ce qui doit nous émouvoir et nous instruire, de trouver dans leur imagination, dans leur génie, ce qui achèvera l’histoire par une parfaite représentation des mœurs. […] Il est difficile d’expliquer comment, avec un goût si décidé pour la plus fidèle représentation des hommes et de la nature, les spectateurs romantiques accueillent néanmoins tous les rêves de l’imagination, pourvu qu’ils soient extrêmement bizarres et n’aient aucune teinte classique.

1316. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Nul n’a plus vécu par l’imagination : son orgueil et son inertie y trouvaient également leur compte. […] Son orgueil et son imagination l’emportèrent dans l’infini. […] Mais l’intelligence et l’esprit restèrent toujours des parties secondaires de sa nature, tout à fait sous la domination du caractère et de l’imagination.

1317. (1889) Les premières armes du symbolisme pp. 5-50

………………………………………………………………………………………………… Tandis que le Naturalisme essaye vainement de casser les ailes à la fantaisie et de mettre l’imagination sous clef, la fantaisie s’enfonce dans le pays des rêves d’un vol fou et l’imagination vagabonde dans les plus étranges sentiers. […] Outre les notions de qualité et de quantité que nos mots définissent avec précision, nous percevons encore dans les choses des affinités restées tout à fait indéterminées jusqu’à présent ; telle couleur évoque de vagues idées d’opulence, tel parfum transporte notre imagination en Orient, tel son nous met sous une impression triste.

1318. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre deuxième »

Il se fit de tout cela des notions claires, déchiffrant lui-même les textes pour la première fois, et joignant l’érudition la plus patiente à l’imagination la plus fougueuse. […] Rabelais se moque des ridicules ; il les exagère par l’imagination mais il n’est pas si malavisé que d’en avoir de l’humeur. […] Il n’est guère de sujet dans lequel il n’ait vu ou indiqué la vérité qui était à dire ; mais comme si ce peu de sagesse le fatiguait, à peine sa raison commence-t-elle à s’intéresser à son objet, qu’il l’en détourne brusquement et, soit par une malice délibérée, soit par cet emportement qui lui est propre, il étouffe cette lueur sous un amas de folles imaginations.

1319. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre cinquième »

Il fit ses plus belles pièces ayant passé l’âge mûr, alors que l’imagination n’a plus de fumées, la raison plus d’illusions, le goût plus d’incertitude : c’est l’âge où Bossuet écrivait l’oraison funèbre du prince de Condé. […] Je ne sache pas de plus bel exemple dans l’histoire des littératures que celui de cet homme, réformateur par instinct, grand poëte presque par devoir, s’attachant pour l’exemple à un genre où ne le portaient ni son imagination, ni son humeur, et soutenu contre les difficultés de la tâche par le sentiment qu’elle était nécessaire. […] En effet, quelque résistance que nous fassions, par la solitude, par la lecture des chefs-d’œuvre, par notre droiture et notre naturel, au tour d’imagination de notre époque, le passager, l’éphémère nous atteignent jusque dans la retraite la plus opiniâtre ; et si nous tenons assez ferme pour n’être pas à la fin dépouillés de notre naturel, il est difficile que nous n’en soyons pas fréquemment distraits.

1320. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre dixième. »

L’amour n’est pas forcé d’y affecter la forme passagère qu’il reçoit des mœurs, du tour d’imagination de l’époque, ou de l’exemple du prince ; il n’y est ni pompeux ni raffiné. […] C’est à l’imagination du lecteur à se représenter, quand ce personnage entre en scène, sa physionomie et ses mouvements. […] Qui de nous n’a visité ces royaumes-là, et gardé dans son imagination la fraîcheur humide de quelque marécage solitaire, que le travail de l’homme n’a pas encore disputé au vent et à l’eau ?

1321. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quinzième. »

Sensibilité vive, mais passagère et sans vapeurs ; raison nourrie sans être profonde, n’enfonçant guère dans les choses, mais parfois, et de la première vue, en découvrant le fond ; gaieté, sans rien d’éventé ; une douce mélancolie qui se forme et se dissipe au moment où elle s’exprime ; pas de vieillesse, sans la prétention de ne pas vieillir ; beaucoup de mobilité, avec le lest d’un grand sens qui écarte de la conduite l’imagination et les caprices ; du goût pour les gens en disgrâce, mais sans rancune contre les puissants ; une pointe d’opposition, comme chez tous les frondeurs pardonnés qui n’osaient ni se plaindre ni regretter, et qui se ménageaient pour un retour de fortune ; le cœur de la meilleure mère qui fut jamais, quoi qu’on en ait dit, capable d’amitiés persévérantes, et qui craignit l’amour plutôt qu’elle ne l’ignora ; tels sont les principaux traits de ce caractère, où le solide se fait sentir sous l’aimable, et où l’aimable n’est jamais banal. […] Les douceurs qu’elle dit à sa fille sont comme les petits mots caressants qu’on dit aux enfants ; l’imagination les suggère peut-être, mais le cœur est dessous. […] Mais l’œuvre de Tacite n’en est que plus étonnante ; et celui-là sera toujours le premier des historiens qui a su se rendre présents, par l’imagination et la sensibilité, des événements si loin de lui, et qui nous émeut de morts arrivées il y a deux mille ans dans la famille des Césars, presque autant que Saint-Simon de ces morts qui réduisaient en quelques semaines la famille de Louis XIV à un vieillard et à un enfant.

1322. (1881) La psychologie anglaise contemporaine «  M. Georges Lewes — Chapitre I : L’histoire de la philosophie »

On expliquait ces faits en les attribuant à l’imagination, bien ; mais par quelles conditions matérielles l’imagination a-t-elle pu agir sur les viscères ou sur la dent ? Ces explications naïves supposaient une sorte d’imagination autocrate, sans sentir aucunement le besoin de découvrir un mécanisme particulier pour la production des résultats.

1323. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre septième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie. »

Avoir trouvé par le raisonnement ou l’expérience, voilà la science ; sentir ou pressentir en s’aidant de l’imagination, c’est la plus haute poésie. […] La vraie poésie est surtout dans les grands symboles philosophiques et même dans les mythes ; l’imagination poétique se confond avec l’imagination religieuse : la poésie est une religion libre et qui n’est qu’à demi dupe d’elle-même ; la religion est une poésie systématisée qui croit réellement voir ce qu’elle imagine et qui prend ses mythes pour des réalités.

1324. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

Le Pere Berruyer péchoit par un excès d’imagination ; on trouve un défaut précisément contraire dans l’Histoire des Juifs, traduite de l’Anglois de M. […] Il a l’imagination vive, noble, élevée, & plus d’impartialité qu’on n’en devoit attendre d’un homme de son état. […] On a prétendu que lorsqu’il eut à décrire l’histoire du siége de Rhodes, les mémoires qu’il attendoit ayant tardé trop long-tems, il fit ce siége, moitié d’après le peu qu’il en savoit, moitié d’après son imagination.

1325. (1910) Muses d’aujourd’hui. Essai de physiologie poétique

Chez eux, c’est l’imagination qui commande le désir, et non pas seulement la nécessité physique de se répandre. […] Cette hypertrophie de la sensibilité et de l’imagination chez les poètes les a fait qualifier, par certains savants, de désharmonisés, de déséquilibrés organiquement. […] L’amour normal le lui procure rarement ; elle demande des gestes plus compliqués et savants auxquels puissent se marier les jeux de l’imagination et de la suggestion. […] et le rêve du poète le cherche dans toutes les villes du monde, dans tous les rêves de son imagination, dans l’histoire et dans le passé. […] Il lui vient du génie, avoue-t-elle : alors elle chante l’Amour vrai, qui est un, qui est seul, qui est tout, qui est soi… mais qui n’est encore qu’une imagination.

1326. (1896) Hokousaï. L’art japonais au XVIIIe siècle pp. 5-298

Un livre aux allusions ironiques, sans doute à propos de la publication d’un sérieux ouvrage sur l’histoire naturelle, et où l’imagination du dessinateur se donne toute liberté dans la création de ses monstres, les faisant, tour à tour, ridicules ou terribles. […] Or l’artiste appelé là-bas le peintre des fantômes, le peintre qui a dessiné ces têtes des Cent contes qui vous laissent dans la mémoire un souvenir d’épouvante, le peintre auquel les directeurs de théâtres venaient demander des maquettes de visions d’effroi, le peintre près duquel les conférenciers macabres sollicitaient des figures de mortes, devait aimer à traduire, avec les imaginations de son art, les rêveuses imaginations dans le noir des lettrés de son pays, et c’est ce qui explique les longues années où une partie de son talent appartint à l’illustration des romans. […] Au milieu de ces féroces épisodes de la guerre, voici tout à coup, dans la sixième série, un palais féerique au haut d’un rocher auquel on arrive par des ponts, des escaliers, une montée d’un pittoresque charmant : palais né dans l’imagination du peintre au fond de son atelier. […] Une autre planche, où Hokousaï donne un curieux échantillon de son imagination fantomatique, est la gravure de la salle où a lieu la conspiration, salle ayant la réputation d’être hantée par les mauvais esprits et qu’a choisie exprès Irouka pour n’être pas dérangé dans ses conciliabules. […] Dans ce second volume, ce renversement a fourni à l’imagination du peintre un motif tout à fait joli.

1327. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « LX » pp. 231-236

Le Prevost fut suivie d’une autre ; les imaginations s’enflammèrent, et il fut, à un certain moment, décidé par acclamation que M.

1328. (1874) Premiers lundis. Tome II « Revue littéraire »

Et d’abord, pour les esprits sévères qui aiment avec raison qu’en recueillant même les songes et les fantaisies de l’imagination dans le passé, on soit fidèle à la lettre et qu’on transmette scrupuleusement les vestiges, l’ouvrage de M. 

1329. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Quatrième partie. Élocution — Chapitre premier. Du rapport des idées et des mots »

Par cette puissance, l’imagination reproduit et remplace la vue ; le livre tient lieu de l’objet ; la phrase rend présente la chose qui n’est pas là.

1330. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Laforgue, Jules (1860-1887) »

Son esprit n’est pas non plus celui de l’atticisme hellène, et rien de la burlesque imagination du Nord ne vient le réjouir.

1331. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 92-99

Avoir reçu du Ciel une imagination vive & féconde, un jugement aussi exquis que solide ; allier à l’étendue du savoir une profonde sagesse ; aux charmes de l’éloquence l’empire de la vertu ; à l’élévation des dignités un amour aussi éclairé qu’intrépide pour le bien ; avoir ajouté à ces qualités une application infatigable à cultiver ses talens, une modestie sincere, la véritable parure du mérite : tel est le privilége heureux qui distingue ce Grand Homme, à qui les hommages ne peuvent être trop prodigués.

1332. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre quatrième. Du Merveilleux, ou de la Poésie dans ses rapports avec les êtres surnaturels. — Chapitre III. Partie historique de la Poésie descriptive chez les Modernes. »

Celui-ci, à une imagination vive, joint un génie tendre et rêveur ; il se sert même, ainsi que La Fontaine, du mot de mélancolie dans le sens où nous l’employons aujourd’hui.

1333. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Restout » pp. 187-190

Il est entouré de quelques-uns de ses ministres qui ont à la vérité l’air rustique : ce caractère déplaît fort à nos artistes modernes dont l’imagination captivée par des idées de dignité du dix-huitième siècle, ne remonta jamais dans l’Antiquité ; mais cela me plaît à moi.

1334. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Vernet » pp. 227-230

Mais considérez que les grandes compositions de Vernet ne sont point d’une imagination libre.

1335. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 17, s’il est à propos de mettre de l’amour dans les tragedies » pp. 124-131

Ainsi ceux qui n’ont point de pente vers une passion, ne conçoivent point que les fureurs dont le poëte remplit ses scenes, et qu’il expose comme les suites naturelles d’un emportement dont-ils n’ont jamais senti les accès, soïent exposées suivant la verité : ou bien les suites d’une semblable passion leur paroissent les pures saillies de l’imagination dereglée d’un poëte exagerateur : ou bien les personnages d’une piece cessent de les interesser.

1336. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 22, quelques remarques sur la poësie pastorale et sur les bergers des églogues » pp. 171-178

Ces prétendus pasteurs ne sont point copiez, ni même imitez d’après nature, mais ils sont des êtres chimeriques inventez à plaisir par des poëtes qui ne consulterent jamais que leur imagination pour les forger.

1337. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « XII »

Voici exactement ce que j’ai dit dans le passage auquel vous faites allusion : « J’ai tâché d’écrire simplement et sèchement cet ouvrage qui n’est qu’une tentative de démonstration, réservant mon effort d’écrire pour des ouvrages d’imagination ou de critique proprement dite. »‌ Loin d’être immodeste, je m’excusais d’avoir trop négligemment écrit ; je demandais l’indulgence, je promettais de mieux faire une autre fois, de réserver mes efforts pour d’autres œuvres.

1338. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame de La Fayette ; Frédéric Soulié »

Les Mémoires en question, les autres romans de l’auteur, ces drames de toute forme, très intrigués et dans lesquels les événements semblent des nœuds gordiens impliqués les uns dans les autres, frappèrent à poing fermé sur l’imagination d’une époque qui avait ressenti les étincelantes secousses du Romantisme.

1339. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre troisième. Découverte du véritable Homère — Chapitre I. De la sagesse philosophique que l’on a attribuée à Homère » pp. 252-257

Ces mœurs sauvages et grossières, fières et farouches, ces caractères déraisonnables et déraisonnablement obstinés, quoique souvent d’une mobilité et d’une légèreté puériles, ne pouvaient appartenir, comme nous l’avons démontré (livre II, Corollaires de la nature héroïque), qu’à des hommes faibles d’esprit comme des enfants, doués d’une imagination vive comme celle des femmes, emportés dans leurs passions comme les jeunes gens les plus violents.

1340. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre VI. La parole intérieure et la pensée. — Second problème leurs différences aux points de vue de l’essence et de l’intensité »

Toutes les idées de choses visibles sont accompagnées d’une telle image, d’un […]39 : l’homme, par exemple, la rose, ne sont pas conçus sans l’imagination d’une ombre d’homme, d’une ombre de rose. […] 2° En fait, l’image idéale est toujours ou le résultat d’une longue recherche ou la rencontre heureuse d’une imagination bien douée ; les grands artistes sont des hommes exceptionnels, ou par la patience de la réflexion ou par la promptitude du génie. […] Cette illusion si fréquente est très heureusement dénoncée par le proverbe français : Comparaison n’est pas raison, riposte ordinaire de l’esprit rigoureux qui distingue l’image et l’idée à l’homme d’imagination qui les confond. […] D’abord, le sommeil imite et ne répète pas ; le souvenir, dans le rêve, est de courte haleine ; l’imagination seule est féconde. […] Et ce qui prouve bien que les éléments de l’idée dégagés par la puissance évocatrice de l’attention ne sont pas reconnus, c’est que, en opérant l’analyse de l’idée, nous ne saurions distinguer la part du souvenir et celle de l’imagination, les éléments anciens qui ont servi à la construire, mais que l’habitude a effacés, et les éléments nouveaux, inventés au moment même, seulement vraisemblables, qui n’ont avec elle qu’un rapport logique et non psychologique.

1341. (1788) Les entretiens du Jardin des Thuileries de Paris pp. 2-212

On seroit alors tenté de déchirer ses ouvrages, comme disoit Fontenelle, & de mettre son imagination sous ses pieds. […] Cela ne vaut gueres mieux que les châteaux en Espagne, (à prendre les choses littéralement) mais cela fournit des idées, & l’imagination s’en amuse. […] J’enverrai mon imagination & ma mémoire dans les pays lointains, deux facultés qui peuvent cheminer sans dépense, sans fatigue & sans bruit. […] N’est-ce pas allumer son imagination à pure perte, que de s’enflammer à la vue des désordres qu’on ne peut empêcher. […] Rien plus risible que les écarts de l’imagination.

1342. (1900) La culture des idées

La plus longue patience ne peut changer en imagination visuelle une imagination aveugle ; et celui qui voit le paysage dont il transpose l’aspect en écritures, si son œuvre est gauche, elle est meilleure encore, telle, qu’après les retouches d’un correcteur dont la vision est nulle ou profondément différente. […] La concision est parfois le mérite des imaginations rétives ; l’harmonie est une qualité plus rare et plus décisive. […] D’après l’analyse qu’il fait d’une page de Télémaque, il semble bien que Fénelon n’ait été doué que fort médiocrement de l’imagination visuelle et plus médiocrement encore du don verbal. […] Des êtres surnaturels flottaient dans les imaginations qui n’étaient ni des anges, ni des démons, mais des Puissances que pouvait se soumettre l’intelligence de l’homme. […] Ribot, L’Imagination créatrice (juillet 1900).

1343. (1894) Écrivains d’aujourd’hui

Libertinage d’imagination. […] Comment, d’ailleurs, le libertinage d’imagination peut s’accommoder du mysticisme lui-même, c’est ce que M.  […] Contre ce défaut, du moins, Maupassant a été toujours tenu en garde par la verdeur de son imagination. […] Ils ne s’inquiètent pas si la parole pourrait être plus chaude, et une imagination colorée les mettrait en défiance. […] Feuillette a une imagination très colorée.

1344. (1898) Impressions de théâtre. Dixième série

Mais enfin l’Odéon nous a aidés à ressusciter dans nos imaginations une grande œuvre et un grand spectacle. […] Jean-Gabriel Borkman est un financier de vive imagination à qui il est arrivé malheur. […] L’imagination puérile, mais fleurie, du patriarche Jacob s’amuse à l’idée que le premier rayon du jour va dissoudre leurs ombres falotes. […] Cela signifie que cet observateur très aigu a beaucoup d’imagination, et une imagination de poète. […] Dans les solitudes forestières où il a coutume de vivre, ce songeur nourrit des imaginations fières et hardies, empreintes de gravité morale et heureusement dépourvues de parisianisme.

1345. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

On n’y réussit que par l’imagination. […] Taine l’imagination philosophique. […] L’imagination est le grand remède aux maux de ce monde. […] Huysmans quelques traits empruntés aux imaginations du comte Robert de Montesquiou. […] À juger par ces fragments, le prêtre de Gaza avait l’imagination sombre et forte.

1346. (1825) Racine et Shaskpeare, n° II pp. -103

Le résultat de ses visites dans le faubourg Saint-Germain est de se voir éconduit comme un fou dangereux, au moment où il s’imagine avoir séduit tous les cœurs de femmes par les grâces de son imagination, et conquis les hommes par la profondeur de ses aperçus. […] À l’insu de la plupart des hommes, l’habitude exerce un pouvoir despotique sur leur imagination. […] Une tête sans poudre lui rappelle les images sanglantes de la révolution française, premiers objets qui frappèrent son imagination royale, il y a trente-un ans. […] Je vois un trésor de tolérance littéraire dans ce mot : l’habitude exerce un pouvoir despotique sur l’imagination des hommes même les plus éclairés, et par leur imagination sur les plaisirs que les arts peuvent leur donner. […] Toute absurdité dont l’imagination d’un peuple a pris l’habitude n’est plus une absurdité pour lui, et ne nuit presque en rien aux plaisirs du gros de ce peuple, jusqu’au moment fatal où quelque indiscret vient lui dire : ce que vous admirez est absurde.

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