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660. (1848) Études sur la littérature française au XIXe siècle. Tome III. Sainte-Beuve, Edgar Quinet, Michelet, etc.

peut-il rester coloré dans l’expression de ces extrêmes délicatesses ? […] C’est à bon escient qu’il solécise ; et il est peu de ses expressions dont il ne pût rendre compte, peu de ses traits qui n’aient leur raison toute prête. […] Les poètes de l’antiquité sont pleins de ces expressions vagues mais délicieuses, de ces inexactitudes sublimes ou touchantes, qui font le tourment du grammairien loyal. […] Il est, qui le croirait, vague d’expression pour être à sa manière plus précis. […] Quinet, comme expression de désespoir, m’avait paru bien triste ; comme expression d’orgueil, il me paraît bien plus triste encore.

661. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Piédagnel, Alexandre (1831-1903) »

Sully Prudhomme J’ai lu l’excellent recueil de poésies : En route, avec le plus vif plaisir, car j’y ai trouvé, dans son expression achevée, tout le talent pur et solide de l’auteur.

662. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Il excelle, à propos des nouveautés qui passent, à se tailler un sujet à part dans une étoffe souvent vulgaire qu’il rehausse aussitôt, à en détacher et à y découper pour son compte un personnage historique, une grande figure, un type, et il s’y applique, il s’y déploie avec sa vigueur d’expression, sa couleur éblouissante, avec son instruction et sa vaste lecture toujours neuve, originale, inventive et heureuse d’allusion et d’à-propos, qui n’a rien de banal ni d’usé dans ses citations, et qui même, lorsqu’elle sort d’un coffre antique, a la splendeur d’une étoffe d’Orient. « Quand je lis Saint-Victor, je mets des lunettes bleues », disait Lamartine. […] Ce qui est certain, c’est qu’à tout instant son expression illumine et grave les caractères.

663. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Lélia (1833) »

Les couleurs, la science, l’harmonie, affluent, se combinent et ne font jamais faute ; mais je préférerais encore une expression plus voisine du sentiment, fût-elle incomplète par endroits. […] Parmi les personnages et portraits charmants déjà en foule échappés à sa plume, nous en savons un dont nous voudrions lui inculquer le souvenir, parce qu’en même temps qu’il est proche parent de Lélia pour les principales circonstances, il a, dans le caractère et dans l’expression, la mesure, la grâce, la nuance qu’on aime et qui attire tout lecteur : ce personnage est celui de Lavinia, que l’auteur a peinte dans une Vieille Histoire.

664. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — I »

La poésie est l’expression de ce tourment de l’âme ; il n’y en a pas d’autre, c’est la poésie de Lamartine. […] Dans les premiers temps de l’humanité, la raison de l’homme étant peu développée, c’est l’imagination qui domine ; alors il parle par images figurées ; alors il faut des formes à l’expression de ses idées, de sa raison ; il croit à des causes surnaturelles : c’est le règne de la religion.

665. (1875) Premiers lundis. Tome III « L’Ouvrier littéraire : Extrait des Papiers et Correspondance de la famille impériale »

« Veuillez, Monsieur, agréer l’expression de mes sentiments respectueux, « Sainte-Beuve. » Une note du Cabinet résumait ainsi le mémoire de l’auteur des Causeries : 5 avril 1856. […] Sainte-Beuve éclate tout entière, sans préoccupation officielle cette fois, à moins qu’on ne considère comme telle l’expression les vœux de la fin.

666. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XI. De la littérature du Nord » pp. 256-269

Un enthousiasme réfléchi, une exaltation pure, peuvent également convenir à tous les peuples ; c’est la véritable inspiration poétique dont le sentiment est dans tous les cœurs, mais dont l’expression est le don du génie. […] Il faut alors qu’il cherche dans le cœur humain les sources de l’émotion, qu’il fasse sortir d’une expression éloquente, d’un sentiment de l’âme, d’un remords solitaire, les fantômes effrayants qui doivent frapper l’imagination.

667. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre IV. De la religion. »

À travers tant de dangers, il persista à ne prendre pour guide que les maximes d’une piété superstitieuse ; mais c’est à l’époque où la religion seule triomphe encore, c’est à l’instant où le malheur est sans espoir, que la puissance de la foi se développa toute entière dans la conduite de Louis ; la force inébranlable de cette conviction ne permit plus d’apercevoir dans son âme l’ombre d’une faiblesse ; l’héroïsme de la philosophie fut contraint à se prosterner devant sa simple résignation ; il reçut passivement tous les arrêts du malheur, et se montra cependant sensible pour ce qu’il aimait, comme si les facultés de sa vie avaient doublé à l’instant de sa mort, il compta, sans frémir, tous les pas qui le menèrent du trône à l’échafaud, et dans l’instant terrible où lui fut encore prononcé cette sublime expression : Fils de Saint Louis, montez au Ciel. […] Suivant une expression de Dryden, différemment appliquée, la dévotion élève un mortel jusqu’aux cieux, la moralité naturelle fait descendre un ange sur la terre : He raised a mortal to the skies She drew an angel down.

668. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre II. Distinction des principaux courants (1535-1550) — Chapitre II. Jean Calvin »

Mais surtout la méthode de l’Institution est l’expression même de l’esprit de la Renaissance, en tant qu’il se caractérise par la découverte de l’homme et par le culte de l’antiquité. […] L’Institution française est vraiment une forte et grande chose : il y a une gravité soutenue de ton, un enchaînement sévère de raisonnements, une véhémence de logique, une phrase déjà ample, des expressions concises, vigoureuses et, si j’ose dire, entrantes, qui en plus d’un endroit font penser à Bossuet : à Bossuet logicien, je le veux, et non pas à Bossuet poète, mais enfin à Bossuet.

669. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXVIII » pp. 305-318

Il les rétablit aussi dans l’horreur convulsive du mauvais langage, et surtout des expressions qui se rapportent à l’amour vulgaire et grossier ; il leur fait un supplice                                              du barbare amas De mots estropiés cousus par intervalle De proverbes traînés dans tes ruisseaux des halles. […] Je ne puis retenir ici l’expression d’un sentiment dont j’ai eu plus d’une fois l’occasion de me pénétrer ; c’est que ce système est condamnable en littérature, en politique, et surtout en morale, qui convertit des ouvrages d’imagination en écrits historiques, et fait d’une satire ou d’une comédie un répertoire d’anecdotes.

670. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 151-168

Ils ont beau s’écrier d’un fausset philosophique, qu’il n’a fait que copier Horace & Juvenal, qu’il n’est tout au plus qu’un bon versificateur, qu’il ne connut jamais le sentiment, que ses idées sont froides & communes, qu’il n’est pas enluminé comme eux, qu’il n’a qu’un ton, qu’une maniere ; ils ont beau s’applaudir réciproquement de leurs prouesses littéraires, lever jusqu’aux nues l’entortillage & l’enflure de leurs pensées, ne trouver rien d’égal à la profondeur de leurs courtes vues, s’extasier sur le vernis de leurs mystérieuses expressions ; la voix noble & ferme de Stentor n’a qu’à se faire entendre, & aussitôt cette engeance mutine disparoîtra, avec son Général, pour se cacher sous ses humbles pavillons. […] Justesse de raisonment, force de pensées, élégance de style, finesse d’expression, sagesse de morale, tout y plaît, tout y attache, & les vers en sont si bien frappés, qu’il est impossible d’en faire de meilleurs dans notre Langue.

671. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Baudouin » pp. 198-202

Quelle tendresse, quelle honnêteté, quelle délicatesse, quelle variété d’actions et d’expressions dans les frères, les sœurs, les parens, les amis, les amies ; quel pathétique n’y aurait-il pas mis ! […] Encore si le mauvais choix des tableaux de Baudouin était racheté par le dessin, l’expression des caractères, un faire merveilleux ; mais non, toutes les parties de l’art y sont médiocres.

672. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 9, des obstacles qui retardent le progrès des jeunes artisans » pp. 93-109

Il ne suffit pas aux peintres de concevoir des idées nobles, d’imaginer les compositions les plus élegantes, et de trouver les expressions les plus pathétiques, il faut encore que leur main ait été renduë docile à se fléchir avec précision en cent manieres differentes, pour se trouver capable de tirer avec justesse la ligne que l’imagination lui demande. […] Comme des matelots qui viennent de mettre pied à terre, après avoir vû, pour me servir de l’expression d’un ancien, la mort dans chaque flot qui s’approchoit d’eux, sont dégoûtez pour un temps de s’exposer aux perils de la mer, de même un bon poëte qui sçait combien il lui en a coûté pour terminer sa tragédie, n’entreprend pas si volontiers d’en faire une autre.

673. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le docteur Revelière » pp. 381-394

Mais il n’en est pas moins vrai que l’auteur des Ruines a l’honneur d’avoir avec eux la fraternité des idées et une parenté d’intelligence… Ce Revelière inconnu, et qui, dans l’égarement universel de la raison, a grande chance de rester inconnu, est un esprit d’une force rare, toujours, dans la pensée, et souvent dans l’expression, mais il est moins près de ces hommes profonds et sans égaux que d’un autre homme de leur temps, un autre observateur politique trop oublié et qu’il rappelle, ce Mallet-Dupan qui, lui aussi, préjugea la Révolution française dès son origine, et dont le préjugé eut parfois toute la justesse d’un jugement… L’auteur des Ruines est une espèce de Mallet-Dupan après la lettre, la terrible lettre de la Révolution ! […] C’est moins une histoire — comme le dit, du reste, son sous-titre, — qu’un Cours tout entier philosophique et critique de l’histoire moderne ; c’est une démonstration en sens contraire de tous les problèmes agités, à cette heure, par l’esprit révolutionnaire, et dont la solution dernière serait, sous le nom imposteur de progrès, de faire rétrograder la civilisation du monde… Après avoir, dans ses premières pages, comme donné le dictionnaire de la langue qu’il va parler en fixant l’origine et en déterminant la grandeur de la Monarchie française, en traitant de « la providence des dynasties inamovibles », de la propriété, du droit divin, dont il dit : « La primogéniture, le droit successif, la légitimité, le droit divin, ne sont qu’une même expression, une même vérité, une loi de raison », le métaphysicien politique aborde vaillamment l’Histoire.

674. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXII. Philosophie politique »

M. de Beauverger a pour Sieyès une admiration très logique et que l’on comprend très bien, venant d’un homme qui croit que la philosophie politique est une des grandes inventions de l’esprit humain, car Sieyès est l’expression la plus concentrée, la plus immobile et la plus dure de la philosophie politique. […] Le christianisme progressif est une expression des temps modernes, injurieuse dans sa bienveillance, et ne tendant à rien moins qu’à la négation du christianisme qui est absolu, puisqu’il est divin.

675. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXV. Le Père Ventura »

Il a la double faculté de la réflexion et de l’expression instantanée. […] Or, qu’on nous pardonne l’expression vulgaire, une panacée ne consiste pas à dire aux gens : Portez-vous bien, et je paierai le médecin.

676. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Émile Augier, Louis Bouilhet, Reboul »

Quand on est d’un temps où une école sans idées, mais non pas sans talent, a voulu faire entrer toute la poésie dans l’expression et est arrivée à produire, dans le maniement de la langue, d’incontestables beautés de détail, il n’est pas permis, quand on est soi-même sans idées, d’écrire des vers aussi dénués d’organisme et de correction forte que l’auteur des Poésies complètes. […] … Est-elle dans des difficultés d’expression vaincues ?

677. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Mistral. Mirèio »

Pendant que nous nous civilisons de plus en plus et que le Réalisme, cet excrément littéraire, devient l’expression de nos adorables progrès, un poète de nature, de solitude et de réalité idéalisée, nous donne un poème fait avec des choses primitives et des sentiments éternels. […] Frédéric Mistral, qui n’entend nullement être un patoisant, et dont le génie d’expression était assez fier cependant pour avoir l’insouciance d’une question pareille, bête comme une personnalité, M. 

678. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Corneille »

il a eu peut-être ses raisons pour affecter cette froideur singulière, pour étouffer l’expression ardente, pour pâlir une couleur qui eût pu briller davantage, pour enfin avoir fait, qu’on me passe le mot ! […] Attendrissement inattendu qui vous prend en regardant cette figure d’une si mâle expression de génie qu’il semble qu’on ne l’a jamais vue jeune, quoi qu’elle l’ait été… et quand le grand Corneille est toujours, plus ou moins, le bonhomme Corneille !

679. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — A — Appleton, Jean (1868-1942) »

Jean Appleton affectionne les idées générales. » C’est d’abord l’indice d’une âme poète, puis « le vague de l’expression communique à ses vers un flou délicieux, une grâce vaporeuse dont on se sent enveloppé comme d’une caresse ».

680. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Brahm, Alcanter de (1868-1942) »

Anonyme Si, dans Éros chante, la langue de M. de Brahm n’est pas toujours exempte d’imprudence et de néologismes, l’expression en est souvent un joli tour de volupté, d’une inspiration hautaine, suave, et tour à tour choisie.

681. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 543

Cet Auteur paroîtra moins répréhensible, si l’on fait attention que le sujet qu’il a traité exigeoit moins que tout autre l’appareil du style & l’élégance des expressions.

682. (1759) Salon de 1759 « Salon de 1759 — Bachelier »

Il n’y a ni couleur ni composition, ni expression, ni dessin dans votre tableau.

683. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 68

Ses Plaidoyers sont d’un style véhément, rapide, pleins de pensées nobles, de tours énergiques, & d’expressions heureuses.

684. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Féraudy, Maurice de (1859-1932) »

J’aime mieux en signaler la douceur commune d’impressions, tout ce qui s’en dégage, comme un arôme pénétrant, d’adoration et de respect pour la femme ; le dire juste et vraiment senti des souffrances qui font, dès ici-bas, des amants, les élus d’une douceur divine ; la simplicité d’une expression qui semble jaillir de l’âme sans s’attarder aux artifices menteurs du style convenu.

685. (1922) Enquête : Le XIXe siècle est-il un grand siècle ? (Les Marges)

Quand on attaque le xixe  siècle, c’est à Victor Hugo qu’on en veut et au romantisme, ce romantisme en qui on voit l’expression littéraire de la satanique Révolution française. […] Nous avions, dans une des expressions d’art les plus authentiques, enchâssé l’âme humaine ; nous risquons de n’être plus que des intelligences. […] La littérature, même d’expression française, n’est pas du ressort de la majorité des habitants de la France : ceux-ci s’en étant, séculairement, désintéressés et portant ailleurs la plus noble activité intellectuelle. […] Notre langue nationale, devenue inexprimablement riche, apte à tout traduire, se fait l’expression supérieure de toutes ces tendances éparses. […] … Et ils se consacreront davantage au culte exclusif de l’athlète, expression supérieure de la brute moderne.

686. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XV. La littérature et les arts » pp. 364-405

Son union étroite avec elles est prouvée déjà par ce fait que beaucoup d’expressions leur sont communes : la chose est facile à remarquer dans le langage de la critique. […] Mme Sophie Gay, auteur de romans applaudis, mais dont l’œuvre la plus célèbre sera sa fille Delphine, est également, pour prendre une expression qui a le tort d’être vulgaire, mais l’avantage d’être très claire, toute en dehors. […] Ainsi les tournois, plaisirs évanouis d’une société guerrière, revivent dans ces expressions : descendre dans l’arène, entrer en lice, combattre à armes courtoises, se faire le champion de quelqu’un, etc. […] Les jeux de cartes ont fourni aussi beaucoup d’expressions et nous permettent de constater un lien de plus avec la littérature. […] Voir à ce sujet : Les rapports de la musique et de la poésie considérées au point de vue de l’expression, un ouvrage de M. 

687. (1894) Textes critiques

Diverses contractions et extensions faciales de muscles sont les expressions, jeux physionomiques, etc. […] Et l’expérience prouve que les six positions principales (et autant pour le profil, qui sont moins nettes) suffisent à toutes les expressions. […] Comme ce sont des expressions simples, elles sont universelles. […] A travers tous ces accidents subsiste l’expression substantielle, et dans maintes scènes le plus beau est l’impassibilité du masque un, épandant les paroles hilarantes ou graves. […] Hautains, selon le rite mallarméen, ils lui offrirent un lunch, l’expression de leur estime et le diadème.

688. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — II. (Fin.) » pp. 198-216

« En suivant les discours de Bossuet dans leur ordre chronologique, a très bien dit l’abbé Vaillant, nous voyons les vieux mots tomber successivement comme tombent les feuilles des bois. » Les expressions surannées ou triviales, les images rebutantes, les oublis de goût, qui sont encore moins la faute de la jeunesse de Bossuet que de toute cette époque de transition qui précéda le grand règne, disparaissent et ne laissent subsister que cette langue neuve, familière, imprévue, qui ne reculera jamais, comme il l’a dit de saint Paul, devant les « glorieuses bassesses du christianisme », mais qui en saura aussi consacrer magnifiquement les combats, le gouvernement spirituel et le triomphe. […] Quant au bonheur même dont il voudrait nous donner directement l’idée, bonheur tout spirituel et tout intérieur de l’âme dans l’autre vie, il le résume dans une expression qui termine tout un développement heureux, et il le définit : « la raison toujours attentive et toujours contente ». […] Tu arrêtes cette eau d’un côté, elle pénètre de l’autre, elle bouillonne même par-dessous la terre… Après tout, Bossuet est un orateur ; si peu qu’il cherche son art, il en possède et en connaît toute la pratique comme un Démosthène ; ce beau morceau, qui a l’air d’être brusque et soudain, il sait bien qu’il est beau, il le garde et le met en réserve pour le répéter dans l’occasion. — On remarque aussi, jusque dans ses sermons de la grande époque, des expressions non pas surannées, mais d’une énergie propre et qui n’est pas de l’acception commune : « Notre siècle délicieux, qui ne peut souffrir la dureté de la croix » ; pour notre siècle ami des délices. — « C’est vouloir en quelque sorte déserter la Cour que de combattre l’ambition. » Déserter, c’est-à-dire dévaster, rendre déserte (solitudinem facere). — « Il y a cette différence entre la raison et les sens, que les sens font d’abord leur impression : leur opération est prompte, leur attaque brusque et surprenante. » Surprenante est pris ici au sens propre et physique, et non dans le sens plus réfléchi d’étonner et d’émerveiller.

689. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

La Rochefoucauld échappe à cette loi presque inévitable, et, dans ces matières délicates et subtiles, lui qui n’avait pas lu les anciens et qui les ignorait, n’obéissant qu’aux lumières directes de son esprit et à l’excellence de son goût, il a, aux endroits où il est bon, retrouvé, soit dans l’expression, soit dans l’idée même, une sorte de grandeur. […] Fuyons les expressions trop recherchées, les termes durs ou forcés, et ne nous servons point de paroles plus grandes que les choses 6. […] Cousin sur les femmes du xviie  siècle a eu grand succès : c’est plein de talent d’expression, de vivacité et de traits ; pourtant c’est choquant pour qui a du goût (mais si peu en ont) ; il traite ces femmes comme il ferait les élèves dans un concours de philosophie ; il les régente, il les range : Toi d’abord, toi ensuite !

690. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

Ce qui était bien certain pour ceux qui tentaient la pratique de l’art en vers, et surtout dans l’ordre lyrique, c’est que les dernières sources trop fréquentées du xviiie  siècle, sources de tout temps mélangées et fort minces, étaient taries et épuisées, et qu’il fallait se retremper ailleurs, non pas tant pour les sentiments (on les avait en soi) que pour l’expression, pour la couleur, pour le style. […] On avait échoué, mais, selon moi, en partie seulement ; car il était possible encore, dans l’ensemble confus des poésies oubliées de cette époque, de recueillir à première vue et de faire goûter une certaine quantité de pièces vives, neuves, d’un rythme ferme et varié, d’une couleur charmante, d’une expression imprévue et pourtant bien française. […] Le poète dans ces sonnets imite habituellement Pétrarque, et par endroits avec fraîcheur et sentiment ; il y a des expressions heureuses, de ces images qui enrichissent la langue poétique : Sur le métier d’un si vague penser Amour ourdit les trames de ma vie.

691. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

L’État ne retient et ne garde que le strict indispensable, ce qui est indivis : le pouvoir individuel est élevé à la plus grande puissance ; le pouvoir indivis et collectif, l’État y est réduit à sa plus simple expression : on a un minimum de gouvernement. Le système auquel M. de Girardin a donné une netteté ingénieuse d’expression et une précision voisine de l’algèbre, et qu’il porte sur quelques points tels que le mariage 68 au-delà de ce qu’on avait exprimé encore, n’est pas nouveau d’ailleurs dans son principe ni dans la plupart de ses développements ; et lui-même reconnaît des pères et des maîtres dans les publicistes de l’école économiste ou économique, promoteurs d’un gouvernement réduit et à bon marché, Dupont de Nemours, Daunou, Tracy… et surtout Turgot. […] Qui se souvient le lendemain de l’article de la veille … » Ici il y a quelque chose à accorder encore, et si l’on enlevait à l’expression de M. de Girardin ce qu’elle a de paradoxal et d’absolu, on serait près de s’entendre peut-être, ou du moins on se rapprocherait.

692. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Mais n’est-ce donc rien, demanderai-je à mon tour, que de poser le problème comme le fait l’auteur, de le serrer de si près, de le cerner de toutes parts, de le réduire à sa seule expression finale la plus simple, de permettre d’en mieux peser et calculer toutes les données ? […] Il y a eu, il y aura toujours, espérons-le, des âmes délicates ; et, favorisées ou non par ce qui les entoure, ces âmes sauront chercher leur monde idéal, leur expression choisie. […] Cela prouverait seulement qu’il faut beaucoup rabattre des écrits, et que lorsqu’on dit et qu’on répète que la littérature est l’expression de la société, il convient de ne l’entendre qu’avec bien des précautions et des réserves.

693. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine »

Il leur était bien plus facile de s’expliquer Racine et Boileau, qui appartiennent à la partie régulière et apparente de l’époque, et en sont la plus pure expression Littéraire. […] La Fontaine lui rendit un caractère primitif d’expression vive et discrète ; il la débarrassa de tout ce qu’elle pouvait avoir contracté de banal ou de sensuel ; Platon, par ce côté, lui fut bon à quelque chose comme il l’avait été à Pétrarque ; et quand le poëte s’écrie dans une de ses fables délicieuses : Ne sentirai-je plus de charme qui m’arrête ? […] Nous conseillons aux curieux de comparer ce passage avec la fin de la deuxième épître d’André Chénier ; l’idée au fond est la même, mais on verra, en comparant l’une et l’autre expression, toute la différence profonde qui sépare un poëte artiste comme Chénier, d’avec un poëte d’instinct comme La Fontaine.

694. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

Il y a dans leur langue une autorité d’expression, une gravité de son, une régularité de périodes, qui se prête à peine aux accents brisés d’une âme troublée, aux saillies rapides de la gaieté. […] La fille de Caton, qui jusqu’alors avait réprimé les expressions de sa douleur, en voyant ce tableau, ne put contenir l’excès de son émotion. […] Quoique les Romains, par la pureté de leurs mœurs et les progrès de leur esprit, fussent plus capables que les Grecs d’affections profondes, on ne trouve point dans leurs écrits, jusqu’au règne d’Auguste, la trace des idées et des expressions sensibles que ces affections devaient leur inspirer.

695. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

L’expression, chez lui, est juste, d’une propriété extrême, toujours exacte à la réflexion, spirituelle, quelquefois jolie, volontiers épigrammatique, même dans le sérieux. Ce qui frappe surtout, c’est le contraste de cette expression, bien souvent un peu mince, avec la grandeur de l’esprit qui embrasse et parcourt les plus hauts sujets. […] Mais ce qu’il savait être surtout dans ces leçons, c’était un improvisateur animé, intéressant, pittoresque, anatomiste avec feu devant les gens du monde, décrivant les appareils des sens d’une manière visible, les développant de l’expression et du geste, poursuivant du doigt dans l’espace les moindres filets nerveux, les fibres les plus ténues, déroulant à n’en pas finir des considérations peu précises, peu concluantes, mais ingénieuses souvent et déliées comme leurs objets.

696. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — III. (Suite et fin.) » pp. 128-145

Je n’insisterais pas à ce degré sur Carrel, si ce n’avait pas été l’homme le plus remarquable de l’opposition antidynastique dans la presse sous Louis-Philippe, l’adversaire le plus élevé et le plus redoutable, et celui qu’on dut regretter le plus de s’être aliéné ; si, à travers ses violences mêmes, il n’y avait pas en lui un fonds d’esprit juste et de bon sens sévère ; si, dans l’expression et dans le style enfin, il ne se trouvait pas être un écrivain de vieille roche et de la meilleure qualité. […] Carrel le savait bien ; tout en saluant d’une expression de regret et de compassion le ministère Laffitte au moment de sa retraite, il disait, en le qualifiant d’un mot : « M.  […] Son expression luit rarement, et ne rit jamais.

697. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

» ce sont là les expressions les plus communes et les plus terre-à-terre ; le reste monte et s’élève à proportion, et se perd au plus haut de l’Empyrée. Il semblerait, en vérité, à lire ces lettres, que Marguerite n’a point aimé de cœur, mais plutôt de tête et d’imagination ; que, ne sentant proprement de l’amour que le physique, elle se croyait tenue d’en raffiner d’autant plus l’expression et de pétrarquiser en paroles, elle qui était si positive dans le procédé. […] possédez la chose aimée. » C’était pour échapper au moins en idée à ce prompt désenchantement, à ce triste et rapide réveil, qu’elle prodiguait ainsi les expressions figurées, mythologiques, impossibles : elle cherchait à se faire un voile ; le cœur n’y était pour rien.

698. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Quelle agréable expression, et qui nous rappelle Mme de Sévigné disant, au contraire, que, de ne point se plaire aux lectures solides, cela donne les « pâles couleurs » ! […] Lucien, qui se moque de ces historiens prétendus poétiques, qui ont, au début, des invocations pleines d’emphase, Lucien, qui veut de la simplicité dans l’histoire, admet pourtant que le style y participe, en certaines occasions, de la poésie : « Il faut alors qu’un petit vent poétique enfle les voiles du navire, et le tienne élevé sur le sommet des flots. » Il ne veut point que la diction s’élève trop, il suffit que la pensée soit un peu plus haut que l’expression, celle-ci à pied et tenant de la main, comme en courant, l’autre qui est montée et qui devance. […] Ne leur demandez point d’ailleurs cette continuité dans les caractères, cette suite dans l’action et dans l’expression qui fait la force intérieure de ceux de M. 

699. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIII : De la méthode »

Continuons l’analyse, ou plutôt continuez-la seul ; vous réduirez de même à des faits ou à des rapports toutes les expressions des sciences physiques. […] Traduisez de même les autres expressions un peu compliquées ou vagues, en reproduisant les circonstances où elles peuvent naître. […] Vous voyez que ma traduction n’était pas complète ; mon expression indiquait un fait, mais non les parties de ce fait ; elle désignait un passage ou changement d’état, mais en gros, sans détailler tout ce qui le compose.

700. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE STAEL » pp. 81-164

L’instinct dramatique, le besoin d’émotion et d’expression, se trahissaient en tout chez elle. […] » D’où vient maintenant qu’un poëte par l’âme et par l’expression, comme l’était Mme de Staël, abordant en vers un sentiment si profond chez elle, l’ait prosaïquement rendu ? […] Votre expression a souvent de l’éclat, de l’élévation… Mais, malgré tous ces avantages, votre ouvrage est bien loin d’être ce qu’il aurait pu devenir. Le style en est monotone, sans mouvement, et trop mêlé d’expressions métaphysiques. […] Leurs défauts mêmes deviennent des traits de peinture et ne sont pas sans charme, comme l’expression autrefois aimée d’un goût qui a fait place à un autre, lequel à son tour passera également.

701. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — F — Frémine, Aristide (1837-1897) »

On lui doit, en outre, de nombreuses pièces de vers d’une expression fort originale, qui ont paru dans diverses revues, et formeront un troisième volume, sous le titre de : Chants de l’Ouest.

702. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Marrot, Paul (1850-1909) »

Cette poésie, pleine de sursauts, nourrie de trouvailles d’expressions, d’observations spécialement physiologiques, éclate parfois en des cris d’humanité pénétrants.

703. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 155

Si on le lit aujourd’hui de sang froid, on y remarquera plutôt ce ton de chaleur & d’emportement qui naît de la prévention, que le caractere de cette véritable éloquence, qui réunit la vérité des faits à la force de l’expression.

704. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » p. 82

Après avoir enseigné, pendant plus de vingt ans, la Rhétorique, il est étonnant que cet Ecrivain paroisse avoir perdu totalement de vue cette réflexion de Longuin :« Rien n’avilit autant le Discours, que les termes bas & vicieux ; ce sont comme autant de taches & de marques honteuses qui flétrissent l’expression. »  

705. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Le nombre de nations qui sont arrivées à être en possession parfaite d’elles-mêmes, à présenter au monde une expression définitive de leur être intime, n’est pas grand. […] Non seulement son talent aime les expressions fortes, mais l’esprit de système le contraint à ne choisir que celles-là. […] Non, ce sont quatre expressions d’un même fait moral qui a agi diversement selon que la chair était plus lourde ou plus violente, plus légère de sang ou plus nerveuse. […] Il y a donc là un accent de plus dans l’expression, un degré de plus dans l’énergie d’un caractère déjà singulièrement tranché. […] Il y a en anglais une expression intraduisible qui seule peut bien peindre Sterne : knowing.

706. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Le mauvais goût et le vice marchent presque toujours ensemble ; le premier n’est que l’expression du second, comme la parole rend la pensée. […] Le cri deviendra le premier mot de son vocabulaire, et ainsi de suite, jusqu’à l’expression des idées purement intellectuelles. […] Il y répand partout une modération féconde, pour employer la belle expression de d’Aguesseau. […] Il y a plus, il est probable que ce prince eût corrigé cette expression, s’il eût prévu que ses écrits seraient un jour publiés. […] Quand l’âme est élevée, les paroles tombent d’en haut, et l’expression noble suit toujours la noble pensée.

707. (1887) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Troisième série pp. 1-326

Quant à la démonstration d’excellence, elle était pour Boileau dans la supériorité des « miracles » de Racine, selon sa propre expression, sur les chefs-d’œuvre même de « l’audace » de Corneille. […] Admirerait-il moins cette expression de Bossuet : « ce grand Dieu qui, du centre de son éternité, développe tout l’ordre des siècles » ? […] Autre trait, non moins essentiel encore, du vrai marivaudage : l’art de déguiser « le mal de l’action », comme disait Molière, sous l’élégance, la recherche et l’obscurité voulues de l’expression. […] Mais déjà, selon l’expression de ses biographes, « un besoin impérieux, devant lequel tout autre se tait, même celui de la gloire », avait commencé de le dominer. […] C’est à dessein que j’essaye d’élargir ici l’expression, parce qu’il s’agissait d’autre chose, en effet, entre Voltaire et Rousseau, que de belles-lettres ou de bon goût.

708. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Avertissement. » pp. 1-2

Chaque fois que je m’y remets et que je rentre dans cette veine de critique toute pratique, je tâche d’y introduire une proportion plus grande de vérité, et d’apporter dans l’expression plus de franchise.

709. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — H — Hennique, Nicolette (1886-19..) »

La valeur de ce livre de Nicolette Hennique : Des rêves et des choses, est grande, car on y trouve quelque chose de nouveau ; et cette nouveauté, ce n’est ni la vigueur, ni la mélancolie, ni la beauté qui certes y abondent ; ce ne sont pas non plus les savantes expressions, ni les bons vers — toutes ces qualités ne font que mettre ce livre parmi les meilleurs — la vraie nouveauté qui ressort de l’ouvrage de Nicolette Hennique, c’est cet élément imprécis mais certain qui distingue les œuvres solides et qui, cette fois, nous dénote la naissance d’un nouveau caractère.

710. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — P — Prarond, Ernest (1821-1909) »

Les connaisseurs aimeront ces vers pleins d’aperçus nouveaux, de tours étranges, d’expressions créées, dans lesquels le bizarre même à sa franchise et son naturel ; ils goûteront ces fruits de forte saveur sous une écorce parfois étrange et rude.

711. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 319

Il faut, pour être assuré de toujours plaire, sur-tout dans le genre de l’apologue, s’attacher à des ressorts plus puissans, c’est-à-dire à cette chaleur vivifiante qui naît de la force du sentiment & que l’esprit ne sauroit jamais suppléer, à cette variété de tours & d’images qui réveille l’attention & écarte l’ennui, & sur-tout à ce choix d’expressions nobles & figurées qui distingue le vrai Poëte du froid Versificateur.

712. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — C — article » p. 50

Tel est, entre autres, le Conte du Rossignol, qu’on a rajeuni depuis, sans y rien changer que les expressions.

713. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 376

Plusieurs de nos Poëtes tragiques n’en ont pas redouté la lecture, & n’ont pas dédaigné d’y puiser des idées, & quelquefois se sont bornés à en rajeunir les expressions.

714. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 506

Hersan ne sont pas de la premiere force ; elles annoncent plus de goût dans l’expression, que de richesse dans l’invention ; malgré cela, on peut les mettre à côté de ce que plusieurs Modernes ont composé de mieux en ce genre.

715. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — J. — article » p. 539

Nous ne parlerons pas de sa Continuation de l’Histoire de sa Société, où la richesse de l’imagination & l’élégance de l’expression se font autant sentir, que les préjugés ultramontains qui lui attirerent la condamnation du Parlement de Paris.

716. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 88

L’expression favorite de cet Historien est, on dit.

717. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIVe entretien. Madame de Staël. Suite »

« Un philosophe français a dit, en se servant de l’expression la plus rebutante, que la pensée n’était autre chose qu’un produit matériel du cerveau. […] Certes, ils auraient fait une déplorable découverte ceux qui auraient détrôné notre âme, condamné l’esprit à s’immoler lui-même, en employant ses facultés à démontrer que les lois communes à tout ce qui est physique lui conviennent ; mais, grâce à Dieu, et cette expression est ici bien placée, grâce à Dieu, dis-je, ce système est tout à fait faux dans son principe, et le parti qu’en ont tiré ceux qui soutenaient la cause de l’immortalité est une preuve de plus des erreurs qu’il renferme. […] Le sort en est jeté, j’écris ce livre : qu’il soit lu par mes contemporains ou par la postérité, n’importe ; il peut bien attendre un lecteur pendant un siècle, puisque Dieu lui-même a manqué, durant six mille années, d’un contemplateur tel que moi. » Cette expression hardie d’un orgueilleux enthousiasme prouve la force intérieure du génie. […] Le feu d’esprit, qui habituellement le traversait et ranimait de mille nuances rapides, ne s’y marquait plus que par une expression singulière de mobile et pénétrante inquiétude, une sorte de divination dans le chagrin : on se sentait affligé en la voyant. […] Si la vanité littéraire hésite à prononcer, le bon sens et la vertu n’hésitent pas : la plus grande des deux, c’est celle qui est le plus femme, c’est-à-dire la plus obscure ; car selon la juste expression d’un ancien, la gloire déplacée n’est que la plus grande des petitesses.

718. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

Rien de plus inégal que ce vaste poème : comme il y a très loin de la sincérité du sentiment à la sincérité de l’expression, la rhétorique y abonde, une rhétorique lyrique qui ne vaut pas mieux que la rhétorique oratoire : d’Aubigné réussit à être vague et boursouflé dans la peinture de la Saint-Barthélemy ! […] La pastorale française modifie en même temps le ton du genre et l’expression des sentiments : ils prennent quelque chose de plus prosaïque, mais aussi de plus solide. […] Mais il a peint des amants respectueux, des hommes du monde qui attendent patiemment la volonté des dames, incapables de brutalité, tout attachés à mériter par la constance de leur sentiment et l’ingéniosité de ses expressions : ils donnaient à nos gentilshommes des leçons de galanterie mondaine et de savoir-vivre. […] Comme la sociabilité a formé et lie toujours le monde, la distinction est un art de plaire ; tout ce qu’on a en soi et sur soi, réalité solide ou surface, il faut l’avoir pour les autres, ou s’en donner l’air : cette coquetterie de parure par laquelle la beauté semble faire don de soi au public, et prendre intérêt à son plaisir, quand il s’agit de la pensée et de l’expression de la pensée, c’est l’esprit. […] On est ainsi, tout à la fois, très près et très loin de l’art : ou, si l’on veut, on a un art d’agrément, et non d’expression, un art tout orienté vers le public, pour lui plaire à sa mode, et non vers la nature, pour la rendre selon la vérité.

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