/ 2298
1501. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Lamennais »

Resté un enfant dans la vie, comme, du reste, cette promptitude à la colère le prouve bien, car il n’y a d’hommes forts que les sangs-froids ou les sangs-froidis, — à qui le monde appartient, disait Machiavel, — resté un enfant, comme un poète de métaphysique, par l’esprit, et un prêtre par le cœur et les habitudes (les prêtres sont toujours des enfants quand ils sont descendus de l’autel), Lamennais n’avait pas grand goût pour la réalité qui le blessait souvent, qui le faisait bondir de souffrance, cette sauvage hermine de Bretagne, et il s’en détournait, se retirant violemment en lui-même, les yeux retournés en dedans et attachés sur une idée, — une idée qui fut la vérité pendant une moitié de sa vie et une erreur pendant l’autre moitié, — mais qui, dans tous les temps, a suffi aux ardeurs et aux aspirations de cette âme désintéressée !

1502. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame de Sabran et le chevalier de Boufflers »

Toutes deux purent suffire au besoin de Lettres de ce siècle aux grandeurs publiques, qui avait autre chose à faire que de se regarder dans l’âme, pour raconter ce qu’il y voyait, à la première personne, dans des épanchements ou des chuchotements particuliers.

1503. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « II. Jean Reynaud »

Nous ne pouvions ni pour le public, ni pour nous, ni pour le livre même dont il s’agit, l’examiner dans le détail trop spécial, trop technique des nombreuses questions qu’il soulève, mais le peu que nous avons dit suffira.

1504. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

« Ou un seul homme, dit-il un jour, suffirait pour sauver la société ; cet homme n’existe pas, ou, s’il existe, Dieu dissout pour lui un peu de poison dans les airs ! 

1505. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVIII. Lacordaire »

La pureté de son intention, certes, personne n’en est plus sûr que moi ; mais quand il s’agit d’une de ces audaces d’observation qui ressemble presque à de l’irrévérence, la pureté d’intention sauve-t-elle tout, et suffit-elle pour entrer dans ce secret, gardé par l’Évangile, de l’espèce d’amitié qu’avait le Sauveur pour la Madeleine ?

1506. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXIX. M. Eugène Pelletan »

C’est que, pour un livre pareil, il ne suffit pas d’en avoir l’audace.

1507. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « M. Funck Brentano. Les Sophistes grecs et les Sophistes contemporains » pp. 401-416

L’histoire de cette sophistique, toujours la même sous des noms changeants, soit qu’elle s’appelle « l’éristique », dans l’Antiquité, soit « l’antinomistique », dans les temps modernes, et montrée exclusivement dans son essence et dans ses résultats généraux, suffisait.

1508. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Gratry »

La théorie de la certitude, malgré le style qui fit un instant sa fortune, la théorie de la certitude, qui est le principe un peu brutal du nombre introduit en philosophie, a péri sous le nombre des attaques, — et nous ajouterons sous leur raison, car le nombre ne nous suffit pas.

1509. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

je ne suis pas de ceux-là qui prétendent que la langue française commence aux Provinciales, — opinion ridicule de Villemain, cet eunuque littéraire opéré par le Goût, — quand, avant Pascal, on avait Rabelais d’abord, ce mastodonte, émergé radieusement du chaos dans le bleu d’un monde naissant, puis, après Rabelais, — qui suffisait seul, — Ronsard, Régnier, Racan et d’Aubigné lui-même.

1510. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Hector de Saint-Maur »

On ne peut pas citer les poètes comme Saint-Maur ; on aurait trop à citer et un chapitre n’y suffirait pas.

1511. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Le Sage » pp. 305-321

Il n’y avait là que de l’à-peu-près historique, mais cela suffit aux imaginations débiles, des mœurs à fleur d’épiderme, mais sur lesquelles on n’était pas blasé.

1512. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Honoré de Balzac » pp. 1-15

Nous n’en dirons qu’un mot, mais il suffira.

1513. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Edmond About » pp. 91-105

Deux mots suffiraient.

1514. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Mais la presque gloire de Louis Bouilhet ne suffisait point à réveiller l’atonie universelle. […] et les morceaux de haut goût où il suffit de s’écrier : “L’âme est immortelle” ou “Le chien est l’ami de l’homme” pour être considéré comme un penseur. […] Mais, encore une fois, s’il est nécessaire d’être homme et mieux homme qu’un autre pour être un créateur, cela ne suffit pas. […] Ce seul livre suffirait, mon cher Armand, à les faire luire sur votre nom. […] Il suffit de dire qu’il n’y a pas en ce temps un inspiré plus sincère, un artiste plus sûr, plus charmant, plus fin.

1515. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Il ne suffit pas de n’être pas chrétien ; il faut encore n’être pas français. […] Ducros est sur ce point absolument de mon avis, et du reste il suffit de lire. […] Les beautés éclatent, et il suffit de les constater ; il suffit d’adhérer au sentiment public, qui, le plus souvent, les a découvertes tout d’abord. […] Il a moins de mérite que nous à être de son opinion ; mais il en est, et cela suffit. […] Une association et une dissociation des images lui suffit.

1516. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Quelques lignes d’une forme entrevue suffisent parfois à nous donner un grand amour. […] Cela suffit à la vraisemblance et partant à l’intérêt du récit de M.  […] Il suffit qu’un homme se dise juste pour qu’il inspire une véritable répulsion. […] Quelques traits suffiront à peindre sa fierté. […] Le malheur suffirait à rendre l’homme auguste à l’homme.

1517. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Il lui suffit d’être un lettré et un homme de goût. […] Il lui suffit qu’on serve la France. […] Mais il suffit, pour tout dire, de rappeler le témoignage que M.  […] Il me suffira de vous avoir présenté M.  […] Le sentiment y suffit çà et là.

1518. (1906) Propos de théâtre. Troisième série

Il était de Tréguier et cela suffisait très bien. […] Vous avez l’appui de la philosophie ; cela suffit. » Ce petit discours peut être dur ; il peut être bête ; mais non plus dur ni plus bête que la conduite de Philaminte envers Henriette et Martine. […] Dans ce cas, il est inutile de laisser la parole à ceux qui arrivent en retard et il suffit de les remercier in globo, comme encore cela se doit. […] Il suffit d’une question d’Armande pour que l’idée fixe reparaisse ! […] « Cette action de la comédie, ce mouvement des scènes suffiraient largement à intéresser des spectateurs intelligents.

1519. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 11-15754

Mais il suffit d’observer que l’usage des cas n’est pas restraint à celui que leur dénomination énonce. […] Il suffit que nous sachions que tout est gouverné par des lois générales & constantes, pour être fondés à croire que les corps qui nous paroissent semblables, ont les mêmes propriétés, que les fruits d’un même arbre ont le même goût, &c. […] Il suffit au dessein du Créateur, qu’elle forme une grande probabilité, que ses exceptions soient rares, & d’une influence peu étendue. […] Les seuls sens ne nous suffisent pas : car quel est l’homme du monde qui puisse examiner par lui-même toutes les choses qui sont nécessaires à la vie ? […] Les autorités que je viens de rapporter doivent suffire, ce me semble, pour détruire le préjugé répandu dans toutes nos grammaires, que notre de est la marque du génitif : mais encore un coup, puisqu’en Latin templum de marmore, pannus de lana, de n’est qu’une préposition avec son complément à l’ablatif, pourquoi ce même de passant dans la langue Françoise avec un pareil complément, se trouveroit-il transformé en particule, & pourquoi ce complément, qui est à l’ablatif en Latin, se trouveroit-il au génitif en François ?

1520. (1902) La poésie nouvelle

  Ces considérations suffisent pour restituer à la métaphysique ses droits. […] Il suffit, pour s’en rendre compte, de lire le Petit traité de poésie française de Théodore de Banville, qu’on peut considérer, comme l’Art poétique de l’école. […] Il suffirait, pour s’en convaincre, de lire avec bonne foi quelque beau poème de Kahn, de Griffin, de Verhaeren ou de Régnier.‌ […] Ne serait-il pas extraordinaire qu’un art savamment archaïque, comme celui que recommande Moréas, y pût suffire ? […] A de nouvelles conceptions des choses l’ancienne métrique ne suffisait plus !

1521. (1886) Le roman russe pp. -351

On l’a appelé réaliste, naturaliste : suffirait-il, pour le définir, de l’appeler démocratique ? […] Toutefois, ces difficultés de forme ne suffisent pas à expliquer la résistance que ces écrivains rencontrent dans une grande partie du public. […] Certains lettrés prétendent que la pensée française n’a que faire de courir l’univers, et qu’il lui suffit de se contempler elle-même dans son miroir parisien. […] Il nous suffira de constater qu’à l’heure où un importun élevait ainsi la voix, la question religieuse n’existait pas. […] Au surplus, il suffit de lire attentivement Terres vierges pour marquer le degré de latitude où Tourguénef entendait se maintenir.

1522. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Camille Jordan, et Madame de Staël »

De quelque nom que notre haute philosophie se plaise à les désigner, quelles que soient les jouissances plus exquises auxquelles nous pensons qu’elle nous admet, c’est là que le peuple a arrêté ses volontés, c’est là qu’il a fixé ses affections ; il nous suffit, et tous nos systèmes doivent s’abaisser devant sa volonté souveraine. » Tout en s’exprimant en philosophe, on le voit, mais en philosophe politique qui cherche à donner un fondement profond à la moralité, et qui ne dédaigne pas de lui trouver la sanction la plus intime, il essayait d’attendrir pour la première fois la législation, et, en la laissant égale pour tous les cultes, de lui infuser une pensée de sollicitude et d’intérêt supérieur pour chacun d’eux : « Que la liberté que vous accordez à tous les cultes ne soit donc point en vous l’effet d’une égale indifférence, encore moins d’un égal mépris, comme cette tolérance dont se parèrent longtemps de dangereux sophistes ; mais qu’elle soit le fruit d’une sincère affection. […] Nous n’avons pas besoin de répéter ici ces louanges sans mesure que lui-même dédaigne ; il nous suffit de dire, dans un langage plus simple parce qu’il est plus vrai : Oui, ce citoyen a bien mérité de son pays. […] « Mais en même temps nous nous hâtons de le déclarer, et nous voulons que la France l’entende, ces motifs qui ont pu suffire à quelques-uns, qu’ils ont longuement commentés, dont ils ont avec adulation exagéré la force, ne nous auraient jamais décidés seuls à une concession de cette étendue ; nous nous fussions défiés même de ce sentiment de la reconnaissance, comme trop sujet à égarer les peuples, même de cette importance de la stabilité, comme devant être cherchée plus dans les lois que dans les hommes, si à ces considérations ne s’en était jointe une autre qui a dû fixer nos suffrages : c’est la ferme confiance que bientôt Bonaparte, appréciant les nouvelles circonstances qui l’entourent, n’écoutant que l’inspiration de son âme et la voix des bons citoyens, posera lui-même à l’autorité dont il est investi une limite heureuse, qu’il ne profitera de cette prolongation de sa magistrature que pour achever, réaliser des institutions qu’il n’est pas temps de détailler encore, mais dont le but sera de former dans le sein de ce peuple un pouvoir véritablement national, qui seconde le sien, qui le tempère, qui le supplée au besoin, qui en assure la transmission légitime. […] Il ne suffit pas qu’on convienne avec eux que la vengeance est défendue, ils ne peuvent pas même entendre qu’elle est naturelle.

1523. (1927) André Gide pp. 8-126

L’Immoraliste est de la veine nietzschéenne, comme le titre suffit à l’indiquer. « Nous autres immoralistes… » C’est une formule de Nietzsche. […] Une édition quelconque y suffit. […] D’ailleurs, c’est beaucoup, et cela suffit à nous charmer, voire à nous instruire, dès qu’on a fait le point. […] Il nous dit bien de quelques jeunes gens qu’ils sont beaux, et apparemment cela lui suffit.

1524. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Je n’ai pu traduire toutes les métaphores bibliques de ce morceau, qui a gardé quelque chose de l’accent de Milton et des prophètes puritains ; il suffit cependant pour montrer vers quelle issue se portent les diverses tendances de ce grand esprit, quelle est sa pente, comment l’esprit pratique, la science et le talent historique, la présence incessante des idées morales et religieuses, l’amour de la patrie et de la justice, concourent à faire de lui l’historien de la liberté. […] On n’a vu jusqu’ici que le raisonneur, le savant, l’orateur et l’homme d’esprit ; il y a encore dans Macaulay un poëte ; et, quand on n’aurait pas lu ses Chants de l’ancienne Rome, il suffirait, pour le deviner, de lire quelques-unes de ses phrases où l’imagination, longtemps contenue par la sévérité de la démonstration, déborde tout d’un coup par des métaphores magnifiques, et se répand en comparaisons splendides, dignes par leur ampleur d’être reçues dans une épopée. […] Me suffit-il, pour comprendre l’action de Marlborough ou de Jacques, de me rappeler une disposition ou qualité qui l’explique ? […] Le mathématicien peut aisément démontrer qu’une certaine force, appliquée au moyen d’un certain levier ou d’un certain système de poulies, suffira pour élever un certain poids.

1525. (1902) Le critique mort jeune

Quand il fait semblant de m’obéir, cela me suffit. […] Mais il avait besoin, par tempérament, d’un champ plus large que celui qui suffit aux querelles d’érudits. […] Cela ne suffit peut-être pas à tout le monde. […] Il a suffi à M.  […] Dix existences n’y suffiraient pas.

1526. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome I

Il avait bien compris le goût des lecteurs français : il savait donner un tour plaisant aux plus graves préceptes : il savait qu’il ne suffisait pas d’instruire, mais qu’il fallait encore amuser et plaire ; c’est tout cela qui donne à son style un tour si vif, si vrai et si naturel. […] Ce n’est pas qu’ils ne connussent très bien l’amour et ses tourments ; il suffit, pour s’en convaincre, de lire celles de leurs comédies que Plaute et Térence ont traduites ; mais ils ne pouvaient regarder un amoureux comme un héros digne de figurer sur le théâtre de Melpomène. […] Le vrai sublime répandu dans ces deux rôles suffirait seul pour élever cette tragédie fort au-dessus des ouvrages les plus vantés du dernier siècle ; elle mérite un rang distingué parmi les chefs-d’œuvre de son auteur. […] Cléopâtre, qui doit connaître les hommes, n’ignore pas que l’offre d’une couronne peut entraîner au crime ceux même qu’on croit les plus vertueux ; et quand même elle pourrait craindre que sa proposition ne fût pas acceptée, elle en tire toujours un grand fruit, en gagnant du temps, en retardant son abdication : cela suffit pour que la proposition soit parfaitement dans la vraisemblance théâtrale. […] La vraisemblance d’une tragédie ne consiste pas à mettre sur la scène ce qui arrive tous les jours dans la société : ce poème ne veut, au contraire, que des incidents nouveaux, étonnants, extraordinaires ; il suffit, pour qu’ils soient vraisemblables, qu’ils ne soient ni impossibles, ni contradictoires, ni hors de la nature.

1527. (1900) Molière pp. -283

Eh bien, la Comédie elle-même, quelques libertés qu’elle eût de ce temps, — elle en avait d’immenses qu’elle a perdues depuis, — la Comédie n’a pas suffi à recevoir tout l’emportement de sa fièvre bouffonne. […] Ce fut un tort ; mais ce qui peut le faire comprendre, c’est que l’hôtel de Rambouillet et l’hôtel de Bourgogne suffisaient à la cour, à la société polie de Paris, tandis que lui-même ne suffisait peut-être pas toujours aux beaux esprits du Limousin et de l’Armagnac. […] Mais cette raison toute générale ne suffit pas pour expliquer le caractère d’acharnement qu’il porta dans cette lutte depuis 1666 jusqu’au jour de sa mort. […] Et, comme dans l’État le roi seul était tout, cette cause latente suffisait pour faire que, dans la famille, à certains moments — les plus graves, — il n’y eût qu’un personnage qui comptât : le père, le mari. […] Mais la vanité, qui aiguise l’esprit ou qui l’aveugle, ne suffit point pour le susciter, et on calomnie l’esprit lui-même en ne le croyant propre qu’à produire de jolies bagatelles et à se railler.

1528. (1927) Les écrivains. Deuxième série (1895-1910)

— Cela suffit ! […] Mais parce que les vingt-quatre colonnes du Journal ne suffiraient pas à contenir les cent vingt-huit questions — d’ailleurs joyeusement scientistes — qui composent ce monumental morceau. […] et ses quotidiennes violences, et ses mensonges, et ses folies, et ses crimes, suffisent à notre curiosité momentanément dévoyée. […] … Un feu d’artifices roulant et pétaradant… et dont la moindre étincelle suffisait à embraser les fusées, les soleils et les bombes ! […] Il suffirait de remplacer les scènes érotiques par des scènes d’exaltation religieuse, ce qui est facile, et les gravures trop libres, par de belles images sulpiciennes !

1529. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « M. DE LA ROCHEFOUCAULD » pp. 288-321

Qu’il suffise d’indiquer que, durant la première Fronde et le siége de Paris (1649), son ascendant fut entier sur Mme de Longueville. […] Tout en mettant le doigt sur le ressort, il faisait semblant de reculer un peu ; il lui suffisait de ne pas lâcher prise.

1530. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Selon Malherbe, il ne suffit pas de cueillir à pleines mains et de ramasser dans un pré de belles fleurs, il faut savoir encore les tresser. […] Mais quand il n’est pas soutenu par ce jet immédiat, dès qu’il compose, il faiblit ; le style fait défaut ; dans l’épopée et dans la tragédie, il s’est contenté de ce qui suffisait à son temps, c’est-à-dire à la moins poétique des époques.

1531. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

Pour s’en convaincre, il suffit d’écouter pendant une heure son ramage ; il est d’une flexibilité étonnante : je suis persuadé que toutes les nuances d’émotion, étonnement, gaieté, contrariété, tristesse, s’y traduisent par des variétés de ton. […] Tant qu’il n’y eut dans le troupeau que des moutons et des vaches, la combinaison béé-mou-ou suffisait ; mais quand le troupeau renferma des animaux d’une autre espèce, les sons distincts qui les désignaient durent être évités avec un soin particulier, parce qu’ils auraient produit des méprises. — De même encore, il était assez facile d’imiter les cris du coucou et du coq, et les sons coucou, coq pouvaient être employés comme les signes phonétiques de ces deux oiseaux.

1532. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Quand, dans un homme, vous avez observé et noté un, deux, trois, puis une multitude de sentiments, cela vous suffit-il, et votre connaissance vous semble-t-elle complète ? […] Selon qu’on prend la table à un moment ou à un autre, l’empreinte est différente ; et cela suffit pour que l’effet total soit différent.

1533. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXIVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (5e partie) » pp. 65-128

Cela lui suffisait, il était resté gai comme l’insouciance, pourvu que la conscience fût en repos, et qu’il contemplât comme le philosophe Vico les grandes et les petites oscillations de ce pendule alternatif des révolutions des empires, mouvement toujours, progrès quelquefois, vicissitude éternelle qui va du bien au mieux, du mieux au mal, du mal au pire, de la vie à la mort, de la vieillesse des sociétés à la mort des peuples, et qui se confie à Dieu du sort des nations ; il était content. […] Qui sera juge de l’oppression d’un seul, et quelle société subsisterait un seul jour, s’il suffisait qu’un seul se sentît ou se crût arbitrairement opprimé ?

1534. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

Il n’y avait pas besoin de loi contre elles, il suffisait de l’ostracisme du dégoût. […] XIII La conversation ne suffisait déjà plus à cette ardeur de gloire que l’éducation avait allumée dans l’âme de la jeune fille.

1535. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre I. Le quatorzième siècle (1328-1420) »

La politique propre d’Oresme tient en ce seul mot : le roi serviteur de l’État ; et cela suffit à prouver, en dépit de tous les contresens qu’il a pu faire dans ses traductions, que pour l’essentiel il a bien lu Aristote. […] Il y a encore de la gaucherie, de l’inégalité dans sa démarche : mais il suffit de lire dans son unique plaidoyer la vive et dramatique narration de la procession des écoliers bousculés par les gens du sire de Savoisy, pour reconnaître qu’en nommant Cicéron, il indique son maître et son modèle.

1536. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Deux lignes lui suffisent à indiquer une bataille : ce qui importe, c’est le résultat, c’est le procédé diplomatique qui en extrait ou en répare les conséquences. […] Et si l’on concevait encore des doutes sur l’œuvre qu’elle a fait, il suffirait, pour s’épargner des anathèmes naïfs et une déploration superflue, de se demander à qui l’oubli du vrai et du bon moyen âge, est imputable.

1537. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Il me suffira de rappeler que les principaux débats engagés dans les Chambres de la Restauration ont porté sur la liberté des cultes et toutes les questions particulières qui y tenaient, sur les biens nationaux et l’indemnité des émigrés, sur la liberté de la presse, sur l’organisation du système électoral, sur les majorats, sur la guerre d’Espagne, sur toutes sortes d’applications ou d’interprétations de la Charte, et, au fond, toujours sur la question de savoir qui l’emporterait, de la Révolution, ou de l’« absolutisme ». […] On le lira, comme on lit l’Heptaméron ou les Joyeux devis, sans y chercher un sens plus grave, et cela suffira pour le faire lire.

1538. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

Il garde le souvenir et le nom de Karatief comme un talisman ; depuis lors il lui suffit de penser à l’humble moujick pour se sentir apaisé, heureux, disposé à tout comprendre et à tout aimer dans la création. […] Quant à l’autre caractère distinctif des romans russes : « l’intelligence des dessous, de l’entour de la vie… l’inquiétude du mystère universel », pensez-vous que cela suffise davantage à les différencier des nôtres ?

1539. (1912) Enquête sur le théâtre et le livre (Les Marges)

Bon comptable, il se dit : Tous les problèmes étant posés, jouons autour ; et cela lui suffit, il ne s’inquiète plus, ne résout rien. […] Si cette réponse odieusement terre à terre ne vous suffît pas, je me permets de vous renvoyer à un livre récent de M. 

1540. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre cinquième »

Mais ces beaux échantillons de style ne suffisent pas à donner à son discours un corps et un caractère. […] C’est ce qui prouve que beaucoup de talent ne suffit pas pour la tragédie, et qu’il fallait du génie, même pour n’y tenir, comme Voltaire, que le second rang.

1541. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, le 8 décembre 1885. »

Il est vrai que le français a une musique plus délicate, et moins monotonale par conséquent ; mais cela suffit pour relever à nos yeux l’opéra français et nous faire oublier le néant artificiel de nos entrepreneurs de musique. […] Il est le véritable motif qui anime tout le drame, et pour donner une faible idée de sa circulation, il suffira de le retrouver à la fin de l’acte deux, où il se dégage de la sérénade de Beckmesser, pour se retrouver dans toute sa simplicité et son charme, page 235.

1542. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Pie V en saint personnifie l’inquisition ; le canoniser suffisait, pourquoi l’innocenter ? […] Pour déshériter l’humanité de tous les grands testaments des génies, il suffisait d’une sottise de copiste ou d’un caprice de tyran.

1543. (1772) Éloge de Racine pp. -

Et ne suffit-il pas qu’on se souvienne que pendant un moment Pradon parut triompher de Racine ? […] Neuf ans lui avaient suffi pour produire tant de chefs-d’oeuvre.

1544. (1857) Articles justificatifs pour Charles Baudelaire, auteur des « Fleurs du mal » pp. 1-33

Un mot suffira pour ceux qui ne l’ont pas lu. […] Mais les bijoux perdus de l’antique Palmyre, Les métaux inconnus, les perles de la mer, Montés par votre main, ne pourraient pas suffire À ce beau diadème éblouissant et clair.

1545. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

Qu’il nous suffise de rappeler qu’ils méritent leurs noms et nos éloges, principalement parce qu’ils cultivent un champ dont leurs devanciers avaient à peine défriché une partie. […] Victor Hugo, dans tous les genres, et ce grand roman historique de Cinq-Mars, qui eût suffi pour faire la réputation de M. 

1546. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Crétineau-Joly »

Un mot suffit aux hommes qui ont du regard, et nous n’en dirons qu’un. […] Et cela suffisait, et bien au-delà, aux desseins des ennemis de l’Église.

1547. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — II. (Fin.) » pp. 330-342

de trier aussitôt parmi les catholiques ceux qui sont plus attachés à la royauté qu’au pape ; une bonne partie de ces catholiques sont tout prêts et s’offrent à servir, le maréchal de Biron en tête ; cela suffit : « Serénez votre visage, usez de l’esprit et du courage que Dieu vous a donnés, voici une occasion digne de vous. » La raison par laquelle il conclut est celle qui est la meilleure pour appuyer tous conseils de ce genre, et qui est le grand renfort des arguments : N’ignorez pas que vous êtes le plus fort ici ; voilà plus de deux cents gentilshommes de votre cornette dans ce jardin, tous glorieux d’être au roi ; si votre douceur accoutumée et bienséante à la dignité royale et les affaires présentes n’y contredisaient, d’un clin d’œil vous feriez sauter par les fenêtres tous ceux qui ne vous regardent point comme leur roi.

1548. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Poésies complètes de Théodore de Banville » pp. 69-85

En poésie on peut lancer et perdre bien des flèches : il suffit pour l’honneur de l’artiste que quelques-unes donnent en plein dans le but et fassent résonner tout l’arbre prophétique, le chêne de Dodone, en s’y enfonçant.

1549. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Lettres de la mère Agnès Arnauld, abbesse de Port-Royal, publiées sur les textes authentiques avec une introduction par M. P. Faugère » pp. 148-162

Faugère et les inconnus qu’il représente, que ces deux volumes devront s’ajouter désormais à la trentaine de volumes originaux et historiques qu’il suffit à l’homme de goût et au curieux raisonnable d’avoir dans sa bibliothèque, s’il veut connaître son Port-Roval très honnêtement et par le bon côté, par le côté moral, sans entrer dans la polémique et la théologie : c’était à peu près le chiffre auquel M. 

1550. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — II » pp. 161-173

Qu’il suffise de dire que Joubert, avec sa division, a été comme le centre et le noyau de Rivoli, qu’il a porté le premier poids de l’affaire, qu’elle a roulé longtemps sur lui, qu’il avait commencé la veille, qu’il a été chargé d’achever le lendemain de la victoire ; que dans l’immortelle journée, au moment le plus critique de la mêlée, quand on était tourné au revers de la chapelle de San Marco et qu’on allait être cerné, quand pendant deux heures d’horrible confusion et de refoulement les charges étaient alternatives ainsi que les déroutes, quand chacun sur son point et par où il pouvait, faisait rage (Berthier, Masséna, Leclerc, Lasalle), lui, il redevint grenadier, chargea à pied le fusil à la main, et reprit à la baïonnette les ouvrages de Rivoli.

1551. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — II » pp. 261-274

On cite de lui, par-ci par-là, des phrases et des mots ; cela suffit.

1552. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

Le chant doit-il intervenir habituellement là où il ne saurait se déployer et où le sermo pedestris, le récitatif à rimes plates suffit ?

1553. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

Il suffit que je sois bien d’accord avec vous pour me réjouir de ces bonnes aventures de parole, de ces victoires de renommée, récompense de votre vie courageuse et laborieuse, — et pour vous en souhaiter, comme je l’espère, beaucoup de semblables.

1554. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

Il suffit d’écouter ce que dit ce peuple, au moment où sa langue se délie, lorsque la réflexion ou l’imitation n’ont pas encore altéré l’accent originel.

1555. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre III. Retour à l’art antique »

Mais il n’est pas non plus un pur classique : l’art de Boileau, les règles de Voltaire ne lui suffisent pas ; et voici ce qu’il fait : il répète pour son compte la tentative de Ronsard, sans s’en douter, pour la même raison et de la même manière que Ronsard.

1556. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Banville, Théodore de (1823-1891) »

Ce mot suffirait pour indiquer le rang magnifique du poète : il a la joie !

1557. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre IV. Le théâtre des Gelosi » pp. 59-79

Ces exemples, non choisis parmi les pires, suffisent à montrer qu’une grande licence régnait sur le théâtre des Gelosi, et pourtant il est certain que cette troupe était en progrès sensible sous ce rapport et qu’elle frappait, au contraire, les contemporains par une décence inaccoutumée.

1558. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre IV. L’antinomie dans l’activité volontaire » pp. 89-108

Cela suffit pour que le moi se reconnaisse, pour qu’il se différencie du voisin, pour qu’il s’oppose au nous.

1559. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Une soirée chez Paul Verlaine » pp. 18-33

Tout son bagage personnel consistait en quelques livres de vers récents, offerts par leurs auteurs, et que suffisait à contenir une petite étagère de bois, noircie d’encre.

1560. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IV. La littérature et le milieu psycho-physiologique » pp. 126-137

Paris avait vu des milliers d’êtres humains emportés par une maladie inconnue et foudroyante ; des rues entières dépeuplées, au point que les fabricants de cercueils ne suffisaient plus à la consommation ; des cadavres empilés nus, pêle-mêle, à ciel ouvert, dans des charrettes quelconques ; des terreurs paniques, où la foule avait mis en pièces des hommes accusés d’empoisonner le vin et les fontaines ; le plaisir côtoyant la mort ; des mascarades plus folles que jamais ; et dans les théâtres mêmes des sachets de camphre, des seaux d’eau chlorurée destinés à conjurer le péril toujours invisible et présent.

1561. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Conclusion »

Elle suffit à montrer combien les études psychologiques sont plus vigoureuses et plus variées en Angleterre qu’en France.

1562. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Avertissement sur la seconde édition. » pp. 23-54

La Nation a déjà compris, &, sans nous, l’expérience eût suffi pour lui faire comprendre, que les inventions en Littérature sont moins des moyens de perfection & des signes de fécondité, que des causes de dépérissement & des preuves de foiblesse ; que la révolte contre les principes religieux est un symptome de vertige, & ne sauroit être le fruit du développement de la raison.

1563. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « De la question des théâtres et du Théâtre-Français en particulier. » pp. 35-48

Le souffle vivifiant de la liberté, dans un premier moment d’inspiration générale et d’enthousiasme, suffit certes à féconder les talents ; mais, en se prolongeant, il s’épuise ou s’égare : l’enthousiasme, sans points d’appui, sans foyers réguliers qui le concentrent et l’alimentent, se dissipe bientôt comme une flamme.

1564. (1913) Le bovarysme « Quatrième partie : Le Réel — IV »

Ce caractère d’utilité fondamentale pour l’exercice de toute connaissance subséquente suffirait à expliquer l’autorité en apparence souveraine et l’aspect nécessaire des notions de temps, d’espace et de cause, ainsi que des lois arithmétiques, géométriques ou logiques qui se bornent à décrire les conséquences de ces notions et les relations qu’elles nouent entre elles.

1565. (1901) La poésie et l’empirisme (L’Ermitage) pp. 245-260

L’essor spontané et soudain des sciences expérimentales n’eut point suffi à susciter cette hérésie.

1566. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

Le fait qu’il s’en occupe lui paraît suffire à indiquer qu’il les regarde comme doués de mérite ou comme significatifs, et, cette attitude attentive ou admirative une fois prise, il s’attache à résoudre les deux problèmes qu’il envisage à propos de livres et d’artistes : celui du rapport de l’auteur avec son œuvre, et celui du rapport des auteurs avec l’ensemble social dont ils font partie, questions délicates et fécondes que M. 

1567. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces diverses — Préface du « Rhin » (1842) »

Il suffit d’examiner la date où ces lignes ont été écrites pour reconnaître que, s’il y avait à cette époque-là quelque chose dans l’esprit de l’auteur, c’était peut-être une prévision, ce n’était pas, à coup sûr, et ce ne pouvait être une application.

1568. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Suffit-il de s’asseoir sur un banc de mousse, au bord d’un ruisseau, et de mettre la main sur son cœur, en regardant la lune ou quelque étoile favorite ; d’évoquer la maison blanche aux volets verts, pour se dire l’annonciateur des fraternités et des bonheurs futurs ?

1569. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Les dons fougueux du poète de Destruction et de la Conquête des Étoiles s’y épanchent avec une libéralité sans mesure, mais quel amphithéâtre suffirait à un tel déroulement symbolique et précis des passions de l’estomac universel.

1570. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 35, de l’idée que ceux qui n’entendent point les écrits des anciens dans les originaux, s’en doivent former » pp. 512-533

Pour imprimer de la veneration, il ne leur suffit pas de se montrer quelquefois dans des fonctions ou dans des significations honorables, il faut aussi qu’ils ne se présentent jamais dans des fonctions viles ou dans des significations basses.

1571. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 4, de l’art ou de la musique poëtique, de la mélopée. Qu’il y avoit une mélopée qui n’étoit pas un chant musical, quoiqu’elle s’écrivît en notes » pp. 54-83

Cet auteur est veritablement posterieur à Quintilianus Aristides ; mais il a vécu avant Boëce qui le cite, et cela suffit pour le rendre d’un grand poids dans la matiere dont il est question.

1572. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 12, des masques des comédiens de l’antiquité » pp. 185-210

Il nous suffit qu’Aulugelle ne l’auroit point louée ni adoptée, si de son temps les masques n’eussent point été une espece d’échos.

1573. (1912) L’art de lire « Chapitre II. Les livres d’idées »

Il ne faut pencher vers aucun excès et il faut se tenir dans un certain milieu où le plaisir de comprendre ne soit pas gâté par le plaisir de discuter, ni même par celui de concilier trop ; mais se placer tour à tour aux différents points de vue et dans les différentes attitudes, et tantôt s’abandonner à la force de la pensée et à la rigueur de là logique, tantôt se défendre, ne vouloir pas être dupe, opposer l’auteur à l’auteur pour le battre à l’aide d’un auxiliaire qui est lui-même ; tantôt venir à son secours et démontrer qu’il ne s’est ni trompé ni contredit et que ce sont des apparences qui sont contre lui, si tant est même qu’il y ait des apparences : tout cela est comprendre encore ; tout cela n’est que différentes façons de comprendre et il suffit, pour que toutes soient utiles et fécondes, qu’à toutes ces opérations préside la loyauté et que jamais le sophisme ne s’y mêle.

1574. (1864) De la critique littéraire pp. 1-13

Il fallait, je crois, trente quartiers de noblesse pour obtenir l’ordre du Saint-Esprit ; mais ils ne suffisaient pas d’ordinaire : on demandait encore des services et du mérite.

1575. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Bien avant ce moment, on y verra des académies, et même des gens de beaucoup de talent et à leur manière des écrivains, mais cela ne suffit pas pour une littérature.

1576. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Buloz »

On s’abreuvait à toutes les sources de la littérature étrangère, qui ne suffisaient pas… et l’exigence universelle était pour la France (pour la jeune France comme on disait alors) de n’être inférieure, en quelque production intellectuelle que ce pût être, à l’Angleterre ou à l’Allemagne.

1577. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VI. M. Roselly de Lorgues. Histoire de Christophe Colomb » pp. 140-156

Et nous l’avons dit, nulle fausse honte, nulle pudeur du dix-neuvième siècle n’a arrêté l’historien qui prouve sa science à toutes pages de son livre, mais qui sent qu’elle ne lui suffit pas !

1578. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Le comte de Gasparin » pp. 100-116

La hardiesse des principes suffit à la lâcheté des hommes.

1579. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Vie de la Révérende Mère Térèse de St-Augustin, Madame Louise de France »

Soury, l’orthopédiste, tord le texte du duc de Luynes pour faire de Madame Louise une rachitique, une misérable larve à l’esprit borné et baroque, moqueuse, orgueilleuse, volontaire et gourmande ; mais la goutte de lumière, la petite lampe sur le tombeau de la Carmélite, suffit pour nous montrer ce qu’elle était à tous les moments de sa vie.

1580. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Charles Monselet »

— des vers charmants ici et là rattachant des souvenirs, en lambeaux, de poésies qui ont timbré les siennes, comme un cachet timbre la cire : Haillons rattachés avec des saphirs, ne suffisent pas pour faire cet être sui generis qui est le poète.

1581. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

Pour écrire de pareils romans, l’intelligence suffit quand elle est robuste.

1582. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Le Comte de Gobineau »

L’air ne suffit pas à Gobineau, il lui faut de l’éther !

1583. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXI. De Thémiste, orateur de Constantinople, et des panégyriques qu’il composa en l’honneur de six empereurs. »

Pour ressembler à Dieu, il ne suffit pas d’usurper ses honneurs, il faut l’imiter.

1584. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VII. »

« — J’avais donné au peuple le pouvoir qui lui suffit, n’abaissant et n’élevant trop personne.

1585. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Elle pense que la protestation du dernier héritier du nom suffira. […] Présentement l’auteur des Reliques vivantes et Tolstoï devraient nous suffire. […] Cette explication me suffit, je n’en demandai pas davantage, et dès lors je m’accoutumai chaque année aux diverses métamorphoses de ma tante. […] » Mais, d’ordinaire, un coup d’œil suffisait à dissiper ses frayeurs. […] Une simple clef de dentiste suffit.

1586. (1893) Impressions de théâtre. Septième série

Parce que la conception étroitement matérialiste de l’univers ne lui a point suffi, parce qu’il s’est délassé à écrire ses rêves dans ses Dialogues et ses Drames. […] Cette raison me suffit, et je n’en cherche point d’autres. […] » Il suffirait d’ailleurs que la mère pût avoir des doutes. […] Cela suffit à faire, en somme, une idylle intéressante, franche et rude par endroits. […] Mais si cela suffit pour qu’elle ne puisse supporter sa compagnie, elle n’est donc qu’une dinde vaniteuse et de sentiments étrangement bas.

1587. (1891) La bataille littéraire. Quatrième série (1887-1888) pp. 1-398

Dreyfous, Madame Robert ; Madame Robert est une des vingt-cinq étincelantes nouvelles qui sont renfermées dans ce livre qui suffirait à la réputation d’un écrivain. […] C’est une protestation élégante et éloquente contre la sottise de la mondanité, contre les tendances de ces esprits inférieurs qui ne peuvent se suffire, qui n’ont de joie et de plaisir que par autrui et pour qui l’élément extérieur est la nourriture nécessaire. […] Bien d’autres magnifiques pièces que je ne puis seulement citer suffiraient pour le succès de l’ensemble de cette œuvre, une des plus belles de Victor Hugo, dont, je le répète, elle résume peut-être le mieux le génie. […] Malot et Crime et châtiment de Dostoïevskyd ; il suffit de se rappeler la fable et surtout le dénouement du roman russe pour que cette accusation tombe d’elle-même. […] Ropartz, j’ai voulu le mettre en garde contre lui-même et lui montrer que je ne le traitais pas comme un poète amateur à qui le compliment suffit.

1588. (1826) Mélanges littéraires pp. 1-457

Les avantages de la figure ou de la fortune, un succès, un bon mot suffisent. […] Un père vertueux, une mère pudique, suffisaient au besoin de son cœur : il n’aimait qu’eux, et il les aimait depuis son enfance. […] Il suffit de jeter les yeux sur les anciennes cartes des jésuites, pour se convaincre que je n’avance ici que la vérité. […] Un demi-siècle suffira à peine pour calmer tant de vanités compromises, tant d’amours-propres blessés. […] Pour faire un portrait aussi fidèle, il ne suffisait pas d’avoir le modèle sous les yeux ; il fallait encore posséder, dans un degré éminent, le talent du peintre.

1589. (1846) Études de littérature ancienne et étrangère

Ni la poésie ni l’éloquence n’étaient encore formées chez les Romains, et il suffisait à Cicéron d’être le plus grand orateur de Rome. […] Pour étudier même dans un seul homme les progrès de cet abaissement que la servitude impose au génie, il suffirait de relire les longues élégies d’Ovide exilé. […] Cette croyance devait suffire aux imaginations les plus vives ; elle satisfaisait ce besoin de fables et de merveilleux si naturel à l’homme. […] La reine elle-même avait mis en vers l’Hercule furieux de Sénèque ; et cette version, peu remarquable d’ailleurs, suffit pour expliquer le zèle littéraire des seigneurs de sa cour. […] Il ne lui suffit pas d’avoir montré dans l’éclat de leur beauté, dans l’innocence de leur tendresse, ces deux créatures nouvelles ; il ne lui suffit pas d’avoir achevé ce tableau de pureté, de gloire et de bonheur, par le contraste d’un témoin invisible échappé de l’enfer, et tout ensemble jaloux et presque attendri de la félicité qu’il vient détruire.

1590. (1939) Réflexions sur la critique (2e éd.) pp. 7-263

Mais enfin cela devrait suffire à nous faire admettre que Flaubert n’est pas un grand écrivain de race et que la pleine maîtrise verbale ne lui était pas donnée dans sa nature même. […] La pratique du tour est pour Binet un plaisir en soi qui suffit à lui donner une raison complète de vivre. […] Et qu’il y ait ici invention de sentiment plus qu’invention grammaticale, le passé de la langue suffit à le prouver. […] Or, presque toutes les autres littératures modernes ont comporté leur critique, et il suffit de lire la grande History of criticism de M.  […] « Il suffit de considérer à quelles conditions, en France, on est écrivain, pour se convaincre que c’est une langue (le français) toute d’appropriation et de communication.

1591. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Il me suffit de vous dire, en général, que je trouve dans le cours de cette comédie, qui est d’un goût tout nouveau, autant de génie que d’esprit, et, si je l’ose dire, autant de jugement que d’imagination ; c’est ce que bien des gens sont incapables d’apercevoir ; car enfin tout y est préparé, amené, combiné, filé, contrasté, raisonné, conduit, comme dans les ouvrages des plus grands maîtres. […] Quand il se trouvait en face de Voltaire, lui grand, robuste, un colosse de verve et de gaîté, et qu’il avait devant lui ce corps maigre, chétif, tout esprit et vif-argent, mais armé à la légère, il se disait en lui-même, et il disait aux autres : « Je le roulerai quand je voudrai. » Dans cette espèce de duel qu’il engagea plus d’une fois, et où la riposte, bonne ou mauvaise, suffit si elle est roide et prompte, il avait ses avantages, et Voltaire le craignait avec raison ; hors de là, Voltaire méprisait, et il en avait bien un peu le droit, un esprit, un génie même, mais si confiné, si localisé, qui, pourvu qu’il eût ses coudées franches, se complaisait à demeure dans un assez bas étage et ne sentait pas le besoin d’en sortir. […] Ainsi fait et créé par la nature, et n’ayant cessé d’abonder en lui-même, on a plus de traits piquants et personnels à citer de lui, que de pensées et de maximes d’une application générale ; en voici une pourtant qui mérite d’être conservée ; Fontenelle, à qui Piron la disait un jour, l’avait retenue et en avait fait un des articles de son symbole littéraire : « La lecture a ses brouillons comme les ouvrages100 », c’est-à-dire que, pour bien comprendre un livre et s’en former une idée nette, lire ne suffit pas, il faut relire.

1592. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Première partie. — L’école dogmatique — Chapitre premier. — Une leçon sur la comédie. Essai d’un élève de William Schlegel » pp. 25-96

Ne suffit-il pas qu’elle le réduise à de belles proportions humaines, et pour le moins à la stature de l’anglais Ben Jonson ou de notre vieil. […] Si Le Misanthrope ne rentre ni dans le comique avoué, ni dans le comique d’observation, ce n’est pas une comédie de caractère, et si cette pièce n’a pas d’intrigue (de légers incidents sans liaison entre eux, la querelle littéraire avec Oronte, le jugement du procès dont on parle sans cesse, la manière dont Célimène est démasquée, ne suffisent pas à constituer une intrigue), Le Misanthrope n’est point une comédie du tout. […] Maintenant sa critique sur les hauteurs des idées générales, il a cru qu’il suffisait d’annoncer au monde la parenté de Legrand avec Aristophane, ou plutôt avec son prédécesseur Eupolis, qui avait lui-même mis sur la scène la fable d’un pays de Cocagne.

1593. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Quarante volumes suffisent, et au-delà, pour bien connaître un homme ; d’ailleurs ils montrent de lui tout ce qu’il importe d’en savoir. […] Il ne sentira pas que le bleu et le rouge, la ligne droite et la ligne courbe, suffisent pour composer des concerts immenses qui, parmi tant d’expressions diverses, gardent une sérénité grandiose, et ouvrent au plus profond de l’âme une source de santé et de bonheur. […] Nous ne pensons pas aux noires ombres des arbres ; nous franchissons du même galop clartés, ténèbres, comme si la lumière de Londres à cinquante milles d’ici suffisait, et au-delà, pour illuminer la route !

1594. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIVe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers » pp. 81-176

« Lorsqu’en présence des trônes chancelants, au sein d’assemblées ébranlées par l’accent de tribuns puissants ou menacées par la multitude, il me restait un instant pour la réflexion, je voyais moins tel ou tel individu passager, portant un nom de notre époque, que les éternelles figures de tous les lieux et de tous les temps, qui à Athènes, à Rome, à Florence, avaient agi autrefois comme celles que je voyais se mouvoir sous mes yeux… « L’observation assidue des hommes et des événements, ou, comme disent les peintres, l’observation de la nature, ne suffit pas ; il faut un certain don pour bien écrire l’histoire. […] L’intelligence, faculté pour ainsi dire neutre et indifférente, qui suffît à l’histoire technique, ne suffit donc nullement à la grande histoire.

1595. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins » pp. 185-304

À peine les presses de Paris, de Bruxelles, de Londres, de Madrid, suffirent-elles à en multiplier les exemplaires et les traductions pour l’impatience des lecteurs. […] Je croyais de plus, dans mon ignorance des assemblées, qu’il suffisait de monter plein de pensées, de passions et de raison à la tribune, pour y trouver, dans l’inspiration du marbre et du bois, des paroles capables de dominer ou d’enthousiasmer l’auditoire ; je voulais en faire l’épreuve le plus tôt possible, prendre la tribune d’assaut, et fixer mon rang dans l’éloquence, puisque je ne pouvais pas encore fixer ma politique dans les partis. […] Ce qu’il suffit de savoir, c’est qu’elle fut pressante jusqu’au pathétique du côté du roi ; loyale, respectueuse, mais inflexible de mon côté ; qu’il me déroula pendant trois heures les circonstances atténuantes de son acceptation de la couronne en 1830 ; les concessions nécessaires à l’opinion qui l’avaient forcé de se jeter entre les mains de tels ou tels ministres, nécessités désagréables pour l’homme, indispensables pour la couronne ; les divisions d’amour-propre qui décomposaient ses ministères, la pression contraire de ces ministres ambitieux sur son gouvernement, l’inconciliabilité de leurs prétentions dans les conseils, le danger de leurs brigues dans les chambres, le danger aussi grand de décréditer la couronne en la confiant à des ministères subalternes que ne couvrait rien, pas même leur insuffisance, aux yeux du pays ; enfin sa résolution de se rejeter tout entier sur les hommes de patriotisme, de gouvernement et de talent, qui avaient appartenu au royalisme d’avant 1830, de faire de la monarchie avec des monarchistes, et de la conservation avec des conservateurs ; à ce titre, il me conjura d’abdiquer mes répugnances à servir la monarchie sous un nouveau monarque, à me rallier hautement à sa maison et à sa cause, devenue la cause de l’ordre en Europe, et à servir de noyau à un ministère dans cet esprit de rapatriement des royalistes par sa dynastie.

1596. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Ces longs murs noirs, ennuyeux à l’œil, ceinture sinistre du vaste cimetière qu’on appelle une grande ville ; ces haies mal closes laissant voir, par des trouées, l’ignoble verdure des jardins potagers ; ces tristes allées monotones, ces ormes gris de poussière, et, au-dessous, quelque vieille accroupie avec des enfants au bord d’un fossé ; quelque invalide attardé regagnant d’un pied chancelant la caserne ; parfois, de l’autre côté du chemin, les éclats joyeux d’une noce d’artisans, cela suffisait, durant la semaine, aux consolations chétives de notre ami ; depuis, il nous a peint lui-même ses soirées du dimanche dans la pièce des Rayons jaunes. […] Ce jeune homme a de modestes besoins ; le froid, la fatigue, la faim même, l’ont déjà éprouvé, et le plus étroit bien-être lui suffit. […] À ces esprits de choix, au milieu de leur vie commode, de leur loisir occupé, de leur développement tout intellectuel, la religion philosophique suffit ; ce qui leur importe particulièrement, c’est de se rendre raison des choses ; quand ils ont expliqué, ils sont satisfaits : aussi le côté inexplicable leur échappe-t-il souvent, et ils le traiteraient volontiers de chimère, s’ils ne trouvaient moyen de l’assujettir, en le simplifiant, à leur mode d’interprétation universelle.

1597. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLIXe Entretien. L’histoire, ou Hérodote »

Il suffit, pour y réussir, d’exciter les Perses à la défection : déterminez-les à s’armer et à marcher contre les Mèdes ; et alors, soit qu’Astyage me mette à la tête des troupes qu’il enverra à votre rencontre, soit qu’il en confie le commandement à qui que ce soit de distingué parmi les Mèdes, comptez sur un succès certain. […] Ils nourrissent leurs chevaux et les autres bêtes de somme avec du poisson, qui abonde tellement, qu’il suffit pour le pêcher d’ouvrir la trappe sur le lac et de descendre dans l’eau une corbeille de jonc vide, que l’on retire un moment après entièrement pleine. […] « Si l’on en croit d’autres récits, ce fut Onétès, fils de Phanagoras, habitant de Caryste, et Corydallus d’Anticyre, qui vinrent trouver le roi, et conduisirent l’armée perse par la montagne ; mais cette tradition ne me paraît mériter aucune croyance, et, pour le prouver, il suffit de lui opposer que les Pylagores, qui sans doute connaissaient parfaitement la vérité, n’ont pas mis à prix les têtes d’Onétès et de Corydallus, mais seulement celle d’Épialte de Trachis, et l’on sait de plus que ce fut par ce motif qu’Épialte prit la fuite.

1598. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre huitième »

Rodrigue a la foi qui soulève les montagnes ; il suffit à Pyrrhus de ne pas désespérer, pour oser tout ce qu’entreprendrait Rodrigue. […] Il suffisait du talent de Quinault, pour écrire cette tirade. […] Ce peut-être suffit pour ramener Pyrrhus : Allez voir votre fils… Dans une autre scène, Pyrrhus paraît devant Andromaque ; elle feint de ne pas le voir, car que lui dire ?

1599. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre dixième. Le style, comme moyen d’expression et instrument de sympathie. »

Pour leur donner ce caractère, il n’est besoin d’introduire dans le style ni l’allégorie précise des anciens, ni le vague de certains modernes qui croient qu’il suffit de tout obscurcir pour tout poétiser, ou de supprimer les idées pour avoir des symboles. […] Pour appliquer les premières sortes de lois, qui aboutissent au style rationnel, exact et correct, le talent suffit ; pour appliquer les autres, qui aboutissent au style vivant, sympathique et poétique, il faut le génie créateur II — L’image Un des éléments essentiels du style poétique, en vers ou en prose, c’est l’image. « Le don de la poésie, a-t-on dit, n’est autre que celui de parler par images, ainsi que la nature. » — S’il est vrai que toute bonne comparaison donne à l’esprit l’avantage de voir deux vérités à la fois, la poésie est une comparaison perpétuelle, une métaphore perpétuelle, qui n’a pas seulement pour but de nous faire voir à la fois deux vérités, mais de nous faire éprouver à la fois deux sensations, ou deux sentiments, ou un sentiment par le moyen de la sensation, ou une sensation par le moyen du sentiment. […] Une vapeur, une goutte d’eau, suffit pour le tuer.

1600. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Il suffit que moi, qui viens tard, je ne sois pas indigne de lui, que je l’honore par mon goût dans un siècle bien différent déjà, et que jamais du moins je n’aie faussé son lointain et supérieur accord par mes accents. » Dans cette sobriété et cette paresse même du poëte, se retrouve donc un sentiment touchant, modeste, et qu’on peut dire pieux. […] Mais, sans faire injure à aucune mémoire, et dans l’éloignement où l’on est de leur tombe, on ne peut s’empêcher de pousser le rapprochement : Garat, avec plus de verve et bien moins de goût, louant Desaix et Kléber, comme Fontanes louait Washington ; Garat se flattant toujours d’élever le monument métaphysique dont on ne sait que la brillante préface, comme Fontanes se flattait de l’achèvement de la Grèce sauvée  ; mais, avec une imagination trop vive chez un philosophe, Garat n’était pas poëte, et l’avantage incomparable de Fontanes, pour la durée, consiste en ce point précis : il lui suffit de quelques pièces qu’on sait par cœur pour sauver son nom. […] Cela peut suffire à un guerrier de vingt-neuf ans. […] Ces discours, présentés dans de sobres échantillons, suffisent à marquer l’époque qu’ils ornèrent, et où ils parurent d’accomplis témoignages de contenance toujours digne, de flatterie toujours décente, et de réserve parfois hardie. […] En même temps qu’il proclamait cette victoire définitive de l’esprit, Napoléon méconnaissait l’esprit dans sa propre essence, et il croyait que, pour le produire, il suffit de le commander.

1601. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

dans toutes les vicissitudes de mon ouvrage, ces mêmes faits m’ont suffi à tout ; je n’ai eu qu’à m’en servir comme on se sert de soldats, en changeant de temps en temps l’ordre de bataille123. » Une circonstance caractéristique de cette première ébauche, c’est qu’elle ait été écrite au revers de cartes à jouer : fatal et bizarre présage !  […] Nous en pourrions citer cent exemples ; un seul suffira. […] Benjamin Constant semble lui-même reconnaître ce qu’elle souffre lorsque, dans cette lettre où il prodigue de si équivoques épanchements, il lui échappe de dire à propos des égards qui sont une triste manière de réparer : « Une cruelle expérience dont je suis bien fâché que vous soyez la victime m’a trop prouvé que des égards ne suffisent pas. » Elle souffrait de bien des manières, elle manquait de secours et d’appui dans ses alentours, elle en venait à douter tout à fait d’elle-même : « Vous n’avez pas comme moi ces moments où je ne sais plus seulement si j’ai le sens commun, mais encore faudrait-il être connue et entendue !  […] Pour clore le chapitre de sa relation avec Mme de Charrière, il suffira d’ajouter que celle-ci lui pardonna toujours, lui écrivit jusqu’à la fin (elle mourut en décembre 1805) ; il lui répondait quelquefois. […] Mais comme il ne faut pas défigurer les chefs-d’œuvre des grands maîtres, je veux, avant de me livrer à ce travail, consulter le public et savoir si mon style et mes connaissances dans les deux langues pourront y suffire.

1602. (1898) La poésie lyrique en France au XIXe siècle

Il ne nous suffit pas que nous ayons à les admirer, nous voulons avoir à les plaindre. […] Un rien les irrite, un souffle les abat ; un sourire qu’ils ont recueilli en passant suffit pour les faire mourir de joie ; un sourire qui a oublié de luire pour eux suffit pour qu’ils s’en aillent mourir de douleur. […] Barberine s’en rend compte et elle est d’avis qu’il lui suffit d’une petite leçon donnée gentiment. […] Mais ces quelques vers, perdus dans l’ensemble d’une œuvre déplaisante et que je ne veux pas analyser davantage, ne suffisent pas à imposer son nom à l’attention et, si je vous ai parlé de Verlaine, c’est pour vous dire que nous ne l’acceptons pas comme représentant de la poésie française de ces dernières années, et que nous protestons énergiquement contre les tentatives qui ont été faites, hors de chez nous, pour représenter en lui l’art de chez nous.

1603. (1936) Histoire de la littérature française de 1789 à nos jours pp. -564

Il suffira que Napoléon protège l’outil et que Talma vende les gaufres : voilà le genre en sursis pour une génération. […] Son voyage d’Amérique, sinon son voyage d’Orient, a suffi pour annexer un nouveau monde aux lettres. […] Ces quelques distiques, que Barbier n’a fait qu’imiter, suffisent à faire de Chénier le plus grand des poètes de combat entre d’Aubigné et Victor Hugo. […] Quelques mois avaient suffi pour faire de sa poésie celle dont tout le monde parlait. […] Jocelyn et la Chute d’un Ange suffisent d’ailleurs à faire de Lamartine la tête en somme la plus épique de notre poésie.

1604. (1925) Portraits et souvenirs

Malheureusement, la bonne volonté ne suffit pas. […] Elle a suffi à M.  […] Une vieille demoiselle, dans Mlle Clocque, un enfant qui observe et qui rapporte ce qu’il a vu, dans la Becquée et dans l’Enfant à la Balustrade, lui suffisent à grouper une série de menus faits où se révèle, peu à peu, l’existence provinciale en ses habitudes, ses sentiments, ses préférences, ses intérêts. […] Car cet ensemble merveilleux qu’est un jardin comme Versailles n’a pas seulement pour but ce « plaisir des yeux », dont parlait Fénelon, ce plaisir que la nature suffit à nous procurer avec des horizons, des ombrages, des fleurs et des eaux. […] Il n’a pas la mine de quelqu’un qui a dû beaucoup abuser des privilèges de sa qualité, mais il est à supposer que cette qualité seule suffît à ce que les patriotes de Vigneux lui en voulussent.

1605. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Vous ne sauriez avoir l’idée du fanatisme d’orgueil et d’insatiabilité qui règne dans cette nation-ci. » Pour lui, il se multipliait et faisait en toute conscience son métier de négociateur auprès d’une puissance aussi parlementaire, dans une crise de violente fermentation ; sa frêle machine n’y suffisait pas ; il était littéralement sur les dents : Mon cher ami, écrivait-il au comte de Choiseul (9 octobre), je ne vous dirai rien ici de plus, sinon que je suis tout à fait borgne. […] Quant au moral, j’y mets tout ce que j’ai… Le duc de Nivernais dut sentir à chaque instant que, pour être un grand ambitieux et un premier acteur sur le théâtre de ce monde, le zèle, l’esprit ne suffisent pas : il faut encore une machine, des organes, une trempe de tempérament.

1606. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

Elle était proprement de ces esprits fins que Pascal oppose aux esprits géométriques, de ces « esprits fins qui ne sont que fins, qui, étant accoutumés à juger les choses d’une seule et prompte vue, se rebutent vite d’un détail de définition en apparence stérile, et ne peuvent avoir la patience de descendre jusqu’aux premiers principes des choses spéculatives et d’imagination, qu’ils n’ont jamais vues dans le monde et dans l’usage. » Mais, géométrie à part, l’usage même, le monde et son coup d’œil, sa finesse et ses élégances, le sang de princesse dans toutes les veines, une âme féminine dans tous ses replis, cette vocation, ce point d’honneur de plaire qui est déjà une victoire, de belles passions, de grands malheurs, une auréole de sainte en mourant, l’entrelacement suprême autour d’elle de tous ces noms accomplis, de Condé, de La Rochefoucauld et de Port-Royal, cela suffit à composer à Mme de Longueville une distinction durable, et lui assure dans la mémoire française une part bien flatteuse, que nul renom d’héroïne ne surpasse, que nulle gloire, même de femme supérieure, n’effacera. […] Quatre livres de Mémoires bien lus suffisent, Retz et La Rochefoucauld, Mmes de Motteville et de Nemours.

1607. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre II. Le public en France. »

Pour eux, ils sont architectes et ils ont des principes, à savoir la raison, la nature, les droits de l’homme, principes simples et féconds que chacun peut entendre et dont il suffit de tirer les conséquences pour substituer aux informes bâtisses du passé l’édifice admirable de l’avenir. — La tentation est grande pour des mécontents, peu dévots, épicuriens et philanthropes. […] Ils agissent, ils sont vraiment généreux ; il suffit qu’une cause soit belle pour que leur dévouement lui soit acquis.

1608. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIIIe entretien. Revue littéraire de l’année 1861 en France. M. de Marcellus (1re partie) » pp. 333-411

Il reprit la vie d’étudiant helléniste dans la société de quelques amis : à défaut de la gloire diplomatique, qu’il regrettait, il aspira silencieusement à la dignité des lettres, qui ne lui suffisait pas, mais qui l’intéressait. […] Quelques Arabes me servent ici ; je parle leur langue, et leurs soins me suffisent.”

1609. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

« Voyons, dit Socrate : c’est, selon moi, l’impuissance de chaque individu isolé de se suffire à lui-même. […] « — Ils veilleront à la nourriture des enfants, en conduisant les mères au bercail, à l’époque de l’éruption du lait, après avoir pris toutes les précautions pour qu’aucune d’elles ne reconnaisse son enfant ; et, si les mères ne suffisent point à les allaiter, ils se procureront d’autres femmes pour cet office ; et même, pour celles qui ont suffisamment de lait, ils auront soin qu’elles ne donnent pas le sein trop longtemps. » Suivent des détails que la pudeur écarte de l’âme.

1610. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (3e partie) » pp. 81-152

N’oublions pas cependant que sur un point si délicat des opinions bien diverses se sont produites, et peut-être suffira-t-il de mettre ces opinions en présence pour concilier les devoirs de l’historien avec les justes égards dus à une femme célèbre, dont les dernières années ont laissé un souvenir honorable. […] Or, comme si cette dénégation imprimée ne suffisait pas au successeur d’Alfieri, il l’inscrivit de sa main sur l’exemplaire qui lui appartenait.

1611. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre deuxième »

Si deux lectures n’y suffisent pas, il faut lire une troisième fois ces raisons « qui s’entre-suivent de telle sorte, dit-il, que comme les dernières sont démontrées par les premières qui sont leurs causes, ces premières le sont réciproquement par les dernières, qui sont leurs effets22. » Qu’on ne s’imagine pas qu’il suffise d’une attention ordinaire pour s’approprier ou pour avoir le droit de rejeter ses raisons ; il ne le souffre pas, il ne permet pas « qu’on croie savoir en un jour ce qu’un autre a pensé en vingt années23. » La fuite n’est pas possible avec honneur ; car comme il nous fait connaître toute la puissance de la réflexion, et qu’il agrandit notre raison par la sienne, ce serait nous avouer incapables d’application que de lâcher prise après un premier effort, ou que de n’oser le tenter.

1612. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre III. Le Petit Séminaire Saint-Nicolas du Chardonnet (1880) »

D’abord, il vit qu’un petit séminaire tout ecclésiastique n’avait à Paris aucune chance de succès, et ne suffirait jamais au recrutement du diocèse. […] Certes quelque chose manquait à cette éducation et, tant qu’elle dut me suffire, j’eus toujours un vide dans l’esprit.

1613. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Ce qu’il y a de vertu dans Saint-Sulpice suffirait pour gouverner un monde, et cela m’a rendu difficile pour ce que j’ai trouvé ailleurs. […] Une belle pièce ornée de représentations toutes profanes a été badigeonnée il y a une cinquantaine d’années ; un lavage suffirait peut-être encore aujourd’hui pour tout retrouver.

1614. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Lettres de m. l’Abbé Sabatier de Castres ; relatives aux trois siecles de la littérature françoise.ABCD » pp. -641

Le plus léger coup-d'œil suffit pour faire saisir ma distinction. […] Celle-ci suffira pour vous donner une juste idée des autres.

1615. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

À l’amoureux d’art, la vue des choses d’art ne suffit pas, il sent le besoin d’être propriétaire d’un petit bout, d’un petit morceau de cet art, qu’il soit riche ou non. Mardi 20 juin Tout homme de lettres est toujours un individu biscornu, hanté par des originalités bizarres, et il n’y a pas besoin pour être ainsi, d’être un imaginateur, un poète, un romancier ; il suffit qu’on soit un homme, vivant de la vie des lettres.

1616. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — IV. La Poësie dramatique. » pp. 354-420

Ce qu’il y a eu de mieux dans toute cette discussion, & ce qui doit suffire pour réunir les deux partis, est la réflexion si judicieuse de M. de Voltaire : « Vouloir de l’amour dans toutes les tragédies est un goût efféminé, l’en proscrire toujours est une mauvaise humeur bien déraisonnable » : mais, ajoute le même auteur, si l’on fait tant que de l’y amener, il faut qu’il y tienne la première place, il faut qu’il soit le nœud nécessaire de la pièce. […] Pour être au fait de la contrariété des opinions sur ce point, il suffit de remonter à la fameuse lettre du père Caffaro, théatin.

1617. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

Elle n’est encore qu’une hypothèse, mais cette hypothèse suffit à remuer profondément les esprits, à les agiter dans un sens ou dans un autre. […] Il a suffi au poète de déclarer que la justice fait partie de l’essence de l’homme, qu’elle est son essence même, que sans doute elle n’a pas de signification hors de lui, mais qu’elle règne en lui.

1618. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VIII : Hybridité »

Pourtant, quelques considérations suffisent à expliquer, du moins en partie, la fécondité si extraordinaire de nos variétés domestiques croisées. […] Secondement, on peut démontrer avec toute évidence que les dissemblances purement extérieures entre deux espèces ne suffisent pas à décider de la plus ou moins grande stérilité de leurs croisements ; et l’on peut appliquer la même règle à nos variétés domestiques.

1619. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Jusque-là la soumission avait suffi ; maintenant l’examen devient un devoir.

1620. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Sa digne mère, dont il est le portrait, continue de vivre pour jouir d’un tel fils, et il suffit d’avoir eu l’honneur de la voir une fois pour sentir tout ce qui a dû présider de pieux, de tendre et d’antique à cette première éducation du foyer.

1621. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Quatre moments religieux au XIXe siècle. »

Vingt pages suffisent pour en apprécier le mérite littéraire et la pauvreté morale et philosophique.

1622. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite.) »

La plupart de mes lecteurs l’auront déjà senti et en auront fait tout bas la remarque : le monde est présentement occupé et distrait ; il n’a plus d’oreille pour le poëte qui se plaint seul, pour celui qui vient nous dire sur tous les tons : Je suis la fleur des champs égarée au désert… ou bien : J’étais un jeune oiseau sans plumes à son aile… Le monde commence à être rebattu de l’éternelle chanson ; il a écouté, non point patiemment, mais passionnément, tous les grands plaintifs depuis Job jusqu’à Childe-Harold ; il s’écoutait lui-même en eux, et il assistait à ses propres pensées désolées : cela lui suffît ; le reste lui paraît faible ; les pleureurs à la suite ont tort ; il en a assez pour quelque temps de ces lamentations sur les lacs et sur les rochers.

1623. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

car il en est du sujet d’Homère dans son ensemble comme de ces comparaisons même, si libres et si vastes, qu’il affectionne ; il suffit qu’elles marchent et qu’elles se dessinent par une partie essentielle ; le reste suit avec un certain désordre qui est le cortége de la grandeur ou de la grâce.

1624. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — II »

Pour connaître donc et déterminer la destinée de l’espèce ; il suffit de bien connaître et de bien déterminer la destinée de l’individu ; et pour bien connaître la destinée de l’individu, c’est-à-dire ce qu’il est, d’où il vient, où il va, ou, en d’autres termes, sa nature, son origine et sa fin ; il faut l’observer en lui-même et directement, le soumettre à la méthode expérimentale de Bacon transportée dans les faits de conscience.

1625. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre III »

Pourtant il ne suffit pas qu’une idée soit dolente pour être belle.

1626. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VIII. De l’éloquence » pp. 563-585

Le raisonnement, dans ses formes didactiques, ne suffit point pour défendre la liberté dans toutes les circonstances ; lorsqu’il faut braver un danger quelconque pour prendre une résolution généreuse, l’éloquence est seule assez puissante pour donner l’impulsion nécessaire dans les grands périls.

1627. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section première. Des passions. — Chapitre II. De l’ambition. »

Si ces considérations générales suffisent pour éclairer sur la juste influence de l’ambition sur le bonheur, les auteurs, les témoins, les contemporains de la révolution de France, doivent trouver au fond de leur cœur de nouveaux motifs d’éloignement pour toutes les passions politiques ?

1628. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre II. L’homme »

Le pauvre homme ne pouvait pas en rendre de bien utiles ; mais son sentiment suffisait à l’acquitter. « Ne montrez ces vers à personne, écrivait-il à Racine, car Mme de La Sablière ne les a pas encore vus. » Il lui gardait ainsi la seule chose qu’il pût donner, des prémices.

1629. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre II. Diderot »

» Instinct, éducation, expérience : voilà qui suffit pour la morale.

1630. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre II. La critique »

Ces Lundis sont une incohérente collection d’âmes individuelles : Sainte-Beuve ne s’emprisonne pas dans la littérature ; il suffit qu’un homme ou une femme ait écrit quelques lettres, quelques lignes, pour lui appartenir : le général Joubert aussi bien que Gœthe, et Marie Stuart avec Mlle de Scudéry ; généraux, ministres, gens de lettres et gens du monde, français, anglais, allemands, toutes sortes d’individus l’arrêtent ; il extrait de leurs accidents biographiques toutes les particularités psychologiques et physiologiques qui les définissent en leur unique caractère.

1631. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

Il est prouvé que l’amour-propre suffit souvent pour inspirer un héroïsme apparent, quand la publicité vient s’y joindre.

1632. (1766) Le bonheur des gens de lettres : discours [graphies originales] « Le Bonheur des gens de lettres. — Premiere partie. » pp. 12-34

La vraie liberté consiste à ne dépendre que de ses devoirs, à jouir des droits d’homme & de citoyen, & à rejetter avec courage les Loix capricieuses de ces esprits minutieux & despotiques, qui feroient à un citoyen l’outrage de penser que les Loix de l’honneur ne suffisent pas(a).

1633. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

Pour lui, l’idée de la beauté se suffit à elle-même et prime toutes les autres.

1634. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XIII. Conclusions » pp. 271-291

Après quelques velléités de résistance, l’individu ne peut manquer de se soumettre, « Pour amener l’individu à se soumettre de son plein gré, il n’est nécessaire de recourir à aucun artifice ; il suffit de lui faire prendre conscience de son état de dépendance et d’infériorité naturelles — qu’il s’en fasse par la religion une représentation sensible et symbolique ou qu’il arrive à s’en former par la science une notion adéquate et définie116. » La science sociologique assumera donc la même fonction qu’ont assumée jusqu’ici les religions ; elle courbera l’individu devant la société.

1635. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XV. Commencement de la légende de Jésus  Idée qu’il a lui-même de son rôle surnaturel. »

Il est évident que le titre de Rabbi, dont il s’était d’abord contenté, ne lui suffisait plus ; le titre même de prophète ou d’envoyé de Dieu ne répondait plus à sa pensée.

1636. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XI »

Le Fils naturel Quelques lignes suffiront à résumer la donnée et à retracer les traits essentiels du Fils naturel.

1637. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires touchant la vie et les écrits de Mme de Sévigné, par M. le baron Walckenaer. (4 vol.) » pp. 49-62

Vous connaissez ce bon d’Hacqueville, l’ami, le confident empressé de Mme de Sévigné et de tout son monde, celui qui se met en quatre et en mille pour tout voir, pour tout savoir, qui sait les dessous de cartes d’un chacun, et qui n’en est pas moins obligeant et indulgent pour cela, incapable de négliger aucun ami absent ou présent, se multipliant de sa plume et de sa personne pour suffire à tout.

1638. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Chefs-d’œuvre de la littérature française (Collection Didot). Hamilton. » pp. 92-107

Qu’un esprit doux et poli, pénétrant et fin, répandant sur les choses et sur le prochain une raillerie légère universelle, qu’un tel esprit vienne à naître, cela ne suffit pas.

1639. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Journal de la campagne de Russie en 1812, par M. de Fezensac, lieutenant général. (1849.) » pp. 260-274

Mais la présence du maréchal Ney suffisait pour nous rassurer.

1640. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface du « Roi s’amuse » (1832) »

Il n’est que trop vrai que ce vers a suffi pour que l’affiche déconcertée du Théâtre-Français reçut l’ordre de ne plus offrir une seule fois a la curiosité du public la petite phrase séditieuse : le Roi s’amuse.

1641. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Strabon prétend qu’elle a précédé l’éloquence ; cette primauté suffit.

1642. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre II. Le cerveau chez les animaux »

Elle comprend elle-même plusieurs organes distincts, dont la description serait trop compliquée, et dont il suffira de connaître les noms.

1643. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Ces faits, qu’il est inutile de multiplier, suffisent pour établir que l’hypothèse phrénologique n’avait aucun fondement sérieux dans l’expérience, et qu’elle n’était qu’une œuvre d’imagination, ou tout au moins une conjecture prématurée.

1644. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Deux ou trois incidents suffisent pour produire de grands effets, sans entasser, comme on fait souvent, un nombre prodigieux de machines qui marquent plus la disette que la fécondité.

1645. (1912) L’art de lire « Chapitre IX. La lecture des critiques »

Ajoutez qu’une certaine paresse aidant, ou, si vous voulez, la loi du moindre effort, je me contenterai bientôt de savoir ce que pensent des auteurs les critiques les plus autorisés, sans jamais lire les auteurs eux-mêmes ; d’abord, parce que — si l’on sait choisir ses critiques — c’est plus court ; ensuite, parce que même les critiques prolixes ont débrouillé la matière et me donnent, par les citations qu’ils font de leur auteur, le meilleur, évidemment, de cet auteur-là, ce qui peut me suffire ; ensuite et surtout parce que, devant, quand je lirai l’auteur après le critique, subir l’influence de celui-ci et lire dans la disposition d’esprit où il m’aura mis ; si je dois, l’auteur lu après le critique, avoir la même impression que le critique seul étant lu, j’épargne du temps en lisant le critique seul.

1646. (1761) Apologie de l’étude

J’avouerai cependant, car il faut être juste, que dans ces archives de frivolité, d’erreur et d’ennui, j’ai distingué quelques historiens philosophes, quelques physiciens qui savent douter, quelques poètes qui joignent le sentiment à l’image, quelques orateurs qui unissent le raisonnement à l’éloquence ; mais le nombre en est trop petit, trop étouffé par le reste, pour me réconcilier avec cette vaste collection de livres : je la compare à ces tristes maisons, destinées à renfermer des insensés ou des imbéciles, avec quelques gens raisonnables qui les gardent, et qui ne suffisent pas pour embellir un pareil séjour.

1647. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXVI. La sœur Emmerich »

Stolberg lui-même, malgré sa piété et sa candeur, n’aurait pas suffi.

1648. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre II. La relativité complète »

Il nous suffira de chercher comment on doit les comprendre dans l’hypothèse d’Einstein.

1649. (1915) La philosophie française « I »

Il nous suffira de citer les noms de Charcot, de Ribot, de Pierre Janet et de Georges Dumas.

1650. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

Ils nous montrent comment des collections d’idées se rassemblent en une seule idée en se résumant sous un seul signe, comment la langue et la pensée marchent ainsi peu à peu vers des expressions plus abrégées et plus claires, comment la série immense de nos idées n’est qu’un système de transformations analogues à celles de l’algèbre, dans lequel quelques éléments très-simples, diversement combinés, suffisent pour produire tout le reste, et où l’esprit peut se mouvoir avec une facilité et une sûreté entières, dès qu’il a pris l’habitude de considérer les jugements comme des équations, et de substituer aux termes obscurs les valeurs qu’ils doivent représenter.

1651. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XX. De Libanius, et de tous les autres orateurs qui ont fait l’éloge de Julien. Jugement sur ce prince. »

les trésors ne leur suffisaient pas ; ils avaient l’audace de s’indigner s’ils ne partageaient point la considération attachée à la dignité, croyant voiler ainsi leur servitude… L’empereur chassa du palais ces animaux dévorants, ces monstres à cent têtes, et voulut qu’ils regardassent comme une grâce la vie qu’il leur laissait. » Il était difficile, sans doute, de mieux peindre la corruption profonde de la cour de Byzance, cette chaîne de brigandage et d’oppression, et l’abus du crédit, dans une classe d’hommes qui, voués par état à des emplois obscurs, mais approchant du prince, ou paraissant en approcher, imprimaient de loin l’épouvante, parce qu’ils habitaient le lieu où réside le pouvoir.

1652. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVII. Des éloges en Italie, en Espagne, en Angleterre, en Allemagne, en Russie. »

Mille ans de vie suffiraient à peine à tant d’autres ; et sa vie a été si courte ! 

1653. (1814) Cours de littérature dramatique. Tome III

Il suffit qu’ils soient hommes et qu’Œdipe soit malheureux. […] Qui ne sait qu’une situation intéressante mais triviale, une nouveauté brillante et hasardée, la seule voix d’une actrice, suffisent pour tromper quelque temps le public ? […] Que vient-il donc faire ce forcené avec une douzaine de misérables, contre une nation victorieuse, puisque six cents hommes de cette nation ont suffi pour détruire en un instant tout son empire ? […] Le monde se dépeuplerait si un affront suffisait aux hommes pour sortir de la vie. […] Voltaire pensait dès lors qu’il ne suffisait pas de faire des livres, qu’il fallait unir l’argent à la gloire, et que le titre de pensionnaire des juifs valait bien celui de prêtresse d’Apollon et des Muses.

1654. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Si la terre d’où sort le bas-relief d’Éleusis n’attestait pas sa valeur sacrée, l’auguste simplicité de sa composition suffirait à la révéler. […] Cette pensée te rendra plus doux envers tous les hommes. » Sa vertu n’attend pas de récompenses par-delà la vie : elle se suffit à elle-même. […] L’héroïsme n’aurait pas suffi à vaincre ce Roland furieux en qui le moyen âge aux abois avait ramassé toutes ses forces et toutes ses puissances. […] Leur liaison était si décente qu’on la crut longtemps platonique. — « Le Dauphin n’est guère adonné aux femmes », — écrit Marino Cavalli, un de ces Envoyés vénitiens, les meilleurs espions de l’histoire, — « la sienne lui suffit. […] La moitié ou le quart aurait suffi, mais le chiffre cabalistique était inflexible.

1655. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

Absorbée par la famille, vous n’eussiez plus été que la moitié de vous-même, c’est-à-dire femme du monde ou écrivain, mais point l’un et l’autre : le temps n’eût pas suffi. […] Mais la solitude et la contemplation ne suffisent pas plus à nos besoins qu’elles ne suffisent à ceux de Faust, et ce n’est pas la voix de Méphistophélès qui vient nous arracher à ces retraites, c’est la voix même de l’humanité qui vient nous crier comme lui : Comment donc aurais-tu, pauvre fils de la terre, passé ta vie sans moi ? […] Il suffit que la souris ne soit pas grise. […] Nous verrons qu’il suffit bien pour constater la fraternité du poète avec ses deux illustres devanciers. […] Ces fragments suffisent à montrer comment l’idée est posée.

1656. (1902) Propos littéraires. Première série

Suffit, tout compte fait, que d’une façon ou d’une autre, il réussisse à ne pas m’ennuyer ; et M.  […] Il suffit qu’on frémisse. — Je n’en crois rien ; mais je veux bien le dire. […] Ces parties rationnelles suffisent pour altérer à leurs yeux la certitude qu’ils ont contribué à faire. […] L’existence assurée, il suffît ; asseyez-vous et regardez, parce qu’il y a autour de vous des choses très belles. […] Il y avait été pourtant, sur convocation, et, malgré l’accueil flatteur, cela suffit pour qu’il fût très agacé.

1657. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre I. Les idées et les œuvres. » pp. 234-333

L’homme souffre de douter, et cependant il doute ; il essaye de ressaisir ses croyances, elles se fondent dans sa main ; il voudrait s’asseoir et se reposer dans les doctrines et dans les satisfactions qui suffisaient à ses devanciers, il ne les trouve pas suffisantes. […] « Si Satan, comme aux anciens jours, se présentait ici parmi les fils de Dieu, cette vue suffirait pour le renvoyer chez lui plein d’effroi1157. » — « Comme sa voix ronfle, et comme il cogne ! […] Elle lui suffit et suffit à les faire naître.

1658. (1896) Le livre des masques

Cette définition, trop simple, mais claire, nous suffira provisoirement. […] M. de Régnier sait dire en vers tout ce qu’il veut, sa subtilité est infinie ; il note d’indéfinissables nuances de rêve, d’imperceptibles apparitions, de fugitifs décors ; une main nue qui s’appuie un peu crispée sur une table de marbre, un fruit qui oscille sous le vent et qui tombe, un étang abandonné, ces riens lui suffisent et le poème surgit, parfait et pur. […] Riche et subtile, la poésie de M. de Régnier n’est jamais purement lyrique ; il enferme une idée dans le cercle enguirlandé de ses métaphores, et si vague ou si générale que soit cette idée, cela suffit à consolider le collier ; les perles sont retenues par un fil, parfois invisible, mais toujours solide ; ainsi, ces quelques vers : L’Aube fut si pâle hier Sur les doux prés et sur les prêles, Qu’au matin clair Un enfant vint parmi les herbes, Penchant sur elles Ses mains pures qui y cueillaient des asphodèles. […] Saint-Pol-Roux joue d’une cithare dont les cordes sont parfois trop tendues : il suffirait d’un tour de clef pour que nos oreilles soient toujours profondément réjouies.

1659. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Les pensées suggérées par l’aspect de ce Salon sont d’un ordre si simple, si ancien, si classique, que peu de pages me suffiront sans doute pour les développer. […] Ce terrible résumé suffit. […] Tout le charme qu’il sait mettre dans ce lambeau arraché à la planète ne suffit pas toujours pour faire oublier l’absence de construction. […] Clésinger, à qui la sculpture ne suffit plus, ressemble à ces enfants d’un sang turbulent et d’une ardeur capricante, qui veulent escalader toutes les hauteurs pour y inscrire leur nom.

1660. (1920) Impressions de théâtre. Onzième série

Pour qu’il fût orateur, il suffisait qu’il joignît à ce don celui d’exprimer aisément ce qu’il pense, car la démarche habituelle de sa pensée muette est précisément la démarche du discours. […] Car les formes anciennes suffisent presque toujours aux grands écrivains, ou, s’ils les modifient, c’est sans trop s’en apercevoir. […] Car les formes anciennes suffisent presque toujours aux grands écrivains, et s’ils les modifient, c’est sans trop s’en apercevoir. […] Il suffisait d’une pièce bien tournée pour vous mettre en lumière. […] Il a été médiocre dans son ensemble ; mais cela ne suffit peut-être pas à le distinguer.

1661. (1900) La vie et les livres. Cinquième série pp. 1-352

Il ne lui suffisait pas d’entendre l’écho de leurs cris d’amour, de leurs désespérances et de leurs joies. […] Cela ne suffît pas. […] Il lui suffit de vivre. […] Un jour de printemps lui suffit pour passer sur un village, arracher les récoltes, déraciner les arbres, éventrer les maisons. […] Il suffit, pour s’en convaincre, de feuilleter cet album-ci.

1662. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « Essai, sur les règnes, de Claude et de Néron. Livre premier. » pp. 15-203

Sénèque était un personnage également innocent, et moins redoutable ; il suffisait de le réduire au silence, et d’empêcher qu’il n’employât son éloquence à venger l’honneur de Julie. […] Cette âme à qui la modicité suffisait, qu’est-elle devenue ? […] On dira : le voilà donc ce stoïcien si frugal, ce modeste philosophe, à qui peu de chose suffit. […] On n’en est pas aux premières notions de la justice, si l’on ignore que des conjectures suffisent pour absoudre, et qu’il faut des faits positifs pour inculper. […] Il suffit de ce qui nous reste, pour regretter ce qui nous manque.

1663. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Il y a des gens pour qui la moindre compensation suffit. […] Gautier, il me semble qu’une chaise de paille suffirait pour une vieille marchande à la toilette comme la Poésie. […] Comme cela prouve bien que vous êtes sans force devant elle et que vous comprenez qu’il suffit de son souffle pour détruire vos châteaux de cartes ! […] il lui suffit d’être en possession. […] à quoi bon employer dix mots quand trois suffisent, rechercher les termes bizarres, inusités, et négliger le mot propre ?

1664. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre I. Les personnages »

61 Il n’y a pas même besoin d’être querelleur ; il suffit d’approcher du prince. […]     Vous m’entendez, je vous entends,     Il suffit. […] ma foi, monsieur     Dit avec un ton de rieur Le gaillard savetier, ce n’est point ma manière De compter de la sorte, et je n’entasse guère     Un jour sur l’autre ; il suffit qu’à la fin J’attrape le bout de l’année.

1665. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

Mais le récit ne suffit point à exprimer le bonheur et le rêve ; il faut que le poëte aille192-A « dans les plaines qui s’habillent de verdure nouvelle, où les petites fleurs commencent à pousser, où les pluies bonnes et saines renouvellent tout ce qui est vieux et mort  » ; où « l’alouette affairée, messagère du jour, salue dans ses chansons le matin gris, où le soleil dans les buissons sèche les gouttes d’argent suspendues aux feuilles. » Il faut qu’il s’oublie dans les vagues félicités de la campagne, et que, comme Dante, il se perde dans la lumière idéale de l’allégorie. […] Il suffit qu’on lui donne « bonne pitance. » « Car donner aux pauvres frères, c’est signe qu’un homme est bien confessé. » Des méchants répandront le bruit que le pénitent est fort peu repentant et fort peu contrit ; pure calomnie. […] Croyez-vous que moi et tout notre couvent nous ne suffisions pas à prier pour vous ?

1666. (1898) Émile Zola devant les jeunes (articles de La Plume) pp. 106-203

Or cette émotion permanente, renouvelée et avivée à chaque ouvrage, suffirait déjà à dénoncer la présence réelle d’un génie créateur, à révéler sa puissance et à nous affirmer que le grand auteur de l’Œuvre et de Germinal demeure, en vérité, la plus vivante incarnation de cette seconde moitié du xixe  siècle, bouleversée par les découvertes scientifiques, par la montante marée des foules en rumeur, par le tragique fracas des industries ; et la haine qu’il provoqua suffirait à démontrer l’éternité de cet homme, émouvant et splendide comme une époque faite chair. […] Mais il suffit de parcourir ses notes sur Zola pour s’apercevoir qu’il n’y a rien distingué.

1667. (1894) La bataille littéraire. Septième série (1893) pp. -307

Elle n’était pas, comme sa mère, une grande liseuse ; l’envolée continue de son imagination lui suffisait ; et, tout de suite, elle s’ennuyait aux histoires inventées. […] Jean Carrère n’avait pas besoin pour faire connaître son nom du tapage des émeutiers qui avaient transporté leur industrie au quartier Latin, imposant ainsi de bien compromettants alliés aux étudiants ; il lui suffisait de publier un livre comme ses : Premières poésies, qui viennent de paraître à la bibliothèque de la Plume. […] Je passe bien d’autres atrocités, d’incroyables raffinements ; l’histoire de l’échafaud à Rennes ne saurait être citée ici ; qu’il suffise de savoir que dans cette ville, outre le fonctionnement régulier de l’échafaud, on avait organisé une compagnie d’enfants pris dans la bourgeoisie aisée et que l’on appelait : l’Espoir de la patrie. […] Son génie seul ne suffit pas pour nous en expliquer la beauté. […] « Il lui suffit d’écrire des vers pour prouver qu’il n’est pas poète ! 

1668. (1853) Propos de ville et propos de théâtre

. — On cite notamment une aventure dont l’héroïne est une actrice qui n’a pas encore débuté, et qui a été surnommée Bérésina, à cause de sa réserve tellement glaciale, qu’un seul de ses regards suffisait pour donner des engelures. […] Toutes les comparaisons qui pourraient peindre l’activité, la souplesse, la ruse, l’insistance, la servilité ne suffiraient pas à donner une idée complète de tout le mal que le Charançon se donne pour arriver à se produire, n’importe où, n’importe comment. […] Mais, pour quelques caudataires, cette simple remarque suffit. […] Cette scène seule suffirait pour justifier le titre de la Jeunesse que M.  […] S’il tentait de protester au nom du style et de la langue, Lassagne lui montrerait la sienne en lui répondant : Ô mon Dieur-je— et tout serait dit ; car, à l’heure où nous sommes, ces deux vocables triomphants suffisent pour répondre à tout.

1669. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Pour moi, le seul intérêt de ces visites était la promenade à l’aller et au retour ; j’étais avec la chérie et cela suffisait à mon amusement. […] L’impasse d’Antin, qui avait été jusque-là mon domaine, ne suffisait plus ; la promenade habituelle à la barrière Monceau, où j’allai jouer de préférence, avec mes amis les gabelous, qui me poursuivaient sous la colonnade du petit temple grec, encore debout aujourd’hui, fut même délaissée. […] Carlotta Grisi était ma tante ; mais cela ne suffisait pas, une marraine est bien mieux située pour transmettre des dons… Si elle pouvait me donner de danser comme elle ! […] La solidité de la clôture suffit. […] — Cela lui suffisait d’avoir été un héros, dit tante Lili, il a bien fait.

1670. (1887) George Sand

« Cela s’était fait tout d’un coup, comme une passion qui s’allume dans une âme ignorante de ses propres forces. » Un jour arriva où son amour profond et tranquille pour la mère Alicia ne lui suffit plus. […] Un exemple suffira. […] Les émotions des sens ne nous suffisent pas. […] Pour bien marquer cette nuance, deux noms suffisent ; nous pourrions en citer dix : Teverino et le Secrétaire intime. […] Elle est triste dans les deux récits ; elle l’avait été dans la réalité, et tout le monde la sait à peu près, ce qui suffit.

1671. (1890) Les romanciers d’aujourd’hui pp. -357

Je n’ai pas eu ce courage, et l’aurais-je eu que ma vie n’eût pas suffi à la tâche1. […] La qualité n’est déjà point si dédaignable, et elle eût pu leur suffire. […] Il lui suffit que ce soit une idylle possible ou simplement vraisemblable. […] Peut-être aussi se figure-t-il qu’il suffit de peindre le « grand monde » pour être un idéaliste. […] Enfin, pour exprimer ces sensations anormales, ces nuances infinies de la pensée et du sentiment, les mots usuels ne suffisent plus.

1672. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

» Il suffit du reste de comparer son Avare à l’Aulularia de Plaute pour montrer comment il s’entendait à adapter sa propre couleur nationale à une donnée puisée en dehors de son temps et de son pays. […] Croyez-vous que la représentation de la centenaire suffira pour cet objet ? […] Il leur suffit d’attendre. […] Il suffirait, pour appuyer notre opinion, de comparer L’Étourdi, par exemple, à la fantaisie italienne d’où Molière a tiré ce pimpant chef-d’œuvre. […] Croyez-vous qu’il suffise d’en porter le nom et les armes, et que ce nous soit une gloire d’être sorti d’un sang noble quand nous vivons en infâmes ?

1673. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « PARNY. » pp. 423-470

Pour apprécier autant qu’il convient le mérite naturel et touchant des élégies de Parny, il suffit de lire celles qu’a essayées Le Brun, si sèches, si fatiguées et si voulues. Pour apercevoir d’autre part ce qu’il y aurait eu à tenter d’indispensable et de neuf dans la forme et dans la trame, il suffit de se rappeler les élégies d’André Chénier.

1674. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

« Elle sentait qu’elle ne pouvait vivre sans Marius, et que par conséquent cela suffisait, et que Marius viendrait. […] « Chose étrange, l’infini leur suffit.

1675. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXVIe entretien. Le Lépreux de la cité d’Aoste, par M. Xavier de Maistre » pp. 5-79

Je n’avais jamais éprouvé de ces moments affreux lorsque ma sœur vivait ; il me suffisait de la savoir près de moi pour être plus calme, et la seule pensée de l’affection qu’elle avait pour moi suffisait pour me consoler et me donner du courage.

1676. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre deuxième »

Il suffit qu’on reconnaisse ce tour d’esprit romanesque dans Froissart, et cette marque des mœurs de la société féodale. […] Ses chroniques en sont l’image si fidèle, et son art suffit si complètement à sa matière, qu’il a fait de la chronique comme un genre parfait en soi, qui a devancé la venue de la littérature.

1677. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre II. Prière sur l’Acropole. — Saint-Renan. — Mon oncle Pierre. — Le Bonhomme Système et la Petite Noémi (1876) »

Raison et bon sens ne suffisent pas. […] Quand on leur avait dit autrefois : « Le roi fait cas des Bretons », cela leur suffisait.

1678. (1896) Les origines du romantisme : étude critique sur la période révolutionnaire pp. 577-607

« Des femmes à cheval sur les cadavres d’hommes entassés dans les tombereaux, cherchaient avec des rires affreux à assouvir la plus monstrueuse lubricité. » La seule possibilité d’ajouter créance à de telles anecdotes et de les répéter suffit pour caractériser l’affolement des esprits. […] Pour sauver mes jours… ma mère promit à la Reine des Anges que je lui consacrerai ma virginité. »« J’ai coûté la vie à ma mère en venant au monde », narre le cadet de Bretagne, mais ça ne lui suffit pas, il ajoute : « J’ai été tiré de son sein avec le fer. » Cette gasconnade romantique n’est pas de son crû, elle est une réminiscence du Macbeth de Shakespeare, que René Chateaubriand avait appris en Angleterre à connaître et à admirer.

1679. (1856) Cours familier de littérature. I « Ve entretien. [Le poème et drame de Sacountala] » pp. 321-398

Mais l’analyse et les citations de ce drame suffiront pour donner une idée du degré de perfection auquel, dans ces temps que nous appelons primitifs, et chez ces peuples inconnus avant l’époque historique de notre Europe, l’art théâtral était parvenu. […] « Je ne m’étonne pas », lui dit son jeune compagnon, « si ce bras, solide et noueux comme l’énorme barre de fer qui assure la porte de sa capitale, a suffi pour soumettre à sa puissance la terre, noire limite du vaste Océan ; si, dans les combats acharnés qu’ils livrent, les dieux attribuent autant à son arc redoutable qu’aux foudres d’Indra les victoires éclatantes qu’ils remportent sur leurs fiers ennemis. » Ils s’approchent, ils invitent respectueusement le chasseur à venir habiter quelques jours leur ermitage.

1680. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XII : Distribution géographique (suite) »

D’ailleurs, le temps a suffi à la production d’espèces autochtones appartenant à d’autres classes, et l’on sait que sur les continents, les mammifères paraissent et disparaissent plus vite que d’autres animaux inférieurs. […] La raison élevée de leur multiplication fait qu’un grand nombre d’individus peuvent être détruits sans que l’espèce périsse, parce qu’il suffit d’un petit nombre d’individus pour la reproduire et la multiplier de nouveau en peu de temps, de sorte que dans les mêmes circonstances où des organismes supérieurs périraient, faute de pouvoir se transformer, des organismes inférieurs souffrent seulement durant un temps, mais persistent, et cette persistance même, leur permettant d’acquérir plus aisément une vaste extension, leur donne ensuite de plus puissants moyens pour persister, parce que, s’ils sont détruits sur un point du globe, ils ont chance de se multiplier sur un autre.

1681. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Un tel résultat peut être obtenu systématiquement ou même sans conscience de l’effet produit : il suffit que, sans avoir aucunement la pensée d’altérer la race, chacun conserve de préférence les individus qui, à toute époque donnée, lui sont le plus utiles. […] Il suffit d’ailleurs, pour montrer combien de telles impressions sont peu durables, de rappeler que la plus grande découverte qui ait jamais été faite par l’homme a été attaquée par Leibniz lui-même « comme subversive de la religion naturelle, et par conséquent de la religion révélée. » Un théologien célèbre m’écrivait un jour « qu’il avait appris par degrés à reconnaître que c’est avoir une conception aussi juste et aussi grande de la Divinité, de croire qu’elle a créé seulement quelques formes originales, capables de se développer d’elles-mêmes en d’autres formes utiles, que de supposer qu’il faille un nouvel acte de création pour combler les vides causés par l’action de ses lois. » On peut se demander pourquoi presque tous les plus éminents naturalistes et géologues ont rejeté cette idée de la mutabilité des espèces.

1682. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

On pourrait d’ailleurs se demander si aucune des hypothèses, même du premier genre, rend réellement compte du rejet, et si la faiblesse ou la subconscience d’une perception suffit à lui donner l’aspect d’un souvenir. […] Et ce souvenir lui-même pourrait, à la rigueur, ne pas se manifester : il suffirait qu’il rappelât, sans se montrer lui-même, les circonstances qui ont été données en contiguïté avec lui, ce qui a précédé et ce qui a suivi, enfin ce qu’il importe de connaître pour comprendre le présent et anticiper l’avenir.

1683. (1829) Tableau de la littérature du moyen âge pp. 1-332

Un exemple suffira. […] Qu’il nous suffise de rappeler que la séparation des dialectes du Nord et du Midi, tout à fait accomplie, laisse désormais à l’idiome français un caractère propre et marqué. […] Mais cette étude, nous pouvons l’indiquer plutôt que la faire : qu’il nous suffise de constater ici que l’esprit des trouvères, au douzième et au treizième siècles, a mis en mouvement l’imagination italienne, si féconde dans l’âge suivant. […] Mais ces exemples ne suffisent pas pour indiquer le grand travail des imaginations à cette époque, et l’influence que dès lors la France exerçait sur l’Europe. […] En attendant, voulons-nous résumer toutes les créations poétiques achevées ou versifiées dans le treizième siècle, un mot suffit ; le moyen âge a inventé trois mythologies : la mythologie chevaleresque, la mythologie allégorique, et la mythologie chrétienne, si l’on me pardonne cette expression.

1684. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — III. (Fin.) » pp. 246-261

C’est là un rôle d’honnête homme austère et impitoyable qu’il est bien ambitieux de prétendre tenir, qui suppose dans celui qui l’exerce de bien stoïques vertus, et auquel suffisent à peine l’intégrité exemplaire et l’autorité proverbiale d’un Caton ou d’un Montausier.

1685. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Je n’ai pas à suivre ici les péripéties de l’entreprise ni à faire le siège de Constantinople : qu’il me suffise de rappeler que les croisés ne prirent point d’abord la ville pour leur compte ; ils exécutèrent fidèlement leur promesse, rétablirent sur le trône le père d’Alexis et y placèrent ce jeune homme lui-même.

1686. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

Aux époques régulières, une certaine sagesse élevée peut consister à suivre et à maintenir le train des choses établies, à embrasser tout un ordre prévu et à n’en point sortir : droiture, prudence et modération y suffisent.

1687. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Montluc, toutefois, sachant que le roi tenait fort à cette entreprise, et piqué par l’idée que tous les autres l’estimaient impraticable, résolut de la tenter : il suffisait, en général, qu’on dît devant lui qu’une chose était impossible pour qu’il se dît : « J’en fais mon affaire. » Impossible n’était pas pour lui un mot français, ou du moins un mot gascon.

1688. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

Or, sachez que ce meilleur cheval de Montluc, qu’il eût donné de tout son cœur pour avoir l’hymne des dames siennoises en l’honneur de la France, était un cheval turc dont il a dit « qu’il l’aimait, après ses enfants, plus que chose du monde, car il lui avait sauvé la vie ou la prison trois fois. » Je n’ai pas à entrer dans le détail du siège ; il me suffit d’en avoir signalé le caractère et de donner envie aux curieux de rechercher les pages qui y sont consacrées14.

1689. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Dissiper les vapeurs dont je suis dévoré…     Cherchez l’or, dit la jeune fille ;     Mon travail ne me suffit pas ;     Et le tentateur sur mes pas Jette rubans, tissus, joyaux, tout ce qui brille.

1690. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Mémoires du duc de Luynes sur la Cour de Louis XV, publiés par MM. L. Dussieux et E. Soulié. » pp. 369-384

C’est un joli tour de finances, un joli coup joué au profit de l’État76.On en peut tirer une leçon d’économie politique, et M. de Luynes n’y manque pas ; car il cite à ce propos la réponse du roi de Pologne, Auguste le Magnifique, à l’avare roi de Prusse, qui s’étonnait qu’il pût suffire aux dépenses de son camp de plaisance à Muhlberg, et qui lui demandait son secret.

1691. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — II » pp. 107-121

Une pareille promenade devrait suffire pour apprendre à supporter paisiblement le mouvement de toutes les affaires de ce monde.

1692. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — I » pp. 146-160

Ce qui ne veut pas dire au moins, en prenant pour vrai le signe inverse, qu’il suffit de ne douter de rien et de se croire propre à tout, pour être en réalité capable de tout.

1693. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Questions d’art et de morale, par M. Victor de Laprade » pp. 3-21

C’est un beau thème que l’infortune des grands poètes, et il suffit de quelques noms illustres pour le justifier, quand le chantre ému qui s’en empare sait y répandre de la chaleur et de l’harmonie.

1694. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Lettres de Madame de Sévigné »

Ils s’accumulent, ils se précipitent sous la plume qui suffit à peine à les écouler.

1695. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

De Flers eut le courage et la constance d’y maintenir son armée immobile, malgré les motions téméraires des clubs de Perpignan, malgré les projets des nouveaux représentants du peuple récemment arrivés, qui croyaient que l’enthousiasme suffit à tout, malgré les murmures de son propre État-major et les soupçons de trahison qui circulaient alors si aisément.

1696. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

La Bibliothèque de l’Institut avait peine à suffire à sa consommation de chaque semaine.

1697. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite et fin.) »

mais de la vérité, du comique même ; l’Architriclin, le Vatel au désespoir quand il voit que le vin manque ; Jésus averti tout bas par sa mère et réparant le mal sans bruit ; l’étonnement du maître d’hôtel quand il goûte ce vin de la fin qui se trouve le meilleur, tandis que, selon l’usage des noces de ce temps-là (et, m’assure-t-on, de quelques noces de campagne encore aujourd’hui), on donnait le meilleur vin au premier service, et le moins bon au dessert ; car il suffit que cela gratte, quand les palais, une fois, sont échauffés. — Ces noces de Cana seraient tout un tableau flamand, s’il y avait de la couleur.

1698. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte. »

Si le temps me le permettait, je vous dirais à présent quelqu’une des choses que fit ce soldat ; cela suffirait pour vous intéresser et pour vous surprendre bien plus assurément que le récit de mon histoire. » C’est dommage que le compagnon n’ait pas cédé à la tentation et ne nous ait pas donné toute l’histoire ; mais, certes, ce n’était pas trop d’orgueil ni de vanité à Cervantes que de jeter ainsi sa signature et de profiler sa silhouette au cœur de son œuvre.

1699. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. »

Le duché de Varsovie appartenait entièrement au système de la France ; il était son avant-garde du côté de la Russie ; ses moyens, son armée, devenaient nôtres par la force des choses ; et, s’il ne se suffisait pas à lui-même, il nous fallait y suppléer. » Il nous expose l’état du gouvernement, à cette date, dans le grand-duché, et il nous en décrit le personnel en parfaite connaissance de cause.

1700. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

Il se loue de lui dans ses Souvenirs ; il se croyait mieux avec ce ministre qu’il ne l’était en réalité, et il suffit pour cela de voir en quels termes peu favorables M. de Senfft s’est exprimé sur son compte.

1701. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Selon lui, quatre ou cinq faits authentiques et « plus clairs que la lumière du soleil », suffisent pour garantir tout le reste de la tradition.

1702. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires du comte Beugnot »

Beugnot, qui a sa place dans les mots célèbres, suffirait à maintenir son nom dans l’histoire.

1703. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. (Suite et fin.) »

Il suffit de jeter les yeux sur les singuliers autographes qui nous viennent de Berny pour mesurer en un clin d’œil toute la distance : on était tombé de la langue si pure encore et si juste des dernières années de Louis XIV à celle que parlaient Mlle Leduc et ses pareilles.

1704. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Au reste, la plus mince et imperceptible différence suffit.

1705. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Je joue déjà assez bien le rôle de l’Ermite ; et d’ailleurs ce serait un vrai moyen de me délivrer de l’importunité de mes créanciers, qui ne cessent de me persécuter. » Les quelques lignes de la fameuse préface que nous venons de rappeler suffisent à nous avertir que les chefs-d’œuvre de la comédie française, L’École des femmes, Le Misanthrope, Le Tartuffe, L’Avare, se succédaient sur le même théâtre où Scaramouche et Dominique faisaient à qui mieux mieux leurs culbutes « et autres singeries agréables, comme dit Gherardi, qui sont du jeu italien ».

1706. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Comme il doit exprimer de l’inédit, la science apprise ne lui suffit pas ; il élargit lui-même son métier.

1707. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 15 janvier 1887. »

Qu’il me suffise d’en indiquer le caractère général, et, presque au hasard, de citer quatre ou cinq titres.

1708. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Voici des exemples du premier cas : Nous sentons l’odeur d’un liquide, cette sensation seule ne suffit pas à nous en rappeler le nom ; mais nous le goûtons ensuite, et le rappel s’opère par ces sensations réunies.

1709. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Nous qui l’avons vue dans ses dernières années, et qui avons saisi au passage quelques rayons de cette bonté divine, nous savons si elle avait de quoi y suffire, et si l’amitié ne retrouva pas en définitive chez elle de cette flamme que n’avait jamais eue l’amour.

1710. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Poésies nouvelles de M. Alfred de Musset. (Bibliothèque Charpentier, 1850.) » pp. 294-310

Au théâtre, une situation heureuse, un dialogue fin, ne suffisent pas ; il faut de l’invention, de la fertilité, du développement, de l’action surtout, pour consommer, comme on l’a dit, cette œuvre du démon.

1711. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Walckenaer. » pp. 165-181

Ces divers travaux ne suffisaient pas encore à l’activité de M. 

1712. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Il me serait assez difficile de l’exposer dans les termes même où il le produit ; qu’il me suffise d’en donner l’idée, tel que plus tard on le retrouve chez Descartes ou chez Fénelon : c’est que par cela même que l’esprit humain peut concevoir l’idée d’un Être infini, parfait, et au-dessus duquel il n’en est aucun autre, il devient nécessaire, par là même, que cet Être parfait et infini existe.

1713. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Seconde Partie. De l’Éloquence. — Éloquence de la chaire. » pp. 205-232

L’impression que fait toujours cet orateur simple, naturel, insinuant, suffit pour faire préférer le sentiment à l’instruction, le pathétique au raisonnement, les réflexions de M. de Montcrif à toutes celles que lui oppose son adversaire.

1714. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

« Elle a suffi à une littérature qui compte à peu près huit cents ans ; elle a donné le seizième, le dix-septième, le dix-huitième, le dix-neuvième siècle qui, après avoir fourni (on ne peut parler que des morts) des poètes comme Alfred de Musset et Lamartine, des prosateurs comme Chateaubriand, Madame de Staël, George Sand, n’est ni achevé ni épuisé ; elle vaut la peine qu’on ne laisse point périr, faute de les comprendre, les chefs-d’œuvre qu’elle a produits.

1715. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

L’identité du sujet, si diversement interprété par le peintre et par le romancier, n’aurait pas suffi sans doute à retenir mon attention, si le rapprochement des deux œuvres n’avait aussitôt fait naître en moi la conscience de l’opposition bien nette des deux conceptions dont elles dérivent.

1716. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VI : M. Cousin philosophe »

Elle soutient le sentiment religieux, elle seconde l’art véritable, la poésie digne de ce nom, la grande littérature ; elle est l’appui du droit ; elle repousse également la démagogie et la tyrannie ; elle apprend à tous les hommes à se respecter et à s’aimer. » Pour mieux prouver que la science m’est indifférente, et que je ne me soucie que de morale, je range avec moi sous le même drapeau des philosophies sans métaphysiques, des métaphysiques opposées entre elles et des religions ; il me suffit qu’en pratique elles tendent au même but, et contribuent à nourrir dans l’homme les mêmes sentiments.

1717. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Ce seul exemple suffit à montrer combien, dans les premières imitations latines, la tragédie grecque devait perdre de sa magnificence et de son harmonie.

1718. (1778) De la littérature et des littérateurs suivi d’un Nouvel examen sur la tragédie françoise pp. -158

Il suffit même quelquefois de faire poindre l’aurore des Lettres dans une contrée barbare, pour lui donner bientôt les Arts solides & les inventions hardies. […] Il est plus naturel à ma pensée de faire le chemin : il suffit qu’elle soit avertie ; elle part, bondit & s’élance, & la vraisemblance n’est point alterée : au-lieu que, quand le Poète entasse les évènemens dans l’espace de vingt-quatre heures, qu’il traîne de force tous les personnages au même lieu, & qu’il veut me rendre complice de son grossier mensonge, je me révolte, & j’aurois mieux aimé qu’il m’eût montré des scènes successives, isolées, qui n’excédassent point la mesure de la réalité, que de sentir l’effort continuel & mal-à-droit du Poète qui tyrannise violemment ses personnages, pour les emprisonner dans une courte durée & dans un point donné. […] Nous tirerons hardiment la conséquence des raisonnemens auxquels on n’a point répondu ; c’est qu’il faut en France recomposer l’Art, & ne plus citer Corneille, ni Racine ; il faut fouler aux pieds ces pitoyables règles(51) qui outragent le bon-sens, qui font un parloir de la scène, & fatiguent plus l’imagination dans le point où on la concentre, que si on lui laissoit son vôl étendu & rapide ; elle suffit seule à rapprocher les objets, à se transporter aux lieux où le Poète l’appellera ; à lier toutes les parties d’un grand évènement qu’elle peut embrasser sans peine & sans effort. […] Un accouplement bisarre de deux idées suffit. […] La règle des cinq actes notamment, quelquefois si judicieusement bravée, suffit alors pour scandaliser les esprits accoutumés à compter les actes par leurs doigts ; & nous ne doutons point que ce ne soit là une raison puissante pour tout Littérateur scrupuleusement attaché au bon goût, & craignant d’intervertir l’usage respecté.

1719. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Figaro a donné le signal de la guerre au chantage ; il a levé l’étendard, cela est beaucoup sans doute, mais cela ne suffit pas. […] Le rôle de critique de salon n’est point à dédaigner : il suffit à la réputation de Rivarol ; mais dans ce temps-là, les salons donnaient sur la place publique et trouvaient un écho au dehors. […] L’irritation du critique l’égare au point de lui faire commettre, — à lui, puriste et délicat, — des phrases aussi défectueuses que celles-ci : « Les natures ardentes, buvant à longs traits ces philtres grossiers, acceptent avec la même complaisance celui qui déprave leur raison que celui qui égare leur imagination et leur cœur. » Et plus loin, ce galimatias intolérable : « Cette manie des célébrités modernes, s’imaginent qu’il leur suffit d’être tombées dans un fossé, pour que ce fossé devienne le pensionnaire de leur génie et de leur gloire. » Quel style ! […] André Leclerc Mon excellent ami André Leclerc, de l’Estafette, s’est permis, lui aussi, de pousser une pointe dans le demi-monde métaphorique ; mais il suffira, j’espère, de lui mettre le nez dans son image pour le rendre à l’avenir plus raisonnable et plus tempérant. […] Pourquoi le lexique du Box prévaudrait-il contre le dictionnaire de la fable, lorsque celui-ci laisse découler de ses pages de miel : pégase, bucéphale, centaure, arènes, jeux de Diane, qui suffisent à tout exprimer, — pourvu qu’on ait la précaution de se ceindre le front d’un laurier et de tenir à la main une lyre d’or, ce qui est la chose la plus commode et la plus simple du monde, quand on se rend en coupé à l’heure aux courses de la Marche ?

1720. (1853) Histoire de la littérature française sous la Restauration. Tome I

Maine de Biran s’aperçurent qu’il ne suffisait pas à l’explication de tous les phénomènes de l’entendement et de la production de toutes les espèces d’idées, et ils le modifièrent d’une manière assez grave. […] Ce temps lui suffit pour exercer une action puissante sur le mouvement des idées philosophiques. […] Dans l’été de 1806, l’enceinte de la chapelle des Allemande n’avait pu suffire à la foule des auditeurs. […] Ceci suffit pour faire entrevoir les résultats fâcheux de son influence littéraire. […] Le ton général de ces poésies suffit pour indiquer que le poëte a marché dans la vie, et qu’au lieu de gravir le versant pour arriver au faîte, il commence à redescendre la pente des années.

1721. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Les détails ne lui suffisent pas. […] L’épithète de nature suffit ordinairement à ses besoins. […] Ce grief suffirait : il s’y en joint d’autres. […] Les bergers du roman et de la pastorale suffisent à satisfaire ses goûts champêtres. […] Zola qui se suffise à lui-même, et qui nous explique entièrement la nature de ses héros.

1722. (1938) Réflexions sur le roman pp. 9-257

Il suffit que nous nous retrouvions nous-mêmes. […] Seillière prenne comme fil conducteur de ses recherches les mots qui lui conviennent : il me suffit de les considérer comme des monnaies dont il use pour sa circulation intérieure. […] Il suffit d’exister. » Cela je ne dirai pas que M.  […] Il leur suffît d’exister. » Soit. […] Il ne suffit pas d’écrire en français, il faut composer en français. — Tout cela, M. 

1723. (1902) Symbolistes et décadents pp. 7-402

Le premier critérium, le seul, était de me satisfaire moi-même ; me satisfaisant moi-même j’étais sûr de plaire, soit tout de suite, soit avec d’inévaluables délais à ceux de ma sorte, et cela me suffisait. […] Il serait bon de reconnaître dans les œuvres d’intellect, complètes ou partielles, ce caractère d’intelligence qu’elles ont ; l’allégation que tel pourrait faire, qu’il n’était encore que comateux lorsque florissait Sue, suffit à expliquer son aire mais non à légitimer son parallèle. […] Cela et ses poèmes suffisent à constituer sa physionomie, à nous faire regretter les développements des idées consignées dans les notules fragmentaires publiées après sa mort. […] Le monde est plein de contrées magnifiques que les existences réunies de mille hommes ne suffiraient pas à visiter. […] On se demande si l’art doit se suffire à lui-même : doctrine de l’art pour l’art ; s’il doit belligérer au profit d’idées sociales, d’intérêts contemporains et généraux : doctrine de l’art social.

1724. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

Il suffit d’envisager l’ensemble des moralités d’Homère pour apprendre à détester les dissensions et les injustes combats, mais à aimer les glorieux périls de la guerre nécessitée par une légitime défense : car jamais la philosophie ne voulut persuader qu’il faille sacrifier son foyer, sa famille, ses lois, à l’amour d’une lâche paix, et exercer une humanité passive envers des brigands et des pirates inhumains. […] Je me restreins à ce petit nombre d’excellents modèles qui nous suffisent pour les diversités des espèces, et pour le complément de toutes les règles du genre. […] On s’aperçoit à l’exposé de leur sort que les facultés brillantes, que les événements remarqués qui distinguent la plupart des hommes qu’on a vus jouer quelque rôle dans l’histoire, ne sont que des accidents ordinaires dans la vie des vrais poètes : leur esprit semble au-dessus de toutes les chances de la destinée, et suffit de plus au travail qui bâtit des monuments immortels, en dépit des cris injurieux, et des coups de la fortune. […] Le bon choix d’un fait ou d’une fable épique mérite d’autant plus l’attention du poète qu’il ne lui suffit pas de trouver une action à chanter, si cette action n’a les qualités relatives au mode de ses chants. […] La Tempête de Shakespeare et son Jules César me suffiraient pour le prouver.

1725. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Ce sont gens qui ont un certain sentiment du beau, mais qui croient fermement que cela suffit à l’humanité. […] Du reste il n’y a aucun risque qu’on y arrive ; mais il suffit qu’on s’en rapproche et il suffit même qu’on y tende, à la condition qu’on y tende sans cesse, puisque c’est seulement l’excès de la joie et de la tristesse qu’il s’agit de supprimer. […] Il ne sait rien, parce qu’il ne sait que son art et qu’il croit que cela suffit. […] « Ce qui donne naissance à la société, c’est l’impuissance où est chaque homme de se suffire à lui-même et le besoin qu’il éprouve de beaucoup de choses. […] Notre gouvernement sera donc, pour toutes ces raisons, dont une suffirait, essentiellement antidémocratique.

1726. (1896) Études et portraits littéraires

De la proposition fameuse de l’Éthique, il n’a retenu que la nécessité, et il prétend qu’elle lui suffit. […] Sa notion résume leur groupe, et il nous suffit de la définir pour l’avoir tout entier en raccourci. […] La pensée abstraite ne lui suffit pas ; il faut qu’il la concrétise ; il ne saurait se passer de « toucher des formes ». […] D’ailleurs, sans changer de latitude, la seule vue du grand désert mouvant suffit au luxe varié de ses tableaux. […] Mais suffit-il pour maîtriser les passions de proposer à la volonté des convenances engageantes ?

1727. (1930) Le roman français pp. 1-197

Il suffit que l’on parle d’elles : mais elles en parlent elles-mêmes bien mieux ! […] Et je viens vous enseigner une morale d’amour. » La morale d’amour ne suffit pas. […] C’est bien simple et cela suffit. […] Berl seulement, ce qui ne suffit pas. […] Il ne suffit pas d’un seul volume pour faire un Balzac.

1728. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CLe entretien. Molière »

Le mérite est comme le Nil, nul ne connaît sa source ; il suffit qu’il coule et qu’il féconde ; on boit ses eaux sans leur demander leur nom ; ouvrier ou grand seigneur, on est grand homme et c’est assez. […] Convenons pourtant que l’invention comique n’est pas forte, et qu’elle ne suffirait pas aujourd’hui. […] Mais vous ne croiriez point jusqu’où monte son zèle : Il s’impute à péché la moindre bagatelle ; Un rien presque suffit pour le scandaliser, Jusque-là qu’il se vint l’autre jour accuser D’avoir pris une puce en faisant sa prière, Et de l’avoir tuée avec trop de colère.

1729. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DE LA MÉDÉE D’APOLLONIUS. » pp. 359-406

Par malheur, le poëte, redevenu érudit, ne veut rien omettre, et il nous promène ensuite à travers toutes les vicissitudes d’un retour où certains tableaux, ménagés de distance en distance, ne suffisent pas à racheter la fatigue pour le lecteur. […] Il suffit de ce qu’on a pu entrevoir à travers nos rapides traductions, pour mettre tout lecteur équitable à même de répondre.

1730. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre I. De l’action »

Tant vous vous êtes montrés avides du bien d’autrui, et impatients de commander, que ni la terre, toute vaste qu’elle est, ne vous suffit pas, ni la mer avec tous ses abîmes. […] Rien ne suffit aux gens qui nous viennent de Rome.

1731. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIVe entretien. Cicéron (3e partie) » pp. 257-336

« Ainsi supérieure et à la tristesse et à toute autre passion, ainsi heureuse de les avoir toutes domptées, un reste de passion suffirait toujours, non seulement pour priver l’âme de son repos, mais pour la rendre vraiment malade. […] « Dans cinq autres livres de dissertations, les Tusculanes, j’ai recherché quelles étaient, pour l’homme, les principales conditions du bonheur : le premier traite du mépris de la mort ; le second, du courage à supporter la douleur ; le troisième, des moyens d’adoucir les peines ; le quatrième, des autres passions de l’âme ; et le cinquième enfin développe cette maxime, qui jette un si vif éclat sur l’ensemble de la philosophie, que la vertu seule suffit au bonheur.

1732. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIe entretien. Balzac et ses œuvres (2e partie) » pp. 353-431

Une seule chandelle suffisait à la famille pour la soirée. […] On ne peut pas le louer plus haut, ce mot suffirait pour sa gloire.

1733. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

vous êtes seul infiniment bon, seul très haut, très puissant ; vous suffisez seul, parce que seul vous possédez et vous donnez tout ; vous seul nous consolez par vos douceurs inexprimables ; seul, vous êtes toute beauté, tout amour ; votre gloire s’élève au-dessus de toute gloire, votre grandeur au-dessus de toute grandeur ; la perfection de tous les biens ensemble est en vous, Seigneur mon Dieu, y a toujours été, y sera toujours. Ainsi tout ce que vous me donnez hors de vous, tout ce que vous me découvrez de vous-même, tout ce que vous m’en promettez, est trop peu et ne suffit pas, si je ne vous vois, si je ne vous possède pleinement.

1734. (1890) L’avenir de la science « III » pp. 129-135

Chez quelques-uns de ces grands hommes, cela s’expliquait par une vue bornée de la science et de son objet ; chez d’autres, comme chez Descartes 31, qui prétendait bien tirer de la raison les vérités essentielles à l’homme, il y avait superfétation manifeste, emploi de deux rouages pour la même fin  Je n’ai pas besoin, remarquez bien, de me poser ici en controversiste, de prouver qu’il y a contradiction entre la science et la révélation : il me suffit qu’il y ait double emploi pour trouver ma thèse actuelle. […] Il faut qu’il n’en soit plus ainsi chez les nations modernes, puisque le repos dans les cultes religieux suffit pour énerver une nation 49.

1735. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 juillet 1885. »

Bientôt j’éprouvai la sensation d’une clarté plus vive, d’une intensité de lumière croissant avec une telle rapidité, que les nuances fournies par le dictionnaire ne suffiraient pas à exprimer ce surcroît toujours renaissant d’ardeur et de blancheur. […] Et de fait, si nous voulions savoir la signification du mot dans l’acception très haute, très vaste, il nous suffirait de considérer la destinée des sublimes conceptions du Maître, écloses depuis Lohengrin, qui, seul, aux yeux de bien des gens, passe pour avoir « réussi ».

1736. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre deuxième. L’idée de l’espace. Son origine et son action »

Toutefois les sensations visuelles seules ne suffiraient pas à produire une idée nette de l’espace, pas même les sensations de couleur : comme pour le tact, il y faut joindre le mouvement, la réaction cérébrale et musculaire. […] En un mot, notre cerveau réagit naturellement selon les lois géométriques et spatiales ; de ce mécanisme naturel résulte une série d’impressions sui generis et de réactions également spécifiques : il suffit de réfléchir ensuite sur ces actions et réactions pour en tirer ce qu’elles contiennent, des relations spatiales ; enfin, ces relations ne sont jamais si nettes que quand nous les réalisons.

1737. (1857) Cours familier de littérature. III « XIIIe entretien. Racine. — Athalie » pp. 5-80

Ce mariage suffisait à Louis XIV pour calmer ses scrupules, mais il ne suffisait pas à la pieuse ambition de la nouvelle favorite pour élever son rang au niveau du miracle de ses rêves ; elle aspirait à conquérir dans l’esprit de la cour, du clergé, de la noblesse française, des titres de considération et de reconnaissance capables de justifier son élévation jusqu’au trône.

1738. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

. — Athalie (suite) I Nous disions, à la fin du dernier de ces Entretiens, que, pour bien juger d’une œuvre dramatique, il ne suffisait pas de la lire (chose en général ingrate, souvent fastidieuse, toujours incomplète), mais qu’il fallait assister, en corps et en âme, à sa représentation. […] Les prêtres ne pouvaient suffire aux sacrifices.

1739. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De la dernière séance de l’Académie des sciences morales et politiques, et du discours de M. Mignet. » pp. 291-307

Vous diriez que ce contemplateur est peut-être un peintre, un paysagiste, à qui il suffit, comme au Canaletto, d’observer, pour les reproduire, les couleurs et les transparences, mais que, certes, ce n’est pas un vrai savant.

1740. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — II. (Fin.) » pp. 364-380

Cela ne lui suffisait pas : Il vint un jour chez moi, dit Voisenon, me confier que ses affaires n’étaient pas bonnes, et qu’il était décidé à s’ensevelir dans une retraite éloignée de Paris.

1741. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

Toutefois, et malgré les efforts de l’abbé Maury pour porter au rang des chefs-d’œuvre deux des sermons de Fénelon, ce dernier, en raison même de la multiplicité de ses dons, n’avait pas reçu avant tout celui de la puissance oratoire, de cette organisation manifeste, naturellement montée pour être sonore et retentissante, pour être hautement distributive à distance, et qu’il suffit ensuite de nourrir au-dedans de forte doctrine, d’étude et de saines pensées, pour que tout cela tourne en fleuve, en pluie, en tonnerre majestueux, ou en une vaste canalisation fécondante.

1742. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Il y a des tons qui crient et que ne suffisent pas à racheter d’agréables vers, tels que ceux-ci : Quant à moi, j’aime mieux ne manger que du pain Et boire d’un ruisseau puisé dedans la main, Sauter ou m’endormir sur la belle verdure, Ou composer des vers près d’une eau qui murmure… Mais, quelques vers plus haut, il était question d’un crocheteur qui, rien qu’à l’entendre nommer, me gâte cette vue champêtre.

1743. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers. (Tome XII) » pp. 157-172

Mais aussi il y a un historien des plus heureusement doués dont le procédé est autre : il lit, il étudie, il se pénètre pendant des mois et quelquefois des années d’un sujet, il en parcourt avec étendue et curiosité toutes les parties même les plus techniques, il le traverse en tous sens, s’attachant aux moindres endroits, aux plus minutieuses circonstances ; il en parle pendant ce temps avec enthousiasme, il en est plein et vous en entretient constamment, il se le répète à lui-même et aux autres ; ce trop de couleur dont il ne veut pas, il le dissipe de la sorte, il le prodigue en paroles, en saillies et en images mêmes qui vaudraient souvent la peine d’être recueillies, car, plume en main, il ne les retrouvera plus : et ce premier feu jeté, quand le moment d’écrire ou de dicter est venu, il épanche une dernière fois et tout d’une haleine son récit facile, naturel, explicatif, développé, imposant de masse et d’ensemble, où il y a bien des négligences sans doute, bien des longueurs, mais des grâces ; où rien ne saurait précisément se citer comme bien écrit, mais où il y a des choses merveilleusement dites, et où, si la brièveté et la haute concision du moraliste font défaut par moments, si l’expression surtout prend un certain air de lieu commun là où elle cesse d’être simple et où elle veut s’élever, les grandes parties positives d’administration, de guerre, sont si amplement et si largement traitées, si lumineusement rapportées et déduites, et la marche générale des choses de l’État si bien suivie, que cela suffit pour lui constituer entre les historiens modernes un mérite unique, et pour faire de son livre un monument.

1744. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres complètes de Saint-Amant. nouvelle édition, augmentée de pièces inédites, et précédée d’une notice par M. Ch.-L. Livet. 2 vol. » pp. 173-191

Le malheur est que le talent, fût-il des plus riches, ne suffit pas à ces tours de force ; on ne se dédouble pas ainsi.

1745. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Eugénie de Guérin, Reliquiae, publié par Jules Barbey d’Aurevilly et G.-S. Trébutien, Caen, imprimerie de Hardel, 1855, 1 vol. in-18, imprimé à petit nombre ; ne se vend pas. » pp. 331-247

. — Mais je n’ai pas à analyser ici les productions de Guérin ; il me suffit d’en rappeler l’idée et d’en provoquer le réveil : ses œuvres complètes, on nous l’annonce enfin, vont paraître, prose et vers, lettres et fragments d’art, grâce aux soins des mêmes amis qui se sont voués à l’honneur de son nom et à la conservation de sa mémoire.

1746. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Croissez, comme j’ai vu ce palmier de Latone, Alors qu’ayant des yeux je traversai les flots ; Car jadis, abordant à la sainte Délos, Je vis près d’Apollon, à son autel de pierre, Un palmier, don du ciel, merveille de la terre : Vous croîtrez comme lui… Après avoir tenté inutilement de l’acclimater à Berne, le trésorier de Bonstetten permit à son fils de se rendre en Hollande à l’université de Leyde, mais sous la condition expresse qu’il n’y étudierait pas la philosophie : il craignait que ce regard aux choses du dedans ne nuisît à l’observation des faits du dehors ; mais Bonstetten était assez éveillé pour suffire aux deux sortes de vue.

1747. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

Nous frisons de même ; mais le bien dit ne suffit pas en telle matière ; nous ajouterons quelque chose.

1748. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

. — Être plutôt que paraître, savoir plutôt qu’enseigner, préférer une vie égale et tranquille avec l’estime des siens à une réputation lointaine, renoncer aux chimères, aux grands desseins, pour cultiver cette sorte de mérite « qui a sa récompense en soi-même et se suffit » ; faire tout cela et par choix, et aussi parce qu’on n’a pas en soi de démon qui vous pousse ailleurs : tel était, avec ses trente louis de rente, et même un peu plus, dit-on, Abauzit, le type du studieux et du sage non professant, mais consultant.

1749. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Que si cela ne suffisait pas sous le régime parlementaire, et si M. 

1750. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Essai sur l’Histoire générale des sciences pendant la Révolution française. »

Les savants, après s’être livrés à l’analyse la plus minutieuse, pour laquelle on leur a laissé à peine le temps nécessaire, paraissent, — j’allais dire comparaissent, — Berthollet en tête, devant le Comité assemblé : ils déclarent dans leur Rapport « que les eaux-de-vie ne sont point empoisonnées ; qu’on y a seulement ajouté de l’eau dans laquelle se trouve de l’ardoise en suspension, en sorte qu’il suffit de les filtrer pour leur ôter toute propriété nuisible : « Robespierre, qui espérait une trahison, demande aux commissaires s’ils sont bien sûrs de ce qu’ils viennent d’avancer.

1751. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Il serait à souhaiter sans doute que tous les sujets d’un royaume fussent vertueux, et l’on ne saurait prendre de trop justes mesures pour qu’une bonne éducation les rende tels ; mais il suffit qu’il s’y trouve autant d’hommes versés dans les sciences qu’il en faut pour remplir les places.

1752. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’Impératrice Catherine II. Écrits par elle-même. »

. — Dès l’enfance, il parut si mal élevé qu’on crut que son gouverneur, le grand maréchal Brummer, Suédois de naissance, dès qu’il vit que le prince n’était point destiné au trône de Suède, mais à celui de Russie, changea de méthode et s’appliqua à lui gâter le cœur et l’esprit de propos délibéré : le maréchal en était bien innocent et n’en pouvait mais ; la nature de l’élève suffisait de reste à tous ses vices.

1753. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poème des champs, par M. Calemard de Lafayette (suite et fin) »

Vous savez aussi bien que moi ces beaux vers : Felix qui potuit rerum cognoscere causas… Fortunatus et ille deos qui novit agrestes…, ce qu’un de mes amis et qui l’est aussi des Littré, des Renan, et même de Proudhon, je crois, s’est amusé à paraphraser ainsi, à votre intention et presque à votre usage ; et c’est à peu près de la sorte, j’imagine, du moins pour le sens, qu’un Virgile, ou un parfait Virgilien par l’esprit, s’il était venu de nos jours, aurait parlé : « Heureux le sage et le savant qui, vivant au sein de la nature, la comprend et l’embrasse dans son ensemble, dans son universalité ; qui se pose sans s’effrayer toutes ces questions, terribles seulement pour le vulgaire, de fin et de commencement, de destruction et de naissance, de mort et de vie ; qui sait les considérer en face, ces questions à jamais pendantes, sans les résoudre au sens étroit et en se contentant d’observer ; auquel il suffit, dans sa sérénité, de s’être dit une fois que “le mouvement plus que perpétuel de la nature, aidé de la perpétuité du temps, produit, amène à la longue tous les événements, toutes les combinaisons possibles ; que tout finalement s’opère, parce que, dans un temps suffisant et ici ou là, tout à la fin se rencontre, et que, dans la libre étendue des espaces et dans l’infinie succession des mouvements, toute matière est remuée, toute forme donnée, toute figure imprimée40” ; heureux le sage qui, curieux et calme, sans espérance ni crainte, en présence de cette scène immense et toujours nouvelle, observe, étudie et jouit !

1754. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Delécluze, connu des gens de lettres et des artistes ne l’est guère du public ; car, bien qu’il écrive depuis tant d’années, il n’est pas, je le répète, un de ces écrivains qu’il suffit de nommer ; il n’a jamais eu de ces rencontres brillantes de plume qui éclatent aux yeux de tous sous forme de talent.

1755. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Sainte-Hélène, par M. Thiers »

Il savait que l’histoire humaine, en ces moments d’ébranlement et de commotion générale et profonde, a, pour ainsi dire, plusieurs dessous, et que le génie d’un seul a suffi bien souvent pour dégager et faire saillir un de ces plans cachés, inaperçus, lesquels, sans un homme, sans le téméraire au coup de main imprévu et vigoureux, auraient toujours paru à la foule (y compris le peuple des gens d’esprit) impraticables, chimériques, et auraient été universellement déclarés impossibles.

1756. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La Grèce en 1863 par M. A. Grenier. »

vous n’avez pu échapper à cette loi ; il ne suffit pas d’exploits brillants et d’un jour, il faut une bonne conduite continue.

1757. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc »

J’ai emporté de cette première leçon une impression pénible ; j’ai reconnu une fois de plus qu’il suffit de quelques malveillants obstinés pour tenir en échec la bonne volonté du grand nombre.

1758. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite.) »

Il suffit que « tout uniment et avec des paroles claires, honnêtes et bien disposées, dans une période sonore, et par le cours naturel d’un récit amusant, l’auteur peigne ce que son imagination conçoit et qu’il fasse comprendre ses pensées sans les embrouiller ni les obscurcir : « Tâchez aussi, se fait-il dire par un interlocuteur de ses amis, qu’en lisant votre histoire, le mélancolique s’excite à rire, que le rieur augmente sa gaieté, que le simple ne s’ennuie pas, que l’habile admire l’invention, que le grave ne la méprise point, et que le sage se croie tenu de la louer.

1759. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Sa maison seule, qui est fort belle, ses escaliers ornés de statues d’un goût parfait, la beauté de ses tableaux, la profusion des dessins qu’on trouve jusque dans ses antichambres, et les raretés de toute espèce et de tous les siècles qu’on rencontre à chaque pas, auraient suffi pour m’apprendre que j’entrais chez le prince de la littérature allemande.

1760. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. (suite et fin.) »

Ce n’est pas pour rien qu’il s’appelait Évariste : il tenait de Parny, son parrain poétique, plus que d’Alfred de Musset. » — Je compléterai aujourd’hui et préciserai un peu plus ces souvenirs, mais sans m’astreindre a la notice : il suffit ici d’un profil et d’un médaillon.

1761. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Pour en donner une faible idée, il suffira de dire que le comte de Gisors, un colonel exemplaire, a pour lui vingt-trois chevaux, sept de plus que ne portait l’ordonnance, et que le maréchal n’a pas moins de vingt-huit secrétaires, dont Grimm était un : qu’on juge parla du reste.

1762. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. EDGAR QUINET.— Napoléon, poëme. — » pp. 307-326

Comme ces empereurs romains que la mort incontinent faisait dieux, suffit-il à nos personnages historiques de mourir pour être faits tout aussitôt idées ?

1763. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LE COMTE MOLÉ (Réception à l’Académie.) » pp. 190-210

Les jours et une partie des nuits suffisaient à peine à son zèle.

1764. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — II »

Son génie, naturellement recueilli et paisible, eût-il suffi à cette intensité d’action que réclame notre curiosité blasée, à cette vérité réelle dans les mœurs et dans les caractères qui devient indispensable après une époque de grande révolution, à cette philosophie supérieure qui donne à tout cela un sens, et fait de l’action autre chose qu’un imbroglio, de la couleur historique autre chose qu’un badigeonnage ?

1765. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre VIII. De l’invasion des peuples du Nord, de l’établissement de la religion chrétienne, et de la renaissance des lettres » pp. 188-214

Il faut des secousses violentes pour porter l’esprit humain sur des objets entièrement nouveaux ; ce sont les tremblements de terre, les feux souterrains, qui montrent aux regards de l’homme des richesses dont le temps seul n’eût pas suffi pour creuser la route.

1766. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre III. Théorie de la fable poétique »

Pour susciter cette passion immense, il a suffi d’assembler quelques conditions qui étaient dans la nature, et que la nature n’avait pas assemblées.

1767. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre 2. La littérature militante »

Il suffit qu’ils soient aux prises avec de rudes réalités, secoués de vraie passion, et dès lors ils ne s’amusent plus à faire montre de leur savoir d’humanistes.

1768. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « J.-J. Weiss  »

Tout cela devrait lui suffire ; mais non : il y chez lui, comment dirai-je ?

1769. (1914) Enquête : L’Académie française (Les Marges)

Charles Saunier Il suffit de jeter les yeux sur une liste des Quarante depuis la fondation de l’Académie, pour se rendre compte que la Compagnie demeure égale à elle-même.

1770. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XVI. Les derniers temps de la comédie italienne en France » pp. 311-338

De même, quand Arlequin se présente, sous le nom de Grapignan, pour succéder au procureur Coquinière56, Arlequin Grapignan n’a que faire d’être Arlequin, il lui suffirait d’être Grapignan.

1771. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Mais il suffit de comprendre par surnaturel l’inexplicable ; tout fait nouveau serait donc provisoirement miraculeux, puis perdrait son caractère de prodige dès l’explication scientifique trouvée.

1772. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre onzième. »

Il suffit.

1773. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

Pour faire le plus charmant et le plus vrai portrait de Voltaire, il suffirait d’extraire avec choix quelques-unes de ses propres paroles ; Voltaire n’est pas homme à se contraindre, même en ce qui le juge, ni à retenir longtemps ses pensées : Ne me dites point que je travaille trop, écrivait-il vers ces années de Cirey : ces travaux sont bien peu de chose pour un homme qui n’a point d’autre occupation.

1774. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Nous, qui rougirions d’ignorer la géographie et ses divisions principales, nous n’avons qu’à lever les yeux vers le ciel pour voir que nous ignorons à peu près tout de cette cosmographie sublime qu’il suffirait cependant de quelques soirées et d’un démonstrateur pour nous apprendre.

1775. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

Et pourtant elle mérite toute cette pitié, et il suffit, pour la lui rendre insensiblement, de la suivre dans la troisième et dernière partie de sa vie, durant cette longue, injuste et douloureuse captivité de dix-neuf années (18 mai 1568 — 5 février 1587).

1776. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Les Gaietés champêtres, par M. Jules Janin. » pp. 23-39

Bientôt, sous le souffle ardent du bonhomme, se réveille une flamme oubliée et qui suffit à rallumer la lampe, ranimée elle-même par un peu d’huile que lui verse une main avare ; la faible clarté remplit à peine un coin obscur de cette masure. — Allons, au travail, mon pauvre Hilaire !

1777. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Cependant la douce et honorable hospitalité de Vienne ne suffisait pas au maréchal ; il se sentait encore des forces, de l’ardeur, une curiosité active ; pour la satisfaire, pour tâcher de donner « un nouvel intérêt à son existence », il conçut le projet d’un grand voyage à travers la Hongrie, la Russie méridionale, jusqu’en Turquie, en Syrie et en Égypte.

1778. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

En un mot, dans Anacharsis le courant n’est jamais rapide, mais il suffit pour porter le lecteur qui n’est pas trop impatient, et à qui une élégante douceur, munie d’exactitude, fait pardonner le manque de nerf et d’originalité.

1779. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Th. Dostoïewski »

Et si l’on considère l’étendue et la pénétration de leur enquête, la façon neuve dont ils parlent de l’homme et à l’homme, leur art sincère et haut, la sérieuse ferveur de l’évangile de pitié qu’ils proposent, le plus déterminé partisan de l’art pour l’art peut se sentir hésiter et réfléchir, jusqu’à ce qu’il recomprenne que le problème de la société, de la vie de l’homme ne peut être résolu par le cri de passion des détracteurs d’intelligence, que l’évangile que prêchent les romanciers slaves a précédé de dix-huit cents ans les maux qu’ils dénomment, que l’enseignement fut la marque même de sa fausseté dans son emportement, que la vérité est paisible, persuade en paraissant et n’a nul besoin d’apôtres, que l’erreur seule parle violemment, que les œuvres d’art ne doivent pas tenter de tromper, qu’il leur suffit de contenir les préceptes latents et obéis, ceux-là du monde dont elles sont la lumineuse image.

1780. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « J. K. Huysmans » pp. 186-212

Et ce livre qui se résume en une accumulation de tableaux colorés et mouvementés, n’a pas suffi à assouvir la passion descriptive de M. 

1781. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Par exemple, j’y lis : « Pour conclure avec certitude qu’une condition donnée est la cause prochaine d’un phénomène, il ne suffit pas d’avoir prouvé que cette condition précède ou accompagne toujours le phénomène ; mais il faut établir encore que, cette condition étant supprimée, le phénomène ne se montrera plus. » N’est-ce pas là une des maximes capitales de Bacon ?

1782. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Observations générales, sur, l’art dramatique. » pp. 39-63

Oui, j’aime avec fureur…… Ne blâme point l’amour où ton frère est en proie ; Pour me justifier, il suffit qu’on la voie.

1783. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Du Rameau » pp. 288-298

Mon ami, le témoignage de deux hommes suffit pour conduire sur un échafaud.

1784. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 24, des actions allegoriques et des personnages allegoriques par rapport à la peinture » pp. 183-212

Or, comme nous le dit Vitruve en termes très-sensez, il ne suffit pas que nos yeux trouvent leur compte dans un tableau bien peint et bien dessiné : l’esprit y doit aussi trouver le sien.

1785. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « I »

Opinion toute personnelle et qui risque de ne pas suffire à me convaincre.

1786. (1887) La banqueroute du naturalisme

Dans la poésie, maintenant que l’on disposait d’un instrument plus souple, nous avions donc espéré que l’on voudrait imiter et serrer de plus près l’exact contour de la réalité ; nous avions cru qu’au théâtre, on pourrait se débarrasser des conventions inutiles, pour n’en respecter que les nécessaires, qui ne sont pas plus de deux ou trois ; et, dans le roman, nous avions cru que la vie contemporaine était assez complexe, assez curieuse à étudier pour que l’imitation en pût suffire à plus d’un chef-d’œuvre.

1787. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IV : M. Cousin écrivain »

Les abstractions s’entre-choquent ; des formes obscures passent devant l’imagination troublée ; dans le cerveau s’agite et roule une ronde d’êtres métaphysiques, grandioses et vides, poésie confuse et sublime que réclament toutes les jeunes têtes d’Allemagne, et qui, avec la bière, suffit pour les remplir à vingt ans.

1788. (1927) Approximations. Deuxième série

Mais sans prétendre à pénétrer un seul des autres obstacles que Pascal put rencontrer en lui-même, il suffit qu’il portât en soi la pierre d’achoppement, à savoir la nature même de son génie. […] Qu’en cette occurrence le survol soit possible s’explique précisément par l’intensification du présent dont la possession s’accompagne ; car il suffit que le présent revendique l’autonomie pour que le héros de Sindral — et ceux qui appartiennent à cette lignée — la lui dénient. […] Dans le poème en prose — poursuite par excellence des analogies — l’arbitraire même sert l’écrivain : il suffit alors que dans ce jeu de balles un tact naturel règle la succession bigarrée des images : tour à tour surgissent les damiers d’un fantastique manteau d’arlequin. […] Il suffisait cependant d’avoir causé un peu longuement et intimement avec Jaloux pour reconnaître qu’à un esprit aussi préoccupé des problèmes les plus hauts de son art, il convenait d’accorder confiance. […] Fait plus significatif encore que notre besoin de parler de lui, sa présence parmi nous est si centrale et si sous-jacente qu’il suffit que l’entretien s’approfondisse, se creuse — un entretien dont il ne forme ni le thème ni l’arrière-pensée — pour que nous le sentions là, qu’aussitôt nous nous tournions vers lui, et qu’il réponde.

1789. (1890) La bataille littéraire. Deuxième série (1879-1882) (3e éd.) pp. 1-303

Qu’il suffise de savoir que la femme de Numa découvre d’une façon presque aussi brutale que la première fois, qu’elle a été trompée. […] … Cette scène si dramatique suffira pour donner une idée des développements qu’a pu prendre l’action romanesque commandée par des sentiments aussi grands et aussi généreux. […] Bien d’autres morceaux intéressants figurent dans ce recueil, mais celui-ci suffira pour en donner une juste opinion. […] Il ne suffit pas d’avoir des sources actives et fécondes, il faut un esprit ferme et subtil, ramassé, et qui se multiplie, pour porter le poids de l’invention, pour soutenir partout et développer sans flétrir cette fleur fugitive qui colore la pensée dans la pensée, et qui s’efface si rapidement quand la pensée a pris son habit pour se faire voir et palper.

1790. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

» Si nous pouvions douter que ce roman luxurieux fût un ouvrage moral, la fin suffirait à nous édifier. […] Un hiver a suffi pour compromettre d’Annunzio et Fogazzaro. […] Deux mots suffisaient à exposer la méthode : ce gentleman faisait toujours son devoir, tout simplement. […] On verra que le mérite et le bonheur ne suffisent pas ; mais qu’il faut aussi, et par-dessus tout, une énorme dépense de volonté et de persévérance. […] Pour le prouver, il me suffira de transcrire cette phrase, qui fut écrite la semaine dernière, dans la Revue blanche, par M. 

1791. (1910) Victor-Marie, comte Hugo pp. 4-265

La première suffît, c’est que ce serait parfaitement inutile. […] Il suffît de voir le texte et de nous connaître. […] Il ne nous suffit plus qu’un marbre soit impeccable. Il ne nous suffit plus qu’un vêtement de marbre. […] Car il y en aura deux, un seul ne suffit pas à ma grandeur.

1792. (1802) Études sur Molière pp. -355

Cinq années suffisent à Pocquelin pour achever ses études : son père, devenu vieux et infirme, le rappelle pour exercer auprès du roi les fonctions de sa charge ; elle avait contrarié l’enfant avide d’instruction, elle ouvre aujourd’hui la mine la plus féconde à l’homme instruit, à l’homme que la nature destine à la saisir et à la peindre dans ses diverses attitudes5. […] Le genre. — J’entends tous les jours mettre cette comédie au rang des pièces d’intrigue, et c’est à tort qu’on le soutient ; l’intrigant Mascarille imagine, il est vrai, toutes ses fourberies avec tant de jugement, qu’une seule suffirait à ses desseins, s’il n’était croisé par les étourderies de son maître ; mais l’étourdi Lélie, entraîné par son caractère, détruit si bien ce que fait Mascarille, qu’une seule de ses étourderies dérangerait totalement, ou couperait le fil de l’intrigue, sans l’adresse de Mascarille à tout renouer. […] il lui suffit de ne pas se trouver au lieu indiqué. […] La sérénade que fait exécuter Adraste, le prétexte qu’il prend pour s’introduire auprès de sa maîtresse, le déguisement d’Hali en Turc, et le voile qui trompe dom Pèdre, sont des moyens bien souvent employés ; il suffit d’ouvrir le théâtre espagnol ou italien pour s’en convaincre. […] Il nous suffit, pour la décence, d’entendre Angélique dire que, « pour punir son mari de ne lui avoir pas demandé son aveu avant de l’épouser, elle veut borner sa vengeance au plaisir de voir le beau monde et de s’entendre dire des douceurs ».

1793. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre premier. Ce que devient l’esprit mal dépensé » pp. 1-92

Désormais, son théâtre errant ne lui suffit plus. […] Toujours est-il que l’esprit, l’intelligence, l’étude des modèles, ne suffisent pas à faire un comédien. […] Arrivez tout de suite, et montrez-vous, ça suffira ; parlez, et soudain vous allez trouver, sans vous en douter, dans la prose la plus vulgaire, ou dans le vers le plus traînant, toutes sortes de mots touchants ou risibles ; soudain vous allez faire de rien quelque chose, une comédie d’un geste, un drame d’un seul cri : émue ou riante, à votre aspect, sans qu’elle se puise expliquer pourquoi son rire, et pourquoi ses larmes, la foule vous applaudit et vous regarde, bouche béante ; — vous, cependant, vous ne comprenez rien à tant de succès ; vous regardez d’où cela peut venir, vous vous demandez si en effet vous êtes bien un homme comme tous les autres, vous êtes prêt à prendre en pitié ces grands niais qui rient aux éclats de la gaîté que vous ne ressentez guère, qui pleurent à chaudes larmes d’une douleur qui est si loin de votre âme. […] Cet Ali est un homme simple et calme dans son dévouement ; il ne prend pas feu tout de suite, comme le seigneur Figaro ; il n’a pas recours tout d’un coup aux grands moyens, aux grandes phrases, aux hardis conseils ; ce bon Ali comprend confusément qu’un des privilèges, un des grands bonheurs de l’amour, c’est de se suffire à soi-même, et qu’en ceci la complaisance des tiers est souvent odieuse quand elle n’est pas infâme. […] Ici la sérénade commence ; on aurait tort de dédaigner la vieille musique de Lulli qui réchauffait autrefois les vers de Quinault ; cette musique est agréable et toute faite naïvement pour les paroles ; elle suffit et au-delà à réveiller le vieux tuteur et à le mettre sur ses gardes.

1794. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Théocrite »

Euphrosyne est la joie que nous cause la pure délectation de la voix musicale et harmonieuse. » Sans insister sur les distinctions un peu platoniques du vieil auteur, il me suffit des traductions vives qu’il emploie pour éclairer la discussion même. […] Homère suffit pour tous.

1795. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Un os, un fragment d’os suffit, dit-on, à la science et au génie pour reconstruire l’animal entier. […] Cette lacune dans sa théorie est fort remarquable ; elle suffit pour nous faire voir que sa détermination de l’idée du comique n’est point a priori.

1796. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

Mais ce seul mot suffit à me faire reconnaître, au son de la voix, par celle de mes sœurs qui m’avait entendu et qui, jetant un grand cri de surprise et de joie, s’écria en parlant à mes autres sœurs : C’est lui ! […] Sa musique se suffisait à elle-même ; il chante pour chanter, Rossini pour émouvoir et pour plaire.

1797. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIe entretien. Vie et œuvres de Pétrarque » pp. 2-79

La frayeur me rendait immobile, je ne savais que devenir ni où aller. » Son amour, ses livres et ses vers suffisaient à sa vie. […] Sa présence seule suffisait pour nous garantir des pièges de l’ennemi et des écueils de ce monde.

1798. (1859) Cours familier de littérature. VII « XXXVIIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (2e partie) » pp. 5-80

La douce intimité dans laquelle il vivait avec le prince et la princesse suffisait à son existence ; lui-même paraissait nécessaire à leur bonheur. […] On le regarde, on l’admire ; il suffit.

1799. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Il avait l’instinct politique si honnête et si sûr qu’il n’avait pas besoin de penser, il lui suffisait de sentir. […] — Quand vous n’auriez que le temps de m’écrire : Je me porte bien et je vous aime, cela me suffirait.

1800. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

« — À votre place, ajouta cet ami, je n’hésiterais pas à mettre Honoré dans quelque administration où, avec votre protection, il arriverait promptement à se suffire. […] « Elle l’installa donc, avant notre départ de Paris, dans une mansarde qu’il choisit près de la bibliothèque de l’Arsenal, la seule qu’il ne connût pas et où il se proposait d’aller travailler ; elle meubla strictement sa chambre d’un lit, d’une table et de quelques chaises, et la pension qu’elle lui alloua pour y vivre n’eût certainement pas suffi à ses besoins les plus rigoureux, si notre mère n’eût pas laissé à Paris une vieille femme, attachée depuis vingt ans au service de la famille, qu’elle chargea de veiller sur lui.

1801. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

Mais il suffisait à l’ambassadeur de France de voir que le Pontife résistait pour inculper résolument son ministre. […] « Peu de paroles suffiront relativement à ce sujet, c’est-à-dire à l’opinion en partie personnelle et en partie inspirée que l’Empereur nourrissait sur mon compte.

1802. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXIXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (1re partie) » pp. 241-314

Sa pension modique suffisait à son honorable état de maison. […] « — La lecture seule d’Egmont, dis-je, suffit pour savoir ce que vous pensez.

1803. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre troisième »

C’est l’heureux privilège de l’histoire naturelle que ses principales vérités soient à la portée de tous, et que la langue littéraire suffise à les exprimer. […] Ce n’est pas non plus une médiocre erreur de Fleury d’avoir cru que, pour goûter l’éloquence de Démosthène et de Cicéron, les traductions suffisent.

1804. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Qu’il nous ait par moments jugés par prévention plutôt que sur pièces, je ne le nie pas ; mais là même il ne cesse pas d’être vrai ; et, pour le trouver vrai, il suffit qu’en méditant avec candeur sur les plus sévères de ses maximes, nous ne nous sentions pas incapables de toutes les fautes dont nous sommes innocents. […] Suffisait-il que Vauvenargues vécût quelques années de plus, pour que le dix-huitième siècle, ce temps des liaisons intéressées, et fragiles, où les amis ressemblent à des partisans enrôlés sous un chef, vît un exemple nouveau de ces amitiés littéraires dont la gloire aimable s’ajoute à toutes celles qui ont valu au dix-septième siècle son nom de grand ?

1805. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre premier. Causes physiologiques et psychologiques du plaisir et de la douleur »

., — est sans doute, sur le moment même, une perte de force motrice ; mais d’abord, nous venons de voir que, dans l’organisme suffisamment nourri, il y a réparation du nerf par la nourriture à mesure qu’il s’use par l’exercice ; le simple repos suffît aussi à le réparer : il n’y a donc point ici perte sèche et définitive. […] Toute sensation est comme un tressaillement qui contient en germe le plaisir ou la douleur, et il suffît d’augmenter l’intensité de cet élément agréable ou pénible pour le rendre évident à la conscience réfléchie.

1806. (1885) La légende de Victor Hugo pp. 1-58

Si le poète avait, sans ambages et détours exposé le véritable motif de sa conduite royaliste, il aurait rendu à la poésie française un service plus réel qu’en écrivant Hernani, Ruy Blas et surtout la préface de Cromwell : il aurait doté la France de plusieurs Hugo, bien qu’un seul suffise et au-delà à la gloire d’un siècle. […] Ses talents d’étalagiste littéraire n’eurent pas suffi pour lui assurer cette admiration de confiance, si universelle ; ses actes, plus encore que ses écrits, lui valurent la haute estime de la bourgeoisie.

1807. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Cela ne suffit pas ; il y faudra encore la tutelle au moins décennale d’une puissance armée, désintéressée de territoire et médiatrice. […] Il suffit qu’un sentiment souffle dans les âmes pour que tout y résonne !

1808. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

VI Qu’il nous suffise de savoir qu’Alighieri, qu’on nommait déjà familièrement Dante, servit dans la cavalerie florentine contre les Guelfes de la petite ville toscane d’Arezzo, et qu’il se montra vaillant soldat avant de se montrer politique et poète ; bien différent en cela d’Horace, jetant son bouclier à Philippes, et de Virgile, fuyant, un chalumeau à la main, sous les hêtres, pendant que la guerre civile déchire sa patrie. […] Il nous suffit d’avoir donné au lecteur, qui voudra lire les trois poèmes tout entiers, la clef de ces interprétations retrouvées et présentées par un judicieux et savant esprit.

1809. (1884) Articles. Revue des deux mondes

Sans cela, ni la liberté ni l’instruction, fût-elle gratuite et obligatoire, ne peuvent suffire. […] Quelques accidens survenus dans le cours du développement embryogénique suffiraient donc à rendre compte de la variété des espèces.

1810. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

Quant à Massillon, pour couper court à une question qui n’en saurait être une, et à une justification à laquelle il ne faut point descendre, il suffit avec lui de redire : « Un prêtre corrompu ne l’est jamais à demi », et de passer, sans plus tarder, aux admirables fruits qu’il ne cessa de tirer de son talent et de son cœur, aux chefs-d’œuvre de son second moment : ce sont là les réfutations victorieuses et souveraines.

1811. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Il comprit à première vue qu’il n’y avait que la prose qui pût suffire à embrasser ainsi et à porter à l’aise tous ces événements, et, malgré la facilité tout ovidienne qu’il avait à rimer, il se garda bien d’imiter Philippe Mouskes, l’évêque de Tournai, et d’aller emprisonner sa Chronique dans des rimes.

1812. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — II. (Fin.) » pp. 36-54

Si quelque chose pouvait être nécessaire pour convaincre de la profonde sincérité chrétienne de Fénelon et de sa haute rectitude morale, cette correspondance avec le duc de Bourgogne ou à son sujet suffirait à en donner la preuve ; car, au point de vue humain et à celui de la Cour, il n’est rien de plus vif, de plus désobligeant, de plus blessant même ni de plus âpre en fait de vérité : il n’y a rien là qui tende à ménager et à prolonger le crédit par aucune flatterie ni louange.

1813. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Dans son Histoire, d’Aubigné affecte de ne vouloir qu’exposer et raconter, et de ne point porter de jugements ; il s’impose la loi de ne donner louange ni blâme : il lui suffit de faire parler les choses.

1814. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Un double résultat assez évident nous suffit : les intentions, les talents, les lumières que Ramond et quelques-uns de ses amis apportaient à l’Assemblée législative ne sont pas moins certains que ne l’est également leur impuissance.

1815. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — II » pp. 18-35

Il suffirait de rapprocher et de marquer à l’encre rouge sur un exemplaire les faits éloignés ; cette série seule, établie par de simples nouvelles de Dangeau, et sans y mêler aucune réflexion étrangère, deviendrait presque, par les considérations qui en ressortiraient en la lisant, un chapitre de Montesquieu.

1816. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — II » pp. 254-269

Chanet ne se laisse point envelopper dans ce dilemme : il observe et trace les limites, les distinctions spécifiques entre l’homme et les bêtes, et qui lui paraissent suffire pour motiver la différence des destinées.

1817. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Henri, à cette distance et séparé de ce qu’il aimait, n’était pas homme à être longtemps ni exactement fidèle ; il pouvait l’être de cœur et de pensée, mais cela ne suffisait pas à la comtesse, qui d’ailleurs était défiante, comme n’étant plus de la première jeunesse : elle avait un fils déjà grand qui servait près de Henri.

1818. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Voiture suffisait à tout, mais il n’allait pas au-delà et pensait guère à nous autres gens du lendemain, ni à la postérité.

1819. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric-le-Grand Correspondance avec le prince Henri — I » pp. 356-374

Un peu d’application et d’étude suffit pourtant bientôt pour dissiper ou pour réduire la plupart de ces fausses vues et de ces objections exagérées à distance : à le considérer de près, dans ses actes et dans ses Œuvres, on reconnaît qu’avec ses défauts et ses taches Frédéric est de la race des plus grands hommes, héroïque par le caractère, par la volonté, supérieur au sort, infatigable de travail, donnant à chaque chose sa proportion, ferme, pratique, sensé, ardent jusqu’à sa dernière heure, et sachant entremêler à son soin jaloux pour les intérêts de l’État un véritable et très sincère esprit de philosophie, des intervalles charmants de conversation, de culture grave et d’humanité ornée.

1820. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Ses ironies, celles même de son frère, étaient trop voisines ; et, le poète eut-il été plus sublime ou plus grave, elles eussent suffi pour déconcerter son désir et pour déranger l’idéal du monument.

1821. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Ainsi pour Charles Bovary vers la fin : le sculpteur n’avait qu’à vouloir, il suffisait d’un léger coup de pouce à la pâte qu’il pétrissait pour faire aussitôt d’une tête vulgaire une noble et attendrissante figure.

1822. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

Une seule ici suffira.

1823. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Je vous soumettrai mon raisonnement à cet égard : qu’il vous suffise aujourd’hui de savoir que mes nouvelles sont honnêtes, et que je crains que le calcul et l’honnêteté leur nuisent et même m’en dégoûtent. »   Lui-même il nous signale l’écueil de ses chansons trop travaillées ; et à cette époque, en effet, il était à bout de voie pour les chansons de sa première manière ; car le sentiment patriotique et antibourbonien était encore loin : il possédait, il est vrai, l’instrument complet, mais du moment qu’il s’interdisait la gaillardise, le motif était rare et faisait défaut.

1824. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Et le 7 septembre 1811 il écrivait encore, et de Coppet même : « Il n’arrive jamais à Mme de Staël de se mettre à la place des autres, et tout son esprit ne lui suffit pas pour comprendre ce qui n’est pas elle ; et puis, si l’on voulait bien entendre les riches, il n’y aurait de malheur que pour eux.

1825. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

Il suffît d’ouvrir le livre admirable où elle apprécie d’un jugement si ferme les principaux événements de la Révolution française, pour être pleinement édifié sur le peu de foi qu’elle accordait au libéralisme de celui, etc., etc. » Mais, Madame, il ne s’agit pas, encore une fois, du livre de Mme de Staël rédigé plus tard et d’après une impression totale et résumée où l’on supprime et l’on abolit tout ce qui a pu s’en écarter un moment ; il s’agit de lettres écrites dans les cinq premières semaines des Cent-Jours, sous le coup des événements les plus menaçants, de conseils d’amis sans doute très pressants, et sous l’inspiration aussi d’un sentiment national honorable, dont la suggestion a pu être plus forte que les règles et les principes.

1826. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

La description de Vallot est très bonne ; le traitement n’est bon qu’à demi (je ne parle que d’après de plus autorisés que moi) ; on saigne beaucoup trop le malade ; mais, somme toute, les purgations aidées des vésicatoires, un vomi-purgatif surtout donné à propos en dernier lieu, réussissent et suffisent pour le guérir, malgré les saignées et nonobstant l’omission des anti-périodiques.

1827. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Lettres inédites de Jean Racine et de Louis Racine, (précédées de Notices) » pp. 56-75

Par exemple, en terminant une Histoire de Port-Royal où le grand Racine aurait rempli toute la place qu’il doit tenir, et où l’on aurait montré l’esprit religieux de cette sainte maison s’exprimant par sa bouche avec un caractère unique de tendresse, de mélodie et de grandeur, dans l’œuvre d’Athalie et surtout dans celle d’Esther on ajouterait quelque chose comme ceci : « Il est un autre Racine que l’on aurait aimé à y joindre, ce Racine fils qui n’a pas été tout à fait sans doute le poète tendre, plaintif, l’élégiaque chrétien, le Cowper janséniste qu’on aurait souhaité à Port-Royal expiré, mais qui en a eu quelques accents ; ce Racine fils qui offre le modèle de la manière la plus honorable de porter un nom illustre quand on est engagé dans la même carrière ; car si le crime d’une mère est un pesant fardeau, la gloire d’un père n’en est pas un moins grand, et Racine fils n’a cessé de le sentir en même temps qu’il a suffi dignement encore à ce rôle difficile.

1828. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Connaissait-on mieux la nature humaine au XVIIe siècle après la Fronde qu’au XVIIIe avant et après 89 ? »

Moins de dix ans avaient suffi pour opérer cette métamorphose.

1829. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Mémoire de Foucault. Intendant sous Louis XIV »

Le roi l’en loue ; puis on en vient au premier détail du plan proposé pour, faciliter les conversions : « Je lui montrai, dit Foucault, la carte que j’avais fait faire du Béarn, avec la situation des villes et des bourgs où il y avait des temples ; je lui fis voir qu’il y en avait, un trop grand nombre et qu’ils étaient trop proches les uns des autres, qu’il suffirait d’en laisser cinq, et j’affectai de ne laisser subsister que les temples, justement au nombre de cinq, dans lesquels les ministres étaient tombés dans des contraventions qui emportaient la peine de la démolition du temple, dont la connaissance était renvoyée au Parlement, en sorte que, par ce moyen, il ne devait plus rester de temples en Béarn.

1830. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. Suite et fin. » pp. 73-95

Or, cela me suffit pour ne pas me déclarer satisfait, même au point de vue archéologique, du système suivi par l’auteur et de toutes ces éruditions rapportées qu’il a mises en œuvre.

1831. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vie de Jésus, par M. Ernest Renan »

Renan savent qu’il est de force à faire face à la situation et à y suffire.

1832. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

oui, il suffit de vivre et de continuer d’aller pour que peu à peu ces premières tristesses s’abattent, pour que tôt ou tard ces grands orages s’apaisent.

1833. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise par M. Taine. »

Lamennais, le fougueux, le personnel, l’obstiné, celui qui croyait que la volonté de l’individu suffît à tout, ne pouvait s’empêcher à certain jour d’écrire : « Plus je vais, plus je m’émerveille de voir à quel point les opinions qui ont en nous les plus profondes racines dépendent du temps où nous avons vécu, de la société où nous sommes nés, et de mille circonstances également passagères.

1834. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. »

Ayant pris sur lui d’ordonner le combat, il n’avait pas tardé à comprendre à son tour qu’à la guerre le patriotisme ne suffit pas à tout, et qu’il y a parfois nécessité de se contenir ou de reculer.

1835. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Legkzinska »

Une sage reine n’y suffisait pas ; il aurait fallu quelque fée.

1836. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Méditations sur l’essence de la religion chrétienne, par M. Guizot. »

Sa pensée va plus loin, mais il ne s’y livre point avec trop de promptitude, il ne s’y obstine pas : il sait que rien n’est sûr, qu’indépendamment de la rareté de ces débris qui peuvent sembler les témoins d’un des états du monde disparus, sa pensée à lui-même est un instrument bien imparfait, qu’il lui suffirait d’un sens de plus ou de moins, ou du moindre degré changé dans la perspicacité de l’un des cinq sens, pour que tout lui parût sous un jour tout autre.

1837. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « La Réforme sociale en France déduite de l’observation comparée des peuples européens. par M. Le Play, conseiller d’État. (Suite et fin.) »

Bourges est le centre du royaume, partie de la France si rançonnée, si opprimée, qu’on s’y croirait dans les déserts de l’Amérique : là, le roi peut fonder un nouvel État ; il n’y sera pas gêné par les intérêts de la petite culture, ni même par ceux de la grande, le pays étant à peu près inculte à trente et quarante lieues de distance. » L’Escurial avec sa tristesse et son désert suffirait à peine à M. 

1838. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Affaires de Rome »

J’ouvre les Mélanges de 1825 : « On ne lit plus,… on n’en a plus le temps… Cette accélération de mouvement qui ne permet de rien enchaîner, de rien méditer, suffirait seule pour affaiblir et, à la longue, pour détruire entièrement la raison humaine. » Et en tête du livre de la Religion considérée dans ses rapports, etc. (1826) : « On ne lit plus aujourd’hui les longs ouvrages ; ils fatiguent, ils ennuient ; l’esprit humain est las de lui-même, et le loisir manque aussi… Dans le mouvement rapide qui emporte le monde, on n’écoute qu’en marchant… » On peut observer en règle générale que, de même que les livres de M. de La Mennais commencent tous par une parole empressée sur la vitesse des choses et la hâte qu’il faut y mettre, ils finissent tous également par une espèce de prophétie absolue.

1839. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DIX ANS APRÈS EN LITTÉRATURE. » pp. 472-494

Un retour, ne fût-il qu’assez rare de la part d’un chacun, s’il est réel et suivi, peut suffire à renouer le lien et à maintenir les lignes.

1840. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Mérimée n’a rien à dissimuler ; son esprit des mieux faits et sa plume des plus sûres restent libres ; il lui suffit d’observer, dans ses travaux d’érudit, la ligne sévère qui est de son goût et du bon goût propre au genre même.

1841. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « La Fontaine »

Qu’il me suffise de faire remarquer qu’il y entre une proportion assez grande de fadeurs galantes et de faux goût pastoral, que nous blâmerions dans Saint-Évremond et Voiture, mais que nous aimons ici.

1842. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Seconde partie. De l’état actuel des lumières en France, et de leurs progrès futurs — Chapitre VI. De la philosophie » pp. 513-542

. — On pourrait prolonger ces exemples ; mais comme la véritable difficulté de cette idée n’est pas de la concevoir abstraitement, mais de l’appliquer avec précision, il suffit de l’indiquer.

1843. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

Mais la pièce est surtout négative et destructive ; il suffisait de ne plus vouloir du présent, pour en être transporté : et qui donc alors voulait du présent ?

1844. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre II. L’éloquence politique »

… » Et voici des clichés : « Vous rentrerez alors dans vos foyers et vos concitoyens diront en vous montrant : il était de l’armée d’Italie. » — « Il vous suffira de dire : j’étais à la bataille d’Austerlitz, pour que l’on réponde : Voilà un brave. » — « Vous pourrez dire avec orgueil : Et moi aussi je faisais partie de cette grande armée, qui », etc.

1845. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre VI. Science, histoire, mémoires »

Cet acte suffit à une vie.

1846. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

xx. ) Mais cela même ne suffit pas à me consoler.

1847. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Peu importe, il nous suffit qu’il soit fini.

1848. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Stéphane Mallarmé » pp. 146-168

Il suffirait à sa gloire d’en avoir été le prétexte et si, comme le prétendent certains, il y eut chez le poète une intention mystificatrice, il faut reconnaître qu’elle fut déjouée par le caprice du hasard.

1849. (1890) L’avenir de la science « V »

Ce que me donne la science ne me suffit pas, j’ai faim encore.

1850. (1890) L’avenir de la science « XVI »

Quoi qu’il en soit, il aura suffi, pour sa gloire, d’esquisser une face de l’humanité.

1851. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Et le fantôme, branlant la tête, déclara : — Non, Léthé, toutes tes eaux ne suffiraient point à me faire oublier cette nuit désastreuse, cette nuit effroyable où, pendant que dormaient paisibles mes camarades d’École… Mais le démiurge ordonna sévèrement : — Tais-toi.

1852. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires de Philippe de Commynes, nouvelle édition publiée par Mlle Dupont. (3 vol. in-8º.) » pp. 241-259

Il n’avait pas eu plus d’éducation que M. de La Rochefoucauld, pas d’autre que celle des hommes et des choses ; aux esprits bien faits c’est la meilleure, et elle suffit.

1853. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Pour s’en guérir, il devrait suffire de relire dans les anciens éloges ces parties si applaudies autrefois : ce sont celles qui font tache aujourd’hui. — Mlle Mars disait un mot d’un grand sens, et qui a son application dans plus d’un art : « Comme nous jouerions mieux la comédie, si nous ne tenions pas tant à être applaudis ! 

1854. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Le Palais Mazarin, par M. le comte de Laborde, de l’Institut. » pp. 247-265

Ne suffit-il pas qu’on reconnaisse leurs mérites et qu’on soit juste envers leur mémoire ?

1855. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. de Lamartine. (Les deux premiers volumes. — Pagnerre.) » pp. 389-408

Pour que l’un et l’autre portraits fussent vrais et réellement ressemblants, on pourrait sans doute en garder bien des traits, et il suffirait presque toujours de réduire ; mais c’est cette réduction précisément dont M. de Lamartine s’est bien gardé, et qui est contraire à sa présente manière, dont le procédé est de tout amplifier, de tout pousser à l’excès et à l’effet.

1856. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

Il avait eu, en plaidant, de la sobriété et du goût, au moins ce goût relatif qui suffit aux contemporains.

1857. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Portalis. Discours et rapports sur le Code civil, — sur le Concordat de 1801, — publiés par son petit-fils — I. » pp. 441-459

Ne pouvant le suivre dans la diversité des questions qu’il traita, je ne le prendrai que dans deux ou trois sujets et discours, qui me suffiront pour le caractériser.

1858. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « De la retraite de MM. Villemain et Cousin. » pp. 146-164

Il ne suffit pas, en effet, à la libre littérature, qu’on lui accorde une grande place et même du silence : elle a plus besoin encore d’attention et d’intérêt que de silence ; elle s’accommode plus d’un amphithéâtre que d’une plaine trop vaste.

1859. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Un chevalier bel esprit y fait solennellement appel au bon sens du siècle à venir et à la postérité ; le comédien répond humblement : « Quelque succès qu’ait notre pièce, nous n’espérons pas, monsieur, qu’elle passe aux siècles futurs ; il nous suffit qu’elle plaise présentement à quantité de gens d’esprit, et que la peine de nos acteurs ne soit pas infructueuse. » Et encore, à toutes les minauderies et aux scrupules grimaciers d’une comtesse très équivoque, M. 

1860. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — III. Franklin à Passy. (Fin.) » pp. 167-185

Le bruit de chaque voiture qui entre dans ma cour suffit maintenant pour m’effrayer.

1861. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Les Faux Démétrius. Épisode de l’histoire de Russie, par M. Mérimée » pp. 371-388

Lucien, qui se moque de ces historiens prétendus poétiques, qui ont, au début, des invocations pleines d’emphase, Lucien, qui veut de la simplicité dans l’histoire, admet pourtant que le style y participe, en certaines occasions, de la poésie : « Il faut alors qu’un petit vent poétique enfle les voiles du navire, et le tienne élevé sur le sommet des flots. » Il ne veut point que la diction s’élève trop, il suffit que la pensée soit un peu plus haut que l’expression, celle-ci à pied et tenant de la main, comme en courant, l’autre qui est montée et qui devance.

1862. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

En outre, il ne suffit pas d’établir qu’un certain nombre d’hommes supérieurs ont eu des bizarreries.

1863. (1912) Le vers libre pp. 5-41

Nous avons souvent rimé par des mots consonants semblablement mais à voyelles finales différentes : « Jules Romains tendrait à codifier qu’il faut mettre à la place de la rime un rapport de sonorité plus inédit, plus frais, plus approprié aux circonstances métriques. » C’est dire, en somme, qu’il suffit de suggérer la rime pour qu’elle existe, et cela est vrai ; les poèmes libres en offrent de nombreux exemples.

1864. (1912) L’art de lire « Chapitre III. Les livres de sentiment »

Chacun de nous se suffirait presque pour peindre tous les vices et aussi toutes les vertus, s’il savait peindre ; pour reconnaître, du moins, la vérité de toutes les peintures de toutes les vertus et de tous les vices.

1865. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Philarète Chasles » pp. 111-136

Comme ce titre pouvait s’appliquer à tous les ouvrages de l’auteur, qui n’a fait que voyager à travers les livres toute sa vie, et qui, même, sans les livres d’autrui, n’en aurait pas probablement écrit un seul, il s’est cru obligé, pour être clair et précis, de donner un sous-titre à son titre, et il a appelé son livre L’Angleterre politique, — ce qui aurait parfaitement suffi, puisqu’il ne s’agit dans ce volume que de l’Angleterre et de quelques écrivains anglais.

1866. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Vaniteuse qui prend les rages de la vanité pour les fiertés de l’ambition, cette princesse des Ursins manquée, ratée avant d’avoir agi, qui ne voudrait pas du pouvoir, cette mâle chose qui se suffit à elle-même, s’il n’était pas extérieur et voyant comme une de ses toilettes, n’est, en somme, rien de plus qu’une cocotte, soufflée, comme un éléphant de baudruche, jusqu’à des proportions gigantesques, mais qui ne l’empêchent pas d’être une cocotte, cette variété de courtisane moderne, indigne même de ce nom de courtisane déshonoré dans d’autres siècles mais relevé en celui-ci, tant tout est tombé bas, même dans l’infamie !

1867. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

Mais cette longue histoire, qui est sa vie et qui, s’il l’avait voulu, eût été sa gloire, ne suffit pas à la pétulance de ses facultés, et de temps à autre il l’interrompt par toutes sortes de publications inattendues.

1868. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Il faut souvent peu de choses à la distraction de ce badaud qui est Paris : une voiture renversée ou une femme qu’on éclabousse suffisent à le mettre en joie. […] La politique ne suffit pas à Maginard, car il comprend qu’il faut mettre entre le ministre et lui un lien plus fort, moins facile à rompre et qui, rompu, laisse des traces bonnes à montrer plus tard. […] C’est qu’avec des qualités rares et brillantes qui suffisent à la contemporanéité qui les acclame, ils ne possédaient pas les dons supérieurs qui font les œuvres fortes et durables : le sens de la vie et l’amour de la nature. […] Maurice Maeterlinck, cela suffirait à arrête ma plume. […] Pour y être un maître incontesté et glorieux, il suffit de répéter à satiété des opinions fixement établies par une sorte de système anthropométrique et dont sont atteints, à leurs débuts, certains littérateurs, sans que l’on puisse considérer ce qu’un écrivain doit avoir fait de progrès, et s’il s’est engagé dans des routes nouvelles.

1869. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Un tel combat suffirait pour perpétuer la gloire de ce nom. […] Il suffit qu’ils fassent partager aux spectateurs le mouvement qui les a inspirés, pour obtenir et mériter des succès. […] Le plus simple bon sens suffit pour s’apercevoir que cette route n’est ni la plus noble, ni la plus certaine. […] La volonté du plus grand nombre souvent ne suffit pas pour le rompre ; le souverain, armé des forces qu’on lui a confiées, la peut tenir longtemps oisive et presque muette. […] Je crains de ne pas suffire au noble devoir qui me prescrit de rendre à sa mémoire un solennel hommage.

1870. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Mémoires du général La Fayette (1838.) »

Des sentiments si peu patriotiques sont bien loin de mon cœur. » Mais il ne lui suffit pas que ces sentiments soient loin de son cœur ; il ne saurait souffrir qu’on les lui pût attribuer. […] Il est vrai que Washington, grand homme qui paraît avoir été de nature à pouvoir suffire à toutes les situations, n’a eu à opérer que chez des nations encore simples, au sein d’une société en quelque sorte élémentaire. […]  —  Elle m’a souvent exprimé, dans le cours de son délire, la pensée qu’elle irait au ciel ; et oserai-je ajouter que cette idée ne suffisait pas pour prendre son parti de me quitter ?

1871. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

On peut de la sorte atteindre avec certitude les principales formes d’un esprit ou d’un caractère, ce qui doit suffire ; à moins d’information toute particulière et imprévue, le reste est raffinement de curiosité et témérité.

1872. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — II. (Fin.) » pp. 213-233

Mézeray, en favorisant cette demi-réforme, ne croit pas innover ; en religion comme en politique, il paraît croire qu’il suffit de revenir à une époque antérieure où régnait une sorte de constitution religieuse, monarchique et suffisamment populaire ; on l’eût embarrassé sans doute en le pressant de définir cette période idéale de notre histoire ou les abus avaient cessé moyennant la Pragmatique et la tenue régulière des États généraux.

1873. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

Pour suffire à tout il met ses terres en gage ; il a avec lui neuf chevaliers et sept cents soldats.

1874. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

» — Moins de deux ans avaient donc suffi pour user et mettre à jour ce grand sentiment.

1875. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — II » pp. 159-177

Il vint un moment, je l’ai dit déjà, où Cowper sentit que de faire des cages, des serres ou des dessins ne lui suffisait plus : il se remit à la poésie, et à une poésie qui naissait de sa vie même et des circonstances qui l’environnaient.

1876. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — I » pp. 395-413

Les opéras, les chanteurs et cantatrices, qui sont un de ses plaisirs, ne lui suffisent pas : elle a besoin de conversation ; il y a des vides et des silences autour d’elle : « Nos entretiens me semblent comme la musique chinoise, ou il y a de longues pauses qui finissent par des tons discordants. » Cette conversation qui lui manque de près, elle la cherche au loin, et elle trouve heureusement dans son frère un correspondant qui a du temps pour tout.

1877. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — I » pp. 249-267

Taine a choisi le fabuliste pour sujet de sa thèse française ; mais, depuis quelques années, les brillants candidats au grade de docteur nous ont habitués, le lendemain matin de leur réception, à lire des livres plutôt que des thèses proprement dites : il a suffi pour cela que le brocheur enlevât la page finale où se lisait le visa de M. le doyen.

1878. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Ces mots, ajouta-t-il en devenant presque furibond ; marchant à grands pas, ces mots le rendent digne du feu, et les cinquante mille bûches de l’Inquisition ne suffiraient pas pour le rôtir ! 

1879. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Charles-Quint après son abdication, au monastère de Saint-Just »

L’inusité de semblables obsèques, une inexactitude de date qu’il suffit de corriger en avançant la scène d’un ou de deux jours pour rendre tout possible, le silence gardé par les secrétaires et les amis politiques de Charles-Quint, qui rougissaient peut-être en secret d’une semblable bizarrerie de leur maître, sont-ce des raisons suffisantes pour faire rejeter un récit qui est confirmé par celui de deux autres moines hiéronymites ?

1880. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Leur tableau chef-d’œuvre, et qui suffirait à consacrer leur nom, est celui de la Forge qu’on voit au Louvre.

1881. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Les quatre moments religieux au XIXe siècle, (suite et fin.) »

Etait-il possible en 1801, comme l’abbé de Pradt l’expose, comme Napoléon lui-même semble depuis l’avoir reconnu, d’adopter un autre mode que celui du Concordat, une manière moins solennelle, moins éclatante, mais plus neuve, plus hardie dans sa simplicité, rentrant moins dans les anciennes ornières, constituant « une liberté protectrice et non directrice », et qui aurait suffi à donner pleine satisfaction alors à la religion et à la majeure partie de la société, sans être grosse des périls et des conflits qui succédèrent ?

1882. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Il s’est fait une règle fort sage, de ne jamais critiquer ni discuter les opinions des commentateurs qui l’ont précédé ; cela irait trop loin : « Lorsqu’ils commettent des erreurs, dit-il, il suffît de les passer sous silence : lorsqu’ils ont bien exprimé une réflexion juste, nous nous en emparons.

1883. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

Le triste n’est pas vrai, car il suffit de le nier.

1884. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Une pensée, et non pas une pensée affichée, mais une pensée infuse et sous-entendue, se mêle à ces dessins qui déjà se suffiraient à eux seuls par leur caractère de vérité.

1885. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

La langue ne gardera ou n’adoptera pas tous les termes d’art qu’il y a versés journellement ; mais il suffit pour son honneur qu’il en ait introduit un bon nombre et qu’il ait rendu impossibles après lui les descriptions vagues et ternes dont on se contentait auparavant.

1886. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

Il suffit, pour se sentir à l’aise en parlant de lui, de l’avoir rencontré souvent, de l’avoir trouvé si impartial envers les personnes, si oublieux de toute injure, si étranger à toute rancune, si oublieux des choses seules et des questions importantes, de celles du jour, de celles de demain, un esprit sincèrement, obstinément voué à la prédication des idées qu’il croit justes et utiles.

1887. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Le mariage du duc Pompée : par M. le comte d’Alton-Shée »

J’ignore si la pièce qui m’a fait plaisir est susceptible d’être représentée à la scène ; je suis très-peu juge de la différence qui existe entre un drame fait pour rester écrit et un drame jouable ; un spectacle dans un fauteuil me suffît très-bien, à défaut d’autre : je m’attacherai donc ici simplement à un ouvrage d’esprit qui porte avec lui son caractère de distinction aisée et qui a un cachet moderne.

1888. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

La parodie du Moyen-Age date de loin et remonte bien plus haut ; son livre, à lui, fut comme la cavalerie qui arrive tout à la fin de la bataille et qui donne à propos : une ou deux charges suffisent pour mettre en pleine déroute ce qui ne tenait déjà plus.

1889. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

« Je suis un peu embarrassée », dit Mme Roland lorsqu’elle en vient à cette histoire, « de ce que j’ai à raconter ici ; car je veux que mon écrit soit chaste, puisque ma personne n’a pas cessé de l’être, et pourtant ce que je dois dire ne l’est pas trop. » Et en finissant ce récit, de tout point fort circonstancié, elle ajoute : « L’impression de ce qui s’était passé demeura si forte chez moi que, même dans l’âge des lumières et de la raison, je ne me le rappelais qu’avec peine ; que je n’en ai jamais ouvert la bouche à une intime amie qui eut toute ma confiance ; que je l’ai constamment tu à mon mari, à qui je ne cèle pas grand’chose, et qu’il m’a fallu faire dans ce moment même autant d’efforts pour l’écrire que Rousseau en fit pour consigner l’histoire de son ruban volé, avec laquelle la mienne n’a pourtant pas de comparaison. » Je sais bien d’autres histoires des Confessions avec lesquelles celle-ci a plus de ressemblance qu’avec le ruban volé, et ce sont les plus laides ; il suffit, je ne les indiquerai pas avec plus de précision.

1890. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

On aura beau dire, rien ne sera exagéré, et au contraire tout sera au-dessous de ce que nous avons vu et éprouvé. » Elle écrivait encore au comte de Mercy dans le même temps : « Vous n’avez pas besoin de me dire votre douleur, et je n’exprimerai pas ce que je sens ; il me suffit d’être sûre que vous avez apprécié tout ce que j’éprouve.

1891. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Il suffit pour cela de rafraîchir la défense, de la mieux revêtir, en raison des récents et plus puissants moyens d’attaque, et de l’étayer en partie sur de nouveaux fondements, en partie sur les anciens, là où ils ont droit de subsister.

1892. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Jeunes, la poésie nous ravit ; les Étoiles de Lamartine, ces fleurs du ciel dont le lis est jaloux , suffisent à peine à symboliser nos imaginations, nos visions d’amour et de tendresse : à l’âge où le sang se refroidit dans les veines, il est doux, d’une douceur sévère, de connaître par leurs noms, d’épeler quelques-uns des astres qui roulent sur nos têtes, de distinguer ceux qui errent véritablement de ceux qui sont fixes par rapport à nous, de s’orienter, de se démêler à travers les cercles brillants ou les traînées lumineuses, de soupçonner dans ces abîmes d’en haut, dans ces profondeurs étincelantes où nous sommes plongés, tout ce qui peut se produire à l’infini d’étranger à nous, de différent de nous ; de ramener nos passions, nos désirs, nos gloires à ce qu’elles sont, de se dire le peu qu’on est, mais de sentir aussi que ce peu a réfléchi un moment, la puissance créatrice universelle, éternelle, — l’infini presque ou du moins l’incommensurable et l’immense24.

1893. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

Ce trait seul suffirait pour juger à quel point la confiance du prince fut mal servie dans cette occasion par ceux qu’il en avait honorés. » Il était donc curieux ou plutôt actif ; il voulait moins s’instruire que se distraire et s’amuser.

1894. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « JASMIN. » pp. 64-86

C’est une biographie poétique, composée, distribuée avec art en petits tableaux, mais d’une réalité approchante qui va nous suffire.

1895. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « CHRISTEL » pp. 515-533

Christel n’apprit ces détails que successivement, et sans rien faire pour s’en enquérir ; mais, quoique sa mère et elle ne reçussent habituellement aucune personne du lieu, les simples propos des voisines, la plupart du temps en émoi si l’on voyait le jeune homme arriver au galop du bout de la place, puis mettre son cheval au pas en approchant, auraient suffi pour instruire.

1896. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre troisième. Les sensations — Chapitre premier. Les sensations totales de l’ouïe et leurs éléments » pp. 165-188

Nous saisissons ici la sensation élémentaire dont les combinaisons différentes suffisent à expliquer toutes les sensations du son.

1897. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

Tacite (1re partie) I L’histoire est de tous les genres de littérature celui qui supporte le plus la médiocrité de l’écrivain, d’abord parce que l’intérêt y est dans le fait plus encore que dans le style : le fait ou le récit se suffit, pour ainsi dire, à lui-même.

1898. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre IV. L’Histoire »

L’abstraction systématique des doctrinaires ne suffisait pas ici.

1899. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Il suffit qu’il tienne la curiosité en éveil sur de grands problèmes, qu’il entretienne des doutes, des inquiétudes, des désirs.

1900. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Le père Monsabré »

» Voilà qui va bien, et cela suffit.

1901. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

Il suffit de dire que la psychologie n’est pas toute la vérité.

1902. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XI. L’antinomie sociologique » pp. 223-252

Il lui suffit d’avoir un certain nombre d’hommes ; peu lui importe lesquels.

1903. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Sa mère, de famille dijonnaise, fille d’un greffier au parlement de Bourgogne, était de ces personnes fortes et simples qui suffisent à tous les devoirs.

1904. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Pour moi, je crois que, du moment qu’elle y regarde, il lui suffit d’un seul regard et d’une seule mesure pour tous.

1905. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le Livre des rois, par le poète persan Firdousi, publié et traduit par M. Jules Mohl. (3 vol. in-folio.) » pp. 332-350

On porta les présents du sultan chez la fille de Ferdousi, qui, d’un cœur digne de son père, les refusa en disant : « J’ai ce qui suffit à mes besoins, et ne désire point ces richesses. » Mais le poète avait une sœur qui se rappela le désir que celui-ci avait nourri dès l’enfance de bâtir un jour, en pierre, la digue de la rivière de Thous, pour laisser dans un bienfait public le souvenir de sa vie.

1906. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « M. de Féletz, et de la critique littéraire sous l’Empire. » pp. 371-391

Pour bien connaître un critique, pour se retracer au vrai sa physionomie et sa personne, il ne suffit pas de lire ses écrits.

1907. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Elle avait pourtant un ami vrai, Formont ; un ami d’habitude, le président Hénault, et assez de liaisons du monde pour combler une autre existence moins exigeante ; mais le tout ensemble ne suffisait au plus qu’à distraire la sienne.

1908. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Pour le prouver, il suffirait d’opposer à M. de Chateaubriand lui-même ses propres souvenirs et ses témoignages, qu’il a consignés dans le livre de l’Essai, publié en 1797.

1909. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

Parlant de certaines familiarités et de certaines caresses que fait, selon lui, le Père céleste aux âmes redevenues petites et simples, Fénelon, par exemple, dira : « Il faut être enfant, ô mon Dieu, et jouer sur vos genoux pour les mériter. » Des théologiens ont cherché querelle à ces expressions et à d’autres pareilles, au point de vue de la doctrine ; un bon goût sévère suffirait pour les proscrire.

1910. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. Le Chateaubriand romanesque et amoureux. » pp. 143-162

» Ainsi il prétend, dans son orgueil, qu’en ne donnant rien il en fait plus que les autres ne font en donnant tout, et que ce rien suffit pour tout éclipser à jamais dans un cœur.

1911. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

M. de Balzac avait le corps d’un athlète et le feu d’un artiste épris de la gloire ; il ne lui fallut pas moins pour suffire à sa tâche immense.

1912. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

contre les scélérats, répondit Frédéric, j’ai le bourreau, et c’est bien assez. » Non, ce n’est pas assez ; quand on n’a que le bourreau seul, il ne suffit pas.

1913. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Étienne Pasquier. (L’Interprétation des Institutes de Justinien, ouvrage inédit, 1847. — Œuvres choisies, 1849.) » pp. 249-269

Car, pour l’aimable traducteur Amyot, ce n’est qu’avec un peu de complaisance qu’on s’est accoutumé à l’associer d’ordinaire à ces deux grands auteurs originaux ; et en ce qui est de Calvin, qui contribua certes à former la langue à la discussion, à serrer, à tremper et à raffermir dans le discours la chaîne exacte du raisonnement, ce mérite notable ne suffit pas à l’élever au-dessus des bons écrivains : il n’a point gagné sa place entre les grands.

1914. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Charles Perrault. (Les Contes des fées, édition illustrée.) » pp. 255-274

Pour admirer, il lui suffit qu’il y ait de l’esprit, de l’habileté, de l’éclat, et une appropriation heureuse aux circonstances et à la société du moment.

1915. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Les grâces et l’esprit de cette reine enfant n’y auraient pas suffi sans les directions de ce guide continuel, et qui l’était aussi du jeune roi en bien des choses.

1916. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le duc d’Antin ou le parfait courtisan. » pp. 479-498

Cherchant à rassembler dans sa raison toutes ses forces et tous ses motifs de renoncement, il se dit qu’il n’a guère plus de quarante ans ; qu’il y a moyen, après avoir consacré sa jeunesse au service du roi et de sa patrie, de vivre chez soi en honnête homme ; il se trace le plan d’une vie heureuse et privée : « Avoir du bien honnêtement, n’avoir rien à se reprocher (et, pour cela, commencer par payer toutes ses dettes), avoir mérité d’avoir des amis, et savoir s’amuser des choses simples. » Toutes ces conditions pourtant ne laissent pas d’être difficiles à rencontrer dans le même homme, et il suffit d’une seule qui échappe, ou d’un goût étranger qui se réveille, pour faire tout manquer, et pour corrompre ce tranquille bonheur.

1917. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Elle y avait trouvé, il est vrai, de bien vifs et spirituels auxiliaires ; il suffit de nommer M. 

1918. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — III. (Suite et fin.) » pp. 242-260

Cela peint l’esprit de Paris, où le mépris et l’opinion sont impuissants ; où il suffit d’amuser pour couvrir tout.

1919. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Boileau. » pp. 494-513

Les Montausier, les Huet, les Pellisson, les Scudéry en frémirent ; mais il suffit que Colbert comprît, qu’il distinguât entre tous le judicieux téméraire, qu’il se déridât à le lire et à l’entendre, et qu’au milieu de ses graves labeurs, la seule vue de Despréaux lui inspirât jusqu’à la fin de l’allégresse.

1920. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Son monument à lui, sa restitution de l’histoire romaine selon Salluste, est venu plus d’un siècle trop tard, à la fin d’une époque empressée et rapide à laquelle suffisaient de reste les Considérations de Montesquieu.

1921. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Elle mêle et varie mainte fois tous ces noms de maître, de frère et de roi, qu’elle accumule en lui, et qui ne suffisent qu’à peine à exprimer son affection si pleine et si sincère : « Quoi que ce puisse être, jusques à mettre au vent la cendre de mes os pour vous faire service, rien ne me sera ni étrange, ni difficile, ni pénible, mais consolation, repos et honneur. » Ces expressions, qui seraient exagérées chez d’autres, ne sont que vraies dans la bouche de Marguerite.

1922. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre troisième. Le souvenir. Son rapport à l’appétit et au mouvement. — Chapitre deuxième. La force d’association des idées »

Ajoutons que, cependant, il aurait toujours l’appétition, en l’absence du souvenir ; cela suffirait pour maintenir le mouvement de ses représentations instantanées, étincelles mortes en naissant.

1923. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Aujourd’hui, j’ai reçu un diplôme de Bethléem, qui me nomme membre de la Société, je sais par le timbre qui porte New-York, que c’est en Amérique, et voilà tout… N’y a-t-il pas des Sociétés en Australie, ayant déjà publié sur l’histoire naturelle, des travaux de la plus grande importance… Un jour il sera impossible de connaître seulement les localités scientifiques… Et la mémoire pourra-t-elle suffire… Pensez-vous qu’à l’heure présente, pour ma partie, il y a, par an, huit cents mémoires dans les trois langues, anglaise, allemande, française ! 

1924. (1899) Esthétique de la langue française « Le vers libre  »

Il ne suffit pas d’avoir de bons sentiments, un cœur doux et d’aimer bien sa tendre amie, pour écrire de bons vers libres ; il faut aussi beaucoup de talent et même beaucoup de science.

1925. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre III. L’art et la science »

On étonnerait fort Solon, fils d’Exécestidas, Zenon le Stoïcien, Antipater, Eudoxe, Lysis de Tarente, Cébès, Ménédème, Platon, Épicure, Aristote et Epiménide, si l’on disait à Solon que Ce n’est pas la lune qui règle l’année ; à Zenon, qu’il n’est point prouvé que l’âme soit divisée en huit parties ; à Antipater, que le ciel n’est point formé de cinq cercles ; à Eudoxe, qu’il n’est pas certain qu’entre les Égyptiens embaumant les morts, les Romains les brûlant et les Pæoniens les jetant dans les étangs, ce soient les Pæoniens qui aient raison ; à Lysis de Tarente, qu’il n’est pas exact que la vue soit une vapeur chaude ; à Cébès, qu’il est faux que le principe des éléments soit le triangle oblong et le triangle isocèle ; à Ménédème, qu’il n’est point vrai que, pour connaître les mauvaises intentions secrètes des hommes, il suffise d’avoir sur la tête un chapeau arcadien portant les douze signes du zodiaque ; à Platon, que l’eau de mer ne guérit pas toutes les maladies ; à Épicure, que la matière est divisible à l’infini ; à Aristote, que le cinquième élément n’a pas de mouvement orbiculaire, par la raison qu’il n’y a pas de cinquième élément ; à Epiménide, qu’on ne détruit pas infailliblement la peste en laissant des brebis noires et blanches aller à l’aventure, et en sacrifiant aux dieux inconnus cachés dans les endroits où elles s’arrêtent.

1926. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

Ce seul inconvénient suffirait pour hâter la décadence de l’art, surtout lorsque l’on considère que l’acharnement de ces amateurs va quelquefois jusqu’à procurer aux artistes médiocres le profit et l’honneur des ouvrages publics.

1927. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 38, que les peintres du temps de Raphaël n’avoient point d’avantage sur ceux d’aujourd’hui. Des peintres de l’antiquité » pp. 351-386

Or il suffit de voir l’antinous, la venus de Medicis et plusieurs autres monumens de l’antiquité, pour être convaincu que les anciens sçavoient du moins aussi-bien que nous dessiner élegamment et correctement.

1928. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 33, que la veneration pour les bons auteurs de l’antiquité durera toujours. S’il est vrai que nous raisonnions mieux que les anciens » pp. 453-488

Il suffit qu’un siecle vienne après un autre pour raisonner mieux que lui dans les sciences naturelles, à moins qu’il ne soit arrivé dans la societé un bouleversement assez grand pour éteindre au préjudice des petits-fils, les lumieres qu’avoient leurs ancêtres.

1929. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre III. Personnages merveilleux des contes indigènes »

Il suffit, paraît-il, de donner un coup de dent dans ce tourbillon pour couper en deux le guinné.

1930. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Mais cela suffit à donner une idée de leur funambulisme.

1931. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

Suffit-il, quoique ce soit observé et bien dit, que Taine empâte les idées et que son style, bourré d’incises, soit trop visiblement travaillé et même un peu argileux ?

1932. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Après sa mort, qui limita ses œuvres, en les interrompant, et les fit complètes, on pensait tout tenir de cet esprit puissant, qui s’était concentré, dans une époque où presque personne ne se concentre, mais où tout le monde s’avachit ; et, de fait, ce qu’il avait publié suffisait à la plus grande gloire religieuse du xixe  siècle et à une des grandes de tous les siècles !

1933. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Une obole suffit pour leur tombeau.

1934. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre iii »

La blessure suffirait pour l’immobiliser ; il ne l’admet pas.

1935. (1900) La province dans le roman pp. 113-140

Il y a des hommes et des femmes, en grand nombre, qui trouvent que le bonheur n’a pas de patrie nécessaire, que la joie et le souci d’une fortune à faire ou à augmenter, d’une famille à élever, d’une âme à ennoblir, d’une place à tenir dans l’amitié de quelques-uns et dans l’estime de tous, suffisent amplement à remplir les heures et à les rendre brèves.

1936. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre III : M. Maine de Biran »

Vous avez, comme tout le monde, une canne à la main, la critique : qu’elle vous suffise.

1937. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Pour l’y faire entrer, il suffirait presque de supprimer sa mauvaise métaphysique, de traduire ses formules, de les réduire par l’analyse.

1938. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

En effet, qu’on suppose un orateur doué par la nature de cette magie puissante de la parole, qui a tant d’empire sur les âmes et les remue à son gré ; qu’il paraisse aux yeux de la nation assemblée pour rendre les derniers devoirs à Henri IV ; qu’il ait sous ses yeux le corps de ce malheureux prince ; que peut-être, le poignard, instrument du parricide, soit sur le cercueil et exposé à tous les regards ; que l’orateur alors élève sa voix, pour rappeler aux Français tous les malheurs que depuis cent ans leur ont causés leurs divisions et tous les crimes du fanatisme et de la politique mêlés ensemble ; qu’en commençant par la proscription des Vaudois et les arrêts qui firent consumer dans les flammes vingt-deux villages, et égorger ou brûler des milliers d’hommes, de femmes et d’enfants, il leur rappelle ensuite la conspiration d’Amboise, les batailles de Dreux, de Saint-Denis, de Jarnac, de Montcontour, de Coutras ; la nuit de la Saint-Barthélemi, l’assassinat du prince de Condé, l’assassinat de François de Guise, l’assassinat de Henri de Guise et de son frère, l’assassinat de Henri III ; plus de mille combats ou sièges, où toujours le sang français avait coulé par la main des Français ; le fanatisme et la vengeance faisant périr sur les échafauds ou dans les flammes, ceux qui avaient eu le malheur d’échapper à la guerre ; les meurtres, les empoisonnements, les incendies, les massacres de sang-froid, regardés comme des actions permises ou vertueuses ; les enfants qui n’avaient pas encore vu le jour, arrachés des entrailles palpitantes des mères, pour être écrasés ; qu’il termine enfin cet horrible tableau par l’assassinat de Henri IV, dont le corps sanglant est dans ce moment sous leurs yeux ; qu’alors attestant la religion et l’humanité, il conjure les Français de se réunir, de se regarder comme des concitoyens et des frères ; qu’à la vue de tant de malheurs et de crimes, à la vue de tant de sang versé, il les invite à renoncer à cet esprit de rage, à cette horrible démence qui, pendant un siècle, les a dénaturés, et a fait du peuple le plus doux un peuple de tigres ; que lui-même prononçant un serment à haute voix, il appelle tous les Français pour jurer avec lui sur le corps de Henri IV, sur ses blessures et le reste de son sang, que désormais ils seront unis et oublieront les affreuses querelles qui les divisent ; qu’ensuite, s’adressant à Henri IV même, il fasse, pour ainsi dire, amende honorable à son ombre, au nom de toute la France et de son siècle, et même au nom des siècles suivants, pour cet assassinat, prix si différent de celui que méritaient ses vertus ; qu’il lui annonce les hommages de tous les Français qui naîtront un jour ; qu’en finissant il se prosterne sur sa tombe et la baigne de ses larmes : quelle impression croit-on qu’un pareil discours aurait pu faire sur des milliers d’hommes assemblés, et dans un moment où le spectacle seul du corps de ce prince, sans être aidé de l’éloquence de l’orateur, suffisait pour émouvoir et attendrir ?

1939. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Ce fit beau suffirait à déshonorer un poème épique ! […] Et ainsi de toutes les autres, sauf une demi-douzaine, qui se suffisent et qui n’ont pas besoin d’être accompagnées… L’excellent Nadaud ! […] Mais il ne suffit pas d’aimer les vers-maximes, il s’agit de les frapper comme on frappe des médailles, de leur donner la sonorité et l’éclat du bronze. […] L’excellent Gaspard suffirait, à lui seul, à réhabiliter l’espèce humaine. […] On avait fait demander des hommes et des chevaux haut-le-pied, pour boucher les trous creusés par la mort ; et ils tardaient à venir, il fallait se suffire en attendant.

1940. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

Très souvent on le voit, d’un seul fait qu’il rapporte, faire sortir une affirmation immédiatement générale ; très souvent aussi il lui suffit de pouvoir interpréter un fait dans le sens de sa théorie pour que toute autre interprétation lui paraisse exclue. […] Telle femme élégante que j’ai connue était loin d’être parfaite, mais enfin il y avait tout de même chez elle un fond de délicatesse, une loyauté dans les procédés qui l’auraient rendue, quoi qu’il arrivât, incapable d’une félonie et qui suffisent à mettre des abîmes entre elle et une mégère comme la Verdurin. […] Mais, comme les vertus qu’il attribuait tantôt encore aux Verdurin, ri auraient pas suffi, même s’ils les avaient vraiment possédées, mais s’ils n’avaient pas favorisé et protégé son amour, à provoquer chez Swann cette ivresse où il s’attendrissait sur leur magnanimité et qui, même propagée à travers d’autres personnes, ne pouvait lui venir que d’Odette, — de même, l’immoralité, eût-elle été réelle, qu’il trouvait aujourd’hui aux Verdurin aurait été impuissante, s’ils n’avaient pas invité Odette avec Forcheville et sans lui, à déchaîner son indignation et à lui faire flétrir « leur infamie ». […] Cela suffit à faire commencer un amour 56. […] Il me suffit de vous avoir marqué et fait sentir d’une part sa tendance à extraire de ses impressions quelque chose qui les transcende et d’autre part le résultat de cette tendance : à savoir le caractère d’admirable généralité que revêtent toutes ses peintures, soit du monde et des autres êtres, soit de sa propre âme.

1941. (1932) Les idées politiques de la France

Même au point de vue des institutions, entourée qu’elle est de révolutions et de dictatures, elle demeure sur le continent le seul grand asile des libertés parlementaires, lesquelles sont après tout des libertés, et, au moins en temps de disette, suffisent encore à fonder une liberté générale sortable. […] Je dis presque, car il en resta une, impossible à trancher, vu qu’elle fait corps avec le Saint-Siège, et qui a suffi depuis à régénérer les autres. […] Il sait les lois générales des nombres et des lignes ; il sait ce que sont les forces physiques : la pesanteur, la lumière, le son, l’électricité, la chaleur, et il sait qu’elles ne sont peut-être que les diverses apparences d’un mouvement unique et qu’elles obéissent toutes à des lois semblables dont un certain nombre d’exemples ont suffi à lui montrer l’éternelle fixité. » Soit l’histoire naturelle, l’anthropologie, l’histoire, un humanisme fait de la tradition gréco-romaine, où le christianisme ne figure que pour avoir versé dans le cœur de l’homme nouveau « le sentiment nouveau de la pitié » (contre sens qui vient de la proscription subie officiellement par tous les sens du mot charité), et qui se termine sur « la Réforme et la Renaissance l’éveillant pour ainsi dire de la longue nuit du passé, et lui mettant au front comme une aurore le rayon de la liberté de penser ; la France moderne, de Descartes à Voltaire, achevant dans une langue d’une force et d’une précision définitive l’affranchissement de son esprit, et faisant enfin, dans l’explosion de 1789, tomber autour de lui les dernières entraves, et le dressant, au milieu du monde, dans la hauteur de tous ses droits et le rayonnement de toutes ses libertés. » Évidemment, c’est monument de Gambetta, c’est court, et l’on comprend que ce manifeste officiel du laïcisme ait été alors accueilli avec quelque gaîté par l’opinion littéraire, laquelle allait céder au mouvement dit des Cigognes, et prendre parti, en sens divers, dans la bataille Brunetière-Berthelot de 1894 sur la faillite ou l’apothéose de la science, — sorte d’ouverture de l’affaire Dreyfus, où l’on se disputa fort le jeune Français de demain. […] Il ne semble pas crue la peur brute des catastrophes suffise à diminuer très sensiblement le potentiel moral de guerre. […] Des groupes puissants, des hommes d’État favorables, des loges même, spécialement outillées, les alliances cléricales, une presse bien en main, tout ce qui a marché et marche encore, n’eussent pas suffi, si tout un idéalisme n’était venu mettre sa rallonge : gloire militaire, honneur du drapeau, revanche contre la perfide Albion, contraste républicain avec les abandons monarchiques, montés en épingle, de Louis XV, larges pays de couleur française, parfois désertiques, mais qui tenaient de la place sur les cartes murales et dans la carte morale, — greffe, en somme, des affaires sur le patriotisme.

1942. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 5482-9849

Charles XII. a encore de la gloire, parce que sa valeur, son desintéressement, sa libéralité, ont été extrèmes, Les succès suffisent pour la réputation, mais non pas pour la gloire. […] Il ne suffit pas pour le goût, de voir, de connoître la beauté d’un ouvrage ; il faut la sentir, en être touché. Il ne suffit pas de sentir, d’être touché d’une maniere confuse, il faut démêler les differentes nuances ; rien ne doit échapper à la promptitude du discernement ; & c’est encore une ressemblance de ce goût intellectuel, de ce goût des Arts, avec le goût sensuel : car si le gourmet sent & reconnoît promptement le mélange de deux liqueurs, l’homme de goût, le connoisseur, verra d’un coup-d’oeil prompt le mélange de deux styles ; il verra un défaut à côté d’un agrement ; il sera saisi d’enthousiasme à ce vers des Horaces : Que vouliez-vous qu’il fît contre trois ? […] Sans examiner si cette expression, mystere du corps, est naturelle & juste, il suffit de remarquer que la reflexion est vraie pour tous ceux qui affectent la gravité, mais non pour ceux qui ont dans l’occasion une gravité convenable à la place qu’ils tiennent, au lieu où ils sont, aux matieres qu’on traite. […] Quoique cette autorité suffise pour établir la croyance de ce fait dans l’esprit d’un chrétien, & que l’histoire nous peigne Hérode comme un prince soupçonneux & sans cesse agité de la crainte que son sceptre ne lui fût enlevé, & qui sacrifiant tout à cette jalousie outrée de puissance & d’autorité, ne balança pas à tremper ses mains dans le sang de ses propres enfans : cependant il y a des difficultés qu’on ne sauroit se dissimuler, tel est le silence des trois autres évangélistes, celui de l’historien Josephe sur un évenement aussi extraordinaire, & la peine qu’on a d’accorder le récit de saint Luc avec celui de saint Matthieu.

1943. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre IV. L’âge moderne. — Chapitre II. Lord Byron. » pp. 334-423

J’ai vécu, je suis content1243. » À ce train, les organes s’usent, et des intervalles de tempérance ne suffisent pas à les réparer. […] —  La main de la mort est sur moi, mais point la vôtre1296… » Le moi, l’invincible moi, qui se suffit à lui-même, sur qui rien n’a prise, ni démons, ni hommes, seul auteur de son bien et de son mal, sorte de dieu souffrant et tombé, mais toujours dieu sous ses haillons de chair, à travers la fange et les froissements de toutes ses destinées, voilà le héros et l’œuvre de cet esprit et des hommes de sa race. […] Le papier ne suffirait pas, s’il fallait transcrire les injures des revues décentes « contre ces hommes (entendez cet homme) au cœur gâté, à l’imagination dépravée, qui, se forgeant un système d’opinions accommodées à leur triste conduite, se sont révoltés contre les plus saintes ordonnances de la société humaine, et qui, haïssant cette religion révélée dont avec tous leurs efforts et toutes leurs bravades ils ne peuvent entièrement déraciner en eux la croyance, travaillent à rendre les autres aussi misérables qu’eux-mêmes en les infectant d’un poison moral qui les rongera jusqu’au cœur. » Emphase de mandement et pédanterie de cuistre : dans ce pays, la presse fait l’office de gendarme, et jamais elle ne l’y a fait plus violemment qu’alors.

1944. (1908) Jean Racine pp. 1-325

Et cela ne lui suffit pas encore. […] Et enfin : Ce n’est point une nécessité qu’il y ait du sang et des morts dans une tragédie : il suffit que l’action en soit grande, que les acteurs en soient héroïques, que les passions y soient excitées, et que tout s’y ressente de cette tristesse majestueuse qui fait tout le plaisir de la tragédie. […] S’il s’achève, il suffit, tout est fini pour moi. […] Et les peintures de l’amour désordonné, mais, en quelque façon, normal dans son désordre, n’avaient pas suffi à Racine.

1945. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Ajoutons que nous sommes tout prêt à reconnaître qu’il est presque impossible de suffire simultanément aux exigences d’un travail de critique et d’érudition, d’aperçus d’histoire littéraire, et d’une biographie. […] Il est bien naturel, en se rappelant que Molière fut l’orateur du Petit-Bourbon, puis du Palais-Royal, et, comme tel, chargé de la rédaction des affiches, de regretter qu’on ne nous ait pas conservé celles de sa troupe ; mais on comprend de reste qu’elles aient dû suffire promptement à éveiller la curiosité des badauds et à commander l’attention du public. […] Je ne suis pas du nombre de ces esprits sublimes dont vous parlez ; mais, tel que je suis, je n’ai rien fait en ma vie dont je sois véritablement content. » Un mot nous suffira pour combattre cette anecdote, qui traîne dans tous les ana, et qu’on aurait dû y laisser. […] C’était une vengeance que le Roi lui permettait d’exercer ; mais elle ne suffisait pas aux yeux du prince, et il est digne de remarque que dès que Molière se trouvait en butte aux attaques de ses ennemis, Louis XIV s’efforçait de lui faire oublier leurs persécutions par un bienfait. […] Ces détails historiques suffisent pour expliquer les attaques de notre auteur contre ces quatre empiriques privilégiés que Louis XIV, auquel on n’a jamais reproché de n’avoir pas su apprécier les hommes, fut néanmoins obligé de choisir pour ses médecins ordinaires, comme moins ignares et moins dangereux encore que leurs confrères.

1946. (1887) Essais sur l’école romantique

Le catholicisme et l’antiquité suffisaient encore aux plus vastes intelligences. […] Comme je n’aime point les querelles, je me hâte de dire qu’il y a art et art ; l’un petit, qui s’apprend comme le latin, et pour lequel j’ai reçu des pensums dans un collège de province ; art d’almanach et de keepsake, qui met un homme en état de faire des vers à une mariée, d’adresser au curé un compliment de première communion, de souhaiter la fête à une mère de famille, qui plus tard suffit à un ou plusieurs poèmes épiques, qui mène à l’Académie dans les pays d’académie ; art qui s’accommode volontiers de tous les régimes auxquels on peut soumettre la pensée, qui chante si l’on a besoin qu’il chante, qui siffle si l’on a besoin qu’il siffle, qui n’est pas très tourmenté par la censure, parce qu’il ne gagne pas grand’chose à la liberté ; l’autre, grand et indépendant, qui ne s’enseigne point au collège, qui mène peu aux académies et mène souvent aux persécutions, art qui fleurit principalement aux époques où l’autre art n’a pas assez de cris pour se faire entendre, et qui peut très bien se caractériser, soit par un siècle se résumant dans un homme — cela a eu lieu pour Dante — soit par un homme se mettant en guerre contre un siècle, comme cela a eu lieu pour Byron. […] La grande salle de la Sorbonne suffit à peine aux auditeurs de M. 

1947. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre III. L’Âge moderne (1801-1875) » pp. 388-524

Ce qui suffirait à prouver la filiation ou la succession, non seulement chronologique, mais logique, c’est que lorsque La Littérature, 1800, et le Génie du christianisme, 1802, paraissent, on commence bien, a la vérité, par les opposer l’un à l’autre, et Fontanes, quoique pourtant il ne soit pas encore le grand maître de l’Université napoléonienne, plaisante assez aigrement Mme de Staël sur sa chimère de « perfectibilité indéfinie ». […] Mais si peut-être il semblait que la politique y tient trop de place, — et quoique d’ailleurs la politique ait plus souvent éclairé l’histoire que l’histoire n’a servi de guide à la politique, — il suffirait en ce cas de nommer Mignet ou Tocqueville, Thiers lui-même, et de rappeler l’Histoire du Consulat ou celle des Négociations relatives à la succession d’Espagne, 1835-1842. […] Mais il suffit ici du pressentiment, puisque aussi bien d’autres que Sainte-Beuve en allaient tirer bientôt toute une conception nouvelle de la critique ; — et c’est ainsi qu’après avoir été l’un des plus solides appuis du romantisme naissant, nul n’a plus fait contre lui que l’auteur des Confessions de Joseph Delorme, en devenant, dans sa maturité, l’auteur des Causeries du lundi. […] Observations à ce sujet ; — et qu’après tout il en a bien pris à Musset d’être une victime de l’amour ; — s’il n’a guéri de sa grande crise, 1832-1837 ; — que pour retomber sur lui-même ; — et se retrouver le dandy de ses origines ; — ou, comme l’appelait Flaubert, le bourgeois. — Que ces côtés « bourgeois » de l’œuvre de Musset ne laissent pas cependant d’avoir leur mérite ; — et que, pour les apprécier, il suffit d’appeler « parisien » ce que Flaubert appelait bourgeois ; — et de replacer ainsi l’auteur d’Une bonne fortune et d’Après une lecture, — dans la lignée de Voltaire, de Regnard, de Boileau et de La Fontaine. […] — Que si l’on ne peut pas le dire, — et si l’on doit au contraire les appeler des romans personnels ou « lyriques », — c’est donc en cela qu’ils sont romantiques, — ou même byroniens. — Il convient d’ajouter que, comme ils le sont sans décor exotique ; — ni recul historique ; — ils le sont d’une autre manière que Cinq-Mars ou Notre-Dame de Paris ; — et toutes ces circonstances réunies expliquent assez, — pour ne rien dire du sexe de l’auteur, — que deux romans : Indiana et Valentine, aient suffi pour rendre illustre en deux ans le nom de George Sand ; — qu’un an plus tard Lélia rendait fameux ; — et plus fameux encore, l’année suivante, ce que l’on pourrait appeler l’aventure des « amours de Venise ».

1948. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

On n’exige pas qu’un poëte étudie de pareilles âmes ; il suffit qu’il découvre en elles trois ou quatre traits dominants ; peu importe si elles s’offrent toujours dans la même attitude ; elles font rire comme la comtesse d’Escarbagnas ou tel Fâcheux de Molière ; on ne leur demande rien de plus. […] Jonson trouvait dans son âme énergique l’énergie de ces passions romaines ; et la lucidité de son esprit jointe à sa science profonde, impuissantes pour construire des caractères, lui fournissaient les idées générales et les détails frappants qui suffisent pour composer les peintures de mœurs.

1949. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VII. Les poëtes. » pp. 172-231

Sans doute Pope avait le mécanisme plus brillant et plus agile ; mais cette habileté de main ne suffit pas pour faire un poëte, même un poëte de boudoir. […] Deux cents vers neufs, cela suffisait.

1950. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Car sans parler du flot qui gronde à tout moment, Et de votre destin qu’assiège incessamment La Gloire aux mille voix, comme une mer montante, Et des concerts tombant de la nue éclatante Où déjà par le front vous plongez à demi ; Doux bruits, moins doux pourtant que la voix d’un ami : Vous, noble époux ; vous, femme, à la main votre aiguille, À vos pieds vos enfants ; chaque soir, en famille, Vous livrez aux doux riens vos deux cœurs reposés, Vous vivez l’un dans l’autre et vous vous suffisez. […] Votre admirable distinction entre le chantre antique, l’histoire vivante et poétisée, telle qu’Homère, qu’on écoute au bord de la mer ou sur le seuil de sa demeure, et le poète épique, qui écrit son œuvre à loisir et qu’on lit par amusement ou par une froide admiration dans les académies ou dans son cabinet, suffirait pour nous réconcilier.

1951. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Ce n’est point que Richard Wagner ait eu, dès l’abord, la nette vue de ces trois questions ; mais il suffit de se rappeler le tempérament spécial du Maître, pour comprendre que toutes trois sont le développement logique de sa nature. […] Mais il suffit lire son œuvre pour comprendre que, chez lui, comme chez Beethoven, l’imitation est un moyen, non une fin en soi, une nécessité dramatique, non un résultat essentiel.

1952. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Il nous suffira, de dégager la ruine de la religion chrétienne de la mixtion de judaïsme dans la formation de ses dogmes. […] Mais cette traduction ne suffit pas : à la foule, aux théâtres, au grand public elle est bonne, et admirable ; à ceux qui souhaitent une intime connaissance de l’œuvre Wagnérienne, non : il faut la traduction littérale.

1953. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre cinquième. Principales idées-forces, leur genèse et leur influence — Chapitre quatrième. L’idée du temps, sa genèse et son action »

Les variations d’intensité et de qualité, par elles seules, ne suffiraient pas à nous révéler la succession, car nous ne pourrions pas distinguer l’intensité faible résultant de l’éloignement dans le temps d’avec l’intensité faible produite par un original rapproché et même immédiat, mais faible lui-même. […] Chez l’animal ou l’enfant, et dans la plupart des circonstances, les tableaux de l’espace suffisent.

1954. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

XXXIV C’est sans doute cet amour, amour qui rend le cœur bien plus prudent, parce qu’il le force à penser à deux, c’est sans doute cet amour qui pressa instinctivement Béranger de songer à se créer par les lettres une existence qui pût suffire à deux vies. […] Six chèvres et nos bras, voilà notre richesse ; Elle nous a suffi : nous en bénissons Dieu.

1955. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre IV. De la pluralité des temps »

Mais on peut se représenter par la pensée une instantanéité de vision, et cela suffit pour que l’intervalle équation de l’avenir du lieu P′ préexiste en droit au présent de ce lieu, y soit préformé et par conséquent prédéterminé. — Nous allons voir qu’il y a là un effet de mirage. […] Mais, en revanche, aucun des moments de l’intervalle M′ E′ ni de l’intervalle P′ F′ n’est absolument antérieur ni absolument postérieur à ce qui se passe en N ; tous ces moments successifs du passé et de l’avenir seront contemporains de l’événement en N′, si l’on veut ; il suffira d’attribuer au système S′ la vitesse appropriée, c’est-à-dire de choisir en conséquence le système de référence.

1956. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Je concède volontiers à D’Annunzio qu’il est un « phénomène », unique même, s’il y tient ; cet éloge suffit sans doute à sa vanité que mes critiques de pauvre homme ne sauraient inquiéter. […] Si Zola raconte l’histoire de Gervaise, mon imagination, excitée par lui, suffit pour voir la noce monter dans la colonne Vendôme et pour respirer, rue de la Goutte-d’Or, le parfum de l’oie rôtie.

1957. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Il eût suffi d’une seconde défaite de M. de Soubise pour faire lapider à Paris Mme de Pompadour.

1958. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

… Quelques strophes de ce ton suffisent pour réparer une langue et pour monter une lyre.

1959. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

La première édition fut épuisée en peu de jours ; une seconde et une troisième suffirent à peine aux demandes, et il s’en fit deux contrefaçons à Dublin.

1960. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

Il suffira de dire qu’il s’acquitta de sa mission sans trop d’échecs et avec des succès partagés.

1961. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Maine de Biran. Sa vie et ses pensées, publiées par M. Ernest Naville. » pp. 304-323

Mais cette réponse, qui place le bonheur dans une certaine harmonie des organes avec ce qui les entoure, ne lui suffit pas : Je voudrais, dit-il, si jamais je pouvais entreprendre quelque chose de suivi, rechercher jusqu’à quel point l’âme est active, jusqu’à quel point elle peut modifier les impressions extérieures, augmenter ou diminuer leur intensité par l’attention qu’elle leur donne ; examiner jusqu’où elle est maîtresse de cette attention… Est-ce que tous nos sentiments, nos affections, nos principes, ne tiendraient qu’à certains états physiques de nos organes ?

1962. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Une bonne nouvelle cependant : le dictionnaire de l’Académie, non pas celui de l’usage, qui est dans les mains de tout le monde, et qui peut suffire quelque temps encore jusqu’à une prochaine révision, mais le dictionnaire historique commencé depuis quinze ans, — un fascicule important de ce dictionnaire si complet, si riche en citations, si intéressant même à la lecture (chose rare pour un dictionnaire), va paraître avec un avertissement du savant rédacteur M. 

1963. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Journal et mémoires du marquis d’Argenson, publiés d’après les manuscrits de la Bibliothèque du Louvre pour la Société de l’histoire de France, par M. Rathery » pp. 238-259

Ne lui demandez ni finesse ni observation : la concaténation du raisonnement lui suffit ; il vous met à la chaîne.

1964. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers. »

L’envie et la jalousie naturelle au monde suffiraient pour expliquer la répugnance d’un grand nombre.

1965. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

Fabius, Quinctius et Régulus les eussent acceptées, sans croire blesser par-là leur désintéressement et leur frugalité… « Ce que vous me mandez de votre santé suffit pour m’inquiéter et non pas pour m’instruire, moyennant quoi vous n’en êtes pas quitte : il faut, Monsieur, que vous m’écriviez encore pour m’en dire des nouvelles.

1966. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin »

Il s’arrête au seuil, dans la ruelle qui y conduit ; il lui suffit d’y voir entrer la foule des dévots et dévotes.

1967. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Dominique par M. Eugène Fromentin (suite et fin.) »

il suffira d’une année et que Dominique ait atteint ses dix-sept ans, que Madeleine en ait dix-huit, pour que le rayon arrive, à elle d’abord et à sa beauté dans sa fleur première, à lui ensuite et à son cœur qu’un soudain regard vient éclairer.

1968. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

Je suppose toujours cet ancien public français avec ses habitudes, et à qui deux heures de spectacle sérieux suffisaient.

1969. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

Après cela eût-il suffi d’avoir un plan arrêté, deux mois plus tôt, pour le faire prévaloir et pour éluder les événements ?

1970. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

À force de veilles, d’études, d’économie industrieuse et de privations, elle suffit à la tâche.

1971. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « MME DESBORDES-VALMORE. (Les Pleurs, poésies nouvelles. — Une Raillerie de l’Amour, roman.) » pp. 91-114

Le vocabulaire habituel de son chant ne lui a plus suffi, et elle a trouvé plaisir et fraîcheur aux vieux mots rajeunis ou aux nouveaux hasardés : Une ceinture noire endeuille un jeune enfant.

1972. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Il suffirait qu’on le louât de préférer et de pratiquer une chose, pour qu’il s’applaudît à l’instant d’aimer également toutes les autres.

1973. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « DU ROMAN INTIME ou MADEMOISELLE DE LIRON » pp. 22-41

Qu’il nous suffise de dire que la fermeté amicale de Mlle de Liron tient en échec Ernest ce jour-là et le suivant ; que le mot vous n’êtes qu’un enfant, à propos jeté à l’amour-propre du jeune cousin, achève de le décider ; que M. de Thiézac, qui arrive en litière avec son projet de contrat de mariage et un brevet de nomination pour Ernest, est accueilli fort convenablement, et que celui-ci annonce bien haut, avec l’orgueil d’une résolution soudaine, qu’il part le lendemain de grand matin pour Paris.

1974. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

Nulle science n’y atteindrait ; nulle forme préconçue n’y suffirait.

1975. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIe entretien. Sur la poésie »

Un livre entier ne suffirait pas à les énumérer et à les définir toutes.

1976. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Tout cela fait à ses livres une figure à part, ce qui est l’essentiel et ce qui suffirait à me les faire goûter, quand même cet homme de loi lettré et ami des champs ne serait point, par-dessus le marché, un poète bien authentique.

1977. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Mais au psychologue cette curiosité suffit.

1978. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre I : La loi d’évolution »

Mais il suffit d’un peu de réflexion pour voir que dans les deux cas, les mêmes facultés sont en jeu, et que leur mode d’opération est le même dans son fond.

1979. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

Quatre stèles de pierre confondraient les Olympiades de la glorieuse arène qu’elle a parcourue ; des parois interminables, couvertes de cartouches hiéroglyphiques, ne suffisent pas à dérouler les siècles et les dynasties de l’antique Égypte.

1980. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre IV »

Le poète voulait guérir subitement son malade ; aussi ne lui a-t-il donné qu’une migraine morale, que l’air de la campagne suffit à dissiper.

1981. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Quand il est question d’écrire à mes amis, je ne songe jamais qu’il faille de l’esprit pour leur répondre : mon cœur me suffit à tout.

1982. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame de La Tour-Franqueville et Jean-Jacques Rousseau. » pp. 63-84

Ce qui suffirait pour donner la plus haute idée de la qualité du talent de M. de Chateaubriand, c’est en général la nature distinguée des femmes qui s’y sont prises, qui se sont éprises de lui pour son talent.

1983. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Il paraît qu’il réussit mieux en diplomatie, dans ces rôles secondaires où suffit un mérite solide.

1984. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Il y a des personnes peut-être qui s’imaginent qu’il suffit d’être riche, d’avoir un bon cuisinier, une maison confortable et située dans un bon quartier, une grande envie de voir du monde, et de l’affabilité à le recevoir, pour se former un salon : on ne parvient de la sorte qu’à ramasser du monde pêle-mêle, à remplir son salon, non à le créer ; et si l’on est très riche, très actif, très animé de ce genre d’ambition qui veut briller, et à la fois bien renseigné sur la liste des invitations à faire, déterminé à tout prix à amener à soi les rois ou reines de la saison, on peut arriver à la gloire qu’obtiennent quelques Américains chaque hiver à Paris : ils ont des raouts brillants, on y passe, on s’y précipite, et, l’hiver d’après, on ne s’en souvient plus.

1985. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Diderot. (Étude sur Diderot, par M. Bersot, 1851. — Œuvres choisies de Diderot, avec Notice, par M. Génin, 1847.) » pp. 293-313

Il a dit quelque part des pastels de La Tour, « qu’il suffirait d’un coup de l’aile du Temps pour en enlever la poussière », et pour faire que l’artiste ne fût plus qu’un nom.

1986. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Notre folie, à nous autres, est de croire aussi que toute la nature, sans exception, est destinée à nos usages ; et quand on demande à nos philosophes à quoi sert ce nombre prodigieux d’étoiles fixes, dont une petite partie suffirait pour faire ce qu’elles font toutes, ils vous répondent froidement qu’elles servent à leur réjouir la vue.

1987. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Théodore Leclercq. » pp. 526-547

Qu’il nous suffise de constater que M. 

1988. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Il n’était content que quand il avait ramené aux champs son jeune Monsieur égaré, et quand il lui avait fait dire : « La campagne fut mon berceau, maintenant elle sera ma tombe : car j’ai compris la terre, j’ai sondé ce qu’elle vaut. » Ce jeune homme, égaré par les idées modernes, pourrait être caractérisé dans sa maladie morale avec plus de particularité sans doute et plus de ressemblance ; l’intention suffit pourtant ; l’auditeur achève la pensée.

1989. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Cette parole d’un seul jour, venue la première après un si long et si rigoureux silence, a suffi pour porter son nom comme citoyen et pour l’inscrire dans l’histoire1.

1990. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Mémoires du cardinal de Retz. (Collection Michaud et Poujoulat, édition Champollion.) 1837 » pp. 40-61

Ce ne serait pas la première fois qu’une nature supérieure se serait transformée en s’emparant du pouvoir et en l’exerçant ; et même on n’est tout à fait supérieur qu’à cette condition d’avoir en soi ce qui transforme et renouvelle, ce qui suffit à toutes les situations grandes.

1991. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

Aussi ce projet du Berlinois l’inquiète en un sens : Si les têtes légères françaises parviennent à trouver un point de contact avec les têtes creuses allemandes, il est sûr qu’il faudra une société cosmopolite pour gouverner l’Europe ; les chefs de nation n’y pourront plus suffire.

1992. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Mais depuis que j’ai eu à examiner de plus près les récits qui le concernent, et à le suivre lui-même dans les pages qu’il a laissées, il m’a semblé que la méthode pour l’expliquer et le présenter sous le meilleur jour à tous était simple, et qu’il suffisait de raconter et d’exposer.

1993. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — I. » pp. 41-62

Pourvu qu’ils y soient, cela leur suffit. » Ailleurs, parlant de ces gens dont la conversation n’est qu’un miroir où ils montrent sans cesse leur impertinente figure : « Oh !

1994. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

« J’entends, disait l’illustre auteur, quelques frelons qui bourdonnent autour de moi ; mais, si les abeilles y cueillent un peu de miel, cela me suffit. » Montesquieu vécut six années encore : il était vieilli avant le temps.

1995. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

Elles ne seront pas vraies, ces accusations, mais elles ne seront pas absolument dénuées de vérité, et cela suffira pour vous faire blâmer… » Jamais pronostic ne se vérifia plus exactement que celui de Grimm.

1996. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Parlant de l’honorable historien Lémontey qui, en petit comité, sous la Restauration, avait tout son courage libéral et tout son trait, mais qui, à la seule vue d’un étranger, rentrait aussitôt dans sa circonspection et s’y renfermait : « Une goutte d’eau, disait Arnault, suffisait pour mouiller toute sa poudre. » Pour lui, c’était tout le contraire ; sa poudre partait par tous les temps.

1997. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Cet art de clair-obscuriste, où des touches de lumière, placées, comme il semble, au hasard, font conjecturer des perspectives infinies, — une série de conversations, de petits faits insignifiants, des traits de caractère sans conclusion, un chuchotement, un serrement de mains, un coup d’œil, suffisent à M. 

1998. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Émile Zola » pp. 70-104

Zola, suffira à rendre compte des procédés et des émotions apparemment contraires que nous avons séparées dans son œuvre.

1999. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre II : La littérature du xviie  siècle »

Nisard ne craint pas de taire entre Bossuet et Voltaire, supérieurs l’un et l’autre par le bon sens, l’un dans les vérités familières, l’autre dans les plus hautes vérités morales ; mais enfin le bon sens suffit-il à constituer le génie ?

2000. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VII. Mme de Gasparin »

Or l’auteur des Horizons célestes est devenu fort, en ces neuf mois qui suffisent à créer la vie.

2001. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Henri Heine »

Il n’a pas cherché le corsage de la femme dans la syrène ; les écailles de la bête lui ont suffi.

2002. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

Seulement, qu’il suffise de savoir que, tout en relevant de Strauss, il se permet de le critiquer et tombe au-dessous de lui dans sa malencontreuse critique.

2003. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

C’étaient peut-être les vers mêmes, que nous retrouvons, au début de la Théogonie108 : « Ayons les Muses en tête de nos chants, les Muses qui habitent le grand et fertile sommet d’Hélicon, et dansent de leurs pieds légers autour de la fontaine bleuâtre et de l’autel du puissant fils de Saturne ; les Muses qui, lavant aux sources du Permesse leur beauté délicate, auprès de l’Hippocrène, ou sur le divin sommet d’Holmios au plus haut de l’Hélicon, forment des chœurs gracieux, sous leurs pas tressaillants ; puis, élancées de là, sous le voile d’un épais nuage, ont marché dans la nuit, jetant d’harmonieuses clameurs, en hymnes à Jupiter porte-égide, à la sainte Junon, reine d’Argos aux brodequins dorés, à la fille du dieu porte-égide, Minerve aux yeux pers, à Phébus Apollon, à Diane chasseresse, à Neptune qui enceint la terre et l’ébranlé, à la vénérable Thémis, à Vénus aux roulantes prunelles, à Hébé parée d’une couronne d’or, à la belle Dioné, à l’Aurore, au Soleil immense, à la Lune brillante, à Latone, à Japet, au ténébreux Saturne, à la Terre, au vaste Océan, à la Nuit sombre et à la race sacrée des autres dieux : célébrons ces Muses, qui enseignaient une si belle chanson à Hésiode, occupé de paître ses agneaux, aux bords de l’Hélicon divin. » Cette poésie brillante et gracieuse, non moins ancienne que les chants homériques, mais indigène en Béotie, offerte aux yeux et gravée dans les temples de cette religieuse contrée, suffisait à dénouer la langue du jeune homme, né pour les vers, qui vivait dans ces lieux.

2004. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

Qu’il nous suffise ici de retrouver çà et là et de suivre à la trace les blanches lueurs de cette grande poésie, que nous avions admirée dans la Grèce et qui revient, à longs intervalles, pour le monde, comme ces astres dont le poëte a vu Flammarum longos a tergo albescere tractus.

2005. (1929) Amiel ou la part du rêve

Le seul intérêt de la somme, trois mille francs, suffisait, alors, à un budget non seulement d’étudiant, mais de voyageur. […] Mais le burin conviendrait mal, les crayons du pastel suffiraient. […] Il nous suffit de noter que, né dans le bas de la rue Verdaine, et dans l’épicerie paternelle, Amiel mourut au numéro 13, à mi-hauteur. […] Il suffisait d’imaginer les grands hommes ordinaires, purs de leur première erreur, ou de s’appuyer sur cette erreur même pour concevoir un degré de conscience plus élevé, un sentiment de la liberté d’esprit moins grossière. » Je crains qu’Amiel et Teste ne soient dupes d’une illusion.

2006. (1896) Impressions de théâtre. Neuvième série

Mais ça ne suffit pas. […] La patrie idéale ne nous suffit plus, la patrie fixe et territoriale nous est redevenue nécessaire, et je pars pour chercher et lever notre acte de naissance légalisé. […] Elles aiment ; ce n’est rien, et pourtant cela suffit pour qu’elles soient d’une autre race que lui. […] Toutefois le dégoût d’elle-même ne suffirait point à l’affranchir. […] Et ne suffisait-il point de répandre sur le front du jeune parricide un voile de mélancolie ?

2007. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

ces vers suffisent au théâtre ! […] Qu’il vous suffise de savoir qu’il ne m’eût fallu qu’une voix de plus pour réussir et que Victor Hugo m’a constamment et hautement refusé la sienne, en annonçant qu’il votait moins pour Vigny que contre moi. […] Il suffit de s’abandonner à Homère avec un cœur pur, dans la seule joie poétique, et alors l’unité parfaite de la composition saute aux yeux. […] Un comédien heureusement doué recrée, en quelque sorte, et il suffit qu’il le fasse dans un ensemble harmonieux. […] Il ne suffit pas à l’acteur de comprendre son rôle, il lui faut encore le sentir.

2008. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Ces paroles, même décousues, et que j’extrais de conversations très suivies, suffisent à donner la force du jet, à faire sentir la note et l’accent.

2009. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Il est un de ces écrivains auxquels il suffirait souvent de retrancher pour ajouter à ce qui leur manque.

2010. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

La pétulance a pris la place de la vivacité et de l’enjouement. » On ne peut tout dire ni tout extraire : qu’il me suffise de bien marquer qu’en ce qui est de la corruption sociale de son temps, d’Argenson est un témoin précis, véridique, et quelquefois même une preuve de ce qu’il avance.

2011. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) «  Essais, lettres et pensées de Mme  de Tracy  » pp. 189-209

Je trouve qu’à chaque jour suffit sa joie, et je suis plus que jamais convaincue que notre bonheur réside en nous-mêmes.

2012. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Sur celle-ci en particulier, tout a été dit de ce qui pouvait l’être ; les défauts et les mérites du livre ont été mis en lumière avec une mesure parfaite, dans une suite d’opinions qu’il eût suffi de sténographier pour avoir un excellent modèle de discussion littéraire et historique : que d’instruction j’y ai recueillie moi-même sur un sujet que j’avais précédemment étudié !

2013. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

L’armée était sans vêtements, sans chaussures, sans solde : On donna des fusils aux lieutenants et sous-lieutenants ; cette mesure, dont les officiers de ces grades se seraient bien passés, était bien entendue : nous devions faire la guerre sur les crêtes de l’Apennin, et l’effectif sous les armes était tellement réduit, qu’un seul officier, le capitaine, suffisait au commandement d’une compagnie en ligne… Un jour, je ne me rappelle pas la date, le citoyen Chiappe, commissaire du gouvernement près l’armée d’Italie, présenta à notre acceptation la Constitution de l’an iii.

2014. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Si j’avais fait tout ce que je pouvais fort bien faire, cent volumes n’y suffiraient pas.

2015. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

que Louise Labé ; il nous suffit de son talent, sa gloire est dans sa flamme ; et il n’y a pas lieu ici, comme avec d’autres beautés de nuance pudibonde, de venir briser chevaleresquement ou pédantesquement des lances pour une vertu qu’elle ne mettait pas si haut.

2016. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Il me suffira de dire que je n’ai rien vu dans aucun de mes voyages qui m’ait autant frappé.

2017. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Je viens de faire une récolte telle que pour plus de vingt ans je suis pourvu de matériaux qui suffiraient pour faire la réputation à un homme.

2018. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Tessé ayant reproché à M. de Saint-Thomas la ruse du duc et le panneau dans lequel il avait voulu faire tomber Catinat à propos du bombardement de Pignerol, comme si un mouvement en avant du général français eût suffi pour l’en détourner, Saint-Thomas l’interrompit et lui dit : «  Moi, je vais vous conter l’histoire de la bataille que nous avons perdue, et je vous jure par tout ce qu’il y a de plus saint et de plus sacré que je vous parlerai vrai.

2019. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

On ne chicanait pas alors sur les textes : à l’humaniste proprement dit, le Virgile du Père de La Rue, l’Horace de Bond, le Cicéron de D’Olivet, suffisaient sans tant de questions, et on en avait pour la vie.

2020. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DE LA LITTÉRATURE INDUSTRIELLE. » pp. 444-471

Quelque hauts services que puissent penser avoir rendus à leur cause les anciens écrivains du Globe devenus députés, conseillers d’État et ministres, je suis persuadé qu’en y réfléchissant, quelques-uns au moins d’entre eux se représentent dans un regret tacite les autres services croissants qu’ils auraient pu rendre, avec non moins d’éclat, à une cause qui est celle de la société aussi : il leur suffisait d’oser durer sous leur première forme, de maintenir leur tribune philosophique et littéraire, en continuant, par quelques-unes de leurs plumes, d’y pratiquer leur mission de critique élevée et vigilante ; aux temps de calme, l’autorité se serait retrouvée.

2021. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Ce travail de pilotis, humble en apparence, suffit souvent, comme en Hollande, pour contenir l’orgueil du flot.

2022. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « HISTOIRE DE LA ROYAUTÉ considérée DANS SES ORIGINES JUSQU’AU XIe SIÈCLE PAR M. LE COMTE A. DE SAINT-PRIEST. 1842. » pp. 1-30

Il suffit pour la vérité historique relative que le pont soit, autant que possible, dans quelqu’une des directions principales, et porte sur quelqu’un des grands courants.

2023. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Le comte de Ségur »

Lorsqu’on veut rompre avec une maîtresse impérieuse et longtemps adorée, il ne faut pas affronter sa présence : sinon, un geste, un coup d’œil suffisent, et l’on a repris ses liens.

2024. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIe Entretien. Chateaubriand »

Les droits réunis, dirigés par M. de Barante ; la diplomatie inférieure, influencée par M. de Saint-Aulaire, pourraient le dire ; ma plume, dans l’ombre d’un bureau, avec mille écus de traitement m’auraient suffi.

2025. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

Les presses de la Hollande, de la Belgique, de l’Allemagne, de la France, de l’Angleterre, ne pouvaient suffire à multiplier les exemplaires du Télémaque au gré de l’avidité des lecteurs.

2026. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre I. Roman de Renart et Fabliaux »

Ce sont questions fort disputées ; mais pour nous en tenir aux faits principaux et acquis, il suffira de dire que le roman de Renart est d’origine essentiellement traditionnelle : et les traditions dont il est sorti sont tantôt savantes et tantôt, le plus souvent, populaires.

2027. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Il n’est pas besoin qu’elle s’arme, pour écraser les petits ennemis qui la menacent : le mépris suffit.

2028. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre II. Boileau Despréaux »

A la tragédie, il donne un ordre d’émotions ; à la comédie, un autre : et la représentation vraie des choses ne lui suffit pas, si on ne donne à cette représentation un agrément ou pathétique ou plaisant.

2029. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Anatole France »

Et même quand l’objet observé est pour toujours arrêté dans ses formes, il suffit que l’esprit où il se reflète soit muable et divers pour qu’il nous soit impossible de répondre d’autre chose que de notre impression du moment.

2030. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Octave Feuillet »

Remarquez que sa faute même ne suffit point à le flétrir à nos yeux, tant nous sentons, malgré tout, de générosité en lui, et tant le châtiment de la faute est effroyable : souvenez vous qu’il en meurt, tout simplement.

2031. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Cependant, on ne lit pas longtemps Marot sans reconnaître la justesse de ce mot d’un contemporain célèbre41 : « L’esprit sert à tout, mais ne suffit à rien. » Cet esprit marotique tourne dans un cercle étroit.

2032. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre douzième. »

Aussi n’ont-ils point eu d’imitateurs ; car, s’il suffit, pour imiter les littérateurs, de leur emprunter leurs procédés, pour imiter les écrivains il faut avoir leur âme, il faut les égaler.

2033. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

Nous qui sommes juges dans un procès fait à un homme de génie, nous ne prenons de ces preuves que ce qu’il en suffit pour donner raison à la vérité contre Voltaire, sans toucher à sa gloire.

2034. (1900) Poètes d’aujourd’hui et poésie de demain (Mercure de France) pp. 321-350

Ils se demandaient où étaient les robes éclatantes qu’elle portait au temps des Romantiques, les colliers et les joyaux qu’avaient ciselés pour elle les bons artisans du Parnasse et, à la voir ainsi enveloppée de voiles mouvants et nombreux, ils pensaient n’avoir devant eux que son ombre vaine, oubliant qu’il suffisait d’écarter ces voiles pour retrouver derrière leurs plis le visage éternel de celle qui ne meurt pas.

2035. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Chansons de Béranger. (Édition nouvelle.) » pp. 286-308

Mais il a pris trop souvent, ce me semble, le mot peuple dans un sens étroit, il l’a pris dans un sens qui est celui de l’opposition et du combat des classes ; il s’est vanté d’être du peuple quand il suffisait de ne pas se vanter du contraire.

2036. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Gil Blas, par Lesage. (Collection Lefèvre.) » pp. 353-375

Les sonnets, les odes et les autres ouvrages qui veulent du sublime, ne s’accommodent pas du simple et du naturel ; c’est l’obscurité qui en fait tout le mérite ; il suffit que le poète croie s’entendre… Nous sommes cinq ou six novateurs hardis qui avons entrepris de changer la langue du blanc au noir ; et nous en viendrons à bout, s’il plaît à Dieu, en dépit de Lope de Vega, de Cervantes… Sachons bien qu’en écrivant ces choses, Lesage avait en vue Fontenelle, Montesquieu peut-être, certainement Voltaire, qu’il trouvait trop recherchés et visant à renchérir sur la langue de Racine, de Corneille, et des illustres devanciers.

2037. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Doué, je l’ai dit, d’une très grande facilité accrue par l’étude, et d’une vaste mémoire, il lui suffit d’une très courte préparation pour donner à sa parole improvisée tout l’air d’un discours médité ; il n’y paraît pas de différence.

2038. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

L’auteur du portrait continue de nous montrer ainsi tous les vices naïfs de sa princesse, toutes ses qualités sans âme et sans lien, sa religion sans piété, sa profusion sans générosité, beaucoup de connaissances sans aucun vrai savoir, « tous les empressements de l’amitié sans en avoir les sentiments », pas le moindre soupçon de la réciprocité et de la sympathie humaine : « On n’a point de conversation avec elle ; elle ne se soucie pas d’être entendue, il lui suffit d’être écoutée. » Et à la voir ainsi se montrer à nu non par franchise, mais parce qu’elle n’a en elle aucun principe d’égards et d’attention pour autrui, Mlle de Launay conclut en citant ce mot qui exprime le résultat de toute son étude, et qu’elle aurait bien trouvé d’elle-même : Elle (la duchesse du Maine) a fait dire à une personne de beaucoup d’esprit que les princes étaient en morale ce que les monstres sont dans la physique ; on voit en eux à découvert la plupart des vices qui sont imperceptibles dans les autres hommes.

2039. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Madame Émile de Girardin. (Poésies. — Élégies. — Napoline. — Cléopâtre. — Lettres parisiennes, etc., etc.) » pp. 384-406

Dans le monde, il suffit d’un de ces jolis vers, d’un de ces jolis mots (l’ingrat !)

2040. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Après 1815, quand la maison de Savoie est rétablie dans son antique héritage, M. de Maistre, à la veille de rentrer dans sa patrie, mais lésé lui-même dans sa fortune et à peu près ruiné dans son patrimoine, ne forme plus que le vœu du patriarche ; il nous laisse voir l’unique fond de son désir au milieu de cet ébranlement de l’Europe, où le volcan ne se ferme d’un côté que pour se rouvrir d’un autre : « Ma famille, mes amis et mes livres suffisent aux jours qui me restent, et je les terminerais gaiement si cette famille ne me donnait pas d’affreux soucis pour l’avenir. » Faisant allusion à cette vivacité qu’il portait volontiers en tout, et dont il ne prétend pas s’excuser : Cependant, écrivait-il à un ami, si j’avais le plaisir de vivre quelque temps avec vous sous le même toit, vous ne seriez pas peu surpris de reconnaître en moi le roi des paresseux, ennemi de toute affaire, ami du cabinet, de la chaise longue, et doux même jusqu’à la faiblesse inclusivement !

2041. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La Harpe. Anecdotes. » pp. 123-144

Jamais, par exemple, à son propos on n’oubliera ces vers de l’Apologie de Gilbert, lorsque ce poète de verve et d’avenir, se justifiant de nommer les masques par leur nom, s’écriait : Si j’évoque jamais du fond de son journal Des sophistes du temps l’adulateur banal ; Lorsque son nom suffit pour exciter le rire, Dois-je, au lieu de La Harpe, obscurément écrire : C’est ce petit rimeur de tant de prix enflé, Qui sifflé pour ses vers, pour sa prose sifflé, Tout meurtri des faux pas de sa muse tragique, Tomba de chute en chute au trône académique ?

2042. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

» Pour peindre ce public français de la première représentation de Figaro et son pêle-mêle d’enthousiasme flottant, deux faits suffisent : lorsque le héros de nos flottes, le bailli de Suffren, entra dans la salle, il fut applaudi avec transport ; lorsqu’un moment après, la charmante actrice Mme Dugazon, relevant d’une maladie dont on savait trop la cause, parut sur le devant de sa loge, on l’applaudit également.

2043. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Il suffit de remarquer qu’il ne les excluait pas.

2044. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

Ayant vu en Orient les effets désastreux du despotisme, il crut qu’il suffisait de la pure et simple liberté pour que tout fût bien.

2045. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

Je n’ai point à discuter le fond des choses : il suffit que la majorité des hommes en ces matières sente autrement que Volney pour que sa manière de voir, qui tend à s’imposer, soit fausse moralement.

2046. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre I. Après la mort — Shakespeare — L’Angleterre »

Partout, dans toutes les rues, sur toutes les places, à chaque pas, de gigantesques points d’admiration sous forme de colonnes : colonne au duc d’York, qui devrait, celle-là, être faite en points d’interrogation ; colonne à Nelson, montrée du doigt par le spectre de Caracciolo ; colonne à Wellington déjà nommé ; colonnes pour tout le monde ; il suffit d’avoir un peu traîné un sabre.

2047. (1694) Des ouvrages de l’esprit

Si je me trompe, et qu’ils n’aient contribué en rien à cette fête si superbe, si galante, si longtemps soutenue, et où un seul a suffi pour le projet et pour la dépense, j’admire deux choses, la tranquillité et le flegme de celui qui a tout remué, comme l’embarras et l’action de ceux qui n’ont rien fait.

2048. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Première partie. Écoles et manifestes » pp. 13-41

Il faut savoir regarder, comprendre et sentir pour être un écrivain, mais cela ne suffit pas.

2049. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Notes et éclaircissements. [Œuvres complètes, tome XII] »

Mais cela ne suffit pas pour prouver que la profession de la morale fût essentiellement liée au polythéisme, quand tout démontre au contraire qu’elle en était séparée.

2050. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre X. Des Livres nécessaires pour l’étude de la Langue Françoise. » pp. 270-314

Pour bien parler une langue, il ne suffit pas de consulter les Dictionnaires, il faut lire les différentes observations que les bons écrivains ont publiées.

2051. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Loutherbourg » pp. 258-274

Sa bibliothèque est double : l’une, des plus belles éditions qu’il respecte au point de ne les jamais ouvrir, il lui suffit de les avoir et de les montrer ; l’autre, d’éditions communes qu’il lit, qu’il prête et qu’on fatigue tant qu’on veut.

2052. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 35, de la mécanique de la poësie qui ne regarde les mots que comme de simples sons. Avantages des poetes qui ont composé en latin sur ceux qui composent en françois » pp. 296-339

Leur unique ressource seroit de consulter l’oreille ; mais la meilleure oreille ne suffit pas toûjours, principalement lorsque pour parler ainsi, on ne l’a point cultivée.

2053. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Nisard » pp. 81-110

Désiré Nisard, dans ce célèbre manifeste, avait pris parti pour la réflexion, l’étude, la volonté inspirée, contre l’improvisation, la précipitation, le gaspillage ; parce qu’il s’était rangé du côté de la conscience littéraire contre les succès à tout prix et au rabais ; parce que, là comme dans ses autres écrits, il n’avait pas sacrifié toutes les qualités de l’écrivain à ce pittoresque que nous ne haïssons pas, mais qui avait positivement alors tourné la tête à toute la littérature ; parce qu’il honorait la tradition, qu’on ne respectait plus et même qu’on insultait très bien ; parce qu’il ne concevait pas la Critique en dehors de la morale chrétienne, quand le Beau seul suffit aux âmes, disaient les délicieux Esthétiques de ce temps ; parce qu’enfin il avait en lui la faiblesse la touchante faiblesse du xviie  siècle au lieu d’avoir l’orgueil insensé et insupportable du xixe , il fut bientôt classé, par les ardents et les rutilants de ce siècle-là, parmi les effacés, les chagrins, les retardataires, les professeurs d’ailleurs, les pédantisants !

2054. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Il me suffit que la Révolution soit blessée par ce livre et qu’elle ne puisse s’en relever… Est-ce que l’éclat de la sandale d’or de l’Archange ajoutait à la force du pied terrible qui l’appuyait sur le dos de l’Immense Rebelle terrassé ?

2055. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Amédée Thierry ne suffit pas à ces grandeurs.

2056. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Il n’avait, lui, — mais cela suffit bien !

2057. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre IV. Le rêve »

Qu’il me suffise de dire, pour répondre à la question posée tout à l’heure, que la puissance informatrice des matériaux transmis par les organes des sens, la puissance qui convertit en objets précis et déterminés les vagues impressions venues de l’œil, de l’oreille, de toute la surface et de tout l’intérieur du corps, c’est le souvenir.

2058. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVIII. Des obstacles qui avaient retardé l’éloquence parmi nous ; de sa renaissance, de sa marche et de ses progrès. »

Mais pour créer des orateurs, une langue, même perfectionnée, ne suffit point.

2059. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

— Non pas, répond Nietzsche, et il suffit de lire aussi bien Platon qu’Aristote pour voir comment les Grecs entendaient la tragédie, au fond, même quand ils n’étaient pas d’accord. […] L’homme qui sait le bien ne le fait pas, parce qu’il se contente de le savoir et que cela suffit à son amour-propre et parce que, à savoir le bien et à se rendre compte qu’il le sait, il croit le faire et avoir accompli et consommé son devoir. […] Il suffit de lire le De officiis de Cicéron, livre admirable du reste, encore que déjà il soit du commencement de la décadence, pour bien comprendre qu’un Romain ne connaît de Revoirs qu’envers la patrie. […] Il suffit pour s’entendre ou c’est le chemin de s’accorder. — Et puis, comme dit Nietzsche avec sa finesse habituelle, « on a dû d’abord beaucoup germaniser et barbariser tout cela ». […] Dieu, la plus haute puissance, Cela suffit.

2060. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Eugène Gandar »

About. » Et rendant compte de ses occupations, de ses promenades parmi les ruines, de ses paisibles lectures dans la petite bibliothèque de l’École, de tout ce qui ne lui laissait guère à désirer d’autres distractions : « Il me suffit, ajoutait-il, de quelques instants passés par intervalle chez M.  […] Cela suffît à ma conscience, « Savonarole m’a très vivement préoccupé : c’est trop peu dire, il obsédait ma pensée… »   « (Au même. — 22 juillet 1860.)… J’ai dit et pensé sur cette Renaissance italienne une foule de choses qui vaudraient peut-être la peine d’être conservées.

2061. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. de Rémusat (passé et présent, mélanges) »

Mais, malgré le soin de l’élégance, de la propriété, de la rime, jamais le poète ne rentre complètement dans son sang-froid ; l’émotion première persiste ; l’air sans cesse fredonné, le refrain sans cesse redit, suffisent pour la soutenir, et la chanson, eût-elle coûté tout un jour de travail, semble toujours faite d’un seul jet. […] Il suffisait, pour en jouir, de passer deux fois la frontière ; la pensée qui sortait manuscrite revenait imprimée dans son pays natal.

2062. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

» Il se convertit donc, premièrement, en haine de cette incertitude, parce que la spéculation philosophique, dont il est d’ailleurs peu capable, ne lui suffit pas ; parce qu’il lui faut une règle absolue de ses actes, et dont la sanction soit en dehors de lui : bref, il se convertit pour avoir la paix de la conscience. […] La commune et la corporation sont nécessairement propriétaires, et la loi les oblige d’avoir, partie en fonds immobiliers, partie en rentes, au moins de quoi suffire à un établissement hospitalier, selon leur importance, etc.

2063. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Discours prononcé à la société des visiteurs des pauvres. » pp. 230-304

Et Catherine suffisait si bien à nous garantir la moralité de l’auteur ! […] Voilà tout. » Et il est vrai que, à voir en quoi consiste le rôle de beaucoup de pasteurs, je me suis souvent dit que je suffirais à le remplir, et que, de prêcher tous les dimanches la morale des honnêtes gens et la philosophie de Jules Simon, cela n’exige assurément pas une consécration spéciale.

2064. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre cinquième. Le réalisme. — Le trivialisme et les moyens d’y échapper. »

Les Indiens, pour se rappeler les grands événements, faisaient des nœuds à une corde, et ces nœuds disposés de mille manières rappelaient par association un passé lointain ; en nous aussi se trouvent des points où tout vient se rattacher et se nouer, de telle sorte qu’il nous suffit de suivre des yeux ces séries de nœuds intérieurs pour retrouver et revoir l’une après l’autre toutes les époques de notre vie. […] Pour comprendre comme Pascal s’était fortement pénétré du style biblique il suffit de lire les traductions qu’il a faites dans les Pensées, de divers passages des prophètes, surtout celles du chapitre cxix d’Isaïe : « Ecoutez, peuples éloignés. » C’est, dit M. 

2065. (1880) Goethe et Diderot « Gœthe »

Eh bien, voyageur, il l’a été, comme il a été tout, dans les proportions de sa médiocrité naturelle, dans ces proportions chétives de curiosité enfantine ou sénile et de baguenauderie qui suffisaient à ses facultés d’érudition, lesquelles ne bouillirent ni ne jetèrent jamais par-dessus bords, mais toujours mijotèrent ! […] Il suffit de parcourir Newton pour lui répondre et pour l’anéantir !

2066. (1866) Cours familier de littérature. XXII « CXXXIe entretien. Littérature russe. Ivan Tourgueneff » pp. 237-315

À cette heure-là, il s’asseyait à table d’un air si heureux et avec un si bon appétit, que son aspect seul eût suffi pour réjouir l’humeur gastronomique d’un Allemand. […] Rien en elle pourtant n’était d’une beauté rare, mais il suffisait de la voir et de l’entendre pour se dire aussitôt : voilà une excellente personne. […] Sa femme ne suffisait plus pour l’occuper.

2067. (1891) Lettres de Marie Bashkirtseff

Comme moi il suffit d’un mot pour que je m’imagine tout un roman, dix romans, vingt romans, et tout cela en quelques minutes. […] Il suffit d’analyser une seule goutte d’eau pour connaître les propriétés de toute la source. […] En partant du golfe d’Otrante, Nous étions trente, Mais en arrivant à Cadix, Nous n’étions que dix… Un seul me suffira. […] une seule suffit pour vicier l’air de tout un atelier.

2068. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Louis XIV, en lui donnant l’ordre de partir, lui a dit expressément « qu’il voudrait bien inspirer à ce qui est à la tête des armées l’audace naturelle à quiconque mène des Français » ; et ce mot-là a plus que suffi pour l’électriser lui-même.

2069. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure »

Il ne suffit pas de dire : « Cette femme est une peste », pour avoir le droit de la chasser.

2070. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

Ce qui suffisait strictement dans les conditions ordinaires les plus simples, une fois dépassé, ne se regagne pas, et dans cette vie de prolétaire au jour le jour, une fois grevé et obéré, on ne s’en tire plus.

2071. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [IV] »

Il se croyait plus résolu intérieurement qu’il ne l’était : il eût suffi jusqu’au dernier moment sans doute d’un retour de justice pour l’arrêter et faire rebrousser le cours de ses pensées.

2072. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres mêlées de Saint-Évremond »

Ce qu’il a dit en maint endroit de M. d’Aubigny, et le regret qu’il a exprimé de cette perte irréparable, suffit à témoigner de sa sensibilité.

2073. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Sa position est allée s’étendant de jour en jour : député, directeur au ministère de l’Instruction publique, maître de conférences à l’École normale et, en dernier lieu, professeur au Collége de France, il a pu suffire à tant d’emplois divers.

2074. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Il resterait toujours à savoir si ce procédé attentif et curieux, employé à l’exclusion de tout autre, est dramatique dans le sens absolu du mot ; et pour notre part nous ne le croyons pas : mais il suffisait, convenons-en, à la société d’alors, qui, dans son oisiveté polie, ne réclamait pas un drame plus agité, plus orageux, plus transportant, pour parler comme madame de Sévigné, et qui s’en tenait volontiers à Bérénice, en attendant Phèdre, le chef-d’œuvre du genre.

2075. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « L’abbé Prévost »

» L’étude en effet, qui, suivant sa propre expression, a des douceurs, mais mélancoliques et toujours uniformes ; ce genre d’étude surtout, héritage démembré des Mabillon, austère, interminable, monotone comme une pénitence, sans mélange d’invention et de grâces, pouvait suffire uniquement à la vie d’un dom Martenne, non à celle de dom Prévost.

2076. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

Un seul personnage ne pouvait suffire à la célérité et aux revirements toujours justes de son esprit mobile, empressé, accueillant.

2077. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

«  Sainte-Beuve. »   Je ne me crois pas en droit de produire la réponse textuelle de M. le Président du Sénat : qu’il me suffise de dire qu’elle était non-seulement extrêmement polie, mais bienveillante, et que M. le Président Troplong m’assurait que, lorsque ces questions de doctrine se représenteraient par leur côté légal et politique, je serais autorisé à faire entendre ma voix à mon tour et à mon rang de parole.

2078. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Introduction »

Est-ce dans un temps où il suffit de vivre pour être entraîné par le mouvement universel, où jusqu’au sein même de la tombe le repos peut être troublé, les morts jugés de nouveau, et leurs urnes populaires tour à tour admises ou rejetées dans le temple où les factions croyaient donner l’immortalité ?

2079. (1868) Cours familier de littérature. XXV « CXLIXe entretien. De la monarchie littéraire & artistique ou les Médicis (suite) »

Aussitôt que Laurent eut cessé de vivre, à peine pourrais-je vous dire avec quelle humanité et quelle gravité notre Pierre reçut tous les citoyens qui affluaient dans sa demeure ; comme il fut convenable et même caressant dans les diverses réponses qu’il fit aux condoléances, aux consolations et aux offres de service ; et bientôt quelle adresse, quelle sollicitude il montra dans l’arrangement des affaires de famille ; comment il secourut et releva tous ses amis frappés par ce grand malheur ; comment le moindre d’entre eux, celui-là même qui lui avait fait de l’opposition dans l’adversité, fut relevé dans son abattement, ravivé, encouragé ; comment, dans le gouvernement de la république, il suffit à toutes choses, au temps, au lieu, aux personnes, et ne se relâcha en rien.

2080. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

ses trente-cinq images se dressent presque en même temps dans sa pensée : elles sautent d’elles-mêmes sur les mots qu’il leur faut, sur les mots dont son cerveau est l’ample ménagerie, et les chevauchent éperdument ; et c’est un flot rapide et intarissable, un torrent auquel rien ne résiste… Et les trente-cinq images sur Marat ne lui suffisent pas.

2081. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Ils ne devinent pas le secret, ils n’y essayent même pas ; il leur suffit de se croire de ceux auxquels on donne de ces secrets-là à deviner.

2082. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

Il les flatte plus qu’il ne les aime, et pour plus d’un il suffit de tourner la page pour voir l’égratignure à la suite de la caresse.

2083. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

C’est une erreur ; cela prouve un affaiblissement de l’esprit philosophique, de la spéculation, de la littérature ; cela prouve que l’on ne comprend plus la valeur et la dignité de l’intelligence, puisqu’elle ne suffit plus à occuper les esprits distingués ; cela prouve enfin que le règne a passé de l’esprit et de la doctrine à l’intrigue et à la petite activité.

2084. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Elle suffirait à l’éloigner d’un mariage devenu suspect.

/ 2298