Il y a un esprit et une volonté qui les conçoivent et qui les écrivent.
Les uns créent et les autres conçoivent… Et c’est bien arrangé !
On se demande en effet si l’acte pouvait ou ne pouvait pas être prévu, étant donné l’ensemble de ses conditions ; et soit qu’on l’affirme, soit qu’on le nie, on admet que cet ensemble de conditions pouvait se concevoir comme donné à l’avance : ce qui revient, ainsi que nous l’avons montré, à traiter la durée comme une chose homogène et les intensités comme des grandeurs.
Je ne dis pas de la volonté publique, parce que, pour vouloir, il faut concevoir. […] Il est à plaindre, non à imiter ; car l’œuvre d’art doit être un plaisir, une purgation de l’âme et du corps, et (même tragique) conçue dans la joie. […] Il apparaît aussi qu’elles ont finalement entraîné leur auteur dans une direction toute différente de celle qu’il avait conçue. […] Il conçut que, pour faire le bonheur des Français, il fallait extirper Dieu de l’enseignement et aussi de la charité publique, des hôpitaux comme des écoles. […] Ranvier, grand esprit à la fois distrait et modeste, en avait conçu une sorte de misanthropie.
Les écrivains qui ont conçu ces types les ont bien marqués au sceau de leur génie particulier. […] La raison de ce caractère commun à tant de romans est aisée à concevoir. […] L’artiste tel que le concevait Gautier, le savant tel que le concevait Taine, devaient être également impersonnels. […] Leurs livres se mouvaient dans la psychologie individuelle, et même les auteurs ne concevaient guère qu’il y en eût une autre. […] Il est difficile de le concevoir équitable et lucide.
ne permettez pas que cette félicité si longtemps attendue — et que j’ai encore peine à concevoir — s’évanouisse pour moi, vaine et trois fois douloureuse, — comme l’ombre fugitive d’un ami mort ! […] Boutmy et Vinet, et nous nous associons de toutes nos sympathies à l’esprit prudent et pratique dans lequel ils la conçoivent. […] Telles sont les vues d’ensemble d’après lesquelles a été conçue l’École des Sciences politiques. […] Ribot, l’hérédité ainsi conçue est la loi stricte ; s’il y a des exceptions, elles sont l’œuvre de l’accident. […] Presque toujours il semble qu’il ait écrit par occasion, pour s’amuser, pour s’occuper, sans subir l’empire d’une idée, sans concevoir un grand ensemble, sans se subordonner à une œuvre.
La patrie pour le Français, c’est donc le sol natal ; en dehors de ce sentiment, il ne conçoit rien qu’un certain cosmopolitisme vague et qu’une certaine idée universelle d’humanité. […] L’intelligence de l’Anglais est mal à l’aise dans les théories et ne conçoit bien une idée que lorsqu’elle est revêtue d’un corps. […] Lorsqu’elle fait effort pour se le représenter elle le conçoit comme l’idéal du pédant et le peint à peu près avec les mêmes couleurs enfantines que certain personnage de Goethe employait pour peindre l’industrie. […] Conçu dans des heures troubles et terribles, comme aurait dit M. […] On conçoit vraiment, sans beaucoup d’imagination, qu’elle lui fit mal la vue de cet acier qui avait été si cruel à sa famille.
Et là-dessus la revue dont je parle a envoyé un petit questionnaire à ses abonnés à peu près conçu comme suit : Shakespeare sait-il composer une pièce ? […] Il conçoit fortement des hommes qui ont tel caractère et qui agiront, sans doute, d’après leur caractère et en raison des circonstances où se heurtera leur caractère et il les laisse agir ainsi. […] Mohr et déjà sur le chemin de concevoir quelque rancune contre Mme Schoppe. […] Je crois que George Sand en conçut un assez vif chagrin et que c’est pour cela qu’elle retourna à ses romans socialistes pour un certain nombre d’années. […] Il conçoit un idéal et ne le saisit jamais.
La tragédie était conçue pour n’avoir pas de mise en scène et pour n’avoir quasi point de costumes spéciaux ; et la comédie était conçue pour être jouée dans les costumes du temps et dans l’ameublement du temps ; seulement on ne pouvait pas matériellement lui donner cet ameublement. […] Les rois ont peine à concevoir les malheurs de la vie commune comme un exemple effrayant pour eux. […] On conçoit que les auteurs de tragédies diligemment et patiemment confectionnées fussent furieux et infiniment et justement jaloux. […] Elle n’est même pas conçue. […] L’identité de ridicule, dans mes personnages, était une nécessité de mon sujet tel que je l’avais conçu.
Il ne conçoit pas un drame, il conçoit une situation, de sorte que le drame est vide d’intérêt tant que la situation n’a pas été amenée, et qu’il est terminé aussitôt qu’elle s’est présentée, fût-ce même dès la première scène. […] L’idée en est nette, le plan assez bien conçu ; mais l’exécution en est bien inférieure à ce qu’elle pouvait être. […] Acceptons cependant le roman tel que l’auteur l’a conçu. […] Conçus sans prétention, ils sont nés sans effort. […] Pauvrement conçue, la pièce a été composée sans souci aucun de la variété.
Il faudrait y voir, au contraire, l’histoire même, conçue d’inspiration, exécutée, sans égard pour les règles et les modèles antérieurs, avec une verve indigène. […] Il conçoit la littérature contemporaine comme une tragédie en cinq actes, mêlée de parades et de chants patriotiques, avec Février pour dénouement. […] Barrière et celui qu’a conçu M. […] Il conçoit la Régence uniquement comme un système de réaction à outrance contre le règne de Louis XIV. […] Il a ceci d’excellent pour nous, qu’il a conçu l’art avant tout comme un amusement.
Ainsi disposé, il aimait à concevoir Dieu comme le chef raisonnable du monde ; il transformait les accidents et les nécessités en calculs et en directions ; il voyait l’ordre et la Providence dans le conflit des choses, et sentait autour de lui la sagesse qu’il tâchait de mettre en lui-même. […] Il conçoit la règle et discipline sa conduite ; il s’écarte de la vie excessive et s’établit dans la vie sensée ; il fuit la vie corporelle et prescrit la vie morale. […] En effet, les classiques des deux derniers siècles n’ont jamais conçu l’esprit humain que comme cultivé.
On rédigea sur son avis le décret du sénat, conçu dans les termes les plus forts et les plus expressifs, dont le résultat était que, toutes les fois qu’il s’était agi de l’intérêt du peuple romain, jamais la sagesse ni la fidélité du sénat n’avaient manqué à la république. […] Ce qui pense en nous, ce qui sent, ce qui veut, ce qui nous meut, est donc nécessairement incorruptible et éternel ; nous ne pouvons pas même concevoir l’essence divine autrement que nous ne concevons celle de notre âme, c’est-à-dire comme quelque chose d’absolument séparé et indépendant des sens, comme une substance spirituelle qui connaît et qui meut tout.
Thucydide, alors âgé de quinze ans, assistait à cette lecture, et c’est là que ce jeune homme, déjà lettré, conçut la pensée d’écrire lui-même. […] — Puisque l’enfant a survécu, répondirent les mages ; puisque, par un pur hasard, il a fait les fonctions de roi, vous pouvez actuellement vous rassurer, et votre esprit ne doit plus concevoir d’inquiétude. […] Je resterai ici, et j’aurai soin de veiller à ce qu’il ne manque rien à nos hôtes. » Amyntas comprit, par ces mots, qu’Alexandre avait conçu quelque projet extraordinaire et lui répondit : « Vos discours sont d’un homme que la colère enflamme, et je vois très-bien que vous cherchez à m’écarter pour exécuter un dessein que vous méditez ; mais, je vous en conjure, ne risquez rien contre de tels hommes, si vous ne voulez nous perdre : résignez-vous, et ne vous opposez pas à ce qu’ils voudront faire ; cependant, je me rends à votre avis, et je vais m’éloigner. » « Amyntas s’étant en effet retiré après cette prière, Alexandre dit aux Perses : « Ces femmes sont à vous, soit que vous souhaitiez les avoir toutes à votre disposition, soit que vous choisissiez seulement quelques-unes entre elles ; veuillez seulement nous faire connaître vos intentions.
Tel est le propre du sublime, que l’esprit ne conçoit rien au-delà dans l’ordre des choses qui sont de l’homme, et c’est pour en exprimer le sentiment qu’il a imaginé le mot de sublime, le plus haut de la langue des choses humaines, et le plus près de la langue des choses divines. […] De ces deux manières de concevoir le poème dramatique, quelle est la plus vraie ? […] S’il arrive qu’on n’y puisse faire entrer à la fois la vérité locale et la vérité telle que la conçoit un grand poète dans un grand siècle, il faut savoir se passer de la vérité locale.
chez l’animal lui-même, de vagues images du passé débordent peut-être la perception présente ; on concevrait même que son passé tout entier fût virtuellement dessiné dans sa conscience ; mais ce passé ne l’intéresse pas assez pour le détacher du présent qui le fascine et sa reconnaissance doit être plutôt vécue que pensée. […] On peut concevoir deux manières de dessiner. […] Mais dans le cas de l’audition mentale, — le seul qui nous occupe, — la localisation de la fonction paraît certaine puisqu’une lésion déterminée du lobe temporal l’abolit, et d’autre part nous avons exposé les raisons qui font que nous ne saurions admettre ni même concevoir des résidus d’images déposés dans une région de la substance cérébrale.
Ce n’est pas par l’intelligence, ou en tout cas avec l’intelligence seule, qu’il pourrait le faire : celle-ci irait plutôt en sens inverse ; elle a une destination spéciale et, lorsqu’elle s’élève dans ses spéculations, elle nous fait tout au plus concevoir des possibilités, elle ne touche pas une réalité. […] Cela se concevrait bien dans une hypothèse telle que la nôtre : l’homme vit naturellement en société, et, par l’effet d’une fonction naturelle, que nous avons appelée fabulatrice, il projette autour de lui des êtres fantasmatiques qui vivent d’une vie analogue à la sienne, plus haute que la sienne, solidaire de la sienne ; telle est la religion que nous tenons pour naturelle. […] Toutefois il est difficile de concevoir un amour agissant, qui ne s’adresserait à rien.
Il est, d’ordinaire, si inhabile à les peindre qu’il semble incapable de les concevoir. […] Comment il conçoit. […] L’artiste. — Comment il conçoit. […] On compose toujours comme on conçoit. […] On conçoit combien la chose est difficile.
Il y a dans chaque esprit une action élémentaire qui, incessamment répétée, compose sa trame et lui donne son tour : à la ville ou dans les champs, cultivé ou inculte, enfant ou vieillard, il passe sa vie et emploie sa force à concevoir un événement ou un objet ; c’est là sa démarche originelle et perpétuelle, et il a beau changer de terrain, revenir, avancer, allonger et varier sa course, tout son mouvement n’est jamais qu’une suite de ces pas joints bout à bout ; en sorte que la moindre altération dans la grandeur, la promptitude ou la sûreté de l’enjambée primitive transforme et régit toute la course, comme dans un arbre la structure du premier bourgeon dispose tout le feuillage et gouverne toute la végétation88. Quand le Français conçoit un événement ou un objet, il le conçoit vite et distinctement ; nul trouble intérieur, nulle fermentation préalable d’idées confuses et violentes qui, à la fin concentrées et élaborées, fassent éruption par un cri. […] Elle reste sèche ; ils conçoivent une à une les parties de l’objet sans jamais les rassembler, comme les Saxons, en une brusque demi-vision passionnée et lumineuse.
C’est au médecin à ne pas se tromper ; car tel régime étroitement conçu, tel remède appliqué hors de propos, révolterait le malade, le tuerait ou aggraverait son mal. […] On ne conçoit pas que Napoléon III se soit fait une si complète illusion sur la solidité de l’édifice qu’il avait fait lui-même d’argile. […] « Je ne conçois qu’une issue à ces hésitations, qui tuent le pays ; c’est un grand acte d’autorité nationale. […] Je voudrais que, dans les élections primaires, l’homme marié votât pour sa femme (en d’autres termes, que sa voix comptât pour deux ), que le père votât pour ses enfants mineurs ; je concevrais même la mère, la sœur confiant leur pouvoir à un fils, à un frère majeurs.
Dans les premiers temps de son séjour à Paris, Fontanes travailla beaucoup, et il conçut, ébaucha ou même exécuta dès lors presque tous les ouvrages poétiques qu’il n’a publiés que plus tard et successivement. […] Des ébauches de tragédies qu’il conçut alors, Thrasybule, Thamar, Mazaniel, n’eurent pas de suite et n’aboutirent qu’à quelques scènes. […] « Ainsi, je ne serais point étonné que vous eussiez conçu le projet hardi de planter à la fois l’étendard français sur les murs du Vatican et sur les tours du Sérail, dans la capitale des États chrétiens et dans celle de Mahomet. […] Cela se conçoit : il était connu par sa propriété de plume et sa mesure ; on s’adressait à lui presque nécessairement, et il rendait à la politique, dans cette crise, des services de littérateur, services anonymes, inoffensifs, désintéressés, et auxquels il n’attachait lui-même aucune importance. […] — En feuilletant ces livres de Manilius, où les noms des constellations amènent d’intéressants épisodes, comme celui d’Andromède, et où les rêveries astrologiques n’étouffent pas tant de beaux passages inspirés par le panthéisme, par l’idée de la parenté de l’homme avec le ciel et par la conscience sublime des hauts mystères, on conçoit un grand poëme dont, en effet, celui de Fontanes ne serait, que l’essai.
Reynaud, grâce à sa familiarité avec les lettres européennes, et non moins au travail critique de quelques devanciers qui lui ont assez fortement mâché la besogne, la conçoit et la définit sous des termes beaucoup plus précis. […] On conçoit l’intime contradiction de cet être. […] Je cherche sous quelle nuance subtile se laisse concevoir chez cet esprit de tant de supériorité et de clairvoyance la perfide forfaiture dont on l’accuse. […] Si quelque jour, dans son salon, un poète lit des vers libres, il lui suffira de se référer au « principe de contradiction » que son bon maître lui a recommandé entre tous, pour concevoir que des vers qui sont libres ne sont pas des vers. […] La lecture me la fit mieux concevoir en me dévoilant la construction de l’édifice.
Le lecteur peut facilement concevoir ce qui met l’abbé Brémond aux antipodes d’André Breton, Drieu La Rochelle d’André Maurois. […] Istrati qui ne pouvait soupçonner ces mystères de la publicité, fut naturellement persuadé que Romain Rolland avait refusé sa lettre, et il en conçut l’amertume que l’on pense. […] Il doit concevoir la cité comme une extension de l’amitié. […] Il faut poursuivre cette étude afin de concevoir tout ce qu’on peut attendre du surréalisme. […] Un humoriste anglo-saxon s’y allie avec un romantique allemand qui, selon Novalis, « conçoit des récits sans autre lien que celui de l’association des idées comme dans les rêves ».
» Le rêve de Wagner, interprété sur un théâtre, par des cabotins, par des décors et des costumes (« qui en sont l’extériorisation »), échoue à donner l’impression d’un art absolu, complet ; tel qu’il fut conçu, le drame wagnérien est « impossible ». […] Là, il y a la page des dentellières, qui est un des plus beaux poèmes des récentes littératures, du style le plus pur, du symbolisme le plus élégant ; elle signifie que, de même que les dentellières « font œuvre d’artistes suprêmes et n’en ont pas le sentiment », si, en faisant œuvre de vie, nous faisons œuvre de beauté, « cette beauté, ce n’est pas nous qui l’avons conçue ». […] On dit que la sociologie est une science et que l’histoire est un vaste cours de logique ; je crois plutôt que la logique est une des catégories de notre esprit et que nous ne pouvons concevoir que logiquement un enchevêtrement de faits : c’est pourquoi l’histoire se plie si volontiers à monter sur le théâtre qui est le paradis de la logique. […] Mazel pour la simplification explique aussi son goût pour le théâtre, conçu tel qu’une refonte des grands événements ou des grandes périodes historiques. […] Le Socialiste en paletot et le Républicain en redingote lui inspirent un identique mépris et il ne conçoit guère comment les malheureux, doucement leurrés par les politiciens gras, peuvent encore écouter sans rire la honteuse promesse d’un bonheur illusoire autant que futur.
La synecdoque Le terme de synecdoque signifie compréhension, conception : en éfet dans la synecdoque on fait concevoir à l’esprit plus ou moins que le mot dont on se sert ne signifie dans le sens propre. […] Ainsi lorsqu’il ne s’entend que des homes, c’est une synecdoque du genre, c’est-à-dire, que sous le nom du genre, on ne conçoit, on n’exprime qu’une espèce particulière ; on restraint le mot générique à la simple signification d’un mot qui ne marque qu’une espèce. […] Come il n’y a rien de plus afreux à concevoir, que d’imaginer quelqu’un qui s’emporte jusqu’à des imprécations sacrilèges contre Dieu même ; au lieu du terme de maudire, on a mis le contraire par euphémisme. […] Les impressions que nous recevons des objets, et les réflexions que nous fesons sur ces impressions par l’usage de la vie et par la méditation, sont la source de toutes nos idées, c’est-à-dire, de toutes les afections de notre esprit quand il conçoit quelque chose, de quelque manière qu’il la conçoive : c’est ainsi que l’idée de Dieu nous vient par les créatures qui nous anoncent son existance et ses perfections : (…). […] En un mot, conoissoit-il alors ce qu’il ne conoissoit pas encore, et ce qui lui a paru nouveau dans la suite, quelque facilité qu’il ait eue à le concevoir ?
Cette philosophie, à défaut d’autre utilité, fournit aux hommes courageux la satisfaction hautaine de déchirer le manteau dont se couvre la mystérieuse et hypocrite cruauté du destin. » Souvent, cette « philosophie » le tourmentait comme un mal positif : il se plaint de sentir « le vide de l’existence comme si ç’avait été une chose réelle qui pesait lourdement sur son âme » ; le « néant des choses » lui « était toujours présent comme un fantôme affreux » ; il ne concevait pas qu’on pût « s’assujettir aux soins journaliers que la vie exige, en étant bien sûr que ces soins n’aboutissent jamais à rien ». […] Avec tous les trois, avec aussi les artistes moins importants ou moins significatifs qui les entourent, nous sommes aussi loin que possible de l’art pur, tel que le conçoivent les réalistes modernes, qui ne pensent qu’à représenter des objets ; tel que le concevaient les artistes de la renaissance qui ne pensaient qu’à reproduire de beaux corps ; et, à ce point de vue, ils se rattachent directement aux primitifs, bien plus que par certaines imitations plus ou moins réussies de procédés techniques, comme l’acuité des couleurs et la netteté du dessin. […] Leur effort collectif était en telle opposition avec le mouvement général qu’on a commencé par les trouver ridicules ; puis, comme toujours les hommes qui ont le courage de concevoir la beauté, ils ont fini par rallier un certain nombre de suffrages, dont la distinction pouvait consoler du petit nombre ; le grand public est venu à son tour, comme toujours également, apportant en ces matières plus de bonne volonté que de discernement, et on a vu naître les exagérations esthètes dont il serait injuste de rendre les préraphaélites responsables ; enfin, l’équilibre s’est établi et l’on peut se rendre compte de la place qu’occupera, dans l’histoire de l’art, le mouvement dont les trois peintres que nous avons étudiés sont les représentants les plus complets. […] Pas un seul n’a réalisé les brillantes espérances qu’il avait fait concevoir. […] Certainement, l’expérience et l’étude ont dissipé bien des illusions de mon jeune âge, ou modéré l’exaltation de mes sentiments et fait concevoir une grande indulgence pour les opinions différant des miennes et pour les systèmes politiques qui ne sont pas conformes à mes principes.
L’œil de l’artiste voyait, son cerveau concevait, son imagination créait, mais la main du tisserand avait aussi son rôle dans l’œuvre merveilleuse. […] Il fallait aussi trouver un thème nouveau dans la relation des sexes, conçue sous une forme naturelle, simple et saine, et M. […] Il est difficile de donner par la simple citation une idée adéquate d’une œuvre aussi considérable, achevée avec autant de perfection qu’elle a été conçue. […] cette doctrine mystique pareille à un cauchemar, conçue dans une crise de fièvre, n’est plus étudiée. […] C’est le plus intéressant, parce qu’il est l’œuvre d’un homme qui parle avec la grande autorité que donne la noble réalisation de choses noblement conçues.
Sérieusement, ç’a été une idée heureuse et bien conçue, d’embrasser un groupe naturel, un groupe de famille, qui offre à la fois des traits frappants de ressemblance et une agréable variété. […] Les paroles et la musique sont de M. le duc de Nivernais… Pour faire concevoir le charme de ce joli petit ouvrage, il faudrait l’avoir vu représenter avec tout l’intérêt qu’inspiraient la présence du prince et celle de l’auteur.
La raison raisonnante ne concevait pas de pareilles figures ; pour les faire rentrer dans son cadre rectiligne, il fallait les réduire et les refaire ; le Macbeth de Shakespeare devenait celui de Ducis, et le Mahomet du Coran, celui de Voltaire. […] On n’imaginait pas la structure de son esprit encore primitif, la rareté et la ténacité de ses idées, l’étroitesse de sa vie routinière, machinale, livrée au travail manuel, absorbée par le souci du pain quotidien, confinée dans les limites de l’horizon visible, son attachement au saint local, aux rites, au prêtre, ses rancunes profondes, sa défiance invétérée, sa crédulité fondée sur l’imagination, son incapacité de concevoir le droit abstrait et les événements publics, le sourd travail par lequel les nouvelles politiques se transformaient dans sa tête en contes de revenant ou de nourrice, ses affolements contagieux pareils à ceux des moutons, ses fureurs aveugles pareilles à celle d’un taureau, et tous ces traits de caractère que la Révolution allait mettre au jour.
Tout homme que je rencontre, et encore plus toute femme, croirait manquer au plus indispensable des devoirs, si elle ne m’adressait un long et ingénieux discours à ma gloire. » Présenté à Versailles, le futur Louis XVI âgé de dix ans, le futur Louis XVIII âgé de huit ans et le futur Charles X âgé de quatre ans, lui récitent chacun un compliment sur son livre Je n’ai pas besoin de conter le retour de Voltaire, son triomphe, l’Académie en corps venant le recevoir, sa voiture arrêtée par la foule, les rues comblées, les fenêtres, les escaliers et les balcons chargés d’admirateurs, au théâtre une salle enivrée qui ne cesse de l’applaudir, au dehors un peuple entier qui le reconduit avec des vivats, dans ses salons une affluence aussi continue que chez le roi, de grands seigneurs pressés contre la porte et tendant l’oreille pour saisir un de ses mots, de grandes dames debout sur la pointe du pied épiant son moindre geste501. « Pour concevoir ce que j’éprouvais, dit un des assistants, il faudrait être dans l’atmosphère où je vivais : c’était celle de l’enthousiasme. » — « Je lui ai parlé », ce seul mot faisait alors du premier venu un personnage. […] ) Le 29 juin 1789, Necker disait dans le conseil du roi, à Marly : « Quoi de plus frivole que les craintes conçues à raison de l’organisation des États Généraux ?
La toile s’abaisse, au moment de sa chute, sur cette scène, une des plus fantastiques et des plus contondantes que le génie du drame ait jamais conçues. […] “J’avais conçu peut-être, dit-elle, l’idée de devenir un jour digne de son choix ; mais vous me faites sentir ma folie, la différence irrémédiable de nos deux conditions, et la distance qui existe entre le jeune homme riche et la jeune fille pauvre.
Il reste bien encore quelques petites difficultés sur l’origine des choses et le but de notre existence, mais on a bien simplifié la question, et la raison conseille de supprimer en nous-mêmes tous les désirs et toutes les espérances que le génie, l’amour et la religion font concevoir ; car l’homme ne serait alors qu’une mécanique de plus dans le grand mécanisme de l’univers : ses facultés ne seraient que des rouages, sa morale un calcul, et son culte le succès. […] L’univers ressemble plus à un poëme qu’à une machine ; et s’il fallait choisir, pour le concevoir, de l’imagination ou de l’esprit mathématique, l’imagination approcherait davantage de la vérité. » LI Ses dédains contre la doctrine de la soi-disant vertu, fondée sur l’intérêt personnel, et sa flétrissure de l’égoïsme, s’élèvent jusqu’à la sublimité de l’invective.
Il conçut ensuite le projet d’une Apologie de la Religion chrétienne, telle, bien entendu, que la définissait le jansénisme. […] Pascal étudiera la Bible, fera valoir que seuls les Juifs ont conçu Dieu dignement, établira la vérité des livres saints et du livre de Moïse en particulier, la vérité des miracles de l’Ancien Testament, prouvera la mission de Jésus-Christ par les figures de la Bible et par les prophéties, puis par la personne même, les miracles, les doctrines, la vie du Rédempteur ; enfin il montrera dans la vie et les miracles des Apôtres, dans la composition et le style des Évangiles, dans l’histoire des saints et des martyrs, et dans tout le détail de l’établissement du christianisme, les marques évidentes de la divinité de notre religion.
Paul Meurice De l’œuvre qu’il conçoit à l’œuvre qu’il construit, Ensemble il rêve, atteint, accomplit le prodige ; L’oranger fait pousser à la fois sur sa tige La fleur, le bouton et le fruit. […] Il est de la race, désormais éteinte sans doute, des génies universels, de ceux qui n’ont point de mesure, parce qu’ils voient tout plus grand que nature ; de ceux qui, se dégageant de haute lutte et par bonds des entraves communes, embrassent de jour en jour une plus large sphère par le débordement de leurs qualités natives et de leurs défauts non moins extraordinaires ; de ceux qui cessent parfois d’être aisément compréhensibles, parce que l’envolée de leur imagination les emporte jusqu’à l’inconnaissable, et qu’ils sont possédés par elle plus qu’ils ne la possèdent et ne la dirigent ; parce que leur âme contient une part de toutes les âmes ; parce que les choses, enfin, n’existent et ne valent que par le cerveau qui les conçoit et par les yeux qui les contemplent.
L’artiste en cheveux se trouvait être un mélomane fort au courant des choses et sachant son monde ; il reconnut le grand homme, et tout en faisant effort pour dominer son émotion : — N’ai-je pas, en ce moment, demanda-t-il, l’insigne honneur de tenir en mes mains la tête illustre qui a conçu Lohengrin ? […] Les invités reçoivent le samedi matin leurs billets qui sont ainsi conçus : Eden-Théâtre — Rue Boudreau Samedi 30 avril 1887 à 7h précises Entrée par la rue Boudreau à partir de 7h 1/4 Répétition générale de Lohengrin offerte à la presse par MM.
Je conçois donc la défiance de notre héroïne ; mais nous allons voir bientôt son joli petit caractère s’affecter, se contourner et tomber dans la mièvrerie chimérique. […] Augier, mollement conçue, vaguement agencée, faible de ressorts et de caractères, s’est sauvée par les détails.
On conçoit ma fureur intérieure du procédé gouvernemental, et elle était complétée cette fureur, dans mon rêve, de ce que je me trouvais mêlé, dans une grande salle, à des confrères tondus comme des aspirants à la guillotine, aux mains exsangues, esthétisant prétentieusement, le monocle dans l’œil, — des confrères correctement sinistres, ainsi que le Baudelaire que j’ai entrevu une fois. […] un pont à son pantalon, un homme qui a un pont à son pantalon, vous concevez… sa femme, une intelligente femme au fond, est colletée jusqu’à la pomme d’Adam, avec sur la tête des couvre-chefs singuliers… elle fait faire ses robes à Maremmes, c’est tout vous dire… Ils allaient, dans le temps, aux soirées de Louis-Philippe, en omnibus, en compagnie de deux beaux-frères qui étaient des officiers de la garde nationale… vous les voyez tous les quatre, les beaux-frères avec leurs oursons, se faisant descendre devant le château, et sortant toujours des Tuileries, de façon à ne pas manquer l’omnibus de onze heures… Il a été un moment orléaniste, puis cela lui a passé, il est devenu républicain… Oui, il va à la messe, à la messe de cinq heures du matin, avec un livre de messe particulier, où il y a des prières de je ne sais plus qui… enfin c’est un janséniste… Il n’est pas bon, oh !
Il ne conçoit pas encore comment les Roscius de la France peuvent avoir à se plaindre de la parodie, pendant qu’ils n’y sont attaqués qu’indirectement. […] Il ne conçoit pas qu’on doive purger les passions, en les excitant.
La Renaissance, on le conçoit, fit peu de chose pour la critique. […] De tels hommes ont presque toutes les parties du grand artiste, l’élévation d’esprit et la noblesse d’âme qui saisissent l’idéal ; ils n’en diffèrent que parce qu’ils ne peuvent produire au dehors ce qu’ils conçoivent.
Il ne concevait rien à la raillerie, à cette offense polie, comme l’appelle Aristote.
L’humanité ainsi conçue et réduite à son élite ne peut cependant tout emporter avec elle : il faut à tout instant choisir, élaguer, généraliser.
Il est curieux de voir comme à chaque trêve, à chaque intervalle de paix, après la paix d’Amiens, puis en 1807, puis en 1810, cette imagination grandiose et civilisatrice se reprend avec ardeur et précision à ses plans conçus ou ébauchés, comme elle s’y applique en toute hâte et se remet à pousser tous les grands travaux, les projets d’embellissement, toutes les branches de services pacifiques, que la guerre vient toujours trop tôt ralentir et interrompre.
Lorsque, il n’y a pas moins de treize à quatorze ans, au lendemain de la révolution de Juillet, cette Revue comme nça, et qu’elle conçut la pensée de naître, elle dut naturellement s’adresser aux hommes jeunes et déjà en renom, aux écrivains et aux poëtes que lui désignait leur plus ou moins de célébrité.
Mais indiquer une telle méthode de traduction et la concevoir, c’est chose plus commode que de l’exécuter.
Voilà ce que concevait Le Brun, et ce qu’il se proposait en certains moments ; mais il fut loin d’y atteindre.
Toutes les scènes qui se rapportent à la mort de Rosa sont d’une haute beauté morale ; il sera sensible à tout lecteur que celui qui les a si bien conçues et représentées travaillait, lui aussi, en vue du sujet même, c’est-à-dire du suprême instant et qu’il peignait d’après nature.
Je suis bien novice, malgré mon âge, à la rédaction des choses politiques, mais je ne conçois pas qu’on insiste pour écrire dans une Constitution de ces choses-là.
L’esprit qui les conçoit est sans cesse ramené vers elles ; et il serait impossible aux modernes de faire abstraction de tout ce qu’ils savent, pour peindre les objets comme les anciens les ont considérés.
Par l’ambition, je désigne la passion qui n’a pour objet que la puissance, c’est-à-dire, la possession des places, des richesses, ou des honneurs qui la donnent ; passion que la médiocrité doit aussi concevoir, parce qu’elle peut en obtenir les succès.
Mais vous nierez que Molière ait conçu le dessein immoral de ridiculiser en général la vertu.
Toutes les sollicitations, requêtes, demandes de privilèges et de faveurs aux quelles tout homme en place ou qui approche d’un homme en place, est en butte, sont fondées sur ces deux axiomes : et souvent la bonne foi des solliciteurs est entière ; ils croient raisonner à merveille, et ne peuvent pas concevoir qu’ils demandent l’injuste et l’impossible.
Leur division et leur subordination étant nettement conçues, vous tâcherez d’en trouver la juste proportion pour bien régler le développement.
On a tort de lui jeter toujours à la tête le quatrain qui précède la Franciade : car il a posé nettement pour règle que les inventions du poète devront être « bien ordonnées et disposées, et bien qu’elles semblent passer celles du vulgaire, elles seront toutefois telles qu’elles pourront être facilement conçues et entendues d’un chacun ».
Il en a conçu la méthode, les directions, les résultats.
Je crois être strictement juste en faisant ici une place à Fromentin868, ce peintre exquis de l’Algérie et de l’Orient, cet esprit inquiet, intelligent, qui comprit, sentit, conçut plus qu’il ne sut exécuter, et qui par là fut éminemment un critique.
Ou bien l’allégorie offre une image bizarre, déplaisante, malaisée à concevoir et à accepter, comme dans Misericors : Fi !
Pour qui embrasse la vie totale de l’humanité, « ces deux moitiés » ne se conçoivent absolument pas l’une sans l’autre ; elles sont diverses, non inégales ; et, s’il nous était prouvé qu’il en est autrement, M.
Nous concevons plus vivement, en effet, nous nous représentons dans un plus grand détail et nous perpétrons avec plus d’application l’acte qui passe pour péché que celui qui est moralement indifférent.
Ce sera l’originale gloire de Paul Verlaine d’avoir conçu, vécu et bâti une œuvre d’art, qui, à elle seule, reflète, en l’agrandissant, la renaissance d’idéalité et de foi dont ces dernières années ont vu s’épanouir la floraison.
C’est cette haine aveugle & opiniâtre que l’envieux conçoit pour l’homme éclairé ; c’est cette jalousie que ressentent les ames basses incapables de l’égaler.
Quand on sait les préoccupations et les passions qui agitaient alors ces députés, on conçoit difficilement qu’ils trouvassent beaucoup d’attraits aux jeux des Pantalon et des Zanni.
L’ancienne critique dogmatique, telle que la concevaient Boileau, La Harpe, Nisard ou Brunetière, la critique qui fixait des étalons moraux, sociaux, littéraires et qui reconnaissait aux œuvres plus ou moins de valeur suivant qu’elles se conformaient plus ou moins à ces étalons semble de plus en plus abandonnée.
S’il aimait une autre femme, s’il s’était laissé prendre à une affection passagère, je concevrais le pardon ; ce serait générosité pure, et la reconnaissance pourrait assurer la fidélité à venir.
Déjà peut-être couraient sur son enfance plus d’une anecdote conçue en vue de montrer dans sa biographie l’accomplissement de l’idéal messianique 687, ou, pour mieux dire, des prophéties que l’exégèse allégorique du temps rapportait au Messie.
Les Galiléens qui étaient venus à la fête en conçurent beaucoup de joie et lui préparèrent un petit triomphe.
Car enfin, qu’il tourne le dos à Rabelais, qu’il ait même l’air de mépriser Montaigne, je le conçois de la part d’une si platonique nature, et ces paroles de dédain ne signifient autre chose, sinon : Je ne leur ressemble en rien.
C’est un portrait de plus à ajouter à ceux de la galerie de Versailles, ou, si vous l’aimez mieux, c’est comme un émail de Petitot : Pour mon portrait, écrivait-elle à un homme qui l’aimait, je voudrais bien le faire sur l’idée que vous en avez conçue et qu’on voulût s’en rapporter à vos descriptions ; mais il faut dire naïvement ce qui en est.
Hamilton, quand le comte de Caylus le vit chez sa mère, était vieux, fatigué peut-être ; de tout temps, d’ailleurs, on le conçoit volontiers capricieux, d’humeur assez inégale, comme l’était sa sœur ; il avait ce coin de singularité dont parle Saint-Simon.
Un régiment est une famille, et le rôle de colonel, conçu dans son véritable esprit, est l’un des plus beaux à remplir.
Guizot, et il faut reconnaître qu’elle est conçue avec une vigueur et une précision dignes de cet éminent esprit.
Enfin, Eschyle a conçu visiblement que la tragédie devait se nourrir de passions, ainsi que le poème épique, quoique d’une façon différente, c’est-à-dire, avec un air plus vif et plus animé, à proportion de la différence qui doit se trouver entre la durée de l’un et celle de l’autre, entre un livre et un spectacle.
Tels sont, en dernière analyse, les véritables termes de la question ; et c’est ainsi que nous aurions voulu la voir présenter dans le discours préliminaire du secrétaire perpétuel de l’Académie française Et maintenant, comment l’auteur d’un travail aussi important, comment cet homme assez érudit, et en même temps assez intelligent, pour concevoir et conduire à fin, seul, une entreprise de cette taille, le premier répertoire complet du langage français ; ce savant qui à la qualité d’érudit intelligent et laborieux réunissait à un haut degré la verve originale du romancier, le goût dans la critique, la vivacité d’esprit du pamphlétaire ; comment cet homme a-t-il pu descendre dans un aussi complet oubli ?
Et voilà pourtant ce qu’a fait la sœur Emmerich, et avec une telle certitude, une telle sûreté d’elle-même, qu’elle a réussi de manière à ce que les théologiens l’absolvent, tout au moins, quand ils ne la glorifient pas, et que nous, critiques littéraires, nous admirons au nom de la beauté, telle que l’art la conçoit, l’intuition, quelle qu’elle fût, qui fut en elle et qui nous a donné ces trois livres, comme on n’en avait pas vu encore dans la littérature sacrée, — ces trois livres d’histoire qui, en définitive, sont trois poëmes ; car l’histoire se puise à des sources, et ici il n’y a pas d’autre source qu’une âme en extase, — ces trois livres enfin dont on peut dire : « théologiquement, il n’est pas de rigueur d’y croire », mais dont on n’oserait dire cependant : « théologiquement, ils sont faux !
Sous un air de facilité et presque d’abandon, sous une simplicité de récit qui fait de l’auteur un Tallemant des Réaux élevé, chez qui la convenance est tempérée par le sourire, et qui veut être reçu chez les honnêtes gens et y plaire, le livre de Renée est conçu avec beaucoup d’art.
Ce ne seront d’ailleurs que des Temps conçus, à l’exception d’un seul, qui sera réellement perçu.
Il semble ainsi que le vers rythmique de Viélé-Griffin, le mètre plus ou moins détendu de Régnier et de Jammes, trouvent leur élément propre dans une forme poétique que l’on ne peut concevoir autrement que parlée.
Dans ce grand entrepôt du commerce de la Méditerranée et de l’Orient, un peuple si vaniteux16, avide de superstitions nouvelles, imbu du préjugé de son antiquité prodigieuse et des vastes conquêtes de ses rois, ignorant enfin que les autres nations païennes avaient pu, sans rien savoir l’une de l’autre, concevoir des idées uniformes sur les dieux et sur les héros, ce peuple, dis-je, ne put s’empêcher de croire que tous les dieux des navigateurs qui venaient commercer chez lui, étaient d’origine égyptienne.
La pièce elle-même, ainsi que nous l’apprend Molière dans son Avertissement, fut conçue, faite, apprise et représentée en quinze jours. […] Le sujet en était emprunté à la fable de Théagène et Chariclée, pour laquelle il avait conçu dans sa jeunesse une admiration voisine de l’enthousiasme. […] C’est à Versailles, le 29 mai, qu’il était tombé malade, et comme, avant de reconnaître le caractère de l’indisposition, on avait conçu des inquiétudes, cet état fut d’abord tenu secret, et la Gazette du 2 juin parlait du Roi de manière à donner le change. […] Elle ne fut pas beaucoup plus heureuse quelque temps après ; les espérances qu’elle avait de nouveau conçues échouèrent également devant l’Arrêt burlesque de Boileau. […] « Si jamais, a dit Chamfort, auteur comique a fait voir comment il avait conçu le système de la société, c’est Molière dans Le Misanthrope.
Que ceux dont l’esprit a conçu et fixé nos mirages nous délivrent. […] On ignore s’ils les réalisèrent ou s’ils les ont simplement conçus. […] L’auteur de la Légende des siècles raconte comme concevrait un génial architecte. […] Mais l’exotisme est chez lui une nécessité ; on ne le conçoit point sédentaire. […] » Étrange vision de notre race qui ne peut concevoir une faculté double appliquée à deux objets divers !
Les lois de l’art qu’il conçoit ne lui permettent point d’estimer M. […] L’essentiel est de concevoir les choses dans leur rapport réel et mathématique. […] J’ai dit en quelques brèves paroles selon quel, esprit il fut conçu. […] Voilà pourquoi, s’il y a des mères qui songent peut-être à concevoir un dieu, nous voyons aussi des poètes qui s’efforcent de créer des ouvrages mémorables, qui seront les Bibles de demain.
Je n’ai assurément aucune intention d’instituer, avec l’auteur de Volupté, une controverse religieuse, et quoique la fin que fait son héros ne soit pas fort de mon goût, je conçois qu’il y ait beaucoup de personnes à qui elle plaise et qu’elle profite même à quelques-unes. […] Tout cela, je l’avoue, ne m’a pas paru très édifiant, et je conçois tout autrement la prédication religieuse. […] Notre intention, comme on le pense bien, n’est pas de suivre Victor Jacquemont dans son voyage de sept cents lieues à travers l’Indoustan, non plus que dans ce pénible et aventureux pèlerinage de l’Himalaya, véritable entreprise que conçoit le génie scientifique, que dirige le bon sens, que soutient la patience, que le courage exécute et mène à terme. […] En effet, Jacquemont vit bien aux empressements de la foule, aux félicitations qui l’accueillirent, et surtout à l’attention grave et respectueuse dont il devint l’objet de la part de ses hôtes de la Grande-Bretagne, que la révolution de juillet l’avait grandi de plusieurs pieds, et que toute l’importance politique de ce prodigieux événement se résumait en quelque sorte dans sa personne : « Je défie M. de La Fayette lui-même, écrit-il à son père, d’avoir donné en un jour plus de poignées de main. » Jacquemont en conçut un légitime orgueil ; mais en même temps il eut le bon esprit de comprendre que l’enthousiasme, assurément très réel, de ses hôtes pour la nouvelle révolution, couvrait je ne sais quelle anxiété tout anglaise qui avait besoin d’être calmée.
Je conçois la malédiction et l’anathème, je conçois le culte et l’enthousiasme ; mais j’ai peine à me figurer comment un poète lyrique pourrait dire : Paris a ceci, mais il lui manque cela ; ses défauts sont tels, ses qualités sont telles. […] Son œuvre n’est pas toujours conforme et souvent même elle est contraire à l’idéal grandiose que l’esprit conçoit naturellement, l’histoire de l’année terrible étant donnée. […] Des pièces longuement développées sont conçues à la façon d’une épigramme ; je veux dire que le dernier vers a été fait d’abord, il est seul important, c’est le pivot de la machine, la clef de voûte de l’édifice ; tout converge vers ce point, le reste n’est écrit que pour amener et préparer le trait final. […] C’est un travail neuf, conçu pour la première fois dans un esprit et selon une méthode scientifiques. […] Mais, si Lamartine est plutôt amoindri par la publication de sa correspondance, il est juste de dire que sa réputation n’en reçoit aucune atteinte grave ; ses lettres n’ont rien qui choque et qui déconcerte violemment l’idée que toute la série de ses précédents ouvrages nous avait autorisés à concevoir de lui.
Un regard nous découvrant que le genre supérieur est le récit d’une grande et merveilleuse action, sublimité dans les choses, importance dans l’époque, élévation dans les personnages, étendue dans le sujet, ce fut d’abord ce qui nous apparut ; mais la sublimité, l’importance, l’élévation, l’étendue, sont des qualités relatives aux idées que les hommes ont conçues d’âge en âge ; car, à la rigueur, il n’est de vraiment grand que la piété naturelle, que la courageuse philosophie, toutes deux immuables et indépendantes des sacerdoces et des sophismes. […] Dès lors quelle idée concevons-nous de sa colère, puisque la gourmandise ne peut même la contrebalancer ! […] En effet tout esprit un peu logicien reconnaîtra que de l’énonciation claire du sujet qu’il va traiter résultent l’idée générale qu’on en conçoit, et la curiosité qu’il fait naître d’en entendre le développement. […] Si vous les frappez d’une secousse trop subite, vous ne leur paraissez pas un inspiré, mais un furieux, et la première impression qu’ils reçoivent de vos paroles leur inspire la répugnance ou l’ironie ; mais si leur ayant bien exposé la matière de la dissertation ou de la narration, eux-mêmes en conçoivent l’étendue, et si vous leur semblez craindre de n’en pouvoir assez déployer la grandeur, ils vous prêtent l’oreille avec autant de curiosité que d’indulgence, et sont disposés d’avance à s’émouvoir quand votre chaleur les pénètre, et à s’étonner quand votre imagination répand sur le sujet des richesses inattendues. […] Soit qu’il eût appris son art des Amphions ou des Orphées que déjà l’admiration des peuples avaient érigés en demi-dieux, soit que l’assemblage des dons les plus rares ait formé sa haute intelligence, il conçut le dessein d’émouvoir, de plaire et d’étonner par une narration poétique, et sut d’abord discerner la meilleure fable pour digne objet de ses chants.
Sérieusement, ce livre est trop touffu et trop conçu selon le procédé digressif. […] Si l’auteur crée lui-même le mythe, il faut qu’il ait conçu d’un seul coup, consubstantiels l’un de l’autre, le mythe et l’idée. […] Ce doit être âme et corps, conçus ensemble et inconcevables séparément. […] Remarquez que cela est surtout le propre même du musicien, et que la façon de concevoir qui était celle de Wagner, est précisément celle qui s’accommode le mieux avec l’art musical. […] Le secret d’amuser étant celui de ne pas tout dire, il y a quelque crainte à concevoir, si ce n’est sur ces deux premiers volumes, qui après tout ne sont qu’une introduction, du moins sur les sept ou huit volumes suivants.
Eh bien, le voilà le programme des études intelligemment conçu ! […] Le « devoir », ainsi conçu, autorise tout, même ce qui n’est pas permis. […] Les Latins, qui sont des maladroits, conçoivent le paradis sous la forme d’un jardin mal entretenu. […] On l’autorisa, le 29 janvier 1876, à ouvrir ces cartons du quai d’Orsay où dorment, dans un calme rarement troublé, tant de desseins conçus par des volontés hardies. […] Il conçoit tout sous la forme fluide et changeante de révolution.
Nicolas Fouquet, voulant donner une fête au roi et à la reine-mère, engagea Molière à composer une pièce qui amenât, avec quelque vraisemblance, des divertissements ; et Molière, à qui l’on ne donna que quinze jours pour concevoir et remplir un sujet propre à satisfaire promptement les projets du surintendant et de Beauchamp, maître des ballets, imagina la légère intrigue des Fâcheux. […] Le roué de coterie remplace le corrupteur de cour ; le poltron révolté contre le ciel remplace l’athée, et par cette métamorphose l’on ne conçoit plus ce que les femmes, victimes de sa débauche, ont pu lui trouver de si séduisant ; par quelle raison son valet n’ose le quitter ; pourquoi son père ne le fait pas jeter dans le fond d’un cachot ; et à quel propos le ciel lui fait l’honneur d’accumuler, pour le punir, miracle sur miracle : enfin, la pièce, rapetissée à la taille de l’acteur, n’a plus un grand caractère. […] Les scènes. — Toutes conçues, toutes exécutées avec une égale audace de génie. […] Elmire portait un bouquet, qu’on critiqua peut-être trop légèrement ; une femme peut aimer les fleurs assez pour ne pas craindre qu’à la suite d’un mal de tête étrange à concevoir ; d’une fièvre et d’une saignée, elles agacent ses nerfs. […] Il soupçonne qu’on a conçu le dessein de l’enivrer pour voler son trésor, et il se condamne à ne boire que de l’eau.
On me permettra d’ajouter un mot sur l’esprit dans lequel ont été conçues ces études. […] Il n’a encore reçu qu’une éducation professionnelle quand il conçoit le projet de faire le bonheur de l’humanité. […] Il est à la base de tous nos sentiments, et dans la manière dont nous le concevons toute notre vie morale est engagée. […] L’officier tout frais émoulu de, l’École d’application et encore neuf dans le métier y avait mis ses rêves, ses espérances, ses idées conçues d’hier. […] Et, du doigt, il se touchait le front, comme pour indiquer que tant de belles choses avaient été conçues là !
Enfin il concevait un amour sévère, intelligent, mais efficace et ardent, du peuple : c’était la passion innée de ce bon et grand citoyen ; c’était l’âme cachée de son opposition à tous les régimes qui ne réalisaient pas sa pensée ; c’était le feu sacré de ses poésies comme de sa vie ; c’était sa philosophie politique ; c’était tout son républicanisme. […] Cette royauté, mal conçue elle-même, avorta en effet, le 24 février, sous une secousse qui n’aurait pas déraciné un hysope. […] La France, selon l’expression de Béranger, n’avait pas eu le temps de le concevoir encore et de le porter à maturité.
Je veille, je vois, j’entends, je regarde, je suis frappé de terreur ; à l’instant la tête commande, agit, dispose des autres organes ; je dors, les organes conçoivent d’eux-mêmes la même agitation, les mêmes mouvemens, les mêmes spasmes que la terreur leur avait imprimés, et à l’instant ces organes commandent à la tête, en disposent, et je crois voir, regarder, entendre. […] La variété des spasmes que les intestins peuvent concevoir d’eux-mêmes correspond à toute la variété des rêves et à toute la variété des délires, à toute la variété des rêves de l’homme sain qui sommeille, à toute la variété des délires de l’homme malade qui veille et qui n’est pas plus à lui. […] Vous concevez maintenant un peu ce que c’est que le fromage mou qui remplit la capacité de votre crâne et du mien.
Cela se conçoit. […] Je conçois bien que le vent agite les feuilles, enfle les voiles d’un navire ; mais je ne comprends pas, je ne crois pas que personne comprenne comment le vent agiterait les corps célestes : la figure employée par M. […] L’affiche était donc conçue en ces termes : CINNA, Tragédie en cinq actes et en vers de Racine.
Ces mots dont on peut dire que « toute notre vie passée s’y renferme et se lève avec eux devant nous131 », n’ont un sens si plein que pour l’individu qui les conçoit ; c’est donc dans la parole intérieure qu’ils surgissent à la conscience ; dits à autrui, ils n’auraient pas la valeur qu’ils ont pour nous ; pour la leur donner, il faudrait les commenter, et mieux vaudrait alors les remplacer tout à fait par un discours détaillé et explicite. […] Dans l’état de veille, si, quand je me parle intérieurement, je pense au tactum buccal qui correspond aux mots que je conçois, je l’imagine aussitôt ; par exemple, au moment où j’écris ces lignes, mon esprit étant préoccupé du problème de l’image tactile, je ne puis constater ma parole intérieure sans y trouver, avec l’image sonore, une image tactile correspondante. […] Mais le fait est incontestable : il y a là, dirait Stuart Mill, deux associations inséparables ; d’une part, l’âme ne se refuse aucun état sans le constater ou le déclarer étendu ; le non-moi et la spatialité sont pour elle deux idées absolument corrélatives et presque les deux aspects d’une seule et même idée ; d’autre part, le moi et la durée sans étendue ne peuvent se concevoir l’un sans l’autre.
Mais le système nerveux peut-il se concevoir vivant sans l’organisme qui le nourrit, sans l’atmosphère où l’organisme respire, sans la terre que cette atmosphère baigne, sans le soleil autour duquel la terre gravite ? […] Or, si les êtres vivants constituent dans l’univers des « centres d’indétermination », et si le degré de cette indétermination se mesure au nombre et à l’élévation de leurs fonctions, on conçoit que leur seule présence puisse équivaloir à la suppression de toutes les parties des objets auxquelles leurs fonctions ne sont pas intéressées. […] Or, où est au juste la différence entre la matière, telle que le réalisme le plus exigeant pourrait la concevoir, et la perception que nous en avons ?
Comme idées conçues dans le futur ou dans le passé, elles expriment une certaine concordance entre nos sensations présentes et l’état général de notre intelligence. […] Je ne crois pas qu’il réussisse, parce que l’on conçoit difficilement une société anti-sociale. […] Jamais les anciens n’ont conçu l’idéal moral sous la forme d’une loi ou d’un commandement. » La morale pour les anciens c’est la coutume, l’usage. […] Et comme ils ne concevaient pas le devoir, ils ignoraient la conscience morale. […] On peut ainsi concevoir l’intelligence comme une forme initiale de l’instinct.
Une telle nature de grand écrivain posthume 95 ne laissait pas de transpirer de son vivant ; elle s’échappait par éclat ; il avait ses détentes, et l’on conçoit très bien que Louis XIV, à qui il se plaignait un jour des mauvais propos de ses, ennemis, lui ait répondu : « Mais aussi, monsieur, c’est que vous parlez et que vous blâmez, voilà ce qui fait qu’on parle contre vous. » Et un autre jour : « Mais il faut tenir votre langue. » Cependant, le secret auteur de Mémoires gagnait à ces contretemps de la fortune. […] Habituellement et toujours, il a dans sa vivacité à concevoir et à peindre, le besoin d’embrasser et d’offrir mille choses à la fois, ce qui fait que chaque membre de sa phrase pousse une branche qui en fait naître une troisième, et de cette quantité de branchages qui s’entrecroisent, il se forme à chaque instant un arbre des plus touffus.
« C’est l’heure de ceindre, d’enlacer à nos cheveux ou le myrte vert ou les fleurs nouvelles que la terre attiédie fait éclore. » Puis, tout à coup, passant sans transition de ces images de toutes les choses renaissantes qui convient les sens à jouir à la pensée de la mort qui commande aux vivants de se hâter de vivre : « La pâle Mort, s’écrie-t-il dans un vers d’un accent aussi funèbre qu’inattendu, la pâle Mort secoue d’un pied indifférent la porte de la cabane du pauvre ou des tours des palais des rois ; là, heureux Sextius, la brièveté de la vie nous interdit de concevoir les longues espérances. […] On conçoit qu’une seule ode de ce genre, répandue à Rome dans sa première fleur, ait attiré sur ce jeune inconnu l’amour de toutes les Lydies et l’enthousiasme de tous les Calaïs de Rome.
Si l’on peut dire que le romantisme a consisté, pour une bonne part, dans le goût du pittoresque à outrance et des effets violents, on conçoit qu’il ait tourné assez rapidement au réalisme ; car, dès qu’il s’agit de forcer l’attention et d’ébranler les nerfs des dégoûtés, l’art qui peint la réalité contemporaine et qui en respecte ou en exagère les brutalités y réussira mieux que celui qui s’attarde aux âges passés ou qui donne aux choses d’aujourd’hui un air de fiction, l’air de « n’être pas arrivées » Notez que, d’un autre côté, par son développement naturel, parallèle, semble-t-il, aux progrès du sens critique et à l’accroissement de ses exigences, le roman tendait au réalisme. […] On conçoit de reste que le tempérament de MM. de Goncourt et leur dédain des apparences mêmes de la banalité les ait détournés des romans « qui finissent bien ».
Samedi 30 décembre Au milieu de la gaieté et du tapage des conversations, Nittis adossé à son bureau du fond de l’atelier, me dit dans sa jolie langue enfantine, sur une note mélancolique : « Oh, quand on a passé la première jeunesse… quand il n’y a plus dans les veines, un certain bouillonnement du sang… la vie, ce n’est plus guère attachant… et moi encore tout enfant — j’avais dix ans — j’ai entendu : « Il y a un « monsieur qui s’est tué… » c’était de mon père qu’il s’agissait… vous concevez la vie fermée que ça m’a fait là-bas… deuil et solitude… et des notions tout élémentaires… lire et écrire : ç’a été tout… le reste c’est moi qui me le suis donné… je me suis entièrement formé par la réflexion solitaire… cela m’a laissé une naïveté… et vous concevez que dans la société actuelle cette naïveté… » Nittis ne finit pas sa phrase.
A Rome de même, — il est presque oiseux de le dire, — il existait tout un peuple divers, des antagonismes profonds de clan, de famille, de partis, d’individus, qui font que l’on peut concevoir du « Romain » les idées les plus diverses, selon qu’on songe à tel ou tel parmi ceux qui portaient ce nom, à Appius ou à Gracehus, à Scipion ou à Caton, à Sylla ou Marius, à César ou à Cicéron. […] Ces sociétés où primitivement la coopération était de tous les instants, où les besoins et les tâches étaient les mêmes pour tous, où tous étaient de même race, où la lutte encore ardue contre tout l’ambiant absorbait toute la force vitale de l’homme, le formait et le pétrissait, peuvent être conçues comme homogènesdi, comme formées de membres presque semblables en tout, de corps et d’âme, et s’il y fût né quelque individu original, différent, doué d’inclinations et de pensées qui n’étaient qu’à lui, cet individu, par la force même des choses, par l’oppression de ses compatriotes, aurait été assurément contraint de revenir au module commun.
« Quant à ceux qui ont voulu assimiler ce drame à une simple pastorale, comme s’il s’agissait ici de bergeries et de moutons à la manière de Florian, nous conviendrons volontiers avec eux que le premier acte se rapproche en effet de ce genre, et qu’il nous offre un modèle de l’idylle aussi parfait qu’il ait été conçu par aucun des meilleurs poètes bucoliques de l’antiquité ; mais, pour le reste, nous leur demanderons dans quelle espèce de pastorale ils ont jamais vu le pathétique, la noblesse, l’élévation des sentiments portés au point où ils le sont généralement dans ce drame, le quatrième acte surtout, qui, sous ce point de vue, nous semble avoir atteint le comble de la perfection. […] … Menaça, ma mère, après m’avoir conçue du grand Visoumitra, m’a abandonnée au moment de ma naissance sur les bords écartés du fleuve Malini !
Paris avait une certaine sensibilité particulière qu’on ne trouvait que chez lui, une façon de voir les choses, de concevoir la vie, de juger qui était sa marque ; il avait un ton plus délicat et plus vif qu’ailleurs, une élégance plus fine. […] Qu’on ait pris autrefois cette précaution avec maladresse et brutalité, on se le rappelle ; et que les écrivains se soient crus délivrés de leurs chaînes en voyant supprimer la censure, on le conçoit parfaitement.
Si l’on ne le dit pas, c’est sans doute que l’expression paraîtrait contradictoire, qu’on ne conçoit pas le souvenir autrement que comme une répétition du passé, qu’on n’admet pas qu’une représentation puisse porter la marque du passé indépendamment de ce qu’elle représente, enfin qu’on est théoricien sans le savoir et qu’on tient tout souvenir pour postérieur à la perception qu’il reproduit. […] On concevrait même que rien de tout cela ne se manifestât à la conscience, et que la conclusion seule apparût, je veux dire la suggestion précise d’une certaine démarche à faire.
Il n’est pas favorable aux religieux des ordres mendiants, mais il n’est pas contre toute espèce de communautés religieuses, et il les croit compatibles avec l’ordre politique moyen qu’il conçoit : Les religieux rentés, en France, sortent communément d’une honnête bourgeoisie, dit-il, paraissent peu dans le monde et sont, malgré beaucoup de plates déclamations, plus utiles à l’État qu’on ne le pense.
Ils ne ressemblent pas en ce point-là à nos gens qui abandonnent leur chemise au premier qui la veut prendre, et qui secouent la poussière de leurs pieds lorsqu’on les chasse de leur patrie… Un tel aveu dispense de tout commentaire, et l’on voit encore par là de quel côté était alors la moralité, la vertu sociale ; pour être à l’état brut, elle n’en existait pas moins ; et l’on conçoit que les vainqueurs, parodiant les vaincus dans une mascarade de triomphe, se soient promenés dans les rues de Constantinople vêtus de robes, coiffés à la byzantine, et tenant en main pour toutes armes du papier, de l’encre et des écritoires.
Ce qu’on peut dire enfin, c’est que l’auteur a très bien deviné et conçu le genre dont le Wallenstein de Schiller (1779) devait offrir le plus magnifique développement, mais qui n’a jamais été en France qu’un genre accessoire et comme latéral à la scène.
Il l’expliqua un jour très gaiement, et avec beaucoup d’imagination et d’esprit, au roi Henri II, qui, au retour de ce siège, l’accueillit comme il devait et l’entretint longuement durant cinq heures d’horloge, se faisant tout raconter, et ses harangues, et ses ruses, et le détail des souffrances, mais le roi ne pouvait, malgré tout, concevoir encore comment il avait su s’accorder si bien et si longtemps avec une nation étrangère et délicate, surtout en de pareilles détresses.
Je sais des hommes d’étude et de lecture approfondie qui placent Fleury très haut, plus haut qu’on n’est accoutumé à le faire aujourd’hui, qui le mettent en tête du second 265 rang ; ils disent « que ce n’est sans doute qu’un écrivain estimable et du second ordre, mais que c’est un esprit de première qualité ; que ses Mœurs des israélites et des chrétiens sont un livre à peu près classique ; que son Traité du choix et de la méthode des études, dans un cadre resserré, est plein de vues originales, et très supérieur en cela à l’ouvrage plus volumineux de Rollin ; que son Histoire du droit français, son traité du Droit public de France, renferment tout ce qu’on sait de certain sur les origines féodales, et à peu près tout ce qu’il y a de vrai dans certains chapitres des plus célèbres historiens modernes, qui n’y ont mis en sus que leurs systèmes et se sont bien gardés de le citer ; que Fleury est un des écrivains français qui ont le mieux connu le Moyen Âge, bien que peut être, par amour de l’Antiquité, il l’ait un peu trop déprécié ; que cet ensemble d’écrits marqués au coin du bon sens et où tout est bien distribué, bien présenté, d’un style pur et irréprochable, sans une trace de mauvais goût, sans un seul paradoxe, atteste bien aussi la supériorité de celui qui les a conçus. » Pour moi, c’est plutôt la preuve d’un esprit très sain.
Le poète cette fois n’anathématise point l’or et ne blâme point les malheureux émigrants qui le vont chercher ; il jette sur l’ensemble du monde un regard de tristesse et trouve encore l’humanité bien misérable au gré des désirs et des vœux qu’il conçoit pour elle.
On trouve, en effet, chez lui de belles pensées qui semblent n’avoir pu être conçues que par un chrétien, à côté d’autres pensées qui semblent ne pouvoir être que d’un philosophe.
Je n’en sais rien, mais je croirais aisément que Fanny a dû être conçue et écrite par manière de gageure comme Adolphe, c’est-à-dire « pour convaincre deux ou trois amis incrédules de la possibilité de donner une sorte d’intérêt à un roman dont les personnages se réduiraient à deux, et dont la situation serait toujours la même ».
Molé concevait et représentait en homme formé à la grande école.
Pour moi je concevrais au point de vue naturel et physiologique, qu’on soutînt la thèse toute contraire : Un grand génie, pour celui qui le possède, est l’instrument d’une grande joie. — Je prends cet exemple et j’en pourrais choisir maint autre chez M. de Laprade.
Je conçois pourtant l’espèce d’impatience qu’il ont donnée à quelques lecteurs, notamment à sir David Brewster, dont on a pu lire la protestation et la réfutation chaleureuse (Revue britannique, juillet 1861).
Ce sont, hommes et femmes, des marionnettes incapables de vivre ; elles ont des proportions habilement conçues, mais, sur leur charpente de bois ou d’acier, ces poupées n’ont absolument que du rembourrage ; l’auteur les fait manœuvrer sans pitié, les tourne et les disloque dans les positions les plus bizarres, les torture, les fustige, déchire leur âme et leur corps, et met sans pitié en pièces et en morceaux ce qui, il est vrai, n’a aucune chair véritable : — et tout cela est l’œuvre d’un homme qui montre de grandes qualités d’historien éloquent, et auquel on ne peut refuser une vive puissance d’imagination, sans laquelle il lui serait impossible de produire de pareilles abominations. » — Vous qui parlez sans cesse de liberté, qui la voulez dans l’art et en tout, soyez conséquents ; sachez admettre et supporter les manières de sentir, même les plus opposées à la vôtre, quand elles sont sincères.
Je ne conçois plus rien à votre tête.
Un tel homme d’État, s’inspirant de considérations de cet ordre, ne pouvait sympathiser, on le conçoit, avec M.
J’entendais parler, à cet endroit, du projet d’une Encyclopédie moderne, conçu ou adopté par MM.
Vuillart fut arrêté un matin (2 octobre 1703) comme coupable de correspondre avec le Père Quesnel et comme agent d’intrigues ; qu’il fut mis à la Bastille, où il ne demeura pas moins de douze ans et d’où il ne sortit qu’en 1715, après la mort de Louis XIV, pour mourir lui-même presque aussitôt, à l’âge de soixante-seize ans passés, on ressent une indignation profonde de ces iniquités qui flétrirent la fin d’un grand règne, et l’on conçoit une horreur nouvelle pour les hypocrites ou les fanatiques qui les conseillèrent.
Il en résulte bien nettement que ce prétendu académicien n’était que frivole ; qu’il ne concevait les gens de lettres que comme des amuseurs, tout au plus comme des professeurs d’élégance, et que, dès qu’il leur arrivait de penser un peu ferme, il ne les avouait plus.
Ce passe-port est conçu en ces termes : « Laissez passer Ch.
Le projet de conciliation et d’infusion graduelle ne se réalisa pas tout à fait comme on l’avait conçu.
Ils croient ainsi se mettre à la portée de leurs lecteurs ; mais il ne faut jamais supposer à ceux qui nous lisent, des facultés inférieures aux nôtres : il convient mieux d’exprimer ses pensées telles qu’on les a conçues.
Nous concevons peut-être mieux l’âme du moyen âge, mais nous en sommes encore plus loin que les écrivains des siècles classiques.
Les apôtres de la primitive Église pratiquaient peu le calembour, et je conçois mal Spartacus vaudevilliste.
Suivant l’usage universitaire, on a fait imprimer un placard qui a été distribué avec le livre du ballet et qui est ainsi conçu : LES THÈSES DE SCARAMOUCHE « Al gran Scaramuzza Memeo Squaquera, de civitate Partenopensi, figlio de Tammero e Catammero Cocumero Cetrulo, et de madama Papera Trentova, e parente de messere unze, dunze e trinze e quiriquarinze, e de nacchete, stacchete conta cadece ; et de Tabuna, Tabella, Casella, Pagana, Zurfana, Minoffa, Catoffa, e dece Minece, etc.
Elslander65 définissent cette éducation en fonction des intérêts sociaux et des destinées sociales telles qu’ils les conçoivent ; ils la subordonnent à quelques grandes lois directrices de l’évolution sociale qu’il convient de favoriser et dont le tenue semble être un eudémonisme collectif où l’individu s’absorberait passivement dans l’uniformité et la médiocrité générales.
« La seule pensée de mourir auparavant le révoltait comme une injustice, tant il avait conçu dans un abîme de prières l’assurance d’être le créancier de cet événement » (Léon Bloy).
Il ne pouvait prévoir que tel peuple à l’imagination égarée le concevrait un jour comme un affreux Moloch, avide de chair brûlée.
On peut, dans un sentiment élevé de compassion, s’éprendre d’un intérêt idéal pour Marie-Antoinette, vouloir la défendre sur tous les points, se constituer son avocat, son chevalier envers et contre tous, s’indigner à la seule idée des taches et des faiblesses que d’autres croient découvrir dans sa vie : c’est là un rôle de défenseur qui est respectable s’il est sincère, qui se conçoit très bien chez ceux qui avaient le culte de l’ancienne royauté, mais qui me touche bien moins chez les nouveaux venus en qui ce ne serait qu’un parti pris.
Ce penchant réagit sur le choix de ses documents humains, de ses sujets, de ses personnages ; ce souci de l’exactitude le pousse à donner des visions nettes de mouvements et de jolités ; l’habitude de l’observation, son ouverture d’esprit à tous les phénomènes de la vie, le garde de tomber dans la mièvrerie ou le pessimisme : la recherche d’émotions délicates le préserve habituellement de s’appliquer à l’étude des choses basses, des personnages laids ou nuls, limite sa vision des phénomènes psychologiques, l’éloigne de concevoir des caractères uns, individuels et constants, colore et énerve sa langue, atténue ses fabulations, rend ses livres excitants et fragmentaires.
On a peine à concevoir que, la nature étant partout la même, on plaise cependant par des voies si opposées.
Quel rapport y a-t-il entre une querelle de chiens et de chats, et le combat des élémens, dont il résulte une harmonie qu’on ne peut concevoir, et dont le fabuliste ne parle pas ?
On conçoit qu’un certain nombre de livres élémentaires, faits avec clarté et avec précision, est une des choses les plus désirables pour l’avancement des sciences et des lettres.
Et l’on conçoit maintenant que nous puissions parler d’une Psychologie des titres.
On le conçoit même : sous la dépravation d’un culte qui plaçait dans les cieux les forfaits et les vices, la foule pouvait être tentée de voir un dieu dans un si méchant homme.
Il n’en devait être que conçu comme plus grand par les esprits puissants, et plus aimé des âmes fortes ; mais les puissants esprits sont rares, et plus encore les fortes âmes. […] Le dieu des philosophes antiques, très vague du reste, est fini encore ; il est d’ordinaire conçu surtout comme un démiurge, comme une intelligence supérieure qui a trouvé de la matière sous sa main, qui l’a organisée, mise en branle et qui, plus ou moins, la surveille. […] Ils concevaient Dieu comme un roi très puissant qui a un adversaire très redoutable lequel lui dispute ses sujets. […] Œuvre très belle du reste, inspirée en ses parties hautes, en ses parties essentielles, par l’idée de l’infini aussi fortement conçue qu’il soit possible à un être humain de la concevoir, et qui semble faite par un homme qui a contemplé l’infini face à face, et qui en est resté ébloui, sans en avoir éprouvé d’élourdissement. […] Il devait, je ne dis pas descendre plus bas, mais s’éloigner encore plus du programme étroit que Calvin lui avait tracé, et de l’espérance tout particulièrement chère à son cœur qu’il avait conçue.
On peut encore ajoûter que la Langue Françoise s’étant formée de la Latine, & les Latins retranchant la préposition dans le discours ordinaire, ces phrases nous sont venues sans prépositions, & nous n’avons saisi que la valeur des mots qui marquent ou le passé ou le présent, & qui ne sont point sujets à la variété des terminaisons, comme les noms Latins ; & voyant que ces mots n’ont aucun rapport grammatical ou de syntaxe avec les autres mots de la phrase, avec lesquels ils n’ont qu’un rapport de sens ou de raison, nous concevons aisément ce qu’on veut nous faire entendre. […] Ils ont compris, ils ont conçu avant que de faire le mot d’entendement ; ils ont voulu avant que de dire qu’ils avoient une volonté, & ils se sont ressouvenu avant que de former le mot de mémoire. […] Autre exemple : livre est un nom d’espece dont la valeur n’est point appliquée : mais si je dis, mon livre, ce livre, le livre que je viens d’acheter, liber ille, on conçoit d’abord par les prénoms ou prépositifs, mon, ce, le, & ensuite par les adjoints ou mots ajoûtés, que je parle d’un tel livre, d’un tel individu de l’espece de livre. […] Selon Platon, le monde fut fait d’après l’idée la plus parfaite que Dieu en conçut.
… L’antiquité, telle que la concevaient les humanistes, était une vivante joie ; elle était une maxime d’existence. […] Encore faut-il concevoir qu’il ait subi la tentation de la vie étrange où il s’est lancé. […] L’intelligence humaine — et concevons-nous un autre mode intellectuel ? […] Il avait conçu cette trilogie, où l’honnête existence des femmes entrait tout entière. […] … Une telle séparation de l’homme et du poète, nous avons peine à la concevoir.
Comme saint Augustin, en présence des épouvantables catastrophes de son siècle, il conçoit sa Cité de Dieu. […] M. de Maistre, en ses Considérations et ailleurs, est, de tous les écrivains religieux, celui peut-être qui nous oblige à nous représenter de la manière la plus concevable, la plus présente et la plus terrible, le Jugement dernier ; il donne à penser là-dessus, même aux sceptiques blasés de nos jours, parce qu’il fait concevoir l’inévitable fin et le coup de filet du réseau universel, d’une manière ordonnée, toute spirituelle, tout appropriée aux intelligences sévères. […] Il lui échappait de dire à des personnes, capables d’ailleurs de l’entendre, lorsqu’elles tenaient bon et avaient l’air de contester : « Je ne conçois pas qu’on n’entende pas cela quand on a une tête sur les épaules. » On a remarqué que dans la conversation, quand il ne discutait pas, ou même quand il discutait, il n’entendait guère les réponses ; il était, tour à tour et très-vite, ou très-animé ou très-endormi : très-animé quand il parlait, volontiers endormi quand on lui répondait : puis, sitôt qu’on se taisait, il rouvrait son œil le plus vif et reprenait de plus belle202. […] « Quand on la contemple, cette Révolution, dans son ensemble et dans la rapidité de son mouvement, et surtout quand on la rapproche de notre caractère national, qui est si éloigné de concevoir, et peut-être de pouvoir suivre de pareils plans, on est tenté de la comparer à une sorte de féerie et à une opération magique ; ce qui a fait dire à quelqu’un qu’il n’y aurait que la même main cachée qui a dirigé la Révolution qui pût en écrire l’histoire.
Il conçoit la plus haute des beautés idéales, mais il n’en conçoit qu’une. […] C’est lui qui dans le ciel a inventé les armes foudroyantes et gagné la victoire du second jour ; c’est lui qui dans l’enfer a relevé ses troupes prosternées et conçu la perdition de l’homme ; c’est lui qui, franchissant les portes gardées et le chaos infini parmi tant de dangers et a travers tant d’obstacles, a révolté l’homme contre Dieu et gagné à l’enfer le peuple entier des nouveaux vivants. […] Sur toutes les faces de la terre, — le large Océan coulait, non oisif, mais d’une chaude — humeur fécondante, il adoucissait tout son globe, — et la grande mère fermentait pour concevoir, — rassasiée d’une moiteur vivante, quand Dieu dit : — « Rassemblez-vous, maintenant, eaux qui êtes sous le ciel, — en une seule place, et que la terre sèche apparaisse !
Cette pratique cependant n’est plus d’usage aujourd’hui pour la lettre c ; on a substitué la cédille à l’e muet, & l’on écrit commença, perçons, conçu. […] Quel préjugé pour la facilité de concevoir & de s’exprimer, pour la netteté du discernement, la justesse du jugement, & la solidité du raisonnement ! […] Fromant, comme tout adjectif uniquement employé pour qualifier, est nécessairement uni à son substantif, pour ne faire avec lui qu’un seul & même sujet du verbe, ou qu’un seul & même régime, soit du verbe soit de la préposition : comme on ne conçoit pas qu’une substance puisse exister dans la nature sans être revêtue d’un mode ou d’une propriété : comme la propriété est ce qui est conçû dans la substance, ce qui ne peut subsister sans elle, ce qui la détermine à être d’une certaine façon, ce qui la fait nommer telle ; un grammairien vraiment logicien voit que l’adjectif n’est qu’une même chose avec le substantif ; que par conséquent ils ne doivent faire qu’une même partie d’oraison ; que le nom est un mot générique qui a sous lui deux sortes de noms, savoir le substantif & l’adjectif ». […] Tout verbe est nécessairement uni à son sujet, pour ne faire avec lui qu’un seul & même tout ; il exprime une propriété que l’on conçoit dans le sujet, qui ne peut subsister sans le sujet, qui détermine le sujet à être d’une certaine façon, & qui le fait nommer tel : un grammairien vraiment logicien doit donc voir que le verbe n’est qu’une même chose avec le sujet. […] Il faut avouer qu’il y a bien de la vérité dans cette remarque, & qu’à parler en général, une langue débarrassée de toutes les inflexions qui ne marquent que des rapports, seroit plus facile à apprendre que toute autre qui a adopté cette maniere ; mais il faut avouer aussi que les langues n’ont point été instituées pour être apprises par les étrangers, mais pour être parlées dans la nation qui en fait usage ; que les fautes des étrangers ne peuvent rien prouver contre une langue, & que les erreurs des naturels sont encore dans le même cas, parce qu’elles ne sont qu’une suite ou d’un défaut d’éducation, ou d’un défaut d’attention : enfin, que reprocher à une langue un procédé qui lui est particulier, c’est reprocher à la nation son génie, sa tournure d’idées, sa maniere de concevoir, les circonstances où elle s’est trouvée involontairement dans les différens tems de sa durée ; toutes causes qui ont sur le langage une influence irrésistible.
Je conçois, à la vérité, que, dans une intention de charité chrétienne et d’édification, un pasteur protestant, un prêtre catholique tentent encore l’entreprise. […] C’est une autre manière de concevoir une édition des Pensées ; c’est la plus prudente ; il se pourrait aussi que ce fût la meilleure. […] Taschereau, sont dirigées dans ce sens et conçues dans cet esprit73. […] Jusqu’à son dernier jour il aura quelque peine à concevoir qu’un gouvernement bien réglé permette aux Desfontaines, aux Fréron, aux La Beaumelle d’écrire contre un Voltaire. […] Merlet a conçu l’ouvrage dont il vient de publier le premier volume, avec ce titre général : Tableau de la littérature française, 1800-1813, et ce sous-titre : Mouvement religieux, philosophique et poétique.
cette fois nous sommes à plein dans la méthode de bien concevoir par le moyen des universaux et de bien juger par le moyen des catégories… Nous sommes tout simplement dans la théorie des trois unités, que Boileau, à tort ou à juste titre, trouve raisonnable. […] Entendez-le par sagesse, si vous voulez ; mais non vraiment par faculté de concevoir l’absolu ; car voyez la suite. […] Le censeur dont je parle donnerait lieu de croire qu’il n’a jamais conçu le sublime des psaumes de David, où il y a beaucoup de ces sens rompus qui servent même quelquefois à en faire sentir la divinité. […] Il se le fit, net, clair, peu chargé, composé de quelques titres seulement, mais aussi précis qu’en choses de lettres il se peut ; et il s’y tint, le développant seulement, avec les années, toujours dans l’esprit même où primitivement il l’avait conçu. […] Il est rare qu’un discours de Lamartine ne soit pas conçu ainsi.
Si l’antiquité païenne a conçu la fable de Psyché, il nous semble que c’est un chrétien qui l’interprète aujourd’hui. […] Quand l’auteur parle ensuite des ouvrages de Rollin, et qu’il entre dans des discussions importantes, il montre un esprit nourri de bonnes doctrines, et une tête capable de concevoir des idées fortes et sérieuses. […] D’où il résulte que Tacite avait conçu l’idée d’un gouvernement à peu près semblable à celui de l’Angleterre, et qu’en le regardant comme le meilleur en théorie, il le jugeait presque impossible en pratique. […] Bien plus, c’est par la seule imagination que l’on peut concevoir la spiritualité de l’âme et l’immatérialité des esprits : tant elle est loin de ne saisir que le côté matériel des choses ! […] Ces écrivains n’ont pas la force de produire la pensée qu’ils ont un moment conçue.
Un homme à cheveux coupés, comme nous, pourrait soumettre à ce prince des projets conçus avec la profondeur de Richelieu ou la prudence de Kaunitz, que pendant tout le temps de sa lecture, le prince n’aurait d’attention que pour la coiffure repoussante du ministre. […] Je conçois que, pour ces littérateurs estimables, le Romantisme soit une insolence. […] Qui même a jamais osé concevoir la folle espérance d’égaler ces grands hommes ?
Le mot étirement est heureux, séduisant ; mais à relire telle épopée, on n’arrive pas à concevoir ce procédé, ni pour le fond ni pour la forme ; considéré de plus près, il ne répond ni à la psychologie ni à l’esthétique. […] Lanson qui confirment ma thèse presque involontairement ; je pourrais aligner aussi une quantité de témoignages du xviie siècle, dont on n’a pas remarqué l’importance, parce que notre façon de concevoir la littérature de cette époque ne s’est pas encore libérée de préjugés traditionnels. […] nous avons combattu avec l’épée… ») révèlent à Augustin Thierry sa vocation d’historien ; et c’est une chaîne ininterrompue qui va de Thierry à Guizot, à Tocqueville, à Michelet, à Fustel de Coulanges, à Taine et à Renan ; c’est aussi par une intuition d’abord toute poétique que Gregorovius, un soir, sur un pont du Tibre, conçoit son Histoire de Rome.
Ballanche, l’Essai, en même temps qu’il répondait aux difficultés politiques du moment, devait servir comme de prolégomènes au poëme d’Orphée déjà conçu en 1816. […] Ballanche concevait, dès 1824, la Vision d’Hébal qui n’en est qu’un épisode et qu’il écrivit en 1829. — Des trois grands poëmes philosophiques, Orphée seul a paru au complet ; mais, outre la Vision d’Hébal, on a des fragments et chapitres des deux autres ouvrages que les Prolégoménes nombreux et féconds, en entier publiés, déterminent suffisamment.
Ces effusions avaient un charme plus grand et plus de prix, on le conçoit, dans une personne si judicieuse et avec un esprit si reposé. […] On conçoit avec cela qu’elle écrivait peu de lettres, et seulement pour le nécessaire.
Ce n’est donc pas tout de concevoir des caractères en poëtes ; il faut concevoir aussi en poëte l’action qui les manifeste.
En s’apercevant enfin du froid dénûment de la maison paternelle, la pauvre fille concevait une sorte de dépit de ne pouvoir la mettre en harmonie avec l’élégance de son cousin. […] bien autrement conçu que celui de Plaute, de Térence ou de Molière.
La femme elle-même, souvent si légère ailleurs, y est dépourvue de toute coquetterie, ce vain masque d’amour, et de toute inconstance, cette satiété du cœur qui se lasse avant la mort des attachements conçus avec réflexion. […] Le marquis Torregiani avait conçu et cultivé dès sa jeunesse une passion de cette nature petrarquesse pour une jeune et ravissante femme de race hébraïque, mariée à un banquier florentin.
Quand, au premier acte, Dorante se donne à Clarice pour un brave qui revient des guerres d’Allemagne, je le conçois : son vice peut lui servir. […] A l’époque où Molière conçut sa pièce, on était entêté de beau langage.
Peut-on concevoir un peintre aveugle ? Mais on peut concevoir, et on connaît, le Voyant aveugle !
D’un autre côté, à mesure que l’on conçoit mieux la grandeur purement humaine des événements historiques, l’épopée se change en chronique, comme dans la Chanson de Bertrand du Guesclin. […] La préoccupation du présent les absorbe tous tout entiers ; et aussi bien le conçoit-on si l’on songe en quel temps ils vivent.
Du grand Dieu le Père est né le Verbe, le Fils éternel, image archétype, essence égale à son auteur ; car la grandeur du Fils est la gloire du Père, et il a brillé d’une gloire telle que la conçoit le Père seul, ou celui qui resplendit égal au Père. […] Il aura rempli son saint ministère d’évêque, comme il le concevait, comme il l’exprimait dans un de ses discours, non moins poétique, non moins élevé que ses hymnes.
C’était une description large, transparente et très significative, des divers degrés de décroissement dans la foi par où passent les antiques religions avant de finir, et il indiquait en même temps sa manière de concevoir les croyances recommençantes.
Ce n’est là pourtant ni le pittoresque, ni la demeure possible de l’homme, ni même une merveille de gigantesque pour l’œil qui a vu les astres ou pour l’esprit qui conçoit l’univers.
Marivaux avait les goûts recherchés que l’on conçoit de la part d’une organisation si fine et si coquette, parure, propreté curieuse, friandise ; tout ce superflu lui était chose nécessaire.
Qu’il y ait eu dans la doctrine des derniers stoïciens, d’Épictète même et de Marc-Aurèle, un commencement de cette manière de concevoir l’affranchissement de l’esprit, je ne le nierai pas ; mais une telle pensée n’a eu son éclaircissement entier et son accomplissement que dans le christianisme et dans l’idée de Dieu qu’il est venu révéler au monde.
Il en voulait faire un quatrième, et il avait conçu le tout comme représentant les quatre saisons dans les quatre contrées principales de l’Italie.
Quand le roi l’eut fait grand maître de l’ordre de Saint-Lazare, en même temps qu’il s’adonna beaucoup au cérémonial et prêta à jaser aux railleurs, Dangeau conçut une idée utile, honorable : il fonda une pension à l’usage des jeunes gentilshommes de l’ordre, et qui visait à être dans son genre un pendant de Saint-Cyr.
Le même défaut de jugement paraît dans son grand ouvrage, non seulement dans ce menu de termes et matières inconnues à ce siècle, mais encore dans le dessein, lequel, par ce que l’on en voit, se fait connaître assez avoir été conçu sans dessein, je veux dire sans un plan certain et une économie vraiment poétique, et marchant simplement sur les pas d’Homère et de Virgile, dont il faisait ses guides, sans s’enquérir où ils le menaient.
Villars est plein de verve et d’ardeur, il se dévore ; il conçoit à tous moments des plans, des possibilités d’entreprise là où d’autres jugent qu’il n’y a rien à faire.
Montesquieu écrit peu (autant du moins qu’on en peut juger par ce qu’on a), et il écrit sans prétention : son grand esprit, sa forte et haute imagination, sa faculté élevée de concevoir et son talent de frapper médaille ou de graver, sont tout entiers tournés et employés à ses compositions savantes et rares.
Si nous revenons à Genève, le baromètre intellectuel et moral y dut éprouver de grandes variations et perturbations, on le conçoit, de la présence dans le voisinage de ces deux météores du xviiie siècle, Voltaire et Rousseau, du passage orageux de l’un et du séjour prolongé de l’autre.
Hauréau pour ses travaux d’érudit et pour autre chose encore, il ajoutait : « … Son cœur ne cessant pas de battre pour toutes les nobles causes au milieu de ses arides travaux, on pourrait craindre qu’il ne fît une aussi mauvaise fin que M. de Tocqueville, s’il ne paraissait vraiment destiné par la nature à vivre très longtemps… » J’avoue que je conçois peu l’ironie prolongée en telle matière.
Ils organisèrent les armées, conçurent des plans de campagne, préparèrent les approvisionnements.
Lacretelle l’académicien entrant à l’improviste à ce moment de la lecture ; il venait en visite et n’était pas des invités ; j’ai, encore présent à l’esprit son visage étonné, car il ne savait absolument de quoi il s’agissait, et il avait peine évidemment à concevoir ce que faisait tout ce beau monde attentif à écouter une description si peu engageante.
Repousser tout examen, toute comparaison entre ces témoins ou ces narrateurs, reconnus sincères et authentiques, n’a jamais été la voie la plus sûre pour arriver au respect et à la vénération la mieux conçue en ce qui regarde la mission et les paroles du maître.
Flaubert, pour l’éclaircir et pour orienter les curieux, un instrument indispensable, une carte de Carthage, un plan de l’isthme, des localités et des monuments tels que l’auteur les a conçus : toute une partie estimable du livre y gagnerait.
Il nous est aujourd’hui facile, aidés par de tels devanciers, par des maîtres qui nous ont élaboré la matière et qui nous épargnent les tâtonnements, de voir juste en un clin d’œil, de nous établir tout d’abord au vrai point de vue pour apprécier ces monuments d’une littérature et d’un art que nous concevons désormais en eux-mêmes et sous leur forme accomplie, sans leur demander autre chose que ce qu’ils sont.
Il y a une scène fort belle où Sibylle ne me paraît pas excéder la mesure du possible : c’est lorsque la duchesse Blanche, son amie, mariée par raison à un homme estimable, retrouve après des années celui que toute jeune elle préférait et de qui elle aurait aimé à faire choix, et lorsque entraînée sur une pente rapide elle se sent bien près de manquer à ses devoirs : dans son trouble, elle s’ouvre tout d’un coup à Sibylle, à cette jeune fille grave, et pour qui elle a conçu une haute estime.
Est-il pourvu de cet instinct qui porte certaines organisations privilégiées à donner à tout ce qu’elles conçoivent une forme émanée directement de l’art ?
Il suffit que « tout uniment et avec des paroles claires, honnêtes et bien disposées, dans une période sonore, et par le cours naturel d’un récit amusant, l’auteur peigne ce que son imagination conçoit et qu’il fasse comprendre ses pensées sans les embrouiller ni les obscurcir : « Tâchez aussi, se fait-il dire par un interlocuteur de ses amis, qu’en lisant votre histoire, le mélancolique s’excite à rire, que le rieur augmente sa gaieté, que le simple ne s’ennuie pas, que l’habile admire l’invention, que le grave ne la méprise point, et que le sage se croie tenu de la louer.
Depuis que j’erre au gré des sombres destinées ; Du jour où je conçus mon funeste dessein, Assez de vers rongeurs ont dévoré mon sein ; De regrets déchirants ma fuite fut suivie ;.
On dresse des procès-verbaux de tout, et grande exactitude pour l’authenticité y est observée. » Racine acceptait et rapportait ces faits favorables aux amis sans concevoir ni admettre l’ombre d’un doute ; il ne manquait pas de se redire tout bas à lui-même : Et quel temps fut jamais si fertile en miracles ?
Le maréchal de Belle-Isle en conçut d’abord de l’humeur : il eût voulu une exception par rapport à lui en particulier.
. — C’est que, sans doute, dans la tragédie telle qu’il la concevait, Racine n’avait nullement besoin de ce franc et libre langage ; c’est que les Plaideurs ne furent jamais qu’une débauche de table, un accident de cabaret dans sa vie littéraire ; c’est que d’invincibles préjugés s’opposent toujours à ces fusions si simples que combine à son aise la critique après deux siècles.
La force, la loyauté guerrière, la vérité, comme attributs de la force, étaient les seules idées qu’ils eussent jamais conçues de la vertu.
Ils n’ont point de romans, comme les Anglais et les Français, parce que l’amour qu’ils conçoivent n’étant point une passion de l’âme, ne peut être susceptible de longs développements.
Ceux que leur destinée approche des premières places, croient voir une preuve de mépris pour eux, dans l’espérance qu’on conçoit de franchir l’espace qui en sépare, et de se mettre par ses talents, au niveau de leur destinée.
Hugo, la Tristesse d’Olympio ; Musset, le Souvenir : un seul thème, trois tempéraments de poète, trois façons de sentir, par suite de concevoir la destinée de l’homme.
Des libraires avaient pensé à une publication sur le modèle de l’Encyclopédie anglaise de Chambers : mais ce fut Diderot qui conçut l’efficacité philosophique de l’entreprise.
À certains moments, ils se précipitent d’un tel train qu’on n’entend plus que leur bruit sans en concevoir le sens ; c’est assurément un défaut que mon parti pris d’extase ne saurait m’empêcher de reconnaître.
Nous concevons aujourd’hui tout autrement notre rôle ; l’artiste, parmi la dislocation des castes, des partis et des hiérarchies, va être le circulateur d’idées, le « quatrième pouvoir » mêlé à tout, influant sur tout.
Dans ces Pensées, publiées quatre ans après, mais conçues vers le même temps, ce grand génie, franchissant les siècles, cherchait les principes et la sagesse bien au-delà des expériences du temps présent, auquel La Rochefoucauld était resté trop attaché.
Sa famille, qui avait espéré le revoir une dernière fois, et l’embrasser le matin même de sa mort, est dans la désolation qu’on peut concevoir : Mais rien, écrit Madame, n’était capable de calmer les angoisses de ma mère ; on ne pouvait faire entrer aucune espérance dans son cœur : il lui était devenu indifférent de vivre ou de mourir.
Cependant la douce et honorable hospitalité de Vienne ne suffisait pas au maréchal ; il se sentait encore des forces, de l’ardeur, une curiosité active ; pour la satisfaire, pour tâcher de donner « un nouvel intérêt à son existence », il conçut le projet d’un grand voyage à travers la Hongrie, la Russie méridionale, jusqu’en Turquie, en Syrie et en Égypte.
On conçoit bien cette prédilection de Franklin pour le monde lettré d’Édimbourg ; il a en lui de cette philosophie à la fois pénétrante et circonspecte, subtile et pratique, de cette observation industrieuse et élevée ; comme auteur d’essais moraux, et aussi comme expérimentateur et physicien, comme expositeur si clair et si naturel de ses procédés et de ses résultats, il semble que l’Écosse soit bien sa patrie intellectuelle.
En cette conception nouvelle, il procéda, comme précédemment, par affirmations énergiques, tranchantes et répétées, sans instituer une théorie qu’il eût été très incapable de concevoir et sans passer par des raisonnements qu’il eût été bien incapable d’enchaîner, ni par des observations historiques dont tout élément lui manquait.
Huysmans a conçu un type de phrase particulier, où par une accumulation d’incidentes, par un mouvement pour ainsi dire spiraloïde, il est arrivé à enclore et à sertir en une période, toute la complexité d’une vision, à grouper toutes les parties d’un tableau autour de son impression d’ensemble, à rendre une sensation dans son intégrité et dans la subordination de ses parties : « Sur le trottoir des couples marchaient dans les feux jaunes et verts qui avaient sauté des bocaux d’un pharmacien, puis l’omnibus de Plaisance vint, coupant ce grouillis-grouillos, éclaboussant de ses deux flammes cerise, la croupe blanche des chevaux, et les groupes se reformèrent, troués çà et là par une colonne de foule se précipitant du théâtre Montparnasse, s’élargissant en un large éventail qui se repliait autour d’une voiture que charroyait en hurlant un marchant d’oranges ».
En général, pour les métaphysiciens, l’âme était considérée, non comme un sujet, mais comme un objet, objet de raison pure, non des sens, mais toujours conçu et aperçu du dehors, \ non du dedans.
Je conçois très bien que toute cette littérature cadavérique, qui n’est pas une ironie, donne au cadavre vivant de tel vieux critique la peur désagréable d’être tout à fait un cadavre demain, et que cela influe légèrement sur son impartialité.
Or, je crois et je vais essayer de prouver que les abonnés de ce journal ou de cette revue sont dans leur tort ; que le roman tel qu’ils le conçoivent et l’imposent est une œuvre fausse et néfaste ; que le roman pour les jeunes filles ne saurait être autre chose qu’un accident heureux, dans une littérature qui n’est pas faite pour elles.
Qu’un roman puisse à la rigueur se passer d’aventures et d’intrigue, de composition et de style, de grammaire et d’esprit, on le conçoit encore ; et il y en a des exemples ; mais ce que l’on n’a jamais vu, c’est un roman sans psychologie.
Dès que j’appris que cette précieuse collection était à la Bibliothèque royale de Paris, on conçoit avec quel empressement j’y recherchai tout ce qui pouvait s’y rapporter à l’histoire de la philosophie du dix-septième siècle.
Mais ce n’est encore que l’étude contemplative de l’artiste ; ce n’est pas l’ode épique et dramatique, comme Pindare l’a conçue dans son récit du voyage des Argonautes et de la fondation de Cyrène, ou dans ses allusions au combat de Salamine.
Et il serait difficile de concevoir un état en apparence plus différent de l’état actuel. […] comment il conçut les Pèlerins d’Emmaüs. […] Or comment concevoir la fusion, chez le même individu, de la nature encline à l’exaltation bruyante des sentiments avec celle que le monde extérieur sollicite avant tout ? […] Les années vécues hors de Belgique développèrent chez lui l’amour de la vie d’abord, puis d’un lyrisme plus large, plus ample ; il conçut ce poème assez long pour former tout un livre, La Chanson d’Ève. […] Francis Nautet concevait en effet, la critique de façon nouvelle.
Gustave Doré, l’heureux illustrateur de Dante, et nous le concevons sans peine. […] Peut-être la véritable illustration de Don Quichotte devrait-elle consister en deux portraits fortement conçus et longtemps médités du chevalier de la Manche et de son écuyer, et dans la reproduction de leurs aventures principales. […] L’ange de l’enthousiasme l’enlève par les cheveux, comme autrefois le prophète, pendant que le monde picaresque s’accroche à ses pieds, et, ainsi tiré en double sens, son maigre corps s’allonge encore et présente le tableau le plus comique qui se puisse concevoir. […] Le poète doit peindre des caractères, cela est vrai, mais ces caractères ne doivent pas être artificiellement, conçus : ils doivent être le résultat même de la vie. […] Nous disons heureusement, et en effet concevez-vous Werther vieillissant au milieu de ces tracasseries et de ces ennuis, sa mélancolie poétique se changeant en humeur chagrine, Werther devenant aigre, grognon, insociable ?
C’est pour répondre à une note conçue dans ce sens, que l’empereur adressa à M. […] N’osa-t-il pas répondre un jour à l’empereur qui, en parlant de ses préventions contre le Journal des Débats, avait dit qu’il ne revenait point de préventions une fois conçues : « Sire, quand on est né sur le trône, on n’a point de préventions conçues, mais des préventions reçues, car on ne connaît pas même ceux contre lesquels on les nourrit. » — « Né sur le trône passa à merveille », continue M. […] Il se soumit sans résistance, mais sans enthousiasme à l’empire, avec cette défiance qu’il concevait toujours à l’aspect de la violence, et, à partir de ce moment, il cessa sa correspondance avec Louis XVIII. […] Ce fut alors qu’en méditant sur les ravages qu’avait faits la philosophie du dix-huitième siècle, il conçut le dessein de la combattre systématiquement dans une suite de conférences où il rétablirait toutes les vérités religieuses ébranlées par elle. […] L’itinéraire de lord Byron était largement conçu ; il voulait, avec son ami sir John Cam Hobhouse, visiter, outre une partie de notre continent, la Grèce, la Turquie, et même pénétrer dans l’Inde.
La réalité me paraît toujours si sublime, si immense, si divine, que je ne conçois pas qu’on ne veuille strictement s’y tenir. […] « De qui je l’ai conçu, cet enfant dans mon sein, je ne vous le dirai pas ! […] * * * Je ne conçois pas que dans les journaux on n’ait pas imaginé une division synthétique basée sur l’art culinaire. […] L’un ne conçoit pas que l’homme soit là pour autre chose que de vivre libre et content, et qu’il ne puisse dresser sa tige en haut qu’à la condition de jeter des raisins. […] À des idées maigres, je conçois qu’on fasse des draperies flottantes et épaisses.
Ce n’est pourtant qu’un portrait, et conçu évidemment sans aucun parti pris d’exagération symbolique. […] Il ne faut pas moins qu’une longue réflexion pour les amener à concevoir qu’ils ne sont pas le centre des choses. […] Non qu’il juge indigne de lui la fatigue d’agir : mais son tempérament porté à l’excès lui fait paraître méprisable tout ce qui n’est pas la perfection absolue, et la perfection qu’il conçoit est faite d’éléments incompatibles. […] Couperus a conçu l’importance politique de son jeune héros. […] « Rien n’empêche, dit-il, de concevoir un roman mystique ayant une forme naturaliste. » Et M.
Il faudrait avoir des années, des lustres devant soi, pour aller s’embarquer dans une étude conçue et tracée sur cette échelle et dans cette proportion. […] Raynouard et M. d’Orell de Zurich, non-seulement il a complété, perfectionné, agrandi les recherches de ces deux savants philologues par une foule d’observations très-fines et très-justes, mais encore il a conçu et exécuté sur les dialectes français un travail dont personne avant lui ne paraît avoir eu l’idée26. » Il divisa la langue d’oïl et la rangea en trois principaux dialectes, le picard, le normand et le bourguignon.
Il est vrai que nous pouvons découvrir des défauts dans l’un et dans l’autre ; mais il ne faut pas confondre la faculté d’apercevoir des taches au soleil, avec celle de concevoir un soleil plus beau. […] Elle découvre en un clin d’œil une foule d’aperçus, dont la piquante variété ne semble point impliquée dans la sensation simple du comique ou du beau, et l’on ne conçoit pas par quelle mystérieuse analyse elle a su tirer tant de choses, du fait d’être émue et d’admirer.
Il s’amusait à concevoir la présence d’un objet bizarre, et, à peine formé dans son imagination, cet objet se traduisait fidèlement à ses yeux… J’ai moi-même recueilli un cas de ce genre… chez un monomaniaque, homme d’un esprit fort cultivé et d’un caractère plein de sincérité, qui m’a assuré à plusieurs reprises qu’il n’avait qu’à se rappeler ou à concevoir une personne ou une chose, pour qu’aussitôt cette chose ou cette personne lui parussent douées d’une apparence d’extériorité. » Il n’y a pas même besoin d’être malade ou sur le bord du sommeil pour assister à la métamorphose par laquelle l’image se projette ainsi à demeure dans le dehors.
Un lettré d’un ordre inférieur osa lui présenter sur le chemin une requête conçue en termes irrespectueux, pour lui intimer le conseil de se retirer du trône et de se nommer enfin un successeur. […] On le conçoit : la guerre, en elle-même, est une barbarie ; les philosophes et les lettrés chinois la réprouvent ; ils la considèrent comme un exercice criminel de la force brutale qui ne prouve rien et qui détruit tout.
Il eut le vertige de l’Italie ; il conçut une peinture nouvelle, tout imprégnée de la pureté des lignes des horizons romains, de la beauté des têtes transtévérines, de la mâle sévérité des attitudes de ce peuple-roi, dont la majesté se révèle dans le pasteur des Abruzzes comme un diadème égaré des palais et retrouvé dans les cabanes, enfin de cette lumière de fournaise ardente qui se vaporise en touchant la terre et qui immerge toute la nature dans un océan de clartés, doublant les objets par les ombres crues qu’elle projette sur leur face obscure. […] Il ne peut concevoir cette sibylle de salon, drapée par la marchande de modes et donnant rendez-vous à ses amis sur un écueil lavé par l’écume, pour écouter une déclamation à froid, puisée dans des rhétoriques de demoiselles.
Entré dans une espèce d’université militaire à Stuttgart, Schiller, d’un extérieur alors grêle, pâle, maladif, commença sa vie par la tristesse, et conçut une révolte secrète contre la servitude disciplinaire à laquelle les élèves de cette école étaient assujettis. […] On voit, par sa correspondance avec Goethe, qu’il le conçut un jour d’inspiration, mais qu’il l’exécuta en trois ans d’étude et de retouches.
On conçoit l’étonnement et la juste colère qui saisirent les ministres et le roi à Cagliari quand les ministres et le roi apprirent avec stupeur cette incartade de zèle et cette folie de fidélité dans leur ministre à Pétersbourg. […] Alors il tomba sur le Piémont. — Pourriez-vous concevoir, Monsieur, l’idée d’une restitution ?
C’est par lui que j’appris que l’Arioste, dans un voyage qu’il fit à Florence, vers l’âge de quarante-cinq ans, conçut un amour sérieux et durable pour une charmante veuve florentine à laquelle il adressait mentalement toutes les louanges qu’il donne aux femmes belles et vertueuses, et dont il retraçait quelques souvenirs dans chacun des délicieux portraits de femmes dont son poème est illustré. […] Elle fit plus ; triomphant de l’amour qu’elle ressentait pour l’ingrat duc d’Albanie, Olinde servit l’amour ambitieux qu’il avait conçu pour la princesse.
Il n’est pas possible d’exprimer ni même de concevoir à quel point de scélératesse ce monstre était parvenu. […] La mort lui ayant enlevé bientôt après sa fille Tullia, délices et orgueil de son cœur, il en conçut une telle douleur qu’il s’offensa de ce que cette douleur n’était pas assez partagée par sa nouvelle épouse, jalouse, sans doute, de n’être pas le seul objet de ses tendresses, et qu’il s’éloigna d’elle et se renferma dans la solitude avec ses larmes et son génie.
Une fois ces objections écartées, Aristote revient à son sujet, et il recherche comment on peut concevoir qu’un mouvement soit éternel. […] Mais, en se mettant au point de vue de la seule raison, il est plus conforme à ses lois de concevoir le moteur avant le mouvement ; car, à moins d’acquiescer à ces systèmes qu’Aristote a cru devoir combattre, et qui expliquent tout par les seules forces de la matière, il faut bien admettre que les choses n’ont pu être mues que par un moteur préexistant.
Les amis de ce couple aimable concevaient, de leur union, de flatteuses espérances. […] Cet équilibre entre le possible et le chimérique lui manqua presque toujours, et il mourut grand pour ce qu’il avait conçu, petit pour ce qu’il avait accompli.
Julie, éclairée par la religion, par le sentiment de l’omniprésence de Dieu, conçoit l’idée d’une vie absolument franche. […] En revanche, les dépôts que cent cinquante ans de la vie genevoise auront laissés dans une suite de générations, se retrouveront dans Rousseau ; toute cette lignée de bourgeois de Genève qui se termine à lui, le rendra apte à concevoir la liberté politique, l’activité municipale, un peuple de citoyens égaux exerçant réellement la souveraineté et s’administrant par des magistrats élus.
Je conçois très bien qu’on l’incrimine parce qu’il a manqué de direction politique, et que tout découle de là. […] On conçoit fort bien que, pour un royaliste, le xixe siècle soit « stupide », puisqu’il ne comporte que trente-quatre années de royauté.
Toujours ceux-là ont composé de la musique sur des textes donnés ; Wagner concevait musique et paroles simultanément, ou plutôt, le drame est né « dans le sein maternel de la musique ». […] On ne conçoit pas que le poème si puissamment original de Wagner ait pu exercer une action aussi nulle et inspirer cette espèce de feuilleton rimé de petit journal.
Le mot d’ordre de la journée de Mycale fut Hébé, la déesse de la Jeunesse « aux beaux pieds », comme la surnomment les poètes, la servante céleste que Héra avait conçue en respirant une rose. […] Si nous les voyons si fiers et si beaux, c’est qu’ils furent conçus au sein du bonheur, fils de l’orgueil et de la joie d’un peuple affranchi.
Alors, conçoit-on un ciron incestueux, criminel ? […] Edmond. » Et elle rentre dans la salle à manger et elle lui fait signe de s’asseoir à côté d’elle : « Je n’ai pas lu votre dernier livre, et je ne peux plus vous recevoir… On me le défend… Oui, j’aime mieux vous le dire… Nous qui vous aimons tous tant là-bas… » Et de l’œil, elle lui donne le sourire d’amitié que lui jettent ses petites filles, en tournant dans leur danse, au tapotement du piano, tenu par la vieille grand-mère à lunettes. « Oui, M. *** — et elle nomme son mari — a une jalousie contre vous que je ne m’explique pas… » Elle reprend : « Ça le rend tout à fait malheureux… Entre moi et lui, ça n’a jamais été formulé d’une manière bien nette… mais cela a amené pourtant des scènes dans notre intérieur… Oui, il faut que nous renoncions à ce plaisir tous… Concevez-vous qu’il m’empêche de vous lire… Que voulez-vous, nous nous retrouverons, une fois par an, comme cela par hasard… Cela me pesait depuis longtemps, j’ai mieux aimé que vous le sachiez. » Et mon frère la quitte, persuadé, comme moi, que cette femme qui vient presque de lui avouer la tendresse de sa pensée, ne ferait jamais pour lui, s’il en devenait vraiment amoureux, le sacrifice de son orgueil d’honnête femme.
Soldat de l’Église militante, il a trop de foi religieuse dans l’âme, et dans l’esprit trop de facultés positives, pour concevoir l’histoire à la manière des sceptiques et des philosophes. […] Il concevait l’histoire et l’a réalisée, sévère et railleuse en même temps, spirituelle et lyrique, respectueuse et insolente, épique et familière comme la vie des hommes et des peuples.
Ce n’est pas en des temps de Fronde qu’il eût appris à les concevoir, et c’est pour avoir, en ses jeunes années, en sa saison de verve et d’entreprise, vu réunies entre les mains de Richelieu les pièces merveilleuses de cet assemblage, c’est pour lui avoir vu reconquérir ce Roussillon aliéné depuis un siècle et demi, et lui avoir vu refaire en tous sens une France, qu’il a su mêler lui-même à son Histoire cet esprit français étendu, cette intelligence d’ensemble qui y subsiste à travers les remarques plus ou moins libres et les réflexions conformes à notre vieux génie populaire.
sens, mémoire et bonne souvenance de toutes les choses passées, esprit clair et aigu pour concevoir tous les faits dont je pourrois être informé, âge, corps et membres pour souffrir peine24, je m’avisai que je ne voulois point tarder de poursuivre ma matière ; et pour savoir la vérité des lointaines besoignes et entreprises, sans que j’y envoyasse aucune autre personne en mon lieu, je pris voie et occasion raisonnable d’aller devers haut prince et redouté seigneur monseigneur Gaston, comte de Foix et de Béarn… Le comte de Foix ne l’a jamais vu, mais il le connaît de réputation et a bien souvent entendu parler de lui.
On conçoit d’ailleurs ces dissidences naturelles et cette sorte d’antipathie instinctive entre une école scientifique tout analytique et précise, et une autre qui ne se refusait ni l’éclat ni les couleurs ; mais d’Alembert se laissait emporter à ses préventions personnelles lorsqu’il disait à propos des systèmes de Bailly et de Buffon qu’il associait dans sa pensée : « Supplément de génie que toutes ces pauvretés ; vains et ridicules efforts de quelques charlatans qui, ne pouvant ajouter à la masse des connaissances une seule idée lumineuse et vraie, croient l’enrichir de leurs idées creuses… » Dans la familiarité de la correspondance et lorsqu’il n’est point retenu par le public, d’Alembert s’abandonne souvent ainsi à des injustices presque injurieuses, dites d’un style assez commun.
C’est ainsi que dans la démonstration de la première vérité, qui est l’existence de Dieu, avec les attributs principaux qui en achèvent l’idée, Charron, au lieu de s’appuyer sur le sens commun, sur le sentiment général humain si d’accord avec cette croyance, insiste bien plutôt d’abord sur les difficultés et les impossibilités de concevoir dans sa grandeur propre cette idée infinie ; il dit avant Pascal, et en termes encore plus formels, qu’il y a une sorte de négation absolue non seulement du Dieu-Providence, mais de la cause première, qui ne se peut loger « que dans une âme extrêmement forte et hardie » ; il est vrai qu’il ajoute aussitôt : en une âme « forcenée et maniaque ».
Il doit cependant au commerce de son maître et ami, et à son propre sens, bien de bonnes pensées qu’il exprime heureusement : dès le début de son second livre, où il en vient à exposer les instructions et règles générales de sagesse, il remarque combien, telle qu’il l’entend et qu’il la conçoit, elle est chose rare dans le monde, et il le dit avec bien de la vivacité (je suppose que l’expression dans ce qui suit est de lui et non de Montaigne, car je n’ai pas tout vérifié, et l’on a toujours à prendre garde, quand on loue Charron, d’avoir affaire à Montaigne lui-même) : Chacun, dit-il donc, se sent de l’air qu’il haleine et où il vit, suit le train de vivre suivi de tous : comment voulez-vous qu’il s’en avise d’un autre ?
Le nom d’écrivains proprement dits continue d’appartenir à ceux qui de propos délibéré choisissent un sujet, s’y appliquent avec art, savent exprimer même ce qu’ils n’ont pas vu, ce qu’ils conçoivent seulement ou ce qu’ils étudient, se mettent à la place des autres et en revêtent le rôle, font de leur plume et de leur talent ce qu’ils veulent : heureux s’ils n’en veulent faire que ce qui est le mieux et s’ils ne perdent pas de vue ce beau mot digne des temps de Pope ou d’Horace : « Le chef-d’œuvre de la nature est de bien écrire. » Les autres, les hommes d’action, qui traitent de leurs affaires, ne sont écrivains que d’occasion et par nécessité ; ils écrivent comme ils peuvent et comme cela leur vient ; ils ont leurs bonnes fortunes.
Certes, il ne se peut concevoir de dissection plus vive, plus pénétrante dans le sens de La Rochefoucauld, ni venant d’une main plus ferme et plus souveraine.
La Bruyère, chargé de raccommoder ces petites déchirures, écrivait à Santeul, ou le chapitrait quelquefois dans l’embrasure d’une croisée ; mais Santeul était difficile à former, et il fallait toujours en revenir sur son compte à cette conclusion du grand moraliste et du censeur amical, qui lui disait : « Je vous ai fort bien défini la première fois : vous êtes le plus beau génie du monde et la plus fertile imagination qu’il soit possible de concevoir ; mais pour les moeurs et les manières, vous êtes un enfant de douze ans et demi. » Cette insigne faveur de Santeul à Chantilly faisait grand bruit dans la rue Saint-Jacques et ailleurs, et ne laissait pas de donner quelque jalousie : « Santeul est fier, Santeul nous néglige depuis que des altesses lui font la cour ; il ne daigne plus venir même à Bâville, il ne s’abaisse plus jusqu’à nous. » Ainsi disait-on en bien des lieux.
Mais on conçoit très bien cette supériorité de M. d’Avaux sur son ami ; les esprits sérieux et nourris de choses solides, s’ils viennent à se détendre, l’emportent sur les esprits légers qui ont passé leur vie à voltiger sur des pointes d’aiguilles et à enfler des bulles de savon.
Il lui semblait, comme à Martial, que pour créer des poètes, et de grands poètes, il ne s’agissait que de les encourager par des largesses ; il pense là-dessus comme Clément Marot, comme les poètes valets de chambre (avant que Molière en fût) ; il n’a pas de doctrine plus relevée, et, dans une pièce imitée de Martial même, il le dit très lestement au maréchal de Noailles, l’un de ses patrons d’autrefois : Dans ce beau siècle où Paris est au faite, Grâce à son roi, des biens, des dignités, Où sous son ombre elle élève sa tête Cent pieds de haut sur les autres cités, À concevoir vous trouvez difficile Pourquoi ce roi, plus couvert de lauriers, Plus grand qu’Auguste, a manqué de Virgile Pour consacrer ses triomphes guerriers.
La peste, la famine sévissent parmi les troupes ; les colonels et capitaines Grisons s’irritent faute de paye et quittent leurs postes, le conseil des ligues pense à de nouvelles alliances : point d’argent, point de Grisons. « Il ne se passe semaine, écrivait Rohan à M. des Noyers dès le mois de juillet, que je ne vous écrive l’état de ce pays, et je n’apprends pas seulement que vous receviez mes lettres, ce qui me fait croire que vous ne prenez pas la peine de les lire. » Les amères doléances de Rohan du fond de sa Valteline arrivaient pendant que les Espagnols prenaient Corbie et menaçaient la capitale ; on conçoit qu’elles aient été médiocrement écoutées.
La seule oraison funèbre qui se conçoive pour l’épicurien sincère est celle-ci : « Tout est fini, c’est irréparable ; nous-mêmes nous y serons demain.
Or, c’est précisément de cet éminent degré de condition et de fortune qu’elle va partir, à cet âge, pour désirer au-delà et pour concevoir de plus hautes espérances.
Ce collège ou syndicat, placé au-dessus du bailli, était destiné à réviser les procès, à contrôler les comptes : véritable tribunal en seconde instance, et duquel on pouvait encore appeler aux douze cantons ; mais on conçoit qu’un appel à douze souverains et à douze pays était à peu près illusoire.
On conçoit qu’un moraliste satirique et souvent personnel comme il l’était, se fût fait une nuée d’ennemis que l’incroyable succès de son livre excitait sans cesse.
Conçoit-on un éditeur, au contraire, qui intervient à tout propos à travers son auteur, parle en son propre nom durant des pages, exprime son opinion sur les événements et sur les personnes, prétend dicter à chacun le ton et donner la note sur ce qu’on peut juger aussi bien que lui ; qui déclare que la France, après s’être incarnéedans Napoléon, s’incarna une seconde fois dans Béranger, et que, depuis 1815 jusqu’en 1857, « la poésie de Béranger est Vessieu sur lequel tourne notre histoire : il a mû quarante ans nos destinées !
D’abord destiné au barreau, on conçoit qu’il eût fait un bien spirituel, un charmant et caustique avocat.
L’Académie française, où il n’y a pas de sections, bien que l’on pût à la rigueur en concevoir (sections de langue et de grammaire, de poésie dramatique, de poésie lyrique, d’histoire, d’éloquence proprement dite, de roman, de critique littéraire, j’y reviendrai tout à l’heure), l’Académie française, loin de voir un inconvénient dans le hasard et la mêlée des candidatures, tient à honneur d’être affranchie de tout examen préalable et de tout ordre prévu et réglé en matière d’élection ; elle estime que les qualités générales qui constituent le littérateur distingué, en quelque genre que ce soit, et l’homme de goût, sont suffisamment appréciées et senties par chacun de ses membres, et que prétendre faire plus, vouloir tracer des divisions et des compartiments, ce serait apporter en cette matière délicate une rigueur dont elle n’est point susceptible, et qui en froisserait et en fausserait la finesse.
Il était parvenu à triompher d’eux tous au moment de la majorité du jeune roi qui se déclara pour lui : devenu à son tour premier ministre (1677), maître de la personne du roi et du gouvernement de l’État, il ne sut pas justifier les espérances qu’avait fait concevoir son élévation.
C’est la guerre ouverte et déclarée entre les gens positifs, formant le gros de la société, et le poëte ainsi conçu.
Comme toutes les facultés humaines y trouvaient à la fois leur compte ; et que l’on conçoit bien que les saint Bernard, les saint Bonaventure et toutes ces âmes mystiques et ardentes qui nous sont personnifiées sous de tels noms, y trouvassent leur fête et leur complet rassasiement !
Dans une composition autrement conçue, et où l’on aurait moins usé jusque là des grands moyens, ce passage ferait de l’effet ; mais les nerfs humains ne sont pas des cordages, et, quand ils en ont trop, quand ils ont été trop broyés et torturés, ils ne sentent plus rien.
Si l’estime que j’ai conçue pour vous, ô mes divins amis, pouvait être une illusion, faites quelle soit éternelle. » C’est en ces termes que Deleyre écrivait à Jean-Jacques déjà méfiant et soupçonneux.
Desjardins n’a pas prétendu, dit-il, faire un ouvrage, mais un essai ; il a pris un sujet de thèse historique, comme il était naturel de le concevoir à un homme qui s’est particulièrement occupé de cet immense et incommensurable champ de l’histoire.
Mais ayant fait deux fois naufrage et ayant perdu en dernier lieu, à son retour de Saint-Domingue, tout le fruit de ses économies, il se dégoûta de la mer et conçut l’idée de se consacrer au ministère évangélique.
Malheureusement les propos tenus par plusieurs ministres du roi dans les Cours ont fait croire le contraire. » Dans de telles conjonctures, Marie-Antoinette, on le conçoit, ne réussit à rien tirer de bien net des ministres qui sont et doivent être plus Français qu’elle, et qui ne se décident point sur des impressions et d’après des convenances de famille : « Pour le roi personnellement, il est bien attaché à l’alliance, et autant que je puisse le désirer ; mais, pour un moment aussi intéressant, je n’ai pas cru devoir me borner à en parler au roi : j’ai vu MM. de Maurepas et de Vergennes ; ils m’ont fort bien répondu sur l’alliance et m’y paraissent véritablement attachés ; mais ils ont tant de peur d’une guerre de terre, que quand je les ai poussés jusqu’au point où le roi de Prusse aurait commencé les hostilités, je n’en ai pu avoir de réponse bien nette. (25 mars 1778.) » Novice qu’elle est dans ces sortes d’affaires, elle ne démêle pas très distinctement les motifs qui font agir nos ministres et les intérêts véritables qu’elle aurait dû comprendre comme eux, ce qui lui aurait permis d’agir de concert vers le seul résultat possible.
Il ne se laisse point éblouir par l’alliance de Tilsitt et par ce concert entre les deux colosses « qui n’était nullement une œuvre pacifique, mais bien au contraire la plus formidable combinaison de guerre qui ait jamais été conçue. » Il indique et dénonce dans le duché de Varsovie, formé dès lors (1807) et comme déposé au sein de l’alliance, un germe de dissensions futures.
Sur la reine Marie-Leckzinska, y revenant à deux reprises et marquant tous les devoirs qu’il faudra que la dauphine remplisse envers elle avec exactitude, il satisfait d’ailleurs et tranquillise l’orgueil saxon en ajoutant que ce n’est que pour la forme et la bienséance : « Car cette princesse, je l’ai déjà dit, ne peut rien et n’a pas assez de génie pour pouvoir quelque chose. » Tous ces succès le mettent, on le conçoit, en belle humeur et en gaieté ; il joue avec le ministre de son frère, le comte de Bruhl, dont il n’avait pas toujours eu à se louer ; il le raille en passant, et faisant allusion aux conditions politiques très peu onéreuses que Louis XV mettait au mariage : « Il ne tient donc plus qu’à vous, écrivait-il, de conclure l’affaire qui est grande, belle et magnifique, et aura des suites encore plus grandes ; mais, pour l’amour de Dieu, concluez et n’apportez ni délais ni difficultés.
Voilà ce que je me hasarderais à penser de la politique de conservation, en idée du salut du pays, si toutefois je m’étais accoutumé d’assez longue main à concevoir le salut et l’honneur du pays sous ces sortes d’aspects.
Un célèbre poëte de nos jours, qu’on a souvent comparé à La Fontaine pour sa bonhomie aiguisée de malice, et qui a, comme lui, la gloire d’être créateur inimitable dans un genre qu’on croyait usé, le même poëte populaire qui, dans ce moment d’émotion politique, est rendu, après une trop longue captivité, a ses amis et à la France, Béranger, n’a commencé aussi que vers quarante ans à concevoir et à composer ses immortelles chansons.
Zola conçut la formule naturaliste comme une « méthode scientifique appliquée aux lettres ».
. — On pourrait prolonger ces exemples ; mais comme la véritable difficulté de cette idée n’est pas de la concevoir abstraitement, mais de l’appliquer avec précision, il suffit de l’indiquer.
Considérer tour à tour chaque province distincte de l’action humaine, décomposer les notions capitales sous lesquelles nous la concevons, celles de religion, de société et de gouvernement, celles d’utilité, de richesse et d’échange, celles de justice, de droit et de devoir ; remonter jusqu’aux faits palpables, aux expériences premières, aux événements simples dans lesquels les éléments de la notion sont inclus ; en retirer ces précieux filons sans omission ni mélange ; recomposer avec eux la notion, fixer son sens, déterminer sa valeur ; remplacer l’idée vague et vulgaire de laquelle on est parti par la définition précise et scientifique à laquelle on aboutit et le métal impur qu’on a reçu par le métal affiné qu’on obtient : voilà la méthode générale que les philosophes enseignent alors sous le nom d’analyse et qui résume tout le progrès du siècle Jusqu’ici et non plus loin ils ont raison : la vérité, toute vérité est dans les choses observables et c’est de là uniquement qu’on peut la tirer ; il n’y a pas d’autre voie qui conduise aux découvertes. — Sans doute l’opération n’est fructueuse que si la gangue est abondante et si l’on possède les procédés d’extraction ; pour avoir une notion juste de l’État, de la religion, du droit, de la richesse, il faut être au préalable historien, jurisconsulte, économiste, avoir recueilli des myriades de faits et posséder, outre une vaste érudition, une finesse très exercée et toute spéciale.
Dans les salons, cela se conçoit, domine l’influence encyclopédique et voltairienne ; Mme du Deffand écrit à Voltaire : « Il n’y a que votre esprit qui me satisfasse » ; et Mme de Choiseul le pense.
Le vol, la cupidité, l’ambition et tous les vices qui en dérivent y sont inconnus, puisque la terre y nourrit les hommes sans travail et que la concurrence pour la vie ne s’y conçoit même pas.
Remarquez d’ailleurs que ce qui est surtout pittoresque, c’est la vie d’en haut, et celle d’en has, la vie conçue comme une vision de Véronèse ou comme une vision de Callot.
En politique, l’absolutisme, le libéralisme, le socialisme et l’anarchisme même, tels que le conçoivent au moins quelques-uns de ses partisans, sont des tentatives variées et contradictoires pour réaliser l’harmonie des intérêts et des désirs, comme aussi pour fortifier les divers sentiments, — respect, soumission, crainte, sens de l’indépendance, initiative individuelle, esprit de concurrence, désir d’égalité, — par qui chacun s’imagine que la société va se fortifier ou s’épurer.
Elle le conçoit selon la fière formule de la loi romaine : ubi tu Caïus, ibi ego Caïa, « là où tu seras Caïus, je serai Caïa. » Elle aime passionnément son mari, elle s’est donnée à lui corps et âme ; donc elle a le droit d’exiger qu’il se donne à elle tout entier.
Voilà le Chaulieu tel que nous le concevons et que nous l’aimons, celui qui, pour nous charmer, a besoin lui-même d’un peu de cette illusion qui nous dérobe l’arrière-fond de la scène et les coulisses de toutes choses.
La manière dont elle conçut et dirigea, dès le premier jour, l’éducation des enfants d’Orléans, est extrêmement remarquable, et dénote chez l’institutrice un sens de la réalité plus pratique que ses livres seuls ne sembleraient l’indiquer.
Droz sur l’application de la morale à la politique, et sur l’économie politique elle-même conçue au point de vue philanthropique, je ne ferai plus qu’une remarque, qui répond à une objection que j’ai souvent entendu adresser à ces sortes d’ouvrages : les hommes d’action, les hommes du métier, sont en général tentés de les considérer comme inutiles, et comme n’étant propres à persuader que ceux qui sont déjà convaincus.
Cette manière de concevoir ce qui nous environne et qui nous touche n’est peut-être pas la plus philosophique ni la plus profonde, mais c’est la plus raisonnable, celle qui est la plus conforme au milieu humain.
Parlant de la dévastation de Saint-Germain-l’Auxerrois, du sac de l’Archevêché, signalant la faiblesse de conduite et de langage des organes de la force publique, il en déplorait l’abaissement : Pour calmer l’émeute, disait-il, on s’humilie devant elle… Une république fondée sur les lois, la république du Consulat, par exemple, ne s’accommoderait pas du désordre, et l’étrange monarchie conçue par les centres de la Chambre, la monarchie attendant des lois et n’osant en faire, s’arrange de ces déplorables scènes
Et elle ajoute naïvement en y mêlant son érudition chrétienne : « Il eut volontiers dit comme saint Pierre : Faisons ici nos tabernacles, si le courage tout royal qu’il avait et la générosité de son âme ne l’eussent appelé à choses plus grandes. » Pour elle, on conçoit qu’elle y serait volontiers restée, prolongeant sans regret l’enchantement ; elle eût arrangé volontiers la vie comme ce beau jardin de Nérac dont elle nous parle encore « qui avait des allées de lauriers et de cyprès fort longues », ou comme ce parc qu’elle y avait fait faire, avec des promenoirs de trois mille pas de long au bord de la rivière, la chapelle étant tout près de là pour la messe du matin, et les violons à ses ordres pour le bal tous les soirs.
Il aimait à citer entre autres un beau passage de Vincent de Lérins qui disait : « Que, grâce à vos lumières, la postérité se félicite de concevoir ce qu’auparavant l’Antiquité croyait avec respect sans en avoir l’intelligence ; mais cependant enseignez les mêmes choses qui vous ont été transmises, de telle manière qu’en les présentant sous un nouveau jour, vous n’inventiez pas des dogmes nouveaux. » Ainsi, en maintenant l’immutabilité sur le fond, il se plaisait à remarquer que l’ordre d’explication scientifique, malgré les déviations passagères, avait suivi une loi de progrès dans l’Église et s’était développé successivement ; et il le démontrait par l’histoire même du christianisme.
Je conçus que tout cela était directement opposé à la société (?)
Lorsque, sur la fin de sa vie, il apprit les premiers événements de juillet 89, il en conçut autant de méfiance et de doute que d’espérance ; les premiers meurtres, certaines circonstances dont la Révolution était accompagnée dès l’origine, lui semblaient fâcheuses, affligeantes : « Je crains que la voix de la philosophie n’ait de la peine à se faire entendre au milieu de ce tumulte. » — « Purifier sans détruire », était une de ses maximes, et il voyait bien tout d’abord qu’on ne la suivait pas.
Cette colère se conçoit.
L’homme de génie est celui qui voit plus clair que les autres, qui aperçoit une plus grande part de vérité, qui peut relier un plus grand nombre de faits particuliers sous une idée générale, qui enchaîne toutes les parties d’un tout sous une loi commune, qui, lors même qu’il crée, comme dans la poésie, ne fait que réaliser, par le moyen de l’imagination, l’idée que son entendement a conçue.
Mais nous croyons en même temps qu’il y a bien des places dans la maison du Seigneur ; qu’un certain classique n’est pas tout le classique ; que le parfait a toujours quelque imperfection qui permet de concevoir un autre genre de parfait ; que, par exemple, le classique du xviie siècle n’est qu’une forme de classique qui n’est pas sans défaut ; qu’on pourrait soutenir très-fortement que le classique grec lui est supérieur, et peut-être aussi que le classique anglais ou allemand (si l’on peut employer une telle expression) lui est égal ; que, pour comparer en toute justice ces différents genres de chefs-d’œuvre, il faudrait lire Goethe et Shakespeare avec la même préparation que nous lisons Racine ou Corneille : il faudrait se faire Anglais ou Allemand, tandis qu’il nous est si facile d’être Français.
Et nous pouvons concevoir aisément ces analogies, si chaque espèce a existé d’abord comme variété, et s’est formée de la même manière ; elles sont inexplicables, au contraire, si chaque espèce a été créée séparément.
Il n’y a de distingué, comme distinguant nécessairement de tout, que ce qui n’existe pas, et même que ce qui ne peut pas exister ; car pour être conçu comme pouvant exister, il faut déjà ressembler à quelque chose.
Que nous concevons bien la tristesse des amis de Michelet !
On conçoit que l’émotion ait été grande : ce qui surprend, c’est qu’elle ait été aussi durable, ait survécu pendant des siècles, et se soit propagée bien au-delà du pays où elle avait été ressentie. […] La Newe Zeitung von einem Juden von Jerusalem n’est en effet qu’un de ces « canards » si fréquents à la fin du xvie et au commencement du xviie siècle qui, conçus le plus souvent ainsi sous forme de lettres, exploitaient la curiosité publique en répandant le récit d’aventures extraordinaires, de prodiges, de crimes singuliers, d’apparitions, de voyages imaginaires, etc. […] Goethe avait voulu faire un Ahasvérus, et il avait conçu le sujet avec une originalité profonde, en donnant au cordonnier de Jérusalem un caractère très particulier, mélange de bon sens, d’étroitesse d’esprit et d’ironie, qui lui aurait permis d’avoir une attitude personnelle en face de l’humanité qui s’écoule devant lui. […] La forme sanscrite dans laquelle elle a certainement été conçue n’a pas encore été retrouvée ; mais l’existence n’en est pas douteuse : elle est attestée par de nombreuses dérivations plus ou moins directes. […] La courtoisie était d’ailleurs considérée comme inséparable de l’amour, conçu d’une manière assez factice et subtile, et l’amour entendu de cette façon était à son tour regardé comme la condition indispensable du goût pour tout ce qui est bon et beau, notamment pour la nature, la verdure, et le chant printanier des oiseaux que les poètes d’alors ne se lassaient pas d’écouter, d’admirer et de célébrer.
Il m’est revenu que vous aviez eu un peu de goût pour sa fille, et je vous avouerai que, si cela est, je ne conçois pas comment tout ce qui a quinze ans ne vous a pas enchaîné. […] Elle avait conçu le projet assez étrange de passer en Amérique, tant c’était pour elle un poids insupportable que le chagrin solitaire ! […] Le Publiciste du 17 mai 1810 avait en effet un petit article ainsi conçu : « On lit dans le Journal de Lyon que, dans la dernière séance publique de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de cette ville, M.
Cette moderne paraphrase de l’antique est vigoureusement conçue. […] Que les amateurs de littérature facile lui reprochent d’être tendu, cela se conçoit : mais Gide, l’auteur de ce Traité du Narcisse, presque aussi hermétique que du Mallarmé ! […] Il est vrai qu’on peut concevoir, et même réaliser le roman à l’état pur.
Il a conçu des soupçons non point sur la fidélité de dona Mencia, remarquez bien, mais sur l’intégrité de son propre honneur, parce que dona Mencia est, à ce qui lui semble, aimée par l’infant don Henri. […] Croit-on qu’il y ait dans l’histoire, et, pour borner le champ de notre réflexion, dans l’histoire littéraire, un seul fait, un seul ouvrage assez capricieux, assez étrange, pour ne pas rentrer dans l’harmonie universelle, pour rester en dehors de cette série de causes secondes que l’imagination ne peut remonter, et que la raison conçoit comme infinie ? […] De même encore que dans un opéra bien fait tout semble l’épanouissement naturel et nécessaire d’un petit nombre de données fondamentales indiquées dans l’ouverture, si bien que par moments l’auditeur pourrait être tenté de croire qu’une pure déduction mathématique a trouvé ce qui ravit ses sens et son âme, telle est aussi l’harmonie d’une pièce telle que Le Misanthrope ou Les Femmes savantes, qu’aucune scène n’y saurait être ajoutée, retranchée, changée, et que l’esprit se refuse absolument à concevoir que les choses eussent pu être autrement qu’elles ne sont.
Quand je réfléchis à cela, je ne puis concevoir que vous soyez des créatures humaines : vous êtes une sorte d’espèce à peine : au-dessus du singe. […] Les anciens, dit-il, ont désigné les critiques, à la vérité en termes figurés et avec toute sorte de précautions craintives ; « mais ces symboles sont si transparents, qu’il est difficile de concevoir comment un lecteur de goût, doué de la perspicacité moderne, a pu les méconnaître. […] En somme, dans tous mes voyages, je n’avais jamais vu d’animal si repoussant, ou contre qui j’eusse conçu naturellement une si forte antipathie1015.
Il y a en lui un certain fonds caché, seul primitif, seul important, sans lequel il ne peut ni exister ni être conçu, et qui constitue son être et sa notion1477. […] Écoutez ces fortes paroles : « Je suis convaincu que si un homme, habitué à l’abstraction et à l’analyse, exerçait loyalement ses facultés à cet effet, il ne trouverait point de difficulté, quand son imagination aurait pris le pli, à concevoir qu’en certains endroits, par exemple dans un des firmaments dont l’astronomie sidérale compose à présent l’univers, les événements puissent se succéder au hasard, sans aucune loi fixe ; et rien, ni dans notre expérience, ni dans notre constitution mentale, ne nous fournit une raison suffisante, ni même une raison quelconque pour croire que cela n’a lieu nulle part1514. » Pratiquement, nous pouvons nous fier à une loi si bien établie ; mais « dans les parties lointaines des régions stellaires, où les phénomènes peuvent être entièrement différents de ceux que nous connaissons, ce serait folie d’affirmer hardiment le règne de cette loi générale, comme ce serait folie d’affirmer pour là-bas le règne des lois spéciales qui se maintiennent universellement exactes sur notre planète1515. » Nous sommes donc chassés irrévocablement de l’infini ; nos facultés et nos assertions n’y peuvent rien atteindre ; nous restons confinés dans un tout petit cercle ; notre esprit ne porte pas au-delà de son expérience ; nous ne pouvons établir entre les faits aucune liaison universelle et nécessaire ; peut-être même n’existe-t-il entre les faits aucune liaison universelle et nécessaire. […] On peut se représenter une droite par l’imagination, et l’on peut la concevoir aussi par la raison.
Il y a en lui un certain fonds caché, seul primitif, seul important, sans lequel il ne peut ni exister ni être conçu, et qui constitue son être et sa notion6. […] Écoutez ces fortes paroles : « Je suis convaincu que si un homme habitué à l’abstraction et à l’analyse exerçait loyalement ses facultés à cet effet, il ne trouverait point de difficulté, quand son imagination aurait pris le pli, à concevoir qu’en certains endroits, par exemple dans un des firmaments dont l’astronomie sidérale compose à présent l’univers, les événements puissent se succéder au hasard, sans aucune loi fixe ; et rien, ni dans notre expérience, ni dans notre constitution mentale, ne nous fournit une raison suffisante, ni même une raison quelconque pour croire que cela n’a lieu nulle part. » 43 Pratiquement, nous pouvons nous fier à une loi si bien établie ; mais « dans les parties lointaines des régions stellaires, où les phénomènes peuvent être entièrement différents de ceux que nous connaissons, ce serait folie d’affirmer hardiment le règne de cette loi générale, comme ce serait folie d’affirmer pour là-bas le règne des lois spéciales qui se maintiennent universellement exactes sur notre planète. » 44 Nous sommes donc chassés irrévocablement de l’infini ; nos facultés et nos assertions n’y peuvent rien atteindre ; nous restons confinés dans un tout petit cercle ; notre esprit ne porte pas au-delà de son expérience ; nous ne pouvons établir entre les faits aucune liaison universelle et nécessaire ; peut-être même n’existe-t-il entre les faits aucune liaison universelle et nécessaire. […] On peut se représenter une droite par l’imagination, et l’on peut la concevoir aussi par la raison.
L’esprit dans lequel il le conçut alors n’était autre que celui du xviiie siècle pur, c’est-à-dire un fonds d’incrédulité et d’athéisme que l’ambitieux auteur se réservait sans doute de raffiner. […] Nous revenons au séjour de Benjamin à Colombier ; il y concevait donc son livre sur les religions, il donnait son avis sur les écrits de Mme de Charrière et en épiloguait le style. […] Il avait conçu quelques préventions contre sa personne, contre son genre d’esprit, et obéissait en cela aux suggestions de Mme de Charrière, qui était alors en froid avec l’ambassadrice, comme elle l’appelait185. […] On conçoit que de si flatteuses paroles n’aient pourtant pas persuadé celle à laquelle il les adressait.
À ce moment, la religion, la morale, le culte, l’art, le merveilleux, tout est confondu, et l’on peut prédire que tels auront été conçus les dieux, tels seront plus tard les artistes et les poètes. […] Ainsi la théorie de l’art, telle que la conçurent les Grecs, mène, d’idéalité en idéalité, c’est-à-dire d’abstraction en abstraction, droit à l’absurde ; elle ne s’y dérobe que par l’inconséquence. […] Non pas que ces deux grands génies aient envahi le monde de la pensée, et condamné les générations futures à ne pas sortir du cercle qu’ils ont tracé, mais parce qu’ils ont exprimé deux façons de concevoir, différentes et éternelles, et que leurs noms ont aussi pu servir de drapeau, lors même que l’objet de la dispute n’était pas identiquement le même. […] [Texte d’Hippolyte Castille] L’excellence d’une méthode ne se prouve que par des œuvres conçues sous son empire.
. — Et nous-mêmes, de la façon dont nous concevons la mort, dépend la façon dont nous vivons chaque jour : car, pensons-nous que le jour de la mort est vraiment la fin de tout, mais alors, réjouissons-nous, hâtons-nous de jouir et, pareils aux sages épicuriens, couronnons-nous de roses. […] Eh bien, cette nature à laquelle nous prêtons des sentiments presque humains, les uns ont conçu contre elle une sorte de haine violente, d’autres, au contraire, considèrent que la nature est pour nous une amie, une mère, une consolatrice. […] C’est bien ainsi qu’Alfred de Musset conçoit l’amour, et dès ses premiers vers, dès le temps où il ne pouvait avoir des tourments de l’amour qu’une divination lointaine, il le salue comme une sorte de divinité redoutable : Amour, fléau du monde, exécrable folie, Toi qu’un lien si fragile à la volupté lie, Quand par tant d’autres liens tu tiens à la douleur… Mesdames et Messieurs, les tourments de l’amour, quand on y songe, on se les représente toujours sous la forme de l’infidélité, des serments violés. […] Car cet amour, auquel on demande tant de bonheur, pour qu’il remplisse la plénitude de bonheur que nous en attendons, il faut qu’il soit à base d’honnêteté, de confiance et de vertu ; mais l’amour tel que le conçoit Alfred de Musset est à base de plaisir.
Rien d’ailleurs ne s’explique et ne se conçoit mieux. […] Comment elle conçoit le beau en littérature : elle se souviendra des formes pures du Télémaque. […] J’avoue, pour ma part, qu’en fait de poésie je ne conçois de système que l’inspiration. […] Je ne conçois pas, pour mon compte, un style sans un emploi à sa hauteur ; je ne conçois pas une langue originale qui ne hisse que tracasser des académiciens et empêcher des vaudevillistes de se croire des immortels. […] Chez lui, nous le répétons, l’imagination tient lieu de tout ; l’imagination seule conçoit et exécute : c’est une reine qui gouverne sans contrôle.
Dire que des choses dont l’idée seule nous effare, — ou que nous ne concevons même pas, — paraîtront peut-être naturelles et nécessaires dans quelques siècles ! […] Il ne conçoit pas qu’on puisse railler ce qui est laid, ni rire de ce qui est triste. […] Presque tous ses personnages semblent conçus a priori, et sont, au fond, aussi idéalisés que ceux des classiques. […] L’état de conscience d’un spécialiste de cet ordre et de cette force me paraît même très difficile à concevoir. […] Elle en conçoit, contre Jeanne, une implacable et mortelle rancune.
Il y a telle pièce conçue en passant le long d’un cimetière qui me paraît un pur chef-d’œuvre, un chef-d’œuvre de sentiment simple et profond, avec une belle imagination sincère et juste, sans rien de forcé pour fournir le cadre. […] On conçoit qu’avec ce genre de complexion et ce tour d’imagination Lenau a dû avoir l’idée de refaire le Faust de Goethe. […] J’ai employé mes longues journées de Ghasir à rédiger ma Vie de Jésus, telle que je l’ai conçue en Galilée. […] Conçu plus tard, le système eût été sans doute plus large. […] On conçoit qu’il ait une certaine déception.
Il voit dans ces alliances mêlées l’abâtardissement de la vraie noblesse, sous la seule forme où il la conçoit.
La réponse ne se fit pas attendre, dit le comte Ouvaroff (auteur d’une spirituelle notice sur le prince de Ligne) ; elle était conçue en ces termes : Monsieur, Après le malheur de vous avoir pour fils, rien ne pouvait m’être plus sensible que le malheur de vous avoir pour colonel.
Saint Louis, né le 25 avril 1214 ou 121588, roi en 1226 à l’âge de douze ans sous la tutelle de sa sage et prudente mère, arrivé à sa majorité vers 1236, avait grandement commencé à ordonner son royaume d’après de bonnes lois, à y réprimer les entreprises des seigneurs, à y faire prévaloir la justice, la piété, à se faire respecter de ses voisins pour son amour de la paix et sa fidélité à ses engagements, lorsque, ayant été pris d’une grande maladie (décembre 1244), et étant tombé dans un tel état qu’on le crut mort, et qu’une dame qui le gardait voulait déjà lui tirer le drap sur le visage, il conçut au fond de son âme la pensée de se croiser ; au premier moment où il se sentit mieux et où il recouvra l’usage de ses sens, il appela à son lit l’évêque de Paris.
Ce quelque chose qu’ils concevaient au-delà les empêchait de s’abandonner et de se rendre à l’impression saine et forte de Bourdaloue.
On conçoit seulement que lorsque peu de mois après le succès fou de John Gilpin, on annonça la publication d’un poème touchant et familier, naturel et élevé, La Tâche, par le même auteur (1784), chacun le voulut lire.
Il est trop bon esprit et trop sincère pour le charlatanisme ou pour la chimère brillante ; il n’est pas de nature assez haute et assez fine pour concevoir le grand art en rien ni le vrai beau.
Mais d’ailleurs, c’est mon histoire que je fais… Il trace en effet, dans ce peu de mots, l’idéal de sa vie, un idéal qu’il n’a rempli qu’imparfaitement, mais qu’il était honorable, à vingt-cinq ans, de concevoir et de se mettre résolument à poursuivre.
Un sentiment vrai, conçu de bonne heure et qu’il nourrira pendant trente ans, l’enchaînait aux pieds de sa noble amie, Mme de Choiseul : je ne sais si, comme Walpole, il l’avait prise d’abord pour la reine d’une allégorie ; mais il était certainement très patient ; il ne paraît pas avoir jamais désiré que le nuage doré se dissipât ni que l’allégorie s’évanouît.
Quelques semaines après, il reçoit une missive royale ainsi conçue : M.
Il en profite pour être présent en tout lieu, pour s’instruire de tout sans bruit, sans appareil, et comme d’affaires de sa maison ; il voit de près et touche de ses mains les irrégularités de tout genre, les énormités et les lacunes de l’administration de la guerre, aucun abus ne lui échappe : il conçoit et prépare sans un instant de relâche cette organisation centrale, cette discipline rigoureuse, cette égalité de tous sous un même règlement, ce contrôle des deniers de l’État. cette économie et ce ménagement des subsistances, cette coordination et cet ajustement de toutes les parties du service, qui sont proprement son œuvre.
Je conçois qu’un homme qui laisse des ouvrages achevés, des monuments peu accueillis d’abord et peu compris de ses contemporains, mais remplis de beautés ou de vérités qui éclatent après lui, soit proclamé, homme de génie sur sa tombe, tandis qu’il ne passait de son vivant que pour un original distingué.
Guérin, quand il conçut le Centaure, ne songeait pas, c’est-à-dire qu’en tant qu’artiste il ne croyait pas à cette distinction des deux natures.
L’idée toute naturelle de cette série, c’est, on le conçoit, le contraste entre le passé et le présent, entre ce qu’on fut et ce qu’on est ; c’est le saillant presque ridicule de ce contraste.
Mais on conçoit l’irritation secrète d’une nature fine et fière, ainsi humiliée à plaisir.
C’est ainsi que je la conçois en idée, cette histoire française du plaisir.
Encore une fois, mettons-nous à la place de ces premiers éditeurs : il n’est pas un seul d’entre nous qui, chargé au lendemain de la mort d’un ami célèbre de mettre en ordre ses papiers et d’en tirer la matière d’une publication réclamée et opportune, ne prenne garde, n’hésite plus d’une fois en vue même d’une mémoire respectée, ne conçoive des scrupules et n’estime quelques retranchements nécessaires, provisoirement du moins.
Mais vous concevez également le plaisir qu’eurent le duc de Bouillon et le duc de Richelieu à parler au roi de celui qu’on lui préparait dans l’intérieur du palais de la reine.
Là est l’erreur, là est le vice anti-français de tous ces plans conçus aux Tuileries en 90 et 91.
C’est de cette façon, du moins, et en ce sens que j’entends et je conçois la défense de la tradition en matière littéraire, — moyennant une vigilance de chaque jour et une réparation infatigable.
Mais il ne s’agit pas de moi, il s’agit de Lisette qui, pour s’être trop appesantie sur la partie hébraïque des Écritures, la plus longue en effet et celle par où l’on commence, est entrée en effroi et a conçu la crainte que le Seigneur ne puisse jamais lui pardonner.
On le vit de bonne heure bien servir à la guerre, concevoir des plans de campagne, avoir des idées en politique, s’exprimer et agir d’une manière aisée et grande qui le rattache encore au siècle dont il était l’un des plus jeunes à soutenir le déclin.
Louis XV en conçoit à la rigueur l’idée et la nécessité, et il se laisse aller à le dire.
Je conçois Saint-Simon exagérant, prenant et présentant pour un scélérat ou un coquin fini quelqu’un qui n’est coquin qu’à demi ; mais prendre pour un fourbe un parfait homme de bien et une belle âme, cela me paraît difficile à lui ; il a le flair de la vertu et du vice. — Eh !
L’un est le dernier esprit de l’ancienne France : l’autre est le premier génie de la France nouvelle. » Ce n’est pas moi qui retirerai jamais rien à Diderot ; mais on conçoit que Voltaire soit immortel ; il ne l’a certes pas volé !
D’ailleurs les rédacteurs de ses statuts avaient conçu à ce sujet, pour ne rien dire de plus, une étrange idée : non seulement ils voulaient (ce qui était raisonnable) marier, pour ainsi dire, chaque art mécanique à la science dont cet art peut tirer des lumières, comme l’horlogerie à l’astronomie, la fabrique des lunettes à l’optique ; mais ils prétendaient encore, qu’on nous passe cette expression, accoler chacun de ces arts à la partie des belles-lettres qu’ils s’imaginaient y avoir plus de rapport : par exemple, disaient-ils, le brodeur à l’historien, le teinturier au poëte, et ainsi des autres.
Mais comment concevoir que dans un livre où l’auteur paraît sentir si bien le prix de l’art et où il se pique de faire valoir ses poëtes, de nous les faire admirer presque à la loupe, les négligences soient poussées au point où on les voit ici ?
Molière a tiré du spectacle de la vie, du jeu animé des travers, des vices et des ridicules humains, tout ce qui se peut concevoir de plus fort et de plus haut en poésie.
L’auteur d’Eugène de Rothelin goûte peu, on le conçoit, les temps d’agitation et de disputes violentes.
On conçoit que la peinture des mœurs mondaines lui échappe : il se complaît au contraire dans les sujets populaires.
Voilà comment Michelet a conçu sa tâche : il fallait, pour en venir à bout, deux conditions difficiles à réunir, la science et la poésie.
L’auteur lui-même, dans ce précieux roman, nous enseigne comment il conçoit le roman ; et nous avons à la fois sous les yeux ce qu’il a fait et ce qu’il a voulu faire.
Les groupes, comme les individus, ont une tendance à s’illusionner sur leur propre compte ; à se concevoir autres qu’ils ne sont, plus forts, plus grands, plus nobles, plus influents qu’ils ne sont (peuples qui s’attribuent une origine divine, qui attendent un messie, etc. ; bureaucratie qui surfait de bonne foi son importance et ses mérites).
Un philosophe de ce temps-ci, homme d’infiniment d’esprit lui-même, a coutume de distinguer ainsi trois sortes d’esprits : Les premiers, à la fois puissants et délicats, qui excellent comme ils l’entendent, exécutent ce qu’ils conçoivent, et atteignent le grand et le vrai beau ; une rare élite entre les mortels !
En voyant se succéder tant de dynasties et tant de siècles qui, de loin, semblent ramassés en un jour, le poète a conçu le sentiment profond de l’instabilité des choses humaines, de la fuite de la vie et des années brillantes, du néant de tout, excepté d’une bonne renommée ; car il croit à la poésie et à la gloire.
On raconte que dans un couvent de la rue de Charonne, où elle était élevée, elle avait de bonne heure conçu des doutes sur les matières de foi, et elle s’en expliquait assez librement.
Concevoir, disait-il, c’est jouir, c’est fumer des cigarettes enchantées ; mais sans l’exécution tout s’en va en rêve et en fumée : Le travail constant, a-t-il dit encore, est la loi de l’art comme celle de la vie ; car l’art, c’est la création idéalisée.
Je laisse de côté quelques essais et quelques saillies de Frédéric très jeune et prince royal ; mais, du moment qu’il conçut son rôle de roi, je trouve tout l’homme d’accord avec lui-même, je le trouve vrai.
Les grands objets de comparaison étaient restés hors de sa portée et de sa vue : il parlait en cette matière tout à fait en homme qui n’avait vu ni conçu à aucun jour la beauté suprême et véritable.
Mais Pasquier ne renvoyait pas à eux pour toute école ; et, en général, la langue telle qu’il la conçoit et qu’il la dessine, est plus large et plus diverse que celle que fit ensuite prévaloir Malherbe.
Poésie d’opéra, peinture de décors, Perrault ne conçoit rien de plus beau : c’est le côté faible de son goût.
De jolis détails de mœurs, des vers qui peignent des coins de paysages et de courtil, viennent en aide, on le conçoit, à ce canevas si simple, mais, selon moi, trop simple.
Mme de Coulanges, en apprenant cette nouvelle, et tout en estimant Mme des Ursins très digne de son emploi, trouvait qu’à cet âge il n’y avait plus rien à imaginer d’agréable dans la vie : c’est qu’elle n’était que femme, et ne concevait de son sexe que les passions aimables et tendres.
Léonie a l’imagination vive ; elle ne conçoit rien de médiocre ; elle est de celles qui veulent être des plus distinguées ou complètement ignorées : « Adorée ou indifférente !
Vers la dixième Étude, il commence plus directement l’exposition de ses vues et des harmonies telles qu’il les conçoit, le jeu des contrastes, des consonances, des reflets et des réverbérations en toutes choses : il y a des détails très fins, mais c’est déjà bien subtil, et dans sa vieillesse, abondant de plus en plus dans son sens, il exagérera encore tous ses défauts, que nous étale démesurément son ouvrage final des Harmonies.
[NdA] Cependant M. de Choiseul-Gouffier, parlant de l’abbé Barthélemy chez la princesse de Bauffremont, disait de ce ton haut et absolu qui était le sien : « Concevez-vous l’abbé Barthélemy ?
Mariée à dix-sept ans au duc d’Alençon, prince insignifiant, elle gardait tout son dévouement et toute son âme pour son frère ; aussi, lorsqu’à la dixième année du règne arriva le désastre de Pavie (25 février 1525), et que Marguerite et sa mère apprirent la destruction de l’armée française et la captivité de leur roi, on conçoit le coup qu’elles reçurent.
Le vrai vers libre est conçu comme tel, c’est-à-dire comme fragment musical dessiné sur le modèle de son idée émotive, et non plus déterminé par la loi fixe du nombre .
On conçoit bien qu’on ne peut sans temerité entreprendre un paralelle de la peinture antique avec la peinture moderne, sur la foi des fragmens de la peinture antique, qui ne subsistent plus qu’endommagez du moins par le tems.
Ces génies ont ici un caractère si différent de celui des djinns de la légende arabe et des génies tels que nous les concevons que j’ai cru devoir leur conserver le nom générique indigène.
Ce premier volume de l’Histoire de la Comédie telle que du Méril l’avait conçue contenait la Comédie primitive, la Comédie chinoise, le Théâtre indien et la Comédie grecque, jusqu’à celle d’Aristophane, avec toutes les questions de détail qui se rattachaient à un si vaste sujet.
nous avons une manière un peu plus mâle de concevoir l’impartialité, et nous sommes certain que Xavier Aubryet, qui a la pureté et la fierté du sens critique, la partage.
Mais il avait désemmaillotté la Critique de ses bandelettes de momie ; il l’avait conçue et réalisée aussi vivante et aussi animée que l’Art !
La société guerrière idéale est celle qui agit le plus aisément comme un seul homme, celle par suite dans laquelle les ordres, vivement conçus par un centre cérébral unique, sont rapidement transmis jusqu’aux extrémités du corps social et immédiatement exécutés.
Beaumarchais ne conçoit évidemment pas que le poète se puisse proposer « la réalisation de la beauté » pour but ; et ne serait-ce pas pour cela qu’il a fait de si mauvais drames, son Eugénie, ses Deux Amis, sa Mère coupable ? […] Agnès est la jeune fille, — telle du moins que la conçoit Molière, qui ne maniera jamais cet âge, ni peut-être ce sexe, avec beaucoup de délicatesse. […] Complexité du génie de Racine. — Le théâtre et la cour en 1667 ; et à ce propos, de l’Attila de Corneille. — Comment Racine conçoit l’emploi de l’histoire dans la tragédie. — Sa docilité à se plier aux règles et aux exigences de la politesse de son temps. — II. […] Pour la première fois en effet, — je ne dis pas depuis Plaute ou Térence, qui n’en auraient jamais conçu la pensée seulement, mais depuis Aristophane, — la satire sociale redevient, avec Tartufe, la matière, le support, et l’âme de la comédie. […] Non, ce n’était pas ainsi qu’ils concevaient l’amour !
(Quelle bizarre manière de concevoir le bonheur ! […] Diderot n’a pas conçu le premier, nous l’avons vu, la « comédie sérieuse », ni la « comédie larmoyante ». […] Il paraît que c’est là la plus belle vie et la plus « poétique » qu’on puisse concevoir… Sentez-vous ce qu’il y a d’audacieusement « convenu » dans cette fantaisie ? […] Elle a vu débarquer le prétendant, il l’a baisée au front et elle a conçu pour lui un amour enthousiaste et religieux. […] Coppée n’a pas dû les concevoir, comme on le dit, l’une après l’autre, mais toutes deux ensemble.
Voilà comme les Français, quand ils sont dégagés de la trame des liens traditionnels, inventent Dieu, conçoivent Dieu. Ils l’inventent, ils le conçoivent de la façon la plus superficielle du monde. […] Aux heures de deuil et même d’écrasement, il demeure ferme, et conçoit et il prépare les revanches, les relèvements et les restaurations futures. […] On conçoit très bien que de semblables prétentions révoltassent les prêtres assermentés, les prêtres constitutionnels eux-mêmes. […] — Mais peut-on concevoir un malheur de la France qui ne vienne pas des Jésuites, le peut-on ?
» C’est elle qui le forçait à penser, à dire, à écrire, des choses contradictoires et contraires à sa pensée générale, si, au moment où il les concevait, elles lui semblaient vraies. […] Si nous voulons entendre le monde comme une manifestation de bonté et dire comme Platon : « Dieu a créé le monde par bonté », nous touchons au ridicule et c’est une simple absurdité que de concevoir une puissance qui crée des êtres par bonté pour les faire souffrir. […] C’est là certainement le but, subconsciemment conçu et senti, de leur démarche générale. […] La civilisation théorique, la civilisation scientifique, la « civilisation alexandrine » est arrivée peu à peu à penser, à concevoir et à proclamer l’égalité entre tous les hommes. […] Elle conçoit et elle exécute par elle-même de très belles choses ; elle conçoit et elle exécute par elle-même, et en contraignant la caste basse à l’y aider, de grandes choses : conquêtes, explorations, fondations de colonies, fondations de villes, fondations d’empire, etc. — Au-dessous d’elle, il y a une caste vile, qui n’aime ni la vie artistique ni la vie dangereuse et qu’on laisse ne rien comprendre à l’art ou avoir à soi un art piteux et ridicule, et qu’on laisse ne rien comprendre à la vie dangereuse, mais qu’on associe à cette vie par la force.
La première question à étudier est donc celle-ci : comment Montesquieu, Rousseau, Voltaire concevaient-ils la patrie ; comment l’aimaient-ils ; qu’est-ce qu’elle était pour leur intelligence, pour leur raison et pour leur cœur ? […] » Mais si le souverain est toujours ce qu’il doit être, et ne peut pas se tromper, s’il est toujours infaillible, le citoyen, lui, « peut avoir une volonté contraire ou dissemblable à la volonté générale. » En ce cas la contrainte est de droit de la part du souverain : « Afin donc que ce pacte social ne soit pas un vain formulaire, il renferme tacitement cet engagement que quiconque refusera d’obéir à la volonté générale y sera contraint par tout le corps ; ce qui ne signifie autre chose, sinon qu’on le forcera à être libre. » Rien n’est donc plus faux que le système de Montesquieu tout entier, et, à vrai dire, le Contrat social a été conçu pour être une réfutation continue de Montesquieu. […] Seulement, il est à croire que ce roi s’est rarement trouvé, et que le concevoir, l’évoquer et compter sur lui est une chimère. […] Ailleurs il fait la distinction classique entre les inégalités naturelles et les inégalités sociales, montre que les secondes sont des dérivations et des aggravations des premières, et qu’elles aboutissent enfin toutes à la seule ou presque seule inégalité de richesse, qui marque le terme extrême de la corruption de la cité : « Je conçois dans l’espèce humaine deux sortes d’inégalités : l’une que j’appellerai naturelle ou physique, parce qu’elle est établie par la nature et qui consiste dans la différence des âges, de la santé, des forces du corps et des qualités de l’esprit et de l’âme ; l’autre qu’on peut appeler inégalité morale ou politique parce qu’elle dépend d’une sorte de convention et qu’elle est établie ou du moins autorisée par le consentement des hommes. […] Damiens, autant qu’il pouvait être quelque chose, était janséniste, disait du mal des Molinistes et de ceux qui refusaient les sacrements, et qu’il avait conçu son crime depuis l’exil du Parlement ; l’attentat de Damiens fut un avantage pour les Jésuites et leurs amis.
Je lis chaque année quelques-unes de ses pièces, de même que je contemple de temps à autre les gravures exécutées d’après les grands maîtres italiens, car nous autres, petits, sommes incapables de concevoir d’aussi grandes choses. […] Qu’il était instruit que l’Académie française l’avait fort approuvé ; qu’elle l’avait trouvé digne de celui qui l’avait conçu, plus digne encore de ceux qui se proposaient de l’exécuter. […] Je conçois la fureur des bigoteries mises à nu. […] Voici pour l’acteur : « Il était tout comédien depuis les pieds jusqu’à la tête ; il semblait qu’il eut plusieurs voix, tout parlait en lui ; et d’un pas, d’un sourire, d’un clin d’œil et d’un remuement de tête il faisait plus concevoir de choses que le plus grand parleur n’aurait pu dire en une heure. » « Il faisait jouer jusques aux enfants. […] « Cet autographe de Molière est écrit sur une feuille de papier de 21 centimètres de large environ sur 29 de hauteur et occupe la moitié supérieure de cette feuille. » Il est ainsi conçu : « J’ai reçu de Monsieur le Pecq thresorier de la bource des Estats du Languedoc la somme de six mille liures à nous accordez par messieurs du Bureau des comptes de laquelle somme ie le quitte faict à Pezenas ce vingt-quatriesme jour de feburier 1656.
Nul ne longe cette fosse commune sans concevoir la vanité du métier d’écrire. […] Faguet n’en avait point conçu un seul qui appartînt à la littérature d’imagination. […] On lit « sans transport » évidemment, mais avec « un vif plaisir de l’esprit, dans une grande tranquillité du cœur et un grand calme de l’imagination » ce « poème très intelligent » que « le sens critique a conçu, mais que le génie de curiosité a exécuté ». […] Il s’agit d’être recevable dans ses postulats, logique dans leur développement, exact et informé dans les détails, et enfin de concevoir une intrigue symbolique, appropriée et assez émouvante pour attacher le lecteur aux idées essentielles de l’ouvrage. […] Et le lecteur en conçoit une jalousie qu’il n’a pas de peine à prendre pour de la pudeur offensée.
Esprit d’un ouvrage, pour en faire concevoir le caractere & le but. […] La plûpart des morceaux passionnés de nos bons poëtes, sont sortis achevés de leur plume, & paroissent d’autant plus faciles qu’ils ont en effet été composés sans travail : l’imagination alors conçoit & enfante aisément. […] On y trouve qu’au siége de Lille les alliés jettoient des billets dans la ville conçus en ces termes : François, consolez-vous, la Maintenon ne sera pas votre reine. […] On ne peut guere lire l’histoire, sans concevoir de l’horreur pour le genre humain. […] On ne conçoit pas mieux comment nous avons des perceptions, comment nous les retenons, comment nous les arrangeons.
Diminué par ces petitesses et ces méchancetés, Saintré n’est même pas l’héritier dégénéré des héros conçus par l’épopée et le roman idéalistes du Moyen-Âge ; n’ayant plus leur vertu distinctive, la générosité chevaleresque, il ne leur ressemble plus. […] Rien n’est moins artistique que ces alphabets, ces « suites », c’est-à-dire ces séries de représentations conçues de telle sorte que chacune, au lieu de se suffire à elle-même, ait besoin pour être comprise du voisinage des autres : l’art véritable exige qu’un tableau forme un tout indépendant, parfaitement un, portant son explication avec soi. […] Le chœur des Dieux infernaux dans Alceste est conçu suivant le même principe. […] Mais tout ce que nous pouvons en conclure, c’est que le réalisme ne peut proscrire tout à fait l’imagination : seulement il la domestique, et, lui retirant le droit de concevoir, borne son utilité à l’expression ; c’est une sorte de mémoire plus vive, et qui, dans le cerveau du poète comme dans une chambre noire, évoque, sans rien de plus, la vision de la réalité. […] L’amoureux ne pense qu’à son amour, le soldat qu’à sa campagne et à la gloire ; le romancier et le poète doivent avoir l’âme plus large, afin de comprendre à la fois le sentiment de l’amoureux et celui du soldat, afin de concevoir les mille intérêts divers qui sont également dans la nature ; il doit avoir la clairvoyance du prince André.
Cette préface, dans laquelle je voulais dire son fait à la critique, cette préface jetée sur le papier dans un premier moment de surexcitation, je ne la publierai pas, parce que je ne me sens plus capable de la parfaire, telle que je l’avais conçue dans la fièvre de l’ébauche, et je dirai même, que je ne me sens plus la vaillance d’en subir les conséquences. […] Quelques jours après, on m’apportait une lettre de vous, datée de Champrosay, et nous nous mettions de suite à collaborer. » Mardi 8 janvier Dans cet Auteuil, dans cette banlieue cléricale et dévote, les curés ont soulevé contre ma pièce et ma personne, les imbéciles qui les écoutent, et aujourd’hui le papetier chez lequel Blanche a l’habitude d’aller, lui disait avec une exaspération amusante : « On ne conçoit pas qu’on ait laissé jouer une pièce, où on dise de telles horreurs ! […] Enfin il arrive à un anéantissement complet, confessant que l’opium donne une certaine hilarité au bout d’un petit nombre de pipes, mais que passé cela, la fumerie amène un vide, accompagné d’une tristesse, d’une tristesse impossible à concevoir.
Si on nous fait des conférences, nous nous en allons. » — « Je ne conçois pas qu’on attache de l’importance à une explication théorique », remarqua l’auteur de Sourires placés. […] Je ne conçois guère un mystique qu’au sommet d’une colonne, nu, lavé par la pluie, brûlé par le soleil des tropiques, et mon imagination franchit difficilement la distance qu’il y a entre cet ascète et le rond-de-cuir qui s’arroge son titre. […] « Cette coïncidence d’une crise intérieure avec la crise extérieure, je rappellerai une aventure, et c’est de la vie humaine, conçue comme une succession d’aventures, que doit s’occuper l’art. […] Au début, la nouvelle était conçue dans un sens plus satyrique qu’à présent. […] On peut l’admettre encore comme amusement, quoique, pour moi, il soit assez difficile de concevoir comment il y a encore des gens doués de leurs cinq sens, qui trouvent du plaisir à voir toujours sortir le même œuf du même sac.
Madame Caverlet et les Fourchambault sont conçus rigoureusement d’après la formule de la pièce à thèse. […] Toutes se valent ; ou plutôt chacune ne vaut qu’autant que vaut l’œuvre conçue d’après elle. […] On ne conçoit seulement pas le Nabab ou les Rois en exil séparés de ce cadre. […] « Depuis que je sais lire, j’ai conçu pour ces deux prodiges, Dumas et Scribe, une passion infatigable et stupide. » Voilà le ton. […] » Or on ne conçoit guère le talent de M.
On sait de longue date que l’expression d’une idée est habituellement empruntée à la langue du peuple qui, le premier, a conçu cette idée. […] La table de toilette est conçue et décorée en manière d’autel, un prie-Dieu garantit la piété de l’habitante de la chambre, et un large divan aux coussins ravagés semble rassurer sur la sévérité de cette piété. […] La notion de la dégénérescence, qui domine aujourd’hui toute la science psychiatrique, a été pour la première fois nettement conçue et définie par Morel. […] Ils ne peignirent pas des vues sobrement conçues, mais des émotions. […] On conçoit ainsi que l’esprit confonde les perceptions des différents sens, et transpose l’une dans l’autre.
Pour tout dire, d’ailleurs, je ne conçois pas la critique sans une sorte d’échange, de mystérieux fluide entre ma pensée et celle de l’écrivain dont je parle. […] Pour me borner, et pour faire concevoir quel trouble dut, à deux époques différentes, ressentir l’esprit délicat et modéré de M. de Narbonne en face des exagérations passionnées de la liberté qu’il servit et du despote qu’il aima, et quelles leçons en rejaillirent pour lui et pour nous, je rappellerai deux scènes, l’une très courte, l’autre développée et dramatique, que je rencontre dans ces Souvenirs. […] En donnant cette importance à la défense de la société par l’individu, en lui assignant comme prix et récompense le maintien de libertés fort précieuses sans doute, mais difficiles à concevoir d’une manière abstraite, le jeune et éminent publiciste a un peu trop oublié que tout le monde ne s’appelait pas Albert de Broglie, n’avait pas à dépenser, pour le service public, la même somme de talent, de courage, d’autorité morale, de qualités naturelles ou acquises, et n’était pas capable de se proposer à soi-même un programme de gouvernement anonyme, où entreraient par doses égales et savantes les éléments de pouvoir et les éléments de liberté. […] On conçoit aisément que ce don de penser, de parler et d’agir avec approbation et privilège de Dieu, lorsqu’il échoit à une âme exquise et délicate, comme Saint-Martin, se borne à la rendre inutile et stérile, mais que, dans une organisation moins inoffensive, il pourrait mener loin et autoriser toutes les folies comme tous les crimes.
Comment pourraient-ils être touchés d’un contraste qu’ils ont peine à concevoir ? […] On conçoit à peine aujourd’hui comment les honnêtes gens de 1736 ont pu supporter pendant vingt-deux représentations ces grossièretés dégoûtantes qui remplissent presque toute la pièce, tandis qu’il n’y a guère que deux ou trois scènes où l’intérêt se montre : encore cet intérêt n’est-il point celui qu’on exige dans une bonne comédie ; c’est l’intérêt romanesque du drame. […] Lachaussée n’est pas le premier qui ait conçu l’idée de mettre sur la scène cette affection désordonnée des parents pour un de leurs enfants, à l’exclusion des autres : il y a sur ce sujet une comédie de collège écrite en latin, et dont le fameux père Porée est l’auteur. […] Il s’en faut de beaucoup que le mari du Préjugé à la mode soit aussi bien conçu ; c’est un homme de cour assez extravagant et assez niais pour ne pas oser avouer à sa femme l’amour qu’il a pour elle : il compromet l’honneur de cette épouse vertueuse en lui faisant incognito des présents magnifiques qui passent pour les libéralités de quelque amant secret ; invention bizarre et romanesque.
Ce séjour de Rome fut peu propre d’ailleurs à faire revenir Leopardi de certaines préventions et aversions déjà conçues. […] C’est une enfant très-belle, et non point telle à voir Que de lâches effrois la veulent concevoir : L’enfant Amour souvent l’accompagne et l’emmène ; Ils volent de concert sur cette route humaine, Portant à tout cœur sage allégeance et confort.
Deux phrases plus loin, la même insinuation revient plus précise. « Quelques-uns, dit Tibère, pourraient représenter sa sévérité publique comme l’effet d’une ambition ; dire que sous prétexte de nous servir, il écarte ce qui lui fait obstacle ; alléguer la puissance qu’il s’est acquise par les soldats prétoriens, par sa faction dans la cour et dans le sénat, par les places qu’il occupe, par celles qu’il confère à d’autres, par le soin qu’il a pris de nous pousser, de nous confiner malgré nous dans notre retraite, par le projet qu’il a conçu de devenir notre gendre. » Les Pères se lèvent : « Cela est étrange132 ! […] Après celle-là une autre, parfois toute contraire, et ainsi de suite ; il n’y a rien d’autre dans l’homme, point de puissance distincte et libre ; lui-même n’est que la série de ces impulsions précipitées et de ces imaginations fourmillantes ; la civilisation les a mutilées, atténuées, elle ne les a pas détruites ; secousses, heurts, emportements, parfois de loin en loin une sorte de demi-équilibre passager, voilà sa vraie vie, vie d’insensé, qui par intervalles simule la raison, mais qui véritablement est « de la même substance que ses songes » ; et voilà l’homme tel que Shakspeare l’a conçu.
Il faut un intérêt brûlant et implacable comme le crime lui-même pour le concevoir et pour l’exécuter. […] Voilà le traité de Fontainebleau, voilà la transaction que M. de Talleyrand avait conçue, d’accord avec Godoy, premier ministre, ministre presque souverain d’Espagne, et ensuite avec la passion de Napoléon de jeter un de ses frères sur ce trône, au risque d’aliéner à jamais de la France cette grande nation espagnole, alliée naturelle de la monarchie ou de la république française.
Conçu à dix-huit ans, terminé à vingt-cinq ans, ce poème conservera le caractère de l’adolescence de son auteur : le vague, la fleur, l’étonnement, la puberté de l’âme. […] On conçoit la popularité d’une pareille poésie dans un siècle où le fanatisme des croisades n’était pas encore éteint, où les traditions de la chevalerie subsistaient encore, et où la passion poétique de la renaissance italienne faisait des poètes tels que Dante, Pétrarque, le Tasse, les véritables héros de l’esprit humain.
C’est alors qu’il conçut le monument colossal de la statue du dieu Mars, représentant François Ier. […] La croix monumentale qu’il avait conçue et exécutée vingt ans avant s’éleva dans l’église de la Nunziata sur sa tombe ; on l’y admire encore.
On conçoit que, pour la démontrer, il faille se plonger dans les arcanes de la scolastique. […] À certains traits, l’empreinte du philosophe est reconnaissable ; et il n’y a que lui dans la Grèce, si féconde d’ailleurs en beaux esprits, qui pût concevoir et exprimer sous cette forme de telles pensées.
— Cela se conçoit. […] XVII Pendant qu’ils déjeunaient à l’ombre, Eckermann et lui, Eckermann lui demande pourquoi le petit coucou est nourri par des oiseaux qui ne l’ont ni conçu ni élevé ?
si l’on pouvait mettre face à face les noms des exploiteurs et ceux des exploités, porter à la lumière du jour les secrets des collaborations occultes, démasquer les signataires au front audacieux, faire remonter de l’ombre, ne serait-ce que pour un instant et pour le seul amour de la vérité, les humbles artisans de ces productions sans guère de valeur et, néanmoins, si profitables à d’autres, si lucratives entre les mains des hardis entrepreneurs, qui les ont parafées d’un geste large sans les avoir conçues ni lues peut-être ! […] En attendant que se réalise cette évolution salutaire, ou que le genre lui-même ne périsse de sa propre décomposition, c’est affaire à la critique de protester de temps à autre, pour la bonne police des lettres, contre la vénalité de certaines plumes et de rendre responsables des mauvais ouvrages, qu’ils signent, ceux-là peut-être qui ne les auront ni conçus ni exécutés, mais qui très complaisamment en perçoivent le salaire.
Quand Héphestos naquit, Héra, sa mère, furieuse d’avoir conçu cet enfant difforme, le précipita dans la mer où il fut recueilli par des déesses nourricières. […] Aussi conçoit-on moins ces nymphes secourables sous la figure de femmes incarnées que sous celle des formes flottantes qui se modèlent vaguement sous les eaux.
Mélange incroyable d’enthousiasme et de mépris, de volontés et d’obéissance ; un assemblage de paradoxes ; une réunion de vérités ; si active à concevoir, si lente à exécuter ce qu’elle a conçu !
Il auroit éclairci bien mieux que moi les véritez que je tâche de déveloper, lui qui possede en un dégré éminent le talent le plus précieux dont un homme de lettres puisse être revêtu, je veux dire le don de mettre les connoissances les plus abstraites à la portée de tout le monde et de faire concevoir au prix d’une attention médiocre, les veritez les plus compliquées, même à ceux qui n’étudierent jamais les sciences dont elles font une partie, que dans ses ouvrages. […] On conçoit que Mummius qui voulut enrichir Rome des dépoüilles de Corinthe ne s’y connoissoit gueres, par la menace ridicule qu’il fit aux maîtres des navires qui les y devoient transporter.
Mais on voit très bien qu’il aurait été très capable de le concevoir. […] Le critique est un artiste qui voit réalisé par un autre ce qu’il n’était capable que de concevoir ; mais pour qu’il le voie, il fallait qu’il pût au moins le rêver. — Fontenelle n’a pas même eu le rêve du grand art. […] Seulement Voltaire est trop léger pour avoir en soi, ou pour atteindre, du système qu’il conçoit ou qu’il caresse, la substance et le fond. […] Ce qu’il paraît concevoir comme idéal de civilisation est peu engageant. […] Le sens critique que l’a conçue ; mais le génie de curiosité l’a exécutée.
Ce fut le moment où l’alliance se noua étroitement entre la France et l’Autriche, et où se conçut et se discuta secrètement le traité de Versailles.
On raconte que Malherbe conçut un peu de jalousie de Racan pour cette belle stance ; et Boileau disait que, pour avoir fait les trois derniers vers, il donnerait les trois meilleurs des siens : ce que Daunou, qui n’entend bien que la prose, ne comprend pas.
Rosny, conduit à Vendôme par son père et présenté par lui à Henri, devant la reine Jeanne d’Albret sa mère, lui débita très bien sa petite harangue avec des protestations de lui être à jamais très fidèle et très obéissant serviteur : Ce que vous lui jurâtes en si beaux termes, lui rappellent ses secrétaires, avec tant de grâce et d’assurance, et un ton de voix si agréable qu’il conçut dès lors de bonnes espérances de vous ; et vous ayant relevé, car vous étiez à genoux, il vous embrassa deux fois et vous dit qu’il admirait votre gentillesse, vu votre âge qui n’était que d’onze années, et que vous lui aviez présenté votre service avec une si grande facilité et étiez de si bonne race qu’il ne doutait point qu’un jour vous n’en fissiez paraître les effets en vrai gentilhomme.
On le voit, si une idée auguste et grandiose préside à l’inspiration de Gibbon, l’intention épigrammatique est à côté : il conçoit l’ancien ordre romain, il le révère, il l’admire ; mais cet ordre non moins merveilleux qui lui a succédé avec les siècles, ce pouvoir spirituel ininterrompu des vieillards et des pontifes, cette politique qui sut être tour à tour intrépide, impérieuse et superbe, et le plus souvent prudente, il ne lui rendra pas justice, il n’y entrera pas : et de temps en temps, dans la continuité de sa grave Histoire, on croira entendre revenir comme par contraste ce chant de vêpres du premier jour, cette impression dénigrante qu’il ramènera à la sourdine.
Le rôle que Madame concevait pour elle en France était donc de préserver son pays natal des horreurs de la guerre, de lui être utile dans les différents desseins qui s’agiteraient à la cour de France et qui étaient de nature à bouleverser l’Europe.
Cowper, en causant avec ce jeune homme, rencontra avec une joie inexprimable une âme nourrie des plus vives notions du christianisme, tel qu’il le concevait lui-même ; il fut introduit bientôt dans la famille, et dès lors une amitié s’engagea qui décida de toute la vie, et, l’on peut dire, de toutes les facultés et des talents du poète.
Il se livra à l’étude ; pendant deux années, il lut toutes sortes de livres ; il s’appliqua avec suite aux mathématiques : « J’ai conçu beaucoup de choses dans cette science, disait-il, mais je n’ai pas une tête à calcul, et ma santé est trop faible pour supporter l’extrême contention qu’exige cette étude. » Il se considérait dès lors comme un solitaire un peu cacochyme, que son organisation éloigne de la vie active et des affaires, et qui est plutôt fait pour se replier et se renfermer au dedans.
On doit s’attendre que des hommes dans sa condition ne seront pas poussés à agir par des mobiles privés… Il pourrait faire sans doute un pas extraordinaire en considération d’un mérite extraordinaire… Mais, s’il ne le fait point, aurait-on bonne grâce à s’en plaindre et à en concevoir le moindre ressentiment ?
On conçoit que les Sahariens adorent leur pays ; que comme le Norvégien est attaché à son sol natal, à ses lacs plaintifs et à ses grandes forêts de sapins, les habitants d’une ville perdue dans une maigre oasis aux confins du désert soient fixés au sol et se sentent pris d’un grave et poignant amour pour « ce tableau ardent et inanimé, composé de soleil, d’étendue et de solitude ».
Quelques-uns conçurent dès lors le projet de rentrer à tout prix dans leurs chères vallées et de reconstituer la nation.
La noblesse, le sénat, les femmes, tout déloge depuis que l’armée du roi a repassé l’Oglio… Je n’ai jamais cru, conçu ni compris que, la défense du Milanais étant l’objet principal, ce fût le défendre que de repasser l’Oglio.
» — « Non, et je n’y conçois rien. » — « Ni moi non plus. » Et nous allions énumérer tous les accidents qui peuvent survenir en voyage, lorsque Suzanne entre et me présente une lettre de Genève.
On sait et l’on savait depuis longtemps par Mme Campan que Marie-Antoinette, après plus de sept ans de mariage, n’avait pas encore le droit de concevoir l’espérance d’être mère.
J’étais en ce temps-là rempli d’horreur pour l’esclavage dans les Indes occidentales et pour le commerce des esclaves, et l’Histoire de Haynal n’avait pas peu aidé à fortifier en moi ces sentiments ; mais, quand je vins à l’aborder sur ces sujets, il me parut si froid et si indifférent, que je conçus de lui une opinion tout à fait défavorable.
La Mennais a mis à peine le pied sur la grande scène, qu’il conçoit l’idée d’un rôle bien différent, d’une action publique à exercer sur l’opinion, et il essaye d’y associer son aîné.
On conçoit que, sous l’impression que laissent de pareils élans, Michelet ait pu lui écrire un jour : « Le sublime est votre nature… » ; et qu’ayant sous les yeux son dernier recueil, il ait écrit à son fils (25 décembre 1859) : « Mon cœur est plein d’elle.
Vivre, puisqu’il le faut, de la vie de tous, subir les hasards, les nécessités du grand chemin, y recueillir les enseignements qui s’offrent, y fournir au besoin sa tâche de pionnier ; puis se dédoubler soi-même, et dans une part plus secrète réserver ce qui ne doit pas tarir ; l’employer, l’entretenir, s’il se peut, à l’amour, à la religion, à la poésie ; cultiver surtout sa faculté de concevoir, de sentir et d’admirer : n’est-ce pas là une manière d’aller décemment ici-bas, après même que le but grandiose a disparu, et de supporter la défaite de sa première espérance ?
La solution mixte improvisée à cette révolution pouvait déplaire à une portion notable des esprits et des cœurs : on pouvait désirer, concevoir du moins une autre issue, un autre cours donné aux choses, un autre lit au torrent ; mais tous, et ceux même qui se prononçaient pour la solution mixte, étaient très-persuadés qu’il allait y avoir pour bien des années dans le corps social une plénitude de séve, une provision, une infusion d’ardeurs et de doctrines, une matière enfin plus que suffisante aux prises de l’esprit.
Quand on traite le portrait d’un pur homme de lettres, d’un romancier comme Charles Nodier, par exemple, qui n’était pas sans de certaines ressemblances de sensibilité avec Benjamin Constant, je conçois de l’indulgence.
Je conçois les difficultés et les scrupules lorsqu’on a en main d’aussi riches matériaux ; mais il importait, ce me semble, dans l’intérêt de la lecture, de conserver à la publication une sorte d’unité ; d’éviter ce qui traîne, ce qui n’est qu’intervalles, et surtout d’avoir toujours les Mémoires sous les yeux, pour abréger ce qui n’en est qu’une manière de duplicata.
David avait de bonne heure, dès 1828, conçu pour le talent de Bertrand la plus haute, la plus particulière estime, et il était destiné à lui témoigner l’intérêt suprême.
Quand les anciens personnifiaient l’amour et la beauté, loin d’affaiblir l’idée qu’on en pouvait concevoir, ils la rendaient plus sensible, ils l’animaient aux regards des hommes, qui n’avaient encore qu’une idée confuse de leurs propres sensations.
Tous les deux crurent que ce qu’ils avaient tant aimé ne pouvait être insensible à leur souvenir ; ils ne purent concevoir que ces absents si regrettés, toujours vivants dans leurs pensées, eussent entièrement cessé d’être ; qu’ils ne se réuniraient jamais à cette autre moitié d’eux-mêmes.
On conçut qu’il fallait donner une autorité supérieure et un fondement rationnel à la règle des mœurs, et l’on résolut encore ce problème par la superposition du christianisme à la sagesse humaine des anciens.
Aussi conçoit-on l’indifférence un peu sèche avec laquelle le jeune Camille lui apprend qu’il en aime une autre.
Je voyais dernièrement le drame plein d’action dans lequel deux hommes de talent (et l’un d’eux le plus habile ingénieur dramatique de notre âge) ont reconstruit et remis en jeu sa mémoire13 : ils ont conçu le rôle au point de vue d’une grande actrice, l’Adrienne de nos jours, en le lui appropriant par d’heureux traits.
Soyons juste : il y a des moments aussi où l’on conçoit l’impatience de Rousseau, où on la partage presque ; car Mme de La Tour est bien exigeante sans paraître s’en douter.
Le jeune Bazin conçut de bonne heure l’aversion du régime qu’il voyait finir ; il était encore au collège, qu’il se permit un jour, m’assure-t-on, quelque espièglerie poétique qui courut, quelque Napoléone au petit pied, qui eut l’honneur d’inquiéter la police impériale.
Dès que les libraires qui en avaient conçu la première idée eurent mis la main sur lui, ils sentirent bien qu’ils avaient leur homme ; cette idée à l’instant s’étendit, prit corps et s’anima.
Pour nous faire mieux apprécier la manière exacte et loyale dont Mallet conçut sa tâche nouvelle et dont il s’en acquitta, M.
Graner ou Grauer, de Berlin, un utopiste, avait conçu le projet d’une association destinée à assurer (ni plus ni moins) la prospérité et la sûreté de tous les États de l’Europe, et il était venu à Paris pour y organiser son idée.
Vers ce temps (1647), le roi tomba malade de la petite vérole ; sa mère en conçut les plus vives inquiétudes ; il lui en témoignait une tendre et touchante reconnaissance : Dans cette maladie, le roi parut à ceux qui l’approchaient un prince tout à fait porté à la douceur et à la bonté.
Elles sont revenues à ma pensée après les événements d’Essonne, et m’ont fait alors une impression que l’on conçoit, et qui jamais ne s’est effacée de ma mémoire.
C’est alors qu’il conçut l’idée de faire le voyage d’Orient et de Jérusalem pour vérifier quelques points restés douteux de son histoire, et pour visiter les lieux témoins des grandes scènes qu’il avait racontées.
Quand il fut question, plus tard, de conduire le char de l’État sur une pente rapide, et que pas un instant n’était à perdre, on conçoit que ce fond d’indécision dut être fatal : dans l’habitude de la vie, ce n’était qu’une singularité piquante.
Arnault ne ressemblent pas à d’autres ; il les conçoit à sa manière et en invente les sujets ; il ne songe point à imiter La Fontaine, il songe à se satisfaire et à rendre d’une manière vive un résultat de son observation propre ; il obéit à son tour d’esprit, à son jet d’expression, et on ne peut s’étonner si, comme lui-même l’avoue, « l’apologue a pris peut-être sous sa plume un caractère épigrammatique ».
On peut concevoir une extrême richesse dans l’expression, tenant à une extrême ingéniosité dans les inventions et les conventions du style, qui cependant ne s’écarterait pas trop de la vérité simple.
Nous pouvons concevoir à peu près pourquoi la concurrence est plus vive entre des formes alliées qui remplissent presque la même place dans l’économie de la nature ; mais il est probable que nous ne pourrions dire en un seul cas précisément pourquoi une espèce a remporté la victoire sur une autre dans la grande bataille de la vie.
Il en est de même d’un conte môssi recueilli par Froger qui est conçu sur le même plan.
De ces deux Mémoires, bourrés de faits et de raisons et qui sont des revendications en faveur des traditions et des coutumes qui faisaient le droit public de France, celui sur les bâtards légitimés est incontestablement le plus beau, et on conçoit que, pour nous surtout qui faisons de la littérature, ce soit le plus beau.
Ainsi, par exemple, de ce que certains esprits distingués dans la littérature ou dans la science ont, comme Hurter, malgré leur origine et leur éducation protestante, manifesté une admiration sincère pour l’organisation catholique telle que le Moyen Âge l’a conçue et réalisée, est-ce un motif légitime d’induire qu’il y a une tendance très animée vers le catholicisme dans la patrie de ces esprits, et que cette tendance mène droit à une révolution ?
Henri Heine est un génie éminemment tendre, nuancé des plus ravissantes et (dans le sens religieux) des plus divines mélancolies, chez qui le sourire et même le rire trempent dans les larmes, et les larmes se rosent de sang… C’est une âme d’une si grande puissance de rêverie et d’un désir si amoureux du bonheur, que l’on peut dire qu’elle est faite pour le Paradis tel que les chrétiens le conçoivent, comme les fleurs sont faites pour habiter l’air et la lumière.
Concevez-vous qu’un peintre, dessinant sur sa toile un coin de bataille, et se fiant pour cela à sa fantaisie, puisse être si bien servi par le hasard qu’il se trouve avoir exécuté le portrait de soldats réels, réellement mêlés ce jour-là à une bataille où ils accomplissaient les gestes que le peintre leur prête ?
Le poëte tragique, en particulier, était à l’aise et suffisamment inspiré, dans cette vaste enceinte et cette infinie variété de la représentation tragique, telle que l’esprit la concevait alors, pouvant essayer tous les spectacles, depuis les splendeurs des rois jusqu’à la mendicité des bannis, depuis la terreur la plus éloquente jusqu’à la bouffonnerie, depuis la majesté d’Agamemnon et le délire religieux de Cassandre jusqu’à la fureur d’Oreste et au sommeil des Euménides trompées par Apollon, depuis les Choéphores jusqu’au Cyclope, Le poëte tragique, avec cette fécondité d’un art nouveau, multipliait ses œuvres pour les grandes fêtes de chaque année ; mais il ne s’exerçait pas ailleurs et pour une moindre occasion que les Panathénées et que la Grèce accourue dans Athènes.
Merveilleux et tendresse, sublimité des images et profonde émotion du cœur, il y aura donc là ce que la poésie la plus vraie, la plus naturelle, avait pu concevoir de plus grand, à la pensée de Dieu et sous les rayons de la plus éclatante nature ; et là devait se rencontrer aussi ce que l’âge plus avancé du monde, ce que l’expérience plus triste de la vie, ce que les malheurs réitérés des siècles, auront appris à l’âme humaine.
Ce n’est pas une religion très intérieure, et l’on conçoit que le théosophe Saint-Martin ait trouvé au moins autant à redire au Génie que le philosophe Ginguené. […] Le poème de Jocelyn, que Lamartine a conçu comme la conclusion et le dernier épisode de l’épopée cyclique, contient bien une spéculation faustienne sur la nature et les destinées de l’homme. […] On conçoit donc que, seul, il n’ait pas écrit de vers directement intimes ; qu’il n’ait pas chanté comme les autres ses amours, ses haines, ses peines et ses joies (ou du moins qu’il n’en ait rien publié) et qu’il ait tout stylisé.
la splendeur du vrai… Platon, Plotin… la qualité de l’idée se produisant sous une forme symbolique… un produit de la faculté d’idéer… la perfection conçue d’une manière confuse… la réunion aristotélique des idées d’ordre et de grandeur… Est-ce que je sais ? […] Il est debout comme Moïse sur le roc de sa foi ; cette foi, il la défend des erreurs intérieures, il la garde dans son intégrité divine contre l’esprit maudit de la division ; mais, comme Moïse encore, ses soins ne sont qu’au Peuple Choisi qu’il protège avec vigilance contre l’hérésie, contre le Protestantisme ou le Quiétisme : quant aux Gentils, aux Incrédules, il s’étonne (dans tout le grand sens qu’il gardait à ce mot) qu’ils puissent avoir lieu, ne conçoit pas la possibilité de discuter avec eux, écrase de son ironie éloquente le naissant esprit de science et de critique et le condamne avec cette brièveté significative : « Il manque un sens aux incrédules. » — Si ce n’est tout à fait la même entité humaine que celle de Bossuet et de Descartes, c’est du moins, encore une entité idéale que Racine voit dans l’homme. […] Que de temps il faudra, que de découvertes scientifiques, que de révolutions sociales, que d’évolutions artistiques et littéraires, pour que l’homme en vienne à concevoir l’invisible et formidable vie universelle où sa vie propre se perd comme l’unité dans l’infini ! […] Cette ressemblance, Obermann la trouve en lui et en conçoit cette fierté qui le place intérieurement auprès de l’homme tel qu’il serait. […] Siècle de tentatives égarées dans tous les sens vers une fraternité spirituelle alors que la lutte analytique se livrait, pouvait-il concevoir la nouveauté architecturale, le sens essentiel et premier de tout monument étant : abri pour la paix et pour l’union ?
Je conçus pour lui une haine qui n’est pas éteinte encore. […] C’est à cette passion conçue depuis longtemps qu’il faut rapporter ses excursions lointaines, dont le but resta jusqu’au dernier jour un mystère pour ses amis. […] En effet, c’est le bon temps, et nous concevons qu’on le regrette ; mais il n’a que quelques années, et rien n’est triste comme un bohème ou comme un étudiant en cheveux gris. […] On méprise et on éloigne le vulgaire ; mais s’il se le tient pour dit et ne vient pas, les plus fières natures en conçoivent des tristesses mortelles. […] Il en conçut une mélancolie qui altéra son esprit, déjà si troublé, et précipita sa fin, dès longtemps prévue.
Il conçut vingt projets de spéculation et courut une fois en Sardaigne pour voir si les scories des mines exploitées par les Romains ne contenaient pas d’argent. […] Si Descartes est arrivé jusqu’à concevoir le monde comme un composé de mouvement et d’étendue, c’est par horreur pour l’obscurité des petits êtres scolastiques. […] Au moment où Bouddha est conçu, « tous les êtres eurent des pensées affectueuses et secourables, eurent les uns pour les autres les sentiments d’un père ou d’une mère ». […] Il avait conçu comme le bien suprême le développement de ses facultés et l’accroissement de sa puissance. […] Sans doute les esprits grossiers, les gens du peuple, surtout les races rudes de l’Asie septentrionale, ne conçoivent pas ce dogme dans sa pureté métaphysique.
Pour la philosophie du dix-huitième siècle, l’individu apparaissait comme existant par lui-même, et la Déclaration des droits décèle cette vision de la personnalité conçue comme indépendante des conditions où elle a grandi. […] Quel que soit le motif qui a empêché qu’elle ne terminât un à tout le moins des romans qu’elle a pu concevoir, — on trouvera ici un fragment de l’un d’eux, — ce livre d’Images restera comme la révélation, pour ceux qui ont le goût et le sens des Lettres, d’un beau talent trop tôt brisé par une mort, de toutes manières cruellement prématurée. […] Quand on se dit que cette méthode scientifique conçue comme il la concevait, suppose une documentation minutieuse et indéfinie de petits faits vérifiés, on demeure étonné du labeur que représentent les quarante ans que Taine a pu consacrer à des recherches distribuées sur tant de sujets différents. […] Ils ne l’ont pas fait ; cette réduction de l’Allemagne aux Allemagnes ne paraît même pas avoir été conçue.
Barabbas conçoit les meurtres, et sur-le-champ les meurtres sont accomplis ; nulle délibération, nul tiraillement ; c’est pour cela qu’il peut en commettre une vingtaine ; sa fille le quitte, le voilà dénaturé, il l’empoisonne ; son confident le trahit, il se déguise et l’empoisonne. […] Le paganisme du Nord s’exprime tout entier dans cet héroïque et douloureux soupir ; c’est ainsi qu’ils conçoivent le monde tant qu’ils restent hors du christianisme, ou sitôt qu’ils en sortent. […] Ainsi conçu, l’amour devient une chose presque sainte : le spectateur n’a plus envie de faire le malin et de plaisanter ; elles songent non à leur bonheur, mais au bonheur de celui qu’elles aiment ; c’est le dévouement qu’elles cherchent, et non le plaisir. « On m’appela en hâte, dit Euphrasie à Philaster en lui contant son histoire87, pour vous entretenir ; jamais homme, — soulevé tout d’un coup d’une hutte de berger jusqu’au trône, — ne se trouva si grand dans ses pensées que moi.
Elles sont étranges en Angleterre : un garçon d’environ quinze ans le prit comme victime, et le pauvre petit, incessamment maltraité, conçut « une telle crainte de son bourreau, qu’il n’osait lever les yeux sur lui plus haut que les genoux, et le connaissait mieux par ses boucles de souliers que par aucune autre partie de son habillement. » Dès neuf ans, la mélancolie le prit, non pas la rêverie douce que nous appelons de ce nom, mais le profond abattement, le désespoir morne et continu, l’horrible maladie des nerfs et de l’âme qui produit le suicide, le puritanisme et la folie. « Jour et nuit j’étais à la torture, me couchant dans l’angoisse, me levant dans le désespoir. » Le mal changeait d’aspect, diminuait, mais ne le quittait pas. […] Enfin le voilà, le précieux paquet ; on l’ouvre, on veut entendre la multitude de voix bruyantes qu’il apporte de Londres et de l’univers. « Maintenant ranimez le feu, fermez bien les volets, laissez tomber les rideaux, roulez le sofa, et, pendant que l’urne bouillante et sifflante élève sa colonne de vapeur, souhaitons la bienvenue au soir pacifique qui entre1193. » Et le voilà qui conte son journal, politique, nouvelles, tout jusqu’aux annonces, non pas en simple réaliste, comme tant d’écrivains aujourd’hui, mais en poëte, c’est-à-dire en homme qui découvre une beauté et une harmonie dans les charbons d’un feu qui pétille ou dans le va-et-vient des doigts qui courent sur une tapisserie ; car c’est là l’étrange distinction du poëte : les objets non-seulement rejaillissent de son esprit plus puissants et plus précis qu’ils n’étaient en eux-mêmes et avant d’y entrer, mais encore, une fois conçus par lui, ils s’épurent, ils s’ennoblissent, ils se colorent, comme les vapeurs grossières qui, transfigurées par la distance et la lumière, se changent en nuages satinés, frangés de pourpre et d’or. […] Le barbare, l’homme féodal, le cavalier de la Renaissance, le musulman, l’Indien, chaque âge et chaque race a conçu sa beauté, qui est une beauté.
On passe de là en logique : celle qu’on enseigne, du moins dans un grand nombre de collèges, est à peu près celle que le maître de philosophie se propose d’apprendre au bourgeois gentilhomme ; on y enseigne à bien concevoir par le moyen des universaux, à bien juger par le moyen des catégories, et à bien construire un syllogisme par le moyen des figures, barbara, celarant, darii, ferio, baralipton, etc. […] Ce que l’on conçoit bien, a dit Despréaux, s’énonce clairement : j’ajoute, ce que l’on sent avec chaleur, s’énonce de même, et les mots arrivent plus aisément pour rendre une émotion vive, qu’une idée claire. […] Mais comme, pour être clair, il ne faut pas concevoir à demi, il ne faut pas non plus sentir à demi pour être éloquent.
Il en était encore à un certain projet de listes nationales de notabilités, projet conçu et adopté dans le premier ordre consulaire et provenant de Sieyès : comme Roederer avait été le rédacteur de ce projet de loi, il continuait de le croire existant, non incompatible avec les changements survenus, et il en écrivit en ce sens au premier consul, qui crut sentir à l’instant qu’il n’était plus compris.
Je ne prétends point flatter ici Saint-Martin et je tiens à le montrer tel que je le conçois et qu’il m’apparaît après une longue connaissance plutôt qu’après une étude bien régulière.
Le vrai titre et l’idée de l’ouvrage était : Jusques ou la démocratie peut être admise dans le gouvernement monarchique ; avec cette épigraphe tirée de Britannicus et exprimant le vœu de conciliation qui est l’esprit du livre : Que dans le cours d’un règne florissant Rome soit toujours libre, et César tout-puissant D’Argenson conçut l’idée de son ouvrage par opposition à celui de M. de Boulainvilliers, tout en faveur de la féodalité et de la noblesse.
Les hommes qui ont été des instruments de salut en ces périodes critiques sont à bon droit proclamés providentiels ; et cette haute idée que l’on en conçoit est une couronne de leurs éminents services, en même temps qu’elle est faite pour rassurer les nations qui y voient le gage d’une protection divine au milieu des tempêtes.
Campaux, on aura pour tout le reste un commentaire aussi ample qu’utile, et conçu dans un esprit mieux encore que littéraire, je veux dire sympathique et presque filial. — Il a dû y avoir, je m’imagine, du temps de Villon, quelque écolier un peu plus jeune que lui, aussi laborieux, aussi bon sujet que l’autre était mauvais et dérangé, mais grand admirateur du poète, sachant ses premières chansons, récitant à tous venants ses plus jolies ballades, en étant amoureux comme on l’est à cet âge de ce qu’on admire.
Qu’un écrivain aimable et romanesque, un Nodier, par exemple, se joue à mille passions, à mille fantaisies et à des excès de tout genre, on le conçoit, on le lui pardonne, on l’en remercie même si son imagination et ses écrits en profitent ; mais si les passions à l’abandon débordent et font irruption dans l’existence d’un homme public, on lui en demande compte.
Le grand poëte n’avait cessé d’être de loin son « étoile polaire. » En recevant le volume de poésies, Gœthe reconnut vite un de ses disciples et de ses amis comme le génie en a à tous les degrés ; non content de faire à l’auteur une réponse de sa main, il exprima tout haut la bonne opinion qu’il avait conçue de lui.
On conçoit qu’un esprit juste se soit peu à peu retiré de ces conflits dans lesquels, ayant fait son devoir, il ne restait rien d’agréable et de bon à gagner.
. — Ainsi encore, dans le tableau de la Liberté, d’Eugène Delacroix, voyez la blouse du gamin : le peintre n’a pas cherché à reproduire la couleur exacte de la blouse ; il a cherché un ton harmonieux qui fît le meilleur effet dans le tableau tel qu’il le concevait.
J’avais autrefois rencontré Gavarni, je ne l’ai connu que tard ; mais j’ai beaucoup causé avec ceux qui l’ont pratiqué de tout temps, je me suis beaucoup laissé dire à son sujet, et insensiblement l’idée m’est venue de rendre à ma manière cette physionomie d’un artiste qui en a tant exprimé dans sa vie et qui les comprend toutes ; j’ai voulu l’esquisser telle qu’à mon tour je la vois et la conçois et telle qu’on l’aime.
Il a soif de posséder et de s’assimiler ce qu’il n’est donné à nul homme de ravir et ce qu’il est permis tout au plus de concevoir et de contempler.
Qu’avait-il fait de plus que ce que nous avons, pour concevoir et proclamer de si ambitieuses espérances ?
Il y a dans les Mémoires de Malouet une phrase dont je ne saisis pas bien le sens : c’est lorsque, venant de parler des projets de M. de Bouille pour le rétablissement de l’autorité royale, il ajoute : « J’imaginai cependant de donner un successeur à Mirabeau ; et la reine, qui ne connaissait pas mon projet, quoique j’en eusse prévenu M. de Montmorin, eut un moment d’humeur contre moi, et dit publiquement à son jeu qu’elle ne concevait pas comment M.
Non pas seulement assister d’une bonne place à ce savant et terrible jeu à combinaisons non limitées qu’on appelle la grande guerre, non pas seulement être appelé à donner en quatre ou cinq occasions des conseils plus ou moins suivis, mais être une bonne fois à même d’appliquer son génie, ses vues, sa manière d’entendre et de diriger les mouvements d’un corps d’armée, être compté, en un mot, lui aussi, dans la liste d’honneur des généraux qui ont eu leur journée d’éclat, qui ont combiné et agi, qui ont exécuté ce qu’ils avaient conçu.
Il est faible sur les origines du langage, on le conçoit aisément, et sur les origines de notre langue en particulier.
Il ne conçoit les transformations de l’humanité, même la plus adulte, que sur le terrain de l’héritage du Christ, dans le champ sans limites, acheté et nommé de son sang, toujours en vue de la Croix, au pied de l’indéfectible mystère. — Tel nous apparaissait Lamartine, lorsqu’hier sa voile s’enflait vers l’Orient ; tel il nous reviendra bientôt, plus pénétré et plus affermi encore, après avoir touché le berceau sacré des grandes métamorphoses.
Je demande d’en citer un passage (prose et vers), qui me semble fidèlement reproduire l’impression élégiaque sous laquelle j’avais conçu le héros.
On conçoit cependant, je le répète, une Société de gens de lettres s’entendant de leur mieux pour s’assurer le plus grand salaire possible de leurs veilles, si leur force unie se contient dans des termes d’équité et ne va jamais jusqu’à la coaction envers les éditeurs : car il ne faudrait ]pas tomber ici dans rien qui rappelât les coalitions d’ouvriers ; on a bien crié contre la camaraderie, ceci est déjà du compagnonnage.
Mais ce n’était là qu’un premier essai bien incomplet, bien arriéré et nullement méthodique ; dans sa modestie laborieuse et à la fois dans sa pleine confiance en Celui qui est la force des faibles, le pieux bénédictin osa embrasser un plan immense qu’un autre bénédictin, dom Roussel, avait déjà également conçu : rassembler dès les origines toutes les parties éparses de notre histoire littéraire, en composer un corps méthodique et régulier.
Placée au centre d’une seule idée, elle ne voyait partout alentour que des moyens, et elle ne concevait pas qu’un goût de philosophie, judicieux ou non, une opinion quelconque sur les oracles ou les miracles, ou encore sur le chapeau de l’abbé Dubois, pût venir jeter le moindre embarras dans la chose essentielle et sacrée.
Si quelque intérêt s’attache aujourd’hui pour nous à cette négociation, il tient tout entier, on le conçoit, à la façon dont le négociateur nous la raconte, et au jeu subtil des mobiles qu’il nous fait toucher.
On est fier d’être d’une race d’hommes à qui la Providence a permis de concevoir de telles pensées, et d’être enfant d’un siècle qui a imprimé l’impulsion à de tels mouvements de l’esprit humain.
On conçoit que, de l’œuvre de Marguerite, l’Heptaméron seul ait vraiment échappé à l’oubli : le xviie siècle s’y retrouvait, mondain, dramatique et moral.
On conçoit aussi pourquoi il n’y a rien de servile dans le respect de Boileau pour les œuvres consacrées par le temps.
Il voit toutes choses du point de vue de la raison : l’idée du vrai est comme la catégorie de son esprit, hors de laquelle il ne peut rien concevoir.
c’est peut-être là la suprême sagesse : voir le monde et s’en émerveiller comme les tout petits, mais ne revenir à cet émerveillement qu’après avoir passé par toutes les sagesses et les philosophies ; concevoir le monde comme un tissu de phénomènes inexplicables, à la façon des enfants, mais par de longs détours et pour des raisons que les enfants ne connaissent pas.
Mais enfin l’amour fait le principal intérêt des histoires qu’il écrit ; l’amour y inspire des actions extraordinaires, et ses héros et ses héroïnes sont les plus distingués que puisse concevoir l’imagination des femmes et dos adolescents.
On conçoit que l’égoïsme et l’envie puissent porter plus d’une fois l’individu, comme le remarque M.
Mais, étant donné un objet, on peut concevoir plusieurs séries différentes de mouvements qui permettraient également de l’atteindre.
Un poème ainsi conçu, quelles que soient les précautions qu’on prenne pour le rendre accessible, n’est jamais d’un accès immédiatement facile.
L’esclavage cesse le jour où l’esclave, que l’antiquité concevait comme sans moralité et sans religion, devient moralement l’égal de son maître.
Ils concevaient comme supérieure au mariage, attachant de force l’un à l’autre deux êtres humains qui peuvent en être venus à se haïr ou à se mépriser, une union ne reposant que sur l’amour, pouvant se nouer et se dénouer sans l’intervention de l’autorité sociale, et ils voulaient acheminer les intelligences paresseuses vers cet idéal encore lointain.
Chez toutes les sectes, quoiqu’elles aient gardé certains traits constants, il s’est produit des variations analogues dans la façon de concevoir les rapports de l’homme avec le divin et par suite avec la vie et l’art.
La façon mémo dont il conçoit les dieux de son temps dissipe leur figure et détruit leur alliage humain.
Je concevrais encore qu’il renonçât à son nom, à son amitié, à son amour même : mais ce qui est faux, humainement faux, foncièrement faux, aussi faux qu’il soit possible de l’être, c’est qu’il renonce à son art.
Il a de bonne heure conçu son rôle, et il s’y est dévoué, au point de ne rien se permettre jamais qui ne s’y rapporte.
Je ne me permettrai d’exprimer qu’une seule critique pour la manière dont ces articles sont conçus et composés.
Un abbé, homme savant et homme d’esprit, l’abbé Gédoyn, le même qui a traduit Quintilien, et qui l’a d’autant mieux traduit qu’il avait été bien avec Ninon (avoir été bien avec Ninon, cela sert toujours), l’abbé Gédoyn, disons-nous, a traité cette question de l’urbanité, et il a terminé son agréable et docte mémoire par y joindre un éloge de Mme de Caylus, en remarquant que, de toutes les personnes qu’il avait connues, il n’en était aucune qui rendît d’une manière si vive ce qu’il concevait par ce mot d’urbanité.
Ce n’est pas conçu d’un jet ; je puis admirer le métier , mais je ne vois pas l’œuvre.
Quelques mois après, l’abbé de Choisy, pour faire sa paix, offrait et dédiait à Louis XIV une Vie de David, puis une Vie de Salomon, avec toutes sortes d’allusions flatteuses et magnifiques ; et, en général, toutes les histoires qu’il composa depuis lors, soit celle de l’Église, soit celle de divers rois de France, paraissaient invariablement avec des dédicaces à Louis XIV, conçues en des termes où toutes les formes de l’idolâtrie sont épuisées.
Épousseter, sabler, douche de fleurs, voilà le détestable style moderne, le style matériel, prétentieux et grossier, que certes on ne s’aviserait jamais d’aller chercher si près du tombeau de Racine, et qui, j’ose le dire, n’aurait jamais dû entacher non plus et charger le berceau de notre école romantique, telle du moins que je l’ai toujours conçue.
et comme il conçoit, avec une largeur et une ampleur qu’elle n’a jamais eue chez nous, la monarchie constitutionnelle véritable !
Il ne lui reconnaît pas la marque royale dans le sens où il la conçoit ; il le trouve un homme rare, extraordinaire, épuisant volontiers à son sujet toutes les épithètes et ne lui refusant que celle de grand, « laquelle, dit-il, suppose une moralité qui lui manque ».
Ailleurs, dans un petit Traité de la vieillesse, elle parlera de la dévotion, non pas comme d’un faible, mais comme d’un soutien à mesure qu’on avance en âge : « C’est un sentiment décent et le seul nécessaire… La dévotion est un sentiment décent dans les femmes, et convenable à tous les sexes. » Cette manière d’envisager la religion est irréprochable au point de vue social et moral ; mais le vrai chrétien demande davantage, et je conçois que le digne M. de La Rivière n’ait pas été entièrement satisfait, à cet égard, des dispositions de son amie.
Voilà l’inépuisable mine dans laquelle il trouve ses preuves, ses comparaisons, ses exemples, ses transitions et ses images… Il fond si bien les pensées de l’Écriture avec les siennes, qu’on croirait qu’il les crée ou du moins qu’elles ont été conçues exprès pour l’usage qu’il en fait… Tout, en effet, dans un sermon, doit être tiré de l’Écriture, ou du moins avoir la couleur des livres saints ; c’est le vœu de la religion, c’est même le précepte du bon goût.
Une fois en correspondance avec le grand homme, on conçoit que Marmontel se soit dégoûté du petit collet, de la carrière ecclésiastique, et qu’il ait un jour pris la route de Paris sur la foi d’une promesse et d’une espérance.
Pour en revenir à La Harpe jeune, nouvellement marié et assez, souvent sifflé, on conçoit que cette existence inégale et nécessiteuse n’était pas propre à fonder la considération ni à imprimer le respect.
Je conçois qu’on ait eu envie de l’écrire. » C’est pour avoir cédé toujours à ces envies et ne les avoir jamais contrôlées par un devoir, par un principe ou un scrupule, que Bonneval se perdit.
Il se montra en même temps humain et moral, fidèle à ses principes de Lyon, en insistant pour qu’on prévînt la conspiration une fois connue, au lieu de la laisser à demi éclater comme quelques ministres l’auraient voulu Vers ces années, pour se consoler des injustices de l’opinion publique à son égard, se sentant peu de goût d’ailleurs pour tout ce qui se pratiquait à la Cour, et croyant aussi qu’il était séant à une époque de paix d’inaugurer le rôle d’une espèce de grand seigneur industriel, il conçut l’idée de fonder dans sa terre de Châtillon un vaste établissement où il assemblerait toutes les industries, et moyennant lequel il doterait son pays des innovations utiles en tous genre.
Pour lui, à cette date, il ne concevait et ne proposait pas de mesure précise et décisive, soit dans le sens de la répression, soit dans celui d’une refonte hardie.
Suard en jugeait comme Napoléon, et La Harpe écrivait : « Il est facile de concevoir les jouissances et les joies d’un public charmé de s’amuser aux dépens de l’autorité, qui consent elle-même à être bernée sur les planches. » Mais, où le rire général se mêle et où l’ivresse éclate, que peuvent les prévisions et les réserves de quelques esprits ?
À peine peut-on concevoir tant de modestie dans un homme que l’on a tant loué, et que l’on loue encore tous les jours à si juste titre.
Il concevait dans sa tête et portait partout avec lui un monde d’ordre et d’harmonie, une espèce d’Éden ou d’âge d’or, duquel il ne voulait absolument pas se départir et qu’il s’obstinait à réaliser au milieu des désaccords de tout genre qui l’offensaient.
À chaque instant, c’est le fervent zélateur, le grand maître ou le général en chef qui harangue ses lieutenants, desquels d’Alembert est là-bas le premier : Je ne conçois pas comment tous ceux qui travaillent (à l’Encyclopédie) ne s’assemblent pas et ne déclarent pas qu’ils renonceront à tout si on ne les soutient… Faites un corps, messieurs ; un corps est toujours respectable… Ameutez-vous, et vous serez les maîtres.
Et le soir le général Sébastiani recevait sur un plat d’orfèvrerie, la tête coupée de la femme, avec un message conçu à peu près en ces termes.
Aussi, si Heine se connut mieux en s’analysant davantage, il se connut ironiquement, se détesta, se méprisa, se vilipenda, et comme l’on ne sait de l’humanité que soi-même, il advint que son âme fut partagée entre la tristesse et le mépris, qu’il se conçut, même dans les œuvres où s’idéalisant, il s’érigeait en pur exemplaire humain, tantôt comme un malheureux digne de pitié et de justice, tantôt comme un misérable qu’il fallait bafouer et maltraiter.
La vérité, dit-on, n’est autre chose que le point de vue selon lequel chacun considère les choses : or le point de vue de l’un n’a pas plus d’autorité que celui de l’autre ; chacun a le même droit de ressentir les choses telles que son organisation les lui présente, et de les concevoir en raison de ses impressions.
Ils conçoivent une période par le mot qui la commence, et par une période tout un chapitre : leur avez-vous lu un seul endroit de l’ouvrage, c’est assez, ils sont dans le fait et entendent l’ouvrage.
… Moins il y a d’opulence autour du berceau de l’enfant qui naît, mieux les parents conçoivent la nécessité de l’éducation, plus sérieusement et plus tôt l’enfant est appliqué.
Ce projet n’a point eu lieu, parce qu’il était embarrassé de différentes difficultés qui disparaissent en suivant la manière simple dont je l’ai conçu.
Désiré Nisard, dans ce célèbre manifeste, avait pris parti pour la réflexion, l’étude, la volonté inspirée, contre l’improvisation, la précipitation, le gaspillage ; parce qu’il s’était rangé du côté de la conscience littéraire contre les succès à tout prix et au rabais ; parce que, là comme dans ses autres écrits, il n’avait pas sacrifié toutes les qualités de l’écrivain à ce pittoresque que nous ne haïssons pas, mais qui avait positivement alors tourné la tête à toute la littérature ; parce qu’il honorait la tradition, qu’on ne respectait plus et même qu’on insultait très bien ; parce qu’il ne concevait pas la Critique en dehors de la morale chrétienne, quand le Beau seul suffit aux âmes, disaient les délicieux Esthétiques de ce temps ; parce qu’enfin il avait en lui la faiblesse la touchante faiblesse du xviie siècle au lieu d’avoir l’orgueil insensé et insupportable du xixe , il fut bientôt classé, par les ardents et les rutilants de ce siècle-là, parmi les effacés, les chagrins, les retardataires, les professeurs d’ailleurs, les pédantisants !
Spéculant sans doute sur tous ces amours-propres qu’il flatte, l’historien de la Littérature semble être de l’avis du Fabuliste : « Mieux vaut goujat debout qu’empereur enterré », et on le conçoit, si c’est moins l’histoire du passé qu’il écrit que l’histoire d’un avenir qu’il espère… Sans cela, comment expliquerait-on que, dans cette histoire, pleine de titubations singulières, certains talents et certaines renommées tinssent hardiment et presque effrontément la place à laquelle d’autres talents et d’autres renommées auraient droit ?
Ordinairement la difficulté, quelle qu’elle soit, dans les choses de ce monde, se conçoit comme une pointe, — comme la vérité, cette pointe écachée, de Pascal.
L’homme qui est né avec de la vigueur n’étant plus arrêté par des conventions, marche où le sentiment de sa vigueur l’entraîne ; l’esprit, dans sa marche fière, ose se porter de tous les côtés, ose fixer tous les objets ; l’énergie de l’âme passe aux idées, et il se forme un ensemble d’esprit et de caractère propre à concevoir et à produire un jour de grandes choses ; celui même qui par sa nature est incapable d’avoir un mouvement, s’attache à ceux qui ont une activité dominante et propre à entraîner : alors sa faiblesse même, jointe à une force étrangère, s’élève et devient partie de la force générale.
Dans une université comme celle de Paris, voir des abus aussi crians, cela ne se conçoit pas, sur-tout après avoir eu pour chanceliers tant d’hommes éclairés. […] Un jeune homme n’a nulle ressource, il a paru quelquefois au théâtre, il conçoit tout-à-coup le dessein de travailler en ce genre. […] Je conçois, reprit la comtesse, que l’homme qui écrit, rend les choses en beau, & qu’une histoire dégagée de toutes les miseres qui accompagnent les voyageurs, ne peut être qu’agréable. […] Cela blesse étrangement l’oreille du lecteur, & l’on ne conçoit pas comment on ne s’apperçoit pas en écrivant d’un pareil défaut… Il n’y a parmi nos écrivains que l’abbé Guidi, auteur de plusieurs ouvrages, qui ait su éviter une pareille dissonance. […] C’est un auteur qui s’applique plus à bien tailler sa plume, qu’à concevoir de grandes choses.
» Et de fait, le crime commis est la plus révoltante lâcheté qu’on puisse concevoir, si on l’isole, si l’on ne tient compte ni des conditions dans lesquelles il a été accompli, ni de l’état spécial du criminel doué d’une intelligence, d’une exagération de sensitivité si subtiles qu’elles constituent presque un état morbide. […] Mari infidèle, par faiblesse d’âme, par excès d’orgueil, Hermil avoue que, se considérant comme un esprit rare, il est devenu incapable de concevoir le moindre sacrifice, la moindre abnégation de lui même. […] Tout cela ne conçoit pas que l’on soit aimable autrement qu’avec les petits mots fins de M. de Ségur ou les réflexions scintillantes de M. […] Désormais, je ne veux servir que mes intérêts nationaux, et je place ces intérêts, non pas dans la satisfaction des visées ambitieuses et des rêves de conquête que l’on me prête, mais dans le maintien et la consolidation de ce qui reste d’équilibre en Europe, dans l’indépendance et la sécurité des peuples. » Pour opérer une évolution aussi considérable, il fallait qu’un homme de génie l’ait conçue, l’ait préparée, et qu’il apportât à sa réalisation une volonté inébranlable. […] Dans notre état corporel présent, nous avons peine à croire et même à concevoir la réalité de l’impalpable : dans l’état spirituel, c’est la matière qui nous paraîtra l’irréel et le non-existant.
C’est qu’il a vraiment conçu et réalisé, selon le vœu d’André Chénier et la formule de Joubert, à la suite de Chateaubriand, un romantisme vraiment français, un romantisme classique. […] « L’éloquence qu’elle mettait dans ces prières, toutes conçues au moment même, était surprenante, lorsqu’à voix basse, partout où l’émotion la saisissait, mais le plus souvent le soir, avant qu’on eût apporté la lumière, elle s’élevait en esprit vers le Père commun. […] À partir de ces épisodes les beautés ne discontinuent pas : l’amour passionné d’Ahasvérus pour Rachel, la tendresse ardente et communicative de la vierge angélique, la fin des âges magnifiquement déroulée, tout nous donne, tout nous suggère l’impression de la grandeur épique, telle que notre temps la peut concevoir. […] Je conçois des séries futures ou inconnues de formes et d’êtres qui me dépasseront en force et en lumière, autant que je dépasse le premier né des anciens Océans. […] Éviradnus et Roland nous figurent dans la pensée du poète l’idéal de justice, tel qu’on pouvait le concevoir au temps où les revanches du droit étaient purement individuelles.
Sous peine de stérilité ou de rabâchage, il faut donc absolument réagir contre cette tournure d’esprit qui consiste à ne concevoir le roman français que sous sa forme passionnelle, et à croire que le roman honnête ne relève pas des procédés d’observation. […] « Cette fin satisfaisante, dit Arnold Mortier, à qui j’emprunte ces lignes, n’est point celle qu’avait primitivement conçue Théophile Gautier. […] On ne conçoit plus aujourd’hui un roman sans couleur locale, c’est-à-dire sans une peinture fidèle du milieu, des circonstances et de l’époque où se passe le récit. […] On peut très bien concevoir un roman genre Walter Scott, où l’on atténuerait le romantisme des personnages et où l’on accorderait plus de place à la description plastique, tout en maintenant l’intérêt, l’action et le dialogue, choses indispensables au succès d’un livre. […] Ceci se conçoit mieux.
L’ancien roman calomniait la société, le roman tel que l’a conçu M. […] L’homme tel que le conçoivent la plupart des romanciers modernes est au-dessous de l’homme réel ; l’homme tel que le conçoivent les romans de chevalerie est au-dessus, c’est un homme surfait. […] L’auteur a conçu ce caractère comme un vivant contraste avec celui des types modernes des riches héritières, un peu plus vaines encore de leurs millions que de leur beauté, de même qu’il a conçu celui de Maxime comme une réaction contre ces jeunes hommes de nos jours qui s’enquièrent du chiffre de la dot avant de s’enquérir des qualités de la future, et trouvent, comme l’Harpagon de Molière, que la cassette peut avoir les plus beaux yeux du monde ; seulement cette double réaction est forcée et elle va au-delà du réel ; l’auteur, dans le désir de produire plus d’effet, a trop appuyé sur le trait. […] Je refuse pour ma part cette louange au Roman d’un jeune homme paume, par un motif qu’il est facile de pressentir ; ce roman, je crois l’avoir prouvé, est conçu en dehors de la vérité humaine. […] Victor Hugo a le droit de concevoir ses personnages à sa manière, et encore faudrait-il qu’il mît en scène des personnages purement imaginaires, et pris en dehors de la réalité historique12, mais il n’a pas le droit de faire des personnages contradictoires.
On conçoit à la rigueur que l’appât d’un prix puisse stimuler la patiente industrie, encourager le labeur honnête ; mais les œuvres qui honorent d’une manière éclatante l’esprit humain n’éclosent pas parce qu’on les appelle ou parce qu’on les récompense. […] Le Moniteur a adressé à la Patrie elle-même, pour un article conçu cependant « dans le meilleur esprit », une petite note pleine de ces conseils qu’aucun journal, si officieux qu’il soit, ne saurait dédaigner. […] Que certaines classes de l’Institut soient divisées en sections afin de pouvoir se partager plus facilement le travail, cela se conçoit ; mais l’Académie française, qui est essentiellement littéraire, — et disons-le aussi, fort peu laborieuse, — ne saurait se fractionner en spécialités sans s’amoindrir. […] On conçoit qu’un soldat éprouve un grand dédain pour les questions d’argent ; mais on admettra qu’il est assez singulier de voir M. […] « Que les onctions sacrées te brûlent ; qu’elles brûlent tes mains tendues aux présents de l’impie ; qu’elles brûlent ton front où devait rayonner la lumière de l’Évangile et qui a conçu de scélérates pensées !
Je dirai aussi quelques mots de lord Byron, cherchant à marquer du point de vue où je suis placé la part de chacun de ces trois grands poètes dans l’influence commune, et malheureusement très funeste, qu’ils ont exercée sur la littérature contemporaine. » L’ouvrage qu’il roulait dans son esprit et dont il avait déjà fixé le plan avait été conçu à cette occasion et dans cet ordre d’idées. […] La vivacité pouvait manquer à Gandar dans les allures, dans la manière de s’exprimer, dans les actions et les démarches, dans les résolutions même ; mais il concevait et travaillait vite.
Cependant on conçoit le mot de La Fontaine, qui, dans sa jeunesse, ayant entendu lire à Château-Thierry, où il était encore, une ode de Malherbe, s’en enflamma, en raffola, le lut sans cesse, essaya de l’imiter : « Il pensa me gâter », a-t-il dit ensuite. […] On conçoit l’admiration de Henri IV pour de tels vers et qu’il ait voulu, après les avoir entendus, s’attacher Malherbe comme le poète le plus fait pour exprimer au vif l’idée de son règne, comme son poète ordinaire, capable de consacrer avec éclat et retentissement sa politique réparatrice et bienfaisante.
La manière de concevoir règle en l’homme la manière de sentir. […] Le roman ainsi conçu est une plaidoirie en faveur du cœur, de l’imagination, de l’enthousiasme et de la nature ; mais il est souvent une plaidoirie contre la société et contre la loi ; nous ne souffrons pas qu’on touche de près ou de loin à la société ni à la loi.
C’est que ce livre est un des monuments écrits les plus vastes qui aient jamais été conçus et exécutés par une main d’homme ; c’est que ce livre est une histoire, c’est-à-dire une des œuvres de l’esprit dans laquelle l’ouvrier disparaît le plus dans l’œuvre devant l’immense action de l’humanité qu’il raconte ; c’est qu’un tel livre n’est plus l’auteur, mais le monde, pendant une de ses périodes d’activité de vingt-cinq ans ; c’est que ce livre est le récit de la vie d’un de ces grands acteurs armés du drame des siècles, acteurs nécessaires selon les uns, funestes selon les autres (et je suis au nombre des derniers), mais d’un de ces acteurs, dans tous les cas, qui n’a de parallèle dans l’univers qu’avec Alexandre ou César ; c’est que ce livre remue en passant toutes les questions vitales et morales, de religion, de philosophie, de superstition, de raison, de despotisme, de liberté, de monarchie, de république, de législation, de politique, de diplomatie, de guerre, de nationalité ou de conquête, qui agitent l’esprit du temps et qui agiteront l’esprit de l’avenir jusque dans les profondeurs de la conscience des peuples ; c’est que ce livre est écrit par une des intelligences non complètes (il n’y en a point de complète devant l’énigme divine posée par la Providence, qui a seule le mot des événements), mais par une de ces intelligences les plus lumineuses, les plus précises, les plus studieuses, les plus universelles, et, disons-nous le mot, en le prenant dans le sens honnête, les plus correspondantes à la moyenne des intelligences, dont un écrivain ait jamais été doué par la nature ; c’est que ce livre, enfin, est aussi remarquable par ce qu’il contient que par ce qui lui manque. […] Il conçut un plan de campagne que nous laissons exposer à M.
Le faire dans l’artiste est inséparable du concevoir. […] Dans un premier écrit sur le Romantisme en 1818, il avait dit : « … La France et l’Allemagne sont muettes : le génie poétique, éteint chez ces nations, n’est plus représenté que par des foules de versificateurs assez élégants, mais le feu du génie manque toujours ; mais, si on veut les lire, toujours l’ennui comme un poison subtil se glisse peu à peu dans l’âme du lecteur ; ses yeux deviennent petits, il s’efforce de lire, mais il bâille, il s’endort et le livre lui tombe des mains. » « Quelle fut donc ma surprise quand je reçus de lui, avec qui je n’avais eu d’ailleurs que des relations assez rares et de rencontre, une lettre ainsi conçue : « Après avoir lu les Consolations trois heures et demie de suite, le vendredi 26 mars (1830).
Il y a certains films fabriqués en Italie, où se déroule, dans l’anecdote la plus inane, la sentimentalité la plus basse, qui semblent conçus pour récréer un peuple d’acéphales. […] J’aurais cru le contraire, que l’amour n’y avait aucune part, du moins avant, et que d’ailleurs l’amour, tel que nous le concevons, n’avait nulle place dans leurs relations sociales.
Au contraire, dans cette infaillible langue anglaise, on vous fait d’abord concevoir quelque chose de noir en général, puis ce noir prend la forme d’un cheval ; vous n’avez donc point dépensé d’attention en vain. […] Nous avons donc ici au moins trois termes en présence : l’idéal conçu et aimé par l’artiste, la langue dont l’artiste dispose, et enfin toute la société d’hommes à laquelle l’artiste veut faire partager son amour du beau.
Nous savons combien il est délicat de faire accorder cette impression en partie conjecturale et déjà poétique avec celle de la réalité encore récente, combien les contemporains immédiats ont toujours quelque particularité à opposer à l’image qu’on veut concevoir de la personne qu’ils ont connue ; nous savons tout ce que nécessairement il y a, dans une vie diverse, orageuse, d’infractions de détail au dessin général qu’on en recompose à distance : mais ceci d’abord est bien moins une biographie qu’une idée, un reflet de peinture morale sur la critique littéraire ; et j’ai tâché, d’ailleurs, dans les traits généraux de ce grand esprit, de tenir compte de beaucoup plus de détails et de souvenirs minutieux qu’il ne convenait d’en exprimer. […] Pour moi, je sais gré à cet esprit noblement ambitieux, à cet homme de génie manqué, d’avoir conçu, l’un des premiers, les idées et les moyens de réforme, les états-généraux, la milice citoyenne ; mais je lui sais gré surtout d’avoir auguré avec certitude et exprimé à l’avance, sous les traits de Zulmé, les grandeurs futures de Corinne. […] Les partisans de la perfectibilité, on le conçoit en effet, blâment surtout le présent, ou du moins le poussent, le malmènent ; les incrédules à la perfectibilité sont moins irascibles envers les choses existantes et les acceptent de meilleur cœur, tâchant dans le détail de s’en accommoder.
Suppression de toute activité intellectuelle, le mysticisme, tel que le conçoit M. […] Le mysticisme donc, tel que Bremond le conçoit, mènerait droit aux gouffres du matérialisme. […] Or les idées et leurs rapports purement intellectuels ne sont point du domaine de l’« art. » l’art implique l’idée, il est vrai, mais l’idée rendue saisissable aux sens… la poésie, ce n’est donc pas " Dieu arbitrairement conçu par l’esprit ", mais la manifestation extérieure de Dieu, l’univers qu’il pénètre et anime de sa vie… etc : ces témoignages, bribes entre des centaines, que le romantisme m’apporte sur la poésie pure, pourraient être rattachés par de multiples fils aux dires des poètes les plus éloignés les uns des autres, de l’extrême occident à l’orient extrême.
Je passe, comme la nuit, de pays en pays ; J’ai une singulière puissance de parole ; Du moment que j’ai vu son visage Je reconnais l’homme qui doit m’écouter, Je lui apprends mon histoire… Si nous avons cru devoir résumer toute cette pièce, c’est par la nécessité même de notre thèse ; nous avions à montrer la qualité spécifique d’une poésie qu’un esprit latin ne pourrait guère concevoir, et qu’il a même quelque peine à supporter. […] Cet autre défendait la poésie contre la vulgarité, contre la facilité, ses éternelles ennemies ; il recourait à l’hermétisme, supprimant les intermédiaires, décevant l’ordre logique, faisant chatoyer les mots, tirant de chaque image une inépuisable source de vibrations, subordonnant le sens à la musique : et dans un modeste salon de la rue de Rome, chez le plus modeste des professeurs, chez Stéphane Mallarmé, naissaient les vers les plus aristocratiques qui eussent jamais été conçus, énigme lyrique. […] Les parties non rationnelles de l’être peuvent trouver leur compte dans la libération d’une raison qui ne se conçoit plus comme un sacrifice fait à l’ordre, mais exige la totalité de ses droits. […] Nous n’en exclurions même pas le cartésianisme, s’il est vrai que l’auteur du Traité des passions rassure ses lecteurs, à la fin, contre la crainte qu’on pouvait concevoir d’abord de leur puissance : car nous voyons, comme il le dit, qu’elles sont toutes bonnes de leur nature, et que nous n’avons rien à éviter que leur mauvais usage ou leurs excès.
L’élève qui, entrant en troisième, s’imposera un plan de lecture sagement conçu et restreint, aura, au bout de quatre ans, acquis un fonds de connaissances infiniment précieux pour la composition6. » De pareilles prévisions sont excessives ; une trop vaste lecture offre des inconvénients. […] Car ces grands hommes, que nous nous proposons d’imiter, se présentant de la sorte à notre imagination, nous servent comme de flambeaux, et nous élèvent l’âme presque aussi haut que l’idée que nous avons conçue de leur génie, surtout si nous nous imprimons bien ceci en nous-mêmes : Que penseraient Homère ou Démosthène de ce que je dis, s’ils m’écoutaient ? […] L’éloquence vivant d’amplification, on conçoit combien il est facile de tomber dans le lieu commun, à l’aide de jolies phrases qui ne sont pas des peintures. […] « Aucune description perdue dans des généralités ne peut être bonne, dit le critique Blair ; car nous ne concevons clairement aucune abstraction : toutes nos idées distinctes se forment sur des objets individuels. […] Ce qu’il avait inauguré, c’était un tour de phrase d’un rythme déjà oratoire et, en outre, merveilleusement conçu pour stimuler la finesse de l’intelligence.
On ne peut même pas nous dire : « Agis en toute circonstance, ou selon ton intérêt, ou selon ton plaisir », que ce conseil n’implique une certaine façon, je veux dire une façon certaine, déterminée de concevoir la vie, et le sens, et le but de la vie. […] Si la Silvia du Jeu de l’amour et du hasard forme le projet de se déguiser en soubrette, Dorante aura de son côté conçu la fantaisie de passer pour son propre valet. […] On conçoit sans peine qu’à mesure du développement de la littérature, il avait fallu singulièrement augmenter le nombre des censeurs. […] M. de Malesherbes était à peine remis de l’étonnement que devait lui causer cette lettre qu’il en recevait, à deux jours d’intervalle, une seconde, ainsi conçue : Ah ! […] Un naturaliste est un homme dont l’œil ou l’esprit ne se rendent pas compte que pas un être de la nature n’est un exemplaire tellement achevé de son type que l’imagination n’en conçoive au-delà quelque exemplaire plus achevé, c’est-à-dire plus vrai.
Un jour, par caprice, le cœur abaissé par les jouissances vulgaires, « il conçut l’idée indigne de voir jusqu’où irait sa puissance sur une personne si dévouée ». […] Indigente par eux, elle se fait mendiante en détruisant les Maures. » Concevez-vous qu’un taureau se perce de ses cornes ? […] Le jeune homme pousse en avant avec la verve d’un poète qui conçoit un roman et sur-le-champ passe la nuit à l’écrire… Il attend le duc « d’un air allumé de crainte et d’espérance ». […] On sent une âme qui a été élevée parmi les plus nobles conseils et les plus saints exemples ; qui, les yeux fixés sur la divine image de la vertu, a conçu pour elle, non seulement de la vénération, mais de la tendresse ; qui respecte l’honneur, non seulement comme une loi inviolable, mais comme la plus chère et la plus précieuse partie de son trésor intérieur ; qui non seulement ne tombera jamais, mais qui n’a jamais eu l’idée de faillir.
Le front se découpe sous leurs bandelettes, ni trop haut ni trop bas, mais tel que l’on peut concevoir le siège d’une pensée divine, unique, immuable. […] L’esprit l’évoque de la même façon qu’il conçoit l’idée ou le rêve. […] Il y a quelque chose du recueillement de la nuit dans ce livre auguste : conçu dans le silence, il en a la solennité. […] César ne se dérange pas pour Machiavel, il conçoit, médite, exécute son crime devant lui avec l’émulation d’un joueur d’échecs qui sent derrière son épaule l’œil d’un théoricien consommé. […] Sous leur divine influence, le génie humain, si longtemps stérile, recouvrait ses forces plastiques : il concevait, il engendrait des formes exquises et grandioses.
Entre les images que nous vous en donnons, vous pouvez concevoir tous les intermédiaires possibles. […] Les veines hépatiques distribuant leurs rameaux et leurs ramuscules dans toutes les parties du foie, on conçoit que, quand elles viennent à se raccourcir, il en résulte une compression générale de tout l’organe. […] En nous plaçant au point de vue de l’organisme adulte, nous n’aurions pu concevoir le principal rôle du sucre que, dans sa destruction, comme on l’avait déjà supposé. […] » Or, Messieurs, on découvre un fait, et l’on conçoit une théorie. […] Et il fait des efforts inouïs de travail et d’imagination, il se crée des agitations qui ne mènent à rien, pour vouloir à toute force voir les choses comme il les conçoit, et non comme elles sont.
Le ton du diapason, dans l’éloge et dans la critique, comme dans la musique, a fort monté depuis lors, mais il paraissait déjà fort monté, et aussi haut que possible, à cette date ; chaque époque renchérit ainsi sur la précédente et a peine à concevoir qu’on puisse aller au-delà : C’est un singulier spectacle pour un observateur, écrivait Bonstetten, que celui de l’opinion publique.
Personnage redouté, guerrier puissant, acharné, vrai démon, vrai diable à quatre, et qui sut se conquérir à lui seul une manière de couronne, deux faits surnagent et dominent dans sa vie d’exploits et de ruses, d’entreprises et de rapines : il a été, somme toute, et malgré ses alliances avec les mécréants, un reconquistador, un reconquéreur de l’Espagne sur les Arabes ; il reprit Valence et conçut le projet de faire plus encore ; — et aussi il fut l’objet de la part de son roi d’une persécution et d’une grande injustice, de laquelle il se vengea par des victoires réitérées, éclatantes.
Elle n’en conçoit point d’autre ; elle trouve cela tout simple et croit n’en avoir jamais fait assez.
En 1847, aux approches de la révolution, Tocqueville avait conçu des craintes sérieuses en voyant la hardiesse et l’espèce de concert des différents systèmes socialistes ; nous l’apprenons par un fragment intitulé : De la classe moyenne et du peuple, qui devait servir de manifeste au petit groupe d’opposants dont il était le chef.
Mais l’on conçoit que dans cette extrémité d’opinion, d’anxiété et de fièvre, au premier pas de son noviciat et s’ignorant lui-même, il se soit attaché en 1815 à un homme de Dieu, à un esprit de saint qui se rencontra sur sa route ; il écrivait à la même date (10 août 1815) : « J’ignore encore entièrement ce que je ferai.
L’esquisse rapide qu’il fait d’une tragédie d’Alexandre telle qu’il l’aurait souhaitée, d’un Porus doué d’une grandeur d’âme « qui nous fût plus étrangère » ; ce tableau qu’il conçoit d’un appareil de guerre tout extraordinaire, monstrueux et merveilleux, et qui, dans ces contrées nouvelles, au passage de ces fleuves inconnus, l’Hydaspe et l’Indus, épouvantait les Macédoniens eux-mêmes ; ces idées qu’il laisse entrevoir, si propres à élever l’imagination et à tirer le poëte des habitudes doucereuses, nous prouvent combien Saint-Évremond aurait eu peu à faire pour être un critique éclairé et avancé.
On fit courir dans le temps divers bruits contradictoires, et quelques personnes prétendaient qu’il avait redoublé de frayeur aux approches suprêmes : « S’il a eu, comme on vous l’a dit (écrivait Bossuet à la sœur Cornuau), de grandes frayeurs des redoutables jugements de Dieu, et qu’elles l’aient suivi jusqu’à la mort, tenez, ma fille, pour certain que la constance a surnagé, ou plutôt qu’elle a fait le fond de cet état. » Peu de temps après cette mort, le même Bossuet, qu’on ne se lasse pas de citer et dont on n’a cesse de se couvrir en telle matière, posait ainsi les règles à suivre et traçait sa marche à l’historien d’alors, tel qu’il le concevait : « Je dirai mon sentiment sur la Trappe avec beaucoup de franchise, comme un homme qui n’ai d’autre vue que celle que Dieu soit glorifié dans la plus sainte maison qui soit dans l’Église, et dans la vie du plus parfait directeur des âmes dans la vie monastique qu’on ait connu depuis saint Bernard.
J’ai lu en grande partie un poëme idyllique de lui, en quatre chants, intitulé le Pèlerinage, et conçu dans cette pensée.
Il y a, nous l’avons éprouvé, dans beaucoup d’esprits jeunes et ouverts, une facilité périlleuse à adopter, à professer prématurément des doctrines qu’on conçoit, qu’on aime, mais dont certaines parties laissent encore du trouble.
Cette figure de Mme Claës, où les hésitations magnétiques et les projections fluides des regards sont prodiguées, de même que le sont dans le portrait de Balthazar les idées dévorantes distillées par un front chauve, m’a bien fait concevoir le genre de portraits de Vanloo et des autres peintres chez qui des détails charmants et pleins de finesse s’allient à une flamboyante et détestable manière, à une manière sans précision, sans fermeté, sans chasteté. « Les personnes contrefaites qui ont de l’esprit ou une belle âme, dit M. de Balzac à propos de son héroïne peu régulière, apportent à leur toilette un goût exquis.
Éphraïm, avec son petit prophète Ichabod et son cheval Lépidoth, est rigoureusement conçu et soutenu sans fléchir : Walter Scott l’avouerait.
Le grand prêtre est beau, noble et terrible ; mais on le conçoit plus terrible encore et plus inexorable, pour être le ministre d’un Dieu de colère.
L’incertitude où était Lemonnier de la suite de cette incommodité, l’embarras dont était dans une chambre aussi petite le service du roi, le scandale et l’indécence dont ce séjour prolongé devait être, rien ne pouvait déranger Mme Dubarry de ce projet déraisonnable et indécent, conçu pour narguer la famille royale.
Sainte-Beuve est ainsi conçue : « Paris, le 29 juin 1867.
Une forme d’esprit si universelle ne peut manquer de leur sembler naturelle ; ils sont comme des gens qui, ne parlant qu’une langue et ayant toujours parlé aisément, ne conçoivent pas qu’on puisse parler une autre langue, ni qu’il y ait auprès d’eux des muets ou des sourds D’autant plus que la théorie autorise leur préjugé.
Quant à moi, j’avoue que je souhaiterais pour tous une telle Constitution, car elle seule réalise ce que tous les hommes désirent, ce que tous les politiques sages ont cherché à leur donner, ce que Moïse seul sut concevoir et exécuter, c’est-à-dire une organisation sociale qui fait comprendre au peuple que c’est « la loi, et non l’homme, qui règne, que la nation doit librement accepter ce gouvernement divin de la raison et de la loi, et l’exercer sans tyrannie, que nous n’avons pas été créés pour être enchaînés et contraints comme des esclaves, mais pour être guidés et conseillés par une puissance invisible, sage et providentielle. » Telle était la Constitution théocratique de Moïse.
Plaise au ciel que l’ambition ne trame pas après lui des projets qu’elle n’aurait pas osé concevoir pendant qu’il vivait !
Mais vous, vous n’êtes guère poli et je crois d’ailleurs que vous exagérez. » On m’a raconté qu’il disait un jour : « Depuis que je suis au monde, j’entends un tas de gens dire qu’ils sont agacés ; moi, je ne sais pas ce que c’est : je n’ai jamais été agacé de ma vie. » Écrivain, il a au plus haut point le naturel et la clarté, car il ne parle jamais que dès choses qu’il « conçoit » parfaitement.
Je conçois avant tout la critique comme une œuvre d’épuration, formelle et substantielle.
C’est ce style de la discussion sérieuse plus habituellement nerveux que coloré, qui a plus de mouvements que d’images, son objet n’étant point de plaire, mais de convaincre ; instrument formidable par lequel la société française allait conquérir un à un tous ses progrès, et faire passer dans les faits tout ce qu’elle concevait par la raison.
« Je voudrais que sa beauté nue me manifestât la beauté métaphysique du dieu-monde… Concevoir l’absolu en spécialisant ses attributs symbolisés par des impressions d’elle… Trouver des révélations flamboyantes aux mystères des analogies !
En France, on à peine à concevoir un milieu entre la lourde érudition du XVIIe siècle et la spirituelle et sceptique manière des critiques modernes 195.
C’est qu’en effet l’amour tel qu’on le conçoit dans cette civilisation déjà raffinée, loin d’avoir le mariage pour aboutissant naturel, en est presque l’opposé.
Je ne conçois pas qu’un homme puisse vouloir être nul, quand il peut être quelque chose.
Voltaire, c’est tout simple, entra en fureur ; il avait insulté Fréron sur la scène, mais Fréron lui répondait dans sa feuille ; il ne pouvait concevoir une telle audace.
Lui, amateur des sources antiques, toujours en quête des saines et « bonnes disciplines », qui voudrait produire dans son style la « tranquillité modeste et hardie » de ses pensées ; lui qui, dans les belles pages de prose où il ébauche des projets d’ouvrages sévères, aspire et atteint à la concision latine, à la « nerveuse et succulente brièveté » d’un Salluste honnête homme et vertueux, on conçoit la colère à la Despréaux, et plus qu’à la Despréaux, qui dut le saisir en voyant un tel débordement de déclamations soi-disant philosophiques, de facéties galantes et de gentillesses libertines, découlant de la plume d’un bel esprit formé à l’école de Danton.
Mardi 28 janvier Un mot de la Guimond : « Conçoit-on ce Girardin… j’ai huit cents lettres de lui toutes compromettantes… et il ne veut pas me les racheter. » Mercredi 5 février Une anecdote sur le colonel, le frère de ce général Lasalle, qui ne quittait l’armée que pour se commander à Paris une paire de bottes, et faire un enfant à sa femme.
Concevez-vous rien de plus hideux que ce sou, vert-de-grisé dans le sang ?
Voilà la politique expérimentale telle que Tocqueville l’a comprise et l’a conçue.
Toutefois, en supposant qu’une administration éclairée et bienveillante jugeât à propos de protéger les hommes qui écrivent, on conçoit, d’après ce que nous venons de dire, quel genre de bienfaits il faudrait lui demander pour eux.
Refusant de parvenir et même par le travail, l’homme en arrive à tenir bien davantage à son travail ; il conçoit son métier… comme le moyen de contribuer à l’institution de la justice.
Qui vit au contraire dans la complication de notre civilisation moderne, habitué à rencontrer les individus les plus nombreux et les plus divers dans les mêmes associations, et inversement les mêmes individus dans les associations les plus nombreuses et les plus variées, est porté à se représenter ce nombre et cette variété comme susceptibles de s’accroître indéfiniment, se figure aisément, au-dessus de ces groupements réels, les groupements possibles, et arrive ainsi à concevoir sans répugnance une sorte de vaste société idéale dont tous les hommes, à quelque société partielle qu’ils pussent appartenir par ailleurs, seraient également les membres.
Cependant cet Achille, le plus grand des héros grecs, Homère nous le représente sous trois aspects entièrement contraires aux idées que les philosophes ont conçues de l’héroïsme antique.
Que faut-il concevoir sous ce titre ?
C’est précisément le scolastique qui croit avoir la certitude absolue qui n’arrive à rien ; cela se conçoit, puisque par un principe absolu, il se place en dehors de la nature dans laquelle tout est relatif. […] On ne conçoit pas, je l’ai dit ailleurs, un savant se fâchant contre l’azote, parce que l’azote est impropre à la vie ; il supprime l’azote, quand il est nuisible, et pas davantage. […] Si l’on conçoit l’humanité comme une armée en marche à travers les âges, lancée à la conquête du vrai au milieu de toutes les misères et de toutes les infirmités, on doit mettre au premier rang les savants et les écrivains. […] L’imagination n’a plus d’emploi, l’intrigue importe peu au romancier, qui ne s’inquiète ni de l’exposition, ni du nœud, ni du dénouement ; j’entends qu’il n’intervient pas pour retrancher ou ajouter à la réalité, qu’il ne fabrique pas une charpente de toutes pièces selon les besoins d’une idée conçue à l’avance. […] Quant aux traités, ils sont actuellement conçus dans un excellent esprit d’honnêteté réciproque.
— mais que l’on conçoit pourtant avec certaines âmes fières et délicates qu’un éloge maladroit choque autant qu’une critique brutale. […] Quoi qu’on fasse, on ne peut concevoir cette horreur qu’au point de vue historique, comme certains préjugés dont les motifs ou les prétextes ont disparu. […] Là flottaient toutes les images de la nature, non pas copiées, mais conçues et transformées, et servant comme des mots à exprimer des idées, et surtout des passions. […] Il n’y a ni fait ni anecdote dans le paysage tel que le concevait Rousseau. […] Certes le Faust tel que Goethe le concevait n’a jamais été mieux compris.
À mesure que l’on avance en âge, les idées que l’on conçoit semblent vieillir avec nous et perdre leurs grâces premières ; elles sont comme ces femmes passionnément aimées, que l’habitude et la familiarité quotidiennes déparent ; elles prennent peu à peu un air calme et reposé, quelque chose de déjà vu qui nous empêche de les regarder avec le ravissement et l’allégresse des premiers jours. […] Il considérait comme des vertus cardinales l’application de la méthode expérimentale, l’inquiétude des hauts problèmes, le sens du réel, l’impossibilité de croire à des traditions religieuses conçues en dehors de toute critique. […] On conçoit un état social où il y aurait deux sortes de bonheurs : l’un, qui consisterait dans la contemplation de l’univers, dans le réveil des visions anciennes, dans la joie d’apprendre et l’ivresse de savoir. […] Mais je ne puis voir sans émotion le cercle familier ou l’horizon natal des hommes qui ont apporté à l’humanité une nouvelle façon de concevoir l’univers. Je voudrais retrouver le « poêle » où Descartes, par un prodigieux effort de réflexion, a conçu le Discours de la méthode, ou bien la petite maison d’Amsterdam où ce grand homme méditait tranquillement, pendant qu’autour de lui des gens affairés « exerçaient la marchandise ».
Etant des lois de transaction, faites de pièces et de morceaux par la Chambre, puis estropiées encore par le Sénat, elles ne sont en conformité (cela est évident) ni avec le reste du régime bourgeois ni avec l’idéal de la société future, tel que le conçoivent les socialistes. […] C’est ensuite l’amour conçu comme une espèce d’ivresse à la fois mystique et sensuelle. […] De même que le moteur de tout effort est l’aiguillon d’un besoin matériel ou moral, de même le guide de tout effort, dans la vie individuelle comme dans la vie sociale, est une idée conçue par l’intelligence. […] Je sais quelqu’un, un ancien officier, qui l’a conçu et exprimé comme M. […] Payot conçoit le problème comme une bataille.
Oui, un clérical, car enfin conçoit-on ? […] Sully a conçu des inquiétudes sur ce rapprochement forcé ; car enfin, qu’il se serve de plumes de fer, son raisonnement tombe. […] Bourget me jette dans des transes affreuses et je cherche à me rassurer, ce qui se conçoit. […] Elles sont fort en colère et je le conçois, car cette comédie-manifeste est provocante, agressive, blessante, irritante. […] Vous concevez alors qu’une partie du public se soulève et proteste.
Une très curieuse physionomie que celle de cet Orlando, républicain farouche, mais à la façon des Italiens qui, comme les Belges les plus libéraux, n’en sont pas moins dévoués à leur roi, aimant mieux, et pour cause, la République chez nous que chez eux, Ce qui ne l’empêche pas de sourire à un tout jeune anarchiste qu’il reçoit, et qu’il gronde doucement comme un petit enfant qui n’est pas sage parce qu’il a conçu le blâmable projet de faire sauter Rome et ses habitants… — « Voyons, lui dit-il, voyons, mon enfant, il faut que tu me promettes d’être raisonnable. » Ce à quoi l’adolescent, beau d’une beauté de fille blonde, répond d’une voix d’ange : « Je suis raisonnable, ce sont les autres qui ne le sont pas ! […] Non pas que ce drame, conçu dans une forme voulue, soit parfait au point de vue de ceux qui ne veulent voir dans toute œuvre dialoguée qu’une œuvre faite exclusivement pour être jouée sur un théâtre ; ceux-là trouveront des redites, des longueurs, de la monotonie, parce qu’ils se figureront qu’on ne peut goûter une conception d’art que dans un fauteuil d’orchestre, après un bon dîner, alors que l’esprit paresseux perçoit moins que les yeux, et que la digestion est plus responsable que l’homme de ses applaudissements, de ses sévérités ou de ses dédains. […] « Alors commence le règne de l’homme où se résument, se complètent les merveilles des temps passés ; il conçoit l’immatériel, et, s’il ne peut bien comprendre l’œuvre de la création, du moins il l’entrevoit, rendant à son auteur un hommage que nul être ne lui avait encore offert. […] La statue est le double de nature ; elle était conçue pour être sur une place publique, sur un haut piédestal, triomphante et dominante.
Les mœurs du temps les suggèrent ; car les usages et les goûts de la société ont commencé, et la fiction, ainsi conçue, ne fait que transporter dans les livres les conversations qui s’échangent dans les salles et sur les chemins. […] C’est ici l’amour chevaleresque, exalté, tel que l’a conçu le moyen âge, mais surtout tendre.
Lorsque ce grand roi vint établir sa cour à Ispahan, et qu’il conçut le dessein de rendre cette ville aussi magnifique qu’elle l’est devenue, il engageait non-seulement tous les grands seigneurs, mais encore tous les particuliers qu’il savait être gens riches, à construire quelque édifice public pour l’ornement et pour la commodité de la ville. […] Vu que l’un ni l’autre n’ayant ni droit, ni titre, ni autorité pour ce faire, aurait-on pu s’imaginer qu’ils auraient été capables de concevoir des sentiments contraires à ceux que cette illustre assemblée faisait paraître ?
Leurs mères semblent les avoir conçus, dans la pensée fixe et peureuse de l’image du mari qu’elles trompaient. […] Contre nous, plastiques et latins, qui ne concevons Dieu, s’il existe, que comme un vieillard à figure humaine, un bon Dieu à la Michel-Ange avec une grande barbe, Taine, Renan, Berthelot, opposent des définitions hegeliennes, montrant Dieu dans une diffusion immense et vague, dont les mondes ne seraient que des globules, des atomes.
On conçoit alors fort bien que Zola se soit jeté, avec la violence et la décision que l’on sait, dans l’affaire Dreyfus. […] Impossible de concevoir un subjectivisme littéraire plus intégral que le sien. […] On conçoit bien alors de quel côté il se rangea dans l’affaire Dreyfus, qui divisa la France en deux camps. […] Il faut avoir beaucoup de talent pour réussir dans ce genre, pour donner au roman conçu de la sorte les apparences de la vie. […] Il conçoit et réalise des paysages pathétiques, où son « moi » pénètre l’objet, le transforme, l’absorbe.
Ainsi furent conçus Manon Lescaut, René, Adolphe, Volupté, Dominique. […] On conçoit que le cabinet de travail d’un Arnaud ou d’un Nicole dut en abriter une pareille. […] Einstein, ce fragment des Pensées sur l’Espace et le Temps : « Nous supposons que tous les conçoivent de même sorte, mais nous le supposons bien gratuitement, car nous n’en avons aucune preuve. […] C’est à lui-même qu’il pense lorsque, au commencement de la première Diabolique, il parle de ces têtes « construites d’une certaine façon militaire pour lesquelles, à propos de tout et toujours, toute la question, comme à Waterloo, est de ne jamais se rendre », et l’on peut dire de lui qu’ayant conçu pour lui-même un certain idéal d’existence et de littérature, et s’étant heurté, soixante ans durant, à des conditions matérielles contraires à tous ses désirs, à un public contraire à tous ses goûts, à une société contraire à tous ses principes, il ne s’est jamais rendu. […] C’est seulement par hypothèse que nous concevons l’unité des phénomènes qui nous entourent et qui se présentent à nous comme distribués, les uns et les autres, dans des ordres si différents.
En admettant que ce fût un homme de talent qui eût conçu le programme de M. […] Il conçoit que sur toutes choses il y a beaucoup de vérités, sans qu’une seule de ces vérités soit la vérité. […] Georges Ohnet, ses prétentions à la maîtrise, une morgue à l’avenant, aient fini par agacer quelques-uns, je le conçois. […] Weiss écrivait : « Dans tout autre domaine que le théâtre il est aisé d’appliquer des principes de cénacle… On conçoit gigantesque.
Ils semblent conçus dans la lassitude et c’est dans la lassitude qu’on les goûte. […] C’est une qualité native, originelle, qui se rencontre dans certaines œuvres conçues selon les canons d’une beauté déterminée, et l’on peut dire que les œuvres de Victor Hugo ne seront jamais classiques, tandis que celles d’Anatole France naquirent telles. […] L’on ne saurait concevoir qu’un style original correspondît avec une pensée vulgaire et l’on comprend parfaitement qu’en acceptant certaines façons de penser que nos devanciers nous ont enseignées, nous les revêtions d’un style qui ressemble au leur. […] Montfort se trouve exprimé dans les Marges, la revue qu’il a fondée, et spécialement dans les numéros qui parurent depuis l’origine jusqu’en 1906, alors qu’il assumait à lui seul, selon le dessein qu’en ce temps il avait conçu, tout le poids de la rédaction.
Si j’ai touché à ce sujet, c’est que l’esprit de critique, né, comme je l’ai dit plus haut, de l’orgueil général froissé par des orgueils particuliers, s’étend aujourd’hui à toute la population, et est devenu la seule conséquence facile à concevoir mais triste à souffrir des grands airs de 1830. […] Toute œuvre qui lui plaît, qui est acceptée par lui, est, on peut l’assurer hardiment, conçue dans un esprit excellent, et remue un sentiment qui est chez tout le monde, seulement elle le remue plus ou moins bien. […] Cette peinture était incomplète, vague et mal conçue, on le voit, les passants s’y arrêtaient à peine, hésitaient, cherchaient et n’y formaient pas foule comme autour de l’autre, dont ils avaient peine à se rassasier. […] On conçoit que Balzac n’ait pas pu dormir.
reprend Crémieux, je vais le destituer à Blois, et du même coup le nommer à Orléans, et l’ayant ainsi nommé moi-même, vous concevez, je ne pourrai plus le destituer. » On demande le chef du cabinet : — « Préparez la nomination de P… à Orléans. — Mais, monsieur le ministre, le mouvement est fait. — Ah ! […] Là, un monsieur désignant, dans la nuit, trois silhouettes lointaines, me dit que l’un de ces hommes l’a pris par la main, et a cherché à l’entraîner : « Vous concevez, me dit-il, ce sont de mauvais soldats débandés, ils savent qu’il n’y a plus de punition, ils sont capables de vous assommer pour attraper quelque chose. » Je retourne à Passy, où retentit l’appel prolongé du clairon avec le tapotement pressé de la générale. […] Nous avons dix-huit étripés dans le petit pavillon là-bas… c’est de la bouillie humaine… Il y en a qui ont le devant tout entier de leur capote, dans le ventre… d’autres ont les jambes broyées et enflées, qu’on dirait de vraies tulipes… L’autre jour, on en a apporté un, qui avait la mâchoire descendue au milieu de l’estomac… un masque antique… et l’infirmier, concevez-vous, qui s’échignait à lui demander son nom ! […] En ce moment, Couchaud vient lui parler, et il y a un ennui sur son front. « Concevez-vous, me dit-elle, au bout de quelques instants, que le bruit court à Saint-Gratien que l’Impératrice est cachée ici… Comme les gens vous connaissent !
Après avoir comparé le génie des deux littératures, elle ajoute : « Les Français gagneraient plus néanmoins à concevoir le génie allemand, que les Allemands à se soumettre au bon goût français. […] Ton titre devant Dieu, c’est d’être son ouvrage, De sentir, d’adorer ton divin esclavage ; Dans l’ordre universel, faible atome emporté, D’unir à ses desseins ta libre volonté, D’avoir été conçu par son intelligence ; De le glorifier par ta seule existence, Voilà, voilà ton sort. […] On conçoit que toute la jeune génération s’enflammât pour cette muse de la jeunesse dorée, pour cette fantaisie qui rappelait tout autant l’adorable fantaisie de Shakespeare que les bizarres divagations de Byron. […] Mais pour le juger sainement il faut se rappeler qu’il était au milieu de la bataille, qu’il s’agissait de frapper fort, que chacune de ses propositions devait porter l’empreinte de la passion du moment et qu’ainsi beaucoup de grandes choses qui, conçues avec plus de calme, auraient mérité de porter l’empreinte de l’immortalité, commencent déjà à nous paraître fausses parce qu’elles ont conservé le caractère transitoire d’une atmosphère actuellement refroidie.
Frédéric Schlegel : « Ce n’est pas une œuvre qui ait été conçue et exécutée ; elle a pris naissance, elle a grandi naturellement. » Toute seule ? […] Mais il raconte l’histoire d’un « docte allemand » qui, ayant lu le roman d’un Français, l’Orphise Chrisante, l’interpréta comme un symbole de la pierre philosophale, vint en France exprès pour en conférer avec l’auteur « et le surprit fort des belles imaginations qu’il avait conçues, auxquelles l’auteur n’avait jamais pensé ». […] Et alors, vous qui ne concevez pas qu’on ait si peu de renseignements relatifs à William Shakespeare, auteur d’un si prodigieux théâtre, et qui partez de là pour refuser à William Shakespeare son théâtre, comment imaginez-vous que William Stanley soit resté dans l’ombre ? […] Or, le monisme a besoin de la génération spontanée, sans quoi la première cellule demeure un mystère absolu, un mystère qui se répand jusqu’aux dernières extrémités de la doctrine : « il est impossible de concevoir l’évolution générale comme loi de l’univers sans la génération spontanée ». […] Or, scientifiquement, il est impossible de concevoir ce passage.
Bertin, cet homme d’État de la presse dans le Journal des Débats, par une sympathie de cœur conçue entre eux au chevet de mort de madame de Beaumont, fille charmante du ministre de Louis XVI, décapité (M. de Montmorin).
« Je conçois bien qu’il vous sera plus difficile de mettre ces avis à profit, à Rome, dans ce séjour de corruption et d’iniquité où vous allez vivre désormais.
Ce livre est le fruit de son humeur, et non l’œuvre fortement conçue de son jugement.
On y touchait du doigt ces perfectionnements que Descartes loue dans Balzac : cette suite, cette liaison des parties, ce plan conçu avec force et clarté, ce langage précis, figuré avec mesure, ce tour libre et majestueux, cette noblesse qui n’est que l’unité de ton dans un sujet où il n’est rien entré qui n’y convienne.
Notre langue n’aime pas les vues confuses, le demi-jour ; elle ne prête sa clarté qu’aux choses bien conçues : Saint-Simon écrit quelquefois comme s’il parlait à demi-mot à un confident.
Et, tel que je le conçois, ses préférences iront à une forme sociale, à un système moral qui donneraient à l’individu le maximum de développement individuel compatible avec une harmonie de l’ensemble aussi pure que possible, mais pas très serrée.
Une telle politesse implique un parti général sans lequel je ne conçois pas pour la vie d’assiette commode ; c’est que toute créature humaine, jusqu’à preuve du contraire, doit être tenue pour bonne et traitée avec bienveillance.
Notes sur Tristan et Isolde Dire sous l’influence de quelles conditions l’œuvre d’un artiste a été conçue et exécutée, c’est contribuer à la formation d’un jugement sain sur l’œuvre et sur son auteur ; c’est ce que je voudrais tenter pour Tristan et Isolde de Wagner.
Puissance de l’imprécation consommée, exécration du fratricide et déploration des frères entre-tués, chute d’une maison royale abattue dans son propre sang, l’inceste qui a engendré tous ces maux, rappelé par un cri jeté vers la mère « malheureuse par-dessus toutes celles qui ont conçu sur la terre » : tel est le thème pris et repris par ces voix pleurantes.
On peut très bien concevoir, ajoute-t-il, un être sensible qui serait « le sujet de changements perpétuels et infiniment variés », comme un miroir devant lequel passeraient les choses les plus disparates, sans qu’il se produisît pourtant rien de semblable à ce que nous nommons une conscience, à plus forte raison une mémoire.
Et moi en pantalon à pieds, je lui tends d’abord doux gros souliers de chasse avec une livre de boue à chaque… Vous concevez le nez qu’elle a fait, ma bourgeoise.
* * * — A-t-on jamais songé à l’être moral que doit faire le fils d’un restaurant, conçu aussitôt après que son père a donné l’ordre aux garçons d’ajouter le numéro du cabinet à l’addition des soupers de la nuit ?
Cousin, qui a de l’imagination et de la fantaisie dans l’esprit, à sa manière, s’est épris d’un amour intellectuel pour la figure historique de Mme de Longueville ; et si nous mettons de côté, par hypothèse, l’homme philosophique, ses préoccupations et presque ses devoirs, cet amour se conçoit fort bien au point de vue poétique et peut avoir son intérêt aux yeux de ceux qui aiment dans l’histoire moins ce qui s’y trouve que ce qui n’y est plus.
Renan a la pensée trop molle pour concevoir et construire un système, et comme il est d’usage de faire des théories avec les indigences de son esprit, pour les cacher, M.
Les paroles de Pusey, empreintes d’une touchante tristesse, révèlent bien l’état de son âme, se débattant, comme épuisée, dans ces lassitudes que la Providence envoie souvent à un homme pour achever son cœur : « Je conçus, il y a plusieurs années, — dit le Dr Pusey, — les premières appréhensions de ce qui vient d’arriver, en apprenant que l’on priait pour lui (Newman) dans un grand nombre d’églises catholiques et de monastères religieux du continent. » Cet aveu de la force et de l’efficacité de la prière des catholiques, apostoliques et romains, a, selon nous, une signification bien profonde sous la plume schismatique encore du Dr Pusey.
Non, cette hypothèse avait été tout naturellement déduite des principes généraux d’une métaphysique qu’on avait conçue, en grande partie au moins, pour donner un corps aux espérances de la physique moderne.
Si la philosophie proclame si facilement l’égalité des hommes, c’est qu’à vrai dire elle ne les connaît pas ; on ne conçoit si aisément leur égalité que parce qu’on n’a pas senti leur hétérogénéité. » Devons-nous donc conclure de tout ceci que l’homogénéité absolue des groupements est la condition nécessaire et suffisante de leurs tendances égalitaires, et que ceux où les individus comptent le plus de ressemblances, tant extérieures qu’intérieures, sont aussi ceux, où il y a le plus de chances pour qu’ils se considèrent comme égaux en droit ?
L’imagination peut à peine concevoir l’horreur des peuples chrétiens du seizième siècle, à l’approche de Soliman ou de Sélim.
On conçoit jusqu’à cet effroi naïf du janséniste Baillet qui, dans ses Jugements des Savants, commence en ces termes l’article sur Molière : « Monsieur de Molière est un des plus dangereux ennemis que le siècle ou le monde ait suscités à l’Église de Jésus-Christ, etc. » Il est vrai que des religieux plus aimables, plus mondains, se montraient pour lui moins sévères. […] De plus, en lisant convenablement le vers : Dans ce sac ridicule où Scapin l’enveloppe9 (car Molière en cette pièce jouait le rôle de Géronte, et par conséquent il entrait en personne dans le sac), on conçoit l’impression pénible que causait à Boileau cette vue de l’auteur du Misanthrope, malade, âgé de près de cinquante ans et bâtonné sur le théâtre.
Conçoit-on chez les pauvres filles du peuple, qui ne se sentent pas la force physique nécessaire pour gagner leur vie, les angoisses secrètes, le crucifiement journalier qu’elles éprouvent ? […] La pièce qu’il voit, qu’il conçoit, serait le développement de l’écart sur l’amour qu’il y a entre la créature du Nord et la créature du Midi.
Mardi 21 août On parlait dans une maison, où j’étais, d’une branche de la famille, tombée presque dans la pauvreté, alors que la maîtresse de la maison s’écriait : « Vous concevez, des gens, qui depuis cinq générations, font des mariages d’inclination ! […] Daudet (absorbé et tout à son idée). — Vous comprenez bien toute la variété qu’il y aurait là dedans… depuis les plus grands problèmes sociaux jusqu’au petit caillou de la route… Tenez, le premier soir, le crépuscule amènerait une grande causerie sur la peur… Et aussi les épisodes de la journée… Au fait, ce ne seraient pas des chapitres, mais des haltes, qui feraient les divisions de mon livre… Puis vous concevez, mes voyageurs seraient de vrais êtres… Je mettrai en contact deux jeunes ménages, deux hommes et deux femmes de tempéraments différents… Oh, pas d’enfant, de peur de donner un caractère de sensiblerie à la chose.
Quand dans son jardin de Vénus nous voyons les formes infinies de toutes les choses vivantes rangées par ordre, en lits pressés, attendant l’être, nous concevons avec lui l’enfantement de l’amour universel, la fécondité incessante de la grande mère et le fourmillement mystérieux des créatures qui s’élèvent tour à tour hors de son sein profond. […] Dans cette attente et dans cette émotion, sa curiosité se prend à tout ; à propos du moindre fait, du plus spécial, du plus archaïque, du plus chimérique, il conçoit une file d’investigations compliquées, calculant comment l’arche a pu contenir toutes les créatures avec leur provision d’aliments ; comment Perpenna, dans son festin, rangea les invités afin de pouvoir frapper Sertorius, son hôte ; quels arbres ont pu bien pousser au bord de l’Achéron, à supposer qu’il y en ait eu ; si les plantations en quinconce n’ont pas leur origine dans le paradis terrestre, et si les nombres et les figures géométriques contenues dans le losange ne se rencontrent pas dans tous les produits de la nature et de l’art. […] De là aussi sa manière de concevoir les choses. […] Sans doute il a fallu pour l’atteindre du bon sens et aussi du génie ; mais ni le bon sens ni le génie n’ont manqué aux hommes ; il y en a eu plus d’un qui, remarquant comme Bacon le progrès des industries particulières, a pu, comme lui, concevoir l’industrie universelle, et, de certaines améliorations limitées, conclure l’amélioration sans limites.
Pour revenir à ma leçon du Collège de France, Tacite m’offrait une autre allusion dans cette réflexion, où, parlant du complot d’Othon : « Telle fut, dit-il, la disposition des esprits dans ce forfait détestable, que peu le conçurent, plusieurs le voulurent, tous le souffrirent. » L’application à la révolution de Juillet était poignante. […] Ce n’est pas seulement la lecture des bons modèles, — vous l’avez immense et incessante ; — une vaste mémoire, — Mnémosyne elle-même vous l’a soufflée au berceau ; — une facilité naturelle et acquise, — nul ne vous y surpasse ; c’est encore et surtout la force d’esprit qui conçoit un sujet, la méditation qui le féconde, l’ordre lumineux qui le range dans la tête de l’orateur, la connaissance des ressorts par lesquels on conduit les âmes aux fins les plus opposées, une logique si serrée qu’on la prend pour la raison elle-même, la faculté de ressentir la passion des autres et de leur inspirer la sienne ; quelque chose enfin d’invisible qui aiguillonne et emporte l’orateur, comme le dieu harcelant de son fouet les chevaux d’Hippolyte. […] Mais le jour où il prenait la plume pour en faire une communication à l’Académie, une douce joie détendait son visage si souvent contracté par sa lutte entre le doute et la confiance, entre le concevoir et le voir. […] Dieu merci, je l’ai aimée dès le jour où ma faible raison a pu concevoir l’idée de patrie.
De plus, Daniel avait pu concevoir et avait conçu, par défaut de confidences, des doutes si Vareilh aimait ou n’aimait point. […] Nous ne pensions guère à toi le jour où nous t’avons conçue ! […] C’est la mode aujourd’hui de rire du bourgeois, de le traiter comme une buse, incapable de rien concevoir de grand ni de noble ; c’est faux, archifaux, et ce sont les bohèmes qui ont cru se hausser en le mettant sous leurs pieds, qui ont livré cette diffamation à la circulation.
» C’est assez justement définir le romantisme, le glorifier ou, si l’on veut aussi, le condamner : au moins noter l’usage et l’abus qu’il a fait de la poésie, d’une certaine poésie et conçue un peu comme un délire. […] La patrie, je ne me conçois pas sans elle ; la patrie, c’est moi-même au complet. […] L’étude de l’histoire et l’étude de notre époque amena Paul Adam à ne plus concevoir la vie humaine, la vie des collectivités et des nations sous l’aspect d’un syllogisme ou d’un sorite bien dérivé. […] Nous avons beau faire, nous ne concevons pas un travail mental extrêmement différent du nôtre, fût-ce pour l’attribuer à des animaux extrêmement différents de nous en apparence. […] Une prouesse qu’il ne réussit pas à concevoir assez extraordinaire.
Magnin, dans une suite d’entretiens et d’explications, les idées, les vérités nouvelles, et l’habile écrivain, l’écouteur avisé, les avait conçues, absorbées aussitôt, puis retournées et exposées à son compte avec une lucidité attrayante.
Villemain, je conçois très bien, par les sentiments et les passions quasi légitimes qui régnaient alors dans toute une partie de la société et de la nation, qu’il ait fait son fameux compliment à l’empereur Alexandre.
On conçoit donc qu’avec ces quatre réserves ainsi ménagées sur une base étendue, M.