/ 1574
748. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre IV »

Celui-ci insiste pour que, dans le cahier, on couche par écrit et tout au long ses griefs locaux et personnels, sa réclamation contre les impôts et redevances, sa requête pour délivrer ses chiens du billot, sa volonté d’avoir un fusil contre les loups796.

749. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XV. Les jeunes maîtres du roman : Paul Hervieu, Alfred Capus, Jules Renard » pp. 181-195

Quelle fraîcheur de ne plus trouver des débuts de chapitre de cette grâce : « Après une douleur intense, physique ou morale, l’homme éprouve une stupeur très douce où il semble qu’il abdique sa volonté et qu’il s’abandonne à sa chance.

750. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Mathilde de Toscane »

Or, Guizot, qui a le bouchon protestant sur l’esprit et qui ne comprend que les prêtres mariés, impute à Grégoire, comme une faute d’homme d’État dommageable à l’Église, ce célibat des prêtres que Grégoire maintint avec une si formidable volonté.

751. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Les Femmes de la Révolution » pp. 73-87

Les plus forts, les plus gigantesques de ses chefs apparents, qu’il poussait devant lui sous le coup de fourche de son inflexible volonté, ne furent, entre ses mains de Briarée, que d’énormes pantins qu’il fit jouer et qu’il brisa.

752. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Oscar de Vallée » pp. 275-289

… Ce ne fut qu’un instant, en effet ; car le poète, toujours vivace, avant d’être immortel, comprimé par la volonté d’être un prosateur et d’ajouter cette flèche de l’arbalète humaine à son carquois d’Apollon, a été, ressort divin !

753. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « Xavier Eyma » pp. 351-366

… Xavier Eyma, qui a vécu en Amérique et de l’Amérique, car toute sa littérature est américaine, Xavier Eyma, qui a été un romancier américain avant d’être un historien américain, est certainement de sentiments, de volonté, de goût, d’admiration hautement et incessamment exprimée dans ce livre même, un apologiste très renseigné et très convaincu des choses et des hommes de l’Amérique.

754. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Balzac »

Né avec les manières de sentir du génie, Balzac voulut de bonne heure mettre à l’abri des froissements d’une condition médiocre ces manières de sentir qui le faisaient ce qu’il était, — et une spéculation de librairie, qu’il avait rêvée comme il rêvait ses livres, n’ayant pas réussi, il fut obligé toute sa vie de traîner l’horrible boulet de la dette, dont il se jura de briser la chaîne, à force de volonté, et avec cette plume qui, dans sa main, fut la massue d’Hercule.

755. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Byron »

Pour mon compte, je suis intimement persuadé que s’il fut toujours si humilié et si enragé d’être boiteux, ce fut bien moins parce que c’était là une infirmité et une laideur, que parce que c’était une destinée, ― parce que c’était une de ces choses contre laquelle sa volonté, et ses furies, et toutes ses énergies ramassées dans son âme et s’efforçant, ne pouvaient absolument rien.

756. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « VII. Vera »

Mais, au fond, dans toutes ces stupides et éloquentes matérialités de Diderot, il n’y avait pas plus d’audace et de niaiserie que dans la théorie idéaliste d’Hegel, cette théorie qui croit aller du néant au devenir, de l’être à la notion, du sujet à l’objet, du fini à l’infini, de la connaissance à la volonté, bref, de l’Idée à la Nature, et qui n’y va pas !

757. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XII. MM. Doublet et Taine »

Il a de la force, de la volonté, de la réflexion, et même dans des proportions assez viriles, tandis que M. 

758. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

Depuis eux, il est venu un médecin à facultés puissantes, qui a posé vigoureusement que la volonté, c’était la vie.

759. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Gustave Rousselot  »

Mais à ces incorrections, qui sont des défaillances et qui ne sont pas sans remède, il s’en ajoute d’autres plus coupables, qui viennent de perversion intellectuelle, de volonté et de système.

760. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « La Fontaine »

Il est devenu un érudit de volonté, mais quand il écrivait son livre intitulé : La Fontaine et ses Fables, qui fut, je crois, sa Thèse pour le Doctorat, et qu’il a reprise et parachevée (1875), il débutait dans les lettres et il avait alors la fraîcheur et la vie d’un esprit jeune qu’il a trop sacrifié depuis à toutes les disgrâces de l’érudition.

761. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Théodore de Banville »

En effet, toutes les pièces de ce recueil d’Idylles sont superbes, et d’un pathétique d’autant plus grand que le désespoir y est plus fort que l’espérance ; qu’il y a bien ici, à quelques rares moments, des volontés, des redressements et des enragements d’espérance, mais tout cela a l’air de s’étouffer dans le cœur et la voix du poète, et on épouse sa sensation… Les hommes sont si faibles et ont tant besoin d’espérer, que c’est peut-être ce qui a fait un tort relatif aux Idylles prussiennes de M. 

762. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

À la fin du sien, qui est très net, très aiguisé, très ajusté à la poitrine et dans lequel il ne dit pas de son Olympe ce que madame Sand dit de son Laurent : « il avait le cœur admirablement bon », Paul de Musset raconte, avec un accent qui n’est pas celui de l’invention romanesque, « qu’en faisant ce récit il n’est que l’exécuteur testamentaire d’une volonté respectée », et l’accent est tel qu’on le croit.

763. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

Paul de Musset raconte avec un accent qui n’est pas celui de l’invention romanesque, « qu’en faisant ce récit, il n’est que l’exécuteur testamentaire d’une volonté respectée », et l’accent est tel qu’on le croit.

764. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Dans une époque comme la nôtre, sans force de principe et sans force de volonté, je sais bien que ce misérable type d’homme ou de femme à deux amours, indésouillable du premier, ayant pris corps avec cette fange, est le type commun et presque universel ; que c’est le cri du sang, de ce sang que nous avons gâté, et que de son temps tout romancier, qui en porte le joug comme un autre homme, peut jeter ce cri à son tour !

765. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XIX. Panégyriques ou éloges composés par l’empereur Julien. »

Il s’y plaint de cette éducation lâche, qui affaiblit à la fois l’un et l’autre ; détruit le ressort de l’âme, en énervant la volonté ; détruit les moyens des grandes actions, en énervant les forces ; prépare la crainte avant le danger, et la faiblesse dans le malheur.

766. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

Il y aurait là pour nous, à volonté, avec les produits de nos plus belles contrées méridionales, toutes les richesses des tropiques.

767. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

Les consentements ensorcelés devançaient ses désirs ; tous, se demandant pour lui ce qu’il souhaitait, interrogeaient leur propre volonté et la faisaient obéir à la sienne. […] Nous sommes si pauvres de volonté, si timides, que nous n’osons nous faire cette simple question : Mais qu’est-ce qui me plairait à moi ?  […] J’ai la conscience d’être une individualité qui se forme et se développe, et je marche entraîné souvent par quelque chose de plus que ma seule volonté. […] Tu ne peux pas dire que c’est parce que tous les autres êtres s’y soumettent, car toi seul tu as une volonté, et tu sais même que ta soumission doit être volontaire. Quand cela arrive, tu te soumets donc librement, non à la nécessité, car celle-ci te force aussi aveuglément qu’elle force le ver de terre, mais elle ne peut atteindre ta volonté, car, même écrasé par elle, tu peux encore avoir une volonté différente.

768. (1890) Le réalisme et le naturalisme dans la littérature et dans l’art pp. -399

Les mystères ont un cadre élastique qui s’élargit ou se resserre à volonté. […] Ils aperçoivent bien d’elle tout ce qui tombe sous les sens, mais ils en sont offusqués, et leur vue ne perce pas jusqu’à ce qui fait le fond de l’être, l’âme avec ses énergies propres, le cœur, la raison et la volonté. […] Il n’a connu ni la raison ni la volonté ; il est demeuré le plus souvent au seuil du monde moral. […] Mais quelques vers blancs échappés à sa plume nous autorisent à nous demander si, pour mettre ces pièces en vers, ce fut le temps ou la volonté qui lui manqua. […] Que faire cependant quand on a le malheur d’être né avec plus d’imagination que de jugement, plus de sentiment que de volonté ?

769. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome II pp. 5-461

Elle leur déclare que le retour de la paix désirée ne dépend que de leur volonté ; que ses négociations lui ont assuré les femmes des cités alliées ou ennemies, et que ses vertueuses compatriotes se sont engagées de vive voix à lui obéir. […] « Ce colosse arrondi, grondant, sourd, et sans yeux, « Premier auteur des arts cultivés sous les cieux, « Seul roi des volontés, tyran des consciences, « Et maître ingénieux de toutes les sciences  ? […] 6º Le ridicule, général et individuel ; 7º Les caractères, principaux, accessoires, pareils à eux-mêmes, et changeants ; 8º Les passions ; 9º Les mœurs ; 10º L’intérêt, de passions, d’événements, et de caractères ; 11º L’exposition, simple de faits, ou compliquée de faits, exposant les caractères avec les faits ; 12º L’intrigue ou le nœud ; 13º Les péripéties, de reconnaissances, de surprises, d’événements, ou de changements de volonté ; 14º L’ordre des actes ; 15º L’ordre des scènes capitales ; 16º Le dénouement ; 17º La force comique, ordinaire ou extraordinaire ; 18º La moralité, publique ou particulière ; 19º Le style naturel, et quelquefois satirique ; 20º Le dialogue coupé ou suivi, idem ; 21º Les tableaux scéniques ; 22º La symétrie ; 23º Le complément, ou réunion de ces diverses conditions, ou règles indispensables. […] Bonnefoi, ingénieux à frauder les règles de la coutume de Paris et les garanties du notariat, n’aurait-il pas ces hommes d’affaires, curateurs intéressés de leurs clients, dont ils grèvent les maisons et les terres par les avances de leurs prête-noms, dont ils confisquent les fonds embarrassés de leurs formes hypothécaires, et dont ils reçoivent quittance de tous biens pour solde du compte définitif qui fait passer les propriétés dans leurs mains ; ces délicats interprètes des règlements civils, qui dirigent avec tant de scrupule les volontés mobiles des testateurs, et qui complètent leur propre ameublement du superflu des inventaires ? […] Les anciens, conformément à leurs dogmes, voulurent sans doute avertir les patients époux que leur lit conjugal était soumis aux volontés de Jupiter, et qu’il fallait se résigner, en cela comme en tout, à l’irrévocable fatalité de leur destinée ; et dans le rôle de l’heureuse Alcmène ils insinuèrent qu’une femme ne peut céder innocemment qu’à la ressemblance parfaite de son mari.

770. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Taine nous a montré dans son héros une volonté uniquement et une sensibilité. […] Chez lui aussi, la volonté se tend à effacer chez la personne la pensée à devenir une table rase où s’inscriront les symptômes. […] Entre parenthèses, c’est même là-dessus que Balzac fondait la théorie de la volonté que professent son Louis Lambert et son Valentin. […] Il n’y a, dans ces définitions, qu’un mot à changer, c’est précisément celui de volonté. […] On y lit toute la force du génie, toute la volonté de l’ascète, de l’apôtre, du martyr, du prophète.

771. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Mais le poète n’y croit, j’en ai peur, que par un coup d’État de sa volonté sur sa tristesse intime et incurable ; et voici ses vers les plus encourageants, qui ne le sont guère. […] Nous avons des poètes qui le sont quand ils veulent et comme ils veulent, qui se donnent et quittent à volonté l’émotion congruente à leur dessein. […] Avouez au moins qu’il y a bien des âmes où vous chercheriez en vain ce conflit de la volonté et du désir qu’il vous faut absolument. […] Si elle a à combattre un moment, c’est contre une influence physiologique, et ce n’est pas sa volonté qui triomphe, mais sa santé. […] Zola prête à ces forces, librement déchaînées ou disciplinées par l’industrie humaine, une vie effrayante, un commencement d’âme, une volonté obscure de monstres.

772. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Non pas, mais de la volonté. […] C’est déjà là un assez joli tour de force de la volonté, et qui est bien cornélien. […] La femme de Thésée est sans doute une malade, en proie à l’une de ces passions inéluctables qui troublent la raison, oppriment la volonté et vous coulent leur poison jusqu’aux moelles. […] Même dans le texte de Racine, il y a des vers d’où l’on pourrait induire, à la rigueur et avec de la mauvaise volonté, qu’Andromaque aime Pyrrhus à son insu. […] Gondinet est clair comme le jour, et qu’il fallait un peu de mauvaise volonté pour ne point le voir.

773. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

La vanité française ne devient orgueil collectif qu’assez rarement et sous l’impulsion d’une volonté puissante et dans l’exaltation d’une grande gloire acquise. […] Il vaincra sa timidité avec des efforts de volonté surhumaine pour prouver qu’il ne l’est pas ; ou il mentira violemment pour assurer qu’il ne l’est point. […] Ils ont donné à l’erreur de l’homme se détachant de la nature l’autorité d’une volonté et d’une intervention surnaturelles. […] Je veux qu’elle vive en moi, de ma pensée qu’elle épousera et de ma volonté à laquelle elle s’associera. […] De ses volontés multiples et divergentes, jamais !

774. (1923) Au service de la déesse

Je me souviens qu’à l’époque de ma jeunesse les professeurs de volonté abondaient. La volonté abondait aussi. […] Ce fut sa prétention, sa volonté, de n’être pas sentimental, de ne paraître pas dans son œuvre, de n’y paraître pas et voire de n’y être pas. […] Ce qui rend plus singulière et malheureuse la volonté scientifique des Goncourt, c’est qu’ils n’étaient pas du tout faits pour la science. […] Mais, quant aux sentiments, rappelons-nous la volonté du combattant : la paix digne d’une si grande guerre !

775. (1911) Études pp. 9-261

L’homme, « séduit par le serpent, se complut dans sa fin comme si elle lui était propre et non point celle de la volonté de Dieu, dont il était l’instrument. […] La volonté qui le porte ne cesse de faiblir et toujours retombe à l’océan des sens. […] Il est moins spontané ; il a été formé par un admirable effort de volonté. […] Par tout ce qu’il accueille de lui-même, par tous désirs qu’il se laisse avoir, par l’immense permission intérieure qu’il se donne, Saül peu à peu s’anéantit lui-même : à trop accepter il use et détruit sa volonté. […] Il ne retire point l’être qu’il leur a communiqué et ses volontés sont sans repentir.

776. (1888) Études sur le XIXe siècle

Ayant trouvé un tel auxiliaire, je me remis entièrement à sa volonté, ce qui fut naturellement notre salut. […] C’est une bonté qui ne vient pas de la volonté, — c’est un instinct de paix et d’harmonie, — c’est une douceur que ma mère — a répandue dans mes os et dans mes veines. — Oh ! […] Dès l’instant où il entre dans la vie publique, Cavour est absorbé tout entier par elle ; sa volonté se tend dans un effort unique, il n’a plus d’autre préoccupation que son œuvre, il laisse en quelque sorte sa personnalité disparaître dans son action. […] Que font à Paris toute cette masse d’étrangers que leurs malheurs ou leur volonté ont jeté loin de leur terre natale ? […] Dans ce drame où tout est absolument tragique, dit Wagner en parlant de sa tétralogie, « la Volonté, qui voulait faire un monde à son image, ne peut arriver à se satisfaire que dans l’anéantissement final ».

777. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome III pp. -

Dieu, par sa science moyenne ; consulte habilement notre volonté, pour sçavoir ce que nous ferons quand nous aurons reçu sa grace. […] C’est de la part de Dieu une grande habileté à ménager la volonté de l’homme, ainsi qu’un ministre adroit & pénétrant ménageroit celle de son prince, pour l’amener à tout ce qu’il voudroit. […] Il fit en même temps signifier ses dernières volontés à tous les nonces apostoliques & aux grands inquisiteurs, faits pour reconnoître sa jurisdiction. […] Si cependant le saint siège veut y faire des changemens, je suis enfant d’obéissance, de l’église Romaine dans laquelle j’ai vécu jusqu’à la mort : telle est ma dernière volonté ». […] De peur qu’on n’allât contre ses volontés, qu’on n’allongeât ou qu’on ne raccourcît le poëme, il stipula le nombre des vers que chaque livre auroit.

778. (1923) Paul Valéry

Dès lors, si l’homme qui produit, si l’ homo faber se définit comme une volonté de faire, avec précision, ceci et non cela, « l’homme de l’esprit doit enfin se réduire sciemment à un refus indéfini d’être quoi que ce soit. » (La phrase pourrait être d’Amiel) Il voit que « toutes choses se substituent, — ne serait-ce pas la définition des choses ?  […] Fabre, remarque, vers le milieu du xixe  siècle, « une volonté remarquable d’isoler définitivement la poésie de toute autre essence qu’elle-même. […] Plus de hasard, mais chance, liberté créatrice, et cette autonomie que Kant n’attribuait qu’à la volonté qui se donne sa loi, mais que le Poète attribue au vers qui en lui se donne sa forme. […] Sa pointe la plus vive et sa volonté la plus certaine consistent en le vœu d’une poésie pure : et c’est en somme Lamartine et Victor Hugo qui ont amené notre langue à l’état, à la tension de poésie pure. […] Il fallait la rupture avec ce poids de matière pour amener cette fuite de l’âme, cette volonté de poésie pure que fut le symbolisme.

779. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre III. Ben Jonson. » pp. 98-162

. —  Vigueur de sa volonté et de sa passion. […] Joignez-y encore sa noblesse morale, son âpreté, sa puissante colère grondante, exaspérée et acharnée contre les vices, sa volonté roidie par l’orgueil et la conscience, « sa main armée et résolue à dépouiller, à mettre nues, comme au jour de leur naissance, les folies débraillées de son siècle, à imprimer sur leurs flancs éhontés les sillons de son fouet d’acier122  » ; par-dessus tout le dédain des basses complaisances, le mépris affiché « pour les esprits éreintés qui trottent d’un pied écloppé aux gages du vulgaire », l’enthousiasme, l’amour profond « de la Muse bienheureuse, âme de la science et reine des âmes, qui, portée sur les ailes de son immortelle pensée, repousse la terre d’un pied dédaigneux, et va heurter la porte du ciel123. » Voilà les forces qu’il a portées dans le drame et dans la comédie ; elles étaient assez grandes pour lui faire une grande place et une place à part. […] Emploie-les à ta volonté.

780. (1860) Cours familier de littérature. X « LIXe entretien. La littérature diplomatique. Le prince de Talleyrand. — État actuel de l’Europe » pp. 289-399

L’intervention d’une puissance chez une autre est illicite quand il s’agit de s’immiscer dans les intérêts purement nationaux et intérieurs d’un peuple, libre de ses volontés et de son mode de gouvernement ou de dynastie chez lui-même. […] Où penchait sa volonté il fallait que penchât le monde : le monde ou lui ne pouvaient manquer d’être bientôt brisés. […] Il pensa ainsi ; il agit, non en citoyen, mais en ministre des Bourbons ; il parvint, à force de volonté, de résolution, d’habileté, de promptitude, à renouer une coalition déjà dissoute et à faire marcher d’un seul pas l’Europe entière au secours des Bourbons.

781. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

Une nation qui compte dans sa population active sept millions d’ouvriers, trois cent mille seulement dans sa capitale ; une nation où deux ou trois millions de ces ouvriers, jeunes, vigoureux, impressionnables, facilement émus, ou séditieux, peuvent être tous les jours, par l’industrie nouvelle des chemins de fer, transportés en masse désordonnée dans cette capitale ou sur un point quelconque du territoire, pour y imposer leur volonté indisciplinée, souveraine, irresponsable, a besoin, sous peine de mort, d’une armée nombreuse, puissante, obéissante, pour contrebalancer cette foule du mont Aventin. […] — Allons, ma fille, joue toujours, va, ne t’inquiète pas de nous ; fais ta volonté, va, Laurette ! […] qui n’a senti ici jusqu’au fond des entrailles l’horrible obéissance de ce soldat qui a remis sa volonté dans celle de son chef, à qui son chef commande un véritable crime qui tue deux êtres en un, et qui se voit obligé d’obéir en mer, et quand l’ordre ne peut plus être discuté ?

782. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Sans gouvernement point de peuple, sans gouvernement point de volonté, sans volonté point d’action ! […] L’esclave est absolument privé de volonté, la femme en a une, mais en sous-ordre ; l’enfant n’en a qu’une incomplète.

783. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre X, Prométhée enchaîné »

Il n’a pas faibli dans la lutte horriblement inégale du fer contre la chair, du paroxysme de la douleur contre l’énergie de la volonté. […] Je sais qu’il a soumis toute justice à sa volonté ; mais un jour il s’humiliera, quand il se sentira menacé. » Cependant le Chœur demande qu’il lui raconte son histoire. […] Jamais leur volonté ne prévaudra contre l’ordre établi par Zeus. » — Les Muses de l’Hymne Homérique ne regardent pas notre espèce, du haut de l’Olympe, avec un mépris plus superbe, lorsque « se répondant avec leurs belles voix elles chantent le bonheur éternel des Dieux et les misères infinies des hommes, lesquels, ainsi qu’il plaît aux Immortels, vivent insensés et impuissants, et ne peuvent trouver un remède à la mort, ni une défense contre la vieillesse. » — Mais aux reproches des Océanides, Prométhée répond par un mot qui le met au-dessus des dieux : — « J’ai eu pitié des hommes ; c’est pourquoi on n’a pas eu pitié de moi. » — Mot sublime qui rattache son cœur d’Immortel aux entrailles humaines, qui rassemble en lui pathétiquement deux natures, et qui fait du Titan souffrant l’image prophétique du Rédempteur à venir.

784. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

Combien d’actes habituels n’accomplissons-nous pas inconsciemment, et souvent même en dépit de notre volonté réfléchie ! Cependant la volonté ou la raison peut réagir sur eux et les modifier. […] Car ni l’exercice des organes, ni l’habitude, ni la volonté, agissant chez les individus stériles d’une communauté d’insectes, ne pourraient en rien modifier la structure ou les insectes, des individus féconds, qui seuls laissent des descendants ; et je m’étonne que personne n’ait argué du cas des insectes neutres contre la théorie des habitudes héréditaires de Lamarck120.

785. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Granier de Cassagnac » pp. 277-345

Ce lendemain échu et l’Empire sorti des causes qui l’ont si bien caché par leur profondeur même, Cassagnac éclaire rétrospectivement, mais vigoureusement, ces causes tardivement aperçues, et l’on sent, en lisant son livre, le bilan de ces Pouvoirs faillis, une — quasi-Royauté et une République également impossibles, — à quel point, heureusement pour l’avenir de la Monarchie dans le monde, le rétablissement de l’Empire fut à la fois naturel et logique, aussi avant dans la volonté humaine que dans les vues de la Providence. […] Les jugements qu’il porte sur eux, non seulement attestent cette volonté de s’abstraire de son temps qui fait la moralité d’une histoire contemporaine, mais, nous ne craignons pas de l’affirmer, ils seront, à bien peu de choses près, l’opinion de l’avenir. […] Ce n’est qu’une raison d’amoureux que s’applique sur la conscience Cassagnac, pour satisfaire sa bizarre passion de linguistique, quand il parle de l’influence de l’origine de la langue sur sa destinée et sur son avenir, et qu’il croit possible d’en diriger à volonté l’incoercible génie.

786. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Discours sur le système et la vie de Vico » pp. -

Il juge de tout d’après lui-même, et suppose la volonté partout où il voit le mouvement. […] De nouvelles observations multiplièrent les signes de Jupiter, et leur réunion composa une langue mystérieuse, par laquelle il daignait faire connaître aux hommes ses volontés. […] Ne vous est-il pas arrivé de faire, dans l’élan d’une volonté forte, des choses que vous admiriez ensuite, et que vous étiez tentés d’attribuer à un dieu plutôt qu’à vous-mêmes ?

787. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Balayer de la scène le moyen âge et installer à sa place un âge de justice, de logique, de vérité, de liberté, de fraternité, conçu d’une seule pièce et jeté d’un seul jet ; En religion, conserver la belle morale et la sainte piété chrétienne, en détrônant les intolérances ; En politique, supprimer les féodalités oppressives des peuples, pour les admettre aux droits de famille nationale, et leur laisser la faculté de grandir au niveau de leur droit, de leur travail, de leur activité libre ; En législation, supprimer les privilèges iniques pour inaugurer les lois communes à tous et à tous utiles ; En magistrature, remplacer l’hérédité, principe accidentel et brutal d’autorité, par la capacité, principe intelligent, moral et rationnel ; En autorité législative, remplacer la volonté d’un seul par la délibération publique des supériorités élues, représentant les lumières et les intérêts généraux du peuple tout entier ; Enfin, en pouvoir exécutif, respecter la monarchie, exception unique à la loi de capacité, pour représenter la durée éternelle d’une autorité sans rivale, sans éclipse, sans interrègne ; honorer cette majesté à perpétuité de la nation, mais la désarmer de tout arbitraire, et n’en faire que la majestueuse personnification de la perpétuité du peuple : voilà la véritable Révolution française, voilà le plan des architectes sages et éloquents des deux siècles. […] Ces trois tendances de l’esprit de la nouvelle civilisation inaugurée sur les ruines de la civilisation féodale, étaient celles-ci : Déplacement, mais nullement destruction du principe d’autorité, c’est-à-dire, au lieu du despotisme des rois, des cours, des sacerdoces dominants, l’autorité raisonnée, mais absolue ensuite et irrésistible de la volonté représentée du peuple tout entier, confiée à un roi héréditaire ou à des autorités électives.

788. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série «  Leconte de Lisle  »

Là mieux que chez nous, il put sentir l’énormité indomptable des forces naturelles et les lourds midis endormeurs de la conscience et de la volonté. […] Rien n’a de substance ni de réalité ; toute chose est le rêve d’un rêve ; et la Vision de Brahma est un obscur poème qu’il faut lire sous le poids d’un grand soleil, quand la tête se vide, quand la mémoire fuit, quand la volonté se dissout, quand on reçoit des objets voisins des impressions si intenses qu’elles tuent la pensée, quand on sent sur soi de tous côtés la molle pesée de la vie universelle et que le moi y résiste à peine et voudrait s’y perdre tout entier, quand la vie arrive à n’être plus qu’une succession d’images sur lesquelles ne s’exerce plus le jugement et que l’on conserve juste assez de conscience pour souhaiter qu’elle s’évanouisse tout à fait, parce qu’alors il n’y aurait plus rien, plus même d’images, et que cela vaudrait mieux.

789. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Si Dieu n’a pas voulu que la perfection fût ici-bas le partage de l’homme, il lui a du moins permis d’en approcher, en lui donnant l’intelligence et la volonté. Par malheur, cette intelligence n’est pas toujours juste, cette volonté n’est pas toujours ferme.

790. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Romans et nouvelles » pp. 3-80

Nous étions à bout de force, à bout de volonté, à bout de tension nerveuse, et quand la porte s’est ouverte, nous avons dit : « Nous enverrons quelqu’un », et nous nous sommes sauvés… De là nous sommes allés à la mairie, roulés dans un fiacre qui nous cahotait et nous secouait la tête, comme une chose vide. […] Et chez cette femme, une énergie de caractère, une force de volonté, un art du mystère auxquels rien ne peut être comparé.

791. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre II : Règles relatives à l’observation des faits sociaux »

En effet, on reconnaît principalement une chose à ce signe qu’elle ne peut pas être modifiée par un simple décret de la volonté. […] Bien loin qu’ils soient un produit de notre volonté, ils la déterminent du dehors ; ils consistent comme en des moules en lesquels nous sommes nécessités à couler nos actions.

792. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Tout est en volonté chez lui, et il n’y a que l’inspiration qui fasse de l’art vrai et profond. La volonté, la réflexion, l’effort, font de l’art tourmenté, rien de plus.

793. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Ernest Feydeau » pp. 106-143

La longévité des nations qui traversent le temps et qui ont toutes cherché à défendre le mariage et la légitimité paternelle comme la source même de leur double vie, l’Antiquité, par l’eunuchat, cette invention du désespoir, dégradante et terrible, et le Christianisme, qui a transfiguré toutes les institutions antiques par un autre eunuchat volontaire qui retranche, avec la volonté, la convoitise du cœur de l’homme et crée une atmosphère de pudeur inconnue avant Jésus-Christ, cette longévité relative des nations ne lui a rien appris pour, dans cette occasion, s’en souvenir ! […] Ce n’est point un enfant, parce qu’il a dix ans de moins qu’elle, mais parce qu’il n’a ni force de volonté, ni principe, ni manière à lui de concevoir la vie, ni rien, enfin, de ce qui constitue en bien ou en mal la virilité morale d’un homme.

794. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « À M. le directeur gérant du Moniteur » pp. 345-355

Feydeau cette qualité trop rare aujourd’hui et qui est l’âme de l’artiste, une ardeur, un feu, un foyer, une volonté, l’amour du bien et du mieux dans l’art.

795. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers »

Lafatalité, pour des esprits qui ne se payent pas de vains mots et d’idoles, c’est une suite inévitable de grandes ou petites causes ajoutées et combinées qui peuvent déjouer à la longue la volonté la plus supérieure et tout le génie humain.

796. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamennais — Lamennais, Paroles d'un croyant »

« Vous voulez qu’elle règne sur la terre, et le méchant y oppose sa volonté mauvaise. 

797. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

Il avait un don qui aide fort au bonheur de qui le possède, et qui simplifie extrêmement ce monde d’ici-bas, la faculté de répandre et d’exhaler la poésie comme à volonté.

798. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Cyprien est une de ces jeunes et ardentes âmes, comme Bucheille, que le mal social agite, dévore, mûrit ou tue avant le temps ; mais Cyprien est plus ferme que Bucheille ; sous son accent amer, sous sa parole un peu fatiguée, on sent l’énergie morale ; il vivra et trouvera à sa volonté intelligente quelque application digne d’elle.

799. (1861) La Fontaine et ses fables « Deuxième partie — Chapitre III. Les dieux »

Il suit une règle, mais il ne prend point sa règle dans la volonté ou l’intérêt national.

800. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Ce mécontent du règne de saint Louis, ce « mangeur » de moines, qui n’a laissé à inventer aux pamphlétaires de l’avenir ni une supposition outrageante ni une plaisanterie grivoise, était un homme dévot, craignant Dieu, qui humblement s’accuse, en sa vie pécheresse, d’avoir « fait au corps sa volonté », qui, tout contrit, recommande à Notre-Dame « sa lasse d’âme chrétienne », qui trouvé d’étrangement tendres, ardentes, pénétrantes paroles pour dire les louanges de la mère de Dieu : Tu hais orgueil et félonie Sur toute chose.

801. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre XVII. Romans d’histoire, d’aventures et de voyages : Gebhart, Lemaître, Radiot, Élémir Bourges, Loti » pp. 201-217

Qu’il ne suffit pas d’avoir de bonnes intentions, mais qu’il faut à un souverain, fût-il démocrate, de la volonté, de l’esprit de suite et de l’adresse.

802. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La Plume » pp. 129-149

Enfin Anatole Baju, dénué de toutes ressources, réalisait ce prodige inouï de faire vivre pendant deux ans, par la seule force de sa volonté, un journal le Décadent, qu’il imprimait lui-même sur du papier à chandelle avec des têtes de clous.

803. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Mais plus heureux encore, nous dirait Jésus, celui qui, dégagé de toute illusion, reproduirait en lui-même l’apparition céleste, et, sans rêve millénaire, sans paradis chimérique, sans signes dans le ciel, par la droiture de sa volonté et la poésie de son âme, saurait de nouveau créer en son cœur le vrai royaume de Dieu !

804. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXI » pp. 338-354

Remarquerai-je le rappel de la volonté du directeur, vous voulez que je demeure à la cour ?

805. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

Je ne puis comprendre que la volonté de Dieu soit que je souffre de madame de Montespan.

/ 1574