Le xviiie garda le principe dont le xviie siècle avait déclaré la souveraineté, mais il en tira toutes les conséquences. […] De ces conditions, pourtant, le xviiie siècle saura tirer un art, un art bien à lui et bien français, intellectuel et mondain, fait d’esprit et d’élégance : art paradoxal en son essence puisqu’il aspire à se passer d’éléments sensibles.
Le tout est de tirer de ces données ce qu’elles comportent de situations surprenantes. […] Montrer dans Brutus des sénateurs en robe rouge, faire tirer un coup de canon dans Adélaïde du Gueselin et y mettre le bras d’un prince du sang de France en écharpe, costumer Lekain en Tartare avec un grand arc à la main et de farouches plumes ondoyant sur un casque invraisemblable dans l’Orphelin de la Chine, voilà les inventions par lesquelles Voltaire remédie à la froideur de la tragédie.
Albalat en eût tirées ! […] Sans doute aurais-je pu choisir d’excellents exemples parmi les Chansons de geste dont Victor Hugo a si merveilleusement tiré parti.
I Ce livre n’est pas, comme on pourrait le croire, une nouvelle édition des œuvres de François Villon, mais tout simplement un mélange de critique et de biographie, entrepris dans le dessein de tirer de l’obscurité, dont elle n’est jamais suffisamment sortie, la figure originale de cet ancien poète à qui pourtant la gloire n’a pas manqué, mais une gloire coupée d’oubli, à interruptions ou à ressauts. […] Il a tiré un effet amer et comique de cette idée, qui domine son poème, de donner ce qu’il n’avait pas !
Mais a-t-il compris au même degré la conséquence redoutable qu’on peut tirer de sa publication contre la Royauté elle-même, la Royauté que ceux qui l’aiment voudraient irréprochable, comme elle est immortelle ? […] Mains tendues avidement à un argent qui n’y tombe pas, et qui pour cela ne tirent pas l’épée, — pas d’argent, pas de suisse !
Pendant qu’il était en train de si bien faire en nous montrant l’antiquité, cette vaine parolière, descendant du sophiste au rhéteur et du rhéteur au grammairien, ces trois marches qui l’ont conduite au gouffre, je souhaitais que l’esprit qui voyait si clair en histoire tirât des faits, si curieux et si nombreux qu’il avait colligés, des conséquences plus circonstanciées et plus hardies, et qu’il osât des rapprochements entre des époques de décadence dont il est impossible de ne pas voir l’analogie… À certaines pages du livre en question, la décadence de l’antiquité, livrée à la phrase et aux mots pour les mots, rappelait à l’auteur d’autres décadences ; des rhéteurs grecs lui mettaient en mémoire d’autres rhéteurs, qui n’étaient pas grecs. […] Voilà pourtant toutes les raisons de l’espèce d’amende honorable que fait, sans torche, sans-corde au cou et sans escalier de Palais de Justice, l’auteur d’un livre qui n’avait qu’à le signer pour en tirer l’honneur qu’il mérite, et qui ne craint pas d’avilir son livre, en le condamnant… L’auteur d’À travers l’Antiquité ressemble, dans son épilogue, à l’homme qui a peur d’un pétard qu’il vient d’allumer.
Elle n’était pas une minute sans tirer le fil de cette quenouille, sans le mouiller de cette salive qui a bien fini par tarir. […] C’est une raisonneuse dans un petit corps lacé de poupée, que cette duchesse de Choiseul ; une raisonneuse comme le xviiie siècle en faisait, une affectée dont le bas de soie tirait furieusement sur le bleu, et c’est peut-être la raison pour laquelle elle plaira à ce siècle-ci ; car tous les pédantismes sont plus ou moins chers au xixe siècle, qui a la fatuité du sérieux, mais pour moi, j’en demande pardon, c’est la raison d’une souveraine déplaisance.
Il tirait des perles du vieux fumier d’Ennius. Lamartine ne tire les siennes que de lui-même.
Esprit emphatique (dans le bon sens du mot), il tend, et c’est son mérite, au grandiose, même quand il le manque ; et quand il le manque, ce n’est pas qu’il ait tiré trop bas, mais c’est qu’il a tiré trop haut !
… II C’est le xixe siècle, du reste (et l’Histoire littéraire devra lui reconnaître cette supériorité), qui a mis dans le monde ces grands producteurs, comme il les appelle dans le jargon de sa manie économique, qui savent tirer de leur cerveau ce nombre de volumes en disproportion (a-t-on cru longtemps) avec la force de l’esprit humain, et qui ne le sont pas même avec sa faiblesse. […] Il donnait à boire à ses gens pour qu’ils fissent tapage et porter haut son nom, et il leur versait le vin qu’eux-mêmes avaient tiré.
Ce qu’a fait dernièrement en Angleterre cette fille de compagnie, cette espèce de gouvernante anglaise chez un garçon, qui a tiré de sa situation même un livre poignant de vérité, une âpre peinture des mœurs anglaises, pourquoi une femme de chambre française ne le ferait-elle pas à son tour ? […] Elle n’a donc servi, disons le mot, que chez des coquines, et cette particularité seule ôte au livre toute nouveauté, toute profondeur et toute portée, rien n’étant plus connu et plus rabâché sur les théâtres, dans les livres et dans les journaux de ce temps, que l’existence de ces dames, qui n’a rien, du reste, de bien compliqué, puisque c’est toujours le même luxe extravagant et gâcheur, la même manière de tromper et de voler leurs hommes, la même abjection d’âme et de langage, le même mutisme de sens moral et d’autres sens, et enfin la même stupidité souveraine, que je ne reprocherais pas cependant à un observateur tout-puissant de peindre encore, s’il en tirait des effets nouveaux et des choses nouvelles !
La coutume ridicule et barbare de citer toujours un texte, coutume dont les hommes de génie ont quelquefois tiré parti, produisit cette fois-là le plus grand effet. […] La Rue fit couler des larmes et par la force de son sujet et par les beautés que son génie sut en tirer.
Ainsi parlait, et tout eschauffé d’ire Hors de sa trousse une sagette il tire, Et décochant de son extrême force, Droit la tira contre ma tendre escorce : Faible harnois, pour bien couvrir le cœur, Contre l’Archer qui toujours est vainqueur. […] Dans ces vers tirés de la réalité de chaque instant, le naturel du poète galope librement, mais sans prendre, toutefois, le mors aux dents. […] La couleur des pierres précieuses est tirée de la matière qui les produit. […] Il fut, aussi, passionné et tragique et il sut tirer de la lyre les sons les plus hauts. […] Il passa une moitié de sa vie à les remanier la plume à la main, à en tirer les brouillons, à les remettre au net et à en préparer une édition qui ne vint pas.
Les miens, qui plus tard, tirèrent sur le jaune, ont été bleus d’abord, à ce qu’on m’a dit. […] … Et tante Zoé se relevait, tirait vivement la corde. […] Il m’avait pris la main et essayait de me tirer en arrière. […] Nini, très effrayée, me tirait par ma robe. […] On me tira les cheveux et on m’en fit deux nattes serrées.
L’un est un Roman intitulé, la petite Poste dévalisée, ancien cadre heureusement imaginé avant lui, & dont il n’a su tirer aucun parti.
de Voltaire ont tiré partie des étranges bizarreries de Bergerac.
l’Abbé Garnier, leur Continuateur, ne paroît pas avoir connu cet Ouvrage, ou avoir jugé à propos d’en tirer le même parti.
Il ajoute encore un nouveau mérite à ses remarques, celui d’en rapprocher plusieurs citations tirées des meilleurs Poëtes François, vrai moyen de répandre une agréable variété sur les sujets qu’il traite.
D’où tirait-il ces idées-là ? […] Elle se tire d’un changement qui s’est opéré dans les mœurs, des conditions nouvelles où sont placés les écrivains. […] Destouches part de définitions générales, et de ses définitions il ne peut tirer que des dissertations. […] Mais il a tiré d’une tradition banale une œuvre originale. […] Quoi qu’on en ait dit, l’information que nous tirons de la comédie est mince.
L’éloquence du professeur, s’il y a lieu, se tire en effet de la profondeur même de l’étude et de la sincérité des convictions littéraires. […] Dans cet ordre de succès réguliers et paisibles, où il ne s’agit point de feux d’artifice à tirer à de certains jours, mais de fruits à produire durant des années, le bonheur calme et pur est un meilleur conseiller encore que l’amour-propre. […] Ses compagnons et lui ne purent guère rapporter sur la topographie de l’ancienne Thèbes que des notions assez conjecturales, comme on les peut tirer d’une ville entièrement détruite « dont il ne reste que trois ou quatre pierres et une vieille mosaïque ». […] Dès que j’aurai revu à mon aise le Parthénon et le golfe, tiré des livres et des hommes ce que je puis en espérer, j’irai vite à Corfou et à Ithaque. » Il suivit exactement son programme. […] Cependant au dernier siècle, un bénédictin, dom Déforis (1772), s’était avisé de fouiller dans les manuscrits de Bossuet et d’en tirer neuf volumes de sermons ou de canevas de sermons.
Comme elle venait régner en France, il en aurait tiré un augure favorable pour les arts et la littérature de ce pays. […] Un écrivain normand qui, bien que d’une très moderne école, sait rendre à Malherbe ce qu’on lui doit, a très bien dit de lui : « Malherbe fut d’un génie qui sentait vraiment cette noblesse dont il tirait vanité si grande. […] Malherbe admirait Henri IV ; il le célébra grandement, mais en tira peu de récompense. […] On cite toujours la lettre de Voiture, écrite dix ans plus tard, sur la politique du Cardinal : pièce vraiment historique, qui honore à jamais ce bel esprit et le tire du rang des purs frivoles, où ses autres écrits le laisseraient. […] Saint-Marc s’en est tiré en homme très-habile : en lisant, J’ai cru un moment que le pauvre Campenon avait été quelque chose.
En religion, beaucoup lui font un tort du mérite même que Fénelon sut tirer de sa défaite. […] De là des inconséquences dont Fénelon ne peut se tirer que par des rêveries. […] Toutes n’ont pas le même poids, mais toutes sont naturelles ; et les plus profondes ne paraissent pas avoir été tirées de plus loin ni s’être présentées avec plus d’hésitation que les plus familières. […] De la même façon que Socrate tire de Gorgias, par mille adresses de discours, l’aveu qu’il n’est qu’un sophiste, Fénelon fait revenir l’interlocuteur de son admiration pour la méchante éloquence. […] Dans une lettre à Cideville, du 13 août 1731, Voltaire signale le parti qu’on tirait de ces doctrines contre la poésie en général.
Si certaines règles sont immuables, on n’aura jamais achevé d’en tirer toutes les conséquences. […] L’artiste fait sonner ce carillon intérieur auquel Taine compare le système nerveux : il a pour cela cent moyens, car la vibration invisible court d’une clochette à l’autre ; que l’une d’elles soit tirée de main de maître, toutes les autres se mettront en branle. […] On peut éveiller une image très nette d’un objet en excitant le sentiment qui en accompagne la vision ; l’image tire alors sa force de l’émotion qu’elle évoque, et parfois d’une émotion d’ordre moral ou même intellectuel. […] Voici un exemple frappant tiré de Flaubert. […] On trouve insuffisant le merveilleux instrument dont il avait tiré toutes les harmonies imaginables ; on demeure fidèle au fétichisme de la rime, mais on supprime le rythme, qui est le fond même de la langue poétique.
Vous tirerez de là, si bon vous semble, des conclusions non seulement sur les abeilles et leurs ruches, mais sur tous les insectes, et peut-être aussi sur tous les animaux. » * * *
Pour se tirer d’un pareil sujet, il eût fallu la force d’idées, de couleurs, et d’imagination de Rubens, et tenter une de ces machines que les Italiens appellent opera da stupire.
Cette Académie a un directeur et un chancelier, qui se tirent au sort tous les trois mois, et un secrétaire, qui est perpétuel. […] Au reste, dans les étymologies qu’un dictionnaire peut donner, il faut exclure celles qui sont puériles, ou tirées de trop loin pour ne pas être trop douteuses, comme celle qui fait venir laquais du mot verna, par son dérivé vernacula. […] Il faut donc, quand on attribue à Cicéron un terme ou une façon de dire, marquer l’ouvrage et l’endroit d’où on l’a tiré. […] Cette comparaison, tirée de la musique, conduit à une autre idée qui ne paraît pas moins juste. […] Quoique ce qu’il en dit soit principalement relatif à la langue latine, qui était la sienne, on peut néanmoins en tirer des règles générales d’harmonie pour toutes les langues.
Qu’est-ce que Paris en eût tiré ? […] Je tire ces lignes d’un long monologue qui est de 1871. […] Et cependant je ne le tirerai point. […] Le verrou tiré, la faiblesse vaincrait. […] Le oui qui l’eût lié à Philine n’est pas sorti, le verrou qui l’en séparait n’a pas été tiré.
Daudet, et qui suffiraient elles seules, écrites, composées, poétisées comme elles le sont, à tirer le romancier et le roman hors de pair. […] Le romancier qui se mettrait à l’école de Balzac, je ne vois pas le profit qu’il en pourrait tirer. […] Nous pouvons donc dire qu’il a tiré d’un procédé connu des effets nouveaux ; et inventer, en littérature, qu’est-ce autre chose ? […] » Ces deux exemples sont tirés de l’Éducation sentimentale. […] Vous dites que cela ne tire pas à conséquence, et que l’erreur d’un seul n’aura pas d’imitateurs ?
Mais en réalité, cette conclusion, ce n’est pas nous qui la tirons du roman, c’est l’auteur qui en a tiré son roman. […] Un grand artiste incorporera à son art l’allégorie consciente, il saura en tirer une beauté. […] Chadourne et j’essaierai d’en tirer des conclusions. […] Le bonheur ne nous pèse guère, à condition, comme un haleur, de le tirer au pas. […] Cela est musulman, c’est entendu, et l’Islam en a tiré un secret de paix intérieure.
Et avait-on besoin même de preuves tirées de l’examen des manuscrits ? […] Alors le roi tira son épée et la posa sur la table. […] Ils la tirèrent à terre péniblement par des cordes, en faisant des prières. […] Il excelle à tirer des écrits qu’il analyse le secret des âmes. […] Ses idées sur le Soleil et sur la mère des dieux sont tirées de Porphyre et de Jamblique.
J’ai jasé environ un quart d’heure avec elles ; j’ai parlé de Lausanne et suis devenu si familier et si à mon aise que j’ai tiré ma tabatière, ai tapé dessus, ai prisé deux fois (crime inouï jusque-là dans la salle de réception !) […] Il fait voir que la connaissance véritable de l’Antiquité est le résultat d’un ensemble très varié, très détaillé, sans lequel on ne fait qu’entrevoir les beautés des grands classiques : « La connaissance de l’Antiquité, voilà notre vrai commentaire ; mais ce qui est plus nécessaire encore, c’est un certain esprit qui en est le résultat ; esprit qui non seulement nous fait connaître les choses, mais qui nous familiarise avec elles et nous donne à leur égard les yeux des anciens. » Il cite des exemples tirés de la fameuse querelle des anciens et des modernes, et qui prouvent à quel point, faute de cette connaissance générale et antérieure, des gens d’esprit comme Perrault ont décidé en aveugles de ce qu’ils n’entendaient pas. — Il y a, chemin faisant, des vues neuves et qui sentent l’historien. […] — L’esprit de critique compare sans cesse le poids des vraisemblances opposées et en tire une combinaison qui lui est propre. — Ce n’est qu’en rassemblant qu’on peut juger. — De ce que deux choses existent ensemble et paraissent intimement liées, il ne s’ensuit pas que l’une doive son origine à l’autre. — Telles sont quelques-unes des maximes de Gibbon.
S’il avait rêvé plus, si ses grands talents précoces lui avaient inspiré des désirs naturels d’élévation, et avaient fait tirer autour de lui, comme nous l’entrevoyons, d’ambitieux augures, tout manqua, et sa carrière fut en quelque sorte brisée par une première légèreté. […] [NdA] Voici deux portraits, l’un de M. de Noyon et l’autre de l’abbé de Caumartin, que je tire d’un opuscule où l’on ne s’aviserait guère de les aller chercher, du Tombeau de Santeul, par l’abbé Faydit (1698). […] Ce sont des esquisses au naturel, faites sans idée de satire et selon l’opinion courante : « François de Clermont, évêque comte de Noyon, à qui tout le Vermandois est soumis, tire son illustre origine du tonnerre.
Elle s’en plaignit au grand-papa, c’est-à-dire au premier ministre, pour qu’on châtiât Fréron : de quoi Horace Walpole, dès qu’il le sut, se montra très contrarié : « Nous aimons tant la liberté de l’imprimerie, disait-il, que j’aimerais mieux en être maltraité que de la supprimer. » Fréron n’avait fait, d’ailleurs, que rapporter un ouvrage traduit de l’anglais, et il n’y avait de reproche à lui faire que d’avoir reproduit cette traduction : « Dans l’exacte justice, disait M. de Choiseul, c’est le censeur qui a tort et non pas Fréron ; ils seront cependant corrigés l’un et l’autre. » Mme de Choiseul avait été mise en mouvement pour cette affaire, mais elle sent vite qu’il faut se mêler le moins possible de toutes ces tracasseries où assez d’autres se complaisent : Ne nous fourrons pas, ma chère enfant, dans les querelles littéraires ; si nous nous en sommes mêlées, c’était pour en tirer notre ami, et non pour y entrer : elles ne sont bonnes qu’à déprécier les talents, mettre au jour les ridicules. […] On tirerait de ces lettres de quoi décrire dans le plus grand détail un idéal d’exil ministériel au xviiie siècle ; Chanteloup, vu par les yeux de Mme de Choiseul ou par ceux du grand abbé, est un Éden. […] Non pas qu’on ne puisse trouver aujourd’hui ses descriptions bien souvent longues et tirées, ses grandes chroniques de Chanteloup fades et traînantes, ses plaisanteries froides et compassées : il faudrait une magie de plume qu’il n’a pas pour nous faire repasser avec plaisir sur la monotonie de ces journées heureuses.
Quelques cas singuliers, quelques anecdotes citées et répétées sur la foi des premiers auteurs, suffisent-elles pour permettre de tirer une conclusion aussi générale et aussi défavorable à la faculté judicieuse du grand roi, faculté si véritablement judicieuse en effet, qu’elle l’a conduit à discerner les hommes les plus capables, en chaque genre, et à les employer à propos ? […] A vrai dire, Boileau a raconté la chose aussi bien, aussi élégamment qu’un fait d’armes aussi compliqué peut se décrire en vers ; mais comme on a toujours affaire à des moqueurs, il n’a pas assez songé au parti qu’on tirerait contre son héros de cet éloge un peu fastueux où il l’a représenté comme inactif et immobile : « Louis, les animant du feu de son courage, Se plaint de sa grandeur qui l’attache au rivage. » Boileau, sans le vouloir, a porté par là préjudice à Louis XIV devant la postérité. […] J’avais moi-même posté une batterie un peu au-dessous de l’endroit où se faisait le passage, qui le voyait à revers ; à peine l’escadron fut entré dans l’eau, que je fis tirer dessus.
Montaigne fait causer son monde, et il tire de chacun les particularités les plus marquées : ainsi cet homme qui le sert, cette espèce de sommelier, et qui est, sous son air de domestique, une manière de seigneur, lui dit entre autres choses qu’ils ne se font nulle difficulté ni scrupule de religion de servir le roi contre les huguenots mêmes, tout huguenots qu’ils sont. […] Montaigne, en un mot, voyageait pour amuser et régaler sa curiosité toujours éveillée et toujours fraîche ; Chateaubriand, pour occuper et remplir son imagination ardente et en tirer gloire. […] On m’avertit de plus d’un côté que dans un livre que je ne connais pas et qui n’a été tiré qu’à peu d’exemplaires, Montaigne chez lui, M. le docteur Galy, de Périgueux, et M.
Suit Je viens de terminer une nouvelle tragédie : c’est Admète et Alceste, sujet tiré de notre Euripide. […] Né à Versailles, dont il est resté le poète chéri, où il a vécu tant d’années et où il est mort69, fils d’un père savoisien et patriarcal, de qui il a prétendu tenir toute sa poétique, bien différente, dit-il, de celle des Marmontel et des La Harpe, et d’une mère, bonne femme humble et antique ; d’abord secrétaire de maréchaux et de généraux, il fit la guerre et la vit de près, sans en tirer grand profit pour son observation de poète : « Ducis a fait la guerre de Sept-Ans avec nous, dit le prince de Ligne. […] Deleyre était une de ces âmes-là, une âme sensible, inquiète, dépaysée, déclassée, tirée du cloître où elle n’avait pu rester, et souffrant dans la société d’où il lui tardait toujours de s’enfuir, une de ces organisations ébranlées comme il ne s’en trouve pas sous cette forme au xviie siècle, et comme il devait s’en rencontrer beaucoup au commencement du nôtre ; il allait avoir son expression, mais imparfaite et insuffisante encore, dans les Rêveries d’un Promeneur solitaire ou dans les Confessions.
On s’est avisé d’imprimer et d’éditer le catalogue — et même plusieurs catalogues — des livres que Marie-Antoinette avait dans ses bibliothèques, soit à Versailles, soit au Petit-Trianon, livres qu’elle lisait ou qu’elle ne lisait pas, et l’on a raisonné là-dessus à perte de vue ; on a voulu tirer ou du moins insinuer des conséquences : frivolité, et plus que frivolité, galanterie, que sais-je ? […] Calonne, en assemblant les Notables et en se flattant de tirer d’eux l’abolition des privilèges, la proscription des abus et la règle dans les finances de l’État, procédait comme s’il ne s’était agi, en vérité, que de passer le rouleau sur un gazon ; il y fallait la sape et la charrue. […] Elle serait disposée à le mieux comprendre et à tirer de lui meilleur parti que Louis XVI qui n’entend rien à cette nature puissante d’homme public, de tribun éloquent, et au double rôle qu’elle est obligée de jouer dans le temps même où elle se donne.
J’avais, à ce qu’il me semblait, mille bonnes raisons pour désirer d’être en repos, où j’aurais vécu plus heureux et plus tranquille : cependant il ne m’a été ni possible ni permis de me défendre, et il a fallu accepter contre mon gré ce que d’autres peut-être envieraient beaucoup, et que je ne désirerais pas de tirer de leurs mains s’ils l’avaient. […] il ne faut jamais trop rechercher ce qu’ils ont pu faire dans un moment donné : ils ont été capables de tout, pour se tirer d’un mauvais pas, pour se débarrasser d’un collègue importun, pour couler un rival, pour arriver plus vite à leurs fins. […] C’est la juste harmonie du jugement avec l’imagination, qui constitue l’homme d’esprit ; joignez-y la conception nette et facile, c’est l’homme de beaucoup d’esprit ; avec le courage de plus, c’est l’homme de génie : mais, avec le feu seul de l’imagination, on extravague… « Il est de ces familles de Cour, tirées de l’obscurité par le bonheur et par l’intrigue, sans avoir jamais rendu d’éclatants services, sans avoir produit d’hommes d’un mérite élevé71.
D’où donc a-t-il tiré cette théorie originale et féconde ? […] Mais si l’on songe que jusque-là, dans l’Art poétique et ailleurs, Boileau n’avait jamais regardé les œuvres littéraires que dans leur relation au genre, sorte de type analogue aux idées platoniciennes, seul élément d’estimation, et seul principe de classification, dont chaque ouvrage tirait et sa raison d’être et sa valeur, selon qu’il le réalisait plus ou moins complètement : si l’on songe qu’il n’avait jamais demandé que la connaissance des règles et le génie pour la création des chefs-d’œuvre poétiques, et ne croyait pas avoir besoin d’une autre considération pour expliquer que la Pucelle n’égale pas l’Iliade, on comprendra tout le chemin que Perrault fit faire à Boileau. […] Ils tirent leur valeur à notre égard des pensées qui nous sont devenues familières, des doctrines où notre siècle a enfermé ses croyances et son génie : tandis que Boileau, en les écrivant, croyait seulement défendre ses chers anciens, et avec eux tout son Art poétique, aussi éloigné de soupçonner qu’il était « évolutionniste » que saint Augustin se doutait peu d’être cartésien le jour où il rencontrait la fameuse formule : Je pense, donc je suis.
La Perse était arrivée, en bannissant les dévas multiples et en les transformant en démons (divs), à tirer des vieilles imaginations ariennes, essentiellement naturalistes, une sorte de monothéisme. […] Mais en religion, c’est toujours le parti ardent qui innove ; c’est lui qui marche, c’est lui qui tire les conséquences. […] Complètement étrangère à l’idée de l’État, la théocratie juive ne faisait en cela que tirer sa dernière conséquence, la négation de la société civile et de tout gouvernement.
Henri, qui ne veut pas d’un pareil beau-frère, lui rappelle le procès qui le déshonore ; sur quoi, Vernouilhet tire de sa poche un vieux numéro de la Gazette des Tribunaux qu’il met sous les yeux du jeune puritain ; puis il s’éloigne, et le banquier, survenant un instant après, trouve son fils, la honte au front et les yeux en larmes ; il prend le journal qui le fait rougir… C’est le compte rendu d’un procès pareil à celui de Vernouilhet, subi il y a vingt ans par son père… Tout s’arrange cependant. […] Augier ; il a dépensé beaucoup de talent dans sa pièce, et il en a tiré fort peu d’intérêt ; l’action est confuse, les situations s’embrouillent, les scènes traînent en longueur, l’esprit parfois brutal du langage ne recouvre pas l’indécision du plan et la faiblesse de l’intrigue. […] C’est pour lui faire épouser Fernande qu’il a tiré le comte de son petit castel provençal.
Dans sa vie de pauvre bergère aux champs, n’a-t-elle pas appris à se suffire avec rien, à tirer parti de tout ? […] Le problème est délicat à résoudre, et elle s’en tire aussi merveilleusement qu’il est possible. […] Il avait déjà trois enfants, quand sa femme, voyant sans doute qu’il avait du bien pour cinq, et qu’il fallait se dépêcher parce qu’elle tirait sur l’âge, s’avisa de lui donner d’un coup deux jumeaux, deux bessons, comme on dit dans le pays.
On vient de publier, dans le dernier numéro de la Revue suisse (octobre 1850), un début des Confessions, tiré d’un manuscrit déposé à la bibliothèque de Neuchâtel, début qui est le premier brouillon de Rousseau, et qu’il a supprimé depuis. […] Un homme de la race aristocratique, mais élève de Rousseau, et qui n’avait pas beaucoup plus que lui le sentiment et la crainte du ridicule, M. de Chateaubriand, a repris dans René et dans ses Mémoires cette manière plus ou moins directe d’aveux et de confessions, et il en a tiré des effets magiques et surprenants. […] Avant lui, le seul La Fontaine, chez nous, avait connu et senti à ce degré la nature et ce charme de la rêverie à travers champs ; mais l’exemple tirait peu à conséquence ; on laissait aller et venir le bonhomme avec sa fable, et l’on restait dans les salons.
On a imprimé depuis cette dédicace dans les Œuvres posthumes, et il y eut même alors trois exemplaires tirés (je donne le fait pour certain aux bibliophiles), qui renfermaient cette dédicace au lieu de l’invocation aux « bergères de mon pays ». […] Cela fait, et le bâtiment Mis à l’eau, le lapin entre tout doucement Dans le léger esquif, s’assied sur son derrière, Tandis que devant lui la sarcelle nageant Tire le brin de jonc, et s’en va dirigeant Cette nef à son cœur si chère. […] Là où l’esprit et la grâce peuvent suppléer à la poésie, là où il suffit de bien conter et d’égayer le récit par un trait agréable, Florian s’en tire à merveille, comme lorsqu’il nous montre, dans la querelle entre le hibou, le chat et l’oison, ce rat arbitre, Rat savant qui rongeait des thèmes dans sa hutte !
Pour nous tirer de l’émotion présente, pour reprendre un peu de lucidité et de mesure dans nos jugements, relisons chaque soir une page de Montaigne. […] Montaigne, qui retourne en son manoir rural le plus souvent qu’il peut, et quand les affaires de sa charge, qui tire à sa fin, ne l’obligent point à être à Bordeaux, se trouve exposé à toute sorte d’injures et d’avanies : « J’encourus, dit-il, les inconvénients que la modération apporte en telles maladies ; je fus pelaudé (écorché) à toutes mains. […] Regardons à terre : les pauvres gens que nous y voyons épandus, la tête penchante après leur besogne, qui ne savent ni Aristote ni Caton, ni exemple ni précepte, de ceux-là tire nature tous les jours des effets de constance et de patience plus purs et plus roides que ne sont ceux que nous étudions si curieusement en l’école.
Le désir et l’espoir me prennent de tirer quelque chose de chacun de ces volumes ; car pour peu qu’il y ait au fond une nature de poète, si incomplète qu’elle soit, on a chance d’y rencontrer tel accent, telle note, telle particularité d’expression et de sentiment qui ne se retrouvera plus. […] La moralité, c’est que le chanteur poète s’est toujours repenti d’avoir tué l’oiseau chanteur, et qu’il n’a pas tiré un coup de fusil depuis. […] J’ajouterais qu’on trouverait en ce moment bon nombre de poètes particuliers très distingués, et qu’on pourrait tirer de leurs œuvres un choix à la fois honorable et charmant.
Pour goûter les écrits de Richelieu, pour en tirer tout le fruit et tout le suc qu’ils renferment, il faut se faire à son style et se tenir bien averti d’avance sur quelques défauts qui, autrement, pourraient rebuter. […] Mais pour ceux qui voudraient tirer parti contre notre nation de ses paroles, ajoutons que, selon lui, cette légèreté française porte souvent son remède en elle-même ; car, si elle nous jette souvent dans des précipices effroyables, elle ne nous y laisse pas, « et nous en tire si promptement, que nos ennemis, ne pouvant prendre de justes mesures sur des variétés si fréquentes, n’ont pas le loisir de profiter de nos fautes ».
» Sur quoi le gentilhomme s’en tira comme il put, distinguant entre les divers ordres d’affection, et il ne sut point disconvenir toutefois qu’il sentait envers M. de Genève une amitié plus douce et plus sensible : « Eh bien, écrivez-lui, répliqua Henri IV, que je désire faire le troisième en cette amitié. » Quelques années après la mort de ce grand prince, en janvier 1617, pendant le premier et court ministère de Richelieu, on désira que le duc de Savoie envoyât un négociateur en France, et c’était sur saint François de Sales qu’on avait d’abord compté. […] Saint François de Sales y énumère toutes les petites formes de partialité et d’injustice par lesquelles nous tirons à nous, dans la pratique de la vie, du côté de notre intérêt et de notre passion, sans vouloir l’avouer ni en avoir l’air, et sans nous croire moins honnêtes gens ; il fait toucher au doigt en quoi consistent ces défauts de raison et de charité, lesquels, au bout du compte, ne sont que de mesquines tricheries : « Car on ne perd rien, dit-il, à vivre généreusement, noblement, courtoisement, et avec un cœur royal, égal et raisonnable. » Par ce seul chapitre, où respire dans le moindre détail la vraie loi de charité, saint François de Sales s’élève en morale bien au-dessus du Montaigne et du Franklin. […] Une de ses pensées encore, et qui est comme la conclusion qu’un lecteur du monde pouvait tirer de son livre, c’est que « l’homme, sans la dévotion, est un animal sévère, âpre et rude » ; et, sans la dévotion, « la femme est grandement fragile et sujette à déchoir ou ternir en la vertu ».
Il ne méconnaît pas le parti fructueux que tirent les marabouts et prêtres de toute sorte des sentiments religieux des naïfs… ce qui ne l’empêche pas, à l’occasion, de tomber dans leurs filets. […] Mais comme le courage n’est souvent qu’une force aveugle et incapable de tirer parti de ses ressources, l’admiration des noirs place la ruse encore bien au-dessus de lui. […] Le lièvre, notamment, a toute la sympathie de l’auditeur des contes quand il trouve moyen de tirer profit du travail auquel il a refusé de participer (V.
Qu’on puisse tirer de la vérité des effets utiles, il ne l’a jamais soupçonné. […] Vous voilà au coin du feu, les rideaux tirés, les pieds au feu, auprès d’une lampe, rêvant un peu, et vous figurant une forêt. […] Par quelle mécanique admirable la nature tire-t-elle la vérité de l’erreur ?
Auguste Barbier Comme poète, il avait peu d’invention et de sentiment, mais une facture de vers remarquable, une grande habileté dans la connaissance et le maniement des rythmes lyriques ; ses poésies légères, voltairianisme un peu romantisé, et son petit poème de Florinde, tiré du Romancero, resteront comme des œuvres pleines de grâce et d’habileté.
Les Rythmes pittoresques tirent, en effet, toute leur intensité de l’âme de Mme Krysinska.
Dans ces trois Ouvrages, Dom Calmet s’attache moins aux réflexions qu’aux faits, en quoi il faut rendre justice à son jugement ; car tout ce qu’il tire de lui-même est souvent lourd & peu intéressant.
Dans ses Notes sur Lucrece & sur Phédre, il a eu l’art de tirer habilement parti de ses recherches ou de celles des autres, & de les dégager du ton de pédantisme qui accompagne ordinairement les Commentaires.
Et, par reconnaissance, elle n’oublia jamais, chaque fois qu’elle mangeait son couscouss, d’en donner la première et la dernière poignée au gros chien noir qui l’avait tirée de ce mauvais pas.
Le mot contemplation, appliqué à ces choses, fut tiré par les Latins de ces espaces du ciel désignés par les augures pour y observer les présages, et appelés templa cœli. — Le ciel ne fut pas d’abord plus haut pour les poètes, que le sommet des montagnes ; ainsi les enfants s’imaginent que les montagnes sont les colonnes qui soutiennent la voûte du ciel, et les Arabes admettent ce principe de cosmographie dans leur Coran ; de ces colonnes, il resta les deux colonnes d’Hercule, qui remplacèrent Atlas fatigué de porter le ciel sur ses épaules.
Mais il est ennuyeux d’être tiré de ses rêves par un vieillard discordant. […] C’est ainsi que, de tout le paysage qui m’entoure, je tire les éléments de la joie chantée par mes poèmes. […] Ô malheureux, rien ne pourra donc te tirer de ton aveuglement ? […] Pour te tirer de ces… divagations, je m’en vais te faire faire connaissance avec la réalité. […] En jeûnant environ trente-six heures par semaine, cette famille se tire à peu près d’affaire.
L’ode est intitulée : À Daphné sur la fuite de ses charmes ; c’est une consolation tirée de la ruine des empires et des changements insensibles des choses de la terre.