Il y avait même, oubliée et digne de l’être, une vieille pièce intitulée Manon Lescaut, et on l’a remise à la scène, on l’a recampée, ô Rocambole ! […] Il resterait donc ici le poète du détail, du récit, de la mise en scène et du style, qui sont bien aussi de la poésie ; mais ce poète-là n’y est pas davantage.
Cette soirée au château de la Vaubyessard est, par parenthèse, une des scènes du livre dans lesquelles M. […] Avant cette scène, nous avions les prodromes du roman, mais il faut le dater réelle ment de ce bal, où l’œil commence de corrompre l’âme et où le monde extérieur entre dans le cœur de madame Bovary pour n’en plus sortir.
Ses fables ne sont-elles pas toute la vie humaine mise en scène ? […] Chénier n’a peut-être pas une pièce, pas un tableau, pas une scène qu’il n’ait pris aux anciens. […] Racine a pris aux Grecs le sujet de ses tragédies et leurs principales scènes. […] Fénelon dissimule dans du bon français la réalité terrible qu’Homère donne à ses scènes de carnage. […] Mais il y a des auteurs qui ne se proposent pas de montrer des scènes ou de peindre des tableaux.
Tous les spectacles du monde se réfractent dans son esprit en scènes comiques. […] La scène, rapportée dans le procès-verbal que nous cite le P. […] Le drame dont ils règlent les péripéties, ils n’en sont pas seulement les metteurs en scène, il faut qu’ils y jouent leur rôle. […] Son Aymerillot est une merveille de grâce et de fraîcheur, la scène la plus émouvante d’une comédie héroïque. […] Sa vie, et principalement sa jeunesse, lui a fourni, comme à tous les romanciers, des personnages, des scènes, des décors.
Le vendredi 7 avril, le soir, chez madame Récamier. mademoiselle Rachel a récité : 1° quelques scènes de Bérénice ; 2° le premier acte presque entier de Judith ; — Bérénice assez bien, mais pour Judith, succès complet d’actrice et d’acteur.
Mais la jeunesse a lu, mais ceux qui ont fait le succès étaient au courant de ces travaux et disposés à accueillir ce style transporté à la scène, enfin, avec pureté et sans trop d’enflure.
La scène se passe aux États-Unis et au Canada, au commencement de la guerre de l’Indépendance.
Collé y a joint tout l’art dont le sujet étoit susceptible, celui de bien amener les incidens, de mettre du jeu & de la variété dans ses personnages, de développer l’ame de son Héros, de faire ressortir, pour ainsi dire, de chaque Scène un intérêt qui lui est particulier & contribue à l’effet général, de joindre enfin à l’énergie du sentiment, l’aisance & le bon ton du Dialogue, en conservant la naïveté & le costume des mœurs du siecle d’Hénri IV.
L’Espagne, séparée des autres nations, présente encore à l’historien un caractère plus original : l’espèce de stagnation de mœurs dans laquelle elle repose lui sera peut-être utile un jour ; et, lorsque les peuples européens seront usés par la corruption, elle seule pourra reparaître avec éclat sur la scène du monde, parce que le fond des mœurs subsiste chez elle.
Brièvement, on peut dire cependant, en somme, que tout spectacle, toute scène passionnelle et spirituelle qui peut être et qui est exactement décrite, analysée par le menu, cessera d’être poétique ; qu’au contraire, tout spectacle qui reste obscur et diffus, étrange et lointain, dont la représentation toute générale et suggestive, mais cohérente cependant, laisse le champ libre aux émotions qui lui sont associées et à celles même qui résultent de son idéalisation, sera poétique. […] Quant à Dickens, nous avons aperçu en lui le type de l’artiste qui implique sans cesse dans ses descriptions, ses personnages, ses scènes, les sentiments qu’ils lui suggèrent ; ses procédés nous ont permis de déterminer exactement ce que c’est qu’un humouriste et ce qu’est particulièrement humouriste spécial du vautdeville, de l’opérette, de la caricature. Dostoïewski poussant plus loin encore la déformation que ces observateurs passionnés font subir à ce qu’ils voient, en vient, à force de perpétuel et trépidant émoi, à fantastiser, si l’on peut dire, la réalité, à réduire les personnages en des sortes de fous constamment furieux ou hagards, les descriptions en hallucinations de songe, les scènes en péripéties de cauchemar, et agit ainsi sur le spectateur, moins par le contenu réel de ce qu’il lui montre, que par le sentiment qu’il donne de l’état de conscience trouble et dément dans lequel l’auteur dut se trouver pour déformer ainsi tout ce que le monde lui montre. […] Assurément il est faux de croire que le réalisme se distingue de l’idéalisme soit classique, soit romantique, exclusivement en ce qu’il donne de la nature et de la nature humaine une représentation plus exacte en chacune des scènes et des individus qu’il représente. […] Ses analyses de caractère sont mieux poussées que celles du romancier anglais chez lequel elles sont médiocres, ses peintures de milieux beaucoup plus exactes, ses descriptions, ses scènes plus renseignantes, sa composition mieux entendue.
Dans une scène d’ivrognerie et de rixe qui rappelle trop un tableau flamand de Teniers, il apprend que don Étur, un de ses camarades, se vante de l’amour de Juana. […] La conception de ce poème du Saule est indécise et obscure, mais dans l’exécution et dans l’inspiration de certaines scènes, la poésie moderne ne monte pas plus haut et ne plane pas plus vaporeusement dans l’éther ; mais le poète est insaisissable comme le caprice. La Coupe et les lèvres, drame écrit après le poème du Saule, est une profession de scepticisme dans son début, une imitation très savante, mais trop servile du Manfred, de lord Byron, dans les scènes. […] À quoi rêvent les jeunes filles n’est qu’une bouffonnerie en vers faciles, une scène de Don Quichotte rimée, un proverbe à jouer après souper entre deux paravents. […] C’est une scène de mascarade à la porte d’un bal public pendant une nuit de carnaval.
Mais ces mâles considérations, qui simplifient tout dans l’histoire de la Saint-Barthélemy et qui couvrent les faits particuliers, les horreurs de détail, le massacre à l’heure, et toute cette frauduleuse mise en scène des partis vaincus, ont échappé au jeune historien. […] Après avoir retracé les vastes mouvements d’une scène historique, Audin a retourné la toile et nous a donné un tableau d’intérieur et de genre, mariant dans un mélange inattendu, qui est presque une invention, la biographie à l’histoire. […] Collombet, son ami, qui devait l’accompagner dans ce voyage : « Nous écririons de conserve deux volumes in-8o qui auraient pour titre : Voyages sur les scènes de la Bible et du Nouveau Testament. […] Madame Audin, pour ne pas être obligée d’abandonner la dépouille aimée et respectée qu’elle rapportait à la terre de la patrie, contint l’explosion de sa douleur et voyagea quatorze heures avec son mari expiré… Cette veillée des morts, sans lit et sans suaire, ce fardeau sacré qu’on emporte presque dans ses bras, termina par une scène sublime la vie d’un homme qui ne fit scène d’aucune de ses vertus, et laissa sur le front de sa veuve l’auréole d’une douleur courageuse, noblement seyante au nom qu’elle a l’honneur de porter.
Même on découvre en cet arrangement pour la scène française plus d’une concession au métier des auteurs dramatiques de l’Empire. […] Je n’hésite pas à considérer Quitte pour la peur, comédie en trois scènes, comme un tout parfait chef-d’œuvre. […] parce qu’on les avait moins lus, parce qu’on avait cessé de les voir sur la scène, ou parce qu’on ne les y avait point vus ; et l’admiration s’accrochait à des souvenirs moins précis, pas contredits par la réalité de l’œuvre même. […] Armand d’Artois réduisit à la scène sans trop de sacrilège, plus d’un spectateur pensait avec mélancolie : « Je croyais bien pourtant que c’était un chef-d’œuvre ! […] Et il était naturel qu’il en fût ainsi : un bafoueur de dieux devait plaire à des renieurs de serments, à des assassins d’idéal ; c’est logiquement que le drame impérial a eu, pour musique de scène, l’opérette.
Les particularités de cette scène pleine d’observations et de couleurs locales ne peuvent être appréciées qu’entre les buttes de Montmartre et les hauteurs de Montrouge, dans cette illustre vallée de plâtras incessamment près de tomber, et de ruisseaux noirs de boue ; vallée remplie de souffrances réelles, de joies souvent fausses, et si terriblement agitée, qu’il faut je ne sais quoi d’exorbitant pour y produire une sensation de quelque durée. […] Le surplus des parois est tendu d’un papier verni représentant les principales scènes de Télémaque, et dont les classiques personnages sont coloriés. […] La scène est horrible, mais invraisemblable, comme toute la fin du roman. […] Un pont tremblant composé de poutrelles pourries, dont les piles sont couvertes de fleurs, dont les garde-fous, plantés d’herbes vivaces et de mousses veloutées, se penchent sur la rivière et ne tombent point ; des barques usées, des filets de pêcheurs, le chant monotone d’un berger, les canards qui voguaient entre les îles ou s’épluchaient sur le jard, nom du gros sable que charrie la Loire ; des garçons meuniers, le bonnet sur l’oreille, occupés à charger leurs mulets ; chacun de ces détails rendait cette scène d’une naïveté surprenante. […] Les scènes douces et amères qui suivent ce moment sont remarquablement écrites, mais ressemblent à toutes.
A côté des scènes plaisantes d’hôtel garni et d’atelier, d’étudiants en droit et d’artistes, l’auteur sait introduire de fraîches descriptions de la nature, et même de touchantes situations de cœur.
Ce début de l’auteur sur une grande scène parisienne était donc attendu avec curiosité, et nos meilleurs souhaits l’y accompagnaient.
Son imagination l’enflamme, l’emporte en un monde féerique, plein de songes, de musique, et jette sur le papier les premières scènes de Conte d’avril.
. — Nos enfants, scène de la ville et des champs (1887)
Il en eut la première révélation en voyant jouer des comédiens de campagne ; il les suivit, joua avec eux à la diable des mélodrames et des vaudevilles, et, sans y songer, apprit ainsi ce mécanisme de la scène et cet art matériel du théâtre, qui si souvent manquent aux poètes lyriques.
Ainsi, les ruines jettent une grande moralité au milieu des scènes de la nature ; quand elles sont placées dans un tableau, en vain on cherche à porter les yeux autre part : ils reviennent toujours s’attacher sur elles.
Tous les poèmes reproduisent le même point de vue, la même femme apparaît toujours, le même homme remonte constamment en scène. […] Le sujet disparaît sous les accessoires, et au lieu d’un drame politique émouvant par les faits importants qu’il représente et par la grandeur des personnages qu’il met en scène, Lorenzaccio n’est plus qu’une pièce fort amusante et très spirituellement écrite. […] Aussi les rôles de la reine d’Égypte et de son amant Meïamoun, seuls acteurs de cette scène, sont-ils réduits à de très petites proportions. […] Étudiant plutôt le dessous que le dessus, amenant sous nos yeux les hommes et les femmes du temps de Périclès ou de Marc Antoine et nous les faisant connaître tels que les institutions sociales et les mœurs les avaient modifiés ; en un mot nous donnant un tableau dans le goût de cette scène de sorcellerie antique, qui forme une des plus belles parties du second Faust. […] Beaucoup plus attentifs à se mettre en scène, à paraître devant le lecteur qu’à produire l’homme dont ils se sont fait les introducteurs, ils s’occupent bien plus de se faire beaux que de détailler la toilette de l’auteur sur les épaules duquel ils grimpent, pour essayer de se faire voir.
(Acte II, scène viii.) […] Nous tâcherons d’en retracer la scène, les accidents principaux, et d’en ranimer quelques acteurs du fond de ces vastes cimetières appelés journaux, où ils gisent presque sans nom. […] Mme Joseph Bonaparte lui en fit une scène à Morfontaine, la prochaine fois qu’elle le vit. […] Le soir étend son deuil et plus avant m’explique La scène d’alentour, sans voix et sans flambeaux. […] Ici une main dispensatrice rendait la scène facile et ouvrait une part large au drame et au roman, par une sage économie de moyens.
Les jeux de la mise en scène, les roueries du métier, la combinaison sont les objets de leur plus profond mépris. […] Les mœurs de la famille, les maladies de l’esprit, les curiosités de la rue, les scènes de campagnes, l’observation des passions, appartiennent également au réalisme, puisque le mot est à la mode. […] Je pourrais découper vingt pages dans ses romans pour donner une idée des scènes qu’il affectionne, mais je m’adresse uniquement à ceux qui les ont lus déjà. […] C’est une série de scènes qui se succèdent sans s’engendrer, et tel chapitre pourrait être déplacé ou même supprimé sans altérer l’ensemble général de l’œuvre. — Que reste-t-il donc à M. […] Mais avoir mis sur la scène toutes les classes jusqu’à présent oubliées ou négligées, ce sera n’avoir fait encore que la moitié de la besogne, si l’on n’avise pas en même temps à déployer aussi cette scène jusqu’à elles.
Les comédies de Ménandre que nous connaissons par celles de Térence sont faites pour ainsi dire avec rien ; il fallait en amalgamer deux pour faire une pièce romaine ; la plus chargée ne contient guère plus de matière qu’une seule scène de nos comédies. […] Elle apparaît vingt fois dans une scène, en plein théâtre, aux fêtes des dieux, devant les magistrats, avec le phallus que portent les jeunes filles et qui lui-même est invoqué comme un dieu33. […] Dans les montagnes de la Calabre ou de la Sicile, aux jours de danse, les jeunes gens figurent par leurs poses et leurs gestes de petits drames et des scènes d’amour. […] Cette pantomime musicale, que nous le rencontrons plus que par fragments isolés et dans des recoins perdus, se développera, se multipliera en cent rameaux et fournira matière à une littérature complète ; il n’y aura pas de sentiment qu’elle n’exprime, pas de scène de la vie privée ou publique qu’elle ne vienne décorer, pas d’intention ou de situation auxquelles elle ne puisse suffire. […] s’il voulait se dépouiller, le visage ne paraîtrait plus rien, tant toute sa forme est belle. » Dans cette petite scène qui nous reporte bien plus haut que sa date et jusqu’aux plus beaux temps du corps nu, tout est significatif et précieux.
Les anecdotes ont abondé sur son compte, et j’ai été plus d’une fois mis en scène.
. — Scènes de la vie des courtisanes, de Lucien (1894). — Ariane (1894). — La Maison sur le Nil (1894). — Les Chansons de Bilitis (1894). — Aphrodite (1896). — La Femme et le Pantin (1898). — Les Aventures du roi Pausole (1900).
L’Iliade est pleine, l’Odyssée est grosse de scènes toutes prêtes à se détacher du récit pour revivre de leur vie propre.
Dans cette autobiographie, au jour le jour, entrent en scène les gens que les hasards de la vie ont jetés sur le chemin de notre existence.
Dans cette autobiographie, au jour le jour, entrent en scène les gens que les hasards de la vie ont jetés sur le chemin de notre existence.
. — Voltaire, dans ses tragédies, Rousseau, dans La Nouvelle Héloïse, Werther, des scènes de tragédies allemandes ; quelques poètes anglais, des morceaux d’Ossian, etc. ont transporté la profonde sensibilité dans l’amour.
Parodi l’a porté à la scène.
À l’heure qui nous occupe, elle vient de prendre possession avec éclat de la scène du Théâtre-Français.
Cette personne, si distinguée par l’esprit et par l’âme, a laissé deux volumes de lettres passionnées, dans lesquelles il y a chaleur à la fois et analyse, mais pas une scène peinte, pas un tableau qu’on retienne. […] Qu’il est bien, par exemple, de nous montrer, à la fin d’une scène joyeuse, Virginie à qui ces jeux de Paul (d’aller au-devant des lames sur les récifs et de se sauver devant leurs grandes volutes écumeuses et mugissantes jusque sur la grève) font pousser des cris de peur ! […] Ferdinand Denis, auteur de Scènes de la Nature sous les Tropiques et d’André le Voyageur, est dans nos générations un représentant très-pur et très-sensible de l’inspiration propre venue de Bernardin de Saint-Pierre : par les deux ouvrages cités, il appartient tout à fait à son école ; mais c’est sa famille qu’il faut dire. […] Girodot dans Endymion, Prudhon surtout en quelques-unes de ses productions trop rares, ont conçu et disposé la scène naturelle sous un jour assez semblable.
Mais voici la contre-partie de la scène et l’image fidèle des mœurs d’alors. […] La scène est racontée par le menu et de manière à Rendre la supercherie plus piquante. […] Pour un marc que vous dépenserez j’en donnerai quatre au monastère. » Les adieux qu’il échange avec Chimène, lorsqu’elle vient à lui avec ses deux filles, rappellent les scènes analogues les plus touchantes des anciens et pieux héros : « Voici que doña Chimène arrive là avec ses filles.
Certaines scènes capitales du Parlement sont rendues avec exactitude ; il les tenait de première main. […] Rien ne montre mieux combien en est sujet, avec le meilleur esprit, à ne pas bien juger des hommes à bout portant et à ne pas se rendre compte, entre contemporains, de la courbe générale d’un génie et d’une destinée. — Voici le premier endroit où il est question, chez lui, de Voltaire (juin 1720) : « Arouet, poète, auteur du nouvel Œdipe, étant à la Comédie avec le prince de Conti, la Le Couvreur, actrice, entra sur la scène. […] Le comparant un jour avec Racine fils, dont il avait le tort d’admirer le poëme sur la Grâce, et annonçant la prochaine publication du poëme de la Ligue ou la Henriade, qui s’imprimait en Hollande (décembre 1723) : « Si ce poëme est aussi beau, disait-il, que celui de Racine, nous aurons là deux grands poètes, mais deux petits hommes ; car ce Racine, que j’ai vu deux ou trois fois, n’a qu’un esprit frivole et sans goût dans la conversation, et l’autre est un fou qui méprise les Sophocle et les Corneille, qui a cru être de la Cour, qui s’est fait donner des coups de bâton, et qui ne saura jamais rien parce qu’il croit tout savoir. » À quelques années de là, quand Voltaire a grandi et s’est déjà mis hors de pair, on lit dans une lettre de Marais au président Bouhier le récit suivant sur la répétition de la scène du pont de Sèvres ; il s’agit de l’éclat si connu avec le chevalier de Rohan ; il est bon d’avoir la version de Marais (6 février 1726) : « Voltaire a eu des coups de bâton.
Tu n’as plus ton chasseur, ton fidèle serviteur… Et le dialogue continue sur ce ton ; Thésée s’y mêle, et la déesse réconcilie le père désolé avec son fils : « Je ne connais point, dit M e Schlegel, de scène plus touchante dans aucune tragédie ancienne ou moderne. » Au moment où elle profère les nobles et clémentes paroles, Diane, qui s’aperçoit qu’Hippolyte va trépasser, termine ainsi : « … Et toi, Hippolyte, je t’exhorte à ne point détester ton père ; c’est ta destinée qui t’a fait périr. […] M. de Schlegel caractérise dignement les beautés pathétiques et pieuses de cette scène : « Nous voyons, dit-il, la majesté immortelle auprès de la jeunesse expirante, les déchirements du repentir auprès des émotions d’une âme pure. […] Je me sers de la traduction qu’a donnée de cette scène M e Schlegel, dans sa brochure sur les deux Phèdres.
Les admirations contemporaines les plus unanimes et les mieux méritées ne peuvent rien contre ; la résignation la plus humble, comme la plus opiniâtre résistance, ne hâte ni ne retarde ce moment inévitable, où le grand poëte, le grand écrivain, entre dans la postérité, c’est-à-dire où les générations dont il fut le charme et l’âme, cédant la scène à d’autres, lui-même il passe de la bouche ardente et confuse des hommes à l’indifférence, non pas ingrate, mais respectueuse, qui, le plus souvent, est la dernière consécration des monuments accomplis. […] De composition et d’art dans le cours de son premier ouvrage, non plus que dans les suivants, il n’y en a pas l’ombre ; le marquis raconte ce qui lui est arrivé, à lui, et ce que d’autres lui ont raconté d’eux-mêmes ; tout cela se mêle et se continue à l’aventure ; nulle proportion de plans ; une lumière volontiers égale ; un style délicieux, rapide, distribué au hasard, quoique avec un instinct de goût inaperçu ; enjambant les routes, les intervalles, les préambules, tout ce que nous décririons aujourd’hui ; voyageant par les paysages en carrosse bien roulant et les glaces levées ; sautant, si l’on est à bord d’un vaisseau, sur une infinité de cordages et d’instruments de mer, sans désirer ni savoir en nommer un seul, et, dans son ignorance extraordinaire, s’épanouissant mille fois sur quelques scènes de cœur, renouvelées à profusion, et dont les plus touchantes ne sont pas même encadrées. […] Ce genre de vie, auquel il est si peu propre, l’engage au milieu des situations les plus amusantes pour nous, sinon pour lui, comme dans cette scène de boudoir où la coquette essaye de le séduire, ou bien lorsque, remplissant un rôle de femme dans un rendez-vous de nuit, il reçoit, à son corps défendant, les baisers passionnés de l’amant qui n’y voit goutte.
La démonstration devient une scène de comédie, une longue, puissante et comique apostrophe du jaloux à la femme qu’il a par folie épousée : le caractère dramatique se dégage du type abstrait et allégorique, par l’abondance des nuances, des traits particuliers, finement inventés et vigoureusement expressifs. Ailleurs, veut-il se plaindre de l’indiscrétion des femmes, autre scène de comédie : dans un tableau très réaliste, un dialogue vif et fort de la femme et du mari, l’une par ruse, caresse, menace, dépit extorquant le secret qu’elle publiera, l’autre, pauvre niais ! […] Ces deux scènes sont de remarquables morceaux de psychologie dramatique.
Ce témoin, cet acteur des brillants drames de l’amour et de l’ambition, une fois qu’il a quitté la scène, nous dit ce qu’il a trouvé, en lui, autour de lui ; toujours, partout, une base d’égoïsme et de calcul. […] Retz se plaît à détailler les conversations, les discussions politiques, où chaque partie fait valoir son intérêt de gloire ou de profit : et son entretien avec Condé, au début de la Fronde, fait vraiment pendant aux grandes scènes politiques de Corneille. […] Certaines scènes sont d’une franchise remarquable, de vrais morceaux de réalité, sincèrement transcrite, sans outrance et sans esprit.
— Parc’ qu’on va manger dans les châtiaux. » L’enfant faisait ces réponses avec un sourire niais, enchanté d’être en scène devant des messieurs. […] Vous y trouverez, à côté de scènes d’une violence sauvage (peut-être même l’auteur a-t-il forcé le contraste : Pancol et la vieille Pancole sont d’horribles fauves), d’autres scènes d’une douceur, d’une simplicité, d’une piété exquises.
C’est à qui le mettra en scène et lui prêtera de nouvelles prouesses. […] Je sais des contes dévots abondants en scènes scabreuses qui jurent étrangement avec l’intention et les conclusion édifiantes. […] Une scène, une page, une ligne peuvent ainsi contenir une essence subtile qui monte à la tête des gens.
On peut lire sa première intrigue avec la jeune veuve de qualité qu’il rencontre à Guise, son autre intrigue avec la belle comtesse qu’il voit à Moulins, et les scènes bizarres et un peu grotesques du château délabré qu’il décrit avec complaisance et avec un véritable talent littéraire. […] Sans parler des hommes qui, en fait de procédés, s’y montrent capables de tout, les femmes qu’il met en scène sont emportées, violentes, surtout intéressées et cupides. […] Qu’on se rappelle cette première scène délicieuse où le spirituel valet, en exposant ses misères, ne fait que décrire la servitude et les attaches du courtisan d’alors auprès des Grands : Cependant notre âme insensée S’acharne au vain honneur de demeurer près d’eux, Et s’y veut contenter de la fausse pensée Qu’ont tous les autres gens, que nous sommes heureux.
L’intrigue et le drame, c’est la déclaration officielle des amours de Saint-Victor et de l’actrice en scène. […] Le rideau s’est relevé sur la scène où les lampistes emportent les quinquets des portants. Dans la demi-nuit de la scène, nous nous heurtons à Fournier, qui se promène comme un fantôme, en cravate blanche, en habit noir, demandant nerveusement aux gens, si c’est un succès et qu’il n’a rien vu. — Cela dit du ton d’un homme qui interroge si ça va être sa faillite.
Dans les premières séances des États-Généraux, ému de ces grandes scènes, Frochot écoutait : mandataire scrupuleux et honnête, « il ne voulait être d’aucun parti, si ce n’est du parti de ses cahiers. » Pourtant il n’y put tenir, et, dès le mois d’octobre 80, il entra, pour n’en plus sortir, dans la sphère d’idées et d’action où présidait l’astre tout-puissant du grand tribun. […] Mais dans le bourg d’Aignay, comme ailleurs, les luttes commencèrent : l’étendue et la hauteur du théâtre n’y font rien ; c’étaient sous d’autres noms les mêmes hommes, les mêmes passions et les mêmes mobiles, les mêmes défections d’amitié, les mêmes arriérés de haine, les mêmes envies d’humilier, les mêmes besoins d’arriver à son tour, que sur la scène principale et centrale ; et Frochot eut à déployer les mêmes qualités de modération et de fermeté dont il aurait eu à faire preuve, s’il avait été de la Législative ou de la Convention. — Louis XIV demandait un jour au cardinal de Janson, aussi bon négociateur qu’habile courtisan, où il en avait tant appris : « Sire, répondit le cardinal, c’est en courant la nuit avec une lanterne sourde, tandis que j’étais évêque de Digne, pour faire les consuls d’Aix. » Et Lisola, le célèbre diplomate franc-comtois, disait qu’il s’était très bien trouvé, dans les grandes affaires, des subtilités qu’il avait apprises « dans le ménage municipal de Besançon. » Une seule maison quelquefois suffit à qui veut observer les variétés des passions humaines : un seul bourg peut suffire, en un temps d’agitation populaire, pour soulever et faire sortir toutes les variétés d’ambitions et de haines, et pour exercer d’autre part toutes les vertus civiques ; Frochot eut de quoi en faire de plus en plus l’apprentissage : il s’honora par toute sa conduite durant ces temps calamiteux ; il y montra une fermeté qui tenait encore chez lui au premier mouvement et à l’impulsion du sang dans la jeunesse.
Quand je dis que c’est un plaisir, je vais bien pourtant un peu loin : c’en serait un certainement dans toute autre circonstance, mais dans celle-ci, nous pouvons en faire l’aveu, la satisfaction de démontrer clairement son bon droit se trouve très-mélangée par l’affliction que tout esprit vraiment littéraire éprouve à voir de telles scènes dégradantes et les noms connus du public qui y figurent. […] Ceux même qui parlent ainsi, et qui se plaignent si haut, ont oublié de quelle manière leurs œuvres dernières, celles qui restaient dignes de leur talent et de la scène, ont été examinées dans cette Revue, non point avec l’enthousiasme qu’ils eussent désiré peut-être, du moins avec une bienveillance et une sincérité d’intention incontestable84.
Il paraît peu, il se retire tout d’abord, on ne l’a envisagé dans cette première scène de colère que pour le perdre de vue aussitôt ; mais sa grande ombre est partout, son absence tient tout en échec. […] Qu’il y ait eu des épisodes intercalés, des scènes d’Olympe à tiroir, ménagées çà et là pour faire transition et relier entre elles quelques-unes des rhapsodies, c’est possible, et la sagacité conjecturale peut s’y exercer à plaisir et s’y confondre ; mais, sans prévention, on ne peut méconnaître non plus un grand ensemble et ne pas voir planer dans toute cette durée de l’action la haute figure du premier des héros, de celui qui agitait en songe et suscitait Alexandre.
De là vient aussi la prolixité stérile des écrivains qui s’abandonnent à leur facilité naturelle : ils reçoivent dans leurs ouvrages tout ce que leur présente leur fantaisie agitée, mais ils ne remarquent pas qu’elle leur envoie toujours les mêmes idées diversement habillées, comme au théâtre on fait passer et repasser sans cesse les mêmes figurants sur la scène pour donner l’illusion des grandes armées. […] Étudiez l’agencement des scènes et la distribution du dialogue dans les tragédies de Corneille et de Racine : vous verrez ce que peut produire cette habile économie.
Il est de tous les lazzi ; il occupe souvent la scène, et les charges qu’il y fait n’ont d’ordinaire aucun rapport avec l’intrigue. […] Nous ne savons l’acteur qui tenait le rôle de Pedrolino (Pierrot) ; ce rôle est, dans les canevas des Gelosi, fort pareil à ce qu’il est resté sur la scène française, pétulant, grimacier, malin, gourmand et poltron.
Elle qui écrit habituellement des scènes de mœurs d’un accent très vif, a voulu cette fois velouter son accent et montrer à l’ironique railleur qui l’a nommée, et qu’elle appelle son parrain dans sa dédicace, qu’elle pouvait, ma foi ! […] Madame Ange Bénigne, dont le nom véritable sera dit un jour (nous l’espérons bien) en plein théâtre et en plein succès, aura-t-elle à la scène la valeur de talent qu’elle a dans ce livre que nous avons le droit d’appeler aussi : Un spectacle dans un fauteuil ?
Que cette continuité et ces retours soient souvent discutables, je le veux bien, mais il me suffit que le vers libre ait produit telles scènes de Phocas le jardinier pour croire que si sa perfection est difficilement atteinte, elle n’est pas inaccessible. […] Il est même curieux que les romantiques n’aient fait de bon théâtre que lorsqu’ils n’étaient pas préoccupés par la scène, les acteurs et le lustre ; ce fut le cas de Musset, et celui de Victor Hugo, qui n’a écrit de parfait dans cet ordre que les deux trouvailles de Gallus .
Que les hommes qui vivent dans une révolution, et qui en sont ou spectateurs éclairés ou acteurs principaux, lèguent à la postérité le dépôt fidèle de leurs souvenirs, c’est un devoir que nous réclamons d’eux ; que ceux mêmes qui, dans une situation secondaire, n’ont vu qu’un coin du vaste tableau et n’en ont observé que quelques scènes, nous apportent leur petit tribut de révélations, il sera encore reçu avec bienveillance ; et si surtout l’auteur nous peint l’intérieur d’une cour dans un temps où les affaires publiques n’étaient guère que des affaires privées, s’il nous montre au naturel d’augustes personnages dans cette transition cruelle de l’extrême fortune à l’extrême misère, notre curiosité avide pardonnera, agrandira les moindres détails ; impunément l’auteur nous entretiendra de lui, pourvu qu’il nous parle des autres ; à la faveur d’un mot heureux, on passera à madame Campan tous les riens de l’antichambre et du boudoir : mais que s’en vienne à nous d’un pas délibéré, force rubans et papiers à la main, mademoiselle Rose Bertin, modiste de la reine, enseigne du Trait galant, adressant ses Mémoires aux siècles à venir, la gravité du lecteur n’y tiendra pas ; et, pour mon compte, je suis tenté d’abord de demander le montant du mémoire.
Les sujets, les entrelacements, les rimes, tous les secrets de la métrique, il les possède ; aussi son œuvre fourmille-t-elle de bons vers, de ces vers tout d’une venue et qui sont bons partout, dans le Lutrin comme dans les Châtiments… On m’objectera que toutes ces qualités sont perdues à la scène, bref, qu’il « n’entendait pas le théâtre !
Vous raconter la comédie d’Ernest d’Hervilly, si pimpante, si subtile, si japonaise, c’est-à-dire si parisienne, et qu’une mise en scène adorablement exotique pimente si vivement ?
Ils me font l’effet de ce bouclier d’Achille longuement et péniblement forgé par Vulcain, où l’œil étonné des guerriers voyait des pampres et de douces scènes bucoliques rehaussés dans l’or splendide du métal.
Artaxerce, environné de tant de poignards, n’est réellement mort que du poison de l’ennui mortel qu’il a communiqué aux Spectateurs ; & l’on ne sait pas ce que Barnewelt seroit devenu, si on eût permis qu’il parût sur la Scène.
quelle scène étalée aux yeux du lecteur !
Après tout, il n’y a guère ici que des décors et de la mise en scène ; les sentiments sont factices ; ce sont des sentiments d’opéra ; les auteurs ne sont que d’habiles gens, manufacturiers de livrets et de toiles peintes ; ils ont du talent et point de génie ; ils tirent leurs idées, non de leur cœur, mais de leur tête. […] Dès sa première enfance, il avait été élevé parmi les récits qu’il mit en scène plus tard, celui de la bataille de Culloden, celui des cruautés exercées contre les highlanders, celui des guerres et des souffrances des covenantaires. […] Comme il a la plus riche provision de costumes et le plus inépuisable talent de mise en scène, il fait manœuvrer très-agréablement tout son monde, et compose des pièces qui, à la vérité, n’ont guère qu’un mérite de mode, mais cependant pourront bien durer cent ans. […] Mais le métal est véritablement noble, et, outre plusieurs sonnets très-beaux, il y a telle de ses œuvres, entre autres la plus vaste, Une Excursion, où l’on oublie la pauvreté de la mise en scène pour admirer la chasteté et l’élévation de la pensée. […] Faust, scène première.
Mais ce qu’on écrit, ce qu’on dit de plus judicieux, de plus fin, dans les intervalles de l’action, ne prouve pas toujours ; on ne saurait conclure de toutes les qualités de l’écrivain historien, de l’homme sorti de la scène et qui la juge, à celles de ce même homme en action et en scène. […] On voit, dans ces récits de conversations, à quel degré La Fayette a le propos historique, le mot juste de la circonstance et comme la réplique à la scène. […] « Je vous embrasse en son nom, au mien, au nom de tout ce que vous avez été pour moi depuis que nous nous connaissons. » La Fayette rentre en scène en 1815, et, à part deux ou trois années de retraite encore au commencement de la seconde Restauration, on peut dire qu’il ne quitte plus son rôle actif jusqu’à sa mort. […] Le public est ingrat ; si belle, si soutenue qu’ait été la pièce donnée à son profit, il ne veut pas que la dernière scène soit traînante, et que l’acteur principal demeure, en se croyant encore indispensable, lorsque le gros du drame est fini. […] On a beaucoup parlé de Sieyès dans ces derniers temps ; sa mort l’a remis en scène.