Médecin et praticien à Paris, il se plaisait à réunir chez lui des hommes distingués que retenaient le charme et l’intelligence de Mme Paulin : c’était le docteur Lallemand, Andral, Jouffroy, Jean Reynaud, Stourm, Littré, beaucoup d’autres.
L’idée était si juste et si opportune qu’elle a aussitôt porté fruit et porté coup ; elle a eu l’honneur, dès le premier jour, de soulever les colères de ceux qui possédaient autrefois et dominaient l’entier domaine de l’intelligence humaine et qui, jusque dans leur décadence, quand presque tout leur échappe, voudraient tout garder.
Cette mère, assez accommodante, malgré les épigrammes que Diderot lui adresse, n’opposa qu’une gêne assez légère à la bonne intelligence et aux projets des amants.
Et les gens du monde n’hésiteront pas : ils reconnaîtront dans ces modernes leurs préjugés, leur esprit, leur confiance dans la raison de leur temps et de leur classe, leur penchant à ridiculiser tout ce qui n’est pas conforme à leurs manières et accessible à leur intelligence, leur incapacité artistique, leur impuissance à goûter d’autres beautés que celles de l’esprit de conversation et de la vie élégante.
Il y a peut-être du vertige et quelque chose de l’attrait d’un crime à simuler ainsi, dans sa propre intelligence, les effets d’un tremblement de terre… Enfin, que vous dirai-je ?
Mais à l’intelligence sereine et puissante du noble Goethe, Mistral joint un flair politique très aiguisé.
Il y avait en lui du prêtre ; il avait tout l’hiératisme qui peut entrer dans une âme moderne, la conscience du sacerdoce qu’exerce l’intelligence.
Ysaye, le pianiste, quelques parents lointains dans une voiture avec Mme Jules Laforgue, Paul Bourget, Fénéon, Moréas, Adam et moi ; et la montée lente, lente à travers la rue des Plantes, à travers les quartiers sales, de misère, d’incurie et de nonchalance, où le crime social suait à toutes les fenêtres pavoisées de linge sale, aux devantures sang de bœuf, rues fermées, muettes, obscures, sans intelligence, la ville telle que la rejettent sur ses barrières les quartiers de luxe, sourds et égoïstes ; on avait dépassé si vite ces quartiers de couvents égoïstes et clos où quelques baguettes dépouillées de branches accentuent ces tristesses de dimanche et d’automne qu’il avait dites dans ses Complaintes, et, parmi le demi-silence, nous arrivons à ce cimetière de Bagneux, alors neuf, plus sinistre encore d’être vide, avec des morts comme sous des plates-bandes de croix de bois, concessions provisoires, comme dit bêtement le langage officiel, et, sur la tombe fraîche, avec l’empressement, auprès du convoi, du menuisier à qui on a commandé la croix de bois et qui s’informe si c’est bien son client qui passe, avec trop de mots dits trop haut, on voit, du fiacre, Mme Laforgue riant d’un gloussement déchirant et sans pleurs, et sur cet effondrement de deux vies, personne de nous ne pensait à la rhétorique tumulaire6. » Jules Laforgue représente le type accompli de l’intellectuel en 1880.
Les historiens ont attribué l’indifférence de Louis XIII pour sa jeune et belle reine aux soins que Marie de Médicis et le cardinal de Richelieu, alors en bonne intelligence, prenaient de concert pour l’empêcher de prendre en elle une confiance dont ils étaient jaloux.
Comment le croire aussi éclairé et aussi élevé qu’il était piquant, lorsqu’on la voit confondre les empressements du roi voluptueux, au moment d’un retour après une longue absence, avec un de ces retours de tendresse et d’affection qui attestent les douces et vives sympathies des âmes délicates et des intelligences élevées ?
L’attention est un état spécial de l’appétition, qui produit en effet l’entrée de l’objet au point de fixation ; mais c’est l’intelligence qui distingue ensuite et sépare les détails auparavant perdus ou confondus dans la masse grâce à leur insuffisante intensité.
Voyons, dans cet écrivain, rival des tragiques Grecs & de Corneille pour l’intelligence des passions, une élégance toujours soutenue, une correction admirable, la vérité la plus frappante, point ou presque point de déclamation ; partout le langage du cœur & du sentiment, l’art de la versification avec l’harmonie & les graces de la poësie porté au plus haut dégré.
La stérile fécondité de son génie, la variété de ses connoissances, quoique superficielles, l’habitude du travail, cette promptitude avec laquelle il concevoit & exécutoit des plans d’ouvrages, & surtout son intelligence à tirer parti de ceux des autres, à partager le fruit de certaines productions auxquelles il n’avoit fait que présider & prêter quelquefois sa plume & son nom ; tous ces divers moyens l’empêcherent peut-être de sacrifier, comme tant d’autres à la bassesse & d’encenser les ridicules de la grandeur & de l’opulence.
Le premier fut pour un jeune prélat romain quelle appelle du nom de Jérôme, et qui la séduisit à cette heure de la vie où les jeunes filles se prennent à autre chose qu’à de la froideur d’intelligence et à une étendue de connaissances qu’elles ne peuvent pas mesurer.
Elle trahissait sa faible intelligence des choses du cœur.
dépenaillés de physique comme d’intelligence, des faméliques de jouissances ou de renommée en guerre contre l’ordre social ; tous ne sont pas de pauvres enfants cherchant sans la trouver leur place au soleil, des Chattertons d’imitation, plus ou moins énergiques ou lâches, qui se tuent ou se laissent mourir, et dont Hégésippe Moreau ou Gérard de Nerval furent les types douloureux et coupables.
c’est un fou complet dont l’intelligence tout entière est dévorée par l’idée fixe et dont la maladie s’écoule en bavardages insensés et perpétuels.
Fût-il doué d’une intelligence surhumaine, eût-il la clef de la psychophysiologie, il ne serait éclairé sur ce qui se passe dans la conscience correspondante que tout juste autant que nous le serions sur une pièce de théâtre par les allées et venues des acteurs sur la scène.
Il est étonné que son héros, avec si peu de forces, ait tenté une guerre si importante : « Assurément, lui dit-il, vous avez quelque intelligence secrète avec l’âme universelle et divine, qui daigne se manifester à vous seul, tandis que nous, ce sont des dieux subalternes et du second ordre qui sont chargés de nous conduire. » Ensuite il ne peut comprendre qu’il se soit trouvé dans l’univers des hommes qui aient eu l’audace de résister à Constantin : « Eux qui auraient dû, lui dit-il, céder, je ne dis pas à la présence de votre divinité, mais en entendant seulement prononcer votre nom. » Bientôt après, ce lâche orateur fait un crime à son héros d’avoir combattu lui-même, et de s’être mêlé au milieu des ennemis, d’avoir par là, dit-il, presque causé la ruine de l’univers.
Au printemps, les amours sont d’intelligence ; au printemps, les oiseaux s’unissent, et la forêt, avivée par des pluies fécondes, déploie sa chevelure.
Macaulay l’aime par intérêt, parce qu’elle est la seule garantie des biens, du bonheur et de la vie des particuliers ; il l’aime par orgueil, parce qu’elle est l’honneur de l’homme ; il l’aime par patriotisme, parce qu’elle est un héritage légué par les générations précédentes, parce que, depuis deux cents ans, une succession d’hommes honnêtes et de grands hommes l’ont défendue contre toutes les attaques et sauvée de tous les dangers, parce qu’elle fait la force et la gloire de l’Angleterre, parce qu’en enseignant aux citoyens à vouloir et à juger par eux-mêmes, elle accroît leur dignité et leur intelligence, parce qu’en assurant la paix intérieure et le progrès continu, elle garantit le pays des révolutions sanglantes et de la décadence tranquille. […] S’il emprunte un témoignage, il commence par mesurer la véracité et l’intelligence des auteurs qu’il cite, et par corriger les erreurs qu’ils peuvent avoir commises par négligence ou partialité. […] Aussi, lorsque les grands orateurs consentent à écrire, ils sont les plus puissants des écrivains ; ils rendent la philosophie populaire ; ils font monter tous les esprits d’un étage, et semblent agrandir l’intelligence du genre humain. […] Les sénateurs, hommes d’affaires, les jurisconsultes, amateurs des formules et de la procédure, les massives et étroites intelligences des publicains comprennent les déductions de Chrysippe ; et le livre des Devoirs a rendu vulgaire la morale de Panætius. […] Là il serait demeuré, torturé par son humeur diabolique, affamé de mettre au pilori et de mutiler les protestants, tourmentant les cavaliers, faute d’autres, par sa sottise et son aigreur, s’acquittant dans la cathédrale de ses génuflexions et de ses grimaces, continuant cet incomparable journal que nous ne regardons jamais sans que l’imbécillité de son intelligence nous fasse oublier les vices de son cœur, notant minutieusement ses rêves, comptant les gouttes de sang qui coulaient de son nez, surveillant de quel côté tombait le sel et écoutant les cris de la chouette.
Intelligence platonique, vivant au pur soleil des idées, il ne voyait volontiers dans ce flambeau de notre univers qu’une, lanterne de plus, un moment allumée pour la caverne des ombres. […] La nature des êtres, les opérations de l’intelligence et les bornes des possibles nous sont inconnues. […] M. de Maistre, en ses Considérations et ailleurs, est, de tous les écrivains religieux, celui peut-être qui nous oblige à nous représenter de la manière la plus concevable, la plus présente et la plus terrible, le Jugement dernier ; il donne à penser là-dessus, même aux sceptiques blasés de nos jours, parce qu’il fait concevoir l’inévitable fin et le coup de filet du réseau universel, d’une manière ordonnée, toute spirituelle, tout appropriée aux intelligences sévères. […] Pour explication de ses défauts, de ses excès spirituels, de ce ton roide et tranchant, il faut penser à la solitude où il vivait, à ce manque d’un enseignement, toujours réciproque, où l’esprit enseignant se corrige à son tour et prend mesure sur celui qu’il veut former, à l’absence fréquente de discussion ou même d’intelligence égale autour de lui. […] Sa colère ressemblait tout à fait à celle de l’Écriture : « Mettez-vous en colère et ne péchez pas. » C’était un tonnerre en vue du soleil de vérité et dans les sphères sereines, la colère de l’intelligence pure.
La chasteté, la mysticité sont toujours une transposition de sensations physiques : lorsque la chair est calme, le cerveau brûle, l’intelligence flamboie. […] L’émotion que l’on éprouve en lisant, en étudiant ce volume, Fables et chansons, difficile un peu (ce qui est vraiment beau est toujours un peu caché, mystérieux, et ne se livre pas au premier regard, au premier palper des mains et de l’intelligence), — l’émotion ressentie est d’abord presque tout intellectuelle. […] Devons-nous lui reprocher, à cette malheureuse Sabine, de n’avoir pas su dissocier son intelligence de sa sensibilité ; c’est justement son métier de femme de féconder l’art, en faisant de la vie. […] Il faudrait s’expliquer, redire que l’instinct est de l’intelligence cristallisée, mais, pour certains, l’instinct et l’intelligence demeureront à tout jamais deux planètes qui gardent leurs distances : l’instinct, imperfectionnable ; l’intelligence, don gratuit d’une divinité.
sortent naturellement de l’homme d’action, lequel ne veut agir que par l’intelligence, ou par la force intelligemment. Cette intelligence, dans ses Mémoires, Commynes l’applique d’abord aux hommes. […] C’est que Louis XI avait en lui le trait distinctif où se reconnaît la force de l’intelligence. […] L’intelligence avide et curieuse de Commynes s’est appliquée aux peuples comme aux individus. […] On peut faire une église fermée avec des bonnes volontés décidées à soumettre leurs intelligences aux exigences d’un dogme, non avec des intelligences que l’on convie sans doute à se « conjoindre avec la foi », mais d’abord à s’exercer sur elle.
Le grand point, le seul est d’être doué ; le reste ne vaut pas grand-chose et n’est que du talent, ce que n’importe qui peut acquérir avec une petite intelligence et une réelle volonté. […] La vie dégradante du banal tripot n’a heureusement pas flétri son intelligence ; dès qu’il en est sorti, son esprit assoupi se réveille, et une valeur intellectuelle est rendue à la société. […] Des êtres sont au-dessus de l’humanité, leurs intelligences constellent le passé, leurs cœurs vastes sont les refuges où nous nous abritons, où nous nous réchauffons quand nous souffrons trop. […] Elle n’est douce qu’aux gens de bon sens et d’intelligence claire. […] Ils savent se disposer à merveille, ne se pressent jamais pour tirer, profitent des moindres accidents de terrain et ont une intelligence parfaite de cette guerre qu’ils font depuis cinq ans.
1834 1814 fut une grande année, d’une influence décisive sur beaucoup d’activités et d’intelligences. […] En voyant aux prises les deux partis acharnés, les libéraux et les ultra-royalistes, chacun croyant à son droit et pouvant produire également des hommes de vertu et d’intelligence, M. […] J’acquis dans cette circonstance des lumières qui me furent très-utiles, sur l’esprit de parti, sur le peu de profit que tirent les vrais littérateurs et les esprits critiques à se mêler à des groupes politiques toujours plus ou moins intolérants ; car il faut, d’un côté ou d’un autre, se fermer des vues et consentir absolument à condamner des jours à son intelligence.
. — En quoi l’intelligence humaine se distingue de l’intelligence animale […] L’enfant invente et découvre incessamment et de lui-même ; il n’y a pas d’époque dans sa vie où son intelligence soit si créatrice.
Les monuments gigantesques des Aztèques ont laissé sur la terre des traces d’intelligence et de force très supérieures jusqu’ici aux édifices exclusivement utilitaires des Américains du Nord. […] Rousseau, un Montesquieu, un Chateaubriand ; là il n’a pu être qu’un naturaliste, un peintre et un descripteur d’oiseaux d’Amérique, un Buffon des États du Nord, mais un Buffon de génie passant sa vie dans les forêts vierges, au lieu de la passer au jardin du roi et autour d’une table à écrire dans sa seigneuriale tour du château de Montbard, un Buffon voyant par ses propres yeux ce qu’il décrit et décrivant d’après nature, un Buffon enfin comprenant l’intelligence et la langue des animaux au lieu de les nier stupidement comme Malebranche, entrant dans leurs amours, dans leurs passions, dans leurs mœurs, et écrivant avec l’enthousiasme de la solitude quelques pages de la grande épopée animale de la création. […] J’échangeai alors des regards d’intelligence avec mon protecteur et redemandai ma montre à l’hôtesse.
Mais son amant s’épouvante de la splendeur même de son idole ; il craint avec raison que cette divinité d’intelligence ne puisse redescendre sur la terre au rôle modeste d’épouse obscure et de mère de famille. […] Il fit pour la littérature ce que le Génie du Christianisme de M. de Chateaubriand avait fait pour le catholicisme ; il fit plus, car dans son livre de l’Allemagne madame de Staël inaugurait une force nouvelle dans le domaine de l’intelligence et de l’art. […] L’homme grandissait aux yeux de l’homme, au lieu de se rapetisser à cette optique ; on sortait de cette étude comme d’un temple où l’on venait contempler les merveilles de l’esprit humain et où la grandeur de l’intelligence révélait la grandeur de celui qui l’a créé ; l’admiration devenait piété.
* * * — Certains mots d’une méchanceté sublime sont donnés à des femmes sans intelligence : la vipère a la tête plate. […] Il est là, toujours le même, toujours dans ses livres, avec sa mémoire, son intelligence, son ironie restée debout. […] Et nous voici arrivés à la question de l’immortalité de l’âme, cette causerie forcée, après un bon dîner, entre intelligences supérieures.
Mardi 5 février Aujourd’hui, au dîner de Brébant, on parlait de l’écrasement de l’intelligence de l’enfant, du jeune homme, par l’énormité des choses enseignées, on disait qu’il se faisait sur la génération présente, une expérience dont on ne pouvait guère prévoir ce qu’il en sortirait dans l’avenir. […] Au fond, dans ces colères contre ma préface, ce qui m’étonne, c’est le peu d’ouverture de ces intelligences de critiques, qui blaguent tous les jours l’absence de sens artistique, chez les bourgeois. […] * * * — Je suis revenu ce soir, de Saint-Gratien, avec Primoli, et nous causions en chemin de fer, des cruels moments qu’on passe avec les êtres, dont l’intelligence est entamée, nous parlions de ces désespoirs énervés, de ces colères intérieures, de ces fuites de la maison, à la suite desquelles on bat la campagne, en coupant les fleurs avec sa canne !
À ce dîner, le colonel Yung disait que l’intelligence de Mac-Mahon, — reconnue par tous assez médiocre — fouettée par la mitraille, s’éclairait, grandissait, devenait surprenante, tandis que celle de Bourbaki, cependant d’une valeur héroïque, se perdait, tombait en enfance. […] Il nous parle de la séduction à la Circé, de la séduction fascinatrice de cette maison, qui lui faisait passer toute la journée à la mairie, en regardant, à tout moment, sa montre, et appelant l’heure, où il lui serait donné de prendre son envolée vers ce Portique Batignollais, où, du dîner jusque bien avant dans la nuit, un cénacle de jeunes et révoltées intelligences, se livraient, fouettées par l’alcool, à toutes les débauches de la pensée, à toutes les clowneries de la parole, remuant les paradoxes les plus crânes, et les esthétiques les plus subversives, dans la surexcitation d’une jolie femme, d’une Muse légèrement démente. […] Porel a, dans les répétitions, quelque chose qui serait charmant à introduire dans un roman sur le théâtre : c’est pour l’intelligence des cabotins et des cabotines, la traduction en langue vulgaire, de toutes les situations où ils se trouvent, et la façon d’en sortir.
Ils vouaient leur génie à cette œuvre illusoire ; Se fiant à lui seul, ils ne pouvaient pas croire Qu’ayant l’intelligence ils dussent regarder. […] La sympathie de Leconte de Lisle n’est que celle de l’intelligence, qui baigne tout de sa même lumière immobile et sereine. […] Ce culte des formes, par lequel il se rattache à la Grèce, n’exclut pas une sorte de dédain profond et final pour un monde qui, par cela même qu’il n’a d’intéressant que ces formes où se mire l’intelligence, n’est en somme qu’un monde d’apparences et d’illusions.
En Allemagne, Hoffmann40 était une de ces intelligences ; Jean-Paul aussi, à un degré moindre ; Novalis et d’autres, plus nombreux qu’ailleurs dans ce pays de l’Abstraction et du Rêve. […] Sans doute, pour rendre probables et acceptables les explications qu’il nous donne, l’auteur du Scarabée d’or montre un talent très particulier ; il déploie une force d’intelligence qui briserait tous les casse-têtes chinois, et on perd l’haleine à le suivre dans ses inductions audacieuses ; mais le fantastique a disparu, et on ne voit plus à la place du rêveur qu’une nature robuste, ingénieuse, acharnée, qui lutte contre la difficulté et qui veut la vaincre. […] Baudelaire en convient implicitement lui-même par cette appréciation juste et profonde du talent de son auteur : « Aucun homme n’a raconté avec plus de magie les exceptions de la vie humaine et de la nature ; — les ardeurs de curiosité de la convalescence ; — les fins de saisons chargées de splendeurs énervantes, les temps chauds, humides et brumeux, où le vent du sud amollit et détend les nerfs comme les cordes d’un instrument, où les yeux se remplissent de larmes qui ne viennent pas du cœur ; — l’hallucination… l’absurde s’installant dans l’intelligence et la gouvernant avec une épouvantable logique ; — l’hystérie usurpant la place de la volonté, la contradiction établie entre les nerfs et l’esprit, et l’homme désaccordé au point d’exprimer la douleur par le rire. » Si on fait le compte de ces puissances, on se demande où, dans tout cela, se trouve la place de l’âme humaine.
Avec cela il aima vivement les Lettres et les alla prendre à leur source ; il aima et cultiva plusieurs des grands hommes de son temps en ce genre, Despréaux, Bayle, le président Bouhier, se fit estimer d’eux, leur fut des plus utiles comme auditeur plein de justesse et de savoir, comme informateur aussi et correspondant excellent ; il est si bien entré dans les intérêts de leur gloire et dans l’intelligence de leur esprit, qu’il est impossible de parler d’eux au complet, sans parler un peu de lui. […] L’intelligence du critique y gagnera.
Il ne me déplaît pas que Mme Sand, le grand paysagiste, soit produite comme interprète dans l’intelligence de Virgile. […] Mais je ne voudrais à aucun prix être privé de son édition, non plus que de celle de Burmann : elles sont absolument essentielles, à mon jugement, non seulement pour un examen critique, mais encore pour une intelligence élégante de ce parfait et délicieux auteur. » (Lettre à Fox, du 22 avril 1801.)
Toutes les vertus que possède l’abbé Carron ravissent son cœur, et les qualités même qu’il n’a pas, ses limites du côté des idées du siècle et dans l’ordre de l’intelligence philosophique, lui semblent une vertu de plus, un signe de perfection et d’avancement dans la ligne évangélique. […] Si l’on a remarqué avec raison que les grandes crises révolutionnaires et les tempêtes politiques ont pour effet de ramener en foule les naufragés et les vaincus au pied des autels, cela n’est pas moins vrai des intelligences supérieures que l’imagination ou que la sensibilité domine, et qui sont tentées dans ces terribles catastrophes de voir et de discerner comme deux plans et deux sphères, l’inférieure où les lutteurs humains se combattent, la supérieure qui en est comme la transfiguration et où se déroulent dans leur harmonie les causes providentielles.
Mais au fond c’était une nature soumise, non raisonneuse, altérée des sources supérieures, encline à la spiritualité, largement crédule à l’invisible ; une intelligence de la famille de Malebranche en métaphysique ; une de ces âmes qui, ainsi qu’il l’a dit de sa Cécile, se portent d’une ardeur étonnante de sentiments vers un objet qui leur est incertain pour elles-mêmes ; qui aspirent au bonheur d’aimer sans bornes et sans mesure, et s’en croient empêchées par les ténèbres des sens et le poids de la chair. […] Son désintéressement au milieu de ces sources de faveur et même de richesse ne se démentit pas ; il se refusait aux combinaisons qui lui eussent été le plus fructueuses ; il abandonnait les profits à son libraire, avec qui on a remarqué (je le crois bien) qu’il vécut toujours en très-bonne intelligence.
De ce fatras se dégage immédiatement avec évidence un esprit général qui est tout contraire à l’aristocratique délicatesse de Guillaumede Lorris : et ce n’est pas la moindre singularité de l’ouvrage que cette absolue incompatibilité des deux intelligences qui l’ont faite. […] La raison ne distingue les individus que selon l’inégalité naturelle : la force physique, que notre penseur est loin de mépriser, mais surtout l’intelligence et la science, voilà ce qui élève les hommes et leur confère une dignité supérieure.
La langue enguirlandée d’épithètes douceâtres ou pompeuses est | un pastiche d’Homère, où l’on sent trop d’élégance aristocratique et d’intelligence spirituelle. […] Dans le Traité de l’existence de Dieu 459, dont la première partie est bien antérieure à la seconde, nous retrouvons cette fécondité de vues qui est un des caractères de Fénelon, et cette souplesse d’intelligence qui s’assimile toutes les connaissances.
L’objet de Vigny n’est pas une étude de caractère, une analyse de sentiments : c’est de manifester une idée philosophique. « J’ai voulu montrer l’homme spiritualiste étouffé par une société matérialiste, où le calculateur avare exploite sans pitié l’intelligence et le travail. » Chatterton est le symbole (le mot est de Vigny) du poète. […] Fournisseur ordinaire du Gymnase depuis sa fondation (1820), applaudi souvent à la Comédie-Française, il offre à la bourgeoisie exactement le plaisir et l’idéal qu’elle réclame : elle se reconnaît dans ses pièces, où rien ne déroute son intelligence.
Et l’espèce d’éblouissement qui m’est resté dans les yeux après cette lecture n’est-elle pas le meilleur hommage, étant le plus involontaire, que je puisse rendre au plus puissant assembleur de mots qui ait sans doute paru depuis que l’univers existe, depuis qu’il y a des yeux pour voir les objets matériels, des intelligences pour concevoir des idées, des imaginations pour découvrir les rapports cachés entre tout le visible et tout cet invisible, et des signes écrits dont les combinaisons peuvent exprimer ces rapports ? […] Tous les progrès de l’intelligence humaine en ce siècle se sont accomplis par d’autres que lui.
Trésor, comparativement à l’effusion d’intelligence, lui, modique selon mes calculs et je n’en cache une satisfaction ; mais absolu : il suffit, prélevé pour le principe, à un délicat et légitime emploi. […] Cette élite qui rompt, par zèle, avec les carrières convenues, encourt souvent la peine et l’hésitation : de qui, mieux ou plus fièrement, accepter l’aide, que d’aïeux par l’intelligence, dont elle tient sa vocation ?
Il se croit intéressé au triomphe de cet instinct : il emploie à son service toutes les ressources de son intelligence et de sa volonté, et cette, lutte se termine au profit d’un être où il ne se reconnaît plus lui-même. […] Au regard de l’intelligence populaire, progrès est synonyme de bonheur.
Les socialistes définissent Edmond Lapierre, « un des meilleurs d’entre les militants de la jeune génération », et disent que « dans la région d’Ivry et de Villejuif, nul n’avait lutté avec autant de dévouement et d’intelligence ». […] De même quand ils lisent les journaux, ils accueillent les nouvelles avec une feinte indifférence, mais se trouvent à table très bien informés et discutent avec compétence et intelligence des questions de mouvement.
Il est un personnage surtout, depuis cinquante ans, vénérable aux amis de la liberté, et que M. de Carné n’aborda jamais qu’avec une sorte d’ironie méprisante qui sied mal à une intelligence si grave, si morale, et si faite pour honorer tant de constance dans une grande cause.
La vie, le sentiment de la réalité, y respirent ; de frais paysages, l’intelligence poétique symbolique de la nature, une conversation animée et sur tous les tons, l’existence sociale du xviiie siècle dans toute sa délicatesse et sa liberté, des figures déjà connues et d’autres qui le sont du moment qu’il les peint, d’Holbach et le père Hoop, Grimm et Leroy, Galiani le cynique ; puis ces femmes qui entendent le mot pour rire et qui toutefois savent aimer plus et mieux qu’on ne prétend ; la tendre et voluptueuse madame d’Épinay, la poitrine à demi nue, des boucles éparses sur la gorge et sur ses épaules, les autres retenues avec un cordon bleu qui lui serre le front, la bouche entr’ouverte aux paroles de Grimm, et les yeux chargés de langueurs ; madame d’Houdetot, si charmante après boire, et qui s’enivrait si spirituellement à table avec le vin blanc que buvait son voisin ; madame d’Aine, gaie, grasse et rieuse, toujours aux prises avec le père Hoop, et madame d’Holbach, si fine et si belle, au teint vermeil, coiffée en cheveux, avec une espèce d’habit de marmotte, d’un taffetas rouge couvert partout d’une gaze à travers la blancheur de laquelle on voyait percer çà et là la couleur de rose ; et au milieu de tout ce monde une causerie si mélangée, parfois frivole, souvent souillée d’agréables ordures, et tout d’un coup redevenant si sublime ; des entretiens d’art, de poésie, de philosophie et d’amour ; la grandeur et la vanité de la gloire, le cœur humain et ses abîmes, les nations diverses et leurs mœurs, la nature et ce que peut être Dieu, l’espace et le temps, la mort et la vie ; puis, plus au fond encore et plus avant dans l’âme de notre philosophe, l’amitié de Grimm et l’amour de Sophie ; cet amour chez Diderot, aussi vrai, aussi pur, aussi idéal par moments que l’amour dans le sens éthéré de Dante, de Pétrarque ou de notre Lamartine ; cet amour dominant et effaçant tout le reste, se complaisant en lui-même et en ses fraîches images ; laissant là plus d’une fois la philosophie, les salons et tous ces raffinements de la pensée et du bien-être, pour des souvenirs bourgeois de la maison paternelle, de la famille, du coin du feu de province ou du toit champêtre d’un bon curé, à peu près comme fera plus tard Werther amoureux de Charlotte : voilà, et avec mille autres accidents encore, ce qu’on rencontre à chaque ligne dans ces lettres délicieuses, véritable trésor retrouvé ; voilà ce qui émeut, pénètre et attendrit ; ce qui nous initie à l’intérieur le plus secret de Diderot, et nous le fait comprendre, aimer, à la façon qu’il aurait voulu, comme s’il était vivant, comme si nous l’avions pratiqué.
Conseil, le sentiment des partis et des nécessités de circonstance, c’est l’intelligence de la marche ardente d’une révolution et des métamorphoses qu’elle subit tout en se poursuivant.
Lerminier, doué comme il l’est d’une intelligence vaste et progressive, tendant, comme il le fait, à une œuvre d’avenir où un si beau rang l’attend et où il convie en toute occasion avec tant d’ouverture de cœur ses contemporains amis et les générations plus jeunes dont il est un des maîtres, M.
Borné du côté de l’intelligence, il a une sensibilité démesurément irritable et vibrante.
La plus forte intelligence religieuse de ce temps qui est en même temps le métaphysicien le plus hardi et le plus puissant, c’est M.
C’est elle qui nous montre combien l’homme est petit par le corps et combien il est grand par l’esprit, puisque cette immensité éclatante où son corps n’est qu’un point obscur, son intelligence peut l’embrasser tout entière et en goûter la silencieuse harmonie.
C’est l’instant où va se produire un schisme parmi les philosophes, où Rousseau va disputer à Voltaire la royauté des intelligences, où la sensibilité va s’opposer à la raison, où le courant négatif en matière religieuse va entrer en lutte avec un courant positif qui ramène les esprits vers le christianisme et les doctrines spiritualistes.
Une infirmité naturelle suffit à faire dévier une intelligence et un talent ; un myope ne verra pas et, par conséquent, ne peindra pas les choses comme celui qui a la vue longue et perçante.
Quelque mauvais que soit le goût de gens liés par une conversation habituelle, il faut qu’ils se forment un langage raisonnable, toute conversation est une épreuve par laquelle chacun essaie son langage à l’intelligence, au goût, aux affections des auditeurs ; là, ce n’est pas la critique qui éclairé, c’est l’impression que fait la parole sur ceux à qui elle s’adresse.
Lui ou elle, masculin ou féminin, Mendès s’en fiche, qui écrivit dans le Journal du 6 mars 1897 : « L’accomplissement de cette chimère, les États-Unis de l’intelligence humaine, est-elle souhaitable ?
Ce n’est que le récit d’un fait singulier qui prouve l’intelligence des animaux.
Les modernes croïant que carmen eut toujours la signification abusive qu’il a dans les vers de Juvenal qui viennent d’être rapportez, et où il veut dire simplement des vers, la signification propre de ce mot leur a échappé, et faute d’en avoir eu l’intelligence, ils n’ont pas connu que les anciens avoient une déclamation composée, et qui s’écrivoit en notes sans être pour cela un chant musical.