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1185. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verhaeren, Émile (1855-1916) »

Et les personnages, se figurait-on, vivraient d’une vie différente de celle des autres hommes : leur extase dissiperait nos pauvres, mais si passionnantes psychologies ; et même au théâtre on rêvait un poème brûlant où éclaterait seul le génie du poète des Villes tentaculaires reprenant ses lointaines évocations de Moines… On se trompait.

1186. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre III. Soubrettes et bonnes à tout faire »

Les personnages sont des fantoches absurdes et leurs conversations essaient seulement d’être drôles.

1187. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 140-155

Les Lettres de la nouvelle Héloïse, considérées comme un Roman, n’ont presque rien de commun avec les regles qu’on doit observer dans ces sortes d’Ouvrages ; plan mal ordonné, intrigue vicieuse, développement pénible & trop lent, action foible & inégale, caracteres hors de nature, personnages dissertateurs, & par-là même ennuyeux.

1188. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Madame Therbouche » pp. 250-254

Il y a sur la table un garde-vue interposé entre le spectateur et ce personnage ; ainsi, tout ce qui est en deçà du garde-vue est dans la demi-teinte.

1189. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 9, de la difference qui étoit entre la déclamation des tragedies et la déclamation des comedies. Des compositeurs de déclamation, reflexions concernant l’art de l’écrire en notes » pp. 136-153

Lucien qui nous a conservé une description curieuse des personnages des tragedies et des comedies dans la conversation qu’il fait avoir à Solon avec Anacharsis, y fait dire à ce philosophe tartare que les acteurs de comedie ne déclamoient pas avec autant d’emphase que les acteurs qui recitoient des tragedies.

1190. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Le marquis de Grignan »

II Eh bien, cette histoire qui paraissait impossible, cette histoire sans personnage historique, — ce qui ne s’était jamais vu, — Frédéric Masson l’a entreprise, et, qui plus est, il l’a faite, et il l’a faite intéressante !

1191. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Bruyère » pp. 111-122

« Lors donc — continue Destailleur — qu’il s’agira de personnages connus et historiques, de faits ou de détails de quelque importance (comme si tout n’était pas important dans la question !)

1192. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Madame Sand »

Adolphe Guéroult, alors saint-simonien, ne sont plus de simples lettres comme on en écrit à ses amis, mais des pages ambitieuses de politique et de morale adressées, en vue peut-être du public, à des personnages solennels.

1193. (1889) Ægri somnia : pensées et caractères

Depuis quelque temps, le vide du personnage me donnait sur les nerfs, et je cherchais un honnête prétexte pour rompre. […] En vain tous les témoignages s’accordent-ils pour faire tenir à un personnage telle ou telle conduite, si ce personnage ne lui agrée pas, c’est assez pour qu’il lui en prête une toute contraire, qui donne raison à sa prévention. […] Qui donc a fait de moi, presque sans moi, une façon de personnage ? […] J’admirais comme tout le monde le personnage, quoique à ma manière, en retranchant de son mérite ce que la prévention politique y avait ajouté de convenu, soit en bien, soit en mal. […] Au lieu de paroles, nous échangeâmes, Claude Bernard et moi, sur le procédé du personnage, un regard qui disait toute notre pensée, et nous nous séparâmes.

1194. (1913) Le mouvement littéraire belge d’expression française depuis 1880 pp. 6-333

On croirait voir les personnages de Téniers et de Jordaens se détacher de la toile, gesticuler, hurler… Ah ! […] C’est elle, le personnage principal ; où ne la trouve-t-on ? […] Oreste, Ajax s’insurgent contre leur destin, les personnages de Maeterlinck le subissent. […] Dans Étude de jeune fille, Les Racines, L’Eau et le Vin, point de personnages agités, point d’actions orageuses, mais des atmosphères qui enveloppent et laissent rêveurs. […] D’autres personnages du Jardinier de la Pompadour s’appellent, non sans saveur, Nicole Sansonet, Eustache Chatouillard, Euphémin Gourbillon, Agathon Piedfin… 39.

1195. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

De là leur goût pour la rhétorique et tous ses prestiges et tous ses procédés, de telle sorte et à tel point que les mots sophiste et rhéteur désignaient presque les mêmes personnages et étaient pris très fréquemment l’un pour l’autre. […] Pour cela je m’engage à ne donner des ridicules qu’à ceux de mes personnages qui n’auront aucune beauté morale, et à ne donner aucun ridicule à ceux qui auront une beauté morale plus ou moins grande. De cette façon, vous aurez satisfaction des deux côtés : le genre d’attrait que contient en lui le ridicule, vous le trouvez dans les personnages que vous pouvez mépriser ; le genre d’attrait qu’a la beauté morale, vous le trouverez chez les honnêtes gens de ma pièce. […] Il veut que les beaux rôles y soient réservés à des personnages qui excitent l’admiration, dont la conduite puisse faire leçon. […] Cependant, parce que le poème épique est lointain, parce qu’il est légendaire, parce qu’il nous montre des personnages appartenant à une autre civilisation que la nôtre, surtout parce qu’il est un récit et qu’un récit met toujours plus loin de nous les personnages présentés que ne ferait un poème dramatique, la foule, encore que très sévère sur la moralité générale du poème épique, lui passe assez facilement quelques choses insuffisamment satisfaisantes à cet égard et se contente assez communément que le poème épique ne blesse pas les mœurs et fasse vivre des personnages d’une certaine élévation.

1196. (1856) Cours familier de littérature. II « Xe entretien » pp. 217-327

Il y fit jouer à la France le principal personnage dans tous les excès et dans tous les désastres de sa gloire. […] Le costume annule pour moi le personnage ; la nature est nue. […] La foule s’était composé un lord Byron factice, d’après quelques excentricités de sa jeunesse, d’après quelques audaces de pensée et d’expression, mais surtout par son obstination à identifier le poète avec les personnages imaginaires de ses poèmes, types qui ne ressemblaient en rien au Byron que j’ai connu. […] C’est chez elle que j’approchais de près, dans un cercle intime resserré et quotidien, les personnages consulaires les plus notables du temps, qui faisaient alors leur nom et qui l’ont laissé depuis à l’histoire : M. 

1197. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers, Tome xix. (L’île d’Elbe, — L’acte additionnel. — Le champ de mai.) » pp. 275-284

jamais il n’a eu plus d’esprit qu’en peignant tous ces personnages de la cour de Louis XVIII et ce roi lui-même.

1198. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Hommes et dieux, études d’histoire et de littérature, par M. Paul De Saint-Victor. »

Il excelle, à propos des nouveautés qui passent, à se tailler un sujet à part dans une étoffe souvent vulgaire qu’il rehausse aussitôt, à en détacher et à y découper pour son compte un personnage historique, une grande figure, un type, et il s’y applique, il s’y déploie avec sa vigueur d’expression, sa couleur éblouissante, avec son instruction et sa vaste lecture toujours neuve, originale, inventive et heureuse d’allusion et d’à-propos, qui n’a rien de banal ni d’usé dans ses citations, et qui même, lorsqu’elle sort d’un coffre antique, a la splendeur d’une étoffe d’Orient. « Quand je lis Saint-Victor, je mets des lunettes bleues », disait Lamartine.

1199. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Virgile et Constantin le Grand par M. J.-P. Rossignol. »

Je ne suis pas un si fervent adorateur de Théocrite que l’était Huet, qui nous apprend lui-même que, dans sa jeunesse, chaque année au printemps, il relisait le poëte de Sicile ; j’ai pourtant fait plus d’une fois le charmant pèlerinage, et chaque fois, après avoir admiré la vivacité spirituelle et ingénue des personnages, la grâce piquante et naïve du dialogue, la vérité des peintures, je me suis préoccupé de la construction du vers, de ces ressorts cachés que le poëte met en jeu pour produire plusieurs de ses effets. » Le résultat de ces observations multipliées et patientes, c’est que le dactyle peut s’appeler l’âme de la poésie bucolique , et que, sans parler du cinquième pied où il est de rigueur, les deux autres places qu’il affectionne dans le vers pastoral sont le troisième pied et le quatrième, avec cette circonstance que le dactyle du quatrième pied termine ordinairement un mot, comme pour être plus saillant et pour mieux détacher sa cadence.

1200. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

Mais quand Dorante a pris la parole ou la plume, nous avons cru que Dorante, c’était vous ; nous l’avons cru jusqu’à la fin de son Étude ; et voilà que Lysidas dans sa Réponse (quels personnages !

1201. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Réponse à M. Dubout. » pp. 305-316

Et je n’ai point parlé des « grâces niaises » de Mlle Bertiny, que je regarde au contraire comme une comédienne très fûtée, mais de la « grâce niaise de Néra », personnage de M. 

1202. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Régnier, Henri de (1864-1936) »

Et sur la scène, derrière un voile de gaze, tels de véritables personnages de songe, s’agitaient des fantoccini, mimant les paroles prononcées par les acteurs, représentations allégoriques des entités verbales.

1203. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XV. La commedia dell’arte au temps de Molière et après lui (à partir de 1668) » pp. 293-309

De nouveaux artistes étaient venus d’autre part renforcer la troupe : Giuseppe Giraton ou Giaratone, d’abord gagiste, puis sociétaire, ressuscita, en 1673, le personnage de Pierrot.

1204. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’Âge héroïque du Symbolisme » pp. 5-17

Des acteurs et des modèles feront les personnages immobiles et muets.

1205. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » pp. 24-41

L’Auteur a trop oublié que, dans un Poëme comme dans un Tableau, tout doit se rapporter au personnage principal ; que les figures du second ordre ne doivent avoir d’action, d’attitude, & d’énergie, que pour faire ressortir la figure essentielle.

1206. (1682) Préface à l’édition des œuvres de Molière de 1682

Monsieur de Molière faisait le Docteur, et la manière dont il s’acquitta de ce personnage le mit dans une si grande estime, que sa Majesté donna ses Ordres pour établir sa Troupe à Paris.

1207. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre huitième. »

Dom pourceau raisonnait en subtil personnage.

1208. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 12, des siecles illustres et de la part que les causes morales ont au progrès des arts » pp. 128-144

Ce genre de mérite faisoit d’un homme du commun un personnage, et il l’égaloit à ce qu’il y avoit de plus grand et de plus important dans un état.

1209. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre III. Mme Sophie Gay »

» Et enchantée de cette idée, bonne tout au plus pour une comédie de société, elle ajoute plus bas : « Il n’est pas de grand talent, de grand personnage plus choyé que l’homme ridicule dont la manie doit occuper et divertir une société entière, toute une réunion de moqueurs… » Mais s’il y a d’autres ridicules que des ridicules gais, s’il y en a de tristes, par exemple, sa thèse à l’instant même s’ébrèche sur le bonheur des gens ridicules qui rappelle, du reste, un peu trop un autre livre, le livre de M. 

1210. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Jacques Demogeot » pp. 273-285

Les groupes qui le composent étant nombreux et surchargés de personnages ; l’auteur n’a pas la possibilité — avec les limites qu’il s’est imposées — de s’arrêter sur chaque figure qui mérite l’étude et le détail.

1211. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Camille Desmoulins » pp. 31-44

Et il ajoutait : « J’ai abaissé et élevé tous les personnages de la Révolution1. » Plaisante distraction d’une girouette qui se croyait le vent !

1212. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. de Vigny. Œuvres complètes. — Les Poèmes. »

Enfin, il y a un admirable artiste encore dans beaucoup de Poèmes antiques ou modernes du recueil publié aujourd’hui, par exemple, Dolorida, poème byronien, un bas-relief pour la netteté avec des personnages modernes pour la passion et pour le geste ; Suzanne au Bain et la Toilette d’une Dame romaine, intailles qu’on eût crues gravées par André Chénier ; Le Cor, la ballade de Roncevaux, où se trouvent de ces vers jaillis comme l’eau, d’une source, et quoi que deviennent les littératures décadentes qui se tordent dans leur convulsive agonie, éternellement limpides, jaillissants et frais : Oh !

1213. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Mistral. Mirèio »

Mistral sont naïves, dans leur pittoresque, et les personnages qu’il met en scène, des êtres essentiellement primitifs.

1214. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Charles Didier » pp. 215-226

Il a aussi des anti-élégances : « Je suis trop poli pour vous démentir », fait-il dire aux personnages des belles compagnies qu’il invente.

1215. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre VII. Dernières preuves à l’appui de nos principes sur la marche des sociétés » pp. 342-354

De même que les poètes guidés par leur art portèrent les personnages et les masques sur le théâtre, les fondateurs du droit, conduits par la nature, avaient dans des temps plus anciens, porté sur le forum les personnes (personas) et les emblèmes110. — Incapables de se créer par l’intelligence des formes abstraites, ils en imaginèrent de corporelles, et les supposèrent animées d’après leur propre nature.

1216. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre V. »

Que le personnage ait été fabuleux ou vrai, il y avait donc fort anciennement des vers répandus sous son nom.

1217. (1866) Dante et Goethe. Dialogues

Je ne voyais pas comment je pourrais m’intéresser à des personnages énigmatiques à ce point qu’on ne sait jamais, par exemple, si c’est Virgile ou la raison, Béatrice ou la théologie, qui parlent. […] Placé sur le devant de la scène, un coryphée récitait ou chantait, en prose ou en vers, l’action que les personnages de bois exprimaient par leurs gestes. […] De très saints personnages les recommandaient comme lecture de carême. […] L’émotion était instantanée ; l’intérêt pour les personnages, l’adoration pour les divinités représentées, se confondaient avec l’enthousiasme pour le talent qui les figurait aux yeux. […] On entre dans un lieu ouvert, lumineux et haut, où Dante voit passer des personnages à l’air majestueux.

1218. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Dans ce poème dédié à Victor Hugo, Moïse, conversant avec Dieu face à face sur la montagne, se plaignait de sa charge terrible de conducteur de nation et de sa grandeur solitaire, et il n’était pas malaisé de deviner le personnage agrandi du poète sous le masque du prophète. […] Et puis, pour parer au mal, il faudrait, à la tête de cet ordre de la société et dans les premiers rangs du pouvoir, je ne sais quel personnage de tact, de goût à la fois et de bonté, qui choisît, qui devinât, qui sût, qui fût comme s’il était du métier et qui n’en fût pas, qui aimât les belles choses pour elles-mêmes, qui discernât les talents, qui les protégeât sans leur rien demander en retour, ni flatterie, ni éloge, ni dépendance…, un Mécène comme il ne s’en est jamais vu. […] J’ai dû, comme je l’aurais fait dans une page de Mémoires, rappeler, puisque je l’avais très-présente, l’action elle-même, et surtout ne pas laisser travestir et dénaturer le personnage de M. 

1219. (1858) Cours familier de littérature. V « XXXe entretien. La musique de Mozart (2e partie) » pp. 361-440

Les réponses de Zerlina, le dialogue de Leporello avec Masetto, dont la jalousie est constamment en éveil, les éclats de la foule, tout cela forme un ensemble que dessinent harmonieusement les aparté des divers personnages. […] Pendant que don Juan danse avec Zerlina en lui disant mille douceurs, Leporello cherche à distraire Masetto ; les trois personnages masqués observent dans un coin la conduite de don Juan, qui leur arrache de temps en temps des soupirs douloureux et des exclamations d’horreur. […] Nous n’échappons pas nous-même à la toute-puissance sensuelle de ce spectacle où le poète compose et versifie, où le peintre décore, où l’architecte construit, où la danseuse enivre l’œil par la beauté, le mouvement, l’attitude ; où le déclamateur récite, où le personnage tragique ou comique rit et pleure, se passionne, tue ou meurt en chantant ; où l’orchestre enfin, semblable au chœur de la tragédie antique, accompagne et centuple toutes ces impressions du drame par ces soupirs ou par ces tonnerres d’instrumentation savants qui caressent ou qui brisent chaque fibre sonore du faisceau de nos nerfs en nous.

1220. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

Le poème de Pulci, premier type de don Quichotte et source inépuisable où puisa Arioste, le grotesque cieco da Ferrara ; le Roland amoureux de Boïardo, merveilleuse débauche de verve de ce poète, dans lequel Arioste n’eut qu’à prendre tous ses personnages, déjà familiers à la multitude de son temps ; tous ces poèmes héroï-comiques et beaucoup d’autres moins célèbres ouvraient la voie à Arioste : il n’avait qu’à y marcher mieux que ses devanciers. Il allait se jeter dans des chemins déjà frayés à travers des aventures déjà populaires, et faire mouvoir des personnages historiques ou romanesques déjà familiers à l’esprit du siècle : seulement il pouvait à son gré prendre ces personnages au sérieux, comme le Dante ou le Tasse, ou les prendre en bouffonnerie comme le Pulci ou le Boïardo, ou enfin les prendre en bonne et gracieuse plaisanterie héroïque, comme il le fit lui-même.

1221. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (2e partie) » pp. 81-159

Comme l’autre personnage officiel, le conseiller d’État Crétet, en affirmait autant, et protestait ne rien savoir, et ne pouvoir admettre ce que j’avançais sur la diversité de la rédaction, jusqu’à ce que je la leur eusse démontrée par la confrontation des deux copies, je ne pus m’empêcher de me retourner vivement vers l’abbé Bernier. […] Tandis que ces nombreux personnages défilaient successivement, et que les cardinaux, confondus dans la foule et sans le moindre égard pour leur dignité, dévoraient ces humiliations en attendant que le héraut d’armes ou le maître des cérémonies, qui était à la porte, les appelât enfin, on vit tout d’un coup s’élancer de la salle du trône un officier chargé d’un ordre de l’empereur. […] Je leur promis que cette nuit-là même nous rédigerions la lettre, et que dès les premières heures du jour on la consignerait au ministre des cultes, personnage le plus important de l’affaire et chargé par l’Empereur de l’exécution de ses ordres.

1222. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre septième »

Elle est vraie de lui, cette parole du Christ à ses disciples : « Je demeure en vous, et vous demeurez en moi. » Dieu, le Christ, la Vierge, les saints, c’était là sa compagnie durant ces longues années de retraite où il vécut abîmé dans les Ecritures et les Pères, s’en rendant tous les personnages présents par la puissance de l’imagination et de la foi. […] Voici, par exemple, un homme qui professe, entre autres maximes, « qu’on ne gagne point les hommes sans les tromper ; que l’honneur est la chimère des fous, qu’il y a peu de sciences certaines ; que l’homme du monde le plus digne d’envie est celui qui a le plus d’empire sur l’esprit d’autrui ; que l’homme le plus heureux et le plus libre est celui qui a le moins de préjugés et de devoirs. » Quel est au juste ce personnage ? […] Et cet autre personnage que Vauvenargues nous montre passant toute la matinée à se laver la bouche, n’est-ce point Othon lui-même ?

1223. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Chaque semaine, tous les personnages de l’histoire et du roman, depuis la famille des Atrides jusqu’au monde de Rétif de La Bretonne, sont les têtes de Turc, par-dessus lesquelles il tape sur ses contemporains, et il se figure, avec une candeur qui étonne, que tout Paris, toute la France, toute l’Europe le comprend et saisit les masques. […] Son nom, qui est quelque part dans un contrat de vente, je l’ai oublié, mais le personnage était un vieux marchand de sabots, — oui, un marchand de sabots artiste, — qui, sa fortune faite, avait donné asile, pendant deux ou trois ans, à deux sculpteurs italiens de passage dans la province, et qui, affolé de musique et de gentille sculpture, sur les marches de son perron, devant la fête de la façade de sa maison, amusait les échos de la grande place, debout toute la journée, penché sur le radotage d’un antique violon. […] Un homme admirable, après tout, ce Paul de Kock, pour avoir appris au public la révolution des légendes Pitt et Cobourg, pour avoir immortalisé poncivement tous ces types consacrés qui traînent dans les mémoires idiotes, toutes ces vieilles connaissances du préjugé populaire, tous ces personnages du drame salé de gros rires et de larmes bêtes : l’émigré hautain, le jeune républicain sentimental, platonique et honnête, la femme, adultère déesse de la liberté, le portier dénonciateur dont le caractère moral est une queue de renard à son bonnet… Oh !

1224. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1872 » pp. 3-70

Samedi 6 janvier Je suis à la première d’Aïssé ; j’ai devant moi le décor ridicule du salon de Ferriol — et ce salon, du moins le vrai, l’authentique, je le connais bien, car je l’ai découvert et fait acheter à mon cousin Alphonse de Courmont, ses boiseries 3 000 francs, — qu’il eût payées 30 000 chez Vidalenc — eh bien, parole d’honneur, les personnages de Bouilhet sont plus faux que ce décor. […] 11 janvier Ces jours-ci, trouvant dans la rue de la Paix un encombrement de voitures de maîtres, tout semblable à celui d’une première au Théâtre Français, je me demandais quel était le grand personnage qui avait sa porte assiégée par tant de grand monde, quand, levant les yeux au-dessus d’une porte cochère, je lus : « Worth ». […] Sardou voit la jeune fille… Et il devient amoureux, ainsi que pourrait le devenir un personnage de ses pièces.

1225. (1903) La renaissance classique pp. -

Les personnages étant tous morts, ou mariés, ou établis, la morale étant satisfaite ou horriblement outragée, il n’y a plus rien à dire, l’auteur a rempli tout son rôle ! […] Tel récit de l’Évangile ou de la Bible n’est qu’une gradation d’attitudes, un groupement de personnages, le triomphe d’une tonalité. […] Sortons maintenant des symboles et résumons la pensée qui s’en dégage : Si l’on ordonne la matière d’un livre comme une vivante architecture, et si, de plus, on est circonspect à ne rien écrire qui n’entretienne l’émotion génératrice d’où l’œuvre est sortie, qui n’éclaire sous une face nouvelle l’idée d’art que l’on veut traduire, qui ne serve enfin à expliquer l’âme des personnages, à justifier telle ou telle de leurs démarches ou même tels de leurs gestes, — alors la forme et la matière se pénétreront dans une juste connexion.

1226. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Benjamin Constant et madame de Charrière »

Benjamin Constant et madame de Charrière96 Rien de plus intéressant que de pouvoir saisir les personnages célèbres avant leur gloire, au moment où ils se forment, où ils sont déjà formés et où ils n’ont point éclaté encore ; rien de plus instructif que de contempler à nu l’homme avant le personnage, de découvrir les fibres secrètes et premières, de les voir s’essayer sans but et d’instinct, d’étudier le caractère même dans sa nature, à la veille du rôle. […] Mais, laissant ces minces détails, nous introduirons sans plus tarder le personnage principal. […] J’étais, n’en déplaise à vos bontés, un sot personnage alors avec mes… et mes… etc., etc. […] Je ne veux certes pas dire que tous les personnages qui obtiennent les ovations populaires soient tels, mais beaucoup le sont, et il y a une grande part de ce calcul, de cette fiction dans chacun, même dans les meilleurs181. […] Il est très-certain que, dans cette première partie de sa vie, Benjamin Constant était volontiers taciturne : ceux qui l’avaient vu à Lausanne et même à Colombier, et qui le revirent à Paris dans l’été de 1795, ne le trouvaient pas le même homme, tant il leur parut brillant de conversation dans le salon de Mme de Staël, tenant tête avec entrain et saillie aux personnages divers et de tous bords qui s’y pressaient.

1227. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Laissez venir seulement ces deux corrupteurs de la morale et de l’innocence, laissez venir Louis XV et Voltaire, alors Don Juan le scélérat, ne sera plus qu’un homme à bonnes fortunes, un philosophe ; il s’appellera M. le duc de Richelieu, pendant qu’en Angleterre, dans la patrie d’Hamlet, on verra ce même personnage de don Juan changer de nom, de costume, et s’appeler Lovelace ! […] Ainsi pense Don Sganarelle, ainsi il agit, tremblant, timide et timoré contrefacteur des grands crimes de son seigneur et maître… Si Don Juan est le seigneur, Sganarelle sera le bourgeois bientôt ; l’un marche devant, l’autre suit à la trace ; puis quand l’un et l’autre ils rencontrent… le pauvre, c’est-à-dire le troisième personnage de l’humanité, Don Juan et Sganarelle détournent la tête ! […] Bulwer se pouvait faire instruire de l’époque et des personnages de son drame. […] Dans tous les arts, mais surtout dans l’art dramatique, les sentiments et les passions se tiennent. — Mettez une insolence dans la question que fait un de vos personnages, à coup sûr l’autre personnage répondra, tout au moins, à cette insolence, par une bêtise. […] Bref, ce vagabondage ou plutôt cette fantaisie qui ne s’arrête sur rien et sur personne, jette dans toute la pièce je ne sais quoi de décousu que Molière lui-même avait pressenti quand il a voulu faire de dona Elvire le nœud de sa lugubre comédie ; mais faute d’un peu d’amour dans l’âme de Don Juan, cette Dona Elvire, elle-même, par un privilège dont elle jouit seule, a beau paraître deux fois, au commencement et à la fin du drame, rien n’empêche qu’elle ne soit un personnage épisodique ; pas une de ces femmes, aimées ou perdues par Don Juan, ne tient à l’action principale.

1228. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Werther. Correspondance de Goethe et de Kestner, traduite par M. L. Poley » pp. 289-315

C’est alors qu’il conçut l’idée d’identifier bientôt l’histoire de ce Jérusalem avec celle d’un amoureux comme lui-même l’avait été ou aurait pu l’être, et de faire du tout un personnage romanesque intéressant, et qui aurait pour le vulgaire le mérite de finir par une catastrophe. […] Et ainsi les personnages chéris du ciel vous bénissent.

1229. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

Une fois, devant un tableau de bataille de deux peintres amis, dont l’un avait fait le paysage et l’autre les personnages (c’était une bataille où figuraient les Autrichiens), il remarquait que le ciel était un peu trop pommelé : « Je trouve, disait-il, qu’il y a un peu trop d’Autrichiens dans ce ciel-là. » Il avait des observations originales qu’il exprimait d’un mot. […] Au nombre des personnages accessoires se trouvait un guide ou chasseur à cheval de la garde impériale.

1230. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. (Suite et fin.) »

C’était un homme de la Renaissance et de la secte académique ou même pyrrhonienne ; grand personnage au demeurant, très en crédit parmi les gens de lettres, estimé en cour, précepteur du second fils du roi (Monsieur, frère de Louis XIV), et fort appuyé en tout temps du cardinal de Richelieu qui aurait sans doute fait de lui le précepteur du futur roi. […] Je ne marquerai ici que ce qui est dit de Coëffeteau, le maître et l’oracle irréfragable selon Vaugelas : le révérend personnage, y attrape son coup de lance et son horion dans la mêlée.

1231. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Diderot »

Philosophe à la mode et personnage célèbre, il eut toujours son bon père le forgeron, comme il disait, son frère l’abbé, sa sœur la ménagère, sa chère petite fille Angélique ; il parlait d’eux tous délicieusement ; il ne fut satisfait que lorsqu’il eut envoyé à Langres son ami Grimm embrasser son vieux père. […] Le Roy ; le baron d’Holbach, au ton moqueur et discordant, près de sa moitié au fin sourire ; l’abbé Galiani, trésor dans les jours pluvieux, meuble si indispensable que tout le monde voudrait en avoir un à la campagne, si on en faisait chez les tabletiers ; l’incomparable portrait d’Uranie, de cette belle et auguste madame Legendre, la plus vertueuse des coquettes, la plus désespérante des femmes qui disent : Je vous aime ; — un franc parler sur les personnages célèbres ; Voltaire, ce méchant et extraordinaire enfant des Délices, qui a beau critiquer, railler, se démener, et qui verra toujours au-dessus de lui une douzaine d’hommes de la nation, qui, sans s’élever sur la pointe du pied, le passeront de la tête, car il n’est que le second dans tous les genres ; Rousseau, cet être incohérent, excessif, tournant perpétuellement autour d’une capucinière où il se fourrera un beau matin, et sans cesse ballotté de l’athéisme au baptême des cloches ; — c’en est assez, je crois, pour indiquer que Diderot, homme, moraliste, peintre et critique, se montre à nu dans cette Correspondance, si heureusement conservée, si à propos offerte à l’admiration empressée de nos contemporains.

1232. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Tous les personnages secondaires de ses deux poèmes sont sommaires et conventionnels, étoffés à force de rhétorique, tout juste aussi vivants que des héros de Luce de Lancival ou de Legouvé le père. […] Si sa psychologie est insuffisante, c’est qu’il voit seulement ses personnages ; il ne les analyse pas.

1233. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Chamfort. » pp. 539-566

Certain quaker, personnage non moins essentiel de la pièce, venait compléter cette morale naturelle de Betty et empêcher à temps l’ingrat Belton de la sacrifier, ce qu’il était bien près de faire. […] Que Molière, dans une comédie, fasse dire cela à l’un de ses personnages, c’est en situation et l’on en peut rire.

1234. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

De là le précepte bien connu, que l’artiste, le poète, le romancier doit vivre son personnage, et le vivre non pas superficiellement, mais aussi profondément que si, en vérité, il était entré en lui. On ne donne après tout la vie qu’en empruntant à son propre fonds ; l’artiste doué d’imagination puissante doit donc posséder une vie assez intense pour animer tour à tour chacun des personnages qu’il crée, sans qu’aucun d’eux soit une simple reproduction, une copie de lui-même.

1235. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Bouchardy, qui est dans son genre un géant aux pieds d’argile, et l’on se demande comment il a fait pour reconnaître, lui-même, au fond des cinq actes où ils s’agitent et se débattent en poussant leurs gloussements, les divers personnages de Christophe le Suédois ? […] La ville et la cour avaient les yeux fixés sur eux ; ils vivaient avec Molière, ils créaient avec lui ses comédies ; ils étaient les instruments immédiats de cet infatigable génie ; chaque jour leur amenait un nouveau chef-d’œuvre, une plaisanterie nouvelle, un personnage nouveau.

1236. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « I — L’avenir du naturalisme »

Je ne sais pourquoi quelques-uns de ses personnages et de ses tableaux m’apparaissent comme un artifice de réalité, et me semblent créés par la volonté violente d’un esprit tout plein d’une formule, au lieu de jaillir naturellement du contact de la nature, du pur et simple sentiment de vie dans l’être du romancier. […] Je m’étonne d’avoir à prononcer de telles paroles sur une œuvre qui contient parfois de si riches intuitions, comme en témoignent des phrases semblables à celle-ci : « La nature est entrée dans nos œuvres d’un élan si impétueux, qu’elle les a emplies, noyant parfois l’humanité, submergeant et emportant les personnages, au milieu d’une débâcle de roches et de grands arbres17 ».

1237. (1879) L’esthétique naturaliste. Article de la Revue des deux mondes pp. 415-432

J’arrive au second caractère de l’esthétique naturaliste, à sa préférence marquée pour les personnages populaires ; il serait plus juste de dire pour les ouvriers et ouvrières de nos ateliers parisiens : car en fait de peuple on ne nous a guère montré jusqu’ici que cela. […] J’accorde que les romanciers nous ont plus d’une fois fatigué avec leurs marquises et leurs comtesses ; il en est que la qualité entête tout simples bourgeois qu’ils soient nés, et qui, comme tel personnage de Molière « ne parlent jamais que duc, prince ou princesse ».

1238. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite et fin.) »

« L’horreur que me cause cette mort est inexprimable, dit-elle en propres termes le lendemain à la princesse Daschkoff ; c’est un coup qui me renverse. » Mais le personnage politique en elle reprit aussitôt le dessus : elle comprit que désavouer hautement le crime et parler de le punir ferait l’effet d’une comédie jouée ; qu’elle ne persuaderait personne ; que ce meurtre lui profitait trop pour qu’on ne le crût pas commandé ou tout au moins désiré par elle ; elle dissimula donc, et faisant son deuil en secret, — un deuil au reste qui dut être court, — elle se contenta, pour la satisfaction et le soulagement des siens et de son fils, de conserver dans une cassette la lettre écrite à elle par Orlof, après l’acte funeste, et qui témoignait de l’entière vérité.

1239. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

Valentine promet plus qu’Indiana, parce qu’Indiana, avec plus de profondeur, je crois, et d’originalité, pouvait sembler à la rigueur un de ces romans personnels et confidentiels comme on n’en a qu’un à faire avant de mourir, tandis que Valentine est véritablement l’œuvre d’un romancier peintre du cœur et de la vie, fécond en personnages, et qui n’a qu’à vouloir cheminer un peu patiemment pour arriver jusqu’au bout.

1240. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier après les funérailles »

Nos hommes distingués, nos personnages éminents dans les grandes carrières tracées, ne se rendent pas toujours bien compte de ce genre de mérite compliqué, fugitif, et sont tentés de le méconnaître.

1241. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre III. Du récit des faits. — Antécédents et conséquents. — Causes et effets »

Il faut éviter ici la confusion, l’entortillement, les digressions, ne point remonter trop haut, ni descendre trop bas ; ne rien omettre qui ait rapport à la cause ; enfin tout ce que j’ai dit pour la brièveté trouve aussi son application ici… La vraisemblance consiste à donner au récit tous les caractères de la réalité ; à observer la dignité des personnages ; à montrer les causes des événements ; à faire voir qu’on a eu le moyen, l’occasion, le temps, de faire ce qu’on a fait ; que le lieu aussi convenait à l’exécution de la chose ; que cette chose même n’a rien qui choque le caractère de ceux qui l’ont faite, ou la nature humaine ou l’opinion des auditeurs.

1242. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVI. Miracles. »

Si l’on part de ce principe que tout personnage historique à qui l’on attribue des actes que nous tenons au XIXe siècle pour peu sensés ou charlatanesques a été un fou ou un charlatan, toute critique est faussée.

1243. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXIII. Henry Gréville »

Le seul reproche qu’on puisse peut-être lui adresser, à cette plume pure qui finit par être trop pure, c’est la perfection, que j’ai déjà signalée, de ses personnages.

1244. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « La Société française pendant la Révolution »

., et d’en nommer successivement les personnages ?

1245. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « César Daly »

En cela il doit ressembler au poète dramatique, dont la plus haute faculté est l’impersonnalité, qui prend tour à tour l’âme de chaque personnage pour lui faire jeter son cri le plus pathétique et le plus vrai.

1246. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Rien de plus fatigant que cela… L’auteur rappelle trop ce personnage dont on dit si gaîment, dans une de nos meilleures comédies : Il ne nous a pas fait grâce d’une laitue !

1247. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le comte de Fersen et la cour de France »

Dans les Mémoires de son temps, le comte de Fersen nous apparaît bien plus comme un personnage romanesque que comme un homme véritablement historique.

1248. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Abailard et Héloïse »

Après le libre dialecticien du Moyen Âge, on nous donne le personnage romanesque, l’Abailard de la passion et de la célèbre catastrophe.

1249. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Collé »

Honoré Bonhomme, qui fait précisément une édition très soignée des irrévérences du maraud, transforme Collé, pour l’excuser de son audacieuse raison, en enfant terrible, en malin, en plaisant, et en vingt autres personnages, tous plus ou moins tortillés et tirés par les cheveux, mais tous rentrant toujours dans le chansonnier.

1250. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XIX. Abailard »

Après le libre dialecticien du Moyen Âge, on nous donne le personnage romanesque, l’Abailard de la passion et de la célèbre catastrophe.

1251. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Georges Caumont. Jugements d’un mourant sur la vie » pp. 417-429

J’ai pensé tout d’abord à une autobiographie de quelque personnage apocryphe, comme celle de Joseph Delorme, par exemple ; mais on m’a assuré que l’auteur de ces pages désespérées avait existé, et qu’il n’y avait ici ni invention romanesque, ni rétorsion littéraire.

1252. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Charles De Rémusat »

Ce sont des personnages curieux, qui eurent beaucoup, les uns, d’esprit, les autres, de talent, et qui remuèrent les surfaces de leur société, mais qui ne laisseront pas le grand sillon dans cette mer d’airain de l’histoire, dont l’airain ne s’entame qu’à la force du poignet de la gloire !

1253. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Ferdinand Fabre »

Homme de génie, secoué par la conscience qu’il est fait pour le commandement, et d’une ambition tellement effrénée qu’elle en est épouvantablement maladroite et qu’elle en devient un jour presque sacrilège, il a, ainsi que le dit un des personnages du roman, la folie de la mitre, comme il aurait dû avoir la folie de la croix, et c’est cette folie de la mitre qui en fait, tout le long du roman, le furibond torrent de haine et de colère humaine que le prêtre ne peut endiguer, mais dont l’Église, à la fin et malgré tout, s’empare, parce qu’elle a reconnu, elle, le lynx divin, aux yeux maternels, que cette tempête d’homme assagi par elle peut avoir, un jour, vertu d’archevêque, et peut-être de Pape dans l’avenir… Le livre de Ferdinand Fabre, dont je viens de dire la conclusion, est, au fond, — si vous en ôtez deux ou trois nuances d’opinion que je n’y voudrais pas voir parce qu’elles blessent mon catholicisme, — un livre écrit à la gloire du prêtre et de l’Église, de cette Église à qui ses ennemis voudraient de petites vertus dont ils pussent se moquer, et non de grandes, devant lesquelles ils tremblent !

1254. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Jules Janin » pp. 159-171

Jules Janin, c’est l’invention, c’est la donnée première, c’est là conception du personnage, de ce Neveu de Rameau, qui est une création comme Falstaff ou Tartuffe, et que M. 

1255. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « L’Abbé *** »

Telle est la trame de ce roman vulgaire, de ce mélodrame en récit, coupé de dissertations filandreuses, dans lesquelles on oublie le roman et ses personnages qu’on voudrait ne pas retrouver.

1256. (1904) Le collier des jours. Souvenirs de ma vie

Il ignorait, certainement, quel personnage j’étais, pour me faire une pareille proposition, et ma surprise fut aussi grande que ma colère. […] L’état social des personnes ne préoccupe guère les enfants et je ne sais en somme rien de précis, je ne suis pas même sûre du tout, que ce personnage fût commandant, ni même qu’il s’appelait Gruau. […] C’était un personnage qui se donna pour un horloger, que l’on envoyait, disait-il, chercher les pendules, afin de les réparer. […] Je ne tarissais pas de questions sur cette fontaine ; sur ces deux personnages si jolis, qui avaient l’air si altérés et si heureux. « Est-ce que Vaucluse était loin de chez la tante Mion ? […] Un coup de timbre nous interrompit, et, bientôt, un personnage, très singulier, entra, sans aucun bruit et en saluant de la tête.

1257. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Nous retrouverons Chateaubriand plus d’une fois, car c’est l’un des principaux personnages de la comédie du style. […] Le sentiment profond de l’amour, qui était en lui, n’a passé que dans les actes de ses personnages ; ils expriment des passions extrêmes en un style abstrait, glacé et diplomatique. […] La préciosité de ce roman est toute dans la psychologie des personnages ; le style en est calme et uni, d’un vert de pré que de rares fleurs « émaillent » fort discrètement. […] On lit ceci dans la recette de l’antithèse-portrait : « Si les traits d’un personnage de roman peuvent s’appliquer à toute espèce de personnes, le personnage est mauvais » ; il faut particulariser ; jamais de types, jamais d’êtres synthétiques tels que : le Roi, la Jeune Fille, le Paysan, le Héros. […] On peut écrire fierabras et même, au besoin, se souvenir qu’il s’agit d’un personnage et non d’un mot composé ?

1258. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Ici, la poésie est représentée par le personnage de Pierrot, legs de l’oncle Watteau, mais, combien changé ! […] La vanité de ce personnage extraordinaire est si démesurément sphérique qu’elle finit par ressembler à une vertu. […] Le catholique ajoutait qu’un pareil acte accompli comme l’Église entend qu’il le soit, si on pouvait y décider un athée, aurait pour résultat probable la conversion du personnage. […] Le triste personnage qui est l’auteur de Ramollot vient de recommencer. […] Celui-là, du moins, ne farde pas le personnage et le donne simplement pour ce qu’il fut, c’est-à-dire un Judas, un hypocrite et un assassin.

1259. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Vous ne sauriez me nier deux choses : l’une, qu’Alceste dans cette pièce est un homme droit, sincère, estimable, un véritable homme de bien ; l’autre, que l’auteur lui donne un personnage ridicule. […] Les personnages ne disent pas un mot de ce qu’ils doivent dire. […] Et c’est ainsi qu’il a conduit ses personnages dans une impasse… Arrivé à ce point, il ne sait décidément plus que faire d’eux. […] Tout cela éloquent, harmonieux, et tout cela sincère et presque ingénu ; et dans tout cela bien des choses que nous remarquons à peine, à moins d’être avertis, mais qui étaient neuves alors : un roman qui n’est pas parisien ; l’amour, le mariage, l’adultère pris au sérieux ; un roman plein de pensées (les personnages y étant tous des raisonneurs) et plein de paysages (les personnages vivant dans la plus belle nature) et plein de lyrisme (les personnages, et surtout l’amant, qui est le plus souvent passif, s’y complaisant à des effusions sur les thèmes de l’absence, du désir, du regret, du souvenir, de la nature indifférente ou consolatrice, etc.). […] Rousseau juge indispensable que ce bon prêtre ait commis autrefois une faute contre les mœurs : car Rousseau ne peut imaginer un personnage sympathique qui n’ait, comme lui, quelque souillure.

1260. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Lorsqu’il nous arrive de juger nos contemporains, nous ne saurions le faire avec la même sûreté que s’il s’agissait de personnages d’une autre époque : il s’agit donc bien moins de les juger que de les comprendre. […] Naturellement, il s’agissait de trouver des personnages sans avenir, dont le succès factice ne pourrait être qu’éphémère. […] Barrès, qu’un personnage soit au moins licencié ès lettres ou candidat à la députation pour présenter de l’intérêt romanesque. […] L’état psychologique des personnages est simplement noté par leur attitude, les frissons de leur chair, les expressions de leurs visages. […] « Dans les poèmes que nous rêvons, écrivais-je, dans mon Essai sur le Naturisme, nous ne placerons plus des personnages allégoriques et légendaires.

1261. (1880) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Première série pp. 1-336

Ajoutez que les personnages ne vivent pas. […] N’est-ce pas là plutôt et tout simplement la marque du grand écrivain, l’inimitable secret du génie s’emparant en maître de tout ce qu’il touche, et, par un effet de ce scrupule extrême de l’exactitude ou de cette haine instinctive de l’à-peu-près qui lui sont propres, donnant naturellement à ses personnages, comme les mœurs et le costume, la langue aussi qu’ils doivent avoir ? […] Molière, qui donnait une grande importance aux moindres parties de son art, et qui semble avoir estimé qu’il n’est pas de petits secrets du métier qu’on néglige impunément, s’est mis lui-même en scène, avec ses acteurs, profitant de la difformité, de la maladie même, pour donner en quelque sorte à ses personnages une réalité plus concrète, plus vivante. […] Vingt personnages : un Newton, un Corneille, un Thucydide, un Catulle, selon le mot de Frédéric, ajoutons un homme du monde et presque un grand seigneur, un bel esprit de salons et de ruelles, un courtisan, un diplomate, un traitant, un journaliste, que sais-je encore ? […] L’homme de lettres, émancipé de la protection du grand seigneur ou du traitant, de l’homme de cour ou de l’homme d’argent, prétend faire figure à son tour, comme eux, et comme eux tenir un personnage dans le monde.

1262. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. FAURIEL. —  première partie  » pp. 126-268

Un séjour de plusieurs mois qu’il fit à Paris, peu avant le 18 brumaire, dut le remettre en relation étroite avec quelques compatriotes, personnages influents d’alors. […] Et qu’on ne dise pas que l’idéal ait souffert au milieu de cette application patiente ; le personnage d’Hermangarde a toute sa pureté et son exaltation tendre, les chœurs ont leur pathétique ou leur éclat. […] Fauriel est trop équitable pour ne point rendre à tout personnage historique la part qui lui revient, et pour sacrifier aucun aspect de son sujet. […] L’histoire est intéressante, romanesque, mais entremêlée d’incidents qui ne sauraient faire absolument honneur à la moralité du personnage. […] Ce personnage excellent avait été mis en relation avec Fauriel par M.

1263. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre huitième. L’introduction des idées philosophiques et sociales dans la poésie (suite). Victor Hugo »

Et d’abord, on peut dire du cœur du poète ce que Mlle Baptistine disait de la maison de Mgr Myriel, ouverte à tous : « Le diable peut y passer, mais le bon Dieu l’habite. » On serait un peu surpris de voir appliquer à l’auteur d’Othello et de Macbeth l’épithète de bon ; de même on ne peut dire que Gœthe, avec son intelligence scientifique et sereine, soit bon, ni Balzac, avec sa psychologie un peu sombre et prévenue : ce sont des observateurs, des artistes qui représentent avec exactitude, quelquefois avec dégoût, la comédie humaine ; ils savent exciter la pitié pour tel ou tel personnage donné, mais ce n’est point ce sentiment large et paternel, cette pitié profonde pour toute misère humaine qui finit par dominer l’œuvre de Victor Hugo. […] On peut appliquer à Hugo ce qu’il dit d’un de ses personnages : « La mansuétude universelle était moins chez lui un instinct de nature que le résultat d’une grande conviction filtrée dans son cœur à travers la vie et lentement tombée en lui pensée à pensée. » — « Il est de ces âmes, a-t-il dit encore, où la pensée est si grande qu’elle ne peut plus être que douce195. » Il est « de ces êtres bienveillants qui progressent en sens inverse de l’humanité vulgaire, que l’illusion fait sages et que l’expérience fait enthousiastes196. » C’est ainsi, et dans son progrès, qu’il faut voir V.  […] Pour comprendre certaines de ces naïvetés généreuses, il faut pouvoir comprendre l’étrange baiser mystique posé sur les pieds d’une prostituée par tel personnage d’un grand romancier russe contemporain. […] Nous nous affirmons par la lumière qui est sous notre sourcil… Si rien ne brille sous la paupière, c’est que rien ne pense dans le cerveau, c’est que rien n’aime dans le cœur. » Sur le démesuré même, il a des explications qui ont leur valeur philosophique : « L’immense diffère du grand en ce qu’il exclut, si bon lui semble, la dimension, en ce qu’il passe la mesure, comme on dit vulgairement, et en ce qu’il peut, sans perdre la beauté, perdre la proportion… Quels personnages prend Eschyle ?

1264. (1920) Action, n° 2, mars 1920

Personnages de La Nuit des rois. […] Personnage de l’opéra Les Maîtres chanteurs de Nuremberg (1868) de Wagner. […] Un aliboron est un personnage sot, surnom de l’âne chez La Fontaine : le mot désigne ici Bottom. […] Fernand Vandérem en propose une critique plus nuancée que Renée Dunan : s’il salue ce roman fort, « au-dessus de la moyenne », il en dénonce l’enflure et le schématisme des personnages.

1265. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Chapitre II. Vérification de la loi par l’examen de la littérature française » pp. 34-154

J’ai eu cette bonne fortune d’assister à une représentation de l’Abraham, devant la société protestante de Paris : à la scène le défaut essentiel apparaît beaucoup mieux qu’à la lecture ; il y a là une douleur poignante, mais pas de conflit dramatique ; la volonté de Dieu est indiscutable et insondable ; sans rapport, pour nous, avec les caractères ; Abraham s’y soumet aussitôt « avec obéissance » ; Isaac de même ; il n’y a qu’un court instant de lutte morale, et cette lutte est extériorisée, donc affaiblie, par le personnage de Satan. […] Avec une naïveté qui serait touchante si elle n’avait été si funeste, on étudia chez Homère, plus encore chez d’autres qui ne le valent pas, la formule de l’épopée : le choix du sujet, la conduite de l’action, le rôle du merveilleux, la qualité des personnages, les épisodes, la forme métrique, tout cela fut établi en règles précises12 ; et la forme tua l’esprit. […] Le problème historique se complique, ici plus qu’ailleurs, de questions esthétiques ; voici, sous une forme concise, les faits que je soumets à la réflexion : 1º la tragédie (en sa formule classique : vers, cinq actes, unités, sujet et personnages nobles, etc.) est une « forme » spéciale du drame, forme naturelle et rationnelle dans l’antiquité13, étroite et vieillie pour l’esprit moderne, mais imposée par la tradition académique, et viable d’ailleurs pour le génie d’un Racine ; de fait, plus d’une « règle » de la tragédie s’explique par les exigences de l’intensité dramatique ; Brunetière l’a fortement démontré en théorie, et, avant lui, Dumas fils en pratique ; de nos jours, Ibsen. […] Il serait intéressant de montrer comment et pourquoi il en revient peu à peu aux « unités » tant honnies21 ; comment chez lui la thèse, sauf de rares exceptions, ne nuit pas à la vérité des caractères ; de fait, ses personnages sont vivants pour qui les a vus une fois : la baronne d’Ange, Denise, Francillon, M. 

1266. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Note »

Il se dessine dans Mirabeau, dans Vergniaud et dans bien d’autres personnages ; le profil de Jocelyn-tribun se projette partout. 

1267. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Stendhal, son journal, 1801-1814, publié par MM. Casimir Stryienski et François de Nion. »

Il fait d’excellentes remarques sur notre tragédie classique : « C’est une fausse délicatesse qui empêche les personnages d’entrer dans les détails, ce qui fait que nous ne sommes jamais saisis de terreur, comme dans les pièces de Shakespeare.

1268. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Préface »

Duportal le soin de publier la vérité, qu’il est seul à savoir, sur ce personnage singulier.

1269. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 45, de la musique proprement dite » pp. 444-463

Par exemple, l’imitation du bruit d’une tempête qui va submerger un personnage, à qui le poëte nous fait prendre actuellement un grand interêt, nous affecte comme nous affecteroit le bruit d’une tempête, prête à submerger une personne pour laquelle nous nous interesserions avec chaleur, si nous nous trouvions à portée d’entendre cette tempête veritable.

1270. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VIII »

Il commence par déclarer que j’ai « bravement crié, comme le personnage de La Fontaine, et ce n’était pas le lion » (c’était l’âne).‌

1271. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre X. Mme A. Craven »

Le Mot de l’énigme, tout analyse et tout récit, sans aperçu, sans caractères, presque sans visages, car les personnages de ce roman ressemblent à des comparses, est du bavardage sans légèreté, sans le moindre petit mot pour rire, ah !

1272. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Eugène Pelletan » pp. 203-217

Et quant à Lamartine, cet idéal du Citoyen, placé en contraste des trois autres dans toute la perfection de son personnage à la fin du livre de Pelletan, Lamartine, dont Pelletan est sorti comme les Méditations, — mais j’aime mieux les Méditations, — Pelletan s’en regarde trop comme la géniture pour ne pas se croire parricide s’il convenait d’une seule des erreurs de ce grand génie de poète égaré.

1273. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « MM. Delondre et Caro. Feuchtersleben et ses critiques. — L’Hygiène de l’âme » pp. 329-343

ce fut un galant homme que Salvandy, et il avait même, dit-on, une petite pente à augmenter son personnage ; mais « l’homme le plus moral des temps modernes ?? 

1274. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « A. P. Floquet »

Aussi, dans son livre, quoique vous y voyiez passer les figures qui sont les éternelles tentations des peintres d’histoire : Richelieu, Mazarin, Louis XIV, le Grand Condé, saint Vincent de Paul, — j’allais presque dire saint Turenne, car ce grand converti de Bossuet, avant qu’un boulet de canon l’envoyât à Dieu, pensait à y aller autrement en se retirant à l’Oratoire, — tous ces personnages, tous ces grands hommes, n’y existent que dans le rapport qu’ils ont directement avec Bossuet.

1275. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Ernest Hello »

Un reproche pourtant que la critique pourrait hasarder, c’est d’avoir laissé un des Deux étrangers trop dans le vague de l’ombre, et de n’avoir pas mis assez de clarté dans ce redoutable personnage… On croit bien pressentir qu’il est l’Homme des Sciences occultes, quelque Magicien investi de sataniques pouvoirs, puisqu’il promet la Science universelle au docteur Williams, lequel meurt de ce funeste don ; mais le conteur aurait précisé davantage cette grandiose et inquiétante figure que son conte n’aurait été ni moins effrayant, ni moins mystérieux.

1276. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Madame Sand et Paul de Musset » pp. 63-77

C’est elle, en effet, leur célébrité, qui a, malgré les précautions et les abat-jour plus ou moins habiles, éclairé pour tous les lecteurs, les sévères et les charitables, les renseignés et les ignorants, tous les faits et tous les personnages de ces deux romans.

1277. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Deux romans scandaleux » pp. 239-251

C’est elle, en effet, leur célébrité, qui a, malgré les précautions et les abat-jours plus ou moins habiles, éclairé pour tous les lecteurs, les sévères et les charitables, les renseignés et les ignorants, tous les faits et tous les personnages des deux romans publiés aujourd’hui.

1278. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Malot et M. Erckmann-Chatrian » pp. 253-266

Et ce manque radical d’originalité dans le sujet et les personnages des Victimes d’amour, il est aussi dans les détails.

1279. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Armand Pommier » pp. 267-279

Tout titre doit faire rayonner l’idée du livre qu’il exprime, à moins que, comme Clarisse et tant d’autres chefs-d’œuvre, qui n’ont pour titre que le nom d’un personnage, il n’introduise dans la grande famille de l’observation humaine des types qu’on invoquera toujours.

1280. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Gogol. » pp. 367-380

Les personnages du roman de Gogol, tous ineptes, ne sont plus que superficiels, quand ils cessent d’être profonds d’ineptie.

1281. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXV. Avenir de la poésie lyrique. »

À part les révolutions de palais qui interrompaient le cours régulier de cet ordre de choses et en changeaient les principaux personnages, en dehors de ces accidents naturels et de ces sinistres compensations du pouvoir absolu, il y avait, durant toute cette époque dont votre théorie préconise la salutaire immobilité, il y avait alors sans cesse la plus active rébellion du sentiment moral, le plus ardent foyer pour les intelligences et les cœurs.

1282. (1913) Poètes et critiques

L’éditeur s’est donné pour unique tâche de choisir les morceaux qu’il est bon de mettre en lumière, de relier ces morceaux par des analyses qui tiennent lieu des parties supprimées, de donner sur les sujets traités, sur les événements, sur les personnages, les explications indispensables. […] Quand les acteurs anglais vinrent jouer Shakespeare à Paris, en 1828, ils avaient supprimé le personnage du fou. […] Pour fêter le jour anniversaire de la délaissée Cendrillon, les personnages du jardin, une linotte, une souris, un lézard, une rose, un potiron viennent se grouper autour d’elle et lui versent l’enchantement de leurs propos légers, de leurs « histoires » ineffables. […] Pour ne prendre ici qu’un exemple, un personnage comme Swift s’ajuste sans effort et presque par définition aux idées générales de Taine ; éclairés à cette lumière, les traits si expressifs de l’homme, la manière saisissante de l’écrivain, s’accusent merveilleusement. […] Giraud n’admet pas, on s’en doute bien, qu’il faille voir dans l’illustre sceptique « un ancêtre authentique de nos encyclopédistes », mais il ne veut pas reconnaître en lui le personnage religieux que tel ou tel, par goût du paradoxe, nous présente.

1283. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Cet intéressant personnage a passé tout le temps de la guerre dans un hôpital, d’où il s’est sauvé, de temps en temps, pour trouver quelque part de la boisson, de la mangeaille, et le reste. […] Maintenant, dédaigneuse des rois et des grands personnages, elle se mêle parfois au populaire ; elle aime les cohues, les meetings, les théâtres mal famés, les foires. […] S’il y a un personnage que les hellénistes, réduits à leurs seules forces, sont incapables de ranimer, c’est bien Cléopâtre. […] Visiblement, avant de commencer son récit, il a étudié ses personnages dans les types actuels qui pouvaient en donner l’idée ; il a observé leur milieu dans les aspects du présent qui pouvaient évoquer des figures surannées. […] Quiconque travaillait dans l’érotisme était sûr d’obtenir une pension, de devenir au moins sous-bibliothécaire, précepteur du prince, et de mourir dans la peau d’un personnage très officiel.

1284. (1911) Études pp. 9-261

Le ton a été établi par superpositions successives, avec lenteur et calcul, il ne lui reste plus à revêtir que son brillant ; mais s’il consentait à cette suprême richesse, peut-être l’étoffe s’animerait-elle d’un mouvement, peut-être les plis tendraient-ils à se draper et tout le personnage se camperait-il en une pose. […] Elle est refusée à ceux qui voulurent se dérober à leur mission, se dépouiller de leur personnage. […] Sans cesse une délivrance naturelle ; le cœur qui trouve ; un sentiment qui cède à la tentation de la musique et se révèle simplement parce qu’il est là, parce que le personnage l’éprouve. […] Au lieu de poèmes moraux, de méditations lyriques, de subtiles aventures imaginaires, toutes chargées de complexes significations, et où son âme seule se divisait entre des personnages idéaux, il écrit des romans258. […] Il est absorbé par les personnages qu’il suscite ; son unique soin désormais sera d’exprimer fidèlement toutes ces pensées qu’il leur découvre, tous ces actes dont il les reconnaît responsables, en un mot de raconter leur histoire.

1285. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre I. Principe des mœurs sous l’Ancien Régime. »

Dorénavant pour les premiers personnages du royaume, hommes et femmes, ecclésiastiques et laïques, la grande affaire, le principal emploi de la vie, le vrai travail, sera d’être à toute heure, en tout lieu, sous les yeux du roi, à portée de sa parole ou de son regard. « Qui considérera, dit La Bruyère, que le visage du prince fait toute la félicité du courtisan, qu’il s’occupe et se remplit toute sa vie de le voir et d’en être vu, comprendra un peu comment voir Dieu fait toute la gloire et toute la félicité des saints. » Il y eut alors des prodiges d’assiduité et d’assujettissement volontaire. […] Le matin, à l’heure qu’il a marquée d’avance176, le premier valet de chambre l’éveille : cinq séries de personnes entrent tour à tour pour lui rendre leurs devoirs, et « quoique très vastes, il y a des jours où les salons d’attente peuvent à peine contenir la foule des courtisans »  D’abord on introduit « l’entrée familière », enfants de France, princes et princesses du sang, outre cela le premier médecin, le premier chirurgien et autres personnages utiles177  Puis on fait passer la « grande entrée » ; elle comprend le grand chambellan, le grand maître et le maître de la garde-robe, les premiers gentilshommes de la chambre, les ducs d’Orléans et de Penthièvre, quelques autres seigneurs très favorisés, les dames d’honneur et d’atour de la reine, de Mesdames et des autres princesses, sans compter les barbiers, tailleurs et valets de plusieurs sortes. […] Si je prends une date précise, en 1771193, j’en trouve encore une pour le duc d’Orléans, une pour le duc de Bourbon, une pour la duchesse de Bourbon, une pour le prince de Condé, une pour le comte de Clermont, une pour la princesse douairière de Conti, une pour le prince de Conti, une pour le comte de la Marche, une pour le duc de Penthièvre  Chacun de ces personnages, outre son appartement chez le roi, a son château et son palais où il tient cercle, la reine à Trianon et à Saint-Cloud, Mesdames à Bellevue, Monsieur au Luxembourg et à Brunoy, le comte d’Artois à Meudon et à Bagatelle, le duc d’Orléans au Palais-Royal, à Monceau, au Raincy, à Villers-Cotterets, le prince de Conti au Temple et à l’Isle-Adam, les Condés au Palais-Bourbon et à Chantilly, le duc de Penthièvre à Sceaux, Anet et Châteauvilain : j’omets la moitié de ces résidences.

1286. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

Notre poète traita lui-même ces divers sujets avec une grande supériorité ; mais, lorsqu’il eut parlé en termes sublimes et un peu mystérieux de la création du monde et des mouvements du soleil, il nous raconte que son hôte se mit à l’examiner avec une plus grande attention, et dit, après un moment de silence, qu’il voyait bien qu’il avait donné l’hospitalité à un personnage plus illustre qu’il ne l’avait d’abord supposé, et que peut-être c’était celui dont on s’entretenait vaguement dans le pays, qui, étant tombé dans l’infortune par suite de quelque faiblesse, était aussi digne, par la nature de sa faute, du pardon des hommes, qu’il était digne de leur admiration par son génie. […] Le poète qui chante un de ces récits doit donc le chanter avec les accents et les images que la riche imagination lui prête ; mais il est tenu aussi à le chanter dans un mode sérieux, conforme à la réalité de la nature humaine à l’époque où il la met en scène, conforme surtout à la vérité des mœurs de ses héros ; en un mot, le poème épique, pour être national, humain, religieux, immortel, doit être vrai, au moins dans l’événement, dans la nation, dans le caractère et dans le costume de ses personnages. […] Un composé d’héroïsme, de fanatisme, de jactance chevaleresque parfaitement uniforme dans les héros chrétiens et dans les héros musulmans ; une chevalerie banale et générale qui ne laisse différencier les personnages que par le costume, le casque ou le turban.

1287. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIVe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (2e partie) » pp. 97-191

« La tragédie est donc l’imitation d’une action ; et cette action étant l’œuvre de personnages qui agissent, ces personnages ont nécessairement un caractère et un esprit qui les font ce qu’ils sont ; conditions qui, d’ailleurs, servent à qualifier aussi les actes humains. […] Le dialogue platonicien ne serait désormais possible qu’à la condition d’un nouveau personnage aussi merveilleux, et peut-être même à la condition d’une catastrophe aussi lamentable.

1288. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

Ainsi, dans Shakespeare, un personnage, en voyant une charmante jeune fille, dit : « Heureux les parents qui la nomment leur fille ; heureux le jeune homme qui l’amènera comme fiancée !  […] La différence, c’est la vie commune que l’on aperçoit toujours chez eux entre la nature extérieure et les personnages humains. […] « Personnage burlesque qui revient souvent dans les vaudevilles écrits à Vienne.

1289. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Or, ce railleur est tellement ingénu qu’il est un des trois ou quatre de nos contemporains qui ont fait des tragédies  oui, des tragédies en cinq actes où tout est pris grandement au sérieux, où se déroulent des événements imposants, où des personnages royaux se débattent dans des situations douloureuses et terribles, où s’entre-choquent les passions les plus violentes et où s’énoncent en alexandrins les sentiments les plus nobles et les plus hauts dont l’humanité soit capable. […] C’est le cas de dire, comme ce personnage de Molière : « J’y crois pour ce que j’y crois… » Néanmoins, si j’ose le dire, la conception du devoir, chez M. de Vogüé, ne me paraît que provisoirement coupée du dogme catholique. […] Celles-là pensent l’honorer en continuant l’élégance de sa vie, en rendant publique l’élégance de leurs souvenirs ; en se conformant à l’idéal mondain exprimé dans ses livres, en se donnant l’air — piété touchante — d’être pareilles aux personnages que sa futilité affectionna.

1290. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Paul Féval » pp. 107-174

Il faut bien le dire, il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse ; car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poète dramatique ne fait pas et ne peut pas faire. […] Paris, la cour, les personnages de cette fin du xviiie  siècle, qu’on a peints tant de fois, ont été rechampis par Paul Féval une centième fois de plus avec un pinceau infatigablement spirituel, audacieux et léger comme cette époque où les jolies manières avaient remplacé les bonnes mœurs. […] C’est Brucker, en effet, qui est le roman même ; il n’en est pas seulement un personnage, il en est le centre, le cadre et le sujet.

1291. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « DÉSAUGIERS. » pp. 39-77

Des personnages que nous avons connus très-graves et même moroses (Eusèbe Salverte, par exemple) avaient débuté, grelots en main, sous ce masque de gaieté. […] Le nom de Désaugiers m’en rappelle un autre qu’on n’est guère tenté de lui associer, et que je tiens absolument à y rattacher par quelque bout, — un personnage célèbre à tout autre titre, et qui pourtant, né en d’autres régions sociales, eût tenu largement sa place parmi les coryphées de la gaieté pure : je veux parler de Lally-Tollendal, auteur de pots-pourris délicieux, d’une folie à l’usage de la bonne compagnie, et qu’il chantait à ravir ; il n’était pas seulement le plus gras, mais encore le plus gai des hommes sensibles.

1292. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (2e partie) » pp. 305-367

Il est sans doute possible qu’après un si long laps de temps le curé de Bessancourt ait commis quelques inadvertances de noms, de dates, de détails sur des personnages si nombreux alors dans les prisons et sur leurs rôles respectifs dans ce drame pathétique de leur dernière heure ; mais il est impossible à qui a entendu ce modeste et sincère témoin de ces scènes de révoquer en doute sa véracité. […] Buchez et Roux, qui a été mon manuel historique, toujours ouvert sur ma table pendant les deux années consacrées par moi à écrire cette histoire, je n’ai pas négligé une seule information verbale possible à obtenir des parents ou des amis des personnages, même odieux, dont j’avais à sonder la vie publique ou la vie intime.

1293. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Nous n’avons pas affaire à des personnages d’opéra ; des figures vivantes s’agitent devant nous et nous associent, pour un temps, à leur existence. […] En ceci, le génie du maître est allé si loin que l’auditeur partage les impressions, les délices cruelles et les ineffables amertumes des personnages.

1294. (1913) La Fontaine « V. Le conteur — le touriste. »

On sent bien que La Fontaine ne tient pas à lier conversation, et à déshabiller l’âme des personnages qu’il rencontre, comme le faisait Stendhal. […] L’un de ces personnages avait fait une tresse de ses cheveux, laquelle lui pendait en derrière comme une queue de cheval.

1295. (1913) La Fontaine « VI. Ses petits poèmes  son théâtre. »

Voici : La Baguenaudière, qui est un personnage du roman de Scarron, est un gentilhomme-poète-tragique. […] La petite fille, parfaitement malicieuse et parfaitement avisée, comprend très bien que c’est son tuteur lui-même qui joue ce personnage ; et alors, feignant de parler au cousin, elle lui fait toute sa confession et lui dit un mal infini de son tuteur.

1296. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Trop fort dans la réalité pour s’abuser sur le personnage de l’Italie, il l’a déterminé, on vient de le voir, dans son premier volume, avec une netteté souveraine. […] « Parfois, — dit-il, étonné des grêles proportions de son histoire ou plutôt de ses histoires, — en voyant des armées de cent ou de soixante-dix hommes, on résiste à peine à l’envie de rire, et l’illusion des distances, qui grandit les grands personnages et rapetisse les petits, engendre de si fantastiques perspectives que, dans la contention de l’esprit nécessaire pour compter de si microscopiques révolutions, on retient son haleine, de crainte que le moindre souffle ne disperse les combattants. » Il est vrai que M. 

1297. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Waterloo, par M. Thiers (suite) »

Un personnage essentiel dans le plan de Napoléon manqua toujours, c’était, Grouchy, lequel apparaissant avec ses 36,000 hommes, en tout ou en partie, eût permis de conjurer ce fantôme des Prussiens devenu bientôt une formidable réalité, et de livrer la bataille dans l’ordre régulier et savant suivant lequel elle, avait d’abord été calculée.

1298. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Béranger — Béranger, 1833. Chansons nouvelles et dernières »

Chaque génération savait et redisait par le chant la tradition du passé, l’augmentant, la variant sans cesse, ignorant l’auteur ou les auteurs de ces poëmes, et les attribuant à des personnages fabuleux.

1299. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Le gros livre que d’honnêtes personnages se préparaient à remorquer pour le tirer de sa fange, y est resté en plein.

1300. (1874) Premiers lundis. Tome II « Chronique littéraire »

Mais la lenteur du préambule, le grand nombre de personnages trop mollement dessinés, et une teinte romanesque à la Montolieu répandue sur l’ensemble, empêchent l’effet d’être vif et réel, bien que la facilité, la grâce et une certaine onction ne manquent pas.

1301. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XV. De l’imagination des Anglais dans leurs poésies et leurs romans » pp. 307-323

Ce sont eux qui ont osé croire les premiers, qu’il suffisait du tableau des affections privées, pour intéresser l’esprit et le cœur de l’homme ; que ni l’illustration des personnages, ni l’importance des intérêts, ni le merveilleux des événements n’étaient nécessaires pour captiver l’imagination, et qu’il y avait dans la puissance d’aimer de quoi renouveler sans cesse et les tableaux et les situations, sans jamais lasser la curiosité.

1302. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Deuxième partie. Invention — Chapitre II. Définition. — Énumération. — Description »

De cette pensée vulgaire parmi les apologistes du christianisme : « tous les prophètes de l’Ancien Testament ont annoncé le Christ », un prédicateur anonyme tire tout un sermon par l’énumération de ces prophètes ; le moyen âge, à son tour, agrandissant le cadre, fait sortir du sermon le drame des Prophètes du Christ, où jusqu’à vingt-sept personnages défilèrent successivement en annonçant le Sauveur.

1303. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Les sentiments étaient si naturels, que les personnages finirent par être vivants : bergers et bergères devinrent de vrais paysans.

1304. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Armand Silvestre »

Il baptise heureusement ses personnages.

1305. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XI. Il Convitato di pietra (le Convié de pierre) » pp. 191-208

Le scénario que nous possédons date du temps où Dominique avait déjà succédé à Trivelin dans le personnage du valet de Don Juan.

1306. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre deuxième »

L’abbé Trublet avait alors la rage D’être à Paris un petit personnage.

1307. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Irénée, Origène, Eusèbe, les Constitutions apostoliques, ignorent l’existence d’un tel personnage.

1308. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Plusieurs personnages qui avaient beaucoup aimé Jésus et fondé sur lui de grandes espérances, comme Joseph d’Arimathie, Lazare, Marie de Magdala, Nicodème, n’entrèrent pas, ce semble, dans ces églises, et s’en tinrent au souvenir tendre ou respectueux qu’ils avaient gardé de lui.

1309. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

« Je vous l’avais bien dit que M. de Condom jouerait dans cette affaire un personnage de dupe.

1310. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre III, naissance du théâtre »

La grande invention de Thespis, c’est l’acteur substitué au coryphée et au narrateur, le personnage fictif incarné dans l’homme vivant et présent, qui simule son être et s’approprie ses actions.

1311. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XIII, les Atrides. »

Tous ses lugubres personnages reviennent dans la Trilogie d’Eschyle, à l’état de Mânes ; son atmosphère est saturée de leurs souffles, Cassandre et le Chœur ne cessent de les évoquer ; leurs haines posthumes attisent les haines vivantes de leurs descendants.

1312. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Œuvres littéraires de M. Villemain (« Collection Didier », 10 vol.), Œuvres littéraires de M. Cousin (3 vol.) » pp. 108-120

Cousin, au premier abord, paraît échapper à la loi commune ; on dirait vraiment que c’est un personnage du xviie  siècle qui écrit.

1313. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1854 » pp. 59-74

Le garde, personnage insignifiant : un faux Decamps rêvant peureusement de braconniers dans le parc.

1314. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface des « Burgraves » (1843) »

Il se dit d’un autre côté que, s’il était nécessaire qu’on vît la servitude se traîner sous les pieds des burgraves, il était nécessaire aussi qu’on vît la souveraineté éclater au-dessus d’eux ; il se dit qu’il fallait qu’au milieu de ces princes bandits un empereur apparût ; que dans une œuvre de ce genre, si le poète avait le droit, pour peindre l’époque, d’emprunter à l’histoire ce qu’elle enseigne, il avait également le droit d’employer, pour faire mouvoir ses personnages, ce que la légende autorise ; qu’il serait beau peut-être de réveiller pour un moment et de faire sortir des profondeurs mystérieuses où il est enseveli le glorieux messie militaire que l’Allemagne attend encore, le dormeur impérial de Kaiserslautern, et de jeter, terrible et foudroyant, au milieu des géants du Rhin, le Jupiter du douzième siècle, Frédéric Barberousse.

1315. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé d’Aubignac, avec Ménage, Pierre Corneille, Mademoiselle de Scudéri et Richelet. » pp. 217-236

Ils chargèrent de cette occupation le célèbre la Monnoye, qui leur répondit : Laissons en paix monsieur Ménage ; C’étoit un trop bon personnage Pour n’être pas de ses amis.

1316. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

Et cependant l’acteur, placé entre ces deux extrêmes, redoutant également d’être trop brusque, c’est-à-dire de paraître mal élevé, ou de paraître trop facile à vivre, c’est-à-dire de rien retrancher de la rudesse et de l’indignation de son personnage, l’acteur, entre ces deux excès, reste bien empêché.

1317. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre septième. »

Les discours des trois principaux personnages, le lion, le renard et l’âne, sont d’une vérité telle que Molière lui-même n’eût pu aller plus loin.

1318. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 2, de la musique rithmique » pp. 20-41

Nous apporterons ci-dessous un de ces passages dans lequel Quintilien parle fort au long du soin qu’avoient ces artifices pronuntiandi, de donner à chaque comedien un masque assortissant au caractere du personnage qu’il devoit representer.

1319. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XX. Mme Gustave Haller »

Les personnages de son drame de cœur, comme dans la plupart des romans écrits par des femmes, n’ont ni physionomies, ni visages.

1320. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Jacques Cœur et Charles VII »

Il est de la race de ces esprits qui ne craignent pas de serrer l’histoire d’une époque autour d’un ou deux personnages qui la centralisent.

1321. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IV. M. Henri Martin. Histoire de France » pp. 97-110

Martin — Abailard, tout grand qu’il est, est bien petit par le cœur auprès de la sublime enfant qu’il enchaîne à sa destinée… L’importance du personnage d’Héloïse, c’est qu’elle ne change pas intérieurement, qu’elle ne subit pas la mort mystique du cloître, c’est qu’elle ne se repent jamais (tiens !

1322. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

Nicolardot, qui n’a que la passion des esprits tournés ardemment vers l’histoire, la passion de la réalité, n’a rien négligé pour montrer dans Voltaire le misérable envers de l’homme opposé à l’endroit du personnage historique, et il est curieux de le suivre dans cette investigation et cette opposition acharnées.

1323. (1890) Les œuvres et les hommes. Littérature étrangère. XII « Nicolas Gogol »

Les personnages du roman de Gogol, tous ineptes, ne sont plus que superficiels quand ils cessent d’être profonds d’ineptie.

1324. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Raymond Brucker. Les Docteurs du jour devant la Famille » pp. 149-165

Une fois demandé, il jaillit, comme tout jaillissait dans Brucker, cet homme-source, qui avait en lui tous les agissements et tous les bouillonnements de l’esprit humain… Mélange de tous les genres de livres dans un seul livre, tout à la fois roman et histoire, critique d’idées et de systèmes, invention de caractères et de personnages pour rendre plus vivantes et plus entraînantes ses théories ; dramatique, poétique, descriptif, mettant des tableaux de mœurs dans des paysages, naturel et intime, et, au milieu de tout cela, débordant de questions, d’explanations, d’argumentations, de démonstrations et de conversations qui roulent dans une verve de style semblable à un battement précipité d’artères, ce livre est peut-être un chaos de puissant ces trop alchimiquement entassées, mais c’est un chaos auquel il faut appliquer cet éternel mot de génie qu’on peut appliquer pour tout à Brucker, — à cet ébaucheur rapide et sublime !

1325. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Seulement, il a réduit l’importance de son personnage, en lui donnant des compagnons.

1326. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Honoré de Balzac » pp. 1-15

— la manière d’un homme assez épique de facultés pour harmoniser une création derrière un personnage qu’il veut mettre en saillie, et faire tourner toute une civilisation autour de lui !

1327. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Edmond About » pp. 91-105

On prend, par exemple, Les Parents pauvres et Les Intimes, et en y ajoutant le perpétuel ricanement de ce personnage d’un des romans de Frédéric Soulié, qui dit, à propos de tout, des choses les plus affreuses ou les plus dégoûtantes : « histoire de rire », on écrit très-bien la Germaine M. 

1328. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

Il faut bien le dire : il a diminué la notion du roman, de cette chose complexe et toute-puissante, égale au drame par l’action et par la passion, mais supérieure par la description et par l’analyse, car le romancier crée son décor et descend, pour l’éclairer, dans la conscience de ses personnages, ce que le poëte dramatique ne fait pas et ne peut pas faire.

1329. (1864) Physiologie des écrivains et des artistes ou Essai de critique naturelle

» — Opposez à ces personnages ceux de quelque roman licencieux de Duclos ou de Crébillon fils. […] Paul Véronèse met les personnages de son temps, et lui-même, et son frère, aux noces de Cana, avec Jésus-Christ. […] Je n’ai jamais pu m’en tirer, quelque intéressant que fût en lui-même le personnage du pauvre Tom. […] Les personnages ne disent pas un mot de ce qu’ils doivent dire ; c’est toujours l’auteur qui parle. […] Il y soutient du mieux qu’il peut le personnage d’un satirique ennuyé de se voir obligé à louer, et par là trouve le moyen de s’en tirer passablement.

1330. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

Volontairement ou non, il s’est peint dans un des personnages de son dernier roman. […] C’est un personnage d’un grand esprit, très supérieur, et d’un caractère exquis. […] Le monde que nous ouvrent les contes populaires de la Gascogne et de l’Agenais est un monde de féerie, dont les personnages et les scènes nous sont déjà connus pour la plupart. […] Tous ces personnages sont très simples, et ils ont des aventures extraordinaires. […] Associé à une vieille femme galante, il prenait la mine d’un dévot personnage et, sous le nom de frère Martin, faisait de nombreuses dupes à Séville.

1331. (1891) Politiques et moralistes du dix-neuvième siècle. Première série

J’ai dit qu’on pouvait s’étonner que ces personnages soient si peu des portraits. […] D’où il suit que de ses souffrances elle fait un personnage très réel et vivant, qui est elle-même, et de son rêve un personnage idéal qui reste de son pays, c’est-à-dire des nuages. […] Ajoutez-y des personnages épisodiques qui sont intéressants à un tout autre égard. […] Ce sont des personnages de La Bruyère. […] Ellénore, elle-même, est-elle un personnage bien net, bien éclairé, surtout bien profondément pénétré ?

1332. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre III. La critique et l’histoire. Macaulay. »

Quel est au juste le degré d’honnêteté et de malhonnêteté du personnage, voilà pour lui la question importante ; il y rapporte toutes les autres ; il ne s’attache partout qu’à justifier, excuser, accuser ou condamner. […] Il en est aussi pénétré que ses personnages. […] Les grands romanciers entrent dans l’âme de leurs personnages, prennent leurs sentiments, leurs idées, leur langage ; il semble que Balzac ait été commis-voyageur, portière, courtisane, vieille fille, poëte, et qu’il ait employé sa vie à être chacun de ces personnages : son être est multiple et son nom est légion.

1333. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

L’asphalte et la façade des maisons ont une blancheur de neige et les gens qui passent semblent des personnages d’Eugène Lami défilant sur une toile de Wikemberg. […] Enfin c’est l’exacte vérité, je le jure, il va, dans une planche de deux personnages, il va jusqu’à prendre l’ombre portée de l’un d’eux pour un troisième personnage, et met un moment l’entêtement le plus comiquement colère, à voir trois individus en scène… Et sur tout, il faut des explications qu’il note, qu’il boit. […] … Comme on se lève pour s’en aller, Gautier va à Scherer, le personnage le plus muet de la société, et lui dit : « Ah ça, j’espère que la première fois vous vous compromettrez, car nous nous compromettons tous, il n’est pas juste que vous restiez froidement à nous observer. » 24 juillet Gretz, près Fontainebleau.

1334. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Ils valaient beaucoup par la voix, l’accent, le sang-froid, la majesté du personnage. […] Songez que dans les Corbeaux, sur treize personnages il y en a sept qui sont « sympathiques ». […] Je m’en souviens, car c’était moi ; et j’étais fier de porter un si joli nom, mais désolé de jouer un si vilain personnage. […] Tel de ces galopins diplômés se croit un personnage, s’estime fort au-dessus de ses parents, rechigne pour travailler la terre et louche du côté de la ville. […] Il y a, boulevard Haussmann, un Shakespeare qui pourrait être, indifféremment, un Bernard Palissy, un Ronsard, un Jean Goujon, ou n’importe quel autre personnage du seizième siècle.

1335. (1893) Alfred de Musset

Il trouvait très mauvais qu’on l’eût emmené à deux cent cinquante lieues pour lui faire jouer un aussi sot personnage. […] Il y a dans son drame deux autres personnages pour lesquels il n’a eu aussi qu’à faire appel à des souvenirs, moins intimes toutefois. […] Quoi qu’il en soit, le personnage est bien joli. […] Musset y a mis une part de lui-même dans deux de ses personnages. […] C’est pour compléter la ressemblance entre ses deux héros et ses deux moi, que Musset a condamné le débauché des Caprices de Marianne à être le bourreau involontaire du personnage noble.

1336. (1925) Promenades philosophiques. Troisième série

Le Bon, si le témoignage unanime pouvait être considéré comme prouvant quelque chose, on pourrait dire que le diable est le personnage dont l’existence est le mieux démontrée. […] Claparède, un personnage entrevu, si on laisse les témoins libres, n’est guère reconnu que par une personne sur quatre, et encore avec des hésitations. […] Il a fait plusieurs allusions à ce phénomène de dédoublement, à ce personnage qui lui ressemblait comme un frère. […] Cependant, prenons le personnage à un état moins avancé, au moment où il ne mérite que ce compliment banal : c’est une heureuse nature. […] C’est tout à l’honneur de Flaubert, car on confond ainsi une création de l’esprit avec un personnage naturel.

1337. (1900) La culture des idées

Shakespeare n’a inventé que ses vers et ses phrases : comme les images en étaient nouvelles, cette nouveauté a nécessairement conféré la vie aux personnages du drame. […] Peut-être aussi qu’après le Satan lubrique de l’occultisme et de l’hérésie il a voulu esquisser le caractère du Satan orthodoxe, et qu’il l’a vu, comme le voyait le moyen âge, sous la forme particulière d’un personnage immonde et facétieux. […] Un roman où tout, jusqu’aux noms des personnages, jusqu’à la nuance des tentures, jusqu’à la forme des fauteuils, où tout, dialogues, paysages, gestes, sourires, cheveux, accidents, scènes d’amour, jalousies, souliers, jupes et consciences, où tout, dis-je, donnerait la sensation de retrouver un chien perdu ou une amante égarée ! […] Aucune jeune fille de dix-huit ans, aucun homme dépassant la trentaine, aucun personnage marié, ni mâle ni femelle, hormis de vénérables parents, ne figurent jamais dans ces histoires dévotes, sinon tout au fond du tableau. […] Ce personnage sortait évidemment d’une histoire illustrée de la peinture italienne, feuilletée le matin.

1338. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. DE VIGNY (Servitude et Grandeur militaires.) » pp. 52-90

Cinq-Mars, par son intérêt dramatique, par la grandeur ou la grâce des personnages, par ses vives et curieuses couleurs, eut un beau succès, contre lequel les critiques minutieuses ne purent rien. […] La vie de Racine est racontée avec une originalité et une finesse qui me font un plaisir infini, et il me semble qu’on doit vous savoir gré du soin que vous prenez de faire ressortir l’innovation de ses personnages moins surhumains.

1339. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

On aborde inconsidérément les époques, on brouille les personnages, on confond les nuances en les bigarrant. […] Il ne se bornait pas aux simples faits principaux ni à l’analyse des ouvrages, ni même à la peinture de la physionomie et du caractère ; il voulait tout savoir, renouer tous les rapports du personnage avec ses contemporains, le montrer en action, dans ses amitiés, dans ses rivalités, dans ses querelles ; il visait surtout à ajouter par quelque page inédite de l’auteur à ce qu’on en possédait auparavant.

1340. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

Macaulay, qui est fort suivi aujourd’hui : « Les meilleurs portraits, a dit ce grand peintre historique, sont peut-être ceux dans lesquels il y a un léger mélange de charge… Quelque chose est perdu pour l’exactitude, mais beaucoup est gagné pour l’effet… Les lignes moins importantes sont négligées, mais les grands traits caractéristiques s’impriment pour toujours dans l’esprit. » C’est ainsi qu’on raccommode après des siècles et qu’on refait bien des personnages. […] Le Franc-Archer de Bagnolet, une autre perle de ces petits théâtres, une parade très-spirituelle à un seul personnage, a été attribué à Villon.

1341. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Introduction. » pp. -

Si, au contraire, la conception générale à laquelle la représentation aboutit est une création poétique et figurative, un symbole vivant, comme chez les races aryennes, la langue devient une sorte d’épopée nuancée et colorée où chaque mot est un personnage, la poésie et la religion prennent une ampleur magnifique et inépuisable, la métaphysique se développe largement et subtilement, sans souci des applications positives ; l’esprit tout entier, à travers les déviations et les défaillances inévitables de son effort, s’éprend du beau et du sublime et conçoit un modèle idéal capable, par sa noblesse et son harmonie, de rallier autour de soi les tendresses et les enthousiasmes du genre humain. […] Qu’y a-t-il au fond d’une religion et d’un art sinon une conception de cette même nature et de ces mêmes causes primordiales, sous forme de symboles plus ou moins arrêtés et de personnages plus ou moins précis, avec cette différence que dans le premier cas on croit qu’ils existent, et dans le second qu’ils n’existent pas ?

1342. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLIIe entretien. Madame de Staël »

À peine eut-elle pris sa place accoutumée, que trois ou quatre vieux personnages s’approchèrent d’elle, lui parlèrent avec le plus tendre intérêt. […] Le personnage oratoire et poétique de Corinne, qu’elle a dépeint plus tard dans son voyage d’Italie, n’est pas une fiction ; c’est le portrait de mademoiselle Necker peinte devant sa glace par elle-même.

1343. (1895) Histoire de la littérature française « Seconde partie. Du moyen âge à la Renaissance — Livre I. Décomposition du Moyen âge — Chapitre II. Le quinzième siècle (1420-1515) »

Il s’établit — vers la cinquantaine, alors que délivré de sa longue prison, sans grand souci des affaires publiques ni même de ses prétentions princières, il vivait grassement, oiseusement, aux bords de la Loire, dans son aimable Blois, au milieu de sa petite cour de gentilshommes lettrés et de poètes quémandeurs, — il s’établit pour le reste de ses jours dans son personnage d’homme du monde aimable et désabusé : raillant l’amour et les dames, et les jeunes gens qui s’y donnent sérieusement, chansonnant amis et indifférents, avec une malice qui n’appuie pas, et pique sans blesser, jouissant de la vie sans illusion, et prêt à la mort, ne souhaitant plus qu’en « hiver du feu, du feu, et en été boire, boire », avec cela bonne compagnie et gais propos, de tout le reste du monde ne s’en souciant pas, et ne lui demandant pas plus qu’il ne lui donne : enfin, le plus gracieux des égoïstes et des épicuriens, qui même devança peut-être les hardiesses païennes du siècle suivant, si l’on s’arrête à cette inquiétante forme de serment qui lui échappe : Par mon âme, s’il en fut en moi. […] Il nous conte comment Louis XI gorgeait d’argent Edouard IV et ses conseillers, leurrait de vaines promesses d’alliance et de mariage les hommes d’État anglais, sauf, dit-il, « plusieurs sages personnages et qui voyaient de loin ; et n’avaient point de pension comme les autres132 ».

1344. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

. — Ses personnages ne nous sont présentés que dans les moments où ils agissent ; et il n’est pas un de leurs sentiments qui ne soit accompagné d’un geste, d’un air de visage, commenté par une attitude, une silhouette. C’est à cause de cela qu’ils nous entrent si avant dans l’imagination et qu’ils nous restent dans la mémoire. — Les personnages des romans « psychologiques » redeviennent pour nous, la lecture finie, des ombres vaines.

1345. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre VIII, les Perses d’Eschyle. »

Ils se nomment et s’annoncent eux-mêmes, comme les personnages de nos peintures primitives par les phylactères qui pendent de leurs bouches — « Ceux que vous voyez ici, ce sont les Fidèles. […] Dans presque tous ses drames, sous l’éclat d’un malheur subit, le personnage frappé se changeait subitement en statue béante, retournée vers une ville en flammes ou des enfants massacrés.

1346. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre IV. Shakespeare l’ancien »

Quels personnages prend Eschyle ? […] On sait par les didascalies que les Perses furent représentés sous l’archonte Ménon, les Sept Chefs devant Thèbes sous l’archonte Théagénidès et l’Orestie sous l’archonte Philoclès ; on sait par Aristote qu’Eschyle osa, le premier, faire parler deux personnages à la fois ; par Platon, que les esclaves assistaient à ses pièces ; par Horace, qu’il inventa le masque et le cothurne ; par Pollux, que les femmes grosses avortaient à l’entrée des Furies ; par Philostrate, qu’il abrégea les monodies ; par Suidas, que son théâtre s’écroula sous la foule ; par Élien, qu’il blasphéma ; par Plutarque, qu’il fut exilé ; par Valère-Maxime, qu’un aigle le tua d’une tortue sur la tête ; par Quintilien, qu’on retoucha ses pièces ; par Fabricius, que ses fils sont accusés de cette lèse-paternité ; par les marbres d’Arundel, la date de sa naissance, la date de sa mort et son âge, soixante-neuf ans.

1347. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Voyez cette page, par exemple, sur une danseuse (un des personnages du roman), une espèce de danseuse composite, faite de deux réverbérations de ces deux êtres évaporés, Fanny Elssler et Taglioni, et qui, vieillie, brisée, anéantie, le spectre charmant d’elle-même, se remet un soir à danser sous l’influence d’une impression heureuse, et demandez-vous si ce poète, qui a chancelé un moment du côté du Réalisme, a eu jamais davantage ce que le Réalisme, cette brosse qui se croit un pinceau, a le moins :   la nuance opalisée, la transparence, la grâce, l’immatérialité ! […] Assurément, il y avait là l’étoffe d’un fier personnage de comédie : le Falstaff de l’argent ; mais Daudet a mieux aimé en faire le héros pathétique d’un drame.

1348. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Lettres de la mère Agnès Arnauld, abbesse de Port-Royal, publiées sur les textes authentiques avec une introduction par M. P. Faugère » pp. 148-162

Mais si je ne craignais de blesser quelques bonnes âmes restées peut-être encore jansénistes au pied de la lettre, je dirais tout simplement qu’après avoir bien considéré les incidents et les personnages de ce drame intérieur, je suis persuadé que la mère Agnès, livrée à elle-même et à sa propre nature, eût été plus soumise qu’elle ne l’a été, qu’elle était portée, comme elle l’a écrit un jour, à l’indifférence sur ces questions de controverse, mot très sage chez une religieuse et dont elle eut tort ensuite de se repentir ; je dirais que la manière indulgente dont elle continua de traiter une de ses nièces qui avait signé ce qu’exigeait l’archevêque et ce que conseillait Bossuet, que la parole tolérante qui lui échappa alors : « À Dieu ne plaise que je domine sur la foi d’autrui ! 

1349. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

I Me voici donc à l’aise, libre de rechercher toutes les causes qui ont pu former mon personnage et sa poésie ; libre de voyager et de conter mon voyage.

1350. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

C’était une forte tentation et un vif plaisir, de poser soi-même et de dessiner le personnage idéal qu’on voulait être dans la postérité.

1351. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

L’écrivain lui-même renonce aux exactes et fines analyses : il déborde de sensibilité comme ses personnages, il s’abandonne à des transports délirants ; son inspiration est fiévreuse, troublée, intempérante.

1352. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Pour nous autres, gens du Nord et du Centre, le Gascon est, nous aimons à nous figurer qu’il est, un personnage souple, spirituel, superficiel, causeur amusant sur toute chose, sans travail et sans connaissance exacte.

1353. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XIII. Premières tentatives sur Jérusalem. »

De tout cela résulta autour du temple une sorte de cour de Rome, vivant de politique, peu portée aux excès de zèle, les redoutant même, ne voulant pas entendre parler de saints personnages ni de novateurs, car elle profitait de la routine établie.

1354. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

Telle ou telle expérience peut avoir été mal conçue ou mal conduite ; le personnage observé peut avoir eu intérêt à dissimuler certaines tares, à s’attribuer libéralement des qualités qu’il n’a pas.

1355. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre II » pp. 12-29

La grandeur des personnages était donc bien importante !

1356. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Avertissement sur la seconde édition. » pp. 23-54

Nous ignorons de quels Quarante celui à qui on l’adresse peut être Membre : il est du moins très-certain qu’une Société composée de quarante personnages qui goûteroient de semblables Epîtres, formeroit bien la plus mauvaise de toutes les Compagnies.

1357. (1901) La poésie et l’empirisme (L’Ermitage) pp. 245-260

Ils donneront à leurs personnages fictifs, un corps, des gestes, un visage : ils les mêleront ainsi que se mêlent les habitants d’une même cité.

1358. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

Posnett, dans un livre tout récent : Comparative literature, envisage dans un esprit nouveau le problème de la morphologie artistique, et s’attache à démêler, dans une énumération malheureusement superficielle, quelle influence ont exercée sur la forme littéraire, sur l’individuation des personnages par exemple et la description de la nature, les différentes formes de la vie sociale, le clan, la communauté urbaine, la nation, le cosmopolitisme.

1359. (1904) La foi nouvelle du poète et sa doctrine. L’intégralisme (manifeste de la Revue bleue) pp. 83-87

Le lecteur moderne est ce personnage.

1360. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Catulle Mendès qui prône encore un théâtre de rêve, mâtiné de Marivaux, de Tabarin et d’Eschyle, le public, qui accepta tant de médiocres mélos, n’accepte plus les personnages chaponnés de Shakespeare.

1361. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre dixième. »

Nous avons déjà vu quelques exemples de ce tour vif et animé, qui met d’abord le personnage en scène.

1362. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XXII. La comtesse Guiccioli »

Elle avait pu condescendre avec son nom de Guiccioli, immortalisé par Byron, à épouser le marquis de Boissy, ce personnage de comédie politique dont, en ce temps-là, toute la France riait ; et la marquise de Boissy ne devait pas oser, avec la décence comme le monde comprend la décence, tout dire de l’intimité de la comtesse Guiccioli avec lord Byron, L’embarras qu’elle éprouvait fut si grand, qu’il résista aux picotements de l’amour-propre du bas-bleu, du bas-bleu qui l’excitait à profiter de cette position, unique pour le succès d’un livre, d’avoir été la maîtresse de lord Byron !

1363. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’empire russe depuis le congrès de vienne »

Caméléons qui prennent toutes les teintes, ayant dans l’esprit ces mouvements charmants du singe que Joubert discerne si bien dans l’esprit de Voltaire, ils sont, en raison de tout cela, de redoutables diplomates, mais, sans caractère comme tous ceux qui font beaucoup de personnages, ils n’ont à eux ni leur élégance, ni leurs mœurs, ni leur littérature, ni leurs vices.

1364. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

Dans cette histoire où se meuvent des personnages comme les Guise et comme Catherine de Médicis, le seul homme de cette famille des Valois, tombée en quenouille et terminée par cet énigmatique Henri III, l’hermaphrodite d’Agrippa d’Aubigné : Si bien qu’en le voyant, chacun était en peine S’il voyait un roi-femme ou bien un homme-reine !

1365. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

Si c’est de la haine contre le clergé que ce personnage, cette haine, traduite ainsi, est innocente et ne nous blesse pas.

1366. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VII. »

Il donne à ses personnages dans l’action et dans le discours toute la dignité qui leur est séante : s’il se modérait, il semblerait fait pour être l’émule le plus rapproché d’Homère.

1367. (1890) La bataille littéraire. Troisième série (1883-1886) pp. 1-343

Mais il était Alexandre Dumas, et en le recevant on recevait deux personnages, lui et son père ! […] « Ici un intérieur de journal », a écrit M. de Maupassant, et on voit que plusieurs des personnages du roman ont passé par le journalisme. […] Monach s’empressait autour de la mère de Courtaron ; il lui demandait les noms des gens qu’il voyait passer et se faisait présenter aux personnages. […] De charmantes pages décrivent les angoisses de ces trois personnages, et je n’ai qu’un regret, c’est de ne pas pouvoir les citer. […] C’est un personnage inattendu, la seconde femme de M. de Loisail, une charmante création, qui dira le mot qu’il faut pour que le bonheur vienne éclairer le dénouement.

1368. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [1] Rapport pp. -218

Ce furent, au contraire, d’assez grossiers personnages. […] Mais c’est surtout dans le principal personnage, dans Léonora Galigaï, que sont sensibles ces différences de personnalité en vue de l’effet immédiat. […] Surtout se dresse, admirable, le personnage de-Lorenzo. […] N’importe, voici un personnage que jamais n’oubliera l’humanité. […] Mais que le personnage de Charlotte Corday est niaisement, puérilement, petitement établi et développé !

1369. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Tous les autres personnages sont habillés à l’avenant. […] Comment saisir cet insaisissable personnage ? […] Ce sont les types et les caractères, ce sont les personnages des romans. […] Balzac, mêle à ses deux mille personnages imaginaires un très petit nombre de personnages réels. […] Zola prêta indistinctement à tous ses personnages.

1370. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Alexis Piron »

Tout cela est fait à la française ; mais aussi longtemps que nos auteurs dramatiques ne sauront pas peindre les mœurs des personnages qu’ils mettent sur la scène, ni l’esprit des peuples et des siècles dont ils empruntent leurs sujets, je regarderai leurs pièces comme des ouvrages faits pour amuser ou épouvanter des enfants ; mais jamais je ne les croirai dignes de servir d’instruction et de leçon aux souverains et aux nations ; c’est pourtant là le véritable but de la tragédie. » Il nous est impossible aujourd’hui, — à moi du moins, — de nous former une idée nette de ces pièces, surtout des tragédies d’alors, ni d’y saisir quelque différence à la lecture ; elles me semblent à peu près toutes pareillement insipides et d’un ennui uniforme. […] Voilà le mérite : un entrain vif, perpétuel, inattendu, une folie légère qui circule entre tous ces personnages et qui les met au ton : Ici, l’amour des vers est un tic de famille. […] Je n’en conclurais pas pour cela à l’entière bonhomie du personnage ni à l’absence de bile : seulement son cerveau ne portait pas à long terme.

1371. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Malherbe »

On connaissait l’homme, le poète, le personnage vivant, par Racan et par les contemporains qui en ont écrit, qui avaient recueilli ses mots, ses apophtegmes : maintenant on a découvert les contrats de mariage, les actes mortuaires, les procès, etc. ; tout cela se complète ; la jeunesse pourtant n’y brille pas. […] Le Chœur était tout, à l’origine, dans la tragédie ; l’action ne vint que peu à peu, introduisant et mettant en jeu un petit nombre de personnages devant un autel : le Chœur et ses chants, même quand ils ne parurent plus qu’un entracte dans l’action, restaient donc une partie intégrante de la tragédie antique. […] Voilà le côté grandiose du personnage.

1372. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Tout cela, on le voit ; concorde et s’explique à merveille ; on a le cadre et le canevas du roman ; mais c’est de la physionomie des personnages et de la nature des sentiments qu’il tire son véritable et durable intérêt. […] C’est une galanterie imitée d’Horace, qui avoit rapport à une aventure où j’étois intéressé ; et les personnages dont il y est question ne sont guère plus connus dans le monde que la Lydie et le Télèphe de l’original. […] Il est trop souvent abusé par des recueils de lettres ou d’anecdotes que l’on altère sans scrupule ; mais ces petites supercheries, bonnes pour amuser la malignité, ne sauraient être indifférentes à un lecteur honnête, surtout lorsqu’elles peuvent compromettre des personnages respectables et faire quelque tort aux auteurs dont on veut honorer la mémoire.

1373. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIIIe entretien. Balzac et ses œuvres (3e partie) » pp. 433-527

Le surplus des parois est tendu d’un papier verni représentant les principales scènes de Télémaque, et dont les classiques personnages sont coloriés. […] Les deux autres chambres étaient destinées aux oiseaux de passage, à ces infortunés étudiants qui, comme le père Goriot et Mlle Michonneau, ne pouvaient mettre que quarante-cinq francs par mois à leur nourriture et à leur logement ; mais Mme Vauquer souhaitait peu leur présence et ne les prenait que quand elle ne trouvait pas mieux : ils mangeaient trop de pain. » III Tel est le préambule de cette admirable tragédie du Père Goriot ; puis vient, avant l’action, le catalogue raisonné ou peint des personnages que Balzac met en scène. […] Il s’était établi rue de la Jussienne, près de la Halle-aux-Blés, et avait eu le gros bon sens d’accepter la présidence de sa section, afin de faire protéger son commerce par les personnages les plus influents de cette dangereuse époque.

1374. (1925) La fin de l’art

Ferrero, qui est un long dialogue philosophique à la manière de Renan, un assez curieux personnage, sorte de Caliban en qui se concentre l’essence du béotisme moderne ou encore du futurisme moderne, ce qui est bien près d’être la même chose. […] Cette médiocrité est telle qu’au lieu de rendre sympathiques les personnages statufiés, elle les fait prendre en mépris. […] Sa gloire est à mettre à côté de celle de Salomon de Caus, personnage à peu près fictif.

1375. (1932) Le clavecin de Diderot

Ce paradoxe apparent est à l’image de la complexité d’un personnage tel que René Crevel, mais aussi à l’image de la singularité de son œuvre. […] Cette déception, s’ajoutant à la réapparition de la tuberculose rénale dont il se croyait guéri, l’aurait poussé à se suicider au gaz, geste qui reproduit de façon étonnante celui du personnage principal de Détours, son premier roman, écrit onze ans plus tôt. […] Un personnage velu, cylindrique et à ressorts, d’une poussée, soulevait son couvercle. […] Le sylvestre personnage conserve tout son sang-froid, pour jouer avec une pomme sur la tête (autant dire avec la tête) de son fils. […] Prudhomme est un personnage créé en 1830 par le dramaturge Henri Monnier.

1376. (1927) Des romantiques à nous

Le personnage de Volmar ne le contente pas, à cause de sa détestable philosophie : « J’avoue, mon cher Rousseau, que je ne vois aucune bonne raison qui ait pu vous déterminer à faire de l’excellent Volmar un athée déterminé ou du moins à ne l’avoir pas fait changer de système à la fin du roman. » Et Jean-Jacques de lui répondre : « Vos griefs contre Volmar me montrent que j’ai mal rempli l’objet du livre ou que vous ne l’avez pas bien saisi. […] Il figure un personnage aussi laïque qu’il soit possible, et qui prêche aux dames (pas à elles seules d’ailleurs) non la vertu, mais la raison, sa cousine : M.  […] Mais, comme il ne leur a point, sans doute, trouvé assez de piquant, il y en a adjoint d’autres, qui lui auraient été tenus, prétend-il, par certain fantastique personnage, rencontré à deux pas de ma demeure, et qui se serait présenté à lui comme mon « démon familier ». […] En un sens, le vieux moine que l’on voit au premier acte, dans une salle de son couvent, occupé à continuer, dans un esprit de sérénité qu’aucun événement n’agite, les annales de la Russie rédigées par la chaîne silencieuse de ses prédécesseurs, ce vieux moine est le principal personnage de l’œuvre. […] » On imagine combien le fond d’humour de Lekeu dut se délecter de ce personnage.

1377. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Y a-t-il un de ces personnages qui se soit macéré ? […] Un personnage leur apparaît, puis une action, puis un paysage, puis une enfilade d’actions, de personnages et de paysages qui se font, se complètent et s’agencent par un développement involontaire, comme il nous arrive lorsqu’en songe nous contemplons un cortége de figures qui, par leur propre force, se déploient et s’ordonnent devant nos yeux. […] Pour déployer ces facultés épiques, et pour les déployer dans la région sublime où cette âme se trouve naturellement portée, il ne faut pas moins que l’épopée idéale, c’est-à-dire située hors du réel, avec des personnages qui existent à peine et dans un monde qui ne peut être nulle part. […] Ce sont bien des personnages vivants, des actions qu’il remue ; seulement, de loin en loin, chez lui, les palais enchantés, tout le cortége des resplendissantes apparitions tremble et se déchire comme une vapeur, laissant entrevoir la pensée qui le suscite et qui l’ordonne. […] Nous sentons que ses personnages ne sont point de chair et de sang, et que tous ces fantômes brillants ne sont que des fantômes.

1378. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Bernardin de Saint-Pierre »

Il avait quelquefois de ces manières de dire orientales comme Bernardin en a de si heureuses ; mais il les avait plus profondes, tenant plus à la pensée : « L’intelligence de l’homme, dit Saint-Martin, doit être traitée comme les grands personnages de l’Orient qu’on n’aborde jamais sans avoir des présents à leur offrir. » Ils furent tous les deux, Bernardin et Saint-Martin, un moment associés sur une liste (avec Berquin d’ailleurs, Sieyès et Condorcet), comme pouvant devenir précepteurs du fils de Louis XVI. […] On y remarque quelques rapports lointains avec des personnages qu’il avait rencontrés durant sa vie antérieure, mais c’est seulement dans les noms que la réminiscence, et pour ainsi dire l’écho, se fait sentir.

1379. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre II. Attardés et égarés »

La guerre y tient tout juste autant de place qu’il faut pour marquer la noblesse des personnages ; Céladon ne serait pas l’amoureux idéal, si jamais il n’avait l’épée en main. […] L’histoire fut travestie par ces poètes autant qu’elle l’était par les historiens : imaginez le Louis XIV de la Place des Victoires, ou les personnages des batailles de Le Brun dans des architectures et des jardins tels que ceux de Versailles, et vous aurez l’Alaric de Scudéry.

1380. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

Beaucoup d’autres saints personnages travaillaient au même but ; mais la façon dont Olier s’y prit fut tout à fait originale. […] Ces saints personnages réunirent leurs prêtres en communautés et ces communautés devinrent des écoles de cléricature, des espèces de pensions où se formèrent à la piété des jeunes gens qui se préparaient à l’état ecclésiastique.

1381. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Et, en effet, quelques conversations en style de rapin, une affectation d’indépendance qui ressemble à la casquette que les jeunes filles se plantent sur l’oreille pour monter à cheval, la gaminerie d’allures que la bêtise et la lâcheté des hommes adorent, tout cela, dans le personnage de Renée, reste à la surface de la vie, et cela devait aller jusqu’au fond, la déformer et la débrailler. […] L’écrivain y décrit jusqu’aux paysages des pays qui ne seront point le théâtre de son roman, et par lesquels ses personnages passent pour n’y revenir jamais… Avec cette charrette, trop minutieusement décrite, de bateleurs ambulants qu’on a vue déjà rouler dans L’Homme qui rit ; avec ces Hercules et ces pitres de foire, bohémiens très chers à la littérature bohème de ce temps, et dont on n’oublie ni le moindre haillon, ni le moindre paillon, les Zemganno ressemblent à beaucoup des anciens feuilletons de Théophile Gautier.

1382. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Variétés littéraires, morales et historiques, par M. S. de Sacy, de l’Académie française. » pp. 179-194

Ne lui demandez pas de retourner les idées reçues sur un personnage et sur un auteur, ou de dire des choses connues d’un air de paradoxe et de gentillesse.

1383. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Mélanges de critique religieuse, par M. Edmond Scherer » pp. 53-66

Si l’on y gagne de connaître un peu mieux le personnage par des détails particuliers, on y perd en ne pouvant le plus souvent exprimer ce qu’on sent avec une entière netteté et franchise.

1384. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Un des derniers traducteurs de Dante, une manière de personnage politique, me faisant un jour l’honneur de m’apporter le premier volume de sa traduction, me disait d’un air dégagé : « Je l’ai traduit avec charme. » C’est là de la fatuité.

1385. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Renan, on voit les différentes nations tributaires du roi de Perse représentées par un personnage qui porte le costume de son pays et tient entre les mains les productions de sa province pour en faire hommage au souverain.

1386. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Frochot, Préfet de la Seine, histoire administrative, par M. Louis Passy. »

Parmi les personnages publics surpris par Malet, tous du moins s’étaient récriés, avaient résisté et n’avaient cédé qu’à la violence : un seul, que la conspiration semblait épargner comme moins suspect, avait accepté, sans raisonner, le mot d’ordre et, au premier avis, avait tenu son Hôtel-de-Ville ouvert comme une hôtellerie aux nouveaux arrivants.

1387. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « HOMÈRE. (L’Iliade, traduite par M. Eugène Bareste, et illustrée par M.e Lemud.) —  second article  » pp. 342-358

Ce que j’indique là pour un ordre de personnages et de tableaux, il faudrait l’étendre à tous les autres.

1388. (1875) Premiers lundis. Tome III « Sur le sénatus-consulte »

Je ne suis pas jurisconsulte ; je suis un peu étonné, tout le premier, d’avoir à discuter un texte de loi ; je suis prêt à déférer à toutes les lumières des personnages plus compétents ; mais quand j’ai lu le texte du sénatus-consulte, seul, livré à mon seul bon sens et sans le commentaire de personne, j’ai bondi à voir en tête et en vedette d’un acte libéral ces mots désobligeants pour tout le monde, y compris les ministres eux-mêmes (car il n’est pas agréable de s’entendre dire en face qu’on dépend) : « Les ministres ne dépendent que de l’empereur. » Eh !

1389. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Quelque sublime que soit Homère par l’ordonnance des événements et la grandeur des personnages, il arrive souvent à ses commentateurs de se transporter d’admiration pour les termes les plus ordinaires du langage, comme si le poète avait découvert les idées que ces paroles exprimaient avant lui.

1390. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Les femmes de France : poètes et prosateurs  »

II Voici la contemporaine de Jeanne d’Arc, l’excellente Christine de Pisan, si digne, si naïve, si pleine de vertu et de prud’homie, qui, raide comme un personnage de vitrail, s’applique, avec le grand sérieux des bonnes âmes du moyen âge, gauchement et gravement, à enserrer la langue balbutiante de son siècle dans la forme du style cicéronien comme dans un heaume lourd et trop large.

1391. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

Ce magicien-roi qui sait tout, à qui toutes les époques et tous les personnages de l’histoire sont familiers, et qui ressuscite les Égyptiennes du temps de Moïse, aussi bien que la lydienne Omphale, a trop souvent caché, derrière son manteau de pourpre, le ferme et délicat rimeur, d’une pureté antique et d’une idéale délicatesse, qui, pareil à un statuaire grec, ne livre pas son Âme, et pudiquement la laisse deviner à peine sous les blancheurs du marbre sacré.

1392. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Ses lectures l’auront à point dégoûté de la badauderie des intrigues : il est bon de s’être diverti jeune à Ponson du Terrail pour se blaser par la suite aux complications feuilletonnées ; non que l’aventure et le romanesque n’aient leur prix, mais à condition qu’ils soient aventure et romanesque de personnages doués de caractère, d’histoires pourvues d’humanité, — et c’est la différence de Balzac à Gaboriau.

1393. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVII. Forme définitive des idées de Jésus sur le Royaume de Dieu. »

Malgré l’église féodale, des sectes, des ordres religieux, de saints personnages continuèrent de protester, au nom de l’Évangile, contre l’iniquité du monde.

1394. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre IV : La Volonté »

De même, demander si nos volitions sont libres ou non, c’est tout confondre, c’est ajouter des difficultés factices à un problème qui de sa nature n’est pas insoluble ; c’est ressembler au personnage à qui Carlyle fait demander : « si la vertu est un gaz. » Un motif me pousse, la faim ; je prends la nourriture qui est devant moi, je vais au restaurant, où j’accomplis quelque autre condition préliminaire : voilà une séquence simple et claire ; faites-y entrer l’idée de liberté, et la question devient un chaos.

1395. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Les Confidences, par M. de Lamartine. (1 vol. in-8º.) » pp. 20-34

Il est question dans le roman d’Adèle de Sénange d’un personnage qui ne parle point sans placer trois mots presque synonymes l’un après l’autre, qui ne vous salue, par exemple, qu’en vous priant de compter sur sa déférence, ses égards, sa considération.

1396. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Bossuet, et Fénélon. » pp. 265-289

Les disputes du quiétisme, de l’amour pur & parfait, si humiliantes pour la raison humaine, auroient eu le même sort, sans le nom des personnages qui s’y trouvèrent entraînés ; Louis XIV, madame de Maintenon, & les deux plus beaux génies qui fussent alors dans l’église.

1397. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « De la tragédie chez les Anciens. » pp. 2-20

Après cet effort, il lui était bien moins difficile de transporter de l’épopée à la tragédie, ce qui s’appelle intrigue ou nœud ; car il est plus aisé de faire oublier le poète et le narrateur, quand on vient à brouiller différents intérêts et à nouer le jeu de divers personnages, que quand on veut mettre les spectateurs au fait d’une action, sans qu’ils s’aperçoivent qu’on ait eu dessein de le faire.

1398. (1908) Les œuvres et les hommes XXIV. Voyageurs et romanciers « Madame Paul de Molènes »

Au lieu des cinq actes qui sont le terme des plus longues comédies, celle-ci en a seize, qui sont des chapitres… Malgré l’ancienneté des noms qui forment son titre, monsieur Adam et madame Ève ne sont pas les personnages historiques de ces noms vieux comme l’univers.

1399. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — Se connaître »

Gabriele d’Annunzio faisait un jour cet aveu naïf et typique à un rédacteur du New-York Hérald : « Je suis un pur Latin et chez tout individu de race différente j’aperçois un côté barbare. » Le Français dirait volontiers, lui aussi : « Je suis un pur Français, et tout ce qui n’est pas semblable à moi m’apparaît inférieur. » C’est l’inverse, on le voit, de la parole du personnage de Térence : Homo sum… L’individualisme national exclusif paraît être la plus forte vertu du Français qui, de bonne foi, se croit généralement d’une essence plus pure que les vulgaires humains.

1400. (1922) Durée et simultanéité : à propos de la théorie d’Einstein « Chapitre II. La relativité complète »

Que le personnage de Morus, « assis bien tranquille », prenne la résolution de courir à son tour, qu’il se lève et qu’il coure : on aura beau soutenir que sa course est un déplacement réciproque de son corps et du sol, qu’il se meut si notre pensée immobilise la Terre, mais que c’est la Terre qui se meut si nous décrétons immobile le coureur, jamais il n’acceptera le décret, toujours il déclarera qu’il perçoit immédiatement son acte, que cet acte est un fait, et que le fait est unilatéral.

1401. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre VIII. »

Il faut que tu apprennes à connaître toutes choses et le fond réel de la vérité persuasive, et les opinions des mortels qui reposent non sur une foi véridique, mais sur l’erreur ; et tu connaîtras ainsi, comment il faut marcher prudemment à travers le tout, en faisant l’épreuve de toute chose. » En tête de cette philosophie poétique dont la Grèce allait recueillir les leçons, il reste à placer le personnage demi-fabuleux de Pythagore.

1402. (1926) La poésie de Stéphane Mallarmé. Étude littéraire

Chez le Marasquin qui incarna le personnage directeur d’un journal de mode, chez Stéphane Mallarmé tout entier, il y avait quelque chose de légèrement féminin : cette séduction et ce demi-sourire, ce geste de danseuse par lequel, selon Rodenbach, il entrait en la conversation, pour y faire miroiter des toilettes entrevues, une imperceptible traduction du dandysme brummiellien en coquetterie. […] Quoique le prêtre céans n’ait qualité d’acteur, mais officie — désigne et recule la présence mythique avec qui on vient se confondre ; loin de l’obstruer du même intermédiaire que le comédien qui arrête la pensée à son encombrant personnage. […] Il fait songer à ce personnage des contes de Grimm qu’un géant défie de lancer aussi haut que lui un caillou. […] Le Romantisme, au contraire, dans ses personnages, cherche un état lyrique à nous faire adopter, ce qui le rend courtisan de la passion. […] Leconte de Lisle croira enrichir la poésie en allant chercher des sujets dans les traductions de poèmes hindous ou finnois, comme Voltaire pensait renouveler la tragédie en demandant des personnages à la Chine et à l’Amérique.

1403. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Flaubert semblait croire que les personnages antiques jouissaient eux-mêmes de l’impression d’étrangeté qu’ils nous donnent. […] Il ne s’est pas fait illusion un seul instant sur l’autorité de ses personnages. […] Il est intéressant de rechercher ce qu’était en réalité ce personnage fameux, et s’il mérite sa gloire en quelque manière. […] Mais le personnage d’Antoine est si étrange, si curieux et ; par un certain côté, si grand, qu’il se dessine de lui-même. […] J’avoue qu’à cet égard le personnage de Caliban m’intéresse et m’inquiète beaucoup.

1404. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Il dressera un arbre généalogique de ses personnages qui est comme un code des lois de l’hérédité. […] Sa caractéristique est dans ses livres la prédominance de la volition, comme chez les Goncourt, ces professionnels de la névrose, la caractéristique des personnages est la prédominance de l’émotion, comme chez Stendhal, ce passionné d’idéologie, la prédominance de l’analyse intérieure. […] Six ans après et dans la préface de Pierrette, il revenait à la charge, et, parlant cette fois de ses héros aussi bien que de ses héroïnes, il calculait que la somme de ses personnages vertueux était d’un tiers supérieure à celle des personnages qui avaient quelque chose à se reprocher. […] Dans ce discours de d’Arthez qui contient toute une esthétique du roman historique, notez avec quelle minutie les problèmes de facture sont abordés : « Vous commencez, comme Walter Scott, par de longues conversations pour poser vos personnages. […] Par derrière les émotions des personnages du Réquisitionnaire nous apercevons pareillement toutes les victimes de la Révolution et tous les bourreaux.

1405. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre IV. La philosophie et l’histoire. Carlyle. »

Il le sait, et prétend fort bien que le génie est une intuition, une vue du dedans (insight). « La méthode de Teufelsdrœckh, dit-il en parlant d’un personnage dans lequel il se peint lui-même, n’est jamais celle de la vulgaire logique des écoles, où toutes les vérités sont rangées en file, chacune tenant le pan de l’habit de l’autre, mais celle de la raison pratique, procédant par de larges intuitions qui embrassent des groupes et des royaumes entiers systématiques ; ce qui fait régner une noble complexité, presque pareille à celle de la nature, dans sa philosophie ; elle est une peinture spirituelle de la nature, un fouillis grandiose, mais qui, comme la foi le dit tout bas, n’est pas dépourvu de plan1418. » Sans doute, mais les inconvénients n’y manquent pas non plus, et en premier lieu l’obscurité et la barbarie. […] Ils ont rendu sensibles des thèses morales, des périodes historiques ; ils ont fabriqué et appliqué des esthétiques ; ils n’ont point eu de naïveté, ou ils ont fait de leur naïveté un usage réfléchi ; ils n’ont point aimé leurs personnages pour eux-mêmes ; ils ont fini par les transformer en symboles ; leurs idées philosophiques ont débordé à chaque instant hors du moule poétique où ils voulaient les enfermer ; ils ont été tous des critiques1421, occupés à construire ou à reconstruire, possesseurs d’érudition et de méthodes, conduits vers l’imagination par l’art et l’étude, incapables de créer des êtres vivants, sinon par science et par artifice, véritables systématiques qui, pour exprimer leurs conceptions abstraites, ont employé, au lieu de formules, les actions des personnages et la musique des vers. […] Par exemple, les théologiens1423, ayant voulu se représenter avec une netteté et une certitude entière les personnages du Nouveau Testament, ont supprimé l’auréole et la brume dans lesquelles l’éloignement les enveloppait ; ils se les sont figurés avec leurs vêtements, leurs gestes, leur accent, avec toutes les nuances d’émotion que leur style a notées, avec le genre d’imagination que leur siècle leur a imposé, parmi les paysages qu’ils ont regardés, parmi les monuments devant lesquels ils ont parlé, avec toutes les circonstances physiques ou morales que l’érudition et les voyages peuvent rendre sensibles, avec tous les rapprochements que la physiologie et la psychologie modernes peuvent suggérer ; ils nous en ont donné l’idée précise et prouvée, colorée et figurative1424 ; ils les ont vus non pas à travers des idées et comme des mythes, mais face à face et comme des hommes.

1406. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

L’importance bruyante du personnage attire aujourd’hui tous les yeux ; mais quand on a fait en somme plus de bruit que de bien, il n’en reste pas grand chose. […] Le premier souci de qui veut sortir de son néant doit donc être de chercher d’influents personnages qui, nous ayant acceptés eux-mêmes, s’emploient activement à nous faire accepter du monde. […] C’est un personnage légendaire reçu dans l’histoire par Tite-Live. […] L’imagination des hommes est merveilleusement inventive pour doter non seulement de l’existence, mais de toutes sortes d’attributs les personnages de sa création. […] Les caractères, les sentiments, la manière d’être des personnages, tout est soumis à la règle de l’antithèse ; et, semblables au violon qui règle les mouvements des danseurs, les deux jambes de l’alexandrin règlent les mouvements du sentiment et de la pensée.

1407. (1894) Les maîtres de l’histoire : Renan, Taine, Michelet pp. -312

Quand on doit raconter une période ou la biographie d’un personnage pour lesquelles les documents positifs font défaut, l’histoire a le droit de reconstituer par divination « une des manières dont les choses ont pu être ». […] On y trouve une érudition consciencieuse, une étude approfondie des documents originaux, et en même temps un génie vraiment créateur, qui pénètre dans l’âme même des personnages et sait les faire vivre et agir. […] Au lieu de donner à chaque événement, à chaque personnage la place proportionnée qui lui est due, il se laisse guider par les caprices de son imagination, se répand à chaque instant en des digressions poétiques. […] S’il anime toute la nature, s’il ressuscite les personnages qui ne sont plus, c’est que son cœur ne reste jamais étranger à ce qui occupe son esprit. […] Je n’ai pas vu le personnage ; je n’ai pas vu sa photographie ; mais nous avons une foule de détails de son signalement.

1408. (1899) Préfaces. — Les poètes contemporains. — Discours sur Victor Hugo pp. 215-309

Ainsi, quand un très noble esprit, un profond penseur, un précurseur de notre Renaissance littéraire, Alfred de Vigny, conçut et écrivit le beau poème de Moïse, il ne fit point du libérateur d’Israël le vrai personnage légendaire qui nous apparaît aujourd’hui, le chef théocratique de six cent mille nomades idolâtres et féroces errant affamés dans le désert, le Prophète inexorable qui fait égorger en un jour vingt-quatre mille hommes par la tribu de Lévi. […] L’éclat du style et l’éloquence lyrique des personnages semblaient aux adversaires du Poète l’unique mérite et à la fois le défaut fondamental de ces œuvres si pleines pourtant de situations dramatiques. […] Nous sommes ici en face d’une trilogie Eschylienne, d’une tragédie épique dont les principaux personnages sont plus grands que nature et se meuvent dans un monde titanique.

1409. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre II. La parole intérieure comparée à la parole interieure »

Alors que le personnage est accablé par la lettre anonyme lui apprenant les amours de sa femme et de Julien, il finit par être un instant absorbé et consolé par l’idée de la magnificence de son château de Vergy : « telle est l’intervention des idées involontaires qui rompent le mouvement de la passion et lui ôtent l’éloquence pour lui donner le naturel. […] Comme la passion n’est qu’une idée douloureuse sans cesse traversée par d’autres, les mots associés aux idées doivent surgir aussi à l’improviste et jeter la maladie morale dans des accès inattendus » (Nous soulignons). […] Woolf : les deux vers de Cymbeline (IV,2) que Mrs Dalloway lit initialement dans la vitrine d’une librairie (« Ne crains plus la chaleur du soleil / Ni les fureurs de l’hiver déchaîné », Folio, p. 70) deviennent une simple répétition allusive « Ne crains plus » (« No fear ») reliant les courants de conscience des deux personnages centraux de Clarissa et Septimus Warren Smith qui se raccrochent à cette formule dans leurs moments de fragilité respectifs. C’est même un trait assez typique des personnages woolfiens que de chercher un rempart intérieur dans une formule éventuellement littéraire.

1410. (1925) Les écrivains. Première série (1884-1894)

Mille personnages défilent devant nous, les uns célèbres, les autres déjà oubliés, presque tous restitués dans une habileté surprenante de notation, avec leurs tics, leurs manies, leurs gestes, leur pensée nue et un peu du mystère de leur âme. […] Vos entretiens avec les personnages célèbres que vous avez ou non rencontrés seront longuement commentés. Il va de soi que les personnages célèbres auront été impressionnés étonnamment par la profondeur de votre savoir et l’originalité de vos concepts. […] Ses personnages ne débitent aucune tirade. […] Dans le guignol littéraire, les personnages de romans n’expriment et ne possèdent qu’une préoccupation : aimer.

1411. (1868) Rapport sur le progrès des lettres pp. 1-184

Il en trouve toujours d’étranges, de sonores, de caractéristiques, qui donnent une physionomie au personnage et se gravent ineffaçablement dans la mémoire. […] Miss Faucit, de si touchant souvenir, lui avait montré l’attitude et la physionomie du personnage. […] Ses personnages y interviennent au moment où il en a besoin, et il n’en limite pas le nombre. […] La composition de sa pièce était bien arrêtée, le style net, le dialogue franc, les personnages frappés chacun à sa marque, l’effet voulu et produit, quelquefois avec, trop de recherche, mais avec certitude. […] Le singulier personnage avait traversé avec trop de succès la comédie des Effrontés pour que l’auteur ne fût pas tenté d’en faire le centre et le ressort d’une autre pièce.

1412. (1888) Portraits de maîtres

Meunier, Talleyrand, Molé, Pasquier, les plus graves personnages donnèrent le signal des applaudissements. […] Chaque siècle transfigure les personnages de l’histoire en leur découvrant des traits que n’avaient pas soupçonnés leurs contemporains et qui peut-être ne pouvaient être démêlés qu’à distance. […] L’homme en effet pris dans ses modes les plus relevés, passion et sacrifice, tient tout entier dans ce personnage de Jocelyn autour duquel vit la nature grandiose des Alpes et s’agite l’orage solennel de la Révolution française. […] Qu’importe aux interprètes de l’Idée l’assentiment de quelques personnages éphémères ? […] Quiconque a su lire ce beau livre a dû reconnaître Edgar Quinet dans le personnage de Merlin l’enchanteur.

1413. (1809) Tableau de la littérature française au dix-huitième siècle

Elle a moins d’unité, elle est plus compliquée, elle embrasse plus de personnages, plus de causes, plus d’objets. […] Les auteurs ont perdu la vérité des personnages ; mais il leur reste la vérité de leurs propres sentiments, de leur imagination. […] Les paroles de chaque personnage sont toujours arrangées de façon à montrer que la théorie de son cœur était bien connue de l’auteur. […] Rousseau plaça ses personnages sur cette scène idéale, la seule où lui-même se plût à vivre. […] On aimerait à retrouver quelque chose de la physionomie des siècles et des personnages qu’il a voulu peindre, et dont les noms seuls réussissent à nous subjuguer ; mais au temps où il écrivait on avait un grand goût pour le faste des paroles.

1414. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Antoine de Saint-Nectaire, abbé d’Aurillac, puis évêque du Puy, était un personnage considérable. […] Sainte-Beuve en raconte l’histoire comme il suit : « Pendant la tenue des Grands-Jours à Poitiers, en 1579, les plus considérables personnages de la magistrature se réunissaient chez les Dames des Roches mère et fille, la fleur et l’ornement du pays poitevin, toutes deux recommandables par leurs vertus, leurs talents et leur beauté. […] Chose qu’elle m’accorda libéralement… Quelques personnages de marque voulurent estre de la partie, et s’emploièrent sur le mesme subject à qui mieux mieux, les uns en latin, les autres en français et quelques-uns en l’une et l’autre langue… » Passerat. — Gilles Durant Je vous ai parlé de Ronsard à deux reprises. […] Son originalité pourtant était assez substantielle, et il pouvait dédaigner des trouvailles telles que le personnage d’Aricie, et surtout celui d’Ériphile. […] Le guindé Alfieri fréquentait chez Mme Chénier, et aussi le fougueux Lebrun, qui, au souper antique de M. de Vaudreuil, joua le personnage de Pindare.

1415. (1929) Critique et conférences (Œuvres posthumes III)

À ces soirées on croisait bien du monde : un roi d’Araucanie première manière, des diplomates très décoratifs, et des sportsmen des mieux meublants ; aussi des artistes et, naturellement, des poètes ; mais on y eût en vain cherché des personnages dans le genre de certains d’entre ceux d’à présent, nos immédiats contemporains, hélas ! […] Ces vers, entre plusieurs autres, témoignaient dès lors d’une certaine pente à une mélancolie tour à tour sensuelle et rêveusement mystique qui vinrent deux ans environ après, costumés en personnages de la comédie italienne et de féeries à la Watteau, confirmer plus agréablement peut-être, en tout cas mieux faits et voulus davantage les vers de ce petit volume dès lors assez goûté : « Les Fêtes galantes ». […] C’était, je le sus par la suite, un vicaire de la paroisse, chanoine de Lincoln, au surplus, magistrat du comté, personnage aimable, plein de bonhomie, dont j’eus l’occasion de reconnaître, par la suite, la réelle charité. […] Granier de Cassagnac (le père de l’impétueux ex-député bonapartiste) se rendit célèbre, avant de devenir l’important personnage que chacun sait, en osant imprimer cette monstruosité : Racine est un polisson ! […] Il était signé Fantin-Latour ; son titre « Le Coin de table », les personnages : Léon Vallade, Camille Pelletan, Ernest d’Hervilly, Jean Aicard, Arthur Rimbaud et votre humble serviteur.

1416. (1863) Cours familier de littérature. XV « LXXXVIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (5e partie) » pp. 145-224

Épopée tragi-burlesque où il se dépense autant d’héroïsme qu’au siège de Troie, et où l’auteur ramène à la porte d’un cabaret douze ou quinze personnages tombés des nues dans ce trou de six pieds, parmi lesquels Valjean, qui ne sait non plus que faire et qui tire quelques coups de fusil, s’amusant à tuer des hommes ; douze ou quinze gamins de Paris et autant d’étudiants buvant dans une salle basse, pérorant et se battant tour à tour, Marius en tête, pour l’honneur du drapeau rouge. […] Valjean trouve à l’embouchure tous les personnages dont le roman a besoin pour se dénouer : Javert, qui l’a suivi, invisible, et qui croit tenir en lui un assassin emportant un cadavre accusateur à la rivière ; Thénardier, qui erre aussi dans ces parages et qui lui en donne la clef ; Marius, évanoui sur ses épaules, qu’il couche sur la plage et qu’il rapporte ensuite à son grand-père, sans se faire connaître.

1417. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre cinquième. De l’influence de certaines institutions sur le perfectionnement de l’esprit français et sur la langue. »

Il y loue « la solidité des observations, beaucoup de savoir et d’esprit, sans aucune affectation ni de l’un ni de l’autre ; des termes choisis, mais sans scrupule et sans enflure, et des mots qu’on disait bannis par l’Académie, employés où il était nécessaire, pour protester contre le reproche d’innovation55. » On peut regretter de n’y pas trouver cet étonnement naïf et généreux qui nous saisit encore aujourd’hui à la vue de ces beautés si neuves et si charmantes, de ces vers si vigoureux et si délicats, de toutes ces grâces de la jeunesse dans le génie et dans les personnages qu’il crée. […] La supériorité de son caractère, l’autorité de sa vertu, que relevait la persécution, l’ardeur d’une sorte de renaissance du catholicisme, réunirent autour de lui, dans une solitude à la fois pieuse et savante, plusieurs personnages de distinction.

1418. (1890) L’avenir de la science « X » pp. 225-238

Homère serait un personnage réel et unique, qu’il serait encore absurde de dire qu’il est l’auteur de l’Iliade : une telle composition sortie de toutes pièces d’un cerveau individuel, sans antécédent traditionnel, eût été fade et impossible ; autant vaudrait supposer que c’est Matthieu, Marc, Luc et Jean qui ont inventé Jésus. « Il n’y a que la rhétorique, a dit M.  […] Mais il y a quelque chose de bien plus beau encore, c’est l’impression qui résulte de ces salles, de la pose ordinaire des personnages, du style général des tableaux, du coloris dominant.

1419. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mars 1886. »

J’accorde même que ce théâtre aura le droit de jouer des compositeurs français qui se rangeront du côté de l’école allemande ; ceux-là feront honneur aux deux écoles, à la condition d’être instruits réellement, convaincus, et de ne pas se croire obligés, comme on l’a fait jusqu’ici, de ne prendre à Wagner que ses nuages et ses personnages légendaires pour les transformer en troubadours. […] Arthur Léon Carvaille, dit Carvalho (1825-1897) est un personnage incontournable de la vie musicale au XIXe siècle.

1420. (1856) Cours familier de littérature. I « VIe entretien. Suite du poème et du drame de Sacountala » pp. 401-474

On remarque en effet qu’à l’exception des mauvais génies ennemis ou jaloux des hommes, tous les personnages y sont innocents. […] X Il y a dans le théâtre indien, ajoutent les commentateurs, une singularité que n’offre aucun théâtre moderne, et qui atteste assez le prodigieux développement de l’éducation publique chez ces peuples, c’est que les personnages parlent plusieurs idiomes dans le même drame.

1421. (1914) Boulevard et coulisses

Leurs directeurs et leurs rédacteurs principaux étaient de puissants personnages. […] J’ai retrouvé au hasard de la vie quelques-uns de ces personnages.

1422. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre V. Le souvenir du présent et la fausse reconnaissance »

Mieux il approfondit ce qu’il éprouve, plus il se scinde en deux personnages, dont l’un se donne ainsi en spectacle à l’autre. […] De là une compénétration d’états qui se fondent et même s’identifient ensemble dans la conscience immédiate, mais qui n’en sont pas moins logiquement incompatibles entre eux et que la conscience réfléchie se représentera dès lors par un dédoublement du moi en deux personnages différents, dont l’un prendrait à son compte tout ce qui est liberté, tandis que l’autre garderait pour lui la nécessité — celui-là, spectateur libre, regardant celui-ci jouer son rôle automatiquement.

1423. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Geoffroy de Villehardouin. — II. (Fin.) » pp. 398-412

Quand je vois ces qualités et ces défauts de l’historien d’une époque finissante, cet arrangement élégant et peigné, ces comparaisons disparates où les images d’Endymion ou de tel autre personnage mythologique sont jetées à travers les événements les plus positifs et les plus désastreux de l’histoire, je les oppose aux qualités et aux défauts du narrateur français qui commence, à cette simplicité grave, sèche et roide, mais parfois épique, et je me demande : « Lequel des deux est véritablement le plus voisin d’Homère ou d’Hérodote ? 

1424. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le président Jeannin. — I. » pp. 131-146

C’est un grand personnage, et de ceux qu’il y a le plus de profit à connaître et à approfondir dans le passé.

1425. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

Il convient pourtant qu’il n’est pas inutile de l’être quelquefois ; car il faut avoir la tête bien grosse quand on a éprouvé une perte en un lieu pour ne pas y pourvoir lorsqu’on se retrouve exposé au même hasard ; c’est le cas de se faire sage par sa perte : « Mais je me suis bien trouvé, ajoute-t-il, de ne l’avoir pas été, et aime mieux m’être fait avisé aux dépens d’autrui qu’aux miens. » Pour un personnage tout d’action et si homme de main, il est à remarquer comme il aime les préceptes, les sentences, et à moraliser sur la guerre ; il le fait en un style vif, énergique, imaginatif, gai parfois et qui sourit : oh !

1426. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — III » pp. 90-104

Le cadre est digne du personnage.

1427. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Lettres sur l’éducation des filles, par Mme de Maintenon » pp. 105-120

Quand elle a ainsi rappelé toutes les conditions imposées et toutes les obligations, ce caractère où se confond le personnage de mère, de sœur aînée et de religieuse, et qui a pour objet de former de pauvres nobles jeunes filles destinées à édifier ensuite des maisons religieuses, mais surtout des familles, et à renouveler le christianisme dans le royaume ; des jeunes filles à qui l’on dit sans cesse : « Rendez-vous à la raison aussitôt que vous la voyez. — Soyez raisonnables, ou vous serez malheureuses. — Si vous êtes orgueilleuses, on vous reprochera votre misère, et si vous êtes humbles, on se souviendra de votre naissance » ; — quand elle a ainsi épuisé la perfection et la beauté de l’œuvre à accomplir, on conçoit que Mme de Maintenon, s’arrêtant devant son propre tableau, ajoute : « La vocation d’une dame de Saint-Louis est sublime, quand elle voudra en remplir tous les devoirs. » Tout ne se fit point en un jour ; il y eut des années de tâtonnement, et même où l’on sembla faire fausse route.

1428. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Sa faiblesse (si l’on était tenté d’en rechercher les indices) se montrerait surtout en ce qu’il céda aux instances de sa famille, de son neveu particulièrement, et que, dans cet état d’infirmité et de décadence physique, il s’obstina à rester trop longuement à Versailles, afin de solliciter sans doute en faveur de ce neveu, qui paraît avoir été un personnage sec, égoïste et exigeant.

1429. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — III » pp. 174-189

Un personnage célèbre, qui faisait alors ses premières armes dans les grandes affaires d’État, Fouché, envoyé à Milan comme ambassadeur de la République française près la République cisalpine, avait concerté avec le général en chef Brune, prédécesseur de Joubert, une répétition aussi du 18 fructidor, faite à l’eau rose (ce sont ses expressions).

1430. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Campagnes de la Révolution Française. Dans les Pyrénées-Orientales (1793-1795) »

Fervel a mis en relief, plus qu’aucun historien militaire ne l’avait fait encore, ce personnage populaire dans les camps et dans la montagne, et digne d’être connu de chacun ; je ne désirerais, dans les belles et bonnes pages qu’il lui a consacrées, qu’un peu plus de simplicité de ton.

1431. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Biot. Mélanges scientifiques et littéraires, (suite et fin.) »

Car c’est votre faute, après tout, et vous avez bien votre meâ culpâ à faire ; vieillard de soixante et dix ans, vous avez été imprudent comme un jeune homme ; vous avez traité, quoique déjà averti, des sujets défendus ; vous y avez mêlé des railleries peu séantes, vous avez prêté à un personnage ridicule de vos Dialogues les opinions du Pape lui-même.

1432. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite et fin.) »

De ces jugements de Gœthe sur Hugo, je ne donnerai que celui-ci, tiré d’une lettre à Zelter du 28 juin 1831 : « Notre-Dame de Paris de Victor Hugo éblouit par les qualités que lui donne une étude attentive et bien mise à profit des mœurs, de la physionomie locale, des événements du passé ; mais, dans les personnages, il n’y a absolument aucune apparence de vie naturelle.

1433. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Térence. Son théâtre complet traduit par M. le marquis de Belloy »

» — Pour le bien expliquer, il faut, dit le père, reprendre les choses dès l’origine. » Et ici commence tout un récit fort admiré des Anciens, proposé comme un modèle de narration aux orateurs eux-mêmes par Cicéron, qui y fait remarquer le développement approprié, le mouvement dramatique, le parfait naturel des personnages introduits et des paroles qu’on leur prête, et, par instants, mais par instants seulement, la brièveté excellente, qui à toute cette abondance persuasive ajoute une grâce.

1434. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Lettres d’Eugénie de Guérin, publiées par M. Trébutien. »

Dans le discours que Victor Hugo me fit l’honneur de m’adresser, quand il me reçut il y a vingt ans à l’Académie dont il était alors directeur, il eut à parler de Port-Royal, des personnages célèbres qui s’y rattachaient, des solitaires, et il les montra « cherchant dans la création la glorification du Créateur, et l’œil fixé uniquement sur Dieu, méditant les livres sacrés et la nature éternelle, la Bible ouverte dans l’église et le soleil épanoui dans les cieux. » C’était magnifique, mais à côté ; la description ne se rapportait pas exactement même aux plus grands des Jansénistes, cœurs profonds, mais à l’œil étroit et qui n’osaient regarder en face, la nature ni le soleil.

1435. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « La civilisation et la démocratie française. Deux conférences par M. Ch. Duveyrier »

Duveyrier, qui est un auteur dramatique des plus distingués, qui connaît la mise en scène et l’art du dialogue, qui a excellé à faire parler des personnages naïfs et originaux, ait su donnera ce qu’il lisait l’accent, le ton, la physionomie, et que dans un seul monologue il ait diversifié les rôles.

1436. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Léonard »

Fauriel, dans les ingénieuses Réflexions qui précèdent sa traduction de la Parthénéide de Baggesen, établit que ce n’est point la condition des personnages représentés dans la poésie idyllique qui en constitue l’essence, mais que c’est proprement l’accord de leurs actions avec leurs sentiments, la conformité de la situation avec les désirs humains, en un mot la rencontre harmonieuse d’un certain état de calme, d’innocence et de bonheur, que la nature comporte peut-être, bien qu’il soit surtout réservé au rêve.

1437. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XVII. De la littérature allemande » pp. 339-365

L’on ne peut juger jusqu’à quel point les ménagements employés par Wieland sont politiquement nécessaires ; mais je répéterai59 que, sous le rapport du mérite littéraire, l’on se tromperait en croyant donner plus de piquant aux vérités philosophiques par le mélange des personnages et des aventures qui servent de prétexte aux raisonnements.

1438. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Parfois le poète se donne pour adversaire un personnage fictif et allégorique.

1439. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre V. La Fontaine »

Chaque personnage est caractérisé dramatiquement, par ses actes, et par son langage : rien de vague, rien d’abstrait ; le type est général, la forme qui l’exprime est concrète ; tout est précis, individuel et vivant.

1440. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « Le symbolisme ésotérique » pp. 91-110

Ils empruntent comme un porte-voix l’éloquence des Pères de l’Église, mais, en s’insinuant dans leur doctrine, ils me font songer à ce personnage d’opérette qui, glissé dans l’armure géante d’un paladin, pense nous effrayer à manœuvrer sa mécanique rouillée.

1441. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

S’agit-il d’un roman ou d’une pièce : cherchez le personnage sympathique.

1442. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre II : L’intelligence »

Si l’on ne perd point de vue que les diverses facultés ne sont aussi que des causes inconnues de phénomènes connus, qu’elles ne sont qu’un moyen commode de classer les faits et d’en parler ; si l’on ne tombe pas dans le défaut si commun d’en faire des entités substantielles, des sortes de personnages qui tantôt s’accordent, tantôt se querellent, et forment dans l’intelligence une petite république ; on ne voit point ce qu’il y aurait de répréhensible dans cette distribution en facultés, très conforme aux règles d’une saine méthode et d’une bonne classification naturelle.

1443. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXII » pp. 355-377

Les trois personnages qui s’étaient séparés à la fin d’avril, le furent pour plusieurs mois.

1444. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Ce n’était nullement un personnage politique qu’Anselme, mais un homme d’école et de monastère, d’oraison et de contemplation, et aussi d’enseignement moral et spirituel, de gouvernement intime et insensible des âmes.

1445. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Despréaux, avec le plus grand nombre des écrivains de son temps. » pp. 307-333

Après avoir joué le personnage le plus considérable dans la littérature, il y joua le rôle le plus ridicule.

1446. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Essai, sur, les études en Russie » pp. 419-428

Tous les six mois il y a des exercices publics de classe en classe, auxquels les scolarches et les plus notables personnages ainsi que les parents assistent.

1447. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Mais il y a parmi nous une espèce de fatalité attachée à tous les arts qui consistent à se revêtir d’un personnage étranger.

1448. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIX. Mme Louise Colet »

Et à commencer par son roman intitulé Lui, ce scandale, imité d’un autre scandale, dont les personnages, aux noms seulement défigurés pour qu’on les reconnaisse tous, ne vivent plus maintenant, à l’exception d’un seul… Ce qui prouve la radicale nullité des femmes, en fait d’invention, c’est qu’elles n’ont dans la tête qu’un roman et c’est le leur, celui de leur vie : Mme Golet n’a pas fait exception à cette loi.

1449. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Les deux cathédrales »

Personnage principal du roman de Huysmans.

1450. (1936) Réflexions sur la littérature « 6. Cristallisations » pp. 60-71

Camille Mauclair a écrit la transposition mystique : « Si chacun de ces frêles personnages errant dans un paysage d’or rose figurait un état du rêve, où allaient-ils tous, et qu’est-ce qui les incitait à tourner ainsi le dos, avec une obstination douce, à l’existence réelle d’où je les contemplais, pour s’aller perdre de mirage en mirage dans les zones successives de cette vaporeuse bleuité ?

1451. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XIV. »

Il avait vu au théâtre de Rome ce personnage renouvelé par le poëte, avec des nuances plus pures et plus douces, qui le faisaient s’écrier : « Ô poésie touchante !

1452. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Malgré cela, je ne me serais pas permis de suppléer à une omission devenue inutile, si le peintre, comme pour nous ôter tout scrupule, n’avait pris la précaution, quelques mois auparavant, de signer l’une de ses toiles où il faisait poser les mêmes personnages pour un sujet différent. […] Pour lui, la Halle n’avait pas de bouge, le taudis pas de vermine ; du tapis-franc au garni, il marchait, les yeux emplis de splendeurs sidérales, traînant après lui, bateleur sublime ses décorations, ses personnages et ses drames en plein-vent, aux cent actes divers ! […] toutes ces scènes, tous ces personnages ; vous les trouverez dans Balzac, si vous cherchez bien. » Conclusion sous-entendue : le Demi-Monde pourrait bien n’être qu’une troisième aventure galante et scandaleuse, comme ses sœurs la Dame aux Camélias et Diane de Lys. […] Le Constitutionnel trouve que les personnages qui concourent à l’action « sont des mannequins dont le ressort est brisé ». […] Les acteurs de son roman de Belle-Rose sont les personnages des Mousquetaires découpés aux ciseaux ; mais il a fourni le verre.

1453. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre III. La Révolution. »

Nous jugeons que ni un homme ni une assemblée d’hommes n’a le droit de dépouiller un homme ni une assemblée d’hommes de ce qui est son bien authentique et son héritage transmis. « Il n’y a pas un personnage public dans ce royaume qui ne réprouve la déshonnête, perfide et cruelle confiscation que votre assemblée nationale a été contrainte d’exercer sur votre Église879. » Nous ne souffrirons jamais que chez nous le domaine établi de la nôtre soit converti en une pension qui la mette dans la dépendance du trésor. […] Personnage de Birton, dans le Jenny de Voltaire. […] Evelina, par miss Burney ; voyez le personnage du pauvre et gentil Français, M. Dubois, qu’on fait tomber dans le ruisseau. — Ces jeunes filles si correctes vont voir jouer Love for Love de Congreve ; les parents ne craignent pas de leur donner miss Prue en spectacle. — Voyez aussi par contraste le personnage du capitaine anglais, si rustre ; il est l’hôte de Mme Duval, et la jette deux fois dans la boue ; il dit à sa fille : « Molly, je vous conseille, si vous faites quelque cas de mes bonnes grâces, de ne plus avoir un goût à vous, en ma présence. » — Le changement est surprenant, depuis soixante ans.

1454. (1923) Critique et conférences (Œuvres posthumes II)

Pommier n’a, lui, qu’un personnage dans tout son poème ; mais son héros, c’est la Foule, c’est le Monde, c’est l’Humanité… » — Ça y est-il ? […] Comme moi, vous avez lu ce livre grandiose et sévère, Salammbô, et comme moi vous en avez goûté et admiré le style rhythmé, les descriptions éblouissantes, les batailles magnifiquement évoquées, les personnages épiques et, par dessus tout, la fable si simple et si terrible. […] élargissez ce mur et la ronde, au lieu d’une année imaginez dix-huit siècles, variez à l’infini le costume des personnages, la physionomie des scènes, la disposition des accessoires, par-dessus cela mettez la griffe du génie et vous n’aurez encore qu’une faible idée de la deuxième partie du Livre qui nous occupe. […] N’allèrent-ils pas en effet, alors qu’il ne s’agissait que d’art et de littérature, jusqu’à vouloir faire interdire Hernani, une pièce où tout n’est qu’héroïsme cornélien, dont tous les personnages, au fond, sont sympathiques dans la haute, sincère et logique expansion de leur passion jeune, loyale, si magnifiquement exprimée dans quelle belle langue nette et bien française ; où, si les sentiments sont naturellement, et de par le sujet, empruntés à l’Espagne, et rappelèrent dès lors plutôt l’inspiration castillane du Cid, le style agile et clair, la versification ferme et souple se réclament visiblement de la forme racinienne, et où rien, mais rien de rien n’évoque ou ne sous-entend l’influence de Shakespeare, dans tous les cas !

1455. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Or, ce monsieur du pouvoir exécutif, et ces médiocrates de province, ont le chauvinisme de la tragédie, du personnage noble. Mais comme l’intérêt est passé des Empereurs, des Rois de l’antiquité, aux marquis des xviie et xviiie  siècles, puis des marquis aux gros bourgeois du xixe  siècle, ils entendent qu’on s’arrête à ce personnage noble de l’heure présente, et qu’on ne descende pas plus bas. […]  » Et pendant que j’appartenais tout à la lecture de ces biographies de pierre, et qu’il se faisait cérébralement en moi le transport qui se fait, à la lecture d’un livre, parmi les personnages et les milieux de ce livre, je n’étais plus de mon temps, je n’étais plus à Paris.

1456. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Ce ne sont que personnages qui croient, se détrompent, s’exaltent encore, ne vérifient rien, et se jettent par une fenêtre ou se cassent d’autre façon la tête, un peu comme dans les romans de l’abbé Prévost, mais d’un abbé Prévost piqué de Werther. […] Ce qui a manqué à ces personnages infortunés de Nodier, si souvent reproduits par lui, ç’a été de se résumer à temps en un type unique, distinct, et qui prit rang à son tour, du droit de l’art, entre ces hautes figures de Werther, de René et de Manfred, illustre postérité d’Hamlet.

1457. (1865) Cours familier de littérature. XIX « CIXe entretien. Mémoires du cardinal Consalvi, ministre du pape Pie VII, par M. Crétineau-Joly (1re partie) » pp. 5-79

« Le cardinal Negroni ne put pas refuser ; il vit même qu’il commençait notre fortune en nous plaçant sous la protection d’un aussi puissant personnage. […] Ce parti aurait le mérite de l’avoir désigné, et ses membres n’avaient aucun grief à articuler contre lui, — si ce n’est tout au plus son âge peu avancé, qui pouvait porter obstacle aux espérances des personnages se flattant de monter sur le trône dans le futur conclave. » Ce cardinal, inventeur d’une trame aussi bien ourdie, se promenant un jour dans les corridors du conclave avec Consalvi, dont depuis longtemps il était l’un des amis, vint à parler de la longueur du conclave et des embarras de la nouvelle élection, — car tel était le sujet des conversations journalières et communes à tous. — Il s’ouvrit dans cette occasion au secrétaire, et lui manifesta non-seulement en général le projet qu’il nourrissait de faire qu’une faction choisît le nouveau pape dans la faction contraire, afin qu’à l’heure de l’élection la part fût égale pour tous, mais encore il lui confia l’idée spéciale de briser le grand obstacle qui s’offrait aux cardinaux cherchant le pape dans le parti Mattei.

1458. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIIe entretien. Fior d’Aliza » pp. 177-256

Sa maison, modeste, élégante, lettrée, était le sanctuaire quotidien des personnages les plus distingués de Florence, Athènes alors de l’Italie. […] Childe Harold, ou lord Byron, que ce nom désigne toujours, est non seulement un personnage très distinct de M. de Lamartine, il en est encore en toute chose l’opposé le plus absolu.

1459. (1857) Cours familier de littérature. III « XIVe entretien. Racine. — Athalie (suite) » pp. 81-159

Je n’étais évidemment pas né pour cette poésie à personnages et à combinaisons savantes qu’on appelle le drame. […] Quelles scènes illuminées m’apparaissaient toutes pleines des personnages créés par mon imagination !

1460. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

Si l’étude des anciens auteurs était réservée pour un temps où la tête fût mûre, et les élèves avancés dans la connaissance de l’histoire, il me semble qu’ils y rencontreraient moins de difficultés, et qu’ils y prendraient plus de goût, les faits et les personnages dont Thucydide, Xénophon, Tite-Live, Tacite, Virgile les entretiendraient, leur étant déjà connus. […] Je demande si ces personnages fameux, connus d’avance, on n’en rencontrera pas les noms avec plus d’intérêt dans les ouvrages qui en parleront ; si l’on n’en interprétera pas plus aisément ces ouvrages, si l’on n’en sentira pas mieux le charme, et si les épines de la grammaire n’en seront pas émoussées ?

1461. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire littéraire de la France. Ouvrage commencé par les Bénédictins et continué par des membres de l’Institut. (Tome XII, 1853.) » pp. 273-290

On a, dans ce recueil de fables et de récits dont le Renard est le héros, un assemblage de bien des types et des personnages qui ont couru depuis sous d’autres noms.

1462. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Fénelon. Sa correspondance spirituelle et politique. — I. » pp. 19-35

M. de Tréville, dont il m’arrive de parler quelquefois et qui était un personnage considérable aux yeux de la société d’alors, venait de retomber dans des habitudes mondaines après quelques années de retraite et d’austérités.

1463. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Bossuet. Lettres sur Bossuet à un homme d’État, par M. Poujoulat, 1854. — Portrait de Bossuet, par M. de Lamartine, dans Le Civilisateur, 1854. — I. » pp. 180-197

Mais ce qui pour moi n’est pas moins sûr, c’est que l’illustre biographe traite ici l’histoire littéraire absolument comme on traite l’histoire dans un roman historique : on invente légèrement le personnage là où le renseignement fait défaut et où l’intérêt dramatique l’exige.

1464. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

Il y a bien des années que, lisant de suite ce recueil des notices historiques de Vicq d’Azyr, simple étudiant alors et en chemin d’être médecin moi-même, mais hésitant encore entre plusieurs velléités ou vocations, il m’a été donné d’en saisir le doux intérêt et le charme ; en passant de l’un à l’autre de ces personnages, je sentais varier mes propres désirs ; chacun d’eux me disait quelque chose ; l’idée dominante que l’auteur avait en vue et qu’il exprimait dans la vie de chacun de ces savants m’apparaissait tour à tour et venait me tenter, même lorsque cette idée dominante n’était que des plus modestes : car il y a cela de particulier dans la touche de Vicq d’Azyr, qu’une sorte de sympathie y respire et que le coloris léger n’y dérobe jamais le fonds humain.

1465. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Léopold Robert. Sa Vie, ses Œuvres et sa Correspondance, par M. F. Feuillet de Conches. — II. (Fin.) » pp. 427-443

Il est en cela sévère et injuste ; il a son type de style qu’il porte un peu partout, et auquel il tend à ramener ses personnages sous leurs costumes divers.

1466. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La Divine Comédie de Dante. traduite par M. Mesnard, premier vice-président du Sénat et président à la Cour de cassation. » pp. 198-214

Quoi qu’il en soit, ce dilettante brillant et incrédule dut à quelque chose de fier et de hardi qu’il avait dans l’imagination, et qui tenait sans doute à ses origines méridionales, d’être le premier chez nous à parler dignement de Dante, et même de le juger très finement sur des beautés de détail et d’exécution qui semblaient être du ressort des seuls Italiens : Il faut surtout varier ses inversions, disait-il en pensant au travail imposé aux traducteurs ; le Dante dessine quelquefois l’attitude de ses personnages par la coupe de ses phrases ; il a des brusqueries de style qui produisent de grands effets ; et souvent, dans la peinture de ses supplices, il emploie une fatigue de mots qui rend merveilleusement celle des tourmentés. — Quand il est beau, disait-il encore, rien ne lui est comparable.

1467. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — III » pp. 476-491

Il n’y aurait plus, en sortant de là, qu’à enterrer le personnage ainsi laissé sur le carreau.

1468. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance de Buffon, publiée par M. Nadault de Buffon » pp. 320-337

Les quatre grands personnages littéraires du xviiie  siècle ont écrit des lettres fort inégalement et avec des différences qui sont bien celles de leur caractère, de leur physionomie.

1469. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Mais ce qu’il eut de particulier et de vraiment original entre tant de personnages ses contemporains, qui eurent également une longue vie et qui furent ainsi que lui à cheval sur deux siècles, ce fut d’être plus jeune dans la seconde moitié de sa vie que dans la première.

1470. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Histoire de la littérature française à l’étranger pendant le xviiie  siècle, par M. A. Sayous » pp. 130-145

Sayous a rendu au personnage sa vie et sa réalité.

1471. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance de Voltaire avec la duchesse de Saxe-Golha et autres lettres de lui inédites, publiées par MM. Évariste, Bavoux et Alphonse François. Œuvres et correspondance inédites de J-J. Rousseau, publiées par M. G. Streckeisen-Moultou. — II » pp. 231-245

Il apparaît, il est sur l’autel sans qu’on l’y ait vu monter : Alors levant les yeux, il (le songeur) aperçut sur l’autel un personnage dont l’aspect imposant et doux le frappa d’étonnement et de respect : son vêtement était populaire et semblable à celui d’un artisan, mais son regard était céleste ; son maintien modeste, grave et moins apprêté que celui même de son prédécesseur (Socrate), avait je ne sais quoi de sublime, où la simplicité s’alliait à la grandeur, et l’on ne pouvait l’envisager sans se sentir pénétré d’une émotion vive et délicieuse qui n’avait sa source dans aucun sentiment connu des hommes, « Ô mes enfants, dit-il d’un ton de tendresse qui pénétrait l’âme, je viens expier et guérir vos erreurs ; aimez celui qui vous aime et connaissez celui qui est ! 

1472. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

Et, ici encore, je n’ai point de parti pris, je ne suis qu’un observateur et un littérateur jugeant d’un livre d’histoire moderne, d’histoire contemporaine, et complétant mon idée des personnages par les traits mêmes qu’on me fournit.

1473. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Molé un portrait des plus délicats, où les qualités du noble personnage sont reconnues et où ses faibles ne sont pas oubliés : une qualité toutefois n’y est pas suffisamment marquée, c’est que M. 

1474. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourgogne, par M. Michelet »

Dans le volume que j’annonce et que je ne parcourrai point en détail, je saisis ce qui me paraît le mieux et le plus vrai, le personnage du duc de Bourgogne, de ce petit-fils de Louis XIV, l’objet de tant d’espérances, tant promis au monde, tant regretté et pleuré, et j’en viens parler à mon tour après M. 

1475. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « M. de Pontmartin. Les Jeudis de Madame Charbonneau » pp. 35-55

On tombe dans le personnage de Molière.

1476. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Etienne-Jean Delécluze »

Maintenant qu’on a une première idée du personnage, il va nous raconter lui-même sa vie, non sans finesse, mais cependant avec une bonhomie parfaite.

1477. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, — Antiquité et Moyen Âge — Par M. J. Zeller. »

Moïse n’est pas seulement un homme, un personnage réel, c’est une figure : en même temps qu’il prédit le Christ et le Messie, il le reproduit par avance dans quelques-unes de ses souffrances, de ses stations et de ses agonies douloureuses.

1478. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Il ne faut pas que le secrétaire se presse et empiète sur son chef, qu’il devance d’une minute son moment, qu’il commence par en faire à sa tête et par se poser en personnage, sur un pied à lui, comme Chateaubriand prétendit faire à Rome avec le cardinal Fesch ; il ne faut pas qu’il laisse soupçonner ni percer, comme on l’a vu récemment chez un secrétaire revêtu d’un nom illustre (Bellune), une inclination politique différente de celle de son ministre : cela est élémentaire ; il faut qu’il vive en parfaite harmonie et ne fasse qu’un avec lui, qu’il s’efface soigneusement et qu’il s’éclipse, et en même temps toutefois qu’il se tienne tout prêt, le cas échéant, à le remplacer, à le suppléer, à faire même, s’il y a urgence, un pas décisif sans lui ; il peut, sous ce titre secondaire, être chargé par intérim de missions délicates et d’une haute importance.

1479. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Poésies, par Charles Monselet »

Il appert de l’un et de l’autre que l’auteur, personnage d’une quarantaine d’années, portant lunettes, bonne mine, mâle encolure, tête posée avec aplomb, menton ras et double, lèvre fine, ferme, prompte à la malice, est né à Nantes, que son père y était libraire ; j’ajouterai, — car je ne suis pas homme à me contenter à demi en matière de biographie, — qu’il fut élevé à Bordeaux, qu’il y fit des études classiques succinctes et fut mis de bonne heure à la pratique, je veux dire au journal, au Courrier de la Gironde.

1480. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Laurentie pour un des personnages distingués et des noms principaux de la Restauration, etc.

1481. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Préface »

Sainte-Beuve, personnages en vue et des plus respectables, des esprits d’élite en effet (si c’est là ce qui a pu servir à autoriser la satire et la calomnie de s’être attachées à leur nom dès le lendemain), aimaient à se retrouver quelquefois chez lui à dîner : c’était comme un terre-à-terre à une extrémité de Paris, quasiment à la barrière, où le milieu d’un quartier populaire et sain influe, malgré soi, jusque dans les habitations bourgeoises ; on s’y sentait bien réellement éloigné de toute contrainte gênante et de toute étiquette cérémonieuse.

1482. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Jean-Baptiste Rousseau »

Le bon Brossette, ce personnage excellent mais banal, un des dévots empressés de feu Despréaux, espèce de courtier littéraire, qui caressait les illustres pour recevoir des exemplaires de leur part et faire collection de leurs lettres, s’était lourdement avisé, en écrivant à Rousseau, de lui signaler, comme une découverte, dans l’Ode à la Fortune, un passage qui semblait imité de Lucrèce.

1483. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre X. De la littérature italienne et espagnole » pp. 228-255

Les Italiens ont de l’invention dans les sujets, et de l’éclat dans les expressions ; mais les personnages qu’ils peignent ne sont point caractérisés de manière à laisser de profondes traces, et les douleurs qu’ils représentent arrachent peu de larmes.

1484. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

À la fin, comme l’amour-propre est un gouffre sans fond, il n’y a pas de « noirceurs » dont ces bourreaux polis ne soient capables, et les personnages de Laclos ont eu leurs originaux302  Sans doute, ces monstres sont rares ; mais l’on n’a pas besoin d’avoir affaire à eux pour démêler ce que la galanterie du monde renferme d’égoïsme.

1485. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre I. La lutte philosophique »

Palissot, médiocre auteur et assez plat personnage, fit plus de bruit, ayant agi par le théâtre : instrument d’une pieuse coterie, il fit jouer en mai 1760 ses Philosophes, où Diderot, Rousseau, Mme Geoffrin étaient personnellement ridiculisés, où Helvétius, Duclos étaient attaqués dans leurs œuvres.

1486. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre IV. L’heure présente (1874) — Chapitre unique. La littérature qui se fait »

Certaines gaucheries d’exécution, et, je crois, pour la dernière pièce, une certaine erreur de l’auteur lui-même sur la valeur morale des actes de son personnage principal, ont fait qu’il n’a pas encore trouvé auprès du public ni auprès de la critique la justice qui lui est due.

1487. (1899) Le préjugé de la vie de bohème (article de la Revue des Revues) pp. 459-469

Y a-t-il eu un personnage de plus haute allure officielle que Puvis de Chavannes, ou un homme plus foncièrement simple, de la belle simplicité d’âme, que le pauvre et grand Ernest Chausson ?

1488. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Légendes françaises. Rabelais par M. Eugène Noël. (1850.) » pp. 1-18

Chacun a son idéal dans le passé, et la nature, la vocation de chaque esprit ne se déclarerait jamais mieux, j’imagine, que par le choix du personnage qu’on irait d’abord chercher si l’on revenait dans un temps antérieur.

1489. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Qu’est-ce qu’un classique ? » pp. 38-55

Goethe a encore dit là-dessus le vrai mot quand il a remarqué que Byron, si grand par le jet et la source de la poésie, craignait Shakespeare, plus puissant que lui dans la création et la mise en action des personnages : Il eût bien voulu le renier ; cette élévation si exempte d’égoïsme le gênait ; il sentait qu’il ne pourrait se déployer à l’aise tout auprès.

1490. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie Stuart, par M. Mignet. (2 vol. in-8º. — Paulin, 1851.) » pp. 409-426

On peut dire tout ce qu’on voudra, maint noble cœur prendra parti pour Marie Stuart, même quand tout ce qu’on a dit d’elle serait vrai. » Cette parole que Walter Scott met dans la bouche de l’un des personnages de son roman (L’Abbé), au moment où il prépare le lecteur à l’introduction auprès de la belle reine, reste le dernier mot de la postérité comme des contemporains, la conclusion de l’histoire comme de la poésie.

1491. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Par exemple, au lieu de nommer tout simplement Achille ou Agamemnon, on dira : Ceux qui sont autour d’Achille ou d’Agamemnon, tant on est loin de concevoir le personnage isolé et sans son cortège !

1492. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

Pitt, ministre, qui était alors un personnage trop considérable et peu accessible, mais il communiqua avec ses secrétaires, et ne cessa d’insister auprès d’eux sur la nécessité et l’urgence d’enlever à la France le Canada, indiquant en même temps les voies et moyens pour y réussir.

1493. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

L’abbé Barthélemy, en introduisant et en faisant parler constamment un personnage du passé, se retranchait la ressource des considérations modernes et vraiment politiques ; mais, eût-il parlé en son propre nom, il se les fût également interdites : elles n’entraient pas dans la nature de son esprit.

1494. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Analyse psychologique »

Des indications importantes résulteront de même de la connaissance de ce que nous avons appelé les moyens internes de l’artiste, c’est-à-dire du contenu de son œuvre, de son sujet, du genre de personnages et de paysages qu’il affectionne, de la manière dont il perçoit et rend la réalité.

1495. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre III : La science — Chapitre I : De la méthode en général »

Il est inutile de mentionner les livres si connus de Descartes16, de Pascal17, de Newton18; mais je rappellerai quelques ouvrages du xviiie  siècle, peu lus aujourd’hui, et où nos logiciens pourront trouver des détails intéressants : par exemple, la Logique 19 de Mariotte, le célèbre et ingénieux physicien, le premier ouvrage français de ce genre où la méthode expérimentale ait pris la place qui lui appartient (encore n’y est-elle pas très-nettement distinguée de la méthode géométrique) ; le Traité de l’expérience, du docteur Zimmermann, célèbre médecin du xviiie  siècle, né en Suisse et connu surtout par son beau livre sur la Solitude ; l’Essai sur l’art d’observer, de Jean Sénebier, ministre protestant de Genève, traducteur de Spallanzani, et lui-même naturaliste distingué de cette grande école de Genève qui a produit les Réaumur, les Trembley, les Bonnet, les de Saussure, les de Gandolle et tant d’autres hommes supérieurs ; les Fragments de Lesage, de Genève20, personnage original, doué d’un esprit méditatif et profond, connu surtout comme l’auteur d’une hypothèse sur la cause mécanique de la gravitation ; enfin le Discours sur l’étude de la philosophie naturelle, de W.

1496. (1858) Du vrai, du beau et du bien (7e éd.) pp. -492

Ce qu’il y a de vrai dans cette opinion, c’est qu’une œuvre d’art n’est belle qu’à la condition d’être vivante, et par exemple la loi de l’art dramatique est de ne point mettre sur la scène de pâles fantômes du passé, mais des personnages empruntés à l’imagination ou à l’histoire, comme on voudra, mais animés, mais passionnés, mais parlant et agissant comme il appartient à des hommes et non à des ombres. […] Il compose ses personnages et les met en scène avec l’habileté de Molière ; il sait prendre dans l’occasion le ton d’Horace et mêler l’ode à la fable ; il est à la fois le plus naïf et le plus raffiné des écrivains, et son art échappe dans sa perfection même. […] Malgré le nombre des personnages et la diversité des épisodes, le tableau se rassemble tout entier dans saint Paul. […] Sur cette vaste toile, quatre personnages seulement, les deux martyrs, et saint Paul qui les présente à saint Ambroise. […] Ajoutez à tous ces portraits, celui de Champagne ; car le peintre peut être mis à côté de ses personnages.

1497. (1902) La formation du style par l’assimilation des auteurs

J’avais copié mes personnages d’après le plus grand peintre de l’antiquité, je veux dire d’après Tacite ; et j’étais alors si rempli de la lecture de cet excellent historien, qu’il n’y a presque pas un trait éclatant dans ma tragédie dont il ne m’ait donné l’idée. […] C’est ainsi qu’il construisit L’Ingrat, L’Irrésolu, Le Médisant, L’Ambitieux, L’Indiscret, Le Glorieux. » Il y a dans La Bruyère des maximes et des réflexions qu’un auteur dramatique pourrait transformer en personnages de roman ou de comédie. […] Voilà des traits avec lesquels on peut reconstituer un personnage, de même que l’observation du personnage a fourni ces traits à La Bruyère. […] Si les traits d’un personnage de roman peuvent s’appliquer à toute espèce de personnes, le personnage est mauvais. Il faut des personnages généraux, mais avec des détails particuliers.

1498. (1924) Souvenirs de la vie littéraire. Nouvelle édition augmentée d’une préface-réponse

Mœurs, portraits, événements, récits, depuis les intrigues les plus hautes jusqu’aux plus minimes personnages, l’anecdote vivifie tout, illumine tout. […] Il empruntait à la vie ses personnages et son sujet ; ses livres sont presque tous des romans à clef. Il n’était pas rare de rencontrer chez lui quelque rancunier personnage venant protester contre une ressemblance qu’il jugeait compromettante. […] Il allait parmi les groupes, soulevant les approbations admiratives qui montraient bien qu’il était le principal personnage de la réunion. […] Il avait une façon de garder le silence et d’écouter ses interlocuteurs qui lui donnait la fixité attentive d’un personnage de cabinet de cire.

1499. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Dès que les policiers subalternes savent que la perte d’un homme pourrait être agréable aux personnages dont ils dépendent, ils s’arrangent de façon à perdre cet homme par des moyens que connaissent tous les mouchards. […] L’Empereur est debout, le front ceint de lauriers, droit et superbe comme un personnage de tragédie, sous les plis du manteau de pourpre, où frissonnent des abeilles d’or. […] Les principaux personnages des Pays-Bas accueillirent cette nomination avec faveur, d’autant plus que le mari de la reine Hortense était un brave homme. […] Mais j’aime mieux insister sur l’art avec lequel l’historien a su, en accumulant des parcelles de vérité, nous procurer la vision des personnages et des multitudes que cette tragédie a mis en mouvement. […] Il s’ensuit qu’ils ne payent pas leur personnel, et ces satellites sont redoutables au peuple qu’ils pressurent de mille manières… » Les très grands personnages, en Chine, ont l’honneur de porter une casaque jaune et une plume de paon.

1500. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

Aucune familiarité n’est permise, sauf sous le voile de l’amitié, et le vocabulaire de l’amour est aussi prohibé que ses rites au premier aspect semblent l’être. » — Même chez Crébillon fils, même chez Laclos, même aux moments les plus vifs, les personnages ne parlent qu’en termes mesurés, irréprochables. […] Mais ce lambeau, si brillant qu’il soit, ne lui suffit point, et, dans tous les châteaux, dans tous les hôtels, à Paris, en province, il installe les travestissements de société et la comédie à domicile  Pour accueillir un grand personnage, pour célébrer la fête du maître ou de la maîtresse de la maison, ses hôtes ou ses invités lui jouent une opérette improvisée, quelque pastorale ingénieuse et louangeuse, tantôt habillés en Dieux, en Vertus, en abstractions mythologiques, en Turcs, en Lapons, en Polonais d’opéra, et pareils aux figures qui ornent alors le frontispice des livres ; tantôt en costumes de paysans, de magisters, de marchands forains, de laitières, de rosières, et semblables aux villageois bien appris dont le goût du temps peuple alors le théâtre.

1501. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre deuxième. Les images — Chapitre premier. Nature et réducteurs de l’image » pp. 75-128

« Mes personnages imaginaires, m’écrit le plus exact et le plus lucide des romanciers modernes, m’affectent, me poursuivent, ou plutôt c’est moi qui suis en eux. […] Les images persistent encore quelque temps et ne tardent pas à pâlir ; on les voit là où l’on tourne la tête. » Ici le remède est visible : c’est l’éveil d’une sensation contradictoire ; le fantôme pâlit et perd son extériorité, à mesure que la sensation de couleur excitée par le mur devient plus nette et plus prépondérante. — Et le remède est général ; toute secousse reporte l’attention sur les sensations réelles ; un bain froid, une douche, l’arrivée d’un personnage imposant ou inattendu les tire de leur effacement et de leur nullité, les rétablit plus ou moins et pour un temps plus ou moins long, et par suite ranime avec elles la sensation particulière qui est le réducteur spécial de l’illusion.

1502. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVe entretien » pp. 317-396

La grandeur d’un peuple, c’est de se personnifier tout entier dans quelques colossales mémoires, en sorte que, quand on nomme ce peuple, sur-le-champ le personnage national se présente à la pensée et dit : « C’est moi. » Aussi rendez-vous bien compte de vos impressions quand vous lisez l’histoire universelle ; toute la scène du monde est remplie pour vous par une centaine d’acteurs immortels, héroïques, politiques, poétiques ou littéraires, qui figurent à eux seuls l’humanité. […] II De tous ces personnages historiques devenus aussi immortels que le nom du continent qui les a produits, Confucius est certainement celui qui personnifie en lui le plus grand nombre de siècles et la plus grande masse d’hommes ; car il a inspiré de son âme vingt-trois siècles, et il est devenu, non pas le prophète ou le demi-dieu, mais le philosophe législatif d’un peuple de quatre cents millions d’hommes !

1503. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXVIe entretien. La littérature des sens. La peinture. Léopold Robert (1re partie) » pp. 397-476

L’attention, l’attention concentrée d’un groupe ou deux de personnages au récit populaire chanté par un poète de la nature. […] Le hasard nous a fait connaître personnellement quelques-uns des principaux personnages et quelques-unes des circonstances de ce drame intérieur, si intimement mêlé à la vie, aux œuvres, au génie, à la mort du jeune Robert, ce Werther des peintres.

1504. (1860) Cours familier de littérature. IX « LIe entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier. — Correspondance de Chateaubriand (3e partie) » pp. 161-240

Cette dame, me disait-il, est un des ressorts dont je me sers pour faire jouer mes personnages à Paris ; et, tandis que cette femme vertueuse l’attendait dans sa cellule de l’Abbaye-aux-Bois, il ramenait de Londres à Paris une autre négociatrice, et il voulait même la conduire au congrès de Vérone. […] XXXII À ces hommes retentissants du passé ou de l’avenir se joignaient, comme un fond de tableau de cheminée, quelques hommes assidus, quotidiens, modestes, tels que le marquis de Vérac, le comte de Bellile ; ceux-là, personnages de conversation, et non de littérature, apportaient dans ce salon le plus facile des caractères, une amabilité réelle et désintéressée, ce qu’on appelle les hommes sans prétention.

1505. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Le matin, à peine éveillé, j’écrivais aussitôt cinq ou six pages à mon amie ; je travaillais ensuite jusqu’à deux ou trois heures de l’après-midi ; je montais alors à cheval ou en voiture pendant une couple d’heures ; mais, au lieu de me distraire et de me reposer, ne cessant de penser soit à tels vers, soit à tel personnage, soit à telle autre chose, je fatiguais ma tête loin de la soulager. […] Prévenu d’avance par l’abbé, je leur renvoyai la lettre sans l’ouvrir, et je chargeai mon ami de leur dire, de vive voix, que je n’acceptais point ce titre d’associé, que je ne voulais être d’aucune association, et, moins que de toute autre, d’une académie qui récemment avait exclu avec tant d’insolence et d’acharnement trois personnages aussi respectables que le cardinal Gerdil, le comte Balbo, le chevalier Morozzo (comme on peut le voir dans les lettres que je cite en note), sans en apporter un autre motif, sinon qu’ils étaient trop royalistes.

1506. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

Seulement, il faut que la simplicité des détails et la naïveté des récits forcent le lecteur à reconnaître qu’on ne le trompe pas et qu’il se dise : « Cela est si naturel que la nature ne se laisserait pas imiter à ce point ; cela est si vrai qu’aucun mensonge ne pourrait se glisser dans la sincérité de ces événements, ou dans les paroles de ces personnages. […] Le vieux Melchior, son bonnet de soie noire tiré sur ses larges oreilles poilues, les paupières flasques, le nez pincé dans ses grandes bésicles de corne et les lèvres serrées, ne pouvait s’empêcher de déposer sur l’établi sa loupe et son poinçon et de jeter quelquefois un regard vers l’auberge, surtout quand les grands coups de fouet des postillons à lourdes bottes, petite veste et perruque de chanvre tortillée sur la nuque, retentissaient dans les échos des remparts, annonçant quelque nouveau personnage.

1507. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Il a vu lever le soleil au Monte en face de Turin, en 1728 ; et l’abbé Gaime qui l’y a mené, lui a fourni, avec l’abbé Gàtier, le professeur du séminaire d’Annecy, les traits du Vicaire savoyard ; de sa passion profonde pour Mme d’Houdeto est sortie la Nouvelle Héloïse : les amours de Julie et de Saint Preux, ce sont les leurs, brutalement tranchés dans la réalité, délicieusement achevés par le rêve ardent de son désir ; les paysages où s’encadrent ces amours, ce sont les bords du lac de Genève, de son lac ; et les sensations de ses personnages dans cette charmante nature, ce sont les siennes, ses profondes émotions d’enfance. […] A prendre le premier discours à la lettre, il paraît douteux que les lettres et les arts soient des agents de corruption ; et la lettre à Dalembert provoque bien des objections, soit dans ses conclusions générales, soit dans ses jugements particuliers, comme lorsque Molière est convaincu d’avoir rendu la vertu ridicule par le personnage d’Alceste.

1508. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre onzième. La littérature des décadents et des déséquilibrés ; son caractère généralement insociable. Rôle moral et social de l’art. »

Les fous et les criminels ont une vanité inconcevable, qui le plus souvent empêche chez eux le développement de tout sentiment altruiste ; ils tuent pour faire parler d’eux, pour devenir le personnage du jour, pour voir leur nom dans les journaux et se faire à eux-mêmes de la publicité, pour être craints ou plaints, ou même pour devenir un objet d’horreur. — Le crime accompli, ils tâchent d’en prolonger le souvenir de toutes les manières en le racontant avec les détails les plus horribles, en le mettant envers. […] Enfin l’évolution d’un caractère vertueux est tout intérieure, tandis que la corruption d’un personnage peut être occasionnée par mille faits dramatiques.

1509. (1856) Cours familier de littérature. II « XIIe entretien » pp. 429-507

Il y regrette ce qu’Aristote appelle la fable d’un drame, c’est-à-dire le mécanisme presque puéril qui excite la curiosité du spectateur ou du lecteur par l’artifice des situations dans lesquelles le poète place ses personnages. […] Est-ce que l’homme n’est pas un personnage aussi intéressant que l’Œdipe roi ?

1510. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XVIII. J.-M. Audin. Œuvres complètes : Vies de Luther, de Calvin, de Léon X, d’Henri VIII, etc. » pp. 369-425

Des vies éparses, détachées de la trame de l’histoire générale, encadrant plus étroitement un homme public, un personnage célèbre, il y en avait partout, dans toutes les littératures, à toutes les époques ; mais ces vies, ces récits, ces portraits, n’avaient rien de la biographie telle que les modernes l’ont réalisée, et qui consiste à étudier l’individualité humaine dans l’individualité historique, comme les naturalistes étudient une plante ou un animal dans tous ses mystères et toutes ses manifestations. […] À lire l’ouvrage de Keith, écrivain protestant qui fait concorder le récit biblique avec les mœurs actuelles de la Palestine, on dirait que la Bible a été écrite d’hier ; rien n’est changé dans l’aspect des lieux, dans les habitudes des personnages, dans les coutumes, les superstitions de ces peuples primitifs que Keith a visités ; mêmes fêtes, mêmes repas, et c’est cette ressemblance qu’il nous faut saisir après lui. » Les deux amis devaient sans doute en tirer d’autres conséquences.

1511. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

Il aura, en se perfectionnant, de ces rapidités de récit qui sont même d’un grand écrivain ; parlant, dans l’Abrégé chronologique, des premiers succès de Conradin en Toscane : « Ces beaux commencements, dit-il, trahirent le jeune Conradin et le flattèrent pour le mener à la mort. » Il ne faut point faire, toutefois, comme Perrault, et aller jusqu’à comparer Mézeray à Thucydide ; les discours qu’il place dans la bouche de certains de ses personnages ont de la pensée sans doute, mais on a très bien remarqué que Mézeray écrit d’abondance et n’a point de phrase, c’est-à-dire de forme à lui ; il suffit que sa diction soit naturelle, sincère, expressive, sa narration pleine et bien démêlée.

1512. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — II. (Fin.) » pp. 254-272

Mais à la fin de cette année 1787, le prince de Ligne redevient tant qu’il peut un personnage d’histoire ; il a désiré la guerre, et il s’y met au premier rang.

1513. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

Il y a un côté sérieux dans ces Lettres de Madame, celui par lequel elle juge les mœurs, les personnages et le monde de la Régence.

1514. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Ce que le Prince Noir fit à Poitiers auprès du roi Jean, Froissart le fait en toute circonstance à l’égard des personnages qu’il introduit et dont il expose les actions.

1515. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — III. (Suite et fin.) » pp. 454-472

De loin, et à voir les choses et les personnages en perspective, il est mieux, je le crois, que cela n’ait point été ; qu’après avoir paru si entièrement l’homme d’une autre époque, M. 

1516. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Ramond, le peintre des Pyrénées — III. (Fin.) » pp. 479-496

Elle nous le montre aussi au naturel dans sa conversation et dans sa personne : « On aurait dit que l’âge accroissait encore le feu de ses discours et de ses regards ; et jusqu’à ses derniers moments, ses proportions légères, son tempérament sec, la vivacité de ses mouvements, ont rappelé le peintre des montagnes. » En ce qui était des hommes, des personnages en scène, il les jugeait bien et les marquait en les jugeant ; sa conversation était gaie, piquante ; il avait de ces mots qui restent, du caustique, le trait prompt et continuel4.

1517. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — II » pp. 71-89

» Ceux qui ne connaissent Montluc que sur sa réputation dernière et terrible s’étonneront de ne point trouver en tout ceci le farouche personnage qu’ils se sont imaginé.

1518. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Charron — I » pp. 236-253

Charron fait consciencieusement son devoir comme controversiste, comme prédicateur ; il amasse ses preuves, il fait servir sa philosophie comme une espèce de machine ou de tour pour battre en brèche la place ennemie : puis, quand il estime que la brèche est suffisante, il ordonne et fait avancer ses preuves directes ; mais tout cela sans feu, sans flamme ; on sent toujours l’homme qui a dit : « Au reste, il faut bien savoir distinguer et séparer nous-mêmes d’avec nos charges publiques : un chacun de nous joue deux rôles et deux personnages, l’un étranger et apparent, l’autre propre et essentiel.

1519. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Toutefois, la ligne qui sépare les uns des autres se confond souvent, et si l’on prend, par exemple, les noms des grands capitaines, des grands rois et ministres qui ont écrit, et dont la pensée se présente d’abord, César, Henri IV, Richelieu, Louis XIV, Frédéric, Napoléon, on trouvera que César et Frédéric avaient beaucoup du littérateur en eux, qu’il y avait en Richelieu de l’auteur, et de tous ces illustres personnages que je viens de citer, ceux qui sont le moins du métier, les seuls même qui n’en soient pas du tout, c’est encore Louis XIV et Henri IV.

1520. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Cette espèce de chemise plus ou moins blanche sous le manteau, et qui est le costume de son ordre, joue le déshabillé et achève le personnage.

1521. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

pour nous, et cependant qui peut être estimée pour son regard, et selon le monde, heureuse. » Et il explique en quoi et en quel sens (un peu païen et antique) cette mort fatale est heureuse pour le héros, une mort sans appréhension, sans douleur, commune à plusieurs grands personnages du passé, et qui laisse l’imagination rêver un avenir de gloire plus grand encore que ce qu’il avait obtenu.

1522. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La Margrave de Bareith Sa correspondance avec Frédéric — II » pp. 414-431

Cela dit, ne confondons point les ordres ; laissons les existences diverses et les personnages du passé dans les cadres naturels que la réalité nous offre et où notre observation les décrit.

1523. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — II » pp. 435-454

À peine est-elle dehors que sa fille, comme délivrée, bondit sur sa chaise, roule sa serviette, y fait un nœud et la lance à la tête du grave personnage qui s’y prête comme s’il n’avait attendu que le signal, et toute une partie entre eux commence ; elle le prend dans ses bras et lui fait danser une ronde.

1524. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Journal d’Olivier Lefèvre d’Ormesson, publié par M. Chéruel » pp. 35-52

Il est passé, il a plié bagage Ce cardinal, dont c’est moult grand dommage Pour sa maison… Or parlerons sans crainte d’être en cage, Il est en plomb l’éminent personnage, etc.

1525. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Lammenais » pp. 22-43

Les conversions, les versatilités éclatantes de Lamennais et de quelques autres personnages célèbres, ont fort étonné de nos jours ; mais il ne faut pas croire que notre siècle ait eu le privilège de ces singuliers spectacles.

1526. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Correspondance de Béranger, recueillie par M. Paul Boiteau. »

Un certain oncle Bouvet, personnage un peu solennel, le lui prédisait dès 1804, en lui rappelant l’exemple des hommes de talent qui s’étaient formés d’eux-mêmes : « La mesure de votre gloire sera celle des difficultés que vous aurez vaincues ; j’aime à me le persuader et vous attends impatiemment au but. » Un second point qui me frappe dans ce commencement de la Correspondance et qui a été contesté cependant, c’est la gaîté, une gaîté entremêlée de réflexion, de travail, de méditation même ; mais je maintiens la gaîté.

1527. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Quand il a voulu aborder la haute scène, où quelquefois il a très joliment réussi, ses défauts d’observation directe pourtant se sont fait sentir ; et trop souvent vers la fin, sur la scène de la Comédie-Française, ses personnages n’étaient plus que des ressorts habillés en rois ou en reines, en ministres, etc.

1528. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Une monarchie en décadence, déboires de la cour d’Espagne sous le règne de Charles II, Par le marquis de Villars »

Le duc de Medina-Celi, qui avait le titre et la place de premier ministre, et en qui le public avait espéré d’abord, personnage considérable par sa naissance et par ses biens, sept fois Grand d’Espagne, « d’un génie doux et honnête, et naturellement éloigné des grands mouvements, » manquait totalement de vigueur et laissait le mal se faire et s’aggraver autour de lui.

1529. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier »

Joseph de Maistre a certainement gagné aux deux ou trois recueils de lettres qu’on a publiées de lui, lettres hardies, mordantes, familières et même affectueuses, très libres toujours de vues et de ton, inconséquentes parfois à l’idée qu’on se faisait du théoricien, et qui, en définitive, si elles n’ont pas grandi le personnage, ont accentué de plus en plus l’individu.

1530. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Madame de Staël. Coppet et Weimar, par l’auteur des Souvenirs de Mme Récamier (suite et fin.) »

» ce personnage conciliateur et bienveillant était tout occupé alors à renouer des relations, à opérer des rapprochements ; ce fut son rôle dans cette crise.

1531. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Journal de la santé du roi Louis XIV »

L’effet général, pourtant, qu’à la réflexion je tire de cette lecture, la dernière impression qui pour moi subsiste et surnage à l’égard du prince si travaillé au dedans, si distrait par ses maux corporels, qui a dû prendre si souvent sur lui, et qui a su faire si constamment, si également, si noblement son personnage public, c’est, — toutes misères tant royales qu’humaines mises en compte, — c’est encore le respect.

1532. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Quelques questions qui me sont adressées de divers côtés sur ce correspondant et ce malade de Ducis, Deleyre, m’engagent à y revenir un peu et à entrer dans quelques détails plus précis sur une figure des plus intéressantes et l’une de celles qui aident le mieux à comprendre ce monde de Rousseau et des philosophes, sur un personnage qui est lui-même un type parmi les secondaires.

1533. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Œuvres de M. P. Lebrun, de l’Académie française. »

J’avais meublé, dans la tour de l’Aigle, une chambre à arceaux et à vaste cheminée, avec de grands fauteuils de tapisserie et des tapis à verdure et à personnages, dans le style des vieux temps, et pour ressembler aux anciens maîtres.

1534. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite.) »

Et dans le Gœthe de Weimar, dans ce personnage majestueux et paisible de la fin ou du milieu de la vie, qui donc reconnaîtra Werther ?

1535. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français, et de la question des anciens et des modernes, (suite et fin.) »

Chacun se retrouve lui-même dans le poète, et, en réalité, il y a autant d’Homères qu’il y a de lecteurs d’Homère, comme un paysage est aussi divers qu’il y a de divers spectateurs. » Mais que de conditions ne sont-elles pas nécessaires pour bien lire, pour lire du plus près possible, et en se rapprochant de l’esprit qui les a inspirés, ces antiques poèmes, pour se dépouiller des sentiments acquis ou perfectionnés qui, à tout instant, font anachronisme avec ceux des personnages héroïques, et qui viennent créer comme un malentendu entre eux et nous !

1536. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

Racine, au contraire, c’est-à-dire le poëte d’alors, dérobait chastement tout ce qui était de sa personne et de son domestique, pour n’offrir ses sentiments même et ses larmes qu’à travers des créations idéales et sous des personnages enchantés.

1537. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. PROSPER MÉRIMÉE (Essai sur la Guerre sociale. — Colomba.) » pp. 470-492

Mérimée a retrouvé, dans le personnage principal, une de ces figures qu’il excelle à dessiner.

1538. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Mais là où Regnier surtout excelle, c’est dans la connaissance de la vie, dans l’expression des mœurs et des personnages, dans la peinture des intérieurs ; ses satires sont une galerie d’admirables portraits flamands.

1539. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre V. De la littérature latine, pendant que la république romaine durait encore » pp. 135-163

Les Romains n’auraient jamais supporté, sur leur théâtre, les plaisanteries grossières d’Aristophane ; ils n’auraient jamais souffert que les événements contemporains, les personnages publics fussent ainsi livrés en spectacle.

1540. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre premier. Les signes — Chapitre II. Des idées générales et de la substitution simple » pp. 33-54

En d’autres termes, une certaine tendance correspondante à ce qu’il y a de commun entre les divers personnages munis d’un paletot, d’une barbe et d’une grosse voix s’est éveillée en lui, à la suite des expériences par lesquelles il les a perçus.

1541. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Pierre Loti »

Vous n’y trouverez ni drames singuliers ou puissants, ni subtiles analyses de caractères, puisque tout s’y réduit à des amours suivies de séparations et que les personnages y ont des âmes fort simples.

1542. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jean Richepin »

Ce sera le virtuose du rut, de l’athéisme nu, du matérialisme cru, et ce prestigieux versificateur sera de plus en plus comme ce personnage de Rabagas qui, s’il connaissait un mot plus cochon que « cochon », l’emploierait avec allégresse.

1543. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

La tradition antique, déjà si incertaine dans les deux siècles précédents, se mêle de fables grossières qui font de Cicéron deux personnages, et de Virgile un magicien.

1544. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVI » pp. 413-441

Sans doute on ne peut pas plus comparer La Bruyère à Molière qu’on ne compare le talent de peindre les caractères à celui de les faire agir et de faire sortir leurs traits de la situation où l’art sait les placer ; mais, supérieur à Molière par l’étendue, la profondeur, la diversité, la sagacité, la moralité de ses observations, il est son émule dans l’art d’écrire et de décrire, et son talent de peindre est si parfait, qu’il n’a pas besoin de comédiens pour vous imprimer dans l’esprit la figure et le mouvement de ses personnages.

1545. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XIII »

Le comparse paye pour le personnage vraiment odieux et vraiment coupable : cote mal taillée, s’il en fut jamais !

1546. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Éloges académiques de M. Pariset, publiés par M. Dubois (d’Amiens). (2 vol. — 1850.) » pp. 392-411

Chez Pariset, l’anatomie trop souvent fait défaut, même l’anatomie au moral : en peignant ses personnages, il n’a pas et ne rend pas assez le sentiment de la réalité.

1547. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres inédites de l’abbé de Chaulieu, précédées d’une notice par M. le marquis de Bérenger. (1850.) » pp. 453-472

Nous sommes déjà si loin de ces temps, que, pour bien juger d’un homme, d’un auteur qui y a vécu, il ne suffit pas toujours de lire ses productions, il faut encore les revoir en place, recomposer l’ensemble de l’époque et l’existence entière du personnage ; en un mot, il faut déjà faire un peu de cette étude et de cet effort qu’on fait pour les anciens.

1548. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

C’est le cas de se former une idée juste du personnage célèbre qui nous est ainsi montré en pleine lumière.

1549. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Pourtant, tout avertit qu’on est dans un monde imaginaire : ces personnages s’attendrissent pour rien ; leurs genoux fléchissent, ils soupirent, ils chancellent sans qu’il y ait de quoi ; l’émotion prodiguée n’est que dans les mots.

1550. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Patru. Éloge d’Olivier Patru, par M. P. Péronne, avocat. (1851.) » pp. 275-293

D’Urfé, comme presque tous les romanciers, avait mis dans son roman les personnages de sa connaissance : il s’y était mis lui-même et les aventures de sa jeunesse ; mais tout cela était combiné, déguisé et (le mot est de Patru) romancé de telle sorte, que lui seul pouvait servir de guide dans ce labyrinthe.

1551. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Aussi, avec tout l’esprit qu’elles peuvent avoir, elles échappent et fuient à un certain moment, et, à moins d’être celui même qui tient le gouvernail et qui leur donne décidément la boussole, on les trouve aisément perfides, infidèles, peu sûres, et pouvant à chaque instant s’entendre par la fenêtre dérobée avec quelque personnage du parti ennemi.

1552. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Monsieur Étienne, ou une émeute littéraire sous l’Empire. » pp. 474-493

Lebrun-Tossa, et dont il parlait aussi négligemment que possible, n’était autre, à très peu près, sauf changement du nom des personnages, que la pièce de Conaxa retrouvée à la Bibliothèque impériale ; il ne croyait pas qu’on pût prendre la mesure exacte du secours qu’il avait reçu, dont il n’avait point parlé jusque-là et dont il ne parlait même alors que le moins possible.

1553. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

Il a fait de même dans le chevalier du Distrait, et en général dans ses personnages épisodiques.

1554. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Un des poèmes les plus curieux du Moyen Âge, et qui constitue une véritable épopée satirique, est le Roman de Renart avec ses diverses branches ; les animaux divers y figurent comme des personnages distincts, ayant un caractère soutenu, et engageant entre eux une série d’aventures, de conflits et de revanches qui, jusqu’à un certain point, s’enchaînent.

1555. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Fervaques et Bachaumont(1) » pp. 219-245

Ils n’ont pas, en peignant leur monstrueuse Rolande, cet accent profond qui, dans la pensée des lecteurs, sépare le peintre de son modèle ; ils n’ont pas cette manière de poser leur personnage qui n’a pas même besoin de paroles, qui n’est qu’un souffle de la plume, mais un souffle vengeur, en exposant des abominations… Certes !

1556. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Alfred de Vigny »

Il fallait se rappeler encore — et surtout — l’art profond de ce créateur du roman historique qu’il est de mode présentement d’abaisser, mais qui restera immortellement ce qu’il est : le premier des hommes après Shakespeare, et, comme lui, se bien garder de mettre sur le premier plan une histoire connue et sur laquelle la Rêverie, comme la Curiosité, s’est épuisée ; mais la donner pour fond, dans la vapeur féconde des distances et l’adoucissement des lointains, à une autre histoire inventée, celle-là, avec ses séries d’incidents et son cortège de personnages !

1557. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre IX : M. Jouffroy écrivain »

Cousin, emporté par l’assaut intérieur de la verve et par la surabondance de la vie animale, causait, s’ouvrait, s’épanchait, dissertait, plaidait avec les gestes et l’appareil oratoire, dans un jardin public, dans son cabinet, n’importe où, devant n’importe qui, jusque devant ce pauvre petit personnage qu’on appelait son secrétaire, M. 

1558. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XII : Pourquoi l’éclectisme a-t-il réussi ? »

Les drames et les romans devinrent des manuels de science ; on représenta, par des personnages, des moments de l’humanité, des époques de l’histoire, des réformes de politique, des thèses de législation pénale, « des questions d’organisation politique et sociale. » Nul poète ne daigna être simplement poète.

1559. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

Il y a, pour ainsi dire, en lui, deux personnages : l’homme de tous les jours, qui est le plus conciliant du monde et presque timide ; et le philosophe rigide dans ses dogmes comme une chaîne de théorèmes ou comme une barre d’acier.

1560. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « M. de Fontanes »

Mais rien n’est tout à fait simple dans la nature des choses, et il ne faut pas, en tirant du personnage l’idée essentielle, ne voir en lui que cette idée. […] Il ne tarda pourtant pas à vouloir éclaircir sa situation, et il adressa au Consul la lettre suivante, dont la noblesse, la vivacité et, pour ainsi dire, l’attitude s’accordent bien avec la lettre de 1797, et qui ouvre dignement les relations directes de Fontanes avec le grand personnage. […] » Nous avons franchi les endroits les plus difficiles de la vie politique de M. de Fontanes, et nous avons cherché surtout à expliquer l’homme, à retrouver le poëte dans le personnage, sans altérer ni flatter. […] La pièce est très-médiocre, mais il en ressort évidemment que Fontanes était à cette date un personnage littéraire à qui l’on demandait une sorte de patronage.

1561. (1890) Nouvelles questions de critique

Faire vivre un personnage d’une vie qui lui soit propre, s’aliéner et s’oublier soi-même en Ruy Blas ou en Guanhumara, ne pas mêler Hugo encore jusque dans les comparses du drame, c’est ce qui semble n’avoir été plus difficile à personne, dans l’histoire du théâtre français, qu’à l’auteur d’Hernani : Nous, cependant, quand nous assistons à la représentation d’un drame, c’est pour voir vivre, souffrir, et pleurer sur la scène des hommes comme nous. […] Atrides et Labdacides, leurs infortunes, trop lointaines, et d’ailleurs inauthentiques, avaient lassé la pitié de nos pères ; on demandait des sujets plus « humains », des personnages dont la condition fût plus approchée de la nôtre ; on voulait enfin des sentiments tirés de la nature, et au besoin de la rue des Deux-Boules, — selon le mot de Voltaire, qui s’en indignait fort, — et non plus des Vies de Plutarque ou de Cornélius Népos. […] Il entendait par là, que non seulement l’artiste ne doit rien mettre de sa personne dans l’œuvre, mais qu’encore il doit se retrancher jusqu’aux sympathies qu’à force de vivre avec eux il serait tenté d’éprouver pour ses propres personnages. […] Ses personnages ne sont que le support commun de leurs sensations successives, et, à cet égard, les jeunes gens les trouvent aujourd’hui conformes aux plus récents enseignements de la psycho-physiologie. […] Dumas a également prouvé qu’il n’en coûtait rien à la dignité de l’art, en imitant la vie, de se ranger lui-même du côté de ses personnages, de les juger, et de déterminer le jugement du lecteur ou du spectateur.

1562. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

Le moraliste, sans négliger l’occasion du contrôle lorsqu’elle se présente, peut plus aisément s’en tenir aux discours mêmes du personnage si ces discours sont de grande étendue et très abondants : car il a moins à s’inquiéter du détail et de l’exposé des faits que de celui qui parle, et il est impossible qu’en parlant si longuement de soi ou de ce qui est autour de soi, on ne se découvre.

1563. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Le prince de Ligne. — I. » pp. 234-253

Sur tous ces personnages historiques, le prince de Ligne est le témoin le plus juste et le plus rapide, le peintre le plus animé, le plus aisé et le plus au naturel.

1564. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Duclos. — I. » pp. 204-223

Je l’entendis un jour dire après dîner, en parlant du lieutenant de police : « Je tirerai ce drôle-là de la fange pour le pendre dans l’histoire. » — C’étaient là des vanteries d’après dîner, comme lorsqu’il disait encore de je ne sais quel plat personnage : « On lui crache au visage, on le lui essuie avec le pied, et il remercie. » Et tant d’autres mots piquants, excessifs et applaudis, par où s’en allait sa verve57.

1565. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Mais cet art de Bourdaloue ne sera tout à fait sensible aux lecteurs d’aujourd’hui que quand j’aurai démontré, par un exemple déterminé et bien choisi, de quelle manière il s’y prenait pour mêler à la gravité morale de son enseignement une de ces intentions précises, et quelque allusion non équivoque à un incident ou à un personnage contemporain.

1566. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Daru, et où il passa de la simple condition d’un administrateur cultivant les lettres à celle d’un personnage considérable dans l’État.

1567. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Le marquis de la Fare, ou un paresseux. » pp. 389-408

Il ne travaille pas assez pour arriver à écrire des mémoires un peu longs et complets ; la plume lui tombe des mains avant la fin, et c’est dommage ; il était si capable de bien juger et de donner sur les hommes qu’il a connus de ces traits qui restent et qui fixent en peu de mots la vérité du personnage !

1568. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

Une notice préliminaire, à la fois instructive et élégante, met le lecteur au fait de tout ce qu’il doit savoir pour se plaire tout d’abord dans cette bonne compagnie, pour en entendre à demi-mot les allusions et les badinages habituels, pour en connaître les principaux personnages et tous les entours.

1569. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

Il coupe par la Bavière, visite Friessen, Lanspergs, Augsbourg où ils sont traités par le corps de ville non-seulement en gentilshommes, mais en personnages de haute condition, ni plus ni moins que barons ou chevaliers.

1570. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Histoire du roman dans l’Antiquité »

C’est sous le nom de Lucius, qui était celui d’un précédent narrateur, qu’Apulée commence son récit, et il confondra plus d’une fois, en avançant, son propre personnage avec l’original qu’il revêt.

1571. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet »

Quand il n’avait qu’un personnage dans son tableau, Horace s’arrangeait encore pour le tourner de manière que la cocarde ne fût pas en vue ; il n’y avait pas moyen pour toute une scène et un combat.

1572. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Je lui demanderai donc (en ne faisant ici que répéter ce que je tiens d’un amateur du théâtre, d’un de ces hommes de finesse, de rondeur et de sens, tels que Molière les eût aimés en son temps, et qui, en revanche, méditent et ruminent sans cesse leur Molière), je lui demanderai s’il sait quelle est la pièce en cinq actes, avec cinq personnages principaux, trois surtout qui reviennent perpétuellement, dans laquelle deux d’entre eux, les deux amoureux, qui s’aiment, qui se cherchent, qui finiront par s’épouser, n’échangent pas durant la pièce une parole devant le spectateur et n’ont pas un seul bout de scène ensemble, excepté à la fin pour le dénouement.

1573. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. (suite) »

Pas un mot ne sera dit entre eux de ces circonstances en quelque sorte étrangères ; les difficultés ne naîtront pas du dehors ni d’aucun événement contraire, et c’est en cela que le roman est d’une grande délicatesse : elles sortiront uniquement du cœur et de l’esprit des personnages, et viendront de la femme en particulier.

1574. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni (suite et fin.) »

Il a mis sous le nom et le masque de cette espèce de monstre, de ce personnage « à demi Quasimodo, à demi Diogène » (comme le définit M. de Saint-Victor), toute sa misanthropie et son amertume, son noir, ce qui reste de l’ancien Michel quand toutes les aurores sont éteintes, quand tous les soleils sont couchés.

1575. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

L’autre représentait, à cette date, l’esprit d’entreprise, l’innovation hardie, inventive, l’esprit économique et véritablement démocratique, le besoin de publicité dans sa plénitude et sa promptitude, les intérêts, les affaires, les nombres et les chiffres avec lesquels il faut compter, la confiance qui est l’âme des grands succès, l’appel à tous, l’absence de toute prévention contre les personnes, y compris les personnages dynastiques, l’indifférence aux origines pourvu qu’il y eût valeur, utilité et talent ; il était l’un des chefs de file et des éclaireurs de cette société moderne qui n’est ni légitimiste ni carbonariste, ni jacobine ni girondine, ni quoi que ce soit du passé, et qui rejette ces dénominations anciennes, surannées déjà ; qui est pour soi, pour son développement, pour son progrès, pour son expansion en tous sens et son bien-être ; qui, par conséquent, est pour la paix et pour tout ce qui la procure et qui l’assure, et pour tout ce qu’elle enfante ; qui aurait pris volontiers pour son programme, non pas la revanche des traités de 1815 ou la frontière du Rhin, mais les chemins de fer avant tout.

1576. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Histoire de la littérature anglaise, par M. Taine, (suite et fin.) »

S’il était l’homme des nobles intimités, il n’avait rien du personnage public ; il a dit quelque part en s’appliquant un mot de Sénèque sur les hommes d’une extrême timidité : « Tam umbratiles sunt, ut putent in turbido esse quidquid in luce est.

1577. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Aussi, ayant eu à écrire l’Introduction au volume des Lettres par elle adressées à Bancal des Issarts, je m’attachai à bien marquer la nuance et à montrer que, dans son goût assez vif pour ce personnage peu connu, il y avait eu plus d’imagination et de désœuvrement de cœur que de sérieux entraînement.

1578. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

D’Argenson, on le sait de reste aujourd’hui, était un singulier personnage ; son arrière-petit-neveu a bien été forcé de nous le livrer à la fin, tel qu’il était, dans sa peau rugueuse et avec toutes ses verrues : l’excellente et complète édition de ses Mémoires, par M. 

1579. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Exploration du Sahara. Les Touareg du Nord, par M. Henri Duveyrier. »

Au moment d’y entrer, le cheik Othman, son protecteur et son grand ami, qui s’était chargé de le conduire chez les Touareg, lui fit quatre recommandations : « 1° S’armer de beaucoup de patience et de résignation ; — 2° Ne pas intervenir dans les discussions des guides ou khebir, relativement à la marche de la route ; — 3° Faire provision de beaucoup d’eau ; — 4° Être libéral envers les guides, envers ses serviteurs et ses compagnons de voyage. »   Ces guides du Sahara sont des personnages respectés.

1580. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire de la Grèce, par M. Grote »

On a souvent cité le joli mot de Boissonade qui, publiant son édition d’Homère (1823) et ne consentant point à a admettre les raisons de Wolf, mais ne se sentant point non plus de force à les combattre, se retranchait derrière Aristophane et disait avec je ne sais quel personnage de la comédie : « Non, tu ne me persuaderas pas, même quand tu m’aurais persuadé. » Il tirait ainsi son épingle du jeu.

1581. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Les fondateurs de l’astronomie moderne, par M. Joseph Bertrand de l’académie des sciences. »

Je ne m’explique pas très bien qu’à la fin du même article sur Galilée, et pour nous rendre plus sensible la physionomie scientifique du savant personnage, le peintre biographe soit allé chercher je ne sais quelle combinaison imaginaire des génies d’Ampère et d’Arago : j’ai peine à me représenter ce qui en résulte pour la ressemblance.

1582. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Correspondance de Louis XV et du maréchal de Noailles, publiée par M. Camille Rousset, historiographe du ministère de la guerre (suite et fin) »

On peut maintenant se faire une idée complète, ce me semble, du maréchal de Noailles, et donner la véritable définition de ce personnage multiple qui appartient à deux régimes et à deux siècles : un courtisan du temps de Louis XIV, tournant avec les années au citoyen.

1583. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

Après la poésie, la rhétorique, à son tour, serait venue s’en mêler ; après l’âge du chant, si l’on avait voulu absolument des écrits, on n’eut certes pas été embarrassé d’en fournir : un rhéteur habile aurait fait des lettres de la reine, comme il y en a de tant d’autres personnages illustres.

1584. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

De plus, ils sont entrés dans la littérature et dans l’art par le xviiie  siècle d’abord, par le xviiie  siècle exclusivement : ç’a été là leur première et unique Antiquité, et de cette étude ils ont passé immédiatement à celle des mœurs et des personnages du jour, sur les traces et à l’exemple de Gavarni.

1585. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « HISTOIRE de SAINTE ÉLISABETH DE HONGRIE par m. de montalembert  » pp. 423-443

Ce que les lecteurs mondains diraient de nos jours en lisant le détail des mortifications et de certains excès, un grand nombre parmi les contemporains des personnages le disaient également et presque par les mêmes termes.

1586. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

Le critique veut absolument imiter ici ce personnage d’une pierre antique qui pèse une lyre dans une balance ; je ne doute pas que sa balance ne puisse être, ne puisse devenir un jour très-délicate et très-sensible, mais il faut convenir que, pour le quart d’heure, les branches et les plateaux en sont encore bien lourds et bien massifs, pas assez dégrossis.

1587. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SOUZA » pp. 42-61

L’aimable M. d’Entrague, toujours grondé par Mme de Nançay, toujours flatté par Blanche, et qui se trouve servir chaque projet de celle-ci sans le vouloir jamais, est un personnage qu’on aime et qu’on a connu, quoique l’espèce ne s’en voie plus guère.

1588. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre premier. La structure de la société. — Chapitre II. Les privilèges. »

Venons-en à des personnages moindres, à un seigneur de dignité moyenne, dans sa lieue carrée de pays, au milieu des mille habitants qui jadis ont été ses vilains ou ses serfs, à portée du monastère, du chapitre ou de l’évêque dont les droits s’entremêlent à ses droits.

1589. (1858) Cours familier de littérature. V « XXVe entretien. Littérature grecque. L’Iliade et l’Odyssée d’Homère » pp. 31-64

Mais le grand poète, d’après ce que je viens de dire, ne doit pas être doué seulement d’une mémoire vaste, d’une imagination riche, d’une sensibilité vive, d’un jugement sûr, d’une expression forte, d’un sens musical aussi harmonieux que cadencé ; il faut qu’il soit un suprême philosophe, car la sagesse est l’âme et la base de ses chants ; il faut qu’il soit législateur, car il doit comprendre les lois qui régissent les rapports des hommes entre eux, lois qui sont aux sociétés humaines et aux nations ce que le ciment est aux édifices ; il doit être guerrier, car il chante souvent les batailles rangées, les prises de villes, les invasions ou les défenses de territoires par les armées ; il doit avoir le cœur d’un héros, car il célèbre les grands exploits et les grands dévouements de l’héroïsme ; il doit être historien, car ses chants sont des récits ; il doit être éloquent, car il fait discuter et haranguer ses personnages ; il doit être voyageur, car il décrit la terre, la mer, les montagnes, les productions, les monuments, les mœurs des différents peuples ; il doit connaître la nature animée et inanimée, la géographie, l’astronomie, la navigation, l’agriculture, les arts, les métiers même les plus vulgaires de son temps, car il parcourt dans ses chants le ciel, la terre, l’océan, et il prend ses comparaisons, ses tableaux, ses images, dans la marche des astres, dans la manœuvre des vaisseaux, dans les formes et dans les habitudes des animaux les plus doux ou les plus féroces ; matelot avec les matelots, pasteur avec les pasteurs, laboureur avec les laboureurs, forgeron avec les forgerons, tisserand avec ceux qui filent les toisons des troupeaux ou qui tissent les toiles, mendiant même avec les mendiants aux portes des chaumières ou des palais.

1590. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

Perrault donc imagina trois personnages : un Président, savant homme, dit-il, et idolâtre des anciens, à qui il ne put prêter toutefois plus de science qu’il n’en avait lui-même, ni plus d’attachement à l’antiquité, qu’il ne croyait qu’on pût raisonnablement en avoir ; un abbé, savant aussi, mais « plus riche de ses propres pensées que de celles des autres », vraie image de l’auteur qui s’y mire complaisamment, sans se douter que cet autre lui-même a plus d’ignorance que d’esprit, et parmi l’abondance de ses idées une totale absence de sentiment esthétique ; enfin un chevalier, sorte de Turlupin de la critique, plus sot que spirituel, n’en déplaise à Perrault, qui l’a chargé d’avancer toutes les énormités qu’il n’osait faire endosser à son abbé.

1591. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre III. La poésie : V. Hugo et le Parnasse »

Hugo est donc assez limitée, et presque toujours contenue, dirigée, refroidie par la préoccupation d’agrandir son personnage.

1592. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XI. L’antinomie sociologique » pp. 223-252

De même, quand un personnage d’Ibsen, Relling, du Canard sauvage, parle de mensonge vital, c’est plutôt illusion vitale qu’il faudrait dire.

1593. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre IV. Ordre d’idées au sein duquel se développa Jésus. »

Réunie à la Samarie et à l’Idumée, la Judée forma une sorte d’annexe de la province de Syrie, où le sénateur Publius Sulpicius Quirinius, personnage consulaire fort connu 172, était légat impérial.

1594. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Discours sur l’histoire de la révolution d’Angleterre, par M. Guizot (1850) » pp. 311-331

Les personnages ne vivent pas d’une vie à eux ; l’historien les prend, les saisit, il en détache le profil en cuivre.

1595. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

, rentre chez lui tout échauffé, et là, plume en main, à bride abattue, sans se reposer, sans se relire et bien avant dans la nuit, couche tout vifs sur le papier, dans leur plénitude et leur confusion naturelle, et à la fois avec une netteté de relief incomparable, les mille personnages qu’il a traversés, les mille originaux qu’il a saisis au passage, qu’il emporte tout palpitants encore, et dont la plupart sont devenus par lui d’immortelles victimes.

1596. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Vauvenargues. (Collection Lefèvre.) » pp. 123-143

Quoi qu’il en soit, ce premier article que j’ai donné avant les découvertes dernières, n’est pas encore trop faux, et les aperçus qu’on vient de lire sur le caractère et la vocation du personnage ont été plutôt confirmés que contrariés.

1597. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand. (Berlin, 1846-1850.) » pp. 144-164

Voulant caractériser le génie trop vaste, trop remuant, du cardinal Alberoni, et son imagination trop fougueuse : « Qu’on eût donné deux mondes comme le nôtre, dit-il, à bouleverser au cardinal Alberoni, il en aurait encore demandé un troisième. » Les portraits des personnages qu’il a connus et maniés sont emportés de main de maître, et comme par un homme qui était habile ou même enclin à saisir les vices ou les ridicules.

1598. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Frédéric le Grand littérateur. » pp. 185-205

Pourtant la vie intérieure et privée de Frédéric est entièrement connue ; toutes les parties de son caractère sont éclairées ; on a ses lettres, ses vers, ses pamphlets, boutades et facéties, ses confidences de toutes sortes ; il n’a rien fait pour les supprimer, et il est impossible de ne pas reconnaître en lui un autre personnage bien essentiel, et qui est au cœur même de l’homme.

1599. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

On ne peut que gagner et s’honorer en s’approchant, même en toute liberté d’examen et de critique, d’un personnage tel que d’Aguesseau.

1600. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

que vous en semble du nôtre où nous avons tant de personnages évidemment distingués comme du temps de Montaigne, l’un par l’esprit, l’autre par le cœur, un troisième par l’adresse, quelques-uns (chose plus rare) par la conscience, une quantité par la science ou par le langage ?

1601. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — I. » pp. 401-420

Le cardinal de Portocarrero, qui y était le personnage influent, avait été autrefois très amoureux d’elle à Rome, aussi bien que beaucoup d’autres.

1602. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

Un dîner chez Mme Tallien, une soirée chez Mme de Beauharnais, les Concerts-Feydeau, ces réunions d’alors avec leur mouvement et leur tourbillon, avec le masque et la physionomie des principaux personnages, revivaient jusqu’à la fin sous la plume et dans les récits de Mme Gay.

1603. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — I. » pp. 84-104

Mais les générations venues depuis sa mort ne savent plus bien ce qu’était ce personnage intrépide et inachevé, si souvent invoqué comme chef dans les luttes politiques, cet écrivain dont il ne reste que peu d’ouvrages et un souvenir si supérieur à ce qu’on lit de lui.

1604. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — II. (Suite et fin.) » pp. 436-455

Je n’ai rien retenu de la dernière partie du discours qu’une longue nomenclature de noms et de personnages qu’on ne s’attendait point à voir paraître en cette occasion.

1605. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

Au xviiie  siècle, dans chaque maison riche, il y avait l’abbé, personnage accessoire et pourtant comme indispensable, commode au maître, à la maîtresse de la maison, répondant aux questions des enfants et des mères, ayant l’œil sur le précepteur, instruit, actif, familier, assidu, amusant, un meuble nécessaire à la campagne.

1606. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

Remercions donc cette Société, composée d’amateurs de beaux livres, d’appliquer si bien son goût et sa munificence : et venons-en à l’étude du personnage même qu’elle nous aide à mieux connaître.

1607. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome premier — Livre deuxième. L’émotion, dans son rapport à l’appétit et au mouvement — Chapitre deuxième. Rapports du plaisir et de la douleur à la représentation et à l’appétition »

Nous n’avons pas d’un côté une froide intelligence qui contemplerait indifféremment les qualités des choses, et une sensibilité qui n’apprécierait que les intensités ; ces deux personnages ne pourraient jamais s’entendre.

1608. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1873 » pp. 74-101

Tout en l’épargnant, tout en estompant, avec des paroles de reconnaissance, le peu de valeur du personnage, il nous le peint, comme ayant un certain tact de l’humanité, et le sens divinatoire, à première vue, d’un incapable avec un intelligent.

1609. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1880 » pp. 100-128

Les deux victimes ont la crête molle, allongée, avec quelque chose de comique, dans le galbe ridicule de leur personnage d’oiseau.

1610. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Édelestand du Méril »

. ; qu’on lui dise que « les personnages de ses galeries sont des portraits sur des fonds d’or plus que des réalités historiques » ?

1611. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « J. de Maistre » pp. 81-108

Je ne sache guères en toutes ses œuvres qu’une page de colère enflammée, et c’est le célèbre portrait de Voltaire, écrit avec la griffe d’un tigre trempée dans du vitriol ; seulement, remarquez que, dans ce portrait, de Maistre ne parle pas en son nom personnel, mais au nom et par la bouche des personnages du dialogue de ses Soirées de Saint-Pétersbourg.

1612. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre XV. »

Fils d’un personnage consulaire, ami de César, il ne fut esclave ni de la puissance ni des vices du dictateur ; et il s’honora par sa fidélité à des amis malheureux, et par ses regrets pour un frère dont il alla, dans un long et dangereux voyage, honorer les restes ensevelis eu Asie.

1613. (1929) La société des grands esprits

Il décerne à un de ses personnages le titre significatif de « lettré d’art ». […] Abel Hermant se flatte de compter parmi ses ancêtres directs l’ami de Solon, et joue le même rôle que le personnage de l’abbé Barthélemy, mais non à la même époque. […] Toutefois il s’attarde et s’acharne vraiment trop sur des personnages alors d’actualité, mais entièrement disparus de l’horizon et qui nous laissent aujourd’hui bien indifférents. […] (Il ne s’occupe que des grands personnages et ne daigne point flétrir nommément la canaille pangermaniste). […] Cependant, Homais est bien pour Flaubert un personnage grotesque ?

1614. (1908) Après le naturalisme

On admettra en effet que les règles auxquelles se contraignirent les classiques, par exemple, que les notions d’humanité incarnées dans leurs personnages renfermaient une grande part d’erreur et de convention. […] Et c’est pourquoi, les uns après les autres, les peintres recommencent les mêmes toiles insignifiantes, les écrivains reprennent les mêmes sujets avec les mêmes personnages dans les mêmes situations. […] Les personnages se parleront entre eux, mais c’est nous qui comprendrons leurs paroles, et y trouverons un sens suggestif.

1615. (1859) Moralistes des seizième et dix-septième siècles

Son personnage, c’est lui-même, ou plutôt c’est l’humanité se personnifiant en lui dans ce qu’elle a de plus général, et par là même de plus profond. […] En qualité d’homme d’esprit, il obtint l’amitié de personnages considérés. […] Il parvint à un haut degré de faveur auprès de grands personnages. […] Son âme, sa conduite, ses opinions forment un contraste frappant avec l’ensemble du seizième siècle, et surtout avec les personnages desquels il vécut entouré. […] Votre rhumatisme le fait penser à son mal de dents ; l’aventure que vous racontez lui est aussi arrivée ; le goût que vous, exprimez est le contraire du sien ; à la place du personnage dont on parle, voici ce qu’il aurait fait, ou ce qu’il a fait peut-être.

1616. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

C’est un récit plein de mouvement et de vie, et la psychologie des personnages se manifeste par l’action, non par l’analyse, par des faits, non par la description. […] Il y a là du caquet de five o’clock tea à n’en plus finir et bon nombre de personnages ennuyeux. […] Son récit est semblable à une vieille et splendide tapisserie toute pleine de personnages imposants et enrichie de détails délicats et charmants. […] Ses personnages se meuvent avec aisance, avec grâce, avec indolence. […] Il est foncièrement faible, dépourvu de toute valeur, et c’est le personnage le plus attrayant de tout le récit.

1617. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « LEOPARDI. » pp. 363-422

L’abbé Gioberti, à qui l’on doit cette justice que, chrétien et prêtre, il n’a jamais parlé de Leopardi qu’en des termes pleins de sympathie et d’une admiration compatissante142, a raconté qu’ayant connu le poëte à Florence, en 1828, et l’ayant accompagné dans un petit voyage à Recanati, il entendit chemin faisant, de sa bouche, le récit de sa conversion philosophique, c’est ainsi que Leopardi la nommait : la première impulsion lui serait venue d’un personnage qu’il admirait beaucoup, littérateur influent par son esprit et par ses ouvrages. […] Bothe, en faisant connaître à l’Allemagne les Dits mémorables d’Ottonieri, les avait pris d’abord pour une biographie réelle d’un personnage de ce nom, et ne s’était pas aperçu que l’auteur, en établissant son Ottonieri à Nubiana, dans la province de Valdivento, entre d’emblée dans la géographie d’Utopie, de Barataria et de l’île des Lanternes.

1618. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Gabriel Naudé »

L’Apologie pour tous les grands personnages qui ont été faussement soupçonnés de magie, publiée en 1625, est un livre très-savant dont le sujet, pour nous des plus bizarres, ne peut s’expliquer que par la grossièreté des préjugés d’alentour. […] Scaliger et Cardan, les deux plus grands personnages modernes selon Naudé, les deux seuls qu’on pût opposer aux plus signalés des anciens, avaient poussé le plagiat de l’antiquité jusqu’à parler d’une façon presque sérieuse de leurs démons familiers, et jusqu’à se donner l’air d’y croire.

1619. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

« Entre ces deux personnages s’est montrée, dans toute la pureté idéale de sa forme, Kitty Bell, l’une des rêveries de Stello. […] Trois autres personnages, dont les premiers sont les victimes, ont été rendus avec une rare vérité.

1620. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Ce sera leur faire injure que de les réduire à l’égalité commune, quand leur mérite et leur importance politiques les mettent si complètement hors de comparaison ; de tels personnages sont, on peut dire, des dieux parmi les hommes. […] L’ostracisme y produit à peu près les mêmes résultats, en arrêtant par l’exil la puissance des personnages qu’il frappe.

1621. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 avril 1885. »

Il y a, dans les Maîtres Chanteurs, une douzaine de mélodies caractéristiques qui sont comme l’effigie musicale des personnages de la comédie, il en résulte que chaque fois qu’il est question, dans la pièce, du ténor, ou de la jeune fille, ou du baryton, etc., qu’ils soient en scène, qu’ils parlent ou que seulement on parle d’eux, l’orchestre joue la mélodie qui lui est propre… L’action est simple, presque enfantine ; ce n’est en quelque sorte qu’un prétexte à mélodies… Le quatrième tableau est d’une beauté exceptionnelle, tout à fait à l’emporte pièce… Le Figaro (même signature) constate dans les numéros suivants, avec des félicitations, le succès des Maîtres Chanteurs. […] Elle tient néanmoins une place honorable à côté de ses partenaires et supplée par le charme de sa personne aux qualités spéciales qui lui manquent pour, donner une représentation fidèle du personnage.

1622. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 octobre 1885. »

Personnages : Victor Hugo, — chœur de la Garde nationale ; choryphées : Mottu, Emile Perrin, Lefèbre, Keller, Dollfuss, Diedenhofer, Véfour, Chevet, Vachette, — Jules Favre, Jules Ferry, Jules Simon, Gambetta, — Nadar, — Flourens, Mégy, quelques Turcos, — rats de Paris. […] L’OR DU RHEIN Prologue à L’Anneau du Nibelung Première scène Personnages : Woglinde, Wellgunde, Flosshilde : Filles du Rhein.

1623. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIe Entretien. Le 16 juillet 1857, ou œuvres et caractère de Béranger » pp. 161-252

Le grand poète, c’est le sort ; nous ne sommes que les personnages avec lesquels il compose ses drames. J’ai connu les deux personnages vieillis de ce drame de jeunesse et d’amour.

1624. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIVe entretien. Épopée. Homère. — L’Odyssée » pp. 445-524

Mais la poésie épique la ravissait en extase, et non pas tant la poésie héroïque, comme l’Iliade et l’Énéide, dont les personnages et les aventures sont trop dissemblables à nos conditions et trop loin du cœur, mais la poésie épique de la Bible ou de l’Odyssée. […] non, dîmes-nous tous en chœur, et même elle nous touche davantage. — Vous voyez donc bien, reprit-elle, que votre père avait raison de vous le dire : la beauté du récit n’était pas dans la condition des personnages, mais dans la vérité et dans l’émotion de la peinture : un haillon ici est aussi beau qu’un diadème.

1625. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Bossuet et la France moderne »

Après avoir étudié d’un peu près les personnages de cette sinistre tragédie, la vérité m’est apparue peu à peu jusqu’à devenir éclatante.‌ Les historiens ont coutume de rejeter indistinctement sur quelques personnages de l’entourage du roi, et sur Louis XIV lui-même, la faute ou le crime de ce qu’on peut appeler l’Inquisition française.

1626. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Ses Bergeries, publiées pour la première fois en 1625, ne sont qu’une espèce de comédie pastorale en cinq actes, assez mal cousus ensemble, où les personnages ne parlent qu’un langage de convention, qui n’est ni celui de la Cour ni celui du village, mais dont le mélange dut plaire, en effet, aux ruelles de ce temps-là, où régnaient les bergers de L’Astrée.

1627. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — I. » pp. 325-345

Le comte Roederer, dont le nom auprès des générations nouvelles ne réveillait guère que l’idée d’un personnage politique mêlé aux grands événements de la Révolution et du Consulat, s’est révélé tout d’un coup comme un écrivain très littéraire par son Mémoire sur la société polie et sur l’hôtel Rambouillet, imprimé en 1835.

1628. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gibbon. — II. (Fin.) » pp. 452-472

., Mme et Mlle Necker ; l’abbé de Bourbon, fils naturel de Louis XV ; le prince héréditaire de Brunswick, le prince Henri de Prusse, et une douzaine de comtes, barons et personnages de marque, parmi lesquels un fils naturel de l’impératrice de Russie. — Êtes-vous satisfait de la liste ?

1629. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Brunet, sont d’un grand secours, et font faire un pas de plus dans la connaissance de ce singulier et original personnage : ce n’est pas trop, pour le bien entendre, de l’Allemagne et de la France réunies.

1630. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — IV » pp. 103-122

On ne vous mandera pas que par ma contenance je donne lieu de croire que je le trouve tel ; mais on passe de mauvaises nuits. » Fénelon n’était pas dans le secret de ces mauvaises nuits, et il en restait sur l’air d’audace et de fête du personnage, sur ses allures de bal et de plaisir aux plus graves moments.

1631. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Œuvres de Vauvenargues tant anciennes qu’inédites avec notes et commentaires, par M. Gilbert. — II — Vauvenargues et le marquis de Mirabeau » pp. 17-37

Si la réponse était non pas de Mirabeau, mais de tout autre, on dirait qu’elle était bien du genre alors à la mode, genre Maurepas, genre Cléon, genre méchant, auquel Gresset bientôt attachera l’étiquette ; mais avec le marquis de Mirabeau, l’humeur du personnage suffit pour expliquer le trait, sans invoquer le bon air.

1632. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de l’Académie française, par Pellisson et d’Olivet, avec introduction et notes, par Ch.-L. Livet. » pp. 195-217

Il y a, il y avait du temps de Pellisson deux sortes d’élégance et d’urbanité, soit en causant, soit en écrivant : l’une plus vive, plus naturelle, plus aisée et plus familière, plus colorée aussi, puisée dans le commerce du grand monde et de la Cour, par ceux qui y avaient été nourris et rompus dès l’enfance ; c’était celle des Saint-Évremond, des Bussy, des Clérembault, des La Rochefoucauld, des Retz ; — l’autre plus étudiée, plus formée dans le cabinet et par la lecture, ou par l’assiduité dans certains cercles illustres et par le commerce des personnages littéraires les plus qualifiés ; cette dernière urbanité est celle des Conrart, des Vaugelas, c’est celle surtout de Pellisson qui y excelle, et qui en est le parfait modèle en son temps.

1633. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Madame Swetchine. Sa vie et ses œuvres, publiées par M. de Falloux. »

Nous sommes de bien grossiers personnages, et ce beau monde qui vit de blanc-manger littéraire a bien raison de nous mépriser ; mais enfin, quand nous avons quelque chose à dire, nous le disons autrement, nous appelons les choses par leurs noms.

1634. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « La comtesse de Boufflers (suite.) »

« Si le roi d’Angleterre avait déclaré la guerre au roi de France, on n’en eût pas fait plus soudainement, dit-il, le sujet de toutes les conversations. » Mme de Boufflers, à qui tous ceux qui savaient sa liaison intime avec les deux personnages, s’adressaient pour en apprendre plus long et pour avoir le mot de l’énigme, était muette ; elle n’avait reçu aucunes nouvelles d’Angleterre, aucune communication, ni elle, ni le prince de Conti non plus.

1635. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

Rien n’est plus dangereux pour un personnage en vue qu’un fou et un maniaque qui s’acharne contre lui et fait de ce duel son idée fixe.

1636. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Les événements s’accélérant chaque jour et le péril croissant, la reine fut bientôt obligée d’être sérieuse, de peser des résolutions graves, de se former un avis sur le mode d’agir, d’avoir enfin de la décision et de la volonté pour deux : ici s’ouvre tout une autre vie pour elle, et elle suffit avec noblesse à ce second personnage qui put et dut commettre bien des fautes, mais qui ceignit la couronne d’épines, épuisa tous les calices et porta sa croix jusqu’au martyre.

1637. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.). Guerre des Barbets. — Horreurs. — Iniquités. — Impuissance. »

Il remporta deux victoires en bataille rangée, celle de Staffarde (18 août 1690), et celle de La Marsaille (4 octobre 1693), eut quantité de beaux sièges, notamment celui de Nice et de Montmélian, n’éprouva que des échecs sans grande conséquence, ne compromit jamais rien, suffit à tout et maintint les affaires en tel point que le duc de Savoie revenu à résipiscence put lui dire en toute bonne grâce « qu’il avait reçu de lui des leçons et corrections dont il espérait profiter à l’avenir pour le service du roi. » Lorsque l’on considère l’ensemble de cette guerre après la conclusion, il semble qu’elle fasse un tout qui aurait perdu à être conduit autrement et qui est bien en harmonie avec les personnages en présence et avec les résultats obtenus.

1638. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

Dans les commencements de leur liaison et quelques années auparavant, M. de Talleyrand avait eu l’idée de donner à Paris un grand dîner de personnages considérables, et représentant chacun quelque chose : Cuvier, la science ; Gérard, la peinture… Royer-Collard devait y représenter l’éloquence politique.

1639. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

… Je me tais par prudence, et plutôt pour vous que pour moi… » Berthier, ce grand chef d’état-major dont je ne prétends point méconnaître les mérites appropriés au génie du maître, mais « à qui il fallait tout dicter » ; Berthier, « à qui vingt campagnes n’avaient pas donné une idée de stratégie », et qui n’en avait que faire sans doute dans son rôle infatigable d’activité toute passive ; Berthier, qui, au début de la dernière guerre d’Allemagne (1809), dépêché d’avance à Ratisbonne pour y rassembler l’armée, avait signalé son peu de coup d’œil personnel, son peu de clairvoyance dans l’exécution trop littérale des ordres en face d’une situation non prévue ; Berthier, qui pourtant s’était vu comblé de toutes les dignités, de toutes les prérogatives, et finalement couronné et doté jusque dans son nom de cette gloire même de Wagram, — un tel personnage avait certes beau jeu contre un simple officier en disgrâce, dont il ne prévoyait pas les titres distingués et permanents auprès de tous les militaires instruits et des studieux lecteurs de l’avenir.

1640. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — M. de Sénancour, en 1832 »

Aux heures propices de liberté, il s’essayait dès lors à ce roman de son cœur. « Plusieurs fois j’étais dans les bois avant que le soleil parût ; je gravissais les sommets encore dans l’ombre, je me mouillais dans la bruyère pleine de rosée ; et, quand le soleil paraissait, je regrettais la clarté incertaine qui précède l’aurore ; j’aimais les fondrières, les vallons obscurs, les bois épais ; j’aimais les collines couvertes de bruyère ; j’aimais beaucoup les grès renversés, les rocs ruineux ; j’aimais bien plus ces sables vastes et mobiles dont nul pas d’homme ne marquait l’aride surface sillonnée çà et là par la trace inquiète de la biche ou du lièvre en fuite. » Si l’on a le droit de conclure d’Oberman à M. de Sénancour, genre de conjecture que je crois fort légitime pour les livres de cette sorte, en ne s’attachant qu’au fond du personnage et à certains détails caractéristiques, il paraît que, dans une de ses courses à travers la forêt, le jeune rêveur fut conduit, à la suite d’un chien, vers une carrière abandonnée, où un ouvrier, qui avait pendant plus de trente ans taillé des pavés près de là, n’ayant ni bien ni famille, s’était retiré, pour y vivre d’eau, de pain et de liberté, loin de l’aumône et des hôpitaux.

1641. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — Note »

Seulement je profiterai encore de vos objections, qui sont bonnes par elles-mêmes : je me chargerai, moi conteur, ou bien quelqu’un de mes personnages, d’avouer au lecteur que la Cavalcanti n’est pas sans imprudence et sans tort.

1642. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

Le personnage de Valère, de ce jeune homme bien doué et d’un naturel excellent, qui se croit obligé de faire le fat par bon air, n’est pas moins vivement saisi ; cela prête à plus d’une scène heureuse et d’un intérêt assez comique ; mais la diction surtout du Méchant est excellente ; on en peut dire ce que Voltaire disait de la satire des Disputes, que ce sont des vers comme on en faisait dans le bon temps.

1643. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre V. Transition vers la littérature classique — Chapitre I. La littérature sous Henri IV »

Comment ce gentil poète des dames de Caen, cet artiste faiseur de tragédies poétiques, ce bretteur qui se fit chef de bandes huguenotes et fut tué d’un coup de pistolet sur l’escalier d’une auberge, comment cet aventureux et incohérent personnage fit-il un traité d’économie, science pacifique ?

1644. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Jules de Glouvet »

Les personnages sont tout près de la terre, et de là leur beauté.

1645. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

La situation de cet Hamlet moderne, d’un caractère si décidé, et qui n’hésite d’ailleurs pas un instant sur son droit, cette situation est telle que d’abord, étant donné le caractère de ce personnage, elle n’implique chez lui qu’un assez petit nombre de sentiments et fort simples, dont la description sans cesse recommencée devient un peu monotone, et qu’en outre nous ne nous intéressons pas très fortement à ce qu’il éprouve.

1646. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Victor Duruy » pp. 67-94

C’est autant peut-être par ce souci moral que par amour de la vérité vraie qu’il évite de faire trop large la part des personnages historiques, même des plus séduisants.

1647. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre VIII. La question de gout ce qui reste en dehors de la science » pp. 84-103

Un roman, très moral, s’il n’émeut pas, s’il nous promène parmi des personnages et des événements qui ne sont ni vrais ni vraisemblables, n’est qu’une ennuyeuse inutilité et la plus fade des lectures.

1648. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

Par désir de se complaire l’une à l’autre, les deux puissances amies s’envoient des ambassades, s’offrent des fêtes, organisent des rencontres entre les grands personnages qui les représentent ; un rapprochement des deux littératures est la conséquence, quand il n’a pas été le prélude, de ces ententes cordiales.

1649. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre XI, les Suppliantes. »

N’approchez pas de trop près ces personnages qui semblent avoir corps et figure ; leur apparence humaine, déjà si fragile, ne résisterait pas au premier contact.

1650. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Œuvres de Barnave, publiées par M. Bérenger (de la Drôme). (4 volumes.) » pp. 22-43

J’avoue que mes muscles étaient crispés… On voit, ce me semble, la situation, l’attitude et le geste des deux parts : d’un côté, M. de Lally, celui qu’on a appelé le plus gras, le plus gai, le plus gourmand des hommes sensibles, ce personnage spirituel et démonstratif, à qui un moment d’éloquence généreuse et de pathétique dans sa jeunesse permit d’être déclamateur toute sa vie, ayant le beau rôle des larmes et se le donnant ici comme toujours ; de l’autre côté, un homme jeune, ardent, un peu amer, irrité de voir un mouvement d’humanité devenir une machine oratoire et un coup de tactique ; qu’on se représente les deux hommes en présence, et tout s’expliquera.

1651. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

L’abbé de Guasco, espèce de complaisant de Montesquieu, est un personnage utile pour servir d’introducteur çà et là : Entre vous et moi, écrit Chesterfield, il a plus de savoir que de génie ; mais un habile homme sait tirer parti de tout, et tout homme est bon à quelque chose.

1652. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

Avec sa facilité improvisatrice, encore aidée des ressources du patois dans lequel il écrit, Jasmin pourrait courir et compter sur les hasards d’une rencontre heureuse comme il n’en manque jamais aux gens de verve et de talent : mais non, il trace son cadre, il dessine son canevas, il met ses personnages en action, puis il cherche à retrouver toutes leurs pensées, toutes leurs paroles les plus simples, les plus vives, et à les revêtir du langage le plus naïf, le plus fidèle, le plus transparent, d’un langage vrai, éloquent et sobre, n’oubliez pas ce dernier caractère.

1653. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Histoire des travaux et des idées de Buffon, par M. Flourens. (Hachette. — 1850.) » pp. 347-368

Leclerc, était conseiller au parlement de Dijon, qui renfermait alors bien des hommes d’étude et d’érudition, maint personnage de bonne race et en qui la vieille sève n’avait pas tari.

1654. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Monsieur de Bonald, (Article Bonald, dans Les Prophètes du passé, par M. Barbey d’Aurevilly, 1851.) » pp. 427-449

Le nom et le personnage de M. de Bonald sont une de ces représentations les plus justes et les plus fidèles qu’on puisse trouver de l’ordre monarchique et religieux pris au sens le plus absolu ; il a été l’un des derniers sur la brèche et n’a pas cédé une ligne de terrain en théorie.

1655. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mémoires et correspondance de Mallet du Pan, recueillis et mis en ordre par M. A. Sayous. (2 vol. in-8º, Amyot et Cherbuliez, 1851.) — I. » pp. 471-493

Je préparais les esprits à assister à une espèce d’action dramatique plutôt qu’à une séance de législateurs ; je peignais les personnages avant de les mettre aux prises ; je rendais tous leurs sentiments, mais non pas toujours avec les mêmes expressions ; de leurs cris je faisais des mots, de leurs gestes furieux des attitudes, et, lorsque je ne pouvais inspirer de l’estime, je tâchais de donner des émotions.

1656. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Notice historique sur M. Raynouard, par M. Walckenaer. » pp. 1-22

Il n’y a de poétique que l’idée d’avoir mis en scène ce sujet abstrait et d’en avoir attribué le développement à un personnage historique.

1657. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Quand il serait vrai qu’un tel marché honteux eût été conclu, et que le prince eût, dans les premiers temps, acheté ou obtenu de Le Brun le droit du seigneur, toute allusion de la part du mari ou de la femme, dans le procès, devenait impossible à cause de l’inviolabilité du personnage sérénissime.

1658. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « M. Fiévée. Correspondance et relations avec Bonaparte. (3 vol. in-8º. — 1837.) » pp. 217-237

Les principaux personnages y sont vertueux, sensibles, intéressants, et l’on y a affaire à une nature humaine d’Opéra-Comique ou de Gymnase, non pas à la vraie et sincère nature.

1659. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

Pourtant, réduite et entendue dans un certain sens, cette idée a sa justesse : « Je ne crains pas de vous dire, écrit-il pour son fils, que plus la place est élevée, plus elle a d’objets qu’on ne peut ni voir ni connaître qu’en l’occupant. » Saint-Simon, que j’oserai ici contredire et réfuter, a dit de Louis XIV : Né avec un esprit au-dessous du médiocre, mais un esprit capable de se former, de se limer, de se raffiner, d’emprunter d’autrui sans imitation et sans gêne, il profita infiniment d’avoir toute sa vie vécu avec les personnes du monde qui toutes en avaient le plus, et des plus différentes sortes, en hommes et en femmes de tout âge, de tout genre et de tous personnages.

1660. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Montesquieu. — II. (Fin.) » pp. 63-82

Il avait la bonhomie de croire qu’il avait négligé de faire la fortune de son nom et l’illustration de sa maison : « J’avoue, disait-il, que j’ai trop de vanité pour souhaiter que mes enfants fassent un jour une grande fortune ; ce ne serait qu’à force de raison qu’ils pourraient soutenir l’idée de moi ; ils auraient besoin de toute leur vertu pour m’avouer. » Ainsi il croyait, par exemple, que si l’un de ses enfants devenait ministre, chancelier, ou quelque chose de tel, ce serait un embarras à un personnage si considérable que d’avoir un père ou un aïeul comme lui qui n’aurait fait que des livres, Ceci même est un excès de modestie ou un reste de préjugé qu’on a peine à comprendre.

1661. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Son attitude dans le salon de sa femme était particulière ; bien que ce fût à son intention, et en grande partie pour lui plaire, pour servir et accroître sa renommée, qu’elle s’appliquât à rassembler cette élite brillante, il n’était là qu’un spectateur silencieux et froid : « Hormis quelques mots fins qu’il plaçait çà et là, personnage muet, il laissait à sa femme le soin de soutenir la conversation. » Marmontel, qui fait cette remarque, ajoute que ce silence et cette gravité de M. 

1662. (1864) William Shakespeare « Première partie — Livre I. Shakespeare — Sa vie »

Ce Vipsanius Minator était un personnage consulaire, vieux romain si entêté de Rome qu’il gêna l’empire.

1663. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre VI. Le beau serviteur du vrai »

L’écrivain qui a émis cet aphorisme est, à ce qu’on nous assure, un des hauts personnages du jour.

1664. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Innocent III et ses contemporains »

En diminuant le personnage historique, nous aurons diminué l’historien, et mis l’un et l’autre à sa place ; car, il ne faut pas s’y méprendre, les hommes donnent leur mesure par leurs admirations, et c’est par leurs jugements qu’on peut les juger.

1665. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « X. Ernest Renan »

Éblouir comme le renard de La Fontaine tous les dindons oisifs de la libre pensée qui le regardent tourner en rond, prendre ses poussières à l’apparence et faire monter cette vile fumée sur le soleil de nos traditions ; tel est le côté sérieux du personnage que M. 

1666. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

J’aime suivre en elles les âges divers, les étapes, la formation d’un personnage, le jeune intellectuel juif, qui joue un grand rôle depuis plusieurs années en France, mais je ne les donne pas comme représentatives de la communauté israélite française14.

1667. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — L’inter-nationalisme »

L’homme moderne ne borne plus ses relations aux seuls membres de sa famille, de sa tribu ou de son groupe, il les étend aux limites de son cœur et de sa pensée, par-delà les espaces naguère ennemis ; et la profonde parole du personnage de Térence devient celle de nous tous, pour qui rien d’humain n’est étranger.

1668. (1919) L’énergie spirituelle. Essais et conférences « Chapitre III. “ Fantômes de vivants ” et “ recherche psychique ” »

La supputation des probabilités, à laquelle on fait appel, nous montrerait que c’est impossible, parce qu’une scène où des personnes déterminées prennent des attitudes déterminées est chose unique en son genre, parce que les lignes d’un visage humain sont déjà uniques en leur genre, et que par conséquent chaque personnage — à plus forte raison la scène qui les réunit — est décomposable en une infinité d’éléments indépendants pour nous les uns des autres : de sorte qu’il faudrait un nombre de coïncidences infini pour que le hasard fît de la scène de fantaisie la reproduction d’une scène réelle 7 : en d’autres termes, il est mathématiquement impossible qu’un tableau sorti de l’imagination du peintre dessine, tel qu’il a eu lieu, un incident de la bataille.

1669. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XI : M. Jouffroy moraliste »

Peut-être est-ce un masque employé tour à tour par deux personnages.

1670. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre X. »

Par un art nouveau, que le poëte créait comme ses acteurs et son théâtre, par un secret qui n’est qu’à lui, son hymne est un drame, son accent inspiré passe à ses personnages ; et vous avez à la fois sous les yeux le délire de l’enthousiasme et l’action vraie de la scène.

1671. (1923) Les dates et les œuvres. Symbolisme et poésie scientifique

Or, rappelons que depuis 83, Paul Verlaine a trouvé grâce devant « Lutèce », qu’il en est devenu le personnage prépondérant, qu’il a donné à cette Revue en les révélant, de premières études de ses « Poètes maudits » que l’éditeur Vanier publiait en 84. […] Que l’on se reporte à l’adorable pièce : Diane au bois, en donnant toute l’attention au personnage de Gniphon, le Satyre. […] Puisqu’il s’agit d’épuiser tous les renseignements sur l’Œuvre rêvée (dont le rêve ne présente guère plus de coordination que la plupart des rêves), rappelons de mes propres souvenirs encore ceci : sur la nature de l’un des Personnages qui devait à un moment solennel apparaître sur la scène. Un personnage apparaîtrait, hiératique, imberbe, tout enveloppé de tissus précieusement blancs, sans gestes  en tête la tiare papale, dômale et également blanche, ceinte des trois couronnes gemmées de toutes pierreries : et ce serait, ce suprême Pontife — une symbolisation Phallique, autour de quoi eussent évolué sans doute, comme l’entendait Mallarmé, les danseuses rituelles. […] La tonalité du vers et son rythme — élément central — réglaient l’orchestre et les récitatifs. » C’est la scénique même du drame Wagnérien, excepté que le rôle prépondérant est dévolu au personnage.

1672. (1828) Introduction à l’histoire de la philosophie

Socrate est un personnage éminemment historique. […] Il engage un autre personnage à avancer un peu son char au milieu de la plaine, afin de reconnaître la situation des choses ; après avoir parcouru des yeux les deux armées, le bon Ardschunas avoue à Crishna son incertitude. […] Quel est le personnage historique ? […] Sous cette réserve, il est certain que tout peuple se résolvant nécessairement en quelques personnages d’élite, l’histoire d’un peuple doit être faite, comme elle l’est, par celle de ses grands hommes. […] très peu de noms propres, très peu de grands personnages historiques y paraissent.

1673. (1884) Les problèmes de l’esthétique contemporaine pp. -257

Lire un roman, c’est le vivre en une certaine mesure, à tel point que, si nous le lisons tout haut, nous tendons à mimer par le ton de la voix, quelquefois par le geste, le rôle des personnages. […] Au lieu de supposer un besoin ou désir suivi d’un plaisir chez le personnage en quête des halles de Paris, il ne suppose qu’une suite d’efforts, de raisonnements et de calculs : or, le raisonnement est opposé au sentiment en général, à plus forte raison au sentiment esthétique. […] Il faut que, dans les héros d’un drame, je puisse retrouver quelque chose de mes défauts et de mes laideurs même pour croire à leur existence : car l’essentiel, pour un personnage fictif, n’est pas de paraître beau ou laid, mais de paraître exister, tant le fictif en lui-même et par lui-même est peu esthétique. […] Peut-être cependant l’émotion la plus esthétique qu’on puisse exciter en nous est-elle encore l’admiration morale ; Corneille l’a cru du moins ; dans les chefs-d’œuvre du roman ou du drame, les personnages auxquels nous nous intéressons le plus sont d’habitude ceux que nous admirons davantage. […] Un des personnages du même Musset compare la voix de son amie à un bon génie Qui porte dans ses mains un vase plein de miel.

1674. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Lamartine »

Nous devons certes tenir compte de la légende, puisque la légende c’est l’idée que le plus grand nombre des hommes se sont faite ou ont fini par se faire d’un personnage historique. Il est à croire que ce personnage avait du moins en lui de quoi suggérer cette idée : et ainsi la légende exprime presque toujours avec force les traits caractéristiques de l’homme qu’elle magnifie. […]     Les personnages du drame sont un jeune homme, Isnel, une jeune femme, Ichmé, et un enfant de six mois, leur fils. […] Déjà, il y a deux mille quatre cents ans, Euripide faisait dire à l’un de ses personnages : « Prions Jupiter, quel qu’il soit, nécessité de la nature, ou esprit des hommes. » (Les Troyennes, vers 893.)

1675. (1882) Hommes et dieux. Études d’histoire et de littérature

Tacite signale, en s’en étonnant, la chance d’un personnage consulaire qui résolut l’énigme de vivre : « Memmius Régulus, dit-il, put vivre en paix, parce que l’illustration, de sa race était nouvelle et que sa fortune n’attirait pas l’envie. » Aucune lutte, aucune révolte. […] Un personnage de théâtre dit : « Bien-aimée cité de Cécrops !  […] D’accord avec l’histoire, la fiction le traite en personnage moitié tragique et moitié grotesque. […] Un jour, il lui échappa de dire en le secouant d’un geste comique : « voilà le fouet de mes ligueurs. » La mascarade était le fond et la forme de ce curieux personnage, il déguisait à la fois son corps et son âme, son sexe et sa pensée. […] Ces conseillers de nuit s’effacent, le jour, devant les personnages officiels.

1676. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Nous nous figurions une belle tête de vieillard auréolée d’une couronne radiée, un personnage très noble, vêtu de l’invariable manteau qui, dans les tragédies et les peintures académiques, drape indifféremment Joad, Agamemnon, Mithridate et Cæsar-Auguste. […] L’Orient ne change guère ; on retrouve encore les personnages de la Bible dans ces tribus errantes, toujours· prêtes à plier leurs tentes, et à pousser leurs troupeaux vers d’autres étoiles. […] Il nous montre, sans s’émouvoir, les gens qui ont vécu là, ces personnages passionnés et têtus, enfermés dans une foi étroite, incapables de rien voir au-delà des bornes qui murent leur horizon. […] Au reste, ces personnages sont très épris des choses saintes. […] Puis, d’autres personnages sont venus, impalpables, légers, semblables aux nuages et à la fumée, mais fort éloquents.

1677. (1897) La vie et les livres. Quatrième série pp. 3-401

De cette façon, malgré l’antiquité de mon personnage, je n’aurai pas trop l’air d’un revenant aux yeux des personnes qu’enivreront les fêtes franco-russes. » Cette idée parut plaire au capitaine. […] L’auteur, dans cette nouvelle étude, a cru devoir recourir à cette forme de la correspondance fictive, qui est bien téméraire lorsqu’on ne sait pas plier son écriture au ton des différents personnages que l’on veut faire parler. […] Ou, du moins, il ne hante les grands personnages que s’ils ont suffisamment reculé dans le passé. […] Survient Iaroslav, personnage cosmopolite, qui marie sa fille aînée au roi de Norvège, sa cadette au roi de France, et la troisième au roi de Hongrie. […] Et tous ces importants personnages reportèrent sur le nouveau gouvernement la fidélité loyale qu’ils avaient déjà prodiguée à l’ancien.

1678. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Dans les conférences académiques, chacun devait rendre compte des anciens auteurs qu’il avait lus ; et même chaque académicien prenait le nom de celui de ces anciens auteurs pour lequel il avait le plus de goût, ou de quelque personnage célèbre de l’antiquité. […] Nous avons sous les yeux un ouvrage de cette dernière espèce, intitulé : la défaite du Solécisme par Despautère, représentée plusieurs fois dans un collège de Paris : le chevalier Prétérit, le chevalier Supin, le marquis des Conjugaisons, et d’autres personnages de la même trempe, sont les lieutenants-généraux de Despautère, auquel deux grands princes, Solécisme et Barbarisme, déclarent une guerre mortelle. […] Que ce soit un valet qui parle, il faudra être en garde pour employer l’expression et le tour dont il s’agit, et ne se résoudre à en faire usage qu’après s’être assuré que cette façon de parler est bonne en elle-même, indépendamment et du personnage et de la circonstance où il est.

1679. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — III. (Fin.) » pp. 371-393

Toutefois, comme je ne suis ici que rapporteur et que je me borne à relever les principales opinions du personnage que j’étudie, je ferai remarquer que Roederer n’était pas sans quelque inconséquence.

1680. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — III » pp. 81-102

Un principe m’a guidé en l’étudiant : sous peine de rapetisser son objet et de voir d’une vue basse, il faut avant tout chercher dans chaque homme distingué, et à plus forte raison dans un personnage historique, la qualité principale, surtout quand elle a rencontré les circonstances et l’heure propice où elle a eu toute son application et tout son jeu.

1681. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) «  Essais, lettres et pensées de Mme  de Tracy  » pp. 189-209

Mme de Coigny est folle des princes Pulawski ; je les aime aussi, mais je trouve toujours que les personnages n’ont pas l’air vrais, et ne sont pas touchants comme le Falkland des Rébellions de Clarendon. » Et enfin, après quelques jours encore : « Ce matin, nous avons fini l’Histoire de Pologne.

1682. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

Bonaparte donna des pelisses d’honneur aux principaux personnages et jeta de l’argent à la populace : il s’exerçait à faire le sultan.

1683. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

Cela tient à bien des causes : allusions à des personnages inconnus, polissonneries et malices de quartier, rythme gênant, langue embrouillée, incertaine, et pourquoi pas aussi ?

1684. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

« Je protestai, dit Gœthe, et le personnage fut écarté. » Mérimée qui, entre nos auteurs français du jour, était le favori de Gœthe, était bien pourtant un peu entaché lui-même de cruauté ou du moins de dureté dans ses scènes de passion, dans l’exposé et le récit de certaines horreurs (se rappeler surtout la Guzla) ; mais là encore il se contenait, il ne se laissait jamais entraîner en racontant, et il retraçait ces choses horribles avec sobriété et un parfait sang-froid, comme quelqu’un de neutre et d’impassible ; ce dont Gœthe lui savait gré.

1685. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

Comme il a fait une pièce de vers intitulée Bon Temps, que ces mots reviennent assez souvent sous sa plume et qu’il avait pour prénom Roger, on a conjecturé que c’est de lui que vient le nom et le masque populaire de Roger Bon-Temps, ce qui reste très douteux ; car, dans le cas contraire, et en supposant que Roger Bon-Temps ait eu cours avait lui pour signifier un personnage de nul souci et de joyeuse humeur, il serait tout naturel que, s’appelant Roger, il eût fait des pièces de poésie sur le Bon Temps pour faire honneur à son prénom et pour le faire cadrer avec le terme courant que consacrait la locution vulgaire.

1686. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

C’est le même homme qui, quelques années après, étant allé en Russie pour y peindre de hauts personnages et des batailles, disait à propos du progrès factice et forcé dont il était témoin : « On est ici comme en Egypte, sur une boursouflure qui, tôt ou tard, s’enfoncera. » J’appelle cela du bon sens d’observation.

1687. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier. »

Je ne puis cependant m’empêcher, dans ce personnage de d’Albert qui est son René à lui, de noter ce touchant passage de la confession à son ami d’enfance Silvio, lorsque, déplorant la forme de corruption précoce et profondément tranquille, qui lui est survenue et qui lui est propre, il lui rappelle avec une sorte de vivacité attendrie le court éclair de leur pure et commune adolescence : « Te souviens-tu de cette petite île plantée de peupliers, à cet endroit où la rivière forme un bras ?

1688. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Supposons donc que l’on soit devant une suite de tableaux que le poète décrit et s’attache à caractériser l’un après l’autre, comme étant l’expression vivante des personnages représentés ; on arrive ainsi devant un tableau de Philoctète à Lemnos.

1689. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Entretiens sur l’architecture par M. Viollet-Le-Duc (suite et fin.) »

Qu’on se figure, dans ce cadre auguste et approprié, une de ces solennités telles qu’on les célébrait au Moyen-Âge les grands jours de fêtes saintes, un de ces drames liturgiques comme il s’en représentait alors dans les églises, avec musique et personnages, le clergé faisant les rôles, — les trois Mages à la crèche, les trois Maries au saint Tombeau, ou la scène des disciples d’Emmaüs au lendemain de la résurrection du Sauveur.

1690. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Madame Roland, ses lettres à Buzot. Ses Mémoires. »

Je sais qu’il y a des personnes qui trouvent cela théâtral ; mais, en vérité, il me semble que l’échafaud est bien réellement un théâtre aussi ; elle ne l’avait pas choisi, il lui échut par le sort ; elle y parut comme il sied, et y joua son personnage d’une manière à la fois aisée, courageuse et supérieure, décente et digne.

1691. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Essai de critique naturelle, par M. Émile Deschanel. »

Je maintiens donc, avec quelques-uns de mes confrères d’aujourd’hui, qu’il y a de certaines règles pour faire le siège d’un écrivain et de tout personnage célèbre ; s’il est mieux de les dissimuler et d’en dérober aux yeux l’appareil, il est bon toujours et essentiel de les suivre, Nous avons vu, dans la personne de M. 

1692. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite et fin.) »

Il ne se dit point que l’autorité de Raynal (si autorité il y avait) ne pouvait se séparer du fond des doctrines qu’il avait si ostensiblement soutenues et proclamées ; que son changement d’idées graduel et sincère, remontant à quelques années et connu seulement de quelques amis, ne pouvait que lui nuire en éclatant comme une conversion subite et en s’étalant comme un exemple de plus de la versatilité humaine ; que les hommes célèbres et les personnages publics ne sont pas seulement ce qu’ils sont, mais ce qu’ils paraissent ; que l’auteur de l’Histoire philosophique était le dernier des hommes qui eût le droit de rappeler si solennellement à la modération ceux qu’il avait de longue main excités et échauffés ; que c’était tout au plus ce qu’aurait pu tenter un Mirabeau, se transformant de tribun séditieux en tribun conservateur : et encore aurait-il eu de terribles difficultés personnelles à vaincre : Quis tulerit Gracchos de seditione querentes ?

1693. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [V] »

Étudier sans doute en elle-même une physionomie militaire distinguée et singulière en son genre, un personnage plus cité que connu ; traverser avec lui la grande époque, la traverser au cœur par une ligne directe, rapide et brisée, par un tracé imprévu et fécond en perspectives ; recueillir chemin faisant des traits de lumière sur quelques-uns des grands faits d’armes et des événements historiques auxquels il avait pris part ou assisté.

1694. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Guttinguer avait publié vers 1828, Amour et Opinion, les mœurs de l’époque impériale, celles de 1815, étaient déjà bien exprimées : élégie de fin d’Empire, écrite par un ex-garde d’honneur, où les personnages sont de beaux colonels et des généraux de vingt-neuf ans, de jeunes et belles comtesses de vingt-cinq ; où la scène se passe dans des châteaux, et le long des parcs bordés d’arbres de Judée et de Sainte-Lucie : en tout très-peu de Waterloo. — Mais Arthur est le vrai, le seul roman de M.

1695. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « DE LA LITTÉRATURE INDUSTRIELLE. » pp. 444-471

Le personnage trop célèbre et d’une capacité aussi incontestable que malheureusement dirigée, qui a eu cette idée hardie, prétendait tuer ce qu’on appelait le monopole de quelques grands journaux ; mais il n’a fait que mettre tout le monde et lui-même dans des conditions plus ou moins illusoires, et où il devient de plus en plus difficile, à ne parler même que de la littérature, de se tirer d’affaire avec vérité, avec franchise.

1696. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

Mérimée pourrait envier ce personnage d’Ivan, de ce brave domestique du major, à la fois si fidèle et si féroce, et qui donne si lestement son coup de hache à qui le gêne, en sifflant l’air : Hai luli, hai luli !

1697. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

Magnin, de cette nature des plus fidèles à elle-même et à ce qu’elle a une fois accepté ; il tient beaucoup en cela de ces personnages de la fin du xviiie  siècle, qu’il connaît si bien, qu’il a pratiqués de bonne heure, et dont il a gardé plus d’une doctrine et plus d’un pli, tout en se séparant d’eux si complétement sur la question littéraire.

1698. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LES JOURNAUX CHEZ LES ROMAINS PAR M. JOSEPH-VICTOR LE CLERC. » pp. 442-469

Bayle, dans l’article Tanaquil de son Dictionnaire, après avoir soigneusement déroulé le tissus de contes qui se rattachent à cette princesse, ajoute que, si l’on avait fait faire à de jeunes écoliers des amplifications sur des noms de personnages héroïques, et qu’on eût introduit ensuite toutes ces broderies dans le corps de l’histoire, on n’aurait guère obtenu un résultat plus fabuleux. « Cela eût produit de très-grands abus, dit-il avec son air de maligne bonhomie, si les plus jolies pièces de ces jeunes gens eussent été conservées dans les archives, et si, au bout de quelques siècles, on les eût prises pour des relations.

1699. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

Mais comme l’illusion d’une certaine perspective a besoin de se retrouver même dans les choses de l’amour lorsque son règne se prolonge, ces personnages, qui, de loin, sous leurs lambris élégants et leurs berceaux, nous semblent réaliser un idéal de vie amoureuse, enviaient eux-mêmes d’autres cadres et d’autres groupes qui leur figuraient un voisinage plus heureux.

1700. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) » pp. 129-176

Critique de l’Histoire des Girondins (6e partie) I Le personnage vraiment historique, mais froid et déclamatoire, de madame Roland, m’apparaît sous un aspect plus juste à l’heure de sa mort.

1701. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

La malignité publique se complut à voir la figure du roi, des princes, des ministres, des favoris et des favorites, dans les personnages dont Fénelon avait composé ses tableaux.

1702. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre II. Boileau Despréaux »

Voyez comment il loue la vérité des personnages dans Térence : Ce n’est plus un portrait, une image semblable : C’est un amant, un fils, un père véritable.

1703. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Toujours son intelligence se révèle curieuse avant tout du vrai, du vrai rationnel : il juge toutes les actions de ses personnages ; il ne les a prises même que pour les juger, comme exemplaires de tous les préjugés ou sottises qu’il combat.

1704. (1890) L’avenir de la science « XIX » p. 421

Étrange personnage que ce lettré, qui ne s’occupe pas de morale ou de philosophie parce que cela est de la nature humaine, mais parce qu’il y a des ouvrages sur ce sujet, de même que l’érudit ne s’occupe d’agriculture ou de guerre que parce qu’il y a des poèmes sur l’agriculture et des ouvrages sur la guerre !

1705. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXVII et dernier » pp. 442-475

Puisque les conséquences ultérieures de cette fortune ne sont plus de notre sujet, et que nous nous arrêtons ici dans l’histoire de la société polie, jetons un dernier regard sur les personnages qui la composent en 1680, rassemblons-les dans notre pensée : leur aspect suffira pour nous faire entrevoir l’avenir que nous laissons à d’autres le soin de décrire.

1706. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Goethe et de Bettina, traduites de l’allemand par Sébastien Albin. (2 vol. in-8º — 1843.) » pp. 330-352

Cousin et qu’il sut que c’était un ami de Manzoni, il se mit à l’interroger avec détail, avec une insatiable curiosité, sur les moindres particularités physiques et morales du personnage, jusqu’à ce qu’il se fût bien représenté cet objet, cet être, cette production nouvelle de la nature qui avait nom Manzoni, absolument comme lui, botaniste, il aurait fait d’une plante.

1707. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Broglie. » pp. 376-398

Ce n’est pas de la politique que je viens faire ; je ne veux qu’appliquer à quelques sujets nouveaux la même méthode d’analyse dont j’use à l’égard des auteurs et des personnages littéraires.

1708. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

L’abbé de Choisy avait l’art de faire causer les personnages bien informés, ceux qu’il appelait de vieux répertoires.

1709. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Mirabeau et Sophie. — II. (Lettres écrites du donjon de Vincennes.) » pp. 29-50

Il y eut en lui aussi une part de comédien et de personnage de théâtre qui tenait au talent même, et comme il en entre si aisément et à peu près inévitablement, on ose le dire, chez tous les hommes publics à qui il est donné de mener les autres hommes : mais le fond du cœur était chaud, le fond de la conviction était sincère, de même que plus tard nous verrons que le fond de ses vues politiques, en apparence si turbulentes et si orageuses, était tout à fait sensé.

1710. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Bien au contraire, ce fut le roi de Sardaigne, quand il en fut informé, qui lui en sut un gré médiocre ; et il faut lire, à ce sujet, la très belle lettre, non pas de justification ni d’apologie (il les laisse à ceux qui en ont besoin), mais d’explication et d’éclaircissement, que M. de Maistre adresse à un personnage important de la petite cour de Cagliari.

1711. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

L’effet que le cardinal Maury fit sur le comte de Maistre répondit peu sans doute à l’attente de ce dernier, et il fut frappé de rencontrer, chez un personnage aussi célèbre et aussi hautement considéré en politique, un si grand nombre de propositions hasardées, irréfléchies, de ces paroles en l’air et de ces légèretés robustes qui retombent de tout leur poids sur celui qui les dit.

1712. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — II. (Suite.) » pp. 23-46

Au sortir du sanglant et glorieux combat du 30 mars, Marmont, rentrant à Paris en son hôtel rue Paradis-Poissonnière, vit arriver chez lui, dans la soirée, ce qui restait dans la ville de grands fonctionnaires, les chefs de la Garde nationale, les magistrats municipaux, et les personnages marquants de tout genre.

1713. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Je ne tiens qu’à bien faire comprendre et à bien décrire un personnage remarquable, et, malgré les restes de flamme qui peuvent s’attacher à son nom, à le mettre à son rang dans ce monde froid et durable où une critique respectueuse s’enquiert de tout ce qui a eu bruit et éclat parmi les hommes.

1714. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Rollin. » pp. 261-282

Pendant qu’il écrivait le premier tome de son Histoire ancienne, il était consulté par un grand seigneur belge, le duc d’Aremberg, sur le choix d’un précepteur : Jean-Baptiste Rousseau, alors établi à Bruxelles, servit d’intermédiaire dans cette négociation à laquelle Rollin apporta tout son zèle ; et cet excellent homme, poussant à bout son idée, écrivait à Rousseau : Il y a, dans le premier tome de mon Histoire, un endroit où j’ai été fort occupé de lui (le duc d’Aremberg) et de vous : c’est celui où je parle de Scipion Émilien, et je ne crois pas vous faire tort ni à l’un ni à l’autre en donnant à M. le duc le personnage et le caractère d’un aussi grand homme que Scipion, et à vous celui de Polybe qui ne contribua pas peu par ses conseils à inspirer à cet illustre Romain ces sentiments de générosité, etc.

1715. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre premier. La solidarité sociale, principe de l’émotion esthétique la plus complexe »

L’intérêt que nous prenons à une œuvre d’art est la conséquence d’une association qui s’établit entre nous, l’artiste et les personnages de l’œuvre ; c’est une société nouvelle dont on épouse les affections, les plaisirs et les peines, le sort tout entier.

1716. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Il fait apparaître dans ses Reisebilder des personnages aussi baroques et aussi redoutablement vivants que ceux du conteur berlinois, dessinés avec les mêmes détails bizarres et précis.

1717. (1920) Action, n° 4, juillet 1920, Extraits

Les personnages de la pièce sont Paul Bourget, Guillaume Apollinaire, la duchesse grasse, la duchesse maigre et une bande d’admirateurs de Guillaume Apollinaire conduite par Jean Cocteau.

1718. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

C’est par là qu’un orateur, sans être réellement affligé, fera verser des pleurs à son auditoire et en répandra lui-même ; c’est par là qu’un comédien, en se mettant à la place du personnage qu’il représente, agite et trouble les spectateurs au récit animé des malheurs qu’il n’a pas ressentis ; c’est enfin par là que des hommes nés avec une imagination sensible, peuvent inspirer dans leurs écrits l’amour des vertus qu’ils n’ont pas.

1719. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

Ceux qui s’avancent hors de leur siècle, et qui, personnages isolés sur la scène du monde, fécondent les idées du siècle suivant, s’ils ne meurent pas obscurs, sont dignes de l’épopée.

1720. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Révolution française »

Aurait-on, pour la retracer et en ressusciter les personnages, le talent de tous les Tintoret et de tous les Velasquez de la terre, l’Histoire est plus pourtant qu’une galerie de tableaux menteurs et stupides.

1721. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « V. M. Amédée Thierry » pp. 111-139

Thierry n’est pas fait pour la grande peinture historique et que l’idéal de ses personnages lui échappe ?

1722. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Cette histoire est très belle, très tragique, et les personnages en sont très criminels, puisque c’est la séduction d’une religieuse de haut lignage, princesse de naissance, supérieure de son couvent, par un jeune seigneur italien de beauté singulière, de mœurs très corrompues, assassin trois ou quatre fois.

1723. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « M. Pommier. L’Enfer, — Colifichets. Jeux de rimes. »

Pommier n’a, lui, qu’un personnage dans tout son poëme, mais ce héros, c’est la Foule, c’est le Monde, c’est l’Humanité.

1724. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre I. La quantité des unités sociales : nombre, densité, mobilité »

C’est le prestige, c’est le cortège d’honneurs dont un haut personnage reste entouré dans notre imagination qui nous empêche de l’assimiler aux autres hommes, et de les tenir, eux et lui, pour des unités comparables.

1725. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

Le personnage atrabilaire, qu’il s’appelle Arnolphe ou Argan, qu’il soit un jaloux ou un malade imaginaire, lui apparaît surtout comme un animal insociable. […] Le personnage essentiel, dans les deux cas, c’est lui. […] De ces trois personnages, lequel a reçu les bienfaits de cette école unique, soi-disant suscitatrice du talent ? […] — Un personnage, surnommé « Louis » dans la confrérie, s’est établi fournisseur de « coco » pour pensionnaires de maisons de tolérance. […] L’homme riche qui monte dans son automobile, est ainsi le tributaire du carrossier, du constructeur de moteurs, du marchand d’essence, d’huile, de pneumatiques et de tous les ouvriers que ces personnages emploient.

1726. (1898) La cité antique

Sous ces noms divers, roi, prytane, archonte, nous devons voir un personnage qui est surtout le chef du culte ; il entretient le foyer, il fait le sacrifice et prononce la prière, il préside aux repas religieux. […] Assurément ces personnages n’avaient pas acquis leur autorité par la force, car ils étaient presque les seuls Athéniens qu’il y eût dans cette nombreuse agglomération. […] Pindare dit de ces personnages que, par les offrandes qu’ils font au foyer, ils assurent le salut de la cité. […] Le lendemain, le peuple se réunissait au champ de Mars ; le même personnage qui avait consulté les dieux présidait l’assemblée. […] Un poète athénien met dans la bouche d’un de ses personnages la formule terrible qui frappait l’exilé : « Qu’il fuie, disait la sentence, et qu’il n’approche jamais des temples.

1727. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Mais je suis de votre avis, Pison ; rien ne fait penser plus vivement et plus attentivement aux grands personnages que les lieux fréquentés par eux. […] Je viens même de me détourner un peu sur la droite pour voir le tombeau de Périclès : mais, dans cette ville-ci, les souvenirs sont inépuisables ; il semble, à chaque pas que l’on y fait, que du sol jaillisse l’histoire. — Les recherches, lui dit Pison, quand on les fait dans la vue d’imiter un jour les grands personnages, sont d’un excellent esprit ; mais, quand elles n’ont pour but que de nous mettre sur les traces du passé, elles témoignent seulement d’un esprit curieux.

1728. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Une certaine gaieté, qu’on n’aurait jamais attendue, y ajoutait pourtant par accès sa pointe et le rapprochait des nôtres, de nos excellents personnages d’autrefois. […] Logé avec sa femme et ses deux enfants dans une seule pièce du rez-de-chaussée à l’hôtel du résident d’Autriche, qui n’avait pu lui faire accepter davantage, il s’y livrait encore à l’étude, à la méditation, et le soir, quand son hôte (le comte de Kevenhüller), le cardinal Maury et d’autres personnages distingués, venaient s’y asseoir auprès de lui, il les étonnait par l’étendue de son coup d’œil et sa vigueur d’espérance : « Tout ceci, disait-il, n’est qu’un mouvement de la vague ; demain peut-être elle nous portera trop haut, et c’est alors qu’il sera difficile de gouverner. » Après diverses fluctuations résultant des événements, M. de Maistre fut mandé en Sardaigne par son souverain et nommé régent de la Grande-Chancellerie de ce royaume ainsi réduit. […] Quand je fais le portrait d’un personnage, et tant que je le fais, je me considère toujours un peu comme chez lui ; je tâche de ne point le flatter, mais parfois je le ménage ; dans tous les cas, je l’entoure de soins et d’une sorte de déférence, pour le faire parler, pour le bien entendre, pour lui rendre cette justice bienveillante qui le plus souvent ne s’éclaire que de près.

1729. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) «  Chapitre treizième.  »

Il allait au théâtre entendre les pièces de Corneille et s’y former à l’art de prononcer ; la grandeur dont Corneille a marqué ses personnages, les mâles beautés de sa langue, avertissaient le futur orateur de son propre génie. […] Quoi que fasse l’érudition, Bossuet ne lui a laissé qu’à éclaircir le détail des causes secondes, et à recueillir, sur les caractères des personnages historiques, des particularités qui, sous la plume d’un historien ingénieux, amusent le lecteur plus qu’ils ne l’instruisent. […] Elle veut pour sujets de ses enseignements des rois, des personnages historiques, des fortunes éclatantes, de grands exemples.

1730. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Roederer. — II. (Suite.) » pp. 346-370

C’était en ces semaines où tous les grands personnages du gouvernement, de l’armée, de l’Institut, affluaient chez le général et lui déféraient en quelque sorte le pouvoir : Je joignis, dit Roederer, l’expression de mes vœux au vœu général.

1731. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le marquis de Lassay, ou Un figurant du Grand Siècle. — II. (Fin.) » pp. 180-203

Saint-Simon n’a pas rendu en des termes plus énergiques M. le Prince fils du Grand Condé, et, en nous retraçant le portrait de ce personnage avec qui il avait eu tant de choses à démêler, Lassay est d’une précision aussi inexorable que Mme de Staal de Launay lorsqu’elle nous exprime si au vif la duchesse du Maine.

1732. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Le maréchal de Villars — II » pp. 57-80

Saint-Simon, à qui il n’a pas tenu de faire de Villars un personnage burlesque et de comédie, nous a mis au courant de tous ces propos de la malveillance.

1733. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — III » pp. 455-479

« Savez-vous, écrivait-il vers ce temps, combien je trouve dans ma mémoire de personnages considérables avec lesquels j’ai eu des relations familières avant le commencement de la Révolution française ?

1734. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

… » On croit entendre un personnage de Térence, transportant et appliquant à un cas moderne cette morale délicate à la fois et indulgente. — Je continue ce portrait tout composé de traits à bâtons rompus, et qui rentre assez dans le genre du modèle.

1735. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Journal et Mémoires, de Mathieu Marais, publiés, par M. De Lescure  »

Il s’agit là de ceux qui ont à parler en public, et qui ont à faire usage parfois de l’arme de l’ironie ou du ridicule ; la recommandation en ce qui les concerne est, on le conçoit, d’une importance bien plus grande encore, tout actuelle, pour ainsi dire, et tout immédiate : « Parcendum est maxime caritati hominum, ne temere in eos dicas qui diliguntur. » Il ne s’agit pas d’aller se moquer d’un personnage généralement aimé.

1736. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de la Mennais (suite et fin.)  »

J’ai toujours l’espoir de vous aller revoir au printemps… » Une lettre toute d’onction de l’abbé Carron à l’abbé Jean, à ce moment, met au grand jour l’âme suavement bénigne et tendre de cet excellent homme : « (12 décembre 1815)… Je ne vous parlerai, cher ami, de mon bien-aimé fils Féli que les larmes aux yeux : je ne suis point un Paul, et pourtant j’ai dans le même personnage un second Tite, un autre Timothée.

1737. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. VINET. » pp. 1-32

On a droit de noter encore à l’avantage du pays de Vaud, qu’on lui devrait l’introduction dans la littérature française d’un autre personnage bien mémorable, du dernier arbitre classique du goût, s’il était vrai, comme cela paraît en effet, que La Harpe descendait, soit légitimement, soit naturellement, de la famille vaudoise de ce nom.

1738. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. NISARD. » pp. 328-357

Or, ce livre sur les poëtes latins de la décadence n’est en effet, dans son but principal, j’ose le dire, qu’un manifeste raisonné, assez érudit d’apparence, mais plein d’allusions, qui vont, je le crois bien, jusqu’à compromettre en plus d’un endroit la réalité historique et l’exactitude biographique, un manifeste contre la poésie moderne dite de 1828, et ses prétentions, et même ses principaux personnages.

1739. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mémoires sur la mort de Louis XV »

C’est une espèce de fou qui ne manque pas d’esprit, à qui les caresses de Mme Dubarry et la confiance du roi dans cet horrible rapport avaient tourné la tête, qui se croyait un personnage, un homme à crédit, que cette idée disposait à tout faire pour l’avantage de cet indigne fripon, mais qui au moins était capable de mettre plus de force et plus d’intrépidité dans ses infamies ; homme d’ailleurs d’une crapule indécente, d’une déraison choquante et d’une insolence brutale.

1740. (1875) Premiers lundis. Tome III «  À propos, des. Bibliothèques populaires  »

Mais Michelet, homme vivant, mais Renan, de quel droit, vous, personnages publics, corps de l’État, fussiez-vous l’ancien Sénat dit conservateur, de quel droit venez-vous-leur imprimer une tache au front ?

1741. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre II. Les romans bretons »

Virgile y passa ensuite, puis Stace, puis Lucain, puis Ovide : Enée, Œdipe, César, tous les personnages des Métamorphoses défilèrent sous les yeux de nos Français émerveillés.

1742. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre neuvième »

« Il m’est venu un bien grand souci, écrivait saint Augustin à un personnage puissant, c’est que Ta Sublimité croie devoir infliger à ces coupables la rigueur de la loi du talion.

1743. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre douzième »

Je n’aime pas Virginie disant à l’esclave marronne, du ton d’un personnage de Diderot : « Rassurez-vous, infortunée créature ! 

1744. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Études sur Saint-Just, par M. Édouard Fleury. (2 vol. — Didier, 1851.) » pp. 334-358

Je ne sache pas qu’on ait vu jamais, sinon chez des esclaves, le peuple porter la tête des plus odieux personnages au bout des lances, boire leur sang, leur arracher le cœur et le manger ; la mort de quelques tyrans à Rome fut une espèce de religion.

1745. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1879 » pp. 55-96

Il y a une danseuse, tournant sur ses pointes dans un clair de lune, de laquelle pourrait s’éprendre un personnage d’Hoffmann, et encore un clown qui se couche, cherche sa position sur un lit, et s’endort avec des poses et des gestes d’une humanité de chair et d’os.

1746. (1881) La parole intérieure. Essai de psychologie descriptive « Chapitre V. La parole intérieure et la pensée. — Premier problème : leurs positions respectives dans la durée. »

Alexandre Dumas, dont les manuscrits immaculés sont célèbres, était de ces derniers ; Balzac, au contraire, se ruinait en corrections d’épreuves ; soutiendra-t-on, d’après Boileau, que Balzac concevait moins nettement qu’Alexandre Dumas les personnages qu’il mettait en scène dans ses romans ?

1747. (1913) La Fontaine « III. Éducation de son esprit. Sa philosophie  Sa morale. »

C’est ici que je rappelle que, même dans Clymène, il avait nommé Horace, ou l’avait fait nommer par Apollon, qui figure comme personnage de Clymène, et il l’avait fait nommer avec honneur.

1748. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

, et quand le personnage évoqué, quand l’idée ressuscitée, se sont dressés et nous ont regardés face à face, nous n’avons pas le droit, — du moins ce serait le comble de la puérilité, — de discuter les formules évocatoires du sorcier.

1749. (1899) Le roman populaire pp. 77-112

Pour m’en tenir aux Anglais, il est remarquable que leurs romanciers, à la différence des écrivains français, ne s’attachent pas, en général, à l’étude d’un cas de psychologie passionnelle, d’un scrupule, d’un doute, d’une situation intéressante sans doute, mais exceptionnelle, soit en elle-même, soit par la qualité des personnages qu’elle met en scène.

1750. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre second. De la sagesse poétique — Chapitre VI. De la politique poétique » pp. 186-220

Partant de ces trois erreurs, ils ont cru que les rois et autres grands personnages des temps anciens s’étaient consacrés, eux, leurs familles, et tout ce qui leur appartenait, à adoucir le sort des malheureux qui forment la majorité dans toutes les sociétés du monde.

1751. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre premier. »

La voix, dont les hardis préludes chantant, il y a plus d’un quart de siècle, la grandeur du conquérant de l’Europe en cellule il Sainte-Hélène, célébraient cet aigle qui, abattu et captif, Manque d’air dans la cage, où l’exposent les rois ; cette voix, aujourd’hui proscrite par un contrebas de la fortune, ne serait pas embarrassée pour rendre l’expression littérale et l’accent même du poëte thébain, pour nommer l’oiseau domestique, non moins que sa cage ; et, sans avoir besoin de l’aigle, personnage noble en tout temps, elle dirait ce coq guerroyant au logis (ἐνδομάχης), dont s’effrayait le bon abbé Massieu.

1752. (1904) Propos littéraires. Deuxième série

Avant : « Jamais de la nature il ne faut s’écarter. » Voyez les personnages de Térence : « c’est un amant, un fils, un père véritable ». […] On a tenté bien souvent une définition du classique, et il est certain que le classique est un personnage assez complexe pour que la définition en soit difficile, et ce lui est honneur qu’il soit malaisé de le définir. […] C’est donc un personnage et une personne ? […] « C’est plus qu’un trésor, c’est un trésorier », dit un personnage d’Émile Augier en parlant de la fille du trop confiant Desroncerets. […] Sur ce personnage en tout cas très curieux, M. 

1753. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre I. Les Saxons. » pp. 3-71

Les personnages ne sont point égoïstes et rusés comme ceux d’Homère. […] Les personnages sont danois.

1754. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1866 » pp. 3-95

Car c’est incontestable, les costumes du passé, de grands noms vaguement entendus et le lointain d’une ancienne époque, imposent au peuple et le pénètrent d’un respect religieux qu’il n’a pas pour les drames qu’il coudoie, pour les personnages de son temps. […] De majestueux faisceaux de seringues marchent, comme des haches de consuls, devant le rire… Les manteaux, les robes, l’hermine, les bonnets carrés des hommes et des femmes, la pourpre universitaire, le personnage du praeses, le latin de cuisine et de latrine, les réponses du clysterium dare , le plain-chant de Diafoirus et de Purgon, font songer à un paranymphe du Mardi-Gras à la Sorbonne, et à la Messe rouge d’une rentrée de cour d’apothicaires en belle humeur.

1755. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1867 » pp. 99-182

Et cela est d’autant plus marqué que le monsieur est un personnage allemand, muet et bellâtre, un gandin de la Borussie, dominant la fête de sa raie au milieu de la tête, et d’un sourire diplomatique, et que la femme, au milieu de son effort de grâce, a je ne sais quoi d’inquiétant d’une femme d’affaire en sa personne, avec des absorptions et des absences, où on dirait que son attention vous quitte pour aller aux deux petits cabinets de sa chambre : qui sont des coffres-forts de pierres précieuses, — et qu’on croit deviner en la terrible implacabilité de son visage de blonde, un passé qui fait peur. […] Il nous conte, du plus grand sérieux du monde, qu’il éprouve un certain ennui de finir son roman, tant il est attaché à ses personnages… Au milieu du développement de son ennui, un coup de sifflet dans la falaise : c’est Mme Feydeau qui arrive avec un pliant, toute charmante en sa fleur de beauté, et délicieusement coiffée d’une de ces coiffures du Directoire, qui ont l’air d’en faire une fille de Mme Tallien.

1756. (1899) Arabesques pp. 1-223

On ne peut pourtant point exiger que je prenne ce personnage au sérieux ! […] Il y a le personnage qui, dans des articles d’allure pseudo-sérieuse, use du charabia le plus effroyable pour démontrer que les Juifs sont d’une mentalité inférieure à la nôtre et qui se livre à des amalgames de Charcot et de Lombroso pour leur reprocher d’être sujets à l’arthrite. […] Puis à propos du mariage d’une demoiselle de la Banque avec l’amant de sa mère, un des personnages s’écrie : « L’apothéose de la bourgeoisie, la vieille noblesse sacrifiant un de ses fils sur l’autel du veau d’or, et cela pour que le Bon Dieu et les gendarmes, redevenus les maîtres de la France, nous débarrassent de ces fripouilles de socialistes » (p. 505). […] Il stimule, il met en valeur les personnages de sa revue ou de son poème divinateur.

1757. (1906) L’anticléricalisme pp. 2-381

Ils la voient comme un personnage doucement ironique qui rabat leur superbe et qui se moque de leurs prétentions. […] C’est un auteur dramatique et il reste toujours caché derrière ses personnages, qu’il fait parler chacun selon son caractère, et il n’est responsable de rien de ce qu’il dit, puisque ce n’est pas lui qui parle. […] Ensuite, à vouloir saisir et surprendre sa pensée personnelle dans le langage de tel de ses personnages qu’il semble bien être et qui vraiment est donné évidemment comme le truchement de l’auteur lui-même, on peut se tromper encore, ce personnage, le Cléante de Tartuffe par exemple, pouvant bien n’être qu’une précaution prise par l’auteur, et, non un drapeau, mais un paratonnerre. […] Don Juan n’est pas personnage sympathique. […] Or tout le monde, certes, a intérêt à être patriote, mais particulièrement les citoyens appartenant aux classes hautes ; par la très bonne raison, qu’il ne leur est pas difficile de comprendre ou de sentir, qu’en cas de conquête de la patrie, ce sont eux qui seraient remplacés comme dirigeants et comme personnages considérables par des citoyens du peuple vainqueur.

1758. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « L’Académie française »

Ce peu d’accord et de concert s’explique par la quantité de personnages politiques considérables des régimes précédents que renferme l’Académie.

1759. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « François Ier, poëte. Poésies et correspondance recueillies et publiées par M. Aimé Champollion-Figeac, 1 vol. in-4°, Paris, 1847. »

A de tels personnages, chefs et gardiens des États, il est aussi beau d’aimer, de favoriser les arts et la poésie, que périlleux de s’y essayer directement ; et, plus ils sont capables de grandeur, plus il y a raison de répéter pour eux la magnifique parole que le poète adressait au peuple romain lui-même : Tu regere imperio populos, Romane, memento.

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