En attendant cette propagande meilleure qu’il désire et qui viendra peut-être, il cherche à se rendre compte de la raison supérieure qui, dans l’ordre de la Providence à laquelle il croit, a pu déterminer le triomphe de la France sur les puissances conjurées qui aspiraient à la morceler : Rien ne marche au hasard, mon cher ami, écrivait-il au baron de Vignet (octobre 1794), tout a sa règle et tout est déterminé par une puissance qui nous dit rarement son secret. […] D’autres nations, ou, pour mieux dire, leurs chefs ont voulu profiter, contre toutes les règles de la morale, d’une fièvre chaude qui était venue assaillir les Français, pour se jeter sur leur pays et le partager entre eux.
« Quand la puissance secrète qui anime l’univers forma le globe que l’homme habite, elle imprima aux êtres qui le composent des propriétés essentielles qui devinrent la règle de leurs mouvements individuels, le lien de leurs rapports réciproques… » C’est ainsi que s’exprime ce Génie, qui n’est pas un de ceux des Mille et Une Nuits. […] Ce livre, commencé par le spectacle des ruines de Palmyre, aboutit à un Catéchisme de la loi naturelle annoncé dans le dernier chapitre, et publié ou promulgué deux ans plus tard, en 1793 : « Maintenant que le genre humain grandit, observe l’auteur, il est temps de lui parler raison. » La morale y est présentée comme « une science physique et géométrique, soumise aux règles et au calcul des autres sciences exactes ».
« Dans la première, on n’examine que des phénomènes dont on règle toutes les circonstances, pour arriver par leur analyse à des lois générales ; dans l’autre, les phénomènes se passent dans des conditions qui ne dépendent pas de celui qui étudie… Il ne lui est pas permis de les soustraire successivement, et de réduire le problème à ses éléments, comme fait l’expérimentateur ; mais il faut qu’il le prenne tout entier avec toutes ses conditions à la fois et ne l’analyse que par la pensée. […] Le fatalisme suppose une force aveugle, capricieuse, indéterminée, agissant au hasard, sans raison, sans règle, sans loi : c’est donc tout l’opposé du déterminisme, qui admet la liaison des phénomènes suivant des lois fixes et rationnelles.
Il a son clair-obscur dont la source et les règles sont au fond de son âme. […] C’est un spectacle d’incidens divers qui n’impliquent aucune contradiction ; l’artiste est donc obligé d’y montrer d’autant plus de poésie, de verve, d’invention, de génie qu’il est moins gêné par les règles.
D’autres hommes, moins coupables que Châteaubriand, il est vrai, sont traités dans cette histoire avec une indulgence qui n’est pas la forte miséricorde du pardon, comme on la rencontre parfois sous une plume chrétienne… L’auteur de l’Histoire de la Littérature sous la Restauration n’a fait d’exception à la règle de la mansuétude que le tempérament de son esprit ou les circonstances lui ont imposées que pour deux hommes, assez dignes, du reste, de cette exception redoutable, Paul-Louis Courier, le pamphlétaire, et Béranger, le chansonnier. […] Voilà le programme de rigueur que tout écrivain qui se mêle d’apprécier les manifestations de l’esprit humain, dans un moment de son histoire, doit s’imposer d’abord comme une règle suprême, — oui, d’abord !
Le prêtre, dont le corps, le cœur et l’esprit demeurent ensevelis sous le fardeau de la règle à laquelle il s’est attaché, est donc bien un malade, un être pitoyable, qui appelle tous nos soins. […] Je parle du prêtre qui, en même temps que l’abstinence sexuelle, rejette les creuses formules qui lui furent imposées ; quant à celui qui prétend obéir à une règle qui lui prescrit la chasteté, tout en ne la pratiquant pas, son cas ne peut relever que de la tartuferie.
Et enfin, dans des sociétés comme les nôtres, où les règles essentielles de l’activité, générale, ne manquent plus d’être dûment formulées, où la puissance de l’État se met immédiatement au service des habitudes collectives vraiment indispensables au bien de l’ensemble, la portion de la vie sociale que les lois abandonnent en quelque sorte aux mœurs proprement dites perd chaque jour de son importance. […] La cité romaine s’étend à l’humanité ; les règles universelles prévalent sur les usages particuliers ; le « Droit naturel » s’élabore29.
La quantité des unités sociales : nombre, densité, mobilité Si l’on veut méthodiquement construire une science, il faut, suivant la règle souvent rappelée par Comte, la fonder sur l’étude des propriétés les plus simples et les plus générales de son objet. […] Mais, dira-t-on, si d’une façon générale, il est vrai que les populations les plus denses se concentrent, dans l’espace, à l’Occident, comme, dans le temps, à l’époque moderne, cette règle n’admet-elle pas d’éclatantes exceptions ?
La régularité sévère, la facture savante d’une œuvre d’art n’est qu’au regard superficiel le signe d’un équilibre imperturbable de l’âme ; les plus passionnés sont quelquefois les plus austères, et la force qui règle peut avoir le même principe que la passion qui entraîne et que l’enthousiasme qui crée. »— Si M.
Procédant d’après des règles expresses de poétique et de politique, elle oubliait trop ce vœu d’un de ses talents les plus indépendants : Heureux qui ne veut rien tenter !
Il s’établit dans les premières classes de certains usages, de certaines règles de politesse et d’élégance, qui servent, pour ainsi dire, de signe de ralliement, et dont l’ignorance trahirait des habitudes et des sociétés différentes.
Ce jugement qu’on porte sur soi doit servir de règle et d’épreuve dans la recherche des idées et des expressions, mais sans étroitesse et sans minutie : il en est du style comme des mines et des gestes ; vouloir faire transparaître son Ame à tous moments est le comble de l’affectation et l’antipode du naturel.
Amyot avait bien rencontré en s’arrêtant à Plutarque : un bon esprit plutôt qu’un grand esprit, un auteur lui laisse les questions ardues ou dangereuses, ou du moins qui ne parle ni politique ni religion ni métaphysique d’une façon offensive, un causeur en philosophie plutôt qu’un philosophe, moins attaché à bâtir un système d’une belle ordonnance, qu’à regarder l’homme, à chercher les règles, les formes, les modes de son activité : en un mot, un moraliste.
Habitués au latin, au grec, à des langues mortes dont ils trouvaient les formes fixes, les règles certaines, le type désormais immuable dans les écrivains anciens, ils cherchaient le français et ne le trouvaient nulle part.
Ils ne vivent que d’une vie factice, soutenus par la mode et par l’éducation, réduits à l’application mécanique de règles devenues arbitraires, parce qu’on n’en comprend plus le sens artistique.
La plupart des sentiments dont il a reçu l’héritage sont trop universels encore pour qu’il puisse les dire selon les saintes règles d’une prosodie que des siècles ont formée et dans laquelle, poème à poème, s’est révélée toute l’âme d’un peuple dans sa précision victorieuse.
Telles sont les règles de bonne méthode et de sérieuse impartialité qui nous guideront dans ces recherches sur le cerveau et la pensée, où nous essayerons de faire connaître les travaux les plus récents et les plus autorisés qui traitent de ce grand sujet.
Le premier pas vers l’intelligence du clair-obscur, c’est une étude des règles de la perspective.
Sans l’histoire, il est difficile d’entendre les auteurs anciens ; sans la morale universelle, il est impossible de fixer les règles du goût : et, sous ces deux points de vue, l’enseignement de ce second cours reflète encore sur l’enseignement du premier.
Le destin qui règle le monde veut que tout passe.
Aujourd’hui comme jadis, ma règle morale, c’est le stoïcisme de Marc-Aurèle, et ma méthode, c’est l’analyse scientifique ; mais ce serait un trait de jacobinisme de vouloir imposer par le raisonnement mon état d’esprit à ceux qui ne l’ont pas atteint.
C’est d’ailleurs, au point de vue scientifique, un livre irréprochable et qui a obtenu les suffrages des plus réputés philologues ; et pourtant M. de Gourmont se distingue d’eux en ce qu’il ne formule ni règles ni principes et n’apporte que des observations pures et simples. […] L’« Esthétique de la langue française » ne proposait pas seulement des préservatifs contre la décomposition du langage imaginés d’après des règles arbitraires, mais conformes à la nature même et au rythme de notre idiome. […] Il n’y a pas de honte à cela : c’est une épopée composée dans les règles ou, mieux encore, un bon poème didactique. […] Pierre Loti — et où l’on sent à chaque moment que l’auteur domine, règle et limite sa matière, au lieu d’être submergé par elle, suivant l’ordinaire des impressionnistes de tout genre. […] Si l’on me permet de commencer par exprimer une opinion aussi tranchée, je n’aime pas du tout l’espèce de ces réformateurs sentimentaux qui, pour obéir à la voix de leur conscience, tracent le plan des cités futures et fixent de nouvelles règles de vie aux humains.
« J’ai bien des fois commencé et bien des fois abandonné cet ouvrage ; j’ai mille fois envoyé aux vents les feuilles que j’avais écrites ; je sentais tous les jours les mains paternelles tomber ; je suivais mon objet sans former de dessein ; je ne connaissais ni les règles ni les exceptions ; je ne trouvais la vérité que pour la perdre. […] « Dieu a du rapport avec l’univers comme Créateur et comme Conservateur ; les lois selon lesquelles il a créé sont celles selon lesquelles il conserve : il agit selon les règles parce qu’il les connaît ; il les connaît parce qu’il les a faites ; il les a faites parce qu’elles ont du rapport avec sa sagesse et sa puissance. […] Ce n’est point la fertilité du sol qui règle la population ; c’est la sécurité, la liberté, l’industrie.
Puis tout se règle, et la transposition de la langue continue de s’opérer régulièrement, par le moyen surtout des deux tempéraments les plus livrés à la sensation : V. […] Ils déposèrent leurs sensations dans les mêmes phrases, qui avaient contenu les idées des classiques : ils dressèrent exactement comme leurs devanciers l’appareil des conjonctions et des relatifs, des propositions subordonnées et coordonnées ; ils composèrent selon les règles les groupes des sujets, des verbes et des régimes. […] En dehors de toute modification des règles de la versification, il y a là une différence considérable.
Mais il est peut-être vrai aussi qu’un roman doit être plus logique, plus lié, plus clair que la réalité, et que MM. de Goncourt se sont dispensés plus qu’il n’aurait fallu des règles les mieux fondées de la composition, de tout ce qui, dans une œuvre d’art, produit, pour employer leurs expressions « la tranquillité des lignes » et l’air de « santé courante », donne une impression de grandeur et de beauté, délivre de toute inquiétude l’émotion esthétique et mêle à l’admiration un sentiment de sécurité. […] Ce qu’ils ont par surcroît, c’est, en un sens, le mépris de la phrase, le dédain de certaines petites règle d’euphonie, de cadence, de construction, (Je rappelle que j’ai surtout en vue Manette Salomon et Madame Gervaisais. ) Ces stylistes outrés ne sont nullement des rhéteurs. […] Elle est longue et se prolonge dans une ombre où elle s’enfonce sans finir. » Ils écrivent tranquillement : « En peinture, il ne voyait qu’une peinture…48 » — Beaucoup de leurs périodes, si on les juge d’après les règles les moins contestables de la rhétorique classique, sont assez mal faites, n’ont ni harmonie ni dessin.
Telles sont les règles qui ont été suivies dans la composition de cet écrit. […] Chaque trait qui sort des règles de la narration classique doit avertir de prendre garde ; car le fait qu’il s’agit de raconter a été vivant, naturel, harmonieux. […] Les règles de l’apostolat (ch.
Si Sophocle, s’adressant à l’assemblée par l’entremise du chœur, eût vanté son propre mérite et dénigré ses compétiteurs, ou si, en vertu de son droit de citoyen d’Athènes, il eût fait des propositions sérieuses pour le bien public, assurément, toute impression tragique aurait été détruite par de semblables infractions aux règles de la scène. […] Règle naturelle, évidente, qui a pour elle l’exemple et l’autorité de Molière lui-même. […] Rappelons-nous les règles du comique d’observation : le ridicule qu’on n’avoue pas, mais que l’on cache ou que l’on ignore, ne doit se trahir qu’à la dérobée, à l’insu et contre le gré du personnage. […] Plein de confiance dans la raison et de mépris pour les procédés empiriques, William-Auguste de Schlegel partait de certaines définitions a priori, et, sans se laisser distraire par les préjugés du sens commun, il allait tout droit devant lui, ne s’écartant pas d’un iota des règles qu’il avait une fois établies.
. — Redressement de la sensibilité et de l’instinct opprimés par la convention et par la règle. — Succès de Dickens. […] La manière de concevoir règle en l’homme la manière de sentir. […] Depuis qu’il est né, il n’a éprouvé que misère et injustice : c’est la règle ; les faibles souffrent et sont faits pour souffrir. […] Thomas lui-même, Thomas Gradgrind avec une règle et une paire de balances, et la table de multiplication toujours dans sa poche, monsieur, prêt à peser et à mesurer n’importe quel fragment de la nature humaine, et à vous dire exactement ce qu’on peut en tirer.
» Il se convertit donc, premièrement, en haine de cette incertitude, parce que la spéculation philosophique, dont il est d’ailleurs peu capable, ne lui suffit pas ; parce qu’il lui faut une règle absolue de ses actes, et dont la sanction soit en dehors de lui : bref, il se convertit pour avoir la paix de la conscience. […] Mystérieux phénomène moral : il avait des remords sans croire pourtant qu’il fît des choses défendues ni qu’il transgressât une règle ; il avait le sentiment du péché avant la connaissance et l’acceptation de la loi […] La foi n’est pas faite pour nous servir de règle uniquement dans la conduite privée : nul ordre d’action ne demeure en dehors d’elle. […] j’eusse accepté sa Constitution entière, pourvu qu’il fût chargé lui-même d’en appliquer, en ce qui me concerne, les règles restrictives.
Et puis, l’auteur de Catherine s’est si bien mis en règle avec la vertu qu’on lui peut passer quelques licences. […] On s’aperçoit un jour que la règle a du bon. […] Paméla manque à cette règle, tant de fois promulguée et établie par mon bon maître Sarcey, qu’une pièce historique ne doit pas trop contrarier les notions ou les préventions du public sur les événements et les personnages qu’on lui met sous les yeux. […] Car cet écrivain d’une violence si folle est un écrivain très pur, et dont l’outrance est respectueuse du génie de la langue et des règles de la rhétorique.
Plus tard, en 1657, dans sa Pratique du théâtre, l’abbé d’Aubignac, d’accord avec le goût français de l’époque, écrira : « Je dis que les règles du théâtre ne sont pas fondées en autorité, mais en raison. » C’est avouer que l’emploi de ces fameuses règles n’est nullement arbitraire, mais s’impose despotique par une prescription des lois de la nature. […] si les mots étaient assez ductiles, assez malléables, assez règle de plomb pour s’adapter sans solution de continuité à tous nos états d’âme ! […] Je n’ignore pas que l’art précède l’esthétique et que les chefs-d’œuvre créent les règles.
Il n’y a pas, je crois, d’exemple d’une œuvre produite avec une telle indépendance, un tel mépris des formes et des règles reçues. […] Voilà le roman qui pourrait être soumis à des règles, règles au reste qui existent déjà et qu’on nomme ficelles. […] Dès qu’il élève la règle du moment à la hauteur d’une loi générale, il se précipite infailliblement dans l’erreur. […] Il puise dans le fait isolé, la règle de son jugement, et dans un sentiment intérieur, la règle de ses actes ; mais avec un heureux instinct, il sait dégager de l’un et de l’autre tout ce qui est momentané et fortuit. […] Il faut que leur esprit repose sur des règles précises et ne fatigue pas.
Comme leur passion est sans règle, après avoir fait leurs délices, elle se tourne en amertume, et, comme ils ont foulé aux pieds tout ce qui en eût arrêté le déchaînement, ils se trouvent contre elle sans recours. […] Loin de là, c’est à la nature que nous le rappelons, lui donnant pour règle immuable le vrai, et pour objet de son culte, pour patrimoine séculaire, le devoir. […] Il n’omet pas un détail ; il décrit jusqu’à leur costume ; de chacun de ces souvenirs de jeunesse, il tire une comédie, une idylle, un drame en règle avec exposition, lutte de caractères, catastrophes, dénouement. […] On ne peut alléguer contre lui ni la tradition, ni les exemples, ni des règles convenues, ni Aristote. […] Si j’agis sans me conformer au devoir, qui est la règle naturelle des actions humaines, l’acte une fois commis entraîne à sa suite une série de perturbations qu’il n’est plus en mon pouvoir de prévenir.
Car le devoir en est la règle souveraine et l’héroïsme en quelque sorte la loi vivante.
Le panégyriste de Tibère devait l’être de Séjan ; aussi, dans le même ouvrage, Séjan est-il peint comme un grand homme ; on nous apprend qu’il fut choisi pour seconder Tibère, parce que c’est la règle que les hommes supérieurs emploient des hommes de génie21 ; enfin, dans les dernières lignes, la servitude à genoux implore hautement tous les dieux de Rome, pour demander, au nom de l’univers, la conservation de qui ?
Le romantique est libre et se moque des règles.
De ne point violer certaines règles fondamentales, et toutes ces règles se trouvent dans un ouvrage que je viens de publier, et qui est le dernier mot de la science. […] Ce sera toujours une vaine prétention que celle d’établir le despotisme en fait de goût, et aucune nation ne pourra jamais imposer à toutes les autres les règles qu’elle a peut-être arbitrairement fixées373. » M. […] Quelques règles : 1° Ne point blâmer Les crocodiles sont beaux, ou plutôt ils ne sont ni beaux, ni laids : ils sont des crocodiles. […] Il explique toutes choses, quelles qu’elles soient, par une seule et même méthode, les règles éternelles, universelles de la nature.
Le naturel réfléchi a donné la règle morale, le naturel batailleur donne la force morale. […] — « Premièrement, j’examinerai la nature de ce vice et ce en quoi il consiste ; secondement, je considérerai jusqu’où s’étend la défense qui nous est faite de nous y livrer ; troisièmement, je montrerai le mal de cette habitude tant dans ses causes que dans ses effets ; quatrièmement, j’ajouterai quelques considérations supplémentaires pour en détourner les hommes ; cinquièmement, je donnerai quelques règles et directions qui serviront à l’éviter et à le guérir827. » Quel style ! […] Le théologien entre en campagne contre les papistes au dix-septième siècle, contre les déistes au dix-huitième836, en tacticien, selon les règles, prend position sur un principe, établit tout à l’entour une maçonnerie d’arguments, recouvre le tout de textes, et chemine paisiblement sous terre dans les longs boyaux qu’il a creusés ; on approche, et l’on voit sortir une sorte de pionnier pâle, le front contracté, les mains roidies, les habits sales ; il se croit à l’abri de toute attaque ; ses yeux fichés en terre n’ont pas vu à côté de son bastion le large chemin commode par lequel l’ennemi va le tourner et le surprendre. […] Ceux qui sont unis en un seul corps, qui ont une loi commune établie et une judicature à laquelle ils puissent en appeler, et en outre une autorité pour punir les délinquants, sont en société civile les uns avec les autres846. » Des arbitres, des règles d’arbitrage, voilà tout ce que leur fédération peut leur imposer. […] Il a beau avouer tout haut qu’en l’état où il est, son ennemi « désarmerait une rancune privée » ; il redouble. « Pour ma part, je ne prétends point comprendre ces prudentes formes du décorum, ces douces règles de discrétion que certaines gens essayent de concilier avec la conduite des plus grandes et des plus hasardeuses affaires.
A coup sûr, ce n’est point dans les curiosités d’une palette encombrée, ni dans le dictionnaire des règles, que notre jeune ami saura trouver cette sanglante et farouche désolation, à peine compensée par le vert sombre de l’espérance ! […] Mais les artistes, même ceux qui n’ont qu’une originalité médiocre, ont montré depuis longtemps au public de la vraie peinture, exécutée avec une main sûre et d’après les règles les plus simples de l’art : aussi s’est-il dégoûté peu à peu de la peinture invisible, et il est aujourd’hui, à l’endroit de M. […] La nature n’a d’autre morale que le fait, parce qu’elle est la morale elle-même : et néanmoins il s’agit de la reconstruire et de l’ordonner d’après des règles plus saines et plus pures, règles qui ne se trouvent pas dans le pur enthousiasme de l’idéal, mais dans des codes bizarres que les adeptes ne montrent à personne. […] Il y avait des élèves unis par des principes communs, obéissant à la règle d’un chef puissant, et l’aidant dans tous ses travaux. […] Car cette règle n’est pas applicable aux coloristes transcendants qui connaissent à fond la science du contre-point.
Pas une règle, pas une certitude, la nuit complète. […] Il y a très peu d’exceptions à cette règle. […] « D’abord fougueux et sans règle, dit M. […] Les erreurs deviennent des règles, et l’on hue quiconque n’applique pas les règles. […] Donner des règles au néant, c’est le comble.
Radiguet, dans ses poèmes, ne semble pas s’être sacrifié ni s’être soumis aux vieilles règles du jeu. […] Vérité, moralité, agrément, juste mesure, sont les règles essentielles sur lesquelles se fonde la critique classique. […] Les professeurs de rhétorique vivent encore sous ses règles ! […] Ainsi, la critique classique se limite à présenter les poncifs des chefs-d’œuvre ; aucune théorie d’art ne se constitue ; les règles sont immuables. […] La critique classique, limitée par les règles qu’elle s’était fixées, n’a pas touché le fond du problème de l’art essentiellement individuel ; la critique romantique a fort bien défini le problème, mais l’a-t-elle résolu ?
Notez qu’on l’y prend par une exception unique, car la règle était de ne recevoir à Port-Royal les élèves que tout jeunes (de neuf à dix ans au plus). […] Nous n’avons pas ici affaire à un étudiant d’aujourd’hui, qu’aucune règle ni aucun souvenir d’une règle ne retient, mais à un jeune homme d’une éducation particulièrement pieuse, chez qui la chaste empreinte est profonde et le scrupule tenace. […] Racine ne songe pas à se le demander ; il accepte, pour la poésie, les règles de noblesse conventionnelle posées avant lui par un idéalisme intéressant, mais un peu pédant et renchéri. […] Il est communément dans la lune, non pas insoumis à la règle, mais ignorant de la règle. […] Notez que Racine l’eût pu faire sans manquer gravement à la règle de l’unité de lieu.
Or, la vie individuelle, c’est presque toujours la révolte contre les règles de la vie collective. […] Ou l’immolation de tout l’être à la règle chrétienne, ou la pleine et libre joie de vivre ! […] fini, la règle ! […] un mariage en règle dans ces conditions ! […] Je veux seulement dire que, si on peut être héroïque contre la règle, on peut l’être aussi en obéissant à la règle (voir le premier Brutus).
Je suppose qu’un physiologiste veuille étudier la digestion et savoir ce qui se passe dans l’estomac d’un animal vivant ; il divisera les parois du ventre et de l’estomac d’après des règles opératoires connues, et il établira ce qu’on appelle une fistule gastrique. […] L’idée une fois émise, on peut seulement dire comment il faut la soumettre à des préceptes définis et à des règles logiques précises dont aucun expérimentateur ne saurait s’écarter ; mais son apparition a été toute spontanée, et sa nature est tout individuelle. […] On rend plus de service à la science, a-t-on dit, par l’erreur que par la confusion, ce qui signifie qu’il faut pousser sans crainte les idées dans tout leur développement pourvu qu’on les règle et que l’on ait toujours soin de les juger par l’expérience. […] De sorte que la règle unique et fondamentale de l’investigation scientifique se réduit au doute, ainsi que l’ont déjà proclamé d’ailleurs de grands philosophes. […] La maladie et la mort ne sont qu’une dislocation ou une perturbation de ce mécanisme qui règle l’arrivée des excitants vitaux au contact des éléments organiques.
Le protestantisme, c’est-à-dire l’inspiration individuelle, cette forme encore religieuse et contenue du libre examen, substitué à la foi et cherchant sa règle dans l’Écriture : voilà le caractère de la première phase. […] Dans la deuxième phase, le protestantisme se sécularise ; il s’élève à sa seconde puissance et devient l’esprit d’examen sans contrôle, sans règle comme sans limites, ce qui était inévitable, car l’inspiration individuelle, maîtresse de tout juger d’après la règle qu’elle interprétait à son gré, devait être fatalement conduite à juger et à détruire la règle elle-même et demeurer seule debout sur les débris qu’elle avait entassés. […] D’autres nations, ou pour mieux dire leurs chefs, ont voulu profiter, contre toutes les règles de la morale, d’un accès de fièvre chaude qui était venu assaillir les Français pour se jeter sur leur pays et le partager entre eux. […] C’est ainsi que M. de Bonald arrive à opposer à la théorie de la souveraineté du peuple cet axiome : « La souveraineté est en Dieu » ; principe fondamental dont il déduit cette règle « Le pouvoir est de Dieu. » Ici quelques explications sont nécessaires. […] Cette idée de transférer dans le domaine de la philosophie la méthode d’observation, à laquelle on devait la découverte de tant de vérités dans le domaine des sciences naturelles, et d’abandonner l’esprit de système, cette source inépuisable d’erreurs, allait devenir la règle de son enseignement.
Lorsque de toutes parts il n’était question en France, en Angleterre, en Italie, que de plaisir, d’intérêt et de bonheur, une voix s’éleva de Kœnigsberg pour rappeler l’âme humaine au sentiment de sa dignité, et enseigner aux individus et aux nations qu’au-dessus des attraits du plaisir et des calculs de l’intérêt, il y a quelque chose encore, une règle, une loi, une loi immuable, obligatoire en tout temps et en tout lieu et dans toutes les conditions sociales ou privées : la loi du devoir. […] Depuis Aristote, la logique n’a pas reculé ; il n’y a dans ses ouvrages aucune règle du syllogisme, aucun axiome logique qui ne soit aujourd’hui aussi incontestable à nos yeux qu’il ne l’était alors à ceux des Grecs. […] C’est que la logique porte sur des règles qui peuvent se ramener à certaines propositions évidentes par elles-mêmes et indépendantes de toute application.
Quelque composition vigoureusement coloriée et d’un grand effet nous servirait-elle de règle ? […] La cascade, morceau froid, sans verve, sans invention, sans effet ; mauvaises eaux, tombant en nappes par les vides d’arcades formées sur un plan circulaire, et ces nappes si uniformes, si égales, si symmétriques, si compassées sur l’espace qui leur est ouvert, qu’on dirait qu’ainsi que les espaces, elles ont été assujetties aux règles de l’architecture. […] Je vois Machy, la règle à la main, tirant les cannelures de ses colonnes ; Robert a jetté tous ces instrumens-là par la fenêtre et n’a gardé que son pinceau.
Mais il était peu probable, d’après les règles de la guerre, que les ennemis commissent pareille faute. […] Ayant ainsi pourvu jusqu’aux derniers instants aux soins de son office, et après s’être mis autant que possible en règle avec le passé, Jomini alla joindre l’empereur Alexandre à Prague.
Vielé-Griffin alla comme eux vers la poésie du peuple pour les raisons que j’ai énumérées plus haut, et aussi, je l’ai fait pressentir en parlant de la technique, parce que la liberté d’allure de ces rythmes devait attirer sa spontanéité ennemie des règles imposées31. […] La règle du premier paraît être : rien de trop peu ; il prétend exprimer toute la pensée, toute l’image, avec toutes leurs nuances, avec toutes leurs complémentaires musiques.
« Il faut suivre une règle, écrivait Malesherbes au censeur, quoique nous nous en soyons un peu écartés dans la feuille de la Bataille, parce que, dans ce moment-là, le pauvre Fréron était dans une crise qui exigeait quelque indulgence. » Maintenant qu’on lise, si on le veut, dans L’Année littéraire (1760, t. […] Pompignan, qui a quelque talent joignait de la sottise, prit de là occasion de rédiger un Mémoire justificatif au Roi (mai 1760), qu’il voulut faire imprimer avec faste en inscrivant le nom du roi en tête et en déclarant à tous : « Le manuscrit de ce Mémoire a été présenté au roi, qui a bien voulu le lire lui-même, et qui a trouvé bon que l’auteur le fît imprimer. » Moyennant cette grosse apostille, Pompignan prétendait être affranchi de la règle commune et pouvoir se passer de censeur.
et bienheureux qui en ferait sa règle !
Dans ce grand travail de recherche et d’analyse, le besoin de règle et de plan se faisait à chaque instant sentir.
Cela aura pour premier et sensible effet de reporter du dehors au dedans la règle, la loi de la création littéraire, de rendre l’écrivain dépendant de son seul tempérament, de son propre et personnel idéal : à moins — ce qui arrivera aussi — qu’à la tyrannie du monde ne se substitue la tyrannie des écoles, des ateliers, des sociétés professionnelles, imposant d’absolus mots d’ordre, d’exclusives formules, et décriant la concurrence.
Malheureusement, les lois de l’hérédité sont encore bien mystérieuses pour la science actuelle ; les familles d’écrivains qui ont une généalogie en règle sont une rare exception ; les accidents auxquels le mariage est sujet, comme disent nos comiques, forcent parfois à un scepticisme prudent ; bref, l’interprétation incertaine de documents incertains ou insuffisants risque de conduire à des conclusions aventureuses.
Aujourd’hui la séparation des genres dans les écrits littéraires est devenue à peu près impossible ; elle ne peut plus être une règle de l’art d’écrire, au moins une régie aussi sévère qu’avant la révolution.
Il n’y a point de milieu, quand on s’en tient à la nature telle qu’elle se présente, qu’on la prend avec ses beautés et ses défauts, et qu’on dédaigne les règles de convention pour s’assujettir à un système où, sous peine d’être ridicule et choquant, il faut que la nécessité des difformités se fasse sentir ; on est pauvre, mesquin, plat, ou l’on est sublime, et Madame Therbouche n’est pas sublime.
Toutes les règles subtiles d’un style ont là leur origine : en même temps elles éloignent, elles créent la distance, elles défendent l’entrée ; en même temps elles ouvrent les oreilles de ceux qui nous sont parents par l’oreille. » A la vérité, ce travail de Protée des auteurs difficiles, ce noli me tangere, noli me intelligere, est assez vain, puisqu’ils seront compris, adoptés, du moins « touchés » par ceux précisément, en majorité, par qui ils redoutent d’être entendus et dont ils craignent le contact, c’est-à-dire par les sots ; et ce sont ceux qui comprennent peu qui courent tout droit aux choses les plus difficiles à comprendre.