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375. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Blès, Numa (1871-1917) »

Horace Valbel Il (Numa Blès) fréquenta quelques cabarets artistiques, et en dernier lieu celui des Éléphants, où chaque soir il faisait applaudir ses chansons d’actualité, ses chansons satiriques, parodies, poésies et monologues humoristiques, et notamment : Nos femmes ; Les Cadeaux présidentiels ; Conseils à Max Lebaudy ; Les Statues des grands hommes ; Les Adjoints et les Maires ; La Contravention ; Les Bains de mer ; Ce que je sais !

376. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article »

Benoît, Jacobin, avoit traité le même sujet ; mais la forme, si l’on peut s’exprimer ainsi, en gâtoit les matieres : un style lourd déparoit le mérite des choses, au lieu que le P.

377. (1874) Premiers lundis. Tome II « Poésie — Alexandre Dumas. Mademoiselle de Belle-Isle. »

Dumas est si nettement décidée, qu’il y a lieu de s’étonner qu’il s’en détourne jamais pour des écrits dont l’intérêt unique est encore un reflet de ce talent de scène qui lui a été donné. […] Nous remontons sans doute au moyen âge aussi ; mais c’est là, surtout au théâtre, une fièvre chaude, un peu factice, et qu’il est difficile de faire partager au grand nombre : au lieu qu’avec le xviiie  siècle, nous ne nous sentons pas tellement éloignés que cela ne rentre aisément dans nos goûts au fond et dans nos mœurs, sauf un certain ton, un certain vernis convenu qu’on jette sur les personnages, un peu de poudre et de mouches qui dépayse et rend le tout plus piquant.

378. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Conclusion » pp. 355-370

Sans définir les mots d’art et de science (ce dont il faut se garder, si l’on veut s’entendre soi-même et se faire entendre), on peut dire qu’entre la science et l’art il y a cette différence que, dans l’une les gens médiocres peuvent rendre d’utiles services, au lieu que dans l’autre ils ne font rien qui vaille. […] Elle a si peur de n’être pas tout intelligence, de conserver la moindre apparence d’âme, de partialité, d’enthousiasme ; elle s’applique avec un dépouillement si entier, si farouche, à se faire toute à tous, à être anglaise avec les Anglais, allemande avec les Allemands, française avec les Français, qu’elle méconnaît une chose : c’est que les Anglais, les Allemands, les Français sont des hommes, et que dans Molière, dans Shakespeare, dans tous les grands poètes il y a, sous les différences de temps et de lieux, un pathétique capable de faire battre toute poitrine humaine, sans distinction de nationalités.

379. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — Abailard, et saint Bernard. » pp. 79-94

Il eut tout lieu de la satisfaire à Paris. […] Qui, plaisir, lieu, moment, tout est présent pour moi.

380. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — Quatrième faculté d’une Université. Faculté de théologie » pp. 511-518

Il y a une logique propre à l’ecclésiastique, connue sous le nom de Lieux théologiques ; c’est un parallèle des autorités entre elles : de l’autorité de la raison, de l’autorité de l’Écriture, des conciles généraux et particuliers, des Pères considérés séparément et entre eux sur telle matière ou sur telle autre, des docteurs de l’Église, des grands hommes, de la tradition et des monuments ; logique de théologien à théologien, fort différente de celle d’un homme à un homme et d’un théologien à un philosophe. […] Un jacobin appelé Melchior Canus110, a laissé des Lieux théologiques, ou de cette singulière logique, un traité qui a conservé de la réputation jusqu’à ce jour.

381. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre V. Des Grecs, et de leurs éloges funèbres en l’honneur des guerriers morts dans les combats. »

lis tous ces noms, honore-les, et adore la patrie qui récompense ainsi le courage. » — Arrivés aux Thermopyles, ils se prosternent sur le lieu où trois cents hommes se sont dévoués contre trois cent mille. […] En donnant leur vie pour l’État, ils ont mérité la plus honorable des sépultures : je ne parle pas de celle où reposent leurs ossements, la gloire des grands hommes n’est pas renfermée sous le marbre qui les couvre : la terre entière est leur mausolée ; leur nom vit dans toutes les âmes : c’est là que leur mémoire habite éternellement, au lieu que les tombeaux élevés de la main des hommes sont détruits par le temps.

382. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre quatrième. Du cours que suit l’histoire des nations — Chapitre V. Autres preuves tirées des caractères propres aux aristocraties héroïques. — Garde des limites, des ordres politiques, des lois » pp. 321-333

En dernier lieu, elle resta dans la France et dans la Savoie. […] En dernier lieu, la bienveillance des Empereurs détendant à toute l’humanité, ils commencèrent à favoriser les esclaves.

383. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 205

Cette Argenis, qui a fait tant de bruit dans son temps, & qui a été traduite par M. l’Abbé Josse, & en dernier lieu par M.

384. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 199

Il seroit à souhaiter que les Historiens des différens Peuples de l’Europe eussent été à portée, comme lui, de recueillir leurs matériaux sur les lieux.

385. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre deuxième. La connaissance des corps — Chapitre premier. La perception extérieure et les idées dont se compose l’idée de corps » pp. 69-122

La seule différence, c’est que tout à l’heure un corps indépendant, extérieur et stable correspondait effectivement et rigoureusement à notre simulacre, et que maintenant cette correspondance effective et rigoureuse n’a plus lieu. […] Par là, l’étendue solide se distingue de l’étendue vide, c’est-à-dire du lieu qu’elle occupe. Par là encore, nous définissons sa mobilité, qui n’est que le pouvoir de changer de lieu. […] Dès lors deux séries nouvelles de propriétés viennent s’ajouter à lui et parfaire son être. — D’un côté, nous remarquons qu’il est capable de tels changements précis sous telles conditions précises ; il peut changer de lieu, de figure, de grandeur, de consistance, de couleur, d’odeur, être divisé, devenir solide, liquide, gazeux, être échauffé, refroidi, etc. […] Parmi ces événements indicateurs, il en est un très simple et plus universellement répandu que tous les autres, le mouvement, ou passage d’un lieu à un autre, avec ses divers degrés de vitesse. — Nous le remarquons d’abord en nous-mêmes ; la notion primitive que nous en avons est celle des sensations musculaires plus ou moins énergiques dont la série, plus ou moins longue, accompagne la flexion ou l’extension de nos membres.

386. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Indépendamment de son mariage avec une fille d’une famille illustre de Florence, dont il avait eu sept enfants, Boccace confesse, dans l’histoire de sa vie, écrite sur les lieux et si peu d’années après la mort de Dante, que son héros et son poète avait eu la faiblesse des héros et des poètes : un amour de la beauté poussé quelquefois jusqu’à la licence du cœur. […] « On peut, selon nous, classer le poème du Dante, l’Enfer, le Purgatoire et le Paradis, parmi ces poésies locales, nationales, temporaires, qui émanent du génie du lieu, de la nation, de l’époque, et qui s’adressent aux croyances, aux passions de la multitude. […] Le fleuve poétique remonte à sa source pour y retrouver ces eaux qui coulent des hauts lieux. […] J’en expliquerai d’avance et d’une façon générale le caractère allégorique en disant que le dessein principal de l’auteur est démontrer, sous des couleurs figuratives, les trois manières d’être de la race humaine. « Dans la première partie il considère le vice, qu’il appelle Enfer, pour faire comprendre que le vice est opposé à la vertu comme son contraire, de même que le lieu déterminé pour le châtiment se nomme Enfer à cause de sa profondeur, opposée à la hauteur du ciel. […] Au moment de commencer sa carrière de gloire, le héros est ravi en songe en un lieu élevé du ciel, où son aïeul l’Africain, lui découvrant les honneurs, les périls et les devoirs qui l’attendent, le prépare à cette destinée par le spectacle de l’économie divine qui soutient l’univers, police les sociétés et dispose souverainement des hommes.

387. (1857) Cours familier de littérature. IV « XIXe entretien. Littérature légère. Alfred de Musset (suite) » pp. 1-80

La sainteté du lieu répand ici sa solennité grave sur le style. […] Il lègue un cadavre à un lieu de débauche ! […] Poursuivons, car le poète ne se lasse pas lui-même de répandre les odeurs de l’Éden sur ce méphitisme du mauvais lieu. […] Mais que la description de cette aurore funèbre contemplée de la fenêtre d’un lieu de débauche est poignante ! […] un baiser, c’est moi qui te le donne ; L’herbe que je voulais arracher de ce lieu, C’est ton oisiveté : ta douleur est à Dieu.

388. (1896) Matière et mémoire. Essai sur la relation du corps à l’esprit « Chapitre IV. De la délimitation, et de la fixation des images. Perception et matière. Âme et corps. »

Il est bien vrai que ma main ne va pas de A en B sans traverser les positions intermédiaires, et que ces points intermédiaires ressemblent à des étapes, en nombre aussi grand qu’on voudra, disposées tout le long de la route ; mais il y a entre les divisions ainsi marquées et des étapes proprement dites cette différence capitale qu’à une étape on s’arrête, au lieu qu’ici le mobile passe. […] Il faudra alors ériger la diversité de lieu en différence absolue, et distinguer des positions absolues dans un espace absolu. […] Un lieu ne se distinguerait absolument d’un autre lieu que par sa qualité, ou par son rapport à l’ensemble de l’espace : de sorte que l’espace deviendrait, dans cette hypothèse, ou composé de parties hétérogènes ou fini. […] Le changement est partout, mais en profondeur ; nous le localisons çà et là, mais en Surface ; et nous constituons ainsi des corps à la fois stables quant à leurs qualités et mobiles quant à leurs positions, un simple changement de lieu contractant en lui, à nos yeux, la transformation universelle. […] Si nous répugnons naturellement, dans l’hypothèse dualiste, à accepter la coïncidence partielle de l’objet perçu et du sujet qui perçoit, c’est parce que nous avons conscience de l’unité indivisée de notre perception, au lieu que l’objet nous paraît être, par essence, indéfiniment divisible.

389. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

Aussi faible d’esprit qu’il était robuste de corps, sa force étant telle que d’un coup de massue il abattait le cheval et le cavalier, et rompait la plus forte lance sur son genou… Du reste, il n’avait point de vices d’homme privé, mais était vaste et sans mesure en toutes choses… Je ne fais que toucher les principaux traits, j’en supprime d’énergiques et de familiers, mais qui font bien en leur lieu. […] [NdA] On lit dans un chapitre de Huet (Origines de Caen), où il donne l’étymologie des noms de plusieurs lieux de Normandie tirés du latin : « Mazure, Maceries. — Mézeray, Maceriatum, lieu bâti à pierre sèche. » 27.

390. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Madame Dacier. — II. (Fin.) » pp. 495-513

De jeunes esprits impatients, plus légers ou plus hardis, trouvaient que ce régime se prolongeait beaucoup et qu’il y avait lieu d’y jeter de la variété et de l’imprévu. […] Je sais bien qu’il y en a qui gémissent de cet attentat… Il est à remarquer, en effet, que l’Académie française qui, depuis, a été une sorte de sanctuaire classique et d’où sont partis en sens inverse, d’où sont tombés sur des têtes que nous savons bien des anathèmes, était alors un lieu beaucoup plus neutre et dans lequel les adversaires et les contradicteurs de Despréaux, et, ce qui était plus grave, les contempteurs d’Homère, avaient eu pied en toute circonstance : J’avertis ici Mme Dacier, disait La Motte dans sa réponse, qu’elle a une idée fausse de l’Académie française. […] En face de ce colosse d’érudition et de pédantisme, elle fut même relativement légère et spirituelle : Quand je lui ôterai le mérite d’avoir entendu Homère et pénétré l’art de la poésie, disait-elle du docte jésuite, je ne lui ôterai presque rien : il lui reste des richesses infinies : au lieu que moi, si le révérend père m’avait ravi le médiocre avantage d’avoir passablement traduit et expliqué ce poète et démêlé l’art du poème, je n’aurais plus rien ; c’est la seule petite brebis que je possède116 ; je l’ai nourrie avec soin, elle mange de mon pain et boit dans ma coupe : serait-il juste qu’un homme si riche vînt me la ravir ?

391. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sylvain Bailly. — II. (Fin.) » pp. 361-379

Je ne sais ce qu’on pouvait y gagner, car il n’est que trop vrai que Bailly, condamné à mort par le Tribunal révolutionnaire, et conduit le 12 novembre 1793 au Champ-de-Mars, lieu désigné pour son exécution, eut à y subir des outrages inaccoutumés, et devant lesquels la mort elle-même n’est plus qu’un bienfait. […] Jugeant le Champ-de-Mars un lieu trop honorable pour s’arroser de son sang, on exigea que l’échafaud fût dressé près de la rivière sur un tas d’immondices. Il y a des gens qui ont le courage de prétendre, comme s’ils y avaient assisté, que le lieu choisi près de la rivière n’était pas tout à fait aussi immonde qu’on l’a dit.

392. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — I » pp. 20-38

Santeul, le poète latin si fier de ses vers, si heureux de les réciter en tous lieux ou de les entendre de la bouche des autres, et qui aimait encore mieux qu’on dît du mal de lui que si l’on n’en avait rien dit du tout ; Santeul, qui dans une de ses plus grosses querelles écrivait à l’abbé Faydit, qui l’avait attaqué sur son épitaphe d’Arnauld : Je fais le fâché par politique, mais je vous suis redevable de ma gloire ; vous êtes cause qu’on parle de moi partout, et presque autant que du prince d’Orange ; vous avez rendu mes vers de l’épitaphe de mon ami plus fameux que l’omousion du concile de Nicée ; ceux des autres poètes sur le même sujet sont demeurés ensevelis avec le mort, faute d’avoir eu comme moi un Homère pour les prôner et les faire valoir ; — Santeul, qui était si fort de cette nature de poète et d’enfant qui tire vanité de tout, serait presque satisfait en ce moment. […] Il passe par la place Maubert, et les harengères du lieu, qui le connaissent et qui aiment à l’attaquer, ont quelquefois les prémices de la pièce de vers du matin. […] [NdA] Ce n’est pas ici le lieu de traiter à fond de M. 

393. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — I » pp. 298-315

Il était de fière et forte race, descendant des anciens ducs et rois de Bretagne, allié et apparenté aux principales maisons souveraines : « Je me contenterai, écrit à ce sujet un de ses anciens biographes, de dire seulement une chose assez belle et assez particulière, c’est qu’en quelque lieu de l’Europe qu’il allât, il se trouvait parent de ceux qui y régnaient. » On sait le mot de sa sœur répondant à une déclaration galante de Henri IV : « Je suis trop pauvre pour être votre femme, et de trop bonne maison pour être votre maîtresse. » Né au château de Blein en Bretagne en 1579, Henri de Rohan, l’aîné de sa famille, fut donc élevé avec de grands soins par sa mère veuve, Catherine de Parthenay, qui mit de bonne heure sur lui son orgueil et ses espérances. […] Quant à la noblesse et aristocratie de France, il l’estime, et sans assez de raison peut-être, beaucoup plus heureuse que celle d’outre-mer, « tant parce que celle-ci, dit-il, paie taille comme le peuple, qu’aussi pour la rigueur de justice qui est si ordinairement exercée contre eux, qu’il y en a qui tiennent à beaucoup d’honneur, et prennent la grandeur de leurs maisons par le nombre de leurs prédécesseurs qui ont eu la tête tranchée, au lieu que cela est fort rare parmi nous. » Il parle ici en jeune homme et avant Richelieu. […] L’honneur qu’il me faisait, la bonne chère dont il me favorisait, l’entrée qu’il me donnait en ses lieux plus privés, m’obligent non seulement à le pleurer, mais aussi à ne me plus aimer où j’avais accoutumé de le voir.

394. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

Ces paysages si vrais, si francs, et où respire l’agreste génie des lieux, ne lui serviront qu’à encadrer des êtres vulgaires, plats, sottement ambitieux, tout à fait ignorants ou demi-lettrés, des amants sans délicatesse. […] Le grade obtenu non sans peine, il ne s’agit plus que de choisir un lieu où il ira exercer. […] Homais, nous l’avons tous connu et rencontré, mais jamais sous une face si fleurie et si triomphante : c’est l’homme important, considérable du lieu, à phrases toutes faites, se vantant toujours, se croyant sans préjugés, emphatique et banal, adroit, intrigant, faisant servir la sottise elle-même au savoir-faire ; M. 

395. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Des prochaines élections de l’Académie. »

Après tout, il serait singulier que cette voix de discussion, qu’on dit bonne en tout lieu et en toute matière, n’eût qu’inconvénients et inutilité au sein de l’Académie. […] Qui donc s’avise de tenir lieu aujourd’hui de ce pourvoyeur dramatique universel ? […] Ses titres sont sérieux, rangés, estimables ; il y aurait lieu de les examiner de près.

396. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire (suite) »

Il était parvenu à réaliser le vœu qu’il exprimait avec tant de modestie : « Je tâcherai d’établir ma réputation dans votre amitié. » Avec quel transport il lui envoyait, tant qu’il le put et qu’il sut où l’atteindre, des paroles d’admiration sympathique et de tendresse : « Vous, que mon cœur poursuit dans tous les pays du monde, vous qui me tenez lieu des anges gardiens et du démon de Socrate ! […] J’aime à traverser des abîmes, à franchir des précipices, à découvrir des lieux où le pied de l’homme n’ait point imprimé sa trace. […] L’absence des objets qu’il voit avec trop d’inquiétude, la nouveauté des lieux, l’air, les promenades champêtres, les conversations douces, tout cela contribue à éclaircir son front, à mettre dans son esprit une certaine modération, qui est peut-être toute notre sagesse humaine… C’est une chose étrange que nous nous forgions à grands frais une sagesse laborieuse qui nous accable, tandis que la véritable est à nos côtés et se rit de nous.

397. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « M. Émile de Girardin. »

On l'a arrêté pour lui fermer la bouche. » M. de Girardin, à qui l'on a quelquefois reproché de l’orgueil, eut tout lieu vraiment d’en concevoir en cette circonstance ; on l’avait jugé un homme. […] La réforme accomplie dans de pareils termes eût ôté lieu et prétexte à toute révolution. […] Ce nouvel état social, fût-il uniforme dans sa simplicité d’organisation, aurait donc, selon les lieux et les peuples, une physionomie autre et des destinées fort différentes ; il aurait, lui aussi, ses orages, ses luttes, ses accidents imprévus, peut-être ses catastrophes, résultat des passions et du peu de sagesse humaine.

398. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Le château d’Usson avait été fortifié par Louis XI, qui se connaissait en précautions et qui en avait voulu faire un lieu de sûreté pour y loger des prisonniers. […] Elle aimait avant tout ces sphères d’enchantement, ces îles Fortunées, mi-parties d’Uranie et de Calypso, et elle chercha à les retrouver, à les reproduire dans tous les lieux et sous toutes les formes, soit à sa cour de Nérac, soit dans les rochers d’Usson, soit même finalement dans ce beau jardin le long de la Seine où est aujourd’hui la rue des Petits-Augustins, et où elle tâchait de tromper la vieillesse. […] Marguerite, devenue de reine aventurière, changea plusieurs fois de lieu, jusqu’à ce qu’elle trouvât dans le château d’Usson cet asile dont j’ai parlé et où elle ne demeura pas moins de dix-huit ans (1587-1605).

399. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

Les Contes lui seraient aisément venus dans ce lieu-là, non pas les Fables ; les belles fables de La Fontaine, très probablement, ne seraient jamais écloses dans les jardins de Vaux et au milieu de ces molles délices : il fallut, pour qu’elles pussent naître avec toute leur morale agréable et forte, que le bonhomme eût senti élever son génie dans la compagnie de Boileau, de Racine, de Molière, et que, sans se laisser éblouir par Louis XIV, il eût pourtant subi insensiblement l’ascendant glorieux de cette grandeur. […] Son tableau lui échappe pour ainsi dire, et nous saute aux yeux ; et, dès les quatre premiers vers, il nous a fait tout voir. — Je laisse à chacun de poursuivre la comparaison, et de conclure, s’il y a lieu. […] [NdA] Pour clore ce VIIe volume des Causeries selon la division que j’ai adoptée dans les volumes précédents, je devrais y faire entrer encore un article appartenant au semestre ; mais cet article étant le premier des trois que j’ai faits sur Bernis, j’ai dû le réserver pour le VIIIe volume ; et je donnerai ici, pour en tenir lieu, quelques pages sur La Fontaine dans lesquelles j’ai examiné une opinion singulière de M. de Lamartine.

400. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Jules Simon : « La loi que je sollicite aurait donc ce double objet : « 1° D’approuver la proposition faite par l’archevêque de Paris d’ériger sur la colline de Montmartre en un point déterminé après une enquête, un temple destiné à appeler sur la France la protection et la bonté divines ;‌ « 2° D’autoriser l’archevêque à acquérir, tant en son nom qu’au nom de ses successeurs, les « terrains nécessaires, à l’amiable et, s’il y a lieu, par voie d’expropriation, après déclaration d’utilité publique, à la charge par lui de payer le prix d’acquisition des terrains et les frais de construction de l’édifice, avec les ressources mises ou à mettre à sa disposition par la piété des fidèles. »‌ Il est inutile, je pense, de faire remarquer la profonde habileté et la prudence d’expression de cette requête, qui cache, sous son apparente modestie, le piège où allait se prendre l’Assemblée nationale. […] « Art. 3. — L’archevêque de Paris, tant en son nom qu’au nom de ses successeurs, est substitué aux droits et obligations de l’administration, conformément à l’article 83 de la loi du 3 mai 1841, et autorisé à acquérir le terrain nécessaire à la construction de l’église et à ses dépendances, soit à l’amiable, soit, s’il y a lieu, par la voix de l’expropriation. […] Celui qui a compris ce que signifie Westminster s’incline, saisi de la profonde majesté de ce lieu.

401. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « [Avertissement de l'auteur] » p. 1

Cela tient lieu d’une de ces invocations ou libations qu’on aurait faites dans l’antiquité à la pure source des grâces.

402. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Cousin a donc enlevé et conquis en plein soleil Mme de Longueville, et il ne s’est pas tenu à ce coup de maître, il a poussé plus loin sans se croire le moins du monde infidèle : il en a affiché bien d’autres, et, en dernier lieu, on a revu, grâce à lui, par les chemins, galopant par monts et par vaux, cette autre brouillonne adorable en son temps, Mme de Chevreuse. […] Guizot, dans un intervalle de ses mâles et fermes histoires, s’est dit qu’il y avait lieu d’intéresser sans tant d’aventures et de beaux crimes : il a retracé et buriné à la manière hollandaise la figure de lady Russell, ce modèle des grandes veuves, de celles qui restent fidèles à un noble sang généreusement versé et à une vieille cause. […] Petit-fils de ce duc de Nevers dont j’ai parlé, et qui, au milieu de toutes sortes de rimes à l’aventure, a fait un bien joli vers, daté de Rome : Sans un peu de Coulange on mourrait en ces lieux, il était fils d’un autre duc de Nevers, qui fut longtemps sans avoir le droit de s’appeler de ce nom ; car, dans leur insouciance épicurienne, ces distraits et excentriques seigneurs avaient omis, en temps utile, de faire enregistrer leur titre au parlement ; ils n’aimaient ni la guerre ni la Cour, et ne suivaient que leur caprice, la paresse et le plaisir. […] Il est prouvé par l’expérience que ces gens-ci ne font rien par reconnaissance et par inclination, et il est même peut-être vrai de dire qu’ils ne le doivent pas ; car, leur intérêt étant de faire le moins qu’ils peuvent, puisqu’ils ne font rien qu’à leur détriment, leur système doit être de ne faire jamais que le plus pressé : or, ce qui presse le plus, c’est la crainte ; et en effet, c’est là le vrai mobile de tous les ressorts de cette cour-ci : or la hauteur, quand elle n’est pas trop excessive, inspire une espèce de crainte, au lieu que trop de politesse et d’égards courent risque d’être pris ici pour de la timidité et de la faiblesse. […] La négociation est trop fatigante ici pour moi : Il faut négocier avec vingt personnes également accréditées ou également à craindre ; il faut courir après eux en toute sorte de lieux et à toute sorte d’heures ; il faut recevoir et combiner une immensité de rapports et de relations ; il faut passser quatre heures à table ; enfin, il faut tout ce que je n’ai pas.

403. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIe Entretien. Marie Stuart, (Reine d’Écosse). (Suite et fin.) »

Il semble qu’elle connaissait le lieu où, une fois débarquée, elle se serait réfugiée, car on voyait et l’on voit encore rôder dans un petit village nommé Kinross, près des bords du loch, George Douglas, avec deux serviteurs de Marie, jadis très-dévoués et paraissant l’être toujours. » George Douglas, le plus jeune des fils de cette maison, était en effet éperdument épris de la captive ; le fanatisme de la beauté, de la pitié, du rang, le dévouait à tous les hasards, pour lui rendre la liberté et le trône. […] Elle décrit en termes pathétiques, à l’envoyé de Charles IX à Londres, les disgrâces de son avant-dernière prison : « Elle n’est que de vieille charpenterie, écrit-elle, entr’ouverte de demy pied en demy pied, de sorte que le vent entre de tous costez en ma chambre, je ne sais comme il sera en ma puissance d’y conserver si peu de santé que j’ay recouverte ; et mon médecin, qui en ha esté en extresme peine durant ma diette, m’ha protesté qu’il se déchargeroit tout à fait de ma curation, s’il ne m’est pourveu de meilleur logis, luy mesme me veillant durant ma dite diette, ayant expérimenté la froydure incroyable qu’il faisoit la nuit en ma chambre, nonobstant les estuves et feu continuel qu’il y avoit et la chaleur de la saison de l’année ; je vous laisse à juger quel il y fera au milieu de l’hyver, cette maison assise sur une montagne au milieu d’une plaine de dix milles à l’entour, estant exposée à tous ventz et injures du ciel… Je vous prye luy faire requeste en mon nom (à la reine Élisabeth), l’asseurant qu’il y a cent païsans en ce meschant villaige, au pied de ce chasteau, mieuz logez que moy, n’ayant pour tout logis que deux méchantes petites chambres… De sorte que je n’ay lieu quelconque pour me retirer à part, comme je peux en avoir diverses occasions, ni de me promener à couvert : et pour vous dire, je n’ay esté oncques si mal commodée en Angleterre... » Les serviteurs écossais et les compagnes de sa fuite et de sa captivité succombaient un à un à cette longue agonie des prisons. […] Marie demanda pour toute grâce de n’être point suppliciée dans quelque lieu caché ; mais devant ses domestiques et devant le peuple, afin qu’on ne lui attribuât pas une lâcheté indigne de son rang, et que tout le monde pût rendre témoignage de sa constance à souffrir le martyre ; c’est ainsi qu’elle appelait déjà elle-même son supplice, consolation bien naturelle dans une reine qui voulait imputer sa mort à sa foi plutôt qu’à ses fautes. […] Je vous recommande ceste personne, pour sa simple sincerité et honnesteté, à ce qu’elle puisse estre placée en quelque bon lieu. […] Vous êtes brave comme le meilleur de mes hommes d’armes ; et si les femmes se battaient comme aux temps anciens, j’estime que vous sauriez bien mourir. » — Il me reste à montrer, reprit-elle, à mes amis et à mes ennemis, de quel lieu je sors. » « Elle avait demandé son aumônier Préau ; on lui envoya deux ministres protestants

404. (1880) Les deux masques. Première série. I, Les antiques. Eschyle : tragédie-comédie. « Chapitre II, grandeur et décadence de Bacchus. »

La multitude des lieux de naissance qu’on lui attribue équivaut à l’ubiquité. […] Avec la dévorante faculté d’assimilation qu’il possède, il a bientôt absorbé l’antique monarque du lieu. […] Adonis entra de bonne heure dans l’Hellade ; le génie du lieu orna et embellit sa légende. […] Aux hurlements enragés des Extatiques de Syrie, succèdent des élégies mélodieuses ; la plainte du rossignol et le chant du Cygne, au lieu du miaulement des panthères flairant leur mâle abattu par le javelot du chasseur. […] Mêmes rondes dévergondées et furieuses : seulement, au lieu des grandes danses antiques, belles encore dans leur frénésie, c’est une saltation baroque et cynique, où les danseurs et les danseuses tournent dos à dos, sans se voir, et un bras en l’air.

405. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 97

Tout le monde sait par cœur des morceaux du Ballet d’Eglé & de l’Opéra de Sylvie, dont les vers sont si naturels & si harmonieux, qu’ils font, pour ainsi dire, valoir la Musique, quoiqu’excellente par elle-même, au lieu que, pour tant d’autres, c’est la Musique qui fait supporter les Vers.

406. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — B — article » p. 192

que l’on seroit heureux « Dans ce beau lieu digne d’envie, « Si, toujours aimé de Silvie, « L’on pouvoit, toujours amoureux, « Avec elle passer sa vie !

407. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » p. 138

Ce projet étoit louable, mais il auroit dû être bien rempli ; au lieu que l’Ouvrage de M.

408. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 2-3

L’Auteur le composa, dit-on, sur les lieux.

409. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

À son retour de Russie, Horace Vernet se mit avec un redoublement d’ardeur et, on peut dire, d’acharnement, à ses grands travaux de Versailles ; pour être moins éloigné du lieu auquel ses tableaux étaient destinés et devaient s’approprier, il s’était installé à Versailles même, dont il devint non pas l’hôte, mais l’habitant. […] … Les médecins vous ont dit de quitter, aussitôt que la convalescence d’Horace30 le permettrait, les lieux dont l’insalubrité a rappelé la maladie dont il a tant souffert. […] On a lu le récit de ses impressions naïves à la vue de Bethléem et des lieux saints. […] Pas trop de poètes on de peintres métaphysiques, je t’en conjure ; pas trop de messieurs de l’Empyrée, ni d’abstracteurs de quintessence : deux ou trois, par génération, suffisent ; mets-les à part et en haut lieu pour la rareté et pour la montre, garde-les pour tes grands dimanches ; mais, les jours ouvrables, sois heureuse encore et contente de retrouver de tes favoris et de tes semblables, de ces talents ou de ces génies faciles, qui, de tout temps, t’ont défrayée et charmée, qui te parlent ton langage et t’y entretiennent, qui te font passer tes plus agréables heures, et non pas les moins salutaires, en t’offrant à toi-même en spectacle sous tes mille aspects vivants, avec tes qualités et défauts divers : crânerie, héroïsme, gaieté, sentiment, humeur légère, audace brillante, coup d’œil net et bon sens pratique37.

410. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre IV. Chateaubriand »

Les Études et les Harmonies de la nature n’étaient que puériles, au lieu que le Génie du Christianisme est puissant. […] Il les sentait avant de les penser, au lieu que Mme de Staël pensait plus qu’elle ne sentait. […] L’Itinéraire appartient aux Martyrs : ce sont les notes du voyage entrepris par Chateaubriand pour se suggérer la vision précise des lieux où se passait l’action de son poème. […] Et ses héroïnes, ses amoureuses, Géluta, Mila, Atala, Cymodocée, les indiennes et la grecque sont de jolies statuettes d’albâtre, dont l’élégance molle écœure vite : Chateaubriand ne connaît pas la femme ; il nous présente toujours des variantes du même type irréel ; toujours il a logé son fantôme d’amour 657 vague et insubstantiel, dans des corps charmants, entrevus un jour par lui en quelque lieu des deux mondes, et qui ont caressé ses yeux ou fait rêver son âme, sans qu’il ait jamais su ou daigné pénétrer la personnalité réelle qui s’y enveloppait.

411. (1913) Le bovarysme « Première partie : Pathologie du bovarysme — Chapitre V. Le Bovarysme des collectivités : sa forme idéologique »

Il est évident, d’autre part, qu’ils ont un avantage décidé à propager cette indifférence, à nier entre les bonnes les distinctions ethniques, celles qui proviennent du long habitat en commun dans un même lieu de l’espace, d’une même tradition historique et morale, d’une commune nécessité de réagir contre un ensemble déterminé de circonstances selon des modes appropriés. […] À désigner d’une façon plus précise et plus concrète le groupe particulier pour lequel cette idée, générale est, en tout temps et en tout lieu, une altitude utile, en antagonisme avec l’attitude d’utilité spéciale à tout groupe national, on est amené, d’un point de vue d’observation positive, à nommer le peuple juif, nouveau-venu dans tous les pays du monde. […] Or cette vue du philosophe paraît bien profonde si l’on considère que le juif, dont le lien national est purement ethnique et religieux et n’est fixé autour d’aucun lieu de l’espace, a tout à gagner et rien à perdre avec une doctrine qui fait de tous les hommes, des citoyens de l’univers égaux entre eux, et, des nationalités diverses, des faits d’une importance secondaire ou périmée. […] Leur agnation n’était autre chose que la parenté primitive telle que la fixait le culte au lieu du sang.

412. (1913) La Fontaine « II. Son caractère. »

Dans le même livre (les Amours de Psyché), il s’est dépeint lui-même de la façon suivante ; et l’on y trouvera, avec moins de beauté de forme, exactement les mêmes traits : « Acante ne manqua pas, selon sa coutume, de proposer une promenade en quelque lieu hors de la ville, qui fût éloigné, et où peu de gens entrassent. […] Solitude, où je trouve une douceur secrète, Lieux que j’aimai toujours, ne pourrai-je jamais Loin du monde et du bruit goûter l’ombre et le frais ? […] Tenez-vous lieu de tout, comptez pour rien le reste. […] Je n’aurais pas alors Contre le Louvre et ses trésors, Contre le firmament et sa voûte céleste Changé les bois, changé les lieux Honorés par les pas, éclairés par les yeux De l’aimable et jeune bergère Pour qui, sous le fils de Cythère, Je servais engagé par mes premiers serments.

413. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — R. — article » p. 70

si ses discours, craints du chaste Lecteur, Ne se sentoient des lieux que fréquentoit l'Auteur, Et si, du son hardi de ses rimes cyniques, Il n'allarmoit souvent les oreilles pudiques.

414. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — V. — article » p. 399

Puisqu'il s'étoit proposé de donner, dans cet Abrégé, la substance de sa grande Histoire, il auroit dû avoir plus d'attention à n'y faire entrer que les événements principaux, en les réduisant à une juste étendue ; au lieu que, s'étant laissé aller à l'envie de ne rien omettre, les faits y sont accumulés, & ne forment qu'une énumération qui rend cet Abrégé assez semblable à une Table des Matieres.

415. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « George Sand — George Sand, Valentine (1832) »

Tous les détails de cette soirée, la présentation de Bénédict aux orgueilleux parents de Valentine, l’invitation à la danse, l’embarras du baiser, l’aisance de bel air de M. de Lansac, fiancé de Valentine, tout cela est délicieusement conduit ; et le départ ensuite, le retour, la manière dont Valentine s’égare, la rencontre des deux jeunes gens près des buissons fleuris de l’Indre ; cette voix limpide et nerveuse de Bénédict, qui le précède et l’annonce, et dont Valentine a de loin admiré le chant ; cette arrivée à la ferme par les jardins de derrière et à travers les haies, leurs deux haleines se confondant au passage dans les fleurs ; cette visite nocturne de Valentine à Louise, à sa sœur aînée, si longtemps perdue, si merveilleusement retrouvée, et qu’une faute amère, déjà bien ancienne, avait bannie d’un lieu qu’elle a voulu revoir ; — oui, tout, jusqu’à cette façon naturelle et rusée d’éconduire M. de Lansac, tout, dans cette première partie du récit, captive, enchante et satisfait. […] Dans ces doux lieux, le long de ces jours si simplement remplis, on partage l’ivresse et le gonflement de cœur du jeune homme entouré et aimé de trois femmes (car la pauvre Louise l’aime aussi), de trois femmes dont une seule suffirait à un moindre orgueil.

416. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXII. Machinations des ennemis de Jésus. »

Le portique de Salomon, avec ses allées couvertes, était le lieu où il se promenait habituellement 999. […] Josèphe en parle avec la même admiration que de la Galilée, et l’appelle comme cette dernière province un « pays divin 1010. » Jésus, après avoir accompli cette espèce de pèlerinage aux lieux de sa première activité prophétique, revint à son séjour chéri de Béthanie, où se passa un fait singulier qui semble avoir eu sur la fin de sa vie des conséquences décisives 1011.

417. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — La synthèse »

Il faut pour entreprendre la restitution d’un de ces grands êtres intellectuels qui sont, dans l’ordre de la pensée et de la sensibilité pures, comme les initiateurs d’une espèce morale, qui concentrent et qui exaltent en eux toute l’émotion et la réflexion excitée dans la foule mêlée de leurs admirateurs, remonter des parties éparses de son esprit à leur enchevêtrement et leur engrenage dans le tout, replacer cet esprit ainsi particularisé dans chacune de ces facultés et dans leur association, en un corps dont il sera nécessaire de connaître les représentations graphiques et dont les habitudes ressortiront des témoignages des contemporains : ce corps même et cet esprit, il faudra le prendre dans ses origines, la famille, la race, la nation, — dans son milieu premier, le lieu de naissance et d’enfance, le climat, le paysage, le sol : il faudra le suivre dans son développement et ses relations, de son enfance à sa jeunesse, de ses amitiés à ses liaisons, de ses lectures à ses actes, tracer le cours de ses productions, connaître les joies et les amertumes de sa vie, le conduire enfin à ce déclin et ce décès qui si rarement, pour les grands artistes, sont glorieux, ou fortunés ou paisibles. […] Les contemporains, les auteurs de mémoires, les comiques et les moralistes du temps, les représentations graphiques, des tableaux aux caricatures, les mille faits épars de la vie de tous les jours, la reconstitution architecturale et géographique des lieux, des monuments et des villes, tous les départements de la vie publique, de la politique à la théologie, seront mis à contribution, fouillés en quête de détails typiques et significatifs ; ces notions sur le vêtement, la demeure, le séjour, sur les habitudes intimes et sociales, sur le type ethnique, sur les relations célestes et humaines, sur toute la vie en somme du groupe formé autour d’une œuvre ou autour d’une famille d’œuvres, groupe qui comprendra tantôt tout ce qui est notable d’une nation, tantôt toute une classe, tantôt enfin un nombre épars d’individus dont il faudra rechercher les points d’union, — seront dégagés, fondus ensemble, ordonnés, et plaqués enfin sur la sorte de squelette psychologique que l’on aura obtenu antérieurement par l’ordre de recherches que nous avons exposé au précèdent chapitré.

418. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 22, que le public juge bien des poëmes et des tableaux en general. Du sentiment que nous avons pour connoître le mérite de ces ouvrages » pp. 323-340

Le lecteur en faisant attention aux temps, aux lieux, comme à la nature de l’ouvrage dont il sera particulierement question, comprendra beaucoup mieux encore que je ne pourrois l’expliquer, à quel étage d’esprit, à quel point de lumieres et à quelle condition le public dont je voudrai parler sera restraint. […] Le mot de public est encore ou plus resserré ou plus étendu, suivant les temps et suivant les lieux dont on parle.

419. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » pp. 373-374

Bien loin de là, chacun s’est empressé d’y fournir, en différens temps & en différens lieux, son contingent, & s’est arrogé le droit de célébrer, selon ses vûes & sa maniere, tout ce qui appartenoit à sa Nation, à sa Secte, ou à son Parti.

420. (1879) À propos de « l’Assommoir »

Zola visite les lieux où son action doit se passer. […] Vous laissez naître ce ferment, il remonte et vous désorganise ensuite. » C’est seulement lorsque les documents ont été soigneusement dépouillés, les notes classées etétudiées, lorsqu’il a visité les lieux et a suivises types, que M.  […] Le premier tableau  le plus naturaliste de tous  fut bien accueilli ; au lieu des sifflets que l’on attendait, les applaudissements éclatèrent de tous les côtés, et la soirée fut un triomphe. […] Il s’agit de découper en quelques tableaux une œuvre traitée sans considérations d’espace ; d’amener, dans un même acte, des personnages qui semblent n’avoir aucune raison de se trouver dans les mêmes lieux ; de condenser en quelques heures une action qui met souvent des années à se développer ; de faire ressortir, par l’action seulement, une foule de faits, de détails que le romancier peut mettre en relief par la description. […] Mais, de même qu’au lieu du mal poétique et du vice doré il peint le mal tel qu’il est et le vice hideux, au lieu du bien factice, il dépeint la vertu vraie, le bien réel.

421. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Philosophie et religion, elle s’est diversifiée selon les temps et les lieux. […] De fait, le yoga semble avoir été, selon les temps et les lieux, une forme plus populaire de la contemplation mystique ou un ensemble qui l’englobait. […] Enfin il y aurait lieu d’hésiter encore, si l’on croyait que l’univers est essentiellement matière brute, et que la vie s’est surajoutée à la matière. […] L’impulsion originelle a donc donné des progrès évolutifs divergents, an lieu de se maintenir indivisée jusqu’au bout. […] Si la surface de notre très petit corps organisé (organisé précisément en vue de l’action immédiate) est le lieu de nos mouvements actuels, notre très grand corps inorganique est le lieu de nos actions éventuelles et théoriquement possibles : les centres perceptifs du cerveau étant les éclaireurs et les préparateurs de ces actions éventuelles et en dessinant intérieurement le plan, tout se passe comme si nos perceptions extérieures étaient construites par notre cerveau et projetées par lui dans l’espace.

422. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leclercq, Paul (1872-1956) »

Paul Leclercq : La Vieille à l’Araignée, comme il convenait, n’est pas du tout dans le style des autres contes ; au lieu des images somptueuses et vagues, arbres en fleurs, joyaux de lumières, eaux transparentes et mobiles, on distinguerait un effort vers le trait précis, presque dur, de M. 

423. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — C — article » pp. 461-462

Il seroit à souhaiter qu’on n’eût pas été si exact à exécuter ses intentions : on auroit dû se souvenir que M. de Caylus étoit Chrétien, & rendre ce monument plus conforme à la dignité du lieu & de la Religion.

424. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — F. — article » p. 333

L’Epitaphe dont il honora le tombeau de la belle Laure, en passant à Avignon, fait honneur à sa Muse : En petit lieu compris, vous pouvez voir Ce qui comprend beaucoup par renommée, Plume, labeur, la langue & le devoir, Furent vaincus par l’Amant de l’aimée.

425. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » pp. 482-483

Dans ces temps encore barbares, les Auteurs & les Spectateurs étoient également peu difficiles ; on n’étoit nullement étonné de voir le début d’une Piece s’annoncer dans un lieu, & le dénouement arriver dans un autre vingt ans après.

426. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des romans — Préfaces de « Bug-Jargal » (1826-1832) — Préface de 1832 »

Il demande pardon à ses lecteurs de les entretenir de détails si peu importants ; mais il a cru que le petit nombre de personnes qui aiment à classer par rang de taille et par ordre de naissance les œuvres d’un poëte, si obscur qu’il soit, ne lui sauraient pas mauvais gré de leur donner l’âge de Bug-Jargal ; et, quant à lui, comme ces voyageurs qui se retournent au milieu de leur chemin et cherchent à découvrir encore dans les plis brumeux de l’horizon le lieu d’où ils sont partis, il a voulu donner ici un souvenir à cette époque de sérénité, d’audace et de confiance, où il abordait de front un si immense sujet, la révolte des noirs de Saint-Domingue en 1791, lutte de géants, trois mondes intéressés dans la question, l’Europe et l’Afrique pour combattants, l’Amérique pour champ de bataille.

427. (1824) Ébauches d’une poétique dramatique « Conduite de l’action dramatique. » pp. 110-232

On ne traite d’ordinaire que de trois unités, de temps, de lieu et d’action : or, j’en ajouterai une quatrième, sans laquelle les trois autres sont inutiles, et qui toute seule pourrait encore produire un grand effet : c’est l’unité d’intérêt, qui est la vraie source de l’émotion continue ; au lieu que les trois autres conditions, exactement remplies, ne sauveraient pas un ouvrage de la langueur. […] Il semblait qu’un spectacle si doux N’attendait en ces lieux d’autre témoin que vous. […] De ces lieux cependant éloignez-vous tous deux : De mes transports jaloux mon sang doit se défendre ; Fuyez, n’exposez plus un père à le répandre. […] Dans Armide, le don de plaire est un prestige ; dans Renaud, l’amour est un enchantement : les plaisirs qui les environnent, les lieux même qu’ils habitent, ce qu’on y voit, ce qu’on y entend, la volupté qu’on y respire, tout n’est qu’illusion, et c’est le plus charmant des songes. […] Il s’affranchit des lois rigoureuses de la tragédie ; et s’il a quelque égard à l’unité d’intérêt et d’action, il viole sans scrupule les unités de temps et de lieu, les sacrifiant aux charmes de la variété et du merveilleux.

428. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

J’ai déjà touché ceux qui en résultent par rapport aux mœurs ; mais je veux parler ici d’un autre qui n’est que trop commun, surtout dans les lieux où on élève beaucoup de jeune noblesse : on leur parle à chaque instant de leur naissance et de leur grandeur, et par là on leur inspire, sans le vouloir, des sentiments d’orgueil à l’égard des autres. […] Il faudrait, dans le mot temps, un accent particulier au lieu de l’s ; dans le mot tend, un autre accent particulier au lieu du d ; dans le mot tant, un autre accent particulier au lieu du t, etc. : il faudrait savoir que le premier accent indique une s, et se prononce comme un z ; que le second indique un d, et se prononce comme un t ; que le troisième indique un t et se prononce de même, etc. […] Les enfants, dira-t-on peut-être, y seront plus embarrassés, au lieu qu’ils démêleront dans plusieurs significations jointes à un même mot, celle qu’ils doivent choisir. […] La manière la plus naturelle et la plus sûre d’arriver à un objet, c’est d’y aller par le plus court chemin, pourvu qu’on y aille en marchant, et non pas en sautant d’un lieu à un autre. […] Érudit se prend aussi substantivement ; on dit par ellipse, un érudit pour un homme érudit : l’ellipse a toujours lieu dans les adjectifs pris substantivement.

429. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

Cet abbé de Cheminon lui donne l’écharpe et le bourdon, et le voilà parti en pèlerin, pieds nus et en chemise, faisant visite à tous les saints lieux d’alentour, sans plus devoir rentrer à son château jusqu’à ce qu’il revienne de Palestine ; et en passant d’un de ces lieux des environs à l’autre, « pendant que j’allais, dit-il, à Blécourt et à Saint-Urbain, je ne voulus jamais retourner mes yeux vers Joinville, pour que le cœur ne m’attendrît pas trop, du beau château que je laissais et de mes deux enfants ». […] « Circé, est-il dit d’Ulysse dans Homère, retient ce héros malheureux et gémissant, et sans cesse par de douces et trompeuses paroles elle le flatte, pour lui faire oublier Ithaque : mais Ulysse, dont l’unique désir est au moins de voir la fumée s’élever de sa terre natale, voudrait mourir. » — Citant ce passage de Joinville, qui m’a rappelé celui d’Homère, Chateaubriand, au début de son Itinéraire de Paris à Jérusalem, où il a la prétention d’aller en pèlerin aussi et presque comme le dernier des croisés, tandis qu’il n’y va que comme le premier des touristes, a dit : « En quittant de nouveau ma patrie, le 13 juillet 1806, je ne craignis point de tourner la tête, comme le sénéchal de Champagne : presque étranger dans mon pays, je n’abandonnais après moi ni château, ni chaumière. » Ici l’illustre auteur avec son raisonnement me touche moins qu’il ne voudrait : il est bien vrai que, de posséder ou château ou simple maison et chaumière, cela dispose, au départ, à pleurer : mais, même en ne possédant rien sur la terre natale, il est des lieux dont la vue touche et pénètre au moment où l’on s’en sépare et dans le regard d’adieu.

430. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Daru unissait, quand il y avait lieu (et alors il y avait lieu toujours), l’administration des pays conquis, laquelle s’accroissait aussi d’année en année. […] … Nos déjeuners sont souvent interrompus, mais ils n’ont jamais lieu sans qu’on boive à la santé de Petrus Horatius Daru.

431. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

René d’Argenson ; en un mot, qu’il y a lieu, en revenant à la source, de se faire une idée non pas autre, mais plus particulière, plus singulière même, et plus caractéristique, de cet homme de bien original. […] Je fréquentais les spectacles, les assemblées, les femmes ; je faisais des connaissances ; j’allais au cabaret et autres lieux quand j’étais avec des gens du monde ; je me figurais être si bien dans le monde ! […] Le nom et la mémoire de son père lui servent beaucoup en tout lieu, et il le reconnaît.

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