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1013. (1888) Petit glossaire pour servir à l’intelligence des auteurs décadents et symbolistes « Petit glossaire »

— Jeune agneau. […] Les cloches, leur battant des mains S’étourdissent en jeunes gammes Hymniclames ! […] Aux passés les jeunes désirs mantelés de paroles au vent. […] De nerveuses douleurs ondèrent dans la poitrine de la jeune femme. […] Le jeune ami du marié qui va chercher la mariée ; et la jeune amie de la mariée qui va chez le mari.

1014. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome I

Il est rare qu’un artiste tout jeune en ait la divination. […] Ce qui se démodait au regard des jeunes habitués du perron de Tortoni — aujourd’hui démoli — procurait aux jeunes liseurs de Rouen les délices d’une initiation et l’enchantement d’une découverte. […] J’ai eu, tout jeune, un pressentiment complet de la vie. […] Les jeunes générations commencent-elles à les chercher ? […] Presque la même facilité d’habitudes aimables s’offrit aux passions des jeunes officiers du jeune vainqueur de Marengo.

1015. (1905) Études et portraits. Sociologie et littérature. Tome 3.

Les plus jeunes avaient eu leurs dix-huit ans avant 89. […] Un jeune sociologue d’une érudition très avertie, M.  […] J’y vois bien plutôt, avec un autre de mes jeunes amis inconnus, M.  […] Un recul pareil qu’un de nos jeunes confrères, M.  […] Elle n’est plus jeune.

1016. (1882) Types littéraires et fantaisies esthétiques pp. 3-340

Mon interlocuteur, un jeune puritain d’humeur tendre et de conscience scrupuleuse, était un ennemi déclaré de cet art enivrant et irrésistible. […] Il est blond comme un enfant du Nord ; son visage, jeune, cela va sans dire, est cependant prématurément fatigué, noble plutôt que beau. […] Il est jeune, noble, bien doué, et il lui est défendu de vivre. […] Qu’est-ce au fond que leur histoire, sinon l’histoire très ordinaire d’une jeune bourgeoise qui se désole d’être obligée d’être vertueuse et d’un jeune bourgeois qui se désespère de ne pouvoir être coupable ? […] Cette jeune Thérèse est née ménagère, cette jeune comtesse Nathalie est née sœur de charité.

1017. (1894) La bataille littéraire. Sixième série (1891-1892) pp. 1-368

C’est qu’ils étaient restés jeunes ; c’étaient encore les yeux de ma maîtresse, de la toute jeune femme qui autrefois m’attirait sur ses genoux pour me caresser. […] Il n’ose peut-être pas en langage connu appeler l’œil du Très-Haut sur la pâture des jeunes prisonniers […] Peut-être les jeunes mariées qui se sentent chancelantes en pourraient-elles tirer profit et s’y trouver un remède préventif ; mais tout est, hélas ! […] Si encore cette gambade péniblement exécutée, et dont leur conscience n’est pas dupe, les faisait passer pour jeunes aux yeux des autres ! […] Lisez là-dessus, pour vous édifier, la plupart des jeunes revues littéraires : elles suent le pédantisme le plus âcre et la plus sotte intolérance.

1018. (1924) Critiques et romanciers

Et le jeune Dupont gardait de son enfance une ferveur assez mystique. […] S’il vient de lire Mensonges, de son jeune ami M.  […] Ses camarades sont de jeunes hobereaux cruels et bêtes. […] Ce jeune corbeau, Tiécelin l’aimait, comme son élève. […] Ko vous le disant ou bien, si vous n’êtes pas jeune, en vous le rappelant, M. 

1019. (1896) Hokousaï. L’art japonais au XVIIIe siècle pp. 5-298

Hokousaï eut trois filles, dont la plus jeune devint un peintre très habile. […] Arrive pour le jeune riche et le jeune pauvre, à quinze ans, le guén boukou, la majorité, l’entrée dans la vie de l’homme, indiquée là-bas par le rasement du front et qui, chez le riche, est fait par un grand personnage, chez le pauvre par sa mère. […] Une jolie planche, dans ces colorations délavées des impressions de ce temps, est une planche où se voient deux jeunes Japonaises jouant avec une souris blanche. […] Sur un bateau, de jeunes garçons de la noblesse cueillant des pousses de lotus : un mets dont les Japonais sont très friands. […] Jeune femme portant une lanterne.

1020. (1911) Visages d’hier et d’aujourd’hui

Une jeune femme se tue ; et l’on trouve, près du cadavre, les œuvres du dramaturge. […] Le jeune Virgile, tandis qu’il était à Mantoue, ignorait probablement la nature. […] Les jeunes revues, il y a quelques années, le traduisaient volontiers. […] Il gouvernait ses jeunes érudits avec une autorité douce, une bienveillance attentive, un soin paternel et magistral. […] Avec une heureuse liberté, il arrange agréablement les robes de ses jeunes femmes, afin que plis et nuances fassent une harmonie.

1021. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — I » pp. 248-262

Les facultés merveilleuses qu’il avait reçues et qui se faisaient aussitôt reconnaître s’accoutumèrent sans aucun effort à trouver leur forme favorite et leur satisfaction dans les exercices graves qui remplissaient la vie d’un jeune ecclésiastique et d’un jeune docteur, thèses, controverses, prédications, conférences ; il y mettait tout le sens et toute la doctrine, il y trouvait toute sa fleur. […] Pénétré de la vérité et de la divinité de l’Écriture, Bossuet la lisait, la méditait sans relâche, et y versait, en l’interprétant toutes les richesses de sa jeune imagination et de son cœur.

1022. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Parny poète élégiaque. » pp. 285-300

Il y connut la jeune créole qu’il a célébrée sous le nom d’Éléonore ; il commença par lui donner des leçons de musique ; mais le professeur amateur devint vite autre chose pour son Héloïse ; les obstacles ne s’aperçurent que trop tard, après la faute, après l’imprudence commise ; l’heure de la séparation sonna ; il y eut ensuite un retour, suivi bientôt de refroidissement, d’inconstance. […] Mais le Ciel avait au trépas Condamné ses jeunes appas. […] — « Mais qu’est-ce que cela, me dit un jeune enthousiaste, auprès du Premier Regret de Lamartine, auprès de la jeune fille de Victor Hugo (les Fantômes) ? 

1023. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

Cependant ces doutes naissants laissaient jour encore à bien des modes d’explication, et le jeune sulpicien en voie de transition se trouvait, j’imagine, dans une de ces phases de philosophie chrétienne, à l’une de ces stations intermédiaires que Malebranche, qu’il lisait alors, avait connues, et où le grand oratorien avait su en son temps s’arrêter comme à mi-côte, y dressant ses tentes légères et ses magnifiques pavillons. […] Renan, en passant du dogme à la science, offre avec Lamennais le plus notable contraste : c’est un Lamennais jeune, graduel, éclairé à temps, et sans ouragan ni tempête, un Lamennais progressif et non volcanique. […] Le jeune écrivain n’avait rien d’un débutant ; dans la pensée ni dans l’expression, rien n’était laissé au hasard.

1024. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Le père Lacordaire. Quatre moments religieux au XIXe siècle. »

Je viens de lire ses Lettres posthumes, publiées par un de ses amis et disciples, l’abbé Perreyve, qui semble lui avoir emprunté quelque chose de sa parole et de son glaive : il faut voir avec quelle fermeté, avec quelle certitude le panégyriste enflammé lui décerne son titre de saint, lui assigne son rang et son rôle d’apôtre, et le propose pour modèle aux jeunes générations catholiques de l’avenir. […] J’aime ces extraits qui font voyager les pensées d’un auteur là où elles n’iraient jamais autrement, et qui sèment jusque dans les camps opposés le respect, parfois même un peu d’affection pour ceux que l’on combat ; cela civilise les guerres : « Il y a peu d’années, disait le Père Lacordaire, s’adressant à son jeune ami qu’il désigne sous le nom symbolique d’Emmanuel, les Martyrs de M. de Chateaubriand me tombèrent sous la main ; je ne les avais pas lus depuis ma première jeunesse. […] Croyez-vous qu’un jeune incrédule qui vous verrait à cheval serait tenté, le soir, de se mettre à genoux devant vous et de vous découvrir les misères de son cœur ?

1025. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Lorsque, il n’y a pas moins de treize à quatorze ans, au lendemain de la révolution de Juillet, cette Revue comme nça, et qu’elle conçut la pensée de naître, elle dut naturellement s’adresser aux hommes jeunes et déjà en renom, aux écrivains et aux poëtes que lui désignait leur plus ou moins de célébrité. […] Il y a quelques années déjà, cette Revue fut l’objet d’attaques violentes et tout à fait sauvages, parties d’une feuille obscure que rédigeaient de jeunes débutants. […] Mais ici on n’a plus affaire à de jeunes Cyclopes, ce sont des Ajax tout grandis qui ne craignent pas de faire acte de gladiateurs, et devant lesquels il ne fallait pas craindre à son tour de s’exprimer.

1026. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Rodolphe Topffer »

Pour la première fois il renonça à son voyage annuel avec sa jeune bande, et il allait partir pour son cher Cronay272, petit bien de famille appartenant à sa femme, où il se réjouissait de passer les vacances, quand le voile se déchira. […] Comment il s’intéresse au premier aspect à ces deux jeunes personnes étrangères, comment il les remet dans leur chemin qu’elles avaient perdu, comment il les rencontre de temps en temps et se trouve peu à peu et sans le vouloir mêlé à leur destinée : tout cela est raconté avec une simplicité et un détail ingénu qui finit par piquer la curiosité elle-même. […] Le moment où Gertrude lui apprend la grossesse de Rosa et où son premier sentiment, au milieu du surcroît d’anxiété qui lui en revient, est d’aller à la jeune mère et de la bénir, arrache des larmes par sa sublimité simple.

1027. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens II) Henry Fouquier »

Vous avez une bonne douzaine de chroniqueurs, jeunes ou vieux, chez qui vous retrouverez le même échauffement artificiel, le même désir vulgaire d’étonner, la même outrance facile, le même claquement de cravache, au reste le même vide et souvent la même insuffisance de style et, par endroits, de syntaxe. […] Une pervenche intacte fleurit au cœur éternellement jeune de ce Parisien cuirassé d’expérience, durci au feu de la vie de Paris. […] Et je ne vous parlerai pas non plus de son style, souple, ondoyant, nuancé, dont la facilité abondante est pourtant pleine de mots et de traits qui sifflent, tout chaud de la hâte de l’improvisation quotidienne, avec un fond de langue excellente, mais avec des négligences çà et là, des plis de manteau qui traîne, comme celui de quelque jeune Grec, auditeur de Platon.

1028. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre premier. La critique et la vie littéraire » pp. 1-18

Ses lectures l’auront à point dégoûté de la badauderie des intrigues : il est bon de s’être diverti jeune à Ponson du Terrail pour se blaser par la suite aux complications feuilletonnées ; non que l’aventure et le romanesque n’aient leur prix, mais à condition qu’ils soient aventure et romanesque de personnages doués de caractère, d’histoires pourvues d’humanité, — et c’est la différence de Balzac à Gaboriau. […] J’eus là, tout jeune, comme collaborateurs assidus, deux hommes de grand savoir et de tempérament opposé, Édouard Thierry et F.  […] Elle vaut pour réparer une injustice, pour mettre en lumière un mérite jeune ou méconnu.

1029. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Au reste, ce prince n’aimoit pas plus les philosophes & les sçavans que les poëtes : témoin l’exil du célèbre Wolf & le mauvais accueil qu’il fit au jeune Baratier, fils d’un François réfugié, qui lui fut présenté comme un prodige d’érudition. […] Le jeune Baratier y travailla si fort, renonçant à toute autre étude, qu’il soutint sa thèse de droit public au bout de quinze mois : mais il mourut, peu de temps après, de l’excès du travail. […] On se souvient encore, à Touts, d’un sermon qu’il s’avisa d’y prêcher étant jeune prêtre.

1030. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Jules Janin » pp. 137-154

Le Prince de la Critique est toujours quelque peu un Prince Noir, et il n’y avait là que le Prince Rose du style, jeune et frais. […] Ce fut son style qui lui valut et qui lui amena une femme jeune, rose et blonde comme l’Aurore dans des épis d’or, riche de cent mille livres de rente, autres épis d’or ! […] Un jour, comme Hylas, mais il était moins jeune, il s’en alla, l’amphore à la main, puiser à la source d’Horace, et il y tomba avec sa cruche.

1031. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre premier : M. Laromiguière »

Il passait devant la Sorbonne vers 1824, et un jeune étudiant de sa connaissance, qui sortait d’un cours célèbre, l’arrêtait, le prenait par le bouton de la redingote, et lui parlait ainsi : « Bonjour, cher monsieur, comment vous portez-vous ? […] Pourquoi donc mon jeune étudiant les pousse-t-il de force dans des opinions dont ils s’écartent avec horreur ? […] Il me semble que la méthode de réfutation qu’emploie mon jeune ami n’est qu’une machine de guerre.

1032. (1890) Les princes de la jeune critique pp. -299

Au lieu de glacer les jeunes talents, il faut les stimuler et les soutenir. […] N’aura-t-il pas de conseil à donner aux jeunes qui cherchent et tâtonnent ? […] Vous souvient-il qu’il y a quelques années le mot d’ordre était parmi les jeunes : « Guerre à l’esprit !  […] ce n’est pas lui qui se piquera d’être un « découvreur » de jeunes talents ! […] Bourget parle en jeune prêtre de la psychologie.

1033. (1902) Le critique mort jeune

Peut-être, étant jeune, étais-je trop porté à chercher les idées dans la littérature. […] Jusqu’à quel point ces jugements sommaires ont pu mener les « jeunes » dénombrés jadis par M.  […] Remy de Gourmont, quoiqu’il usât des mêmes procédés littéraires, différait des jeunes écrivains symbolistes qu’il lui est arrivé de couvrir d’éloges. […] Ce jeune écrivain, intelligent, subtil, très lettré, a retrouvé normalement l’accent qui est celui des fidèles lorsqu’ils parlent d’un mauvais prêtre.) […] On voit bien dans l’Étape un fils de banquier et un jeune aristocrate qui répondent à cette condition.

1034. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Joseph de Maistre »

Sa mère l’entendit et l’arrêta : « Ne parlez jamais ainsi, lui dit-elle ; vous comprendrez un jour que c’est un des plus grands malheurs pour la religion. » Cette parole et le ton dont elle fut prononcée lui restèrent toujours présents ; il était de ces jeunes âmes où tout se grave. […] Le temps des purs prophètes et des jeunes Daniels est passé ; c’est à l’école de l’histoire, à celle de l’expérience pratique et présente que se forment les sages et les mieux voyants. […] Dans cette espèce d’épithalame adressé au père et au roi au moment du mariage de son fils Charles-Emmanuel avec Clotilde de France et pour fêter leur voyage en Savoie, le jeune substitut épanche en prose poétique sa fidélité exaltée envers son souverain. […] Les premières pages sont un peu dans l’imitation et le ton de Voltaire faisant l’éloge funèbre des officiers morts pendant la campagne de 1741, dans le ton de Vauvenargues lui-même déplorant la perte de son jeune et si intéressant ami Hippolyte de Seytres. […] Il eût été attentif, m’assure-t-on, à plusieurs des jeunes tentatives ; il l’était toutes les fois qu’il ne voyait pas hostilité décidée.

1035. (1862) Portraits littéraires. Tome II (nouv. éd.) « Delille »

De cette école du presbytère, le jeune Delille fut envoyé à Paris, et vint faire ses études au collège de Lisieux, où on le reçut comme boursier. […] Voltaire reçoit, jeune, des coups de bâton d’un grand seigneur, et il ne reste pas moins ami de la noblesse, du beau monde, et l’opposé en cela de Jean-Jacques. […] Du collège d’Amiens, le jeune professeur fut rappelé comme agrégé à Paris, et nommé pour faire la classe de troisième au collège de La Marche : il y était encore lors de sa réception à l’Académie, en 1774. […] Nommé en 1772 à l’Académie, en même temps que Suard, Delille se vit rejeté ainsi que lui par le roi, sous prétexte qu’il était trop jeune (il avait trente-quatre ans), mais en réalité comme suspect d’encyclopédisme23. […] On relit avec une sorte de surprise, toujours flatteuse, l’épisode du jeune Potaveri, l’apostrophe à Vaucluse, et, sous la forme plus complète dans laquelle le poème fut publié en 1800, la belle invocation aux bois dépouillés de Versailles.

1036. (1929) Dialogues critiques

Pas plus que les louanges qu’ils peuvent distribuer prodigalement à tous les jeunes et vieux confrères qu’ils rencontrent là, sans même les avoir lus. […] Pierre Et que dites-vous de l’amour incestueux pour sa mère, qui contrairement à son père était jeune ? […] Et je vous avoue, j’aime encore mieux ces respectables auteurs que bien des jeunes qui se croient plus avancés. […] D’après le « chapeau » de Marcel Prévost, il paraît que c’est un jeune. […] Paul Hazard a cité dans son discours de la Sorbonne, à la cérémonie du centenaire, le mot d’un vrai jeune de sa connaissance, lequel admire Taine, parce que Taine est direct et fort.

1037. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXe entretien. Œuvres diverses de M. de Marcellus (3e partie) et Adolphe Dumas » pp. 65-144

Qui de vous n’a été témoin de ces bruyantes occupations, de ces repas, de ces jeux après l’ouvrage de nos jeunes femmes occupées du soin de blanchir ? […] « “Des cris de jeunes femmes sont venus jusqu’à moi ; ce sont des nymphes sans doute qui résident sur les hautes cimes des montagnes, aux sources des fleuves et dans les prairies herbeuses et humides. […] « “Ainsi jadis, à Délos, auprès de l’autel d’Apollon, j’ai vu la tige grandissante d’un jeune palmier. […] Cette scène orientale commence cette réminiscence de nos jeunes années et de nos premiers voyages. […] Jules Janin, cet homme qui a autant d’esprit que Voltaire, autant d’érudition littéraire que Fontenelle, autant de bon sens que Boileau, autant de cœur qu’une jeune fille quand elle verse ses premières larmes dans le sein de sa mère sur la mort de son serin…, Jules Janin, ce véritable homme de lettres, en action perpétuelle depuis trente ans, qui a tout vu, tout su, tout retenu, tout raconté, et dont le sentiment est éternellement jeune parce qu’il est sans cesse renouvelé par la verve aimable de ce cœur qui ne s’est jamais racorni sous la mauvaise humeur.

1038. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre sixième »

Le Joueur de Regnard n’est qu’un de ces jeunes étourdis qui jouent par imitation et que l’âge corrige. […] Mais parlez de deux jeunes fiancés qui, pour s’éprouver, se font la cour sous un déguisement, l’un de valet, l’autre de soubrette, tout le monde s’en souvient et nomme les Jeux de l’amour et du hasard. […] Le premier, c’est Diderot, qui a écrit tant de pages sans laisser un livre, et parlé de tant de choses sans rien dire de décisif sur quoi que ce soit ; écrivain auquel on peut d’ailleurs pardonner bien des torts pour le travers, si rare, d’avoir toujours été trop jeune. […] Acheminer le vieux célibataire au mariage sans l’y pousser ; écarter, par de prudentes calomnies, un neveu et sa jeune femme de la maison d’un oncle incapable de haine et très capable de retour ; ménager un intendant complice de ses petits profits, qui veut sa main parce qu’il la sait bien pleine ; poursuivre le maître en paraissant l’attendre, et tenir l’intendant tout à la fois en échec et en espérance : voilà les fins auxquelles la rusée fait servir les qualités comme les vices de sa nature. […] Les autres souffrent, tout est dans l’ordre ; le mal vient-il jusqu’à lui, le monde entier est confondu. » Si le temps a pu tourner en égoïsme l’indifférente sagesse du jeune Philinte, pourquoi n’aurait-il pas changé en générosité active la stérile misanthropie du jeune Alceste ?

1039. (1894) Textes critiques

La Baigneuse de Bonnardsuspend le vol écarté d’un écureuil au cerceau crevé des arbres ; — visage d’un nénuphar de profil jeune et charnel sur un étang cyclope vêtu de vert-tendre. […] Après les ironies presque de guignol de la Peau de castor les assomptions des mortes aux ventouses cristallines des cloches… — Dessous, le squelette des thèses opposant front à front l’ivoire de leur jeu d’échecs ; l’escrime deux à deux ou en mêlée des idées neuves et jeunes encore dont germent les vertes pointes lancéolées. […] De par la différence des cerveaux, un enfant de quinze ans, si l’on le choisit intelligent (car on trouve que la majorité des femmes sont ordinaires, le plus grand nombre des jeunes garçons stupides, avec quelques exceptions supérieures), jouera adéquatement son rôle, exemple le jeune Baron dans la troupe de Molière, et toute cette époque du théâtre anglais (et tout le théâtre antique) où l’on n’aurait jamais osé confier un rôle à une femme. […] Augier, Dumas fils, Labiche, etc., que nous avons eu le malheur de lire, avec un ennui profond, et dont il est vraisemblable que la génération jeune, après les avoir peut-être lus, n’a gardé aucun souvenir. […] Naïfs, ils s’imaginent que ce personnage, fauteur de rhapsodies romantico-hébraïques, adore la jeune littérature.

1040. (1856) Cours familier de littérature. II « VIIe entretien » pp. 5-85

Il est toujours vieux et il est toujours jeune. […] Oui, nos temps, qui nous semblent vieux, sont jeunes. […] Nous avons vu cela quand les empereurs ont précipité Rome de liberté en servitude et de servitude en lâcheté, jusqu’à l’inondation de Rome et de Byzance par les jeunes barbares d’Attila, au lieu des vieux barbares de Marius. […] Ce prince, exilé à Rome par les révolutions de son pays, avait épousé tard la jeune et belle comtesse de Stolberg, fille d’une illustre maison princière de la Belgique allemande. […] Le comte Alfieri avait été touché profondément des infortunes d’une jeune femme négligée et souvent offensée par un époux abruti.

1041. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXe entretien. Dante. Deuxième partie » pp. 81-160

Ils sont dans l’étonnement du plus jeune de ses fils, qui, voyant ce regard et n’en comprenant pas encore la signification, demande à son père : Padre, che hai (qu’as-tu, ô père) ? […] Sur les marches de l’oratoire, une femme jeune et belle encore est agenouillée entre deux petites filles d’âge inégal. […] Derrière la veuve et ses filles, un jeune adolescent de douze à treize ans presse sous son bras gauche une grosse musette des Abruzzes. […] Je m’arrête à quelque distance, sans être aperçu même du chien, attentif à l’instrument de son jeune maître. […] « Il me sembla, dit-il, voir en songe une femme jeune et belle aller et venir dans une lande en cueillant des fleurs et en chantant.

1042. (1857) Causeries du samedi. Deuxième série des Causeries littéraires pp. 1-402

Un jeune homme, lié depuis longues années avec une femme de quarante ans, — on sait la prédilection de M. de Balzac pour des maturités féminines, — épouse une belle et jeune personne de dix-huit. […] » cette naïveté cynique, qu’il met sous la plume d’une de ses héroïnes, écrivant à une amie (Mémoires de deux jeunes mariées), pourrait s’appliquer à lui-même. […] — « De jeunes femmes se trouvaient-elles au comptoir, on avait soin de choisir les écrits les plus propres à corrompre leur imagination : bien plus, ajoute M.  […] Albert de Broglie : livre qui nous a donné, non pas la surprise, mais le plaisir de trouver le jeune et noble écrivain supérieur encore à notre attente et à lui-même. […] Nous avons cité quelques lignes : il eût fallu citer cent pages, car le jeune historien n’avait rien écrit d’aussi grandiose, d’aussi éloquent.

1043. (1883) Essais sur la littérature anglaise pp. 1-364

Lord Herbert fut marié très jeune, et un peu légèrement. […] J’allai aussitôt à lui, et, avec toute la politesse possible, mon chapeau à la main, je lui demandai de me faire l’honneur de rendre à la jeune duchesse son nœud de rubans. […] Il s’arrange avec un jeune lieutenant d’une compagnie écossaise qui cousent, un peu légèrement, à lui fournir le cheval de son propre capitaine, sir James Areskin. […] Une première aventure l’a délivré des contraintes de cette timidité et de cette sauvagerie qui sont naturelles aux jeunes garçons. […] Il me semble que je vois en ce moment ma contemplative jeune amie occupée dans son jardin à épier les approches graduelles du printemps.

1044. (1925) Dissociations

Vient l’âge mûr, qui le mène jusqu’à soixante-dix ans et au-delà, parfois jusqu’à l’âge de Mathusalem. « Il est tout jeune, disait un général d’un de ses collègues, tout jeune. […] Cependant il y a un neveu, mais en jeune Anglais froid et raisonnable, il ne porte sur sa jeune tante nul regard concupiscent. […] Les faces glabres sont presque toutes plus jeunes que les faces à moustaches. […] Cela remplacerait avec avantage les notions inutiles et même un peu sottes dont on charge les jeunes esprits. […] Hier c’était une jeune hystérique atteinte de dermographisme.

1045. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Elles apprirent que le jeune horloger savait jouer avec un talent peu commun d’un instrument alors fort à la mode, et qu’il avait perfectionné lui-même comme le mécanisme des montres. […] La prudence ne saurait conseiller trop de douceur et trop d’égards envers les jeunes poètes qui sont à leur début et qui ont devant eux l’avenir. […] Sully Prudhomme (c’est ma conclusion) n’en reste pas moins, parmi nos jeunes poètes, le premier par le plus grand nombre de dons réunis : le style, le sentiment, la pensée. […] Il est jeune et ne sait pas encore comme il faut son métier. […] Ce grand’père qui raconte ainsi l’histoire de France a quatre-vingt-cinq ans, et il est aussi jeune, aussi vert que jamais.

1046. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gui Patin. — I. » pp. 88-109

Si vous me daignez faire cette faveur, vous aiderez beaucoup à contenter la curiosité de l’esprit d’un jeune médecin de Paris, qui, en récompense, vous servira en toute occasion… Dans une autre lettre, ayant appris de M.  […] Je connais les vieux et les jeunes, et sais beaucoup de choses de la plupart des défunts. […] Il nous dit lui-même qu’il saigna treize fois en quinze jours un jeune gentilhomme de sept ans atteint de pleurésie. […] Quand, vers le milieu du xviiie  siècle, Marmontel ou Le Brun (le poète), ou tout autre jeune littérateur pauvre, voulait créer quelque petite feuille de littérature et de critique, il ne le pouvait qu’en contrebande, faute d’avoir de quoi payer 300 francs au Journal des savants : c’était un tribut qui était dû à ce père et seigneur suzerain des journaux littéraires.

1047. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Étienne de La Boétie. L’ami de Montaigne. » pp. 140-161

Nous y entrevoyons, non pas encore le Montaigne sceptique, railleur et malin que nous connaissons, mais un premier Montaigne jeune et ardent, enthousiaste, ce semble, et pourtant ayant à se garder du côté des plaisirs et de la volupté. […] Que serait-il arrivé de Voltaire, me suis-je demandé quelquefois, s’il avait rencontré de bonne heure un tel ami ; si, jeune, au lieu des liaisons frivoles et dissipées de la Régence, il avait trouvé un Vauvenargues de son âge, et si leurs âmes s’étaient prises, ne fût-ce que pendant quelques années, par un tel lien ? […] Lorsqu’ils se rencontrèrent, leurs deux âmes étaient à la fois déjà faites et encore jeunes : elles sentirent à l’instant leur pareille et s’y portèrent avec une énergie adulte qu’elles n’avaient encore nulle part employée. […] Toutes les fois, du moins, qu’on parlera des nobles vies interrompues au sommet de la jeunesse et à la fleur de la maturité, de ces hommes supérieurs morts jeunes et déjà formés tout entiers, grâce au généreux témoignage de Montaigne, le nom de son ami se présentera, et au-dessous de Pascal, sur un marbre à part, on inscrira Vauvenargues et La Boétie.

1048. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Selon lui, la nature n’est pas en affaiblissement ni en décadence, quoi qu’en disent les partisans exagérés de l’Antiquité : Non, monsieur, la nature n’est pas sur son déclin : du moins ne ressemblons-nous guère à des vieillards ; la force de nos passions, de nos folies, et la médiocrité de nos connaissances, malgré les progrès qu’elles ont faits, devraient nous faire soupçonner que cette nature est encore bien jeune en nous. […] Et quant aux modernes tout voisins de nous, et qui semblent mieux accommodés au goût et au ton de notre siècle, il ne faut pas qu’un jeune écrivain les imite davantage : car « cette façon a je ne sais quel caractère ingénieux et fin dont l’imitation littérale ne fera de lui qu’un singe, et l’obligera de courir vraiment après l’esprit ». […] Dans cette petite personne si mignonne, si distinguée, si au-dessus de sa condition, si glorieuse tout bas et si raisonneuse, dans cette Marianne du roman il y a quelque chose de Mme de Maintenon jeune et guettant en tout honneur la fortune ; mais c’est Mme de Maintenon rapetissée et vue en miniature, avec plus de grimace qu’elle n’en eut jamais. […] Vous savez que j’étais bien mise, et quoiqu’elle (la dame) ne me vît pas au visage, il y a je ne sais quoi d’agile et de léger qui est répandu dans une jeune et jolie figure, et qui lui fît aisément deviner mon âge.

1049. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Œuvres de Louise Labé, la Belle Cordière. »

. — Enfin, nous attendons de jour en jour Pierre de Brach, le poète bordelais, l’ami de Montaigne, que le jeune érudit, M.  […] On n’en peut lire quelques pages sans être vivement frappé, ce me semble, de la fermeté, de la netteté, de la maturité précoce et continue de cette jeune langue du xvie  siècle dans la prose, et de l’antériorité de formation de celle-ci sur les vers. […] Folie, citée à comparaître, demande qu’un dieu plaide pour elle : elle craindrait, si elle plaidait en personne, les murmures de la cabale des jeunes dieux, toujours portés « du côté d’Amour. » La Folie n’est pas si folle. […] Laquelle si elle est belle, elle contregardent tant bien contre les pluies, vents, chaleurs, temps et vieillesse, qu’elles demeurent presque toujours jeunes.

1050. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE PONTIVY » pp. 492-514

Au milieu de cette génération gracieuse, jaseuse, légère et peu passionnée, qui allait devenir l’élite des jeunes femmes du commencement de Louis XV, elle gardait sa sensibilité concentrée et dormante. […] Allié ou parent éloigné de Mme de Maintenon, il était né protestant : on l’avait converti de bonne heure à la religion catholique : Fort jeune, il avait servi avec distinction dans la dernière guerre de Louis XIV, et il avait été honoré à Denain d’une magnifique apostrophe de Villars. […] Lorsqu’il vit chez Mme de Noyon cette jeune nièce, belle et naïve, redevenue ou restée un peu sauvage malgré l’éducation de Saint-Cyr, si entièrement occupée d’un mari qui l’avait mise en de cruels embarras, et apportant un dévouement vrai parmi tant d’agitations factices, il en fut touché d’abord, et demanda à la tante la permission d’offrir à Mme de Pontivy, avec ses hommages, le peu de services dont il serait capable. […] c’est assez ; demain, onze heures, à Chaillot, » lui dit-elle ; et il se retira dans une angoisse et une attente voisines des plus jeunes serments.

1051. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre IV. Le patriarche de Ferney »

Activité philosophique de Voltaire Alors, n’ayant plus rien à ménager puisqu’il n’avait plus rien à craindre, sentant la nécessité de ne pas se laisser distancer par les jeunes, Voltaire s’épanouit, plus fort, plus actif, plus jeune à soixante ans passés qu’il n’avait jamais été. […] Le chevalier de la Barre est roué à Arras en 1766 pour avoir chanté des chansons impies et mutilé un crucifix : Voltaire élève la voix en 1768 ; en 1775 il recueille un des camarades de La Barre, le jeune d’Etallonde ; il le fait instruire, recevoir au service du roi de Prusse, et travaille à le faire réhabiliter. […] On n’imagine pas la dévotion avec laquelle cette jeune femme de vingt ans approcha de Voltaire : « Jamais, dit-elle, les transports de sainte Thérèse n’ont pu surpasser ceux que m’a fait éprouver la vue de ce grand homme ».

1052. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Les poètes décadents » pp. 63-99

Nous étions jeunes. […] « Nous postposerons, à la suite, des variantes contradictoires propres, comme il nous semble, pour atténuer les lacunes et masquer les effondrements, heureux si nous érigeâmes ce “Grande signum et insigne” qu’atteste, dans une prose épiphanique, le Missel de Cluny, si nous pûmes restituer aux Lettres humaines ces Reliquaires jusqu’alors épars : les Rythmes effeuillés du Divin Jeune Homme, pareils aux clous d’or que sème, en la frappant du pied, l’Hippogriphe conculcateur de l’Omnipotente Béotie. […] Verlaine tenait ce renseignement de Baju lui-même, mais je soupçonne fort ces voyages d’être un produit fertile de l’imagination·du jeune pince-sans-rire. […] Georges Izambard, qui fut, à Charleville, le professeur d’Arthur Rimbaud, nous décochait cette ballade sans venin, dans, la Jeune France, revue libre où Maurice Barrès publia des fragments de Sous l’œil des barbares.

1053. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XI. La littérature et la vie mondaine » pp. 273-292

Ils ont aidé la comédie à remplir la tâche difficile de faire rire les honnêtes gens ; mais, dans la comédie même, le jeune premier est parfois trop réduit au rôle d’éternel soupirant. […] Chez Marivaux, par exemple, Dorante ou Lélio (peu importe le nom ; c’est toujours le même personnage sous des noms différents) est un joli garçon à combler d’aise toutes les jeunes pensionnaires. […] Le jeune Eliacin s’exprime avec une aisance et une sûreté qu’on n’eût pas attendues d’un âge si tendre. […] La cour de Louis XIV jeune est brillante et féconde en ballets, comédies, fêtes galantes ; celle de Louis XIV vieilli est morose et vouée aux sermons, aux tragédies bibliques, aux querelles de théologie ; celle du Régent provoque et encourage une littérature décolletée et même débraillée.

1054. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Biographie de Camille Desmoulins, par M. Éd. Fleury. (1850.) » pp. 98-122

Mais, ô nuit charmante, o vere beata nox, pour mille jeunes recluses, bernardines, bénédictines, visitandines, quand elles vont être visitées… Voilà Camille qui commence à se révéler avec ses goûts de saturnales, sa république de Cocagne comme il la rêve, cette république qu’il a presque inaugurée, le 12 juillet, en plein Palais-Royal, et qui dans son imagination s’en ressentira toujours. […] Sa jeune femme l’y suivit huit jours après, pareillement immolée. Camille s’était marié le 29 décembre 1790, avec cette jeune Lucile qu’il aimait. […] Il avait eu à son mariage cinq témoins, Pétion, Brissot, Sillery, Mercier, et ce cher Robespierre toujours ; ces cinq témoins avaient dîné ce jour-là en famille, en petit comité, avec les jeunes époux.

1055. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La Grande Mademoiselle. » pp. 503-525

Énumérant toutes les jeunes personnes qu’elle-même avait à sa suite : « Nous étions toutes vêtues de couleur, dit-elle, sur de belles haquenées richement caparaçonnées ; et, pour se garantir du soleil, chacune avait un chapeau garni de quantité de plumes. » Cela nous la peint déjà, fière et de haute mine, grande pour son âge, ayant gardé du panache de son aïeul Henri IV toutes les plumes. […] Serait-elle reine de France en épousant le jeune roi Louis XIV, de onze ans moins âgé qu’elle ? […] Elle connut par lui Huet (le futur évêque), lequel, jeune alors, lui servait quelquefois de lecteur pendant sa toilette. […] Mademoiselle avait quarante-deux ans ; elle avait manqué tant et de si grands mariages, qu’elle semblait n’avoir plus qu’à demeurer dans cet état indépendant et libre de la plus riche princesse de France, lorsqu’elle commença (1669) à remarquer M. de Lauzun, favori du roi, et plus jeune qu’elle de plusieurs années.

1056. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits du comte Joseph de Maistre. (1851, 2 vol. in-8º.) » pp. 192-216

Pendant tout le temps que le jeune Joseph passa à Turin pour suivre le cours de droit à l’Université, il ne se permit jamais la lecture d’un livre sans avoir écrit à son père ou à sa mère à Chambéry pour en obtenir l’autorisation. […] « Ma mère était un ange, disait-il à qui Dieu avait prêté un corps ; mon bonheur était de deviner ce qu’elle désirait de moi, et j’étais dans ses mains autant que la plus jeune de mes sœurs. » Envoyé à Saint-Pétersbourg comme ministre plénipotentiaire par le roi de Sardaigne son souverain, il écrivait de là à l’un de ses frères, et il avait alors cinquante et un ans (février 1804) : « À six cents lieux de distance, les idées de famille, les souvenirs de l’enfance me ravissent de tristesse. Je vois ma mère qui se promène dans ma chambre avec sa figure sainte, et, en t’écrivant ceci, je pleure comme un enfant. » Cette première éducation pure, étroite et forte, acheva de déterminer la nature déjà énergique du jeune de Maistre ; il fut comme ces chênes qui prennent pied dans une terre un peu âpre et qui s’enracinent plus fermement entre les rochers. […] Quand on a passé le milieu de la vie, les pertes sont irréparables… Séparé sans retour de tout ce qui m’est cher, j’apprends la mort de mes vieux amis ; un jour les jeunes apprendront la mienne.

1057. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

C’est ce même sentiment d’une générosité presque confraternelle qui lui inspira (21 juillet) les quelques lignes par lesquelles il honora le trépas du jeune Amédée de Bourmont, tué au début de l’expédition, quand, à peu de jours de là, il avait été si inexorable et d’une mémoire si vengeresse contre le père. […] Encore une fois, tout cela serait charmant et d’une singularité pleine de grâce dans un jeune et brillant militaire qui veut qu’on soit avant tout avec lui de la religion des braves ; mais, transposé dans l’ordre de la discussion politique et dans un système qui professait une entière liberté de presse, cela criait et jurait à chaque pas. […] Il est question tout à côté, avec une sorte d’affection, de notre jeune royauté consentie. Les cordiales revues des gardes nationales et les effusions qu’elles amènent ne sont nullement dissimulées : Le roi était content ; il parcourait les rangs des divers corps avec l’ardeur du jeune soldat de Jemmapes.

1058. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — I. » pp. 389-410

J’avais plus d’une fois songé à faire entrer Volney dans ces études, où j’aime à passer en revue les hommes distingués qui appartiennent à la fois au siècle dernier et au commencement du nôtre : un travail d’un jeune et judicieux écrivain, Μ.  […] Le jeune enfant perdit sa mère à deux ans, et fut abandonné aux mains d’une servante de campagne et d’une vieille parente, gâté par l’une, grondé par l’autre. […] Cabanis et lui, tous deux jeunes, en épousèrent l’esprit et l’appliquèrent chacun dans son sens ; mais Volney n’avait rien du caractère de Cabanis, qui corrigeait par l’onction de sa nature la sécheresse des doctrines : lui, il était homme à l’exagérer plutôt. […] Il voulut se guinder jusqu’à l’imagination qu’il n’avait pas, et il ne réussit qu’à produire, dans le genre sec, un livre fastueux, quelque chose comme du Raynal plus jeune, en turban et au clair de lune.

1059. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Volney. Étude sur sa vie et sur ses œuvres, par M. Eugène Berger. 1852. — II. (Fin.) » pp. 411-433

J’ai autrefois entendu raconter à Lemercier que Volney poussait loin alors l’attention et la déférence pour le jeune général. […] Il s’était marié à une personne de sa famille, beaucoup plus jeune que lui, et qui entourait de soins sa vieillesse. […] « Je suis le plus jeune du Sénat, me disait Fargue, je ferai, je ferai, etc., etc. » ; nous l’enterrions dix jours après. […] Volney, content de ne pas mourir et s’enfonçant dans son fauteuil, s’appliquait aussi le mot de Franklin, qui disait en les voyant, Cabanis et lui, tous deux jeunes alors et pleins d’ardeur : « À cet âge, l’âme est en dehors ; au mien elle est en dedans, elle regarde par la fenêtre le bruit des passants sans prendre part à leurs querelles. » Volney, qui n’était point orateur et qui avait l’organe assez faible, causait bien dans un salon ; il parlait comme il écrivait, avec la même netteté, et cela coulait de source ; on aimait à l’écouter. — Son honneur durable, si on le dégage de tout ce qui a mérité de périr en lui, sera d’avoir été un excellent voyageur, d’avoir bien vu tout ce qu’il a vu, de l’avoir souvent rendu avec une exactitude si parfaite que l’art d’écrire ne se distingue pas chez lui de l’art d’observer, et une fois au moins, dans son tableau de la Syrie, d’avoir le premier offert un modèle de la manière dont chaque partie de la terre devrait être étudiée et décrite.

1060. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Le Prince » pp. 206-220

Deux bohémiennes l’accostent, lui prennent la main, lui prédisent des enfans et charmans, comme vous pensez bien, un jeune mari qui l’aimera à la folie, et qui n’aimera qu’elle, comme il arrive toujours ; de la fortune, il y avait une certaine ligne qui le disait et ne mentait jamais ; une vie longue et heureuse, comme l’indiquait une autre ligne aussi véridique que la première. […] Montrez-moi une vieille rusée qui attache l’attention d’une jeune innocente enchantée, tandis qu’une autre vieille lui vide ou lui coupe ses poches ; et si chacune de ces figures a son expression, vous aurez fait un tableau… non pas, s’il vous plaît, il y faudra encore bien d’autres choses. […] Ils regardent l’un et l’autre vers le même côté, ils semblent écouter et ils écoutent en effet un jeune musicien qui joue à quelque distance d’une espèce de mandoline. […] Celle-ci tient la main de la jeune femme, elle lui parle, mais elle n’a point le caractère faux et rusé de son métier ; c’est une vieille comme une autre.

1061. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Philarète Chasles » pp. 147-177

Cette histoire est très belle, très tragique, et les personnages en sont très criminels, puisque c’est la séduction d’une religieuse de haut lignage, princesse de naissance, supérieure de son couvent, par un jeune seigneur italien de beauté singulière, de mœurs très corrompues, assassin trois ou quatre fois. […] Partout où il s’est mouché et essuyé les yeux, l’auteur de ce livre est jeune de couleur et d’accent. […] Je le tiens jeune par le talent, oui ! séduisant et jeune toujours, quand il ne se vieillit pas en pleurant.

1062. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « VICTORIN FABRE (Œuvres mises en ordre par M. J. Sabbatier. (Tome II, 1844.) » pp. 144-153

Ainsi pour le jeune talent de Victorin Fabre : il épousa sans retour une littérature vieillissante, et sa fidélité même le perdit. […] Les anciens expliquaient aux plus jeunes de quoi il s’agissait au juste : était-ce un grand écrivain, décidément, qui nous revenait de Jaujac ?

1063. (1874) Premiers lundis. Tome I « Walter Scott : Vie de Napoléon Bonaparte — II »

Sir Walter Scott a tronqué et obscurci à plaisir ces beaux faits d’armes ; il s’est cru même obligé, en patriote fervent, d’égayer son récit par une critique littéraire des proclamations du jeune général, et d’y relever l’enflure et les sesquipedalia verba. […] Sir Walter Scott sait gré au jeune vainqueur du respect et de la pitié que lui inspira le guerrier à cheveux blancs, mais ce n’est pas sans ajouter quelque épigramme contre le coup de théâtre du manteau.

1064. (1874) Premiers lundis. Tome I « A. de Lamartine : Harmonies poétiques et religieuses — I »

Moins jeune et mûri par l’expérience, le poète sait qu’il n’en a pas fini avec les funestes pensées ; que, pour les avoir repoussées aujourd’hui, il n’en sera peut-être pas délivré demain, et que le meilleur port ici-bas nous laisse encore sentir le contre-coup des orages. […] La foule qui s’ouvre à mesure La flatte encor d’un long coup d’œil, Et la poursuit d’un doux murmure Dont s’enivre son jeune orgueil  Et moi je souris et je passe !

1065. (1874) Premiers lundis. Tome II « Charles de Bernard. Le nœud Gordien. — Gerfaut. »

Les trois amants successifs, le commandant Garnier, Mornac et le jeune Boisgontier, sont des personnages d’aujourd’hui, du dernier vrai, saisis dans leur relief et assemblés, contrastés entre eux dans des situations habiles où le pathétique d’un moment cède vite au comique et à l’ironie. […] Gerfaut, le héros du roman, est aussi un des héros du jour, un écrivain à la mode, un dramaturge applaudi, un romancier qu’on s’arrache ; à trente ans, après bien des efforts et de longues sueurs, il a gagné, lui aussi, son bâton de maréchal ; il est aujourd’hui, comme dit spirituellement l’auteur, un de ces jeunes maréchaux de la littérature française dont Chateaubriand semble le connétable.

1066. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Contes de Noël »

L’auteur nous confie que, dans son enfance, il aimait déjà toutes les femmes, comme il a continué de faire au grand séminaire de Montpellier, Donc, le jeune Ferdinand a treize ans ; il apprend le latin chez son oncle l’abbé Fulcran, curé de Lignières-sur-Graveson ; celle qu’il aime, c’est Mlle Méniquette, une jolie personne de vingt ans, mi-paysanne et mi-bourgeoise, fille de M.  […] Le jeune Ferdinand, étranglé d’émotion, rate son solo.

1067. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXV. De Paul Jove, et de ses éloges. »

Il eut la même patrie que Pline le jeune ; mais Pline fut l’ami de Trajan, consul de Rome et gouverneur de province, et Paul Jove commença par être médecin et finit par être évêque. […] En Espagne, vous trouverez Ferdinand-le-Catholique, qui chassa et vainquit les rois Maures, et trompa tous les rois chrétiens ; Charles-Quint, heureux et tout-puissant, politique par lui-même, grand par ses généraux, et cette foule de héros dans tous les genres qui servaient alors l’Espagne ; Christophe Colomb, qui lui créa un nouveau monde ; Fernand Cortez qui, avec cinq cents hommes, lui soumit un empire de six cents lieues ; Antoine de Lève qui, de simple soldat, parvint à être duc et prince, et plus que cela grand homme de guerre ; Pierre de Navarre, autre soldat de fortune, célèbre par ses talents, et parce que le premier il inventa les mines ; Gonzalve de Cordoue, surnommé le grand Capitaine, mais qui put compter plus de victoires que de vertus ; le fameux duc d’Albe, qui servit Charles-Quint à Pavie, à Tunis, en Allemagne, gagna contre les protestants la bataille de Mulberg, conquit le Portugal sous Philippe II, mais qui se déshonora dans les Pays-Bas, par les dix-huit mille hommes qu’il se vantait d’avoir fait passer par la main du bourreau ; enfin, le jeune marquis Pescaire, aimable et brillant, qui contribua au gain de plusieurs batailles, fut à la fois capitaine et homme de lettres, épousa une femme célèbre par son esprit comme par sa beauté, et mourut à trente-deux ans d’une maladie très courte, peu de temps après que Charles-Quint eut été instruit que le pape lui avait proposé de se faire roi de Naples.

1068. (1857) Réalisme, numéros 3-6 pp. 33-88

La vieille Mme d’Héricourt tape déjà sur les doigts de ce monstre, quelle sera sa douleur quand les jeunes s’en mêleront. […] * *   * Il va paraître un petit catéchisme pour l’instruction des jeunes clercs d’huissier, jeunes coiffeurs, jeunes commis qui veulent entrer dans les petits journaux pour satisfaire leur vanité. […] Vous avez déchiré toute la jeune littérature. […] Il travaille pour sa vieille mère ou sa jeune sœur. […] Cette phrase n’est donc pas de notre Balzac, c’est du Balzac jeune qui faisait la tragédie classique dont Cromwell était le héros.

1069. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre I. Les origines. — Chapitre III. La nouvelle langue. » pp. 165-234

j’étais toute fringante, et belle, et riche, et jeune et bien née. » Quel mot ! […] Chaque conte est approprié au conteur ; le jeune écuyer raconte une histoire fantastique et orientale ; le meunier ivre, un fabliau graveleux et comique ; l’honnête clerc, la touchante légende de Griselidis. […] Sa voix ressemble à celle d’un jeune garçon qui devient homme. […] Il y a tel récit d’un jeune garçon qui, meurtri par son précepteur, veut à toute force le garder, afin d’apprendre. […] Ces jeunes et vaillants esprits avaient cru apercevoir le temple du vrai ; ils s’y ruèrent la tête basse, par légions, avec une vélocité et une énergie de barbares, enfonçant la porte, escaladant les murs, précipités dans l’enceinte, et se trouvèrent au fond d’une fosse.

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