/ 2207
1395. (1760) Réflexions sur la poésie

Pour lui le premier mérite et le plus indispensable dans tout écrivain, est celui des pensées : la poésie ajoute à ce mérite celui de la difficulté vaincue dans l’expression ; mais ce second mérite, très estimable quand il se joint au premier, n’est plus qu’un effort puéril dès qu’il est prodigué en pure perte et sur des objets futiles.

1396. (1824) Notice sur la vie et les écrits de Chamfort pp. -

Étonné de vivre et résolu de mourir, il saisit un rasoir, essaie de se couper la gorge, y revient à plusieurs reprises, et se met les chairs en lambeaux ; l’impuissance de sa main ne change rien aux résolutions de son âme ; il se porte plusieurs coups vers le cœur, et commençant à défaillir, il tâche par un dernier effort de se couper les deux jarrets, et de s’ouvrir les veines.

1397. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre III. Besoin d’institutions nouvelles » pp. 67-85

Ils l’ont comparée à un torrent, que l’on veut contenir par des digues trop étroites, et qui fait naturellement effort pour briser ces digues.

1398. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Plus timide que celui qui tremblait devant la statue sortie de ses mains, il a tremblé devant la majesté d’un titre qui n’est pas sorti de sa plume, et il n’a osé que le mot d’Études… Or, Études est un mot qui dit l’effort, mais qui ne dit pas la réussite.

1399. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte du Verger de Saint-Thomas »

Le livre de Verger de Saint-Thomas, qui n’a point visé à l’extraction du duel, n’est que l’effort courageux d’un excellent esprit pour atténuer les férocités de cette coutume qui fut souvent féroce, et pour diminuer la fatalité des conséquences qu’elle peut avoir.

1400. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Il rame, depuis des années, sur les galères de la publicité, qui n’est pas pour lui comme pour nous, profanes écrivains, la publicité de l’amour-propre, mais celle de la charité, et certainement il n’a pas trouvé dans l’opinion des hommes une récompense en proportion de ses efforts et de ses travaux.

1401. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « L’Angleterre depuis l’avènement de Jacques II »

On a retourné contre lui l’insuccès de ses efforts à défendre un droit politique périssant dans l’exécration universelle de la religion qui semblait consacrer le mieux ce droit.

1402. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Histoire des Pyrénées »

Cénac-Moncaut, dont l’ouvrage suppose des années d’efforts et d’études, doit donc être profondément pénétré de l’importance, de la virtualité et de l’originalité instructive du sujet qu’il traite.

1403. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le roi René »

Il en fallait pour l’ôter de dessous cette épitaphe et cette épithète du « bon Roi René », sous lesquelles il gît… L’initiative d’un tel effort n’appartient pas à Lecoy de la Marche.

1404. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Femme et l’Enfant » pp. 11-26

Malgré les succès actuels d’une philosophie qui mutile l’homme pour le simplifier, les questions morales, en fin de compte, seront toujours les grandes questions, les questions premières ou dernières, et l’homme se prendra dans ses propres efforts comme dans un filet inextricable toutes les fois qu’il méconnaîtra son âme, et qu’il demandera à une autre cause que son âme l’explication et l’amélioration de sa destinée.

1405. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Madame de Sévigné » pp. 243-257

Prude, en somme, sous ses airs de page, honnête toute sa vie sans que cela lui coûtât un sou d’effort pour le rester, coquette d’esprit, de coiffure, de corsage, de bras nus abandonnés, qui se donnaient à tous et qui n’ont jamais étreint personne, coquette même de maternité, madame de Sévigné résume en elle deux figures de Molière qui, dédoublées, font la femme française : Elmire et Célimène.

1406. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « La Papesse Jeanne » pp. 325-340

C’est pour elle qu’il s’est fait savant ; qu’il a remué toutes les chroniques ; qu’il a grignoté, mangé, dévoré et digéré tous les manuscrits ; et, de cette digestion, fait sortir cette Papesse Jeanne, pondue enfin dans les champs de l’imagination, après d’effroyables efforts scientifiques et pour satisfaire tous les goûts !

1407. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

I Puisqu’il n’y a pas de livres nouveaux, et que l’anémie littéraire continue, il faut bien se replier vers les réimpressions… En voici une toute récente d’un livre publié en 1870 par les deux Goncourt, et que celui qui reste des deux frères a remanié avec l’ambition d’atteindre aux qualités les plus solides de l’historien, après en avoir eu les plus brillantes… Et il faut lui savoir gré de ce noble effort !

1408. (1895) Les œuvres et les hommes. Journalistes et polémistes, chroniqueurs et pamphlétaires. XV « Émile de Girardin » pp. 45-61

La première condition d’une œuvre littéraire, c’est le temps, le sérieux, l’effort, la conscience, le respect de soi et du public, auquel on ne jette pas les bavures de son portefeuille à la tête.

1409. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

Là il déposa tout son effort, toute sa force et sa vie presque.

1410. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XVI. Buffon »

Sachant le prix du temps, le prix de tout, planant sur les préoccupations de son âme et les distractions de la vie, ne permettant pas à ces distractions d’emporter jamais sa pensée hors de l’atmosphère où, sans effort, il la maintenait, Buffon, comme Rousseau, ne jouait pas au hibou de Minerve.

1411. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXI. Philosophie positive »

je ne veux parler que des philosophes, et non pas des prêtres positivistes, des philosophes qui prétendent tirer une grande doctrine des six volumes de fatras qu’Auguste Comte a légués… aux vers de la terre, et qui font actuellement de si grands efforts pour cacher le ridicule fondamental de leur grand homme.

1412. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XXX. Saint Anselme de Cantorbéry »

Ni les efforts de Mœhler, le théologien catholique qui s’est occupé, dans un autre but, de la métaphysique de l’illustre archevêque, ni les petites chicanes d’une revue estimable (la Revue de Louvain), qui prétendait et montrait plaisamment un jour que M. de Rémusat n’entendait pas même le latin du texte qu’il traduisait, ne nous feront perdre de vue la vérité dans cette question de la métaphysique de saint Anselme.

1413. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Christophe »

Ce fut Eugène IV qui, par la date et la durée de son pontificat, fut le plus spécialement chargé de cette besogne ; mais, comme tous les restaurateurs, qui ne restaurent guères en définitive, comme tous les réparateurs des maux commis, qui sont presque toujours irréparables, il se crut obligé à des habiletés et à des concessions qui restent sur sa mémoire, malgré les efforts de l’abbé Christophe pour les en ôter… C’est du concile de Bâle, en effet, que date l’établissement dans l’opinion ecclésiastique de ces prétentions démocratiques, si contraires, quoi qu’on en ait dit, au gouvernement de l’Église, laquelle est une monarchie mixte, d’un ordre spécial, comme l’a très bien prouvé l’abbé Christophe.

1414. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Dargaud »

il n’a fallu pour l’écrire ni tant de spontanéité, ni tant de réflexion, ni tant d’efforts.

1415. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Son système, s’il est possible d’entendre la voix ferme et distincte d’un système à travers cette tempête de mots lâchés par un homme véritablement attaqué d’une tympanite verbale, son système n’est qu’une espèce de métempsycose toujours en évolution… idée chétive, trouvaille de peu d’efforts, vulgarité niaise à force d’être commune.

1416. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Agrippa d’Aubigné »

Réaume et de Caussade, ont extrait, à force d’efforts, ces pépites… Et si, dans l’ordre interverti des volumes, le troisième a paru avant le second, c’est que dans le troisième se trouvent les vers inédits et absolument inconnus de d’Aubigné, et qu’on a cru intéresser au succès immédiat de l’édition qu’on publie par cet attrait de nouveauté.

1417. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

Féval, cette réputation qui n’est pas seulement la popularité du feuilleton, est-elle en proportion avec ses efforts et ses travaux ?

1418. (1868) Curiosités esthétiques « VIII. Quelques caricaturistes étrangers » pp. 421-436

Des démons malfaisants, une myriade de vilains gnomes lilliputiens pèsent de tous leurs efforts réunis sur le couvercle de la tombe entrebâillée.

1419. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XVI. Des sophistes grecs ; du genre de leur éloquence et de leurs éloges ; panégyriques depuis Trajan jusqu’à Dioclétien. »

La corruption du goût, qui naît des vices et des passions fortes, est différente de celle qui naît du défaut d’énergie, et de l’oisiveté qui s’amuse de tout ; l’une fait trop d’efforts, l’autre n’en fait pas assez : ainsi l’une exagère, l’autre affaiblit, et par là même peut-être le goût à Rome était plus près d’une décadence entière que dans la Grèce et dans l’Asie ; car celui qui ne va pas où il peut aller, est bien plus près de la nature que celui qui est emporté au-delà.

1420. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

le digne sujet de nos louanges et de nos regrets, vous vivrez éternellement dans ma mémoire ; … agréez ces derniers efforts d’une voix qui vous fut connue ; vous mettrez fin à tous ces discours.

1421. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXVI. Des éloges académiques ; des éloges des savants, par M. de Fontenelle, et de quelques autres. »

S’ils ont fait des efforts, et qu’ils n’aient pas réussi, ils ne manquent pas d’appeler à leur secours l’injustice du siècle.

1422. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Première partie. — Chapitre IV. »

L’élégie, la plainte funèbre, eut alternativement un vers brisé, comme pour exprimer par le son l’effort et la tristesse.

1423. (1892) Impressions de théâtre. Sixième série

Blum et Toché, ni que la pièce d’Ibsen n’exige pas, au moins, un petit effort d’esprit pour être comprise. […] Mais il faut croire que c’était nous demander trop d’effort et trop de bonne volonté. […] L’effort de l’art, ce doit être d’agrandir le domaine du vraisemblable, de donner l’apparence du vrai à la plus grande quantité possible de réel : ce qui n’est pas commode. […] Le pessimisme boulevardier ne conclut pas, ne veut pas conclure ; il se passe d’espérance et veut s’en passer ; car l’espérance, songez-y, implique l’effort et le renoncement. […] Il faut évidemment prendre celui où ils ont le plus de choses à nous apprendre sans y faire effort.

1424. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Plusieurs fois il avait eu des velléités de réforme, et fait des efforts et des tentatives dans ce sens. […] C’est d’ailleurs celui de ses livres que Rousseau a écrit avec le moins d’effort (en trois semaines). […] Sa propre vie, quand nous l’embrasserons dans son ensemble, nous apparaîtra comme une évolution, comme un effort, souvent plein d’illusions, mais enfin comme un effort vers la vertu, comme une lente sortie hors de sa fange première, comme une montée que n’arrêtera point sa folie peu à peu croissante ; au contraire. […] … Au livre III, de douze à quinze ans, se fait l’éducation de l’intelligence et de la réflexion, — toujours par les choses mêmes, par l’expérience directe, sans livres, — avec le moindre effort possible pour l’élève. […] Elle unit ainsi et fait concorder l’effort des générations successives.

1425. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Que d’efforts il a faits pour rester inconnu ! […] Les torses des damnés, où s’écrase la lourde écume du fleuve infernal, font penser au Naufrage de la Méduse pour la pâleur noyée des chairs, la force des ombres et l’effort anatomique. […] Eugène Devéria ne dépassa point son premier effort. […] Chacun se donnait tout entier avec son effort suprême et sa plus intense originalité. […] Quoique appartenant à une autre génération, mademoiselle Georges a été notre contemporaine par ses succès dans le drame moderne ; elle avait quitté Eschyle pour Shakespeare — ce n’est pas là une défection — et s’était généreusement associée aux efforts de notre école.

1426. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — chapitre VI. Les romanciers. » pp. 83-171

De quelque côté qu’on regarde sa vie, on n’y voit qu’efforts prolongés et persécutions subies. […] Rien n’enraye son effort ; ni la possession ni la lassitude. « J’avais maintenant, dit-il, après avoir fait et chargé onze radeaux en treize jours, le plus gros magasin d’objets de toute sorte qui eût jamais été amassé, je crois, pour un seul homme ; mais je n’étais point encore satisfait ; car tant que le navire était debout dans cette posture, il me semblait que je devais en tirer tout ce que je pourrais. […] Il pardonnera à son mortel ennemi sans effort, par bonté pure, et lui enverra de l’argent en cachette. […] When a character is strongly marked in the living face, it may be considered as an index to the mind, to express which with any degree of justness in painting requires the utmost efforts of a great master.

1427. (1841) Discours aux philosophes. De la situation actuelle de l’esprit humain pp. 6-57

Hommes du pouvoir, vos efforts rétrogrades sont jugés ; mais quand vous réussiriez quelque temps à faire de l’immobilité, ce ne serait jamais de l’ordre, ce ne serait qu’un désordre caché. […] Mais puisque mourir est une loi nécessaire, l’effort des grandes âmes sera au moins de ne pas languir dans une triste apathie, dans une morne existence, dans une demi-vie, dans une demi-mort. […] Sublime effort de la vertu et de la sagesse de nos législateurs ! […] Certes, ce ne sont ni les poètes, qui ont tant répété sur toutes les variations ce cri de douleur : Mon âme est triste jusqu’à la mort ; ni les philosophes, que tant de scepticisme accable ; ni les politiques, que tant de perplexité dévore ; ni les moralistes, qui ne savent quelle base donner à la morale ; ni les philanthropes, qui voient tous leurs efforts vains comme la fumée que le vent disperse ; ni enfin aucun de ceux qui ont réfléchi attentivement sur le caractère de notre époque.

1428. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome II

Tous les efforts des anatomistes ont été impuissants pour dire à quoi pouvaient servir ces organes. […] En exécutant des efforts de bâillement, on obtient un résultat analogue. […] À chaque effort que faisait l’animal en criant, la quantité de liquide affluait plus considérable et le canal devenait plus distendu. […] La réduction en fut très longue et très difficile, à cause des efforts constants que l’animal faisait en se débattant. […] Tous mes efforts pour obtenir ces sortes de fistules ont été infructueux, toujours le tube est tombé et la continuité du canal pancréatique s’est rétablie.

1429. (1716) Réflexions sur la critique pp. 1-296

Je suis bien loin d’avoir une haute idée de ces dieux ; je ne crois pas qu’il faille entasser Ossa sur Pélion pour les vaincre : en vain les géants, et même en âge d’homme, se rangent aujourd’hui de leur parti ; tout pigmée que je suis, je me flatte d’en venir à bout sans effort, et je ne tirerai pas vanité de ma victoire. […] Il a fait beaucoup d’ouvrages sensez et poëtiques mêmes : il avoit particulierement le génie de la traduction ; mais soit que dans celle-ci, le dessein de rendre trop exactement Homere, eût contraint son propre goût, soit qu’il n’eût pas fait assez d’efforts pour vaincre la difficulté, il ne donna que des vers froids et durs : je nomme ici les choses par leur nom, parce que cela ne le touche plus, en un mot, il ne se ressembla pas à lui-même. […] Je crus avoir réussi aux prémiers vers ; cette opinion m’engagea plus loin ; et ainsi me flattant toûjours, j’arrivai d’efforts en efforts jusqu’à la fin du prémier livre. […] Racine, qui essayerent tous deux de traduire Homere, et qui abandonnerent l’entreprise dès les prémiers efforts. […] Homere n’a point avili Agamemnon en lui faisant préférer hautement son esclave à sa femme, il l’auroit avili, s’il l’avoit fait soupirer quand il se fait l’effort de la rendre.

1430. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Si elle est mauvaise, l’organisme qui souffre fait un effort et s’en débarrasse. […] C’était l’illusion de cet homme trop intelligent de croire que les hommes étaient à la hauteur de son oreille ; comme il comprenait la moindre nuance d’idée suggérée par un mot, il supposait tout esprit de bonne volonté capable du même effort intellectuel. […] Déjà, il y a dix ans, il notait tous les efforts de non-imitation rencontrés à l’Expsition, les potiches de Chapelet, les argenteries de Falize, aussi bien que le nouvel arc en fer de l’architecte Formigé et les multiples talents de Gallé, menuisier, potier, verrier. […] Nous avons cependant une sentinelle, dans tous les sens, mais cela semble dû à l’effort des grammairiens qui savaient que l’original de ce mot est l’italien sentinella. […] On peut affirmer que tous les verbes que formera dorénavant notre langue suivront le modèle aimer, et aussi qu’elle fera tous ses efforts pour ramener à ce modèle unique toutes les autres formes encore en usage.

1431. (1802) Études sur Molière pp. -355

Mairet, Scudéry, Rotrou et plusieurs autres, redoublaient d’efforts pour effacer la gloire de Hardy ; les quatre premières pièces de Corneille éclipsaient cette foule de rivaux et multipliaient les théâtres. […] Elle mit le comble à la jalousie des auteurs, et surtout à celle des comédiens de l’Hôtel de Bourgogne ; les grands seigneurs prirent parti contre Molière, pour les uns et les autres ; et croyant n’être que leurs protecteurs, ils se montrèrent publiquement leurs complaisants, tant ils firent d’efforts pour arrêter le succès de la pièce nouvelle. […] Dans le mois d’août de la même année, Louis XIV, satisfait des efforts que faisait, pour lui plaire, la troupe de Molière, voulut la fixer tout à fait à son service, en lui accordant une pension de 7 000 livres, et le titre de troupe du roi. […] La femme saisit vite l’occasion de se venger, indique son mari, avertit qu’il faut le battre pour le faire convenir de son savoir ; il nie, est rossé, avoue qu’il est un grand homme ; paraît devant la princesse, risque mille singeries, et les efforts que fait la malade pour rire la débarrassent de l’arête. […] Mais que nous apprennent les modernes, après beaucoup d’efforts ?

1432. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. LEBRUN (Reprise de Marie Stuart.) » pp. 146-189

Voilà ce qu’on se pouvait dire, ce que le poëte aurait pu opposer aux idées de reprise, s’il avait mieux aimé sa tranquille possession de renommée que l’art même, si longtemps glorieux, qu’il a, pour sa part, cultivé d’un noble effort, et qu’il parut, à un certain jour, avoir agrandi. — « J’irai voir ce soir vos Templiers, » disait quelqu’un à M. […] On ne saurait méconnaître dans cet ensemble d’efforts élévation et courage.

1433. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre I. Succès de cette philosophie en France. — Insuccès de la même philosophie en Angleterre. »

 » — Il n’importe, et la jolie femme, bien conduite, va philosopher sans le savoir, trouver sans effort la définition du bien et du mal, comprendre et juger les plus hautes doctrines de la morale et de la religion  Tel est l’art du dix-huitième siècle et l’art d’écrire. […] Les célèbres discours sur l’influence des lettres et sur l’origine de l’inégalité nous semblent des amplifications de collège ; il nous faut un effort de volonté pour lire la Nouvelle Héloïse.

1434. (1868) Cours familier de littérature. XXVI « CLVe entretien. Vie de Michel-Ange (Buonarroti) »

Les écrivains florentins décrivent ce carton de Michel-Ange comme un poëme national, prélude du poëme universel de son Jugement dernier, et nullement inférieur à ce prodige du crayon et du pinceau : « Pendant que les soldats sortaient en hâte des ondes ruisselantes sur leurs membres, on voyait parmi eux, dit Vasari, par la main divine de Michel-Ange, la figure d’un vétéran qui, pour s’ombrager du soleil pendant le bain, s’était coiffé la tête d’une guirlande de lierre, lequel s’étant accroupi sur le sable pour remettre sa chaussure que l’humidité de ses jambes empêchait de glisser sur sa peau, et entendant en même temps les cris de ses compagnons et le roulement du tambour appelant aux armes, se hâtait pour faire entrer de force son pied dans sa chaussure mouillée ; en outre, ajoute Vasari, que tous les muscles et tous les nerfs du vétéran se dessinaient en saillie dans l’effort, toute sa physionomie exprimait son angoisse, depuis la bouche jusqu’à l’extrémité de ses pieds. […] » Il n’eut pas besoin d’être soutenu par ses amis, il expira sans effort et comme on s’endort, le 17 février 1564, au coucher du soleil.

1435. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

Le, défaut de Courier, c’est qu’on sent trop cet art, et l’effort de l’écrivain : nous aimerions un peu plus d’abandon ; et pourtant, en son genre, il fut un vrai artiste, et tout à fait original. […] Guizot tourna tous ses efforts.

1436. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « De l’influence récente des littératures du nord »

En quoi l’objectivité des peintures, à laquelle ils tendent loyalement et non sans effort, implique-t-elle l’insensibilité, le dédain ou l’ironie du peintre ? […] Londres, près de qui Paris n’est qu’une jolie petite ville, est la capitale de la volonté et de l’effort ; et je crois aussi que c’est une excellente atmosphère pour la réflexion qu’un brouillard anglais.

1437. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Figurines (Deuxième Série) » pp. 103-153

Quoique ces deux classes se touchent souvent et se mêlent (et cette rencontre même est un phénomène social que l’auteur du Prince d’Aurec a étudié d’un effort très sérieux), elles lui inspirent des sentiments bien différents. […] Elle agrandit son cœur et sa pensée par l’effort de souffrir noblement, et par les méditations mêmes et les lectures de ses longues insomnies ; et d’autre part elle pousse à l’aigu son expressive fébrilité d’artiste.

1438. (1894) Propos de littérature « Chapitre IV » pp. 69-110

Printanière, dans l’aube éternelle du rêve Et dans l’aurore assise, Elle tisse en rêvant Des choses qu’Elle sait, et sourit ; et, devant Elle, au gré de sa main agile, court sans trêve La navette laborieuse, et le doux vent D’avril emmêle ses cheveux qu’Elle soulève Et rejette sur son épaule ; et, relevant La tête, Elle fredonne un air qu’Elle n’achève… De l’ombre, Elle apparaît, comme en un cadre d’or : Derrière Elle l’azur et des plaines qu’arrose Un fleuve ; et, sur sa tête, un rameau de laurose Étend ses fleurs contre l’azur clair ; — et l’effort Du métier, comme un chant monotone et morose Se plaint très doucement : — on envierait le sort De celui qui baiserait la main qu’Elle pose Négligemment, parfois, et lasse de l’effort… Mais moi, la voyant rire en rappelant sans doute Quelque doux jour mort de sa joie un soir de mai, Je songeai que, peut-être, pour avoir aimé Son rire, d’autres ont repris la lente route Tristes d’un souvenir et le cœur affamé D’un mets où nulle lèvre impunément ne goûte.

1439. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre V. Le Séminaire Saint-Sulpice (1882) »

Le christianisme m’apparaissait comme plus grand que jamais, mais je ne maintenais plus le surnaturel que par un effort d’habitude, par une sorte de fiction avec moi-même. […] Ce n’est pourtant pas sans efforts que j’ai pu appliquer un démenti aussi formel aux faits apparents.

1440. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Première leçon »

Ainsi, pressé entre la nécessité d’observer pour se former des théories réelles et la nécessité non moins impérieuse de se créer des théories quelconques pour se livrer à des observations suivies, l’esprit humain, à sa naissance, se trouverait enfermé dans un cercle vicieux dont il n’aurait jamais eu aucun moyen de sortir, s’il ne se fût heureusement ouvert une issue naturelle par le développement spontané des conceptions théologiques, qui ont présenté un point de ralliement à ses efforts, et fourni un aliment à son activité. […] Nous voyons, par ce qui précède, que le caractère fondamental de la philosophie positive est de regarder tous les phénomènes comme assujettis à des lois naturelles invariables, dont la découverte précise et la réduction au moindre nombre possible sont le but de tous nos efforts, en considérant comme absolument inaccessible et vide de sens pour nous la recherche de ce qu’on appelle les causes, soit premières, soit finales.

1441. (1913) La Fontaine « VIII. Ses fables — conclusions. »

Il est plein de l’antiquité, je lui en fais mon compliment, mais c’est toujours au point de vue strict de l’antiquité qu’il examine tout effort littéraire. […] Il y a encore une raison : c’est que Lessing faisait tous ses efforts et, il faut le reconnaître, il avait raison, pour déshabituer les Allemands de l’idolâtrie de la littérature française, et, fondant la littérature allemande, il disait que, dans tout pays, il faut vouloir être soi-même et donner sa mesure, et ne jamais imiter personne, surtout ne jamais être engoué de personne.

1442. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Taine » pp. 305-350

C’est un esprit intéressant, d’ailleurs, plus volontaire qu’inspiré, qui se développe dans des efforts très laborieux. Seulement, ces efforts sont-ils bien dans le sens de ses facultés ?

1443. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

Effort magnanime auquel le succès n’a pas répondu27 ! […] Le plus sublime effort de la poésie est d’animer, de passionner les choses insensibles. — Il est ordinaire aux enfants de prendre dans leurs jeux les choses inanimées, et de leur parler comme à des personnes vivantes. — Les hommes du monde enfant durent être naturellement des poètes sublimes.

1444. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Le général Joubert. Extraits de sa correspondance inédite. — Étude sur sa vie, par M. Edmond Chevrier. — II » pp. 161-173

Puissent tant d’efforts héroïques nous amener la paix !

1445. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

Dans un premier recueil, la Flûte de Pan, il s’est livré à des études de poésie en quelque sorte plastique et sculpturale ; il avait demandé à la nature extérieure le sens confus de ses harmonies et de ses symboles : aujourd’hui, sous le titre de la Lyre intime 46, il aborde le monde du cœur ; il se détache, non sans peine et sans effort, du grand Pan pour en venir à un sentiment plus distinct, plus défini, qui a pour objet la personne humaine.

1446. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

Elle se compose du souvenir de tant de malheurs irréparables, de tant d’efforts inutiles, de tant d’espérances trompées !

1447. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre I. L’esprit gaulois »

Ils trouvent à l’instant et sans effort l’expression juste, et atteignent du premier coup l’objet en lui-même, sans s’empêtrer dans le magnifique manteau des métaphores, sans être troublés par l’afflux trop grand des émotions.

1448. (1861) La Fontaine et ses fables « Première partie — Chapitre III. L’écrivain »

Ensuite il se guinda de tout son effort pour composer une bonne fiction mythologique à l’éloge de Vaux ; il expliquait sa fiction dans une préface, tout au long, avec des précautions qui auraient fait honneur aux pédagogues Bossu et Rapin.

1449. (1892) Boileau « Chapitre III. La critique de Boileau. La polémique des « Satires » » pp. 73-88

Et notamment si tout l’effort de la critique depuis Scaliger tendait à fonder en raison le culte, et l’imitation des anciens, le vrai collaborateur et précurseur de Boileau, celui qui est comme l’anneau intermédiaire de la chaîne entre Malherbe et lui, c’est Chapelain.

1450. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

Les conteurs limitent leur ambition et leur effort : entre la bouffonnerie épique, l’universalité scientifique de Rabelais, et la gauloiserie satirique sans portée des anciens couleurs français, ils déterminent une voie moyenne : Noël du Fail205, surtout, mêle le réalisme pittoresque de la description des mœurs à la satire particulière des divers caractères de l’homme et des divers états de la vie.

1451. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre III. Le naturalisme, 1850-1890 — Chapitre I. Publicistes et orateurs »

Ce mouvement de réaction contre le romantisme, malgré l’incompatibilité théorique des formules d’art, fut en fait un effort souvent impuissant pour échapper au romantisme, qui contenait en sa vaste confusion tous les éléments dont la nouvelle école allait s’emparer pour le détruire et le nier : elle eut beau faire, elle mit quelque chose de lui dans presque tous ses chefs-d’œuvre.

/ 2207