Que ce soient les femmes de telle société, de telle époque ou de telle autre, dont on s’occupe et dont on jase ; que ce soient les femmes de l’Antiquité ou du Moyen Âge, de la Renaissance ou des temps modernes, de la Régence ou de la Révolution, peu importe !
Nous n’aurions eu que la grisaille sans profondeur de Voltaire, mais la clef de ces hiéroglyphes d’étiquette, de ce monde olympien de Versailles, nous ne l’aurions point eue sans Saint-Simon, et ce monde, incompréhensible à l’esprit moderne, fût resté éternellement une lettre morte pour nos descendants !
Il est biblique, protestant, puritain, prédicateur comme les Caméroniens d’Old Mortality de Walter Scott, et, par-dessus le marché, universitaire, — universitaire anglais, — barbouillé de mythologie, bourré de souvenirs classiques, roulé dans les loques pédantesques que nous trouvons dans les plus modernes et qui traînaillent encore, en Angleterre, dans leurs plus beaux discours de Parlement.
Grâce à Fréron et à Grimm, l’un dans son Année littéraire, l’autre dans sa Correspondance, le journalisme était né en littérature ; mais pour qu’il devînt le journalisme politique, le journalisme tel que le conçoit et l’a réalisé l’esprit moderne, il fallait que la Révolution éclatât.
Il n’a pas laissé éteindre le feu sacré… Chevaleresque, en ces temps modernes et corrompus, ce chevalier de l’amour dans le mariage a, comme les Chevaliers du Moyen-âge, fait une veillée d’armes, mais la sienne a duré toute sa vie… Cœur aussi mâle qu’il était un esprit robuste, il a aimé comme il a pensé.
Les préoccupations modernes et ce que j’ose appeler la fausse indulgence de ce temps, cette espèce d’étendue qui peut voir tout, mais qui ne doit pas accepter tout, ont, sinon fêlé, au moins rayé cette glace de Venise dans laquelle devrait nous apparaître Madame de Créqui, cette femme qui avait mis à tremper un esprit à la La Rochefoucauld dans les eaux attendrissantes et vivifiantes des pensées chrétiennes, probablement pour qu’il ne se pétrifiât pas de douleur, de misanthropie et de mépris !
Livre grave, qui se fronce et se donne un mal terrible pour être profond ; illisible d’ailleurs, quand on ne connaît pas le chinois de la philosophie moderne, et qui, pour cette raison, mériterait d’être traduit !
Pitra, un moine de nos jours, un Mabillon moderne aussi savant que le Mabillon ancien, mais avec la poésie en sus !
Ou, comme tant de modernes, n’est-il que de cette philosophie qui est sortie du protestantisme ?
III Mais, quoiqu’ils soient moins originaux, moins grandiosement profonds et moins étonnants que ce Centaure, qui n’est ni antique ni moderne, mais quelque chose de tout à fait à part de toutes les productions littéraires connues, et même pour cette raison-là, les autres fragments, et dans ces fragments, par exemple, les paysages, seront-ils plus goûtés du public des livres que Le Centaure, et sera-ce par eux que Guérin fera sa gloire, qui, d’ailleurs, ne sera jamais populaire ?
— le sol crevassé de ce temps ; enivré par les sciences modernes qui l’ont frappé de leurs vertiges ; optimiste furieux qui mord l’histoire du passé comme un tigre, — du passé dont, malgré la noblesse de son espèce, il s’abaisse à être le chacal, — orgueilleux comme Nabuchodonosor lui-même, ce petit !
Il a la force du Verbe moderne.
Mais ce qui ne l’est point, ce fut son génie, son génie tout en âme, le plus puissamment humain et le plus puissamment moderne, — le plus nous tous, enfin, qui ait assurément jamais existé !
J’ai eu l’honneur de connaître le poète d’Éloa et de Moïse, et je dois dire que jamais je n’ai pu oublier un moment, quand je l’ai rencontré, que j’avais affaire à la plus suave poésie des temps modernes.
Sèche d’ailleurs, creuse comme une écorce de sureau vidée par le couteau d’un enfant, cette femme, qui devrait, pour être grande, avoir un cœur qu’elle tiendrait sous elle et qu’elle sacrifierait à la gloire et à la pensée des aïeux, n’est que la dernière venue de tous les livres modernes, qui nous ont donné mieux que ce carton-pâte, depuis Flora Mac Ivor, cousant le suaire de son frère, dans Walter Scott, jusqu’à la Mathilde de la Môle, du roman de Beyle, et la Laurence de Cinq-Cygne, de Balzac.
Hector Malot tout ce qui appartient à notre époque et ce qui passera avec elle, toutes les choses qui sont le domaine commun pour qui plante sa plume dans un sujet moderne, et les lectures contemporaines et la langue générale des romans actuels, que resterait-il à ce communiste littéraire qui vit sur l’apport social bien plus que sur son propre talent ?
Bataille, qui manque ici à son tempérament pour n’écouter que la voix d’un esprit faussé par les livres et les idées modernes, fait la galeuse de son roman.
Quelle apparence en effet qu’un moderne ait tiré de son propre fonds des choses aussi peu subtiles ? […] En quoi a-t-il été le précurseur et, si je puis dire, le héraut de la poésie moderne ? […] Au lieu de dresser, à propos « des influences qu’il a subies », un catalogue de tous les critiques anciens et modernes, ne valait-il pas mieux se borner, ne prendre que Lessing, Hamann et Rousseau, qui tous trois ont agi si fortement sur lui ? […] C’est le grand intérêt de l’histoire moderne de nous montrer cette solidarité chaque jour plus forte et plus complète ; depuis les guerres de la Réforme et du système d’équilibre jusqu’à la guerre actuelle, l’Europe va s’étendant et se concentrant sans cesse. […] Il coule à pleins bords dans les plus belles pages de la poésie moderne.
Le déterministe qui estimait illusoire toute morale transcendante a évalué « l’apport du christianisme dans nos sociétés modernes ». […] Qu’y a-t-il « sous les feuillets d’un poème moderne ? […] Sur le poète moderne, nous consulterons Balzac et les aquarelles d’Eugène Lami. […] Et, du coup, quelques modernes formules de la vie se trouvent condamnées. […] Paul Guigou, l’auteur de la belle préface de ses Reliques, raconte que sa foi s’éteignit « au souffle de la science moderne ».
— écrit Michelet, en 1866, — Voltaire, dans ses Lettres anglaises a dit la grande parole, le moderne Symbole ; le but de l’homme est l’action » [Cf. […] On résumera ces observations d’un seul mot, en disant que, d’individualiste qu’elle avait été avec les romantiques, et d’impersonnelle avec les naturalistes, la littérature française moderne, considérée dans son ensemble, est redevenue sociale. […] Gautier, dans son Histoire du romantisme] a heureusement résumée en disant : — qu’il « a restauré la cathédrale gothique » ; — « rouvert la grande nature fermée » ; — et « inventé la mélancolie moderne ». […] II, 1845 ; — Gustave Planche, dans la Revue des Deux Mondes, juin 1851, novembre 1859 ; — Cuvillier-Fleury, Dernières études littéraires, 1859 ; — Victor de Laprade, Le Sentiment de la nature chez les modernes, 1868 ; Eugène Pelletan, Lamartine, sa vie et ses œuvres, Paris, 1869 ; — Ch. de Mazade, Lamartine, sa vie littéraire et politique, Paris, 1870 ; — Émile Ollivier, Lamartine, Paris, 1874 ; — Ernest Legouvé, Soixante ans de souvenirs, Paris, 1876 ; — Ch. […] Origines populaires de Michelet ; — ses commencements laborieux ; — ses débuts littéraires : la traduction des Œuvres de Vico et le Précis d’histoire moderne, 1827. — Les premiers volumes de l’Histoire de France, 1833-1844 [des origines jusqu’à la Renaissance] ; — et s’il y faut voir, avec quelques-uns, le chef-d’œuvre de Michelet ?
Par rime mauvaise je veux dire, pour illustrer immédiatement mes raisons, des horreurs comme celles-ci qui ne sont pas plus « pour » l’oreille (malgré le Voltaire déjà qualifié) que « pour » l’œil : falot et tableau, vert et pivert, tant d’autres dont la seule pensée me fait rougir, et que pourtant vous retrouverez dans maints des plus estimables modernes. […] Leconte de Lisle, historien et philosophe, un hommage affectueux, cordial et sincère à ce Théodore de Banville qui compte pourtant dans le rhythme de la vie absolue des fiers et désintéressés livrer de vers de cette époque décisive, après Coppée, exquis, et Sully-Prudhomme, noble témoin, salués, Jules Tellier aborde enfin les Modernes. […] Je sais, comme la majorité des gens un peu pensifs et dégagés de l’immédiat, ce que ces grandes manifestations modernes couvrent et parfois cachent de vilain et de mesquin. […] C’est, en passant, une chose à retenir que l’effort des édificateurs de chaque réceptacle d’exposition à créer quelque chose de tout à fait moderne et d’aussi bien que possible, deux conditions dures à assortir ; car notre modernité n’est guère bien dans le sens de l’esthétique comme dans les autres sens. […] Et il revient sur « l’irrésistible attrait de gaieté et d’enchantement » dû aux « tonalités claires, ici et là épandues », inspirées par tout l’Orient, par tous « les peuples du Levant, anciens ou modernes, artistes par instinct et non par éducation », remarque-t-il excellemment.
Le chevalier sait bien l’antiquité latine et grecque ; il en parle très-volontiers, d’une manière qui nous paraît bien d’abord un peu étrange, car il l’accommode, bon gré mal gré, à ses façons modernes ; pourtant il y a de quoi profiter à l’entendre. […] Cela est encore vrai, même des modernes ; les vrais épicuriens, ceux qui sont allés une fois au fond, m’ont bien l’air de vivre tels jusqu’au bout et de mourir tels, sauf les convenances. […] Lettre du 24 novembre 1679. — Mais, à propos de Mme de Sévigné et de ses rigueurs, je m’aperçois que j’ai omis de dire, sur la foi des meilleurs biographes modernes, que le chevalier de Méré en avait été autrefois amoureux ; c’est que je n’en crois rien, et je soupçonne qu’il y a eu ici quelque méprise.
Vous connaissez de nom et de génie Mozart, l’ange de la musique moderne, le Raphaël de la mélodie, l’enfant surnaturel, le jeune homme fauché dans sa fleur, mais après avoir exhalé dans cette fleur plus de chant céleste de son âme musicale qu’aucun chérubin mortel n’en répandit jamais au pied du trône de Dieu. […] Quant au plaisir, aux langueurs, aux rêveries, à l’amour, l’institution moderne du drame musical ou de l’opéra composé par des musiciens de génie, tels que l’Italie et l’Allemagne italienne en donnent au monde de nos jours, et chanté par les Malibran, les hommes n’inventèrent jamais une effémination et une corruption plus délicieuses, mais plus dangereuses, de la virilité des âmes. […] Le génie aime ces petites capitales recueillies, où l’âme ne s’évapore pas dans la foule et dans le bruit comme dans les Babels de l’industrie moderne.
IV Quant à Aristote, nous connaissons assez de son histoire pour vous la redire avec les certitudes et les détails que la distance du temps et des lieux et la célébrité de l’homme ont laissés, de traditions en traditions, rayonner autour de ce grand nom, héritage de deux mondes, le monde ancien et le monde scolastique moderne. […] XV Nous allons voir en quoi consistent aujourd’hui les reliques de ce puissant génie qui attache sur sa trace, quatre siècles avant le christianisme, les plus fortes et les plus sages pensées du monde antique et moderne. […] Qu’est-ce, à côté de cette sublime réalité, que les sophismes antiques et modernes de Platon ou de J.
L’Allemagne, l’Angleterre, la France, depuis Milton, Voltaire et Klopstock (Paradis perdu, Henriade, Messiade) ne l’égalent pas, si ce n’est en élégance de style moderne, mais comme force, grâce, naïveté, héroïsme et originalité des aventures, les Nibelungen selon moi dépassent tout. […] XXXI Quant aux mœurs des deux peuples combattant par leurs chevaliers, elles sont barbares dans le combat et chrétiennes dans les négociations, et après la victoire, l’honneur que nous croyons une fleur de vertu moderne, y dépasse presque les habitudes des armées de nos temps. […] Kant, le plus penseur et le plus sublime des philosophes, a scruté le monde et y a retrouvé Dieu dans la raison pure ; comme un Brahmane des derniers temps, Wieland, a rajeuni les traditions obscures et mêlé aux dogmes des Indes les légendes de la Grèce ; Schiller a tenté au théâtre et dans l’histoire de renouveler à Weymar les triomphes d’Athènes ; Gœthe enfin, génie plus fort, plus haut, plus complet, a retrempé Faust à la fois dans l’observation et dans le surnaturel, il a expliqué le monde des vivants par le monde des morts ; il a été le Volkêr des temps modernes, le Ménestrel des grands combats de notre ère, il a laissé en mourant l’Allemagne éblouie et vide comme si rien d’aussi grand ne pouvait naître de longtemps pour le remplacer.
Elle est restée un des charmes de l’Europe moderne cette langue éloquente et forte, qui suffit à tout dire, à tout comprendre, à tout garder : élégance, politesse, atticisme, urbanité, — habile à parler des choses de la guerre, ingénieuse et savante à parler des choses de l’amour ! […] Car voilà, ceci soit dit à notre louange à tous, la toute-puissance de la critique moderne, le voilà le mur de séparation qu’elle a élevé entre elle et la rigoureuse école de l’abbé Desfontaines, de Fréron et de M. de La Harpe ; elle a montré que l’admiration et la sympathie étaient au premier rang de ses droits et de ses devoirs ; elle ne s’est plus contentée, comme autrefois, de relever les erreurs, les fautes, les défauts, les impuissances, elle s’est attachée aux grâces, aux beautés, aux promesses que fait le présent à l’avenir ! Enfin la critique moderne est revenue, et vaillamment aux maîtres de l’antiquité, leur empruntant tout ce qu’elle pouvait leur prendre !
Le fils de prince qui a eu son berceau dans le palais d’une capitale moderne, le fils du mercenaire qui est né comme la pariétaire des murs d’une cité et qui n’a vu le soleil qu’entre les toits parallèles de la ville où son atelier le nourrit et le dévore, ne doivent pas même ouvrir ces poèmes d’Homère ; l’épopée de la mer, des montagnes, des matelots, des pasteurs, des laboureurs, n’est pas faite pour eux. […] C’était autrefois un château à tours, à fossés, à pont-levis ; on en voit encore les vestiges mal recouverts par les constructions modernes. […] Mais ici notre mère, retrouvant toutes les naïvetés du ménage antique restées les usages du ménage moderne dans notre vie rurale, redoubla d’intérêt dans sa voix et redoubla notre attention par la sienne.
Il voulait introduire le génie antique, le génie grec, dans la poésie française, sur des idées ou des sentiments modernes : tel fut son vœu constant, son but réfléchi ; tout l’atteste. […] L’érudition, le goût d’un Boissonade, n’y seraient pas de trop, et de plus il y aurait besoin, pour animer et dorer la scholie, de tout ce jeune amour moderne que nous avons porté à André.
Hors de là, peu de choses l’intéressent ; l’antiquité ne l’occupe guère, la société moderne ne l’attire pas. […] La Rome moderne ne remplit pas son attente ; son goût simple et pur repoussait les colifichets : « Décidément, écrivait-il, je ne suis pas fort émerveillé de Saint-Pierre, ni du pape, ni des cardinaux, ni des cérémonies de la Semaine sainte, celle de la bénédiction de Pâques exceptée. » De plus, il ne trouvait pas là assez d’agréable mêlé à l’imposant antique pour qu’on en pût faire un séjour de prédilection.
De plus, autour de lui, nombre de gens experts, vieux conseillers de famille, rompus aux affaires et dévoués au domaine, bonnes têtes et barbes grises, lui font respectueusement des remontrances quand il dépense trop ; souvent ils l’engagent dans des œuvres utiles, routes, canaux, hôtels d’invalides, écoles militaires, instituts de science, ateliers de charité, limitation de la mainmorte, tolérance des hérétiques, recul des vœux monastiques jusqu’à vingt et un ans, assemblées provinciales, et autres établissements ou réformes par lesquels un domaine féodal se transforme en un domaine moderne. Mais, féodal ou moderne, le domaine est toujours sa propriété, dont il peut abuser autant qu’user ; or qui use en toute liberté finit par abuser avec toute licence.
Cette doctrine, qui ne contredit aucune de ses doctrines chrétiennes, et qui agrandit le Créateur en agrandissant son œuvre, est une vérité vieille comme le monde, et qui ressemble à une audace, tant le monde moderne semble l’avoir oubliée. […] ……………………………………………………… ……………………………………………………… ……………………………………………………… ……………………………………………………… XXVI Mais, à la fin du volume, l’idylle se transforme en épopée, et le Pétrarque moderne devient, dans deux ou trois belles ébauches héroïques, le Dante du Forez.
Montrez-moi un historien de cette trempe dans les auteurs modernes, fût-ce Bossuet ! […] « Ensuite, dit Tacite, on pensa aux Dieux ; on voulut bien convenir de réédifier le Capitole. » XXVII Ici, avec un art de composition qui fait contraster la plus pure vertu avec la plus infâme corruption du temps, et qui repose l’esprit lassé de tant de turpitudes, Tacite fait apparaître tout à coup dans le sénat un grand citoyen, un débris de l’antiquité dans l’infamie moderne, Helvidius Priscus ; il se complaît à retracer l’homme et le discours.
Bien que M. de Chateaubriand n’eût aucune faveur pour moi, cependant, dans les Mémoires de sa vie, il me reconnaît en politique une parenté avec les grands hommes d’État, et en littérature avec les deux noms immortels de toute poésie antique et moderne, Virgile et Racine. […] Ce n’est pas un livre d’incrédulité, c’est un livre de recherches, une espèce de Montaigne moderne appliqué à de plus graves sujets.
C’est le sort, dans notre littérature, de toute imitation, et plus particulièrement de l’imitation des littératures modernes. […] Le mérite en est si grand qu’il ne saurait être diminué par les erreurs que Du Bellay mêle à ces vues et notamment par le conseil d’imiter les modernes.
Sully Prudhomme, dans son noble poème de la Justice, a condensé en un dialogue tragique l’antagonisme de ces deux voix que l’homme moderne entend retentir au fond de sa conscience ; l’une est celle de la science, implacable et sereine, qui renverse sans pitié les vieilles idoles, les croyances chères à l’enfance des peuples, les préjugés enracinés par une longue accoutumance ; l’autre est celle du cœur qui proteste, qui tantôt a peur de ce bouleversement, s’attendrit sur les choses détruites, proclame l’inutilité du savoir humain et conseille au chercheur de s’endormir dans le plaisir et l’insouciance, tantôt se révolte, taxe la science d’impie, l’accable d’invectives passionnées, l’accuse de désenchanter la vie, d’anéantir le bonheur et la vertu. […] De là dans nos poètes modernes une veine nouvelle de sensibilité.
Dès lors, la musique russe avait sa voie tracée : elle devait explorer ce vocabulaire des chansons populaires, le faire entrer dans les formes artistiques modernes et construire ainsi une musique artistique nationale. […] Si nous considérons chez maints modernes compositeurs allemands, le désordre sans bornes, le gâchis des formes, par lesquelles si souvent ils nous gâtent la joie de beaucoup de beautés isolées, nous désirerions bien voir ces pelotes enchevêtrées mises en ordre par cette forme italienne fixe ; et en effet, si elle est, avec tous ses sentiments et sensations, entièrement coordonnée et saisie d’un ferme trait en une claire et convenante mélodie, l’instantanée et simple compréhension de toute une passion sera de beaucoup plus facile, que lorsque, par mille petits commentaires, par telle ou telle autre, nuance d’harmonie, par le timbre de tel instrument ou de tel autre elle aura été cachée et à la fin tout à fait subtilisée.
Léon Dommartin, qui, sous le pseudonyme de Jean d’Ardenne, a signé plus d’un article humoristique empreint de vénération pour le génie de Wagner, envoie ses impressions à la Chronique, Enfin l’Art moderne, acquis dès l’origine aux idées de rénovation, consacre une étude complète aux représentations de Parsifal. […] Assez souvent on peut constater des essais de drame populaire en dehors de nos théâtres ordinaires ; les processions historiques, partout tant appréciées, sont un symptôme ; les mystères d’Oberammergau ont eu un retentissement énorme, c’est là le berceau de notre drame moderne, et on serait bien tenté de le vérifier en retournant à cette source ; le drame religieux que M.Friedrich Schœn fit exécuter par le peuple dans la cathédrale de Worms, tout récemment, à l’occasion du quatrième centenaire de Luther, a produit un effet immense, 2° J. van Santen Kolfk : Considérations historiques et esthétiques sur le motif de Réminiscence.
Lewes la représente « comme la masse des ondes stationnaires formées par les ondes individuelles des vibrations nerveuses. » « Les ondes stationnaires, dit-il, jouent un grand rôle dans les spéculations des physiciens modernes. […] On en peut dire presque autant de la doctrine moderne d’une force vitale ou de forces vitales ; ce n’est aussi qu’une abstraction réalisée243, un terme qui sert à voiler notre ignorance.
C’en est fait, le théâtre a trouvé un maître et la comédie moderne saura désormais à qui parler ! […] Au dénouement, il lui tend un piège bassement combiné, et plus digne d’un Scapin de l’ancien répertoire que d’un gentleman de la vie moderne.
Et ce qu’il y a de charmant dans cette fable, c’est précisément le contraste parfaitement voulu, parfaitement médité et concerté, le contraste entre la jeunesse présomptueuse qui n’accorde même pas au vieillard la liberté, la licence de travailler en quelque sorte à long terme ; et, tout au contraire, cette sorte de méditation du futur qui accompagne le vieillard dans son labeur et qui lui fait dire : Voilà des jeunes gens qui me suppriment dans leur pensée, et moi, c’est à des gens qui ne sont pas encore, c’est à mes arrière-neveux que je songe déjà Voilà une très jolie leçon de sagesse, tout à fait dans la manière d’Horace en même temps que dans la manière de Virgile, une très jolie leçon de sagesse antique avec quelque chose, je crois, de plus attendri, de plus doux, de plus mouillé de la tendresse moderne et de la tendresse, j’allais dire chrétienne, mais il ne faut pas dire chrétienne, en parlant de La Fontaine, ce serait trop une erreur, enfin d’une tendresse qui avoisine déjà le christianisme et qui en a senti quelque légère influence. […] Ces endroits, comme vous le savez, sont d’ordinaire le quartier des Flores : j’y en vis une et une Vénus, un Bacchus moderne, un consul (que fait ce consul parmi de jeunes déesses ?)
Elle dédaigne également les grands prêtres et le suffrage universel, et quoique les modernes lui dédient la philosophie de l’histoire, elle ne veut ni le culte ni la fidélité de personne ; qui pourrait lui être infidèle ? […] D’aptitude spontanée et incontestable, l’auteur des Révolutions d’Italie était un homme de forte imagination et de pénétration littéraire, et il n’est pas permis d’en douter, quand on a lu son livre d’aujourd’hui, et qu’on en a comparé les meilleures pages historiques aux quelques fragments de littérature qu’il a introduits dans son travail, car l’histoire, telle que nous autres modernes la concevons, est une véritable encyclopédie.
Après le plaisir de travailler, elle n’a rien de plus agréable que de visiter les grandes galeries, notre musée du Louvre, et d’y revoir les chefs-d’œuvre ; et si on lui parle des tableaux modernes qu’elle a chez elle et dont ses salons sont ornés : « Ici ce sont mes amis, dit-elle, mais là-bas ce sont mes admirations. » Le goût de la princesse est classique : on a remarqué que le goût des princes l’est naturellement73.
Mais l’ancien me semble avoir un grand avantage sur le moderne.
La Corse a fait, depuis, assez parler d’elle, — cette petite île, par ce qu’elle a enfanté, a, depuis, assez étonné le monde —, pour nous rendre bien indifférents sur cette question de savoir si elle faisait bien ou mal de s’adresser alors à Jean-Jacques comme à un Solon moderne ou à un Lycurgue.
J’ai souvent entendu reprocher à la critique moderne, à la mienne en particulier, de n’avoir point de théorie, d’être tout historique, tout individuelle.
Au reste, il ne s’agit pas de charger en rien Ney, le brave des braves, mais d’expliquer la suite des faux pas, des malentendus dont un ou deux, ou trois encore, eussent été réparables, mais qui, en s’ajoutant tous, en s’accumulant opiniâtrement et sans relâche jusqu’à la fin, comblèrent la mesure et firent mentir dans ses calculs les plus profonds et les plus justes le génie moderne des combats.
matière en fusion, matière toute bouillante du plus beau chant d’une moderne Iliade, s’il y avait encore des Iliades !
Victorin Fabre, battu dans le concours de 1812, et perdant la belle génisse, c’est-à-dire le prix de l’Académie, ne fit pas autrement que le vaincu de Virgile, et sortit de l’arène avec la rancune superbe du taureau blessé ; mais il ne revint pas avec la même allure, et à le voir reparaître, quelques années après, tout ralenti et tout empesé, on put lui appliquer ce vers assez imitatif d’un moderne : Taurus abit mœrens e regnis : ecce redit bos.
Remarquons toutefois qu’au xive siècle, du temps de Pétrarque et de Boccace, à cette époque de grande et sérieuse renaissance, lorsqu’il s’agissait tout ensemble de retrouver l’antiquité et de fonder le moderne avenir littéraire, le but des rapprochements était haut, varié, le moyen indispensable, et le résultat heureux, tandis qu’au xvie siècle il n’était plus question que d’une flatteuse récréation du cœur et de l’esprit, propice sans doute encore au développement de certaines imaginations tendres et malades, comme celle du Tasse, mais touchant déjà de bien près aux abus des académies pédantes, à la corruption des Guarini et des Marini.
Soumet, à un poëte des plus féconds et des plus brillants, placé aux confins de l’ancienne et de la moderne école, succédait M.
Scribe, malgré son esprit et son talent, fasse une complète illusion et qu’il semble un Shakspeare moderne : on sait à quoi s’en tenir sur cette verve fine et pétillante ; mais en espérant mieux, l’on en profite et l’on s’amuse.
. — Vous êtes singuliers, vous autres philosophes modernes ; vous blâmez les poétiques, parce que, dites-vous, elles enchaînent le génie ; et actuellement vous voudriez que la règle de l’unité de temps, pour être plausible, fût appliquée par nous avec toute la rigueur et toute l’exactitude des mathématiques.
Il les préférait hautement aux modernes. « Art et guides, disait-il, tout est dans les Champs-Elysées. » Il avait annoté presque à chaque page Platon et Plutarque, avec profit certainement, car la plupart de ses notes sont des maximes qu’on retrouve dans ses fables.
J’ai fait connaître, lorsqu’il y avait un intérêt quelconque, les éditions originales : mais, à l’ordinaire, je me suis contenté d’indiquer les meilleures, les plus modernes (quand elles sont les meilleures), et, en certains cas, les plus accessibles à tout le monde.
Malherbe sauva l’art du naufrage de Ronsard, et, tandis qu’avec Desportes la poésie retournait aux grâces étriquées de la mondanité spirituelle, Malherbe fit d’une main un peu brutale la soudure de l’art antique et de la raison moderne.
La querelle des anciens et des modernes, Marivaux et Lesage, La Chaussée, Diderot et Rousseau nous font passer de Boileau à Chateaubriand, du goût classique au romantique, sans peine, sans heurt et sans lacune.
Et pour passer du joli au grandiose, ce sonnet si connu des Conquérants n’est-il pas large comme une épopée, et n’éveille-t-il pas une vision complète de la plus grande aventure des temps modernes ?
II C’est pourtant avec le plus grand sérieux que « la bonne femme Sand » écrivait à propos des Sonnets païens : C’est l’hymne antique dans la bouche d’un moderne, c’est-à-dire l’enivrement de la matière chez un spiritualiste quand même, qu’on pourrait appeler le spiritualiste malgré lui ; car, en étreignant cette beauté physique qu’il idolâtre, le poète crie et pleure.
Quand nous voulons aujourd’hui représenter le Christ de la conscience moderne, le consolateur, le juge des temps nouveaux, que faisons-nous ?
Celui-ci rumine et digère tous les évêchés et tous les bénéfices modernes.
* * * — Un soir, le monde de la boutique se décide à faire une excursion dans la forêt de Fontainebleau, à passer quelques jours chez le père Saccaux, à Marlotte, la patrie d’élection du paysage moderne et de Murger.
Celui qui écrit ces lignes, — et qu’on lui pardonne d’expliquer ici sa pensée, laquelle a été d’ailleurs si bien comprise qu’il est presque réduit à redire aujourd’hui ce que d’autres ont déjà dit avant lui et beaucoup mieux que lui ; — celui qui écrit ces lignes avait depuis longtemps entrevu ce qu’il y a de neuf, d’extraordinaire et de profondément intéressant pour nous, peuples nés du moyen-âge, dans cette guerre des titans modernes, moins fantastique, mais aussi grandiose peut-être que la guerre des titans antiques.
Les plus célèbres rhéteurs, tant anciens que modernes, n’ont pas senti combien il importoit de la traiter.
Ni le roman intime (feu le roman intime, faudrait-il dire), ni feu le drame moderne, toujours escortés de quelques héros mystérieux sans explication et sans nom, et tout noir, n’ont jamais préoccupé la curiosité et la sagacité du lecteur, autant que l’a fait ce bel Alceste, créé tout exprès et mis au monde par Molière, quand Molière voulut dire à tous et à chacun, enfin, les plus secrètes pensées de son esprit et de son cœur.
En effet, l’ambition dans nos états modernes n’est guère que de l’avarice.
Il est vrai que quelques musiciens modernes ont cru pouvoir trouver le secret d’enseigner autrement que de vive voix, la durée que devoit avoir un air, et d’apprendre par consequent même à la posterité le mouvement dont il falloit le joüer, mais c’étoit en se servant de l’horlogerie que ces musiciens prétendoient venir à bout de leur projet.
Ainsi le mot hostis des xii Tables désigne une sorte d’existence sans nom dans nos langues modernes : c’est l’individu frappé d’une incapacité absolue d’entrer jamais dans la communion civile.
Et, de fait, donnez à la jeune fille que vous voudrez, Cosaque ou non, pour lecture et pour éducation, les Eugène Sue, les Dumas, les Michelet, les Sand et tous les propagateurs des gales modernes, vous verrez si vous n’obtenez pas identiquement les mêmes résultats moraux et intellectuels, qui brillent dans la dame cosaque en question.
Elle a, dans ses livres, l’œil baissé, la contenance pudique… quelque chose d’opiniâtrement subsistant et de ressemblant à, la décence romaine ; mais le fuseau de la Matrone est tombé dans l’encre moderne et elle l’a taché de cette encre.
Elle a de l’instruction obligatoire, la chimère moderne, assez pour être bas-bleu, et même elle se la fait pardonner, car elle n’est ni balourde, ni badaude, ni pédante, ni prétentieuse.
qui ose aujourd’hui l’histoire, a consacré à la Femme (genre et espèce), sa puissance de talent et ses travaux historiques… Elle a déjà écrit la Femme de l’Inde, la Femme de la Bible, la Femme grecque et la Femme romaine, et elle nous promet la Femme chrétienne, la Femme du moyen âge et la Femme moderne.
Nous comprenions bien que ce dernier panorama du désert, que ces dernières fantasias d’un peuple équestre et nomade, seraient un spectacle que ne verraient pas nos enfants ; mais nous nous disions aussi que toute cette poésie qui doit céder à la prose, que ces mœurs éloquentes qui seront un jour — un jour plus prochain qu’on ne croit, — remplacées par les habitudes étriquées et plates des temps modernes, auraient du moins ici leur daguerréotype ineffaçable et fidèle, et que l’image qu’elles y auraient laissée en consacrerait le souvenir.
Ce sont eux, — puisqu’il faut interroger le tombeau de la France ancienne, comme dit Tocqueville, et le tombeau de la France, c’est son histoire, — ce sont eux qui ont créé une révolution permanente forcée en oubliant ce qu’ils étaient, en donnant l’exemple des mauvaises mœurs, en altérant dans sa pureté la notion de la famille chrétienne, — le seul fondement des sociétés modernes, quels que soient leur forme et leur nom, — en nous dévêtant de nos institutions, en brisant les corporations (l’œuvre de Saint-Louis sanctionnée par les siècles), les corporations d’états, c’est-à-dire le peuple qui travaille et qui prie, et en le jetant, bohème et affamé, à la liberté vague, au hasard et à la préoccupation du jour le jour !
L’auteur a écrit dans son titre : contemporaine, quoique ce fût l’histoire de toute la littérature anglaise à toutes les époques qu’il écrivait, parce que, pour lui, le démocrate et le socialiste moderne, l’important, c’est la littérature contemporaine, qui roule le socialisme, le matérialisme, le positivisme, et toutes les menaçantes horreurs de ce temps dans ses flots !
Un homme seul, dans les temps modernes, faillit la renverser un jour… Et cet homme fut Byron, qui, de nature, devait peu se soucier d’Horace et de sa petite lampe, et de son petit atrium, et de sa petite salière de sel attique ; Byron, dont la gloire est une torche !
Qui ne devine pas que celui-là qui fait l’exception est un moderne ?
Est-ce ce caractère de malheur complet et immérité qui a déterminé Lecoy à écrire cette vie, qui n’est pas, après tout, un de ces grands sujets tentants pour un historien moderne, s’il n’a pas, comme Thierry, l’imagination sentimentale et mélancolique… Certes !
Nous pouvons nous sentir une noble jalousie pour cette gloire de la Grèce moderne qui doit exciter entre peuples une émulation généreuse, dans l’intérêt de la multiplication des chefs-d’œuvre !
Ainsi, par exemple, à toute page et presque à chaque ligne éclate et rayonne cette capacité formidable d’homme d’affaires, qui était en Voltaire à un bien autre degré que tous ses autres talents, et qui en lui, plus encore qu’en Beaumarchais, son Sosie diminué, commence de briller, comme le caractère de la Bourgeoisie moderne dans l’avenir.
Les Jacques modernes furent les Chouans, et ce fut toute sa vie un chouan, que Crétineau.
Le Kosmos, l’idole intellectuelle de ce temps, qui cache sous un nom grec la préoccupation universelle et moderne des esprits qui ont désappris les choses invisibles du ciel, a été salué par de telles acclamations qu’on éprouve quelque embarras à jeter cette goutte d’eau froide sur tous ces fronts brûlants et fumants d’enthousiasme ; le Kosmos, après tout, n’est qu’une description.
Esprit physiologiquement religieux, tourné de tendance primitive et de tempérament vers les choses de la contemplation intellectuelle, métaphysicien et presque mystique, l’auteur de Terre et Ciel n’était point, par le fait de ses facultés, destiné aux doctrines de la philosophie moderne, mais pour des raisons qu’il connaît mieux que nous, et qu’il retrouverait s’il faisait l’examen de conscience de sa pensée, il n’a pu cependant y échapper.
Est-ce la division du pouvoir en pouvoir spirituel et pouvoir temporel, qu’il dit d’ordre majeur, la grande affaire, et que le Moyen Âge a léguée au monde moderne ?
Le Kosmos, l’idole intellectuelle de ce temps, qui cache sous un nom grec la préoccupation universelle et moderne des esprits qui ont désappris les choses invisibles du ciel, a été salué par de telles acclamations qu’on éprouve quelque embarras à jeter cette goutte d’eau froide sur tous ces fronts, brûlants et fumants d’enthousiasme : le Kosmos, après tout, n’est qu’une description.
Sur cette question que le panthéisme moderne a posée et qu’à plusieurs reprises il a essayé de résoudre, M.
Renan, l’ennemi des Saints modernes, n’oserait pas soutenir que le bandeau de Sainte Térèse n’est pas vraiment une auréole.
La Paternité, qui crée la Famille, insultée maintenant et presque avilie dans une société où les mœurs et les comédies qui les réfléchissent montrent le père toujours inférieur aux enfants et éternellement bafoué par eux ; entamée, de plus, par une philosophie qui a créé l’individualisme moderne et par une révolution qui, du premier coup, enleva à la Famille le droit d’aînesse, cette Paternité a eu bientôt contre elle une effroyable et universelle conspiration, et on le conçoit, car plus une société devient irréligieuse, plus elle peut se passer de père et de Dieu !
Sa métaphysique n’était plus alors que de la cosmologie… Par ce côté, il touchait, sans le savoir, au Positivisme, le Monstre moderne qui doit dévorer, dans un temps donné, toutes les métaphysiques, parce qu’il les nie toutes et qu’il est l’Athéisme absolu.
qu’on me permette de le dire avec le respect que l’on doit au prêtre : les idées du monde moderne ont passé souvent à travers son esprit, digne de la vérité, et que la théologie — la théologie comme l’entendait saint Thomas d’Aquin — a sauvé et au besoin sauverait encore.
Les arts plastiques, qui sont la tyrannie de l’imagination et de la curiosité moderne, et qui ont pris parmi nous un développement qui tient de la rage, les arts plastiques ont profondément modifié la notion du style en le surchargeant d’ornementations et d’images, en le poussant aux reliefs et à la couleur, qui est un relief de plus… On voudrait écrire en rondes-bosses peintes, pour mieux entrer dans l’imagination.
Seulement, la rose de Provins qui couronne la Muse de Saint-Maur n’est jamais tombée où celle d’Hégésippe, le Villon moderne, s’est quelquefois salie.
En sortant de Germaine, nous sortons d’une littérature diabétique, et dans Maître Pierre nous entrons dans quelque chose de nouveau, de particulier, de moderne, qui sera peut-être demain toute la littérature de ces derniers temps.
, plus turbulente que celle de La Bruyère, — le seul coloriste et le seul pittoresque pourtant, dans le sens moderne, que le xviie siècle ait produit, car Fénelon n’est qu’une bergerie et Bossuet ce n’est pas un reflet, mais un embrasement de la Bible et des Pères, — vous n’en trouverez pas d’autres le long de cette galerie de trente-six dévotes, dont les noms choisis : Pétronille, Scholastique, Dosithée, Gorgonie, Hilarione, etc., rappellent les noms, admirablement appropriés à ses types, du grand moraliste du xviie siècle : Gnaton, Cléophile, Acis, Ménalque, Onuphre, etc., etc., noms que le génie a touchés de son phosphore et qui sont à l’état de choses inextinguibles dans nos esprits !
Tel est cet orateur célèbre, qui par ses beautés et ses défauts, a le plus grand caractère du génie, et avec lequel tous les orateurs anciens et modernes n’ont rien de commun.
Les siècles chrétiens ont fabriqué le juif moderne. […] Jean Béraud, a un caractère plus moderne encore. […] Il avait déjà dessiné des figures d’idylle moderne en marge de saint Matthieu. […] Moi, le Sage Insensé ; moi, le Moderne Antique ! […] Michel Bréal, qui prouve que la philologie moderne ne méprise pas la langue d’Albert le Grand et de sainte Hildegarde.
Mme Jane Thomsen, de visage trop moderne, à la vérité, pour jouer la tragédie antique, nous a donné une douce, aimable et attendrissante Antigone. […] À travers la pièce moderne M. […] Les rôles poétiques ou élégiaques ne lui vont pas ; elle est faite pour les rôles modernes un peu vigoureux et véhéments ; aucune de ses qualités ne lui sert dans Ophélie, et elle n’a aucune des qualités qu’il y faudrait. […] Le drame romantique est un composé de tragédie classique moderne et de drame populaire historique ; ou, bien plutôt, le drame romantique est tout simplement le drame populaire historique, se donnant, par l’emploi du vers (le plus souvent) et par le souci du style, quelque apparence d’être la tragédie classique moderne renouvelée et rajeunie, mais n’étant en son fond que le drame populaire historique plus soigné et écrit par des gens qui savaient écrire. […] Il était très précisément le confluent et la fusion du drame populaire historique et de la tragédie classique moderne.
L’homme a déjà gagné ainsi sur la nature minérale une puissance qui se révèle avec éclat dans les applications des sciences modernes, bien qu’elle paraisse n’être encore qu’à son aurore. […] Les idées de la morale moderne réprouvent ces tentatives ; je partage complètement ces idées. […] Parmi les anciens, aussi bien que parmi les modernes, des physiciens et des chimistes les plus éminents ont voulu établir les principes d’une mécanique animale et les lois d’une statique chimique des animaux. […] La science du présent est donc nécessairement au-dessus de celle du passé, et il n’y a aucune espèce de raison d’aller chercher un accroissement de la science moderne dans les connaissances des anciens. […] C’est donc là que gît réellement le problème médical, c’est la base sur laquelle la médecine scientifique moderne s’édifiera.
Ces figures naïves de l’antiquité ne font plus sourire quand on en a saisi le sens, et vos images à vous, empreintes de toute la poésie de l’art moderne, s’éclaircissent plus aisément pour laisser passer la vérité. […] Julie. — Je ne sais pas assez l’italien pour être juge d’une forme plus ou moins belle dans la langue moderne. […] Mais dans les anciens comme dans les modernes qui les ont imitées ou reproduites, ces apparitions n’ont pas le caractère purement métaphysique que Goethe leur a donné. […] Ils ont eu, sans doute, en ceci, une pensée de haute moralité ou de critique incisive ; mais cette pensée n’était pas la pensée fondamentale de leur œuvre, comme il a plu à la critique moderne de le croire. […] Il faut échouer dans la moderne arène, ou écrire pour les consommateurs d’émotions triviales, l’amusement des épiciers, les besoins de l’arrière-boutique.
Comme le théâtre moderne avec La Chaussée, le théâtre classique commence avec Hardy. […] Le théâtre du moyen âge finit, et le théâtre moderne commence : il ne passe rien du premier dans le second. […] Il se rapproche de nous ; il est tout moderne. […] Le Sage a infiniment d’esprit, un sens moderne et même contemporain du mot. […] C’est le dernier des picaresques et le premier des romanciers modernes.
Art moderne : Andre Fontainas. […] Aussi le rôle du poète symboliste consiste-t-il, en quelque sorte, à reconstituer dans l’esprit moderne une faculté perdue : le sens du mystère. […] On le sacre initiateur de toute la poésie moderne, — pour la pensée, émule de Nietzsche, — pour l’action, devancier de Marchand, — vagabond principalement et le premier des « poètes maudits ». […] C’est ainsi qu’il ne semble accorder à l’œuvre d’art qu’une valeur passagère et qu’il sacrifie au moderne l’art ancien le plus consacré […] Par l’union de si diverses élégances, Moréas arrive à une poésie très complexe, dont on a peine à démêler tous les éléments et qu’il élève parfois à la célébration des anciens mythes, et qu’ailleurs il incline à l’expression des plus modernes inquiétudes.
Le sanscrit, l’arabe, le grec, même le grec moderne et vulgaire, l’allemand, les langues romanes, l’italien comme s’il était de Florence, que n’apprit-il pas durant les vingt premières années du siècle qu’il passa sans presque rien produire et accumulant sans cesse ? […] Je ne prétends point anticiper en ce moment, ni préjuger quelques-unes des pièces de vers assez spirituelles et agréables qu’on a de lui ; mais il est certain qu’à sa sortie du collège, en cette mémorable année 1819 où Lamartine se révélait par ses premières Méditations, où Victor Hugo adolescent s’essayait déjà par des odes touchantes et pures, où André Chénier apparaissait comme un jeune moderne dans ses œuvres pour la première fois recueillies, Ampère, ardent, exalté, enthousiaste, ne rêvait que la palme et le laurier. […] Patin, esprit délicat, possédant mieux que personne l’antiquité grecque, acceptant les progrès modernes sans les devancer ; M. […] Le goût de l’Antiquité pure et le génie du passé n’étaient pas tout dans son inspiration : en approchant de l’époque impériale et en la traversant dans ses principaux règnes, il avait un stimulant puissant et un motif de zèle dans sa haine contre le régime impérial ancien ou moderne, à toutes les dates : il commença déjà à lui faire la guerre et à lui décocher des traits bien avant César et de derrière le tombeau des Scipions.
Qu’on lise le Journal d’une dame moderne, l’Ameublement de l’esprit d’une dame, et tant d’autres pièces : ce sont des dialogues transcrits ou des jugements notés au sortir d’un salon. […] Cependant le frère aux distinctions, maintenant qu’il avait mis la main à l’ouvrage, prouva par un très-bon argument que K était une lettre moderne, illégitime, inconnue aux âges savants, et qu’on ne rencontrait dans aucun ancien manuscrit. […] La religion noyée, il se tourne contre la science : car les digressions dont il coupe son conte pour contrefaire et railler les savants modernes sont attachées à son conte par le lien le plus étroit. […] Les anciens, dit-il, ont désigné les critiques, à la vérité en termes figurés et avec toute sorte de précautions craintives ; « mais ces symboles sont si transparents, qu’il est difficile de concevoir comment un lecteur de goût, doué de la perspicacité moderne, a pu les méconnaître.
* * * — La dorure moderne ressemble à ces feuilles de faux or, dont sont enveloppées les noix de bonne aventure, qu’on vous offre pour un sou dans les foires. […] Donc ce qui différencie le plus radicalement la littérature moderne de la littérature ancienne : c’est le remplacement de la généralité par la particularité. […] Au dîner, à propos d’un mot de je ne sais qui, la princesse s’emporte contre l’antiquité, la tragédie ; et déclare n’aimer, ne sentir, ne comprendre que le moderne, — et semble avoir pour tout le classique l’horreur d’un écolier pour un pensum. […] » Comme tous les hommes d’un talent moderne et vivant, il a le goût d’écouter dans la rue, sur les impériales des omnibus, et il nous conte ce dialogue entendu par lui, ce dialogue de deux ouvriers, le plus jeune gourmandant le plus vieux : « Elle se fichait de toi, cette femme !
Nous savons seulement qu’André Chénier se proposait de refaire l’œuvre de Lucrèce en empruntant le secours de la science moderne. […] Malgré sa prédilection avouée pour la poésie grecque, il s’en faut de beaucoup qu’il circonscrive les devoirs de l’imagination moderne dans l’imitation de Sophocle et d’Homère. […] Hugo et de dire qu’Aristophane est aussi hardi que Rabelais et Shakespeare, qu’il a poussé la moquerie aussi loin que la satire et la comédie modernes, M. […] Aujourd’hui l’étude des langues modernes jouit dans le monde d’une popularité souveraine. […] Quant aux hommes familiarisés depuis longtemps avec l’antiquité aussi bien qu’avec la littérature moderne, ils n’ont pu être abusés un seul instant.
C’est en prose que les cantinières modernes parlent du régiment. […] Je pense beaucoup de mal de l’éducation moderne et de toute éducation prolongée. […] Mais quand Mary Léopold-Lacour cite en une même phrase Taine, de Puibusque, Mérimée et je ne sais qui encore ; quand elle appelle Gœthe à son aide pour nous apprendre que les domestiques ne sont point parfaits ; quand elle nomme nos prisons de « modernes ergastules », je suis tenté de jurer que c’est elle qui fut le condisciple de Gaston Deschamps. […] « Il est évident que Mme Jousselin la reine de la philosophie moderne, dont l’école a bouleversé tant de cerveaux, a montré dans ses Planètes rocheuses, les Erreurs de la Vie, pour ne pas dire plus, autant d’imagination qu’Homère, Michel-Ange, Géricault, Cuvier, Linné, Geoffroy Saint-Hilaire et Newton ». […] Mais Mme d’Uzès est la plus moderne des grandes dames : grande dame par la syntaxe, jolie et souriante et poudrée, moderne par le vocabulaire.
Leibniz d’abord, et puis Lamennais, Lessing, puis Herder expliqué par Quinet, Pierre Leroux, Jean Reynaud enfin, voilà les principaux maîtres qui l’empêchèrent, par des secours successifs, de trop flotter dans sa route à travers les diverses tentatives de la philosophie moderne. […] Balzac et les romanciers modernes concevront autrement les paysans et les peindront avec une âpreté dure, même féroce, de pinceau ; ne sera-ce pas une exagération dans un autre sens ? […] Ce sont des mœurs nouvelles qui ont amené le roman à prendre une si grande place dans la vie moderne. […] Ce qui a fait la royauté littéraire du roman, c’est en grande partie l’ennui moderne, cette maladie que les générations des autres siècles, moins excitées et plus croyantes, n’ont pas connue au même degré que nous ; c’est l’ennui, ce vide absolu de l’esprit et du cœur, qui est un trait irrécusable des hommes de notre temps. […] Le roman semble s’adapter de lui-même à ces intervalles inoccupés de la vie moderne ; il remplit les repos de l’action ou des affaires, où l’homme, même le plus ordinaire, sent en lui je ne sais quelle vague lassitude ou quelle morne inquiétude qui ressemble à un besoin de penser.
Il ne ressemblait pas du tout à ce que le malheur des temps a fait de l’artiste moderne : il n’avait pas pour lui-même cette prédilection passionnée qui caractérise nos contemporains, lesquels, d’habitude, ne se gaspillent pas. […] Je crois que les lois du mariage, du divorce et de l’adultère modernes ont toutes été préconisées d’abord sur le théâtre et, de coutume, avec gaieté. […] Certes, il est un sculpteur très moderne, épris de son indépendance et qui a secoué le souvenir des écoles. […] Métaphysique, psychologie, sociologie, morale, philosophie des sciences, philosophie de l’histoire, philosophie religieuse, esthétique, histoire de la philosophie : tels sont les chapitres de ce résumé de la pensée moderne. […] Ce reproche, où il y a un peu d’ingratitude, s’adresserait justement à maintes mélodies modernes.
Quelques parties aussi en sont consacrées à l’art, à des détails de la vie romaine moderne, mais c’est le Vatican, c’est le Pape, sa politique, l’avenir de la papauté et de notre religion qui en sont le véritable et sévère sujet. […] Je passe sur bien des points d’une conversation de haut intérêt et j’arrive au passage relatif aux opinions du grand philosophe sur nos écrivains modernes : « Après le repas, Tolstoï avise sur un guéridon un périodique français. […] Mais j’insisterai sur la partie moderne, la première du livre, où je trouve des pièces exquises de forme et qu’eût pu signer A. […] Il y a bien encore un peu de tout cela dans la chanson moderne, mais le naturalisme lui a donné une bien autre forme ! […] Espagne Voici, sur la péninsule, une note toute moderne ; elle nous est donnée par M.
Et même son fantôme apparaît dans le décor, plus moderne, des réunions électorales. […] Homme d’État essentiellement moderne, l’Empereur connaît la toute-puissance de l’opinion publique. […] Par trois ponts jetés à la lutte sur le Niémen, la plus belle et la plus nombreuse des armées modernes faisait majestueusement son entrée sur le territoire russe, sous les yeux du grand Napoléon. […] Cet interviewer, véritablement représentatif, symbolisait à merveille le Japon moderne. […] Nous voulons conformer notre religion aux directions générales de la civilisation moderne.
C’est à Bologne qu’il chercha, avec l’instinct du génie, le sujet d’une épopée moderne égale aux grandes épopées nationales d’Homère et de Virgile, et qu’il trouva ce sujet dans les croisades. […] Sur la foi d’un vers de Boileau, le seul poème épique moderne digne de ce nom passa pendant deux siècles, en France, pour une fausse dorure sur un vil métal.
À l’exception de la virile Sapho, dont cinq ou six vers attestent l’énergie poétique, aucune femme, dans aucune langue antique ou moderne, n’a laissé un seul fragment de ces vers que les siècles se transmettent en les répétant comme un monument du sentiment ou de la pensée humaine. […] Aristocratie et France moderne sont deux mots qui se nient l’un à l’autre.
L’histoire des peuples modernes est sèche et petite, sans que les peuples soient plus heureux. » « Avant la fin du siècle, il a pourtant paru cet homme dont la force sait détruire, et dont la sagesse sait fonder ! […] On commença par dépouiller les autels ; on défendit ensuite aux fidèles d’enseigner et d’étudier les Lettres… Les sophistes dont Julien était environné se déchaînèrent contre le christianisme. » Dans les temps modernes, au lendemain de Bossuet, « tandis que l’Église triomphait encore, déjà Voltaire faisait renaître la persécution de Julien.
Et puis c’était pour la première fois que la courtisane moderne nous était montrée sur la scène, avec ses raffinements et ses élégances, son accent parisien et son air de race. […] Et puis la vie circule dans tout cela, une vie mondaine et moderne, rapide et fébrile, aiguisée par le tact social et par une merveilleuse faculté d’ajuster et de tirer l’épigramme.
Cet inquiétant rire de l’art s’appelle, dans l’antiquité Aristophane, et dans les temps modernes Rabelais. […] Exemple à plus d’une nation moderne.
C’est ainsi, par exemple, que l’éducation d’un géomètre de l’antiquité consistait simplement dans l’étude successive du très petit nombre de traités originaux produits jusqu’alors sur les diverses parties de la géométrie, ce qui se réduisait essentiellement aux écrits d’Archimède et d’Apollonius ; tandis qu’au contraire, un géomètre moderne a communément terminé son éducation, sans avoir lu un seul ouvrage original, excepté relativement aux découvertes les plus récentes, qu’on ne peut connaître que par ce moyen. […] De même, relativement aux phénomènes Sociaux, qui sont encore plus compliqués, ne serait-ce point avoir fait un grand pas vers le retour des sociétés modernes à un état vraiment normal, que d’avoir reconnu la nécessité logique de ne procéder à l’étude de ces phénomènes, qu’après avoir dressé successivement l’organe intellectuel par l’examen philosophique approfondi de tous les phénomènes antérieurs ?
Taine, était un esprit essentiellement moderne. […] Taine, qui s’était donné pour tâche de connaître les origines de la France moderne, plongea dans cette boue et ce sang et dit sans sourciller ce qu’il y avait vu.
Je ne prétends pas ici traiter la question dans son étendue, ni même l’effleurer, n’étant pas de ceux qui se plaisent à soulever de telles discussions rétrospectives, et je n’ai pas oublié d’ailleurs qu’à défaut d’un gouvernement alors selon nos vœux, il y a eu pour les esprits des saisons bien brillantes : mais ce qu’il faut bien dire quand on vient de parcourir le tableau fidèle de cette première Restauration, c’est que je ne crois pas qu’il se puisse accumuler en moins de temps plus de fautes, de maladresses, d’inexpériences, d’offenses choquantes à la raison, à l’instinct, aux intérêts d’un pays, ni qu’on puisse mieux réussir (quand on y aurait visé) à établir dans les esprits, au point de départ, la prévention de l’incorrigibilité finale des légitimités caduques et déchues, de leur incompatibilité radicale avec les modernes éléments de la société, et de leur impuissance, une fois déracinées, à se réimplanter et à renaître.
Les Anciens dans leurs comparaisons excellaient à cette généreuse liberté des détails ; et si les modernes, par suite de l’esprit croissant d’analyse, ont dû se ranger à plus de précision, il ne faudrait jamais que cela devînt d’une rigueur mécanique appliquée aux choses de la pensée.
M. de Musset est, de nos jeunes auteurs modernes, celui duquel on tirerait peut-être le plus grand nombre de vives et saillantes épigraphes, c’est-à-dire de pensées concises, colorées et comme inscrites sur un caillou blanc.
Rien de moins poétique, je vous assure, rien de moins littéraire dans le sens moderne du mot, et j’ajouterai presque comme une conséquence immédiate, rien de plus véritablement humble et de plus sincère.
. — Telle est cette race, la plus attique des modernes, moins poétique que l’ancienne, mais aussi fine, d’un esprit exquis plutôt que grand, douée plutôt de goût que de génie, sensuelle, mais sans grossièreté ni fougue, point morale, mais sociable et douce, point réfléchie, mais capable d’atteindre les idées, toutes les idées, et les plus hautes, à travers le badinage et la gaieté.
Son roman est une pastorale de courtisans modernes habillés à la grecque, occupés à disserter longuement, à rire froidement et à sourire mignardement, Psyché était trop déesse pour être à sa place entre les mains de La Fontaine ; il n’ose être familier avec elle ; quant à être grave et respectueux, c’est ce qu’on ne lui demandera jamais.
Sera-ce cette petite Macédoine moderne, qu’on appelle le Piémont, auquel vous livrez si aveuglément aujourd’hui l’Italie ; le Piémont, puissance radicalement disproportionnée à son ambition ; monarchie de complaisance, à qui vous faites un rôle plus grand que sa taille dans le drame géographique de l’Europe ; puissance trop faible pour constituer l’Italie et pour la défendre, si vous consentez à lui annexer monarchiquement toute cette péninsule ; puissance trop forte, si vous la laissez former contre vous un bloc de trente millions d’habitants sur votre frontière du midi et de l’est ; excroissance ou chimérique ou périlleuse qui change complétement la situation défensive de la France en changeant la géographie des puissances contiguës ?
D’assez bonne maison pour ne pas s’inquiéter trop de sa fortune, aventureux et aventurier, il n’a l’âme ni féodale ni moderne : sans foi chevaleresque, et sans patriotique affection, il court le monde, pour sa fortune, mais surtout pour voir, curieux admirateur de tous les égoïsmes qui se déploient avec force ou avec grâce.
Les sujets se renouvellent : l’histoire de France, les histoires modernes s’emparent de la scène ; et ces sujets ne se contentent pas d’un vague décor sans caractère ; ils amènent infailliblement le pittoresque exact, les essais de restitution historique dans la composition littéraire et dans la représentation théâtrale.
La société et la littérature, depuis la querelle des anciens et des modernes, s’étaient désintéressées de l’antiquité.
En dépit des critiques à l’ancienne mode, qui, de théorie ou de pratique, nient la possibilité d’une étude scientifique, c’est-à-dire exacte et patiente, de la littérature, il est incontestable qu’en ces vingt ou trente dernières années, même pour les quatre siècles modernes, qui sont comme le champ de bataille de tous les dogmatismes ou la foire de toutes les fantaisies, la masse de la connaissance solide s’est considérablement accrue : et cela dans deux directions.
Évidemment, il y a là une inégalité, une injustice, un fatum… On peut différer de sentiment sur la poésie de M. de Banville et sur la nature de ses inspirations ; mais ce qu’on ne peut méconnaître, dès la première lecture, c’est que l’effort est complet, et qu’aucune négligence, aucune transaction ne s’est interposée entre le poète et son but… Des deux grands principes posés au commencement de ce siècle, la recherche du sentiment moderne et le rajeunissement de la langue, M.
Théodore de Banville, je rappellerai ce que je disais il y a un an, à propos de ses Odelettes : « Des deux grands principes posés au commencement de ce siècle, la recherche du sentiment moderne et le rajeunissement de la langue poétique, M. de Banville a retenu le second… » Dans ma pensée, je retenais le premier pour M.
Au contraire, les poèmes Védiques et Brahmaniques qui eurent lieu peu après, entremêlés de superbes paysages des îles et de tableaux d’animaux : Les Éléphants, le Condor, et cette terrible eau-forte, les Chiens, révélèrent un poète épris du néant par dégoût de la vie moderne ; ce qui n’empêcha pas le maître de donner bientôt toute sa mesure dans ce colossal livre des Poèmes barbares, études d’une couleur inouïe sur le Bas-Empire et le moyen âge.
Les nations modernes ressemblent aux héros, écrasés par leur armure, du tombeau de Maximilien à Innsbruck, corps rachitiques sous des mailles de fer.
L’éducation théologique du clergé moderne, quoique très sèche, ne peut donner aucune idée de cela ; car la Renaissance a introduit dans tous nos enseignements, même les plus rebelles, une part de belles-lettres et de bonne méthode, qui fait que la scolastique a pris plus ou moins une teinte d’humanités.
Je sortis de sa maison aussi indigné qu’attendri et déplorant le sort de ces belles contrées à qui la nature n’a prodigué ses dons que pour en faire la proie des barbares publicains. » On sait, après cela, et de science certaine, l’une des causes qui firent de Rousseau un ancêtre du socialisme moderne.
Après avoir indiqué ce qu’il doit aux travaux de ses modernes compatriotes, physiologistes ou psychologistes, il ajoute qu’il renvoie aussi le lecteur à l’école contemporaine de psychologie allemande, et en particulier à celle qui est issue de Herbart.
Fréron, la Beaumelle & Clément, l’indignation des Défenseurs du goût moderne ; comme de certaines Epigrammes applaudies dans des Cercles où jamais on n’a ri, & qui n’étoient pas non plus propres à faire rire*.
Je demande pardon d’insister sur ces nuances, mais les anciens, nos maîtres en tout, et particulièrement en éloquence, y apportaient une minutieuse attention, et un grand orateur moderne a dit : « On a toujours la voix de son esprit. » Un esprit clair, net, ferme, généreux, un peu dédaigneux, marque tout cela dans sa voix.
On y montrait comment l’idée chrétienne, en prêchant le renoncement à la vie immédiate, le détachement des biens terrestres, la fraternité, l’égalité entre les hommes et le mépris du savoir, en modérant par cette doctrine absolue, sans la réduire toutefois, l’énergie excessive du monde, barbare, qui sans ce frein ne fût pas parvenue à se coordonner, a rendu possible l’organisation des sociétés modernes que l’on voit fondées sur le principe de hiérarchie, qui sanctionnent le droit de propriété, qui, par l’accroissement du savoir, tendent à l’accroissement du bien-être, qui, sur tous les points et dans toutes leurs conclusions, contredisent et renient le principe chrétien, ce principe chrétien qui aida à les fonder et qui, développé avec outrance, aboutirait à les supprimer.
Mais, nous voici naturellement amenés au centre historique de notre sujet, à la récente crise qui mit comme en présence, toutes les tendances toutes les formes, toutes les forces de nos lettres modernes, et cela à l’époque où précisément, par une coïncidence merveilleuse tandis que sur la poésie le formisme régnait, dans le domaine du roman trônait l’empirisme à son apogée.
Broussais et ses modernes disciples ont souvent recours à une échappatoire qui leur réussit assez bien auprès des esprits peu réfléchis.
Un auteur moderne n’eût pas manqué de le faire se jeter de préférence au cou du frère le plus coupable, afin que son héros fût un vrai personnage de tragédie.
Mais voici ce qu’a fait le Poussin ; il a tâché d’ennoblir les caractères ; il s’est assujetti selon les convenances de l’âge, aux proportions de l’antique ; il a fondu avec un tel art la bible avec le paganisme, les dieux de la fable antique avec les personnages de la mythologie moderne, qu’il n’y a que les yeux savans et expérimentés qui s’en aperçoivent, et que le reste en est satisfait.
Cet usage s’est même conservé en partie sur les théatres modernes.
de la Ninive moderne.
Par la comparaison des deux idées principales de Descartes, nous avons retourné Descartes et du père du positivisme moderne nous avons fait le tenant le plus radical du déisme et du providentialisme traditionnel.
Après les classiques, venons aux modernes.
Or, cette espèce est très moderne en France et il a fallu les transformations successives par lesquelles nous sommes passés depuis la Révolution française, pour que des femmes qui n’étaient ni bossues, ni laides, ni bréhaignes, eussent l’idée de se mettre en équation avec l’homme, et que les hommes, devenus aussi femmes qu’elles, eussent la bassesse de le souffrir.
Byron, qui fut non seulement le plus grand poëte des temps modernes, mais la poésie elle-même dans sa réalité, c’est-à-dire, un mystère, est resté un mystère comme la poésie.
Huc qui, comme Abel Rémusat, a trouvé qu’il n’y avait rien de moins immobile que l’immobile Asie, nous donne dans son livre l’histoire d’une philosophie sociale qui remua tout en Chine, dans le XIe siècle, sous la fameuse dynastie des Song, et qui a mille rapports curieux avec le Socialisme moderne de l’Occident.
« C’est à ce mouvement qu’on dut en partie la victoire… » Maintenant, qu’il déclame tant qu’il voudra contre la guerre et s’enniaise de philosophie moderne, l’homme qui a écrit cette espèce de strophe, cette phrase presque plastique, ce tableau d’un si rapide mouvement et d’une si héroïque couleur, est, avant de se donner pour un Lavater de la main, un peintre militaire indestructible qui va se trouver partout : — il n’y a qu’un moment dans l’idéal, tout à l’heure dans la réalité.
Les temps modernes ne sont pas tellement beaux pour la littérature qu’elle ne puisse supporter beaucoup de choses cruelles et qu’elle n’y soit même accoutumée ; mais la condition d’avoir Buloz pour correcteur, — non plus d’épreuves, mais de son style et de sa pensée, — lui sembla cependant trop dure pour la supporter, et on vit en très peu de temps tout ce groupe de talents que je viens de nommer se détacher de la Revue des Deux Mondes 24, s’égrener et complètement disparaître d’un recueil dont la rédaction, pour qui avait le sentiment de sa valeur propre ou de son œuvre, était une douleur, quand ce n’était pas une indignité.
Même Renan, l’ennemi des Saints modernes, n’oserait pas soutenir que le bandeau de sainte Térèse n’est pas vraiment une auréole.
Goethe, qui a joui d’un bonheur sans égal durant sa vie, ce Polycrate moderne qui aurait pu jeter toutes ses bagues — sans crainte de les perdre — aux carpes du Rhin ; Goethe, qui n’était pas né sur le trône et qui a montré pour la première fois au monde ébahi la poésie aux affaires, qui a été tout ensemble Richelieu et Corneille ; son Excellence M. de Goethe, qui avait été un beau jeune homme, puis un beau vieillard ; qui fut aimé d’amour dans sa vieillesse comme Ninon de l’Enclos dans la sienne ; qui mourut tard, en pleine gloire, en pleine puissance, que dis-je ?
D’un autre côté, vainement l’Église lui a-t-elle appris cette charité chrétienne qui a suffi au monde depuis l’Évangile, il ne s’en est pas moins laissé mordre par la brebis enragée de la Philanthropie moderne, et comme l’école tout entière du dix-huitième siècle qu’il essaie de combattre, mais qui le tient sous elle comme un vaincu, il se préoccupe, à toute page de son livre philanthropique, du droit de chaque homme vis-à-vis de la société, et il va chercher ce droit individuel dans des notions incomplètes ou fausses, pour l’exprimer dans de nuageuses définitions que le dix-huitième siècle n’aurait certes pas repoussées !
Elle est très moderne et très de son pays, cette slave, cette polonaise mêlée de russe, et elle fait beaucoup d’honneur à l’ethnographie de Gobineau, qui n’a pas voyagé et qui n’est pas diplomate pour des prunes ; car ce n’est pas une prune que cette femme-là !
Le problème de la liberté est donc né d’un malentendu : il a été pour les modernes ce que furent, pour les anciens, les sophismes de l’école d’Élée, et comme ces sophismes eux-mêmes, il a son origine dans l’illusion par laquelle on confond succession et simultanéité, durée et étendue, qualité et quantité.
Nul doute que ce génie lyrique, si cher il la Grèce, ne s’y trouve et ne puisse parfois se reconnaître sous des formes où la théorie moderne ne le chercherait guère.
Voici par exemple, une sortie inattendue et très juste à propos de l’ameublement moderne. […] Rosny décrit avec toute la conscience d’un analyste de l’école moderne. […] Paul Bourget est pour ainsi dire le chef d’école moderne, leur tort d’immobiliser la nature pour la mieux observer, de mettre l’hirondelle en cage pour l’étudier de plus près ; plus de mouvement, partant plus de vie. […] L’ensemble du roman n’est pas traité avec moins de délicatesse de touche ; chaque chose, chaque personnage y est mis à sa place, la perspective y est partout observée et ne prête pas à la confusion que la superposition des événements impose à trop de nos romans modernes, leur donnant un faux aspect de peintures japonaises ou chinoises. […] Par le temps de guerre qui court contre la prose et la poésie française écrite par les plus grands maîtres, depuis Rabelais, Racine, Voltaire, Diderot, Victor Hugo et Musset, il est intéressant de consulter les maîtres modernes sur la valeur de ce qu’on est convenu d’appeler, dans une petite église : les idées nouvelles.
Et, si l’on trouve que le pantalon si moderne, avec le chaperon, le doublet et la hallebarde, c’est drôle et ce n’est pas joli, patience ! […] Il se lance même à tutoyer cette aimable mémoire et la complimente ainsi : « Tu ne songeais guère à résoudre ni à poser les grands problèmes sociaux et philosophiques où patauge le roman moderne… » Filon ne veut pas que le roman moderne patauge ; et qui ne l’approuverait ? Il n’a pas l’air d’imaginer que le roman moderne puisse traiter les grands problèmes sociaux et philosophiques sans patauger. […] Il est moderne et l’est extrêmement. […] L’ancienne critique reproche à Ronsard de parler, en français, grec et latin : la critique moderne constate ce que fut, à l’époque de Ronsard, l’enivrement de l’Antiquité retrouvée, L’ancienne critique reproche à Rabelais tant d’obscénité : la critique moderne examine la verve sensuelle et cynique de la Renaissance.
Et il a pensé que le poète moderne doit, comme les grands seigneurs aumôniers du moyen âge, se tourner vers les foules et leur faire largesse de beauté. […] L’italien, le grec ancien et moderne, l’anglais lui étaient familiers. […] Le poète Lamartine voyait dans son poème, intitulé la Mort du Juif-Errant, le « germe de la plus belle épopée moderne ». […] Pourtant son livre d’amour est moderne par certains caractères. […] Elle fut attirée irrésistiblement par le théâtre, par le harem moderne où le peuple souverain applaudit ses sultanes.
Avec un peu d’emphase, mais non pas sans quelque vérité, n’a-t-on pas pu prétendre que la littérature allemande moderne était l’œuvre ou la création de la critique de Lessing ? […] Pour un article qu’il a mis dans le Figaro sur le Roman romanesque moderne, combien M. […] » Étant plus moderne, et même contemporain, le sujet de la pièce de M. […] Ce qui veut dire que nous pouvons bien préférer les anciens aux modernes, mais non pas exiger des modernes qu’ils ressemblent aux anciens ; et, encore bien moins, qu’ils affectent, pour mieux leur ressembler, d’ignorer tout ce qui s’est passé depuis les anciens jusqu’à eux. […] Ce sera vraiment faire une version que de traduire en français moderne, de mot à mot, une page de Joinville ou quelques couplets de la Chanson de Roland.
Et que l’on ne dise pas que nous avons la partie belle à juger ainsi d’une oreille toute moderne une langue dont nous ne connaissons ni ne pouvons connaître l’exacte prononciation. […] Plus sévères aujourd’hui, nos érudits ne réunissent plus sous ce nom que ce que nous appellerions, en langage moderne, le conte et la nouvelle en vers. […] Tout de même, dans notre moyen âge, à mesure que l’on approche des temps modernes, on constate la déchéance de la chanson de geste. […] Les derniers tenants d’une vieille querelle se lamentent et déplorent qu’à l’éternel Homère des anciens les modernes ne puissent opposer un seul poète épique ? […] Ce n’est pas tout : au xviie siècle, l’art est vraiment une religion ; j’entends — car on pourrait trouver l’expression bien moderne — que les Corneille, les Molière, les La Fontaine, les Boileau, les Racine, s’ils ne font pas de l’art « un sacerdoce », du moins ne vivent que pour l’art.
Achille reste inflexible ; il ne craint pas même d’avouer un lâche amour de la vie que les modernes éprouvent, mais qu’ils n’avouent pas ; il veut, dit-il, se retirer dans l’heureuse Phthie, royaume de son père, et s’y marier. […] Admirez en quels termes le poète distrait du champ de carnage par le charme intime d’une image domestique : « Telle qu’une femme juste, qui vit de l’œuvre de ses doigts, prenant sa balance, place d’un côté le poids et de l’autre la laine filée, afin de rapporter à ses petits enfants son modique salaire, tel le sort du combat se balance, etc., etc. » Dans quel poète moderne trouverez-vous une comparaison pareille, tout à la fois si gracieuse, si intime, si tendre, et cependant si hardie et si neuve par le lieu où elle est aventurée par le poète antique ? […] Rien n’est comparable à ce tableau en relief dans toutes les œuvres didactiques de l’antiquité et des siècles modernes.
Le premier, tout moral, c’était de démontrer historiquement au peuple, et surtout aux hommes d’État, que le crime politique, populaire, démocratique ou aristocratique, déshonorait ou perdait fatalement toutes les causes qui croyaient pouvoir se servir pour leur succès de cette arme à deux tranchants ; Que la Providence était aussi logique que la conscience ; Que les événements ne pardonnaient pas plus que Dieu l’emploi des moyens criminels, même pour les causes les plus légitimes, et qu’en commentant avec clairvoyance la Révolution française, le plus vaste et le plus confus des événements modernes, on trouverait toujours infailliblement un excès pour cause d’un revers, et un crime pour cause d’une catastrophe. […] » Charles X appelait de ce nom tous les sentiments populaires qu’on lui prêtait pour attester son attachement à la charte libérale de Louis XVIII et tout le pacte moderne de la monarchie et de la liberté. […] La dignité et la grâce se confondaient sur son beau visage ; c’était la séduction de l’aristocratie compatible avec la liberté moderne.
Mais la Muse, dans les temps modernes, n’est qu’une convention poétique ; il faut remonter jusqu’à la poésie primitive pour trouver une croyance naïve et sincère à l’inspiration d’en haut. […] La loi morale a encore ceci de particulier qu’elle parle plus volontiers à la seconde personne qu’à la première : tu dois, au lieu de je dois ; dans le cas de reproche, elle emploie quelquefois le vous au lieu de tu, parce que le vous, dans nos usages modernes, est méprisant quand il n’est pas cérémonieux. […] Les monologues tragiques, s’ils ne passent pas dans l’allure générale et dans les détails la mesure de la vraisemblance, et s’ils ne sont introduits par le poète que dans les circonstances qui les motivent dans la réalité, reproduisent un événement assez fréquent de la vie humaine ; la preuve en est que la comédie use aussi de ce procédé et que le drame moderne l’a conservé ; rien n’est donc plus légitime que son emploi.
Mais à l’une et à l’autre la réponse est facile : la théorie platonicienne des Idées a dominé toute la pensée antique, en attendant qu’elle pénétrât dans la philosophie moderne ; or, le rapport du premier principe d’Aristote au monde est celui même que Platon établit entre l’Idée et la chose. […] Quand on a ainsi reconstitué l’origine et la signification du Dieu d’Aristote, on se demande comment les modernes traitent de l’existence et de la nature de Dieu en s’embarrassant de problèmes insolubles qui ne se posent que si l’on envisage Dieu du point de vue aristotélique et si l’on consent à appeler de ce nom un être que les hommes n’ont jamais songé à invoquer. […] Que sera-ce si l’on considère que les autres mysticismes, anciens ou modernes, vont plus ou moins loin, s’arrêtent ici ou là, mais marquent tous la même direction ?
Une dynastie nouvelle faillit sortir de la convulsion terrible qui agitait la France ; mais on vit alors combien il est difficile aux nations modernes de se créer d’autres maisons souveraines que celles qui sont sorties de la conquête germanique. […] L’économie politique, uniquement préoccupée de la création de la richesse par le travail, n’a jamais compris la féodalité, laquelle était au fond tout aussi légitime que la constitution de l’armée moderne. […] Elle suppose une grande absence de réflexion égoïste, puisque, après la victoire, ceux qui ont le plus contribué à la faire remporter, je veux dire les morts, n’en jouissent pas ; elle est le contraire de ce manque d’abnégation, de cette âpreté dans la revendication des droits individuels, qui est l’esprit de notre moderne démocratie. […] La France, croyez-le, restera un pays de gens aimables, doux, honnêtes, droits, gais, superficiels, pleins de bon cœur, de faible intelligence politique ; elle conservera son administration médiocre, ses comités entêtés, ses corps routiniers, persuadée qu’ils sont les premiers du monde ; elle s’enfoncera de plus en plus dans cette voie de matérialisme, de républicanisme vulgaire vers laquelle tout le monde moderne, excepté la Prusse et la Russie, paraît se tourner.
Une autre idée vers la même époque achève aussi de se déterminer : c’est cette idée de progrès que nous avons vue se dégager, il y a quelque cinquante ans, de la querelle des anciens et des modernes ; qui depuis s’est comme enrichie de tout ce que perdait l’esprit de tradition ; et qui pénètre maintenant jusque dans le sanctuaire de la routine : on veut dire en Sorbonne. […] Un jeune écrivain, dans les notes qu’il griffonne aux marges de son exemplaire de Malherbe, décide que, « même quand nous traçons des tableaux et des caractères modernes, c’est d’Homère, de Virgile, de Plutarque, de Tacite, de Sophocle, d’Eschyle qu’il nous faut apprendre à les peindre ». […] Cleveland, 1731 ; — Le Doyen de Killerine, 1735-1740 ; — l’Histoire d’une Grecque moderne, 1740 ; — les Campagnes philosophiques ou les Mémoires de M. de Montcal, 1741 ; — et les Mémoires d’un honnête homme, 1745. […] 3º Les Œuvres. — On peut diviser les Œuvres de Jean-Jacques Rousseau en trois principaux groupes, nettement délimités par les époques mêmes de sa vie, et dont il importe assez peu que les dates précises de publication ne soient pas exactement celles de leur composition. 1734-1759. — Narcisse, 1734 ; — Le Verger des Charmettes (en vers), 1736 ; — Dissertation sur la musique moderne et Projet concernant de nouveaux signes pour la notation musicale, 1742 ; — Les Muses galantes (opéra), 1743 ; — L’Allée de Silvie (en vers), 1747 ; — L’Engagement téméraire (comédie en vers), 1747. […] 2º Le Poète ; — et que, bien que son œuvre n’ait paru qu’après sa mort, — c’est pourtant le lieu d’en parler ; — si beaucoup de ses contemporains l’ont en partie connue ; — ou imitée même, comme Millevoye ; — et si les traits essentiels en sont caractéristiques d’une renaissance du classicisme, — dont l’Histoire de l’art, de Caylus ; — la peinture de David ; — et le Voyage du jeune Anacharsis de l’abbé Barthélémy subsistent comme autant de témoins. — Rien de plus faux en conséquence que de voir dans André Chénier un « précurseur du romantisme » ; — et au contraire la juste idée que nous devons nous former de lui, — ce n’est pas seulement celle d’un Boileau ou d’un Malherbe inspirés ; — mais d’un Ronsard, — qui aurait lu Voltaire, Montesquieu, Buffon ; — Buffon surtout peut-être ; — et plus moderne enfin de deux cent cinquante ans que l’ancien.
Ils n’y pouvaient rencontrer ces traits d’une originalité presque sauvage qui nous saisissent dans les ouvrages que Shakespeare a composés sur des sujets modernes, étrangers aux habitudes actuelles de notre vie, comme aux idées classiques sur lesquelles se sont formées les habitudes de notre esprit. […] Un critique moderne ne voit qu’une froide vertu dans la conduite de cette jeune novice : il l’eût préférée plus touchée du sort de son frère, et prête à faire le sacrifice d’elle-même. […] Le roi qui lui donne son nom régnait du temps de César Auguste, selon Holinshed, ce qui n’a pas empêché Shakspeare de peupler Rome d’Italiens modernes, Iachimo, Philario, etc. […] En général, toutes les scènes entre elle et Petruchio sont divertissantes, et ne manquent pas de poésie, quoique les inventions de Petruchio aient quelquefois une espèce de grossièreté qui répugne à l’élégance de nos mœurs modernes. […] Les machinistes de notre opéra moderne seraient peut-être eux-mêmes embarrassés pour figurer la scène où le développement de l’action transporte ses personnages.
Comme elle est mal faite pour un peuple moderne ! […] Quand il peint les mœurs modernes, c’est en moraliste.
Et ainsi de tous les autres…, etc. » « Et si jamais, ajoute-t-il, un homme habile dans l’art d’exercer divers rôles venait dans notre République et voulait nous réciter ses poèmes, nous lui rendrions honneur comme à un être divin, privilégié, enchanteur ; mais nous lui dirions qu’il n’y a pas d’homme comme lui dans notre République, et, après avoir répandu des parfums sur sa tête et l’avoir couronné de fleurs, nous le proscririons de l’État. » Si cette division des facultés et des professions ne vient pas de l’Inde, par une servile imitation des castes, elle prélude à cette division moderne du travail, mutilation tout industrielle des facultés de l’homme, qui fait d’excellents ouvriers machines, et de détestables hommes pensants. […] Cependant il ne prédit pas l’éternité à sa République ; il reconnaît l’instabilité organique des choses humaines ; il ne croit pas à ce beau rêve moderne d’un progrès indéfini et continu dans la race.
Marie Stuart (reine d’Écosse) I Si un autre Homère devait renaître parmi les hommes, et si le poëte cherchait une autre Hélène pour en faire le sujet d’une épopée moderne de guerre ou de religion et d’amour, il ne pourrait la retrouver que dans Marie Stuart. […] XVIII Le secret de cette aversion croissante était un amour plus semblable à une fatalité du cœur, le destin d’une Phèdre moderne, qu’à l’égarement d’une femme et d’une reine dans un siècle de plein jour.
Il me disait qu’il cherchait toujours, qu’il venait de découvrir à peu près la tache que fait sous des arbres, une amazone de femme, et qu’il ne désespérait pas, à la longue, de trouver le caractère, le style d’un habit noir, enfin l’héroïsme de la vie moderne. […] Me voici donc, comme un chirurgien, qu’on arracherait à d’aimables curiosités, obligé de reprendre la cruelle autopsie moderne, la brutale prose, le travail qui fait mal, et dont tout mon système nerveux souffre, tout le temps que le volume se pense et s’écrit… * * * — Il s’élève, à l’heure qu’il est, une génération de jeunes liseurs de bouquins, aux yeux ne connaissant que le noir de l’imprimé, une génération de petits lettrés, sans passion, sans tempérament, les yeux fermés aux femmes, aux fleurs, aux objets d’art, à tout le beau de la nature, et qui croient qu’ils feront des livres.
Il y en avait qui étaient réformateurs en avant et par les moyens propres aux sociétés modernes, discussion, liberté d’examen, suffrage éclairé, lumières graduées et intérêt bien entendu, progrès dans l’égalité, le bien-être et la morale civile.
Le jeune abbé Vaillant essaye de cette critique moderne et d’après M.
Ainsi nous avons ici affaire à un poëte de talent et de pensée, qui ne dit non ni à la science, ni à la philosophie, ni à l’industrie, ni à la passion, ni à la sensibilité, ni à la couleur, ni à la mélodie, ni à la liberté, ni à la civilisation moderne.
On n’y releva pas assez les belles émotions lyriques du Prologue, la fervente et sérieuse Introduction aux Temps modernes, et la fin du chant de Waterloo.
Il y a lieu, en de certains moments décisifs, à cette critique auxiliaire, explicative, apologétique : c’est quand il s’agit, comme cela s’est vu dans les années de lutte de l’école poétique moderne, d’inculquer au public des formes inusitées, et de lui faire agréer, à travers quelques ornements étranges, les beautés nouvelles qu’il ne saluerait pas tout d’abord.
L’élégie de Le Brun est sèche, nerveuse, vengeresse, déjà sur le retour, savante dans le goût de Properce et de Callimaque ; l’imitation de l’antique n’en exclut pas toujours le fade et le commun moderne.
Mais ce mot de nature se détermine pour Diderot dans un sens bien moderne.
Au bout de quelques années, les Inspecteurs généraux s’aperçurent que les lycées et les collèges étaient pleins de petits Brunetières qui débitaient en tranches nos quatre siècles de littérature moderne devant des classes passives et mornes.
. — L’Art moderne (1852). — Les Beaux-Arts en Europe (1852). — Caprices et zigzags (1802). — Aria Marcelin (1852). — Gemma (1854). — Constantinople (1854). — Théâtre de poche (1855). — Le Roman de la Momie (1856). — Jettatura (1857)
On est en droit de remarquer que, parmi nos artistes modernes, Lamartine est celui qui ressemble le plus aux grands rêveurs du Nord, à un Shelley et à un Keats, par ce caractère d’une beauté poétique absolument étrangère à tout ce qui n’est pas la poésie.
Pourquoi ne puis-je dissimuler ici le vice de la Littérature moderne ?
D’un autre côté les conditions politiques et sociales modernes ne favorisent pas beaucoup l’inspiration.
Mais le développement qu’a pris la doctrine du Minokhired chez les Parsis est moderne et peut impliquer une influence étrangère.
La société n’étant plus sûre de son existence, en contracta une sorte de tremblement et ces habitudes de basse humilité, qui rendent le moyen âge si inférieur aux temps antiques et aux temps modernes 816.
Par une singularité fort étrange, c’étaient ces incrédules, niant la résurrection, la loi orale, l’existence des anges, qui étaient les vrais Juifs, ou pour mieux dire, la vieille loi dans sa simplicité ne satisfaisant plus aux besoins religieux du temps, ceux qui s’y tenaient strictement et repoussaient les inventions modernes faisaient aux dévots l’effet d’impies, à peu près comme un protestant évangélique paraît aujourd’hui un mécréant dans les pays orthodoxes.
On a quelquefois rappelé à cette occasion la retraite des Dix Mille ; mais il n’y a nul rapport ni dans les proportions, ni pour les circonstances et les résultats, entre l’héroïque et ingénieuse retraite conduite et consacrée par le génie de Xénophon, et l’immense catastrophe où s’engloutit la plus grande armée moderne.
Quelques modernes se sont fait gloire d’adopter l’opinion de ce philosophe, & ont encore chargé le portrait.
Pour être vrai, il faut reconnaître que ce n’est point par la métaphysique, c’est par la philosophie sociale et politique que le principe de la personnalité est entré dans la pensée moderne.
La musique n’entre plus pour rien dans nos tragédies modernes, excepté nos tragédies lyriques ou opéras.
Stuart Mill en donne lui-même un exemple en rappelant que, suivant les théories modernes, la production de la chaleur par le frottement, la percussion, l’action chimique, etc., dérive d’une seule et même cause.
On y voit Furetière accusé d’avoir prostitué sa sœur pour se mettre en état d’acheter la charge de procureur fiscal de l’abbaye de Saint-Germain-des-Prés ; il y est dit qu’il se déshonora dans ce poste par des prévarications et qu’il s’y fit le protecteur déclaré des filous et des filles publiques ; on y raconte comment il abusa de sa charge pour escroquer, par une manœuvre qui, selon le vocabulaire moderne, serait qualifiée de chantage, le bénéfice d’un jeune abbé ; enfin, retournant une plaisanterie de Furetière contre lui-même, l’auteur prétend que le Roman Bourgeois, — ce détestable ouvrage — a été dédié par lui au bourreau, comme au seul patron digne d’une telle œuvre.
L’auteur d’Un An dans le Sahel n’a pas l’antipathie moderne pour la guerre, et il croit à la haine implacable des races, nées ennemies, que toutes les civilisations de l’avenir seront impuissantes à empêcher.
Barre voit dans les stances des « sentiments philosophiques d’une élévation assez haute pour valoir au poète qui les fixe dans ses vers l’honneur de se voir comparer aux plus grands maîtres de la pensée moderne, d’être même appelé le Vigny du XXe siècle. » Cela est à la page 235, et Moréas seul n’en eût pas été étonné ; mais qu’en pensa en Sorbonne son répondant, M.
Enfin il avait paru au milieu de l’été, entre les chants des rossignols et la plus grande splendeur de la nature épanouie. » La timidité même de notre goût moderne découvre quel trésor d’harmonie, quel éclat d’images, quel renouvellement de la liturgie poétique cette fiction devait amener, sous les mètres nombreux et souples de la muse éolienne.
Sir William Temple, critique anglais éminent qui écrivait dans la seconde moitié du xviie siècle, voulant établir la supériorité des anciens sur les modernes, a dressé la liste des plus grands auteurs, italiens, anglais, espagnols et français, et voici ce qu’il a trouvé : en Italie, Boccace, Machiavel, Fra-Paolo Sarpi ; en Angleterre, Philip Sidney, Bacon et Selden ; en Espagne, Cervantès et Guevara ; en France, Rabelais, Voiture, La Rochefoucauld et Bussy-Rabutin. […] Les plus beaux vers de Mme Ackermann, insérés dans la Revue moderne, avaient passé inaperçus ; un article de Caro la fit connaître tout d’un coup, et elle eut depuis lors un groupe d’admirateurs fervents. […] Si l’on est effrayé du nombre de nos grands historiens modernes, de nos grands romanciers, de nos grands poètes, de nos grands orateurs, comme de l’abondance de leurs ouvrages, et si l’on dit : Nous en avons beaucoup pour être de vrais dieux, je ferai observer que le régime des morceaux choisis a commencé depuis longtemps non seulement pour eux, mais pour la plupart de leurs glorieux prédécesseurs. […] La raison raisonnable de l’insuccès final de Monod, c’est donc d’abord l’anachronisme d’un style trop étudié, plus emprunté aux livres et aux modèles classiques que moderne et vivant ; et c’est aussi l’anachronisme d’une pensée trop orthodoxe pour avoir été en parfaite harmonie avec la conscience et la raison contemporaines. […] À peine retient-on le nom de Gerbier, « le Cicéron français, le plus grand orateur des temps modernes ». — La particularité ennuyeuse de détails arides où se noient les idées générales, seule chose ayant un intérêt littéraire, explique très suffisamment la fatale destinée de l’éloquence du barreau.
Le pessimisme moderne, sous prétexte de nous ouvrir les yeux sur la vanité de ce qu’il appelle des songes, a d’abord combattu le beau partout où il se trouvait, assurant que le beau n’existait pas ; il ajoutait, invoquant comme exemple, la réalité de nos désastres nationaux, que notre imagination, nos rêves héroïques, nous avaient perdus, et que la précision de nos ennemis, qui, eux, n’étaient pas des rêveurs, leur avait rendu le triomphe facile. […] Aussi, est-ce un grand charme que le repos des gros mots (que je ne veux pas citer) dans un roman moderne. […] , que, renonçant aux personnages de convention du roman moderne, c’est dans la nature même qu’il a puisé ses nouvelles inspirations, qu’il a pris ses nouveaux modèles. […] René Maizeroy ; il a fort bien compris que la banalité et le ridicule ne s’attachent qu’aux choses de la mode, et que les caractères dont sont revêtus la plupart des personnages du roman moderne ne sont que des costumes, piquants aujourd’hui, flétris demain et bientôt tombés à la friperie. […] Dumas, et tant d’autres qu’on accuse de ne pas être modernes.
Mais le sentiment de la nature chez Hésiode ne ressemble point au sentiment de la nature des poètes modernes ou même d’un poète comme Virgile. […] Elle n’est ni mythologique, ni ancienne, ni moderne. […] Et dire que nous en rendions responsable l’esprit moderne ! […] On peut dire que notre Université moderne, tout en refondant l’œuvre des Jésuites et en la rendant plus nationale, est issue d’eux. […] Elles lui ont seulement donné le moyen d’acquérir un sens plus complet et plus aigu de la vie moderne.
Mais tout à côté sont des personnages choisis, le chevalier qui est allé à la croisade à Grenade et en Prusse, brave et courtois, « aussi doux qu’une demoiselle, et qui n’a jamais dit une vilaine parole213 » ; le pauvre et savant clerc d’Oxford ; le jeune squire, fils du chevalier, « un galant et amoureux, tout brodé comme une prairie pleine de fraîches fleurs blanches et rouges. » Il a chevauché déjà et servi vaillamment en Flandre et en Picardie, de façon à gagner la faveur de sa dame ; « il est frais comme le mois de mai, chante ou siffle toute la journée, sait bien se tenir à cheval et chevaucher de bonne grâce, faire des chansons et bien conter, jouter et danser aussi, bien pourtraire et écrire ; il est si chaudement amoureux, qu’aux heures de nuit il ne dort pas plus qu’un rossignol ; courtois de plus, modeste et serviable, et à table découpant devant son père214. » — Plus fine encore, et plus digne d’une main moderne est la figure de la prieure « madame Églantine », qui, à titre de nonne, de demoiselle, de grande dame, est façonnière et fait preuve d’un ton exquis. […] Vous trouverez là une exposition de la science hermétique, un cours sur la philosophie d’Aristote, un traité de politique, une kyrielle de légendes antiques et modernes ramassées dans les compilateurs, gâtées au passage par la pédanterie de l’école et l’ignorance du siècle. […] Âge triste et morne, amusé par des divertissements extérieurs, opprimé par une misère plate, qui souffre et craint sans consolation ni espérance, situé entre l’esprit ancien dont il n’a plus la foi vivante, et l’esprit moderne dont il n’a pas la science active.
Je les passe sous silence, parce que ce sont de trop horribles histoires ; je dirai seulement que le traître Cotzia fut tué aussi en trahison, et que peu après ses assassins le furent aussi à la bataille de Chicaris, qui est un gros village à la vue de Scander, forteresse d’Imirette, où l’armée de ce pays et celle du prince de Mingrélie se rencontrèrent ; et qu’il y a une Providence toute visible dans les histoires modernes de ces méchants peuples, en ce que Dieu y fait de rudes et brèves justices ; les assassins y sont presque toujours assassinés, et avec des circonstances qui font bien connaître que c’est Dieu qui s’en mêle, et qui emploie ainsi les uns pour punir les autres. […] Chacun écrivait en l’honneur de son système, rien par amour de la vérité ; cela ressemblait à certains voyageurs modernes, pleins de mérite d’ailleurs, mais plus pleins encore d’illusions, qui, pour honorer la démocratie, nous peignaient les États-Unis de l’Amérique comme des lieux saints, et les bazars cosmopolites de New-York comme des sanctuaires de patriarches de la vertu. […] Lisez κανδηλαναφτης, kandilanaphtis (allumeur de chandelles) ; c’est un mot grec moderne et un titre des fonctionnaires dans les grandes églises.
Il a confondu le paysan moderne, contemporain, avec le abanier du moyen âge et même avec celui du xviie siècle hâve, flétri, famélique, tel que l’a dépeint La Bruyère. […] Il est bien évident pour tout le monde, et ce n’est pas une découverte moderne, que de reconnaître qu’un organe ne vit pas par lui seul, pas plus le cerveau qu’un autre ; il est solidaire des parties qui composent l’ensemble animal et ne peut survivre à aucune d’elles. […] Nous nous garderons bien de retomber dans les vaines querelles des anciens et des modernes nous ne soutiendrons pas que les écrivains des deux siècles derniers étaient nécessairement mieux doués que ceux du nôtre.
Albalat analyse dans son livre les procédés de Bossuet, de Pascal, de Fénelon, de Montesquieu, de Rousseau, de Buffon, de quelques poètes, de quatre ou cinq prosateurs modernes. […] Il a subi toutes nos modernes langueurs de l’automne : Salut, bois couronnés d’un reste de verdure ! […] Et ces embellissements modernes ne nuisent point à la beauté naturelle du site, ni à la gravité du trésor artistique légué par les ancêtres. […] Elle n’est cependant qu’une vulgaire maison moderne, mais je pense, et ne riez pas, que la fréquentation constante du poète l’avait imprégnée de charme. […] Ne suis-je point un berger moderne ?
Au lieu de ces seigneurs fiers et calmes qui restent cavaliers en devenant hommes de cour, de ces grandes dames si simples qui semblent à la fois princesses et jeunes filles, de ce monde généreux et héroïque, élégant et orné, où resplendit encore la flamme de la Renaissance, où reluit déjà la politesse de l’âge moderne, on rencontre des courtisanes dangereuses ou provocantes, à l’air ignoble ou dur, incapables de pudeur ou de pitié536. […] Il est réaliste, non pas de parti pris, comme nos modernes, mais par nature. […] — Splendidement laide, une mauvaise croûte dans un cadre riche. — Et la dégoûtante vieille au haut bout de sa table… — Renouvelle la coutume grecque de servir une tête de mort dans les banquets. » Nos nerfs modernes ne supporteraient pas le portrait qu’elle fait de Manly, son amant ; celui-ci l’entend par surprise ; à l’instant elle se redresse, le raille en face, se déclare mariée, lui dit qu’elle garde les diamants qu’elle a reçus de lui, et le brave. « Mais, lui dit-on, par quel attrait l’aimiez-vous ? […] Parfois, sans doute, l’esprit naturel rencontre de bons jugements neufs : Temple, le premier, trouve un souffle pindarique dans le vieux chant de Regnard Lodbrog, et met le Don Quichotte au premier rang parmi les grandes œuvres de l’invention moderne ; de même encore lorsqu’il touche un sujet de sa compétence, par exemple les causes de la puissance et de la décadence des Turcs, il raisonne à merveille. […] Un jour l’entreprise tourna mal ; ayant voulu prendre part à une querelle littéraire, et réclamer la supériorité pour les anciens contre les modernes, il se crut helléniste, antiquaire, raconta les voyages de Pythagore et l’éducation d’Orphée, fit remarquer que les anciens sages de la Grèce « étaient communément d’excellents poëtes et de grands médecins ; si versés dans la philosophie naturelle, qu’ils prédisaient non-seulement les éclipses dans le ciel, mais les tremblements de terre et les tempêtes, les grandes sécheresses et les grandes pestes, l’abondance ou la rareté de telles sortes de fruits ou de grains609 », talents admirables et que nous ne possédons plus aujourd’hui.
« Il est évident que ce prince des poètes, conquérant tout comme un roi, a mis à contribution ses devanciers anciens et modernes. […] Où se trouvait sa table de travail s’appuie un secrétaire, tout à fait moderne, orné de groupes de porcelaine, et un berceau d’enfant remplit, en regard du lit, le coin jadis réservé à l’armoire sculptée sous la clef de laquelle Molière enfermait ses livres et ses manuscrits, vendus, disséminés et perdus à la mort de La Grange, à qui la Béjart les avait confiés. […] Suprême qualité, en outre : elle est essentiellement moderne, cette pièce vivante, et pour ainsi dire contemporaine. […] C’est véritablement là qu’il nous apparaît comme un précurseur, et c’est l’honneur éternel de cet homme d’avoir prononcé le premier ce grand mot d’humanité, qu’on proscrivait alors, nous l’avons montré, et qui est ou qui sera le mot d’ordre moderne. […] De pareils traits d’ailleurs, qui ouvrent de telles perspectives, ne sont pas rares dans son œuvre, et pour n’en citer qu’un, le monde moderne, épris d’égalité, ne doit-il pas regarder comme un des siens le poète qui, en plein xviie siècle, s’est vaillamment écrié : La naissance n’est rien où la vertu n’est pas ?
Quelle ode philosophique moderne égale en sérénité et en flexibilité de poésie l’ode à Délius ? […] Les discours en vers de Voltaire sont ce qui ressemble le plus, dans nos littératures modernes, aux épîtres du poète latin : une morale prodigue de préceptes merveilleusement alignés dans ces vers faciles, et des retours personnels sur sa propre vie privée qui font le charme des confidences poétiques.
« L’idéal moderne a son type dans l’art, et son moyen dans la science. […] L’esprit moderne, c’est le génie de la Grèce ayant pour véhicule le génie de l’Inde : Alexandre sur l’éléphant.
Aussi, chose bien remarquable, Montesquieu écrivait sur le seuil même d’une révolution, d’une tentative la plus forte qui fut jamais pour rectifier et renouveler les lois du monde moderne, et, depuis Mirabeau jusqu’à Condorcet, Danton, Robespierre, personne ne s’est inspiré de lui, personne n’a prononcé son nom, et la Convention n’en a pas parlé plus que de Confucius ou d’Aristote : ce n’était pas l’homme de l’avenir, c’était l’homme du passé. […] Il ne faut pas oublier que, pendant que les philosophes modernes : Voltaire, Rousseau, Helvétius, d’Holbach et mille autres, et toute l’innombrable société lettrée ou érudite de l’Europe, niaient la vérité suprême, Dieu, ou s’efforçaient de noyer ce principe des principes dans des controverses plus ou moins ambiguës, Montesquieu commençait son examen des lois par la profession nette de la Divinité.
Pour l’exprimer, il créa (à peu près en même temps qu’Émile Deschamps) la forme du Poème ; et, classant ses Poèmes, il fit un livre mystique, un livre antique (Biblique, Homérique), un livre moderne : ne voit-on pas là le modèle et l’esquisse d’une Légende des siècles ? […] — Éditions : Poèmes, 1822 ; Eloa, 1824 ; Poèmes antiques et modernes, 1826 ; les Destinées, 1865 ; Journal d’un poète, 1867, M.
Ainsi, à près de quatre siècles de l’époque où cette ébauche de langue sera la plus grande langue du monde moderne une partie déjà en est mûre, et restera. […] Le récit, dans certains endroits de ses chroniques, n’a pas été surpassé ; et cette partie de l’art, si difficile pour l’historien moderne, au milieu de tant de faits divers qu’il faut, à la fois, classer, raconter et juger, est l’habitude et comme le tour d’esprit naturel de ce chroniqueur.
Bossuet, Fénelon, a-t-on dit, les deux gloires de la théologie en France, ont été philosophes ; Leibniz, un des plus grands noms de la philosophie moderne, a été chrétien. […] Aussi la société moderne se manquerait-elle à elle-même, si Démosthène, défendant sa ville contre l’ambition de Philippe, la touchait plus que Pascal défendant les vérités de la morale, l’honneur chrétien, la vie humaine, au prix où l’a mise le christianisme, contre des sophistes qui autorisaient le vice, la calomnie et l’homicide.
Les annales des arts occultes de tous les temps, qui étonneront un jour la science moderne lorsqu’elle saura les comprendre, nous apprennent que tous les magnétiseurs, évocateurs, dompteurs de corps ou d’âmes ont été des mâles puissants qui ont su diriger leurs forces physiques et psychiques vers un but déterminé. […] Partant du principe dernier de la science moderne, — l’axiome de la conservation de la force, — il en déduit et en confirme avec une rectitude de raisonnement prodigieuse, toutes les lois partielles abstraites de toutes les manifestations phénoménales de la matière.
On vérifie au premier coup d’œil ce caractère de virilité dans l’antique, de raffinement et d’afféterie dans le moderne, en comparant le poème antique de Sacountala avec le drame relativement plus moderne qui porte ce nom.
Des orateurs anciens et Modernes. […] Le mérite de tout traducteur se réduit presque par le défaut de nos jargons modernes à être exacts, précis & fidéle.
[NdA] Dans des leçons que j’ai eu depuis lors à faire à l’École normale au sujet de ce même Villehardouin, je développais un peu plus ce point de vue, et j’ajoutais : Il est un mot sur lequel il faut insister encore, et pour le réfuter, et pour nous faire mieux pénétrer dans l’esprit de ces temps, de ce Moyen Âge occidental et français véritablement moderne : c’est que les chefs et capitaines des croisés, auraient été de purs barbares.
[NdA] Dans ce travail sur le président Jeannin, je suis guidé, indépendamment des secours que je dois aux auteurs anciens, par deux modernes de la même province, M.
Il refuse même, à l’occasion, un guidon qui lui est offert dans une compagnie à cheval : « Il lui semblait qu’il parviendrait plus tôt par le moyen de l’infanterie. » Il est bien en cela de son siècle et non du xve siècle ; ce n’est plus un chevalier d’autrefois, c’est un moderne.
Je sais des hommes d’étude et de lecture approfondie qui placent Fleury très haut, plus haut qu’on n’est accoutumé à le faire aujourd’hui, qui le mettent en tête du second 265 rang ; ils disent « que ce n’est sans doute qu’un écrivain estimable et du second ordre, mais que c’est un esprit de première qualité ; que ses Mœurs des israélites et des chrétiens sont un livre à peu près classique ; que son Traité du choix et de la méthode des études, dans un cadre resserré, est plein de vues originales, et très supérieur en cela à l’ouvrage plus volumineux de Rollin ; que son Histoire du droit français, son traité du Droit public de France, renferment tout ce qu’on sait de certain sur les origines féodales, et à peu près tout ce qu’il y a de vrai dans certains chapitres des plus célèbres historiens modernes, qui n’y ont mis en sus que leurs systèmes et se sont bien gardés de le citer ; que Fleury est un des écrivains français qui ont le mieux connu le Moyen Âge, bien que peut être, par amour de l’Antiquité, il l’ait un peu trop déprécié ; que cet ensemble d’écrits marqués au coin du bon sens et où tout est bien distribué, bien présenté, d’un style pur et irréprochable, sans une trace de mauvais goût, sans un seul paradoxe, atteste bien aussi la supériorité de celui qui les a conçus. » Pour moi, c’est plutôt la preuve d’un esprit très sain.
Il y a, à cet endroit, de fort belles strophes, et qui expriment énergiquement la protestation de l’antique frugalité à la vue des poursuivants modernes de la richesse et des adorateurs du veau d’or ; j’en veux citer une seule, qui a bien du souffle et de la verdeur : Généreuse aristocratie Des grands cœurs sur terre envoyés, Ô Caton, ô La Boëtie, Fiers de vos indigents foyers !
Tandis que l’artiste jeune et tout moderne nage à torrent dans le présent, y abonde, s’y abreuve et s’y éblouit, nous vivons de ces rapprochements qui reposent, et nous jouissons des mille idées qu’ils font naître.
M. de Corcelles avait été frappé de cette sorte de contradiction qu’il y avait entre le tableau vraiment assez triste de cette démocratie moderne, présente ou future, et les conclusions du livre qui tendaient à l’acceptation et à l’organisation progressive de cette même démocratie.
du plus grand rôle moderne, qu’il nous est visible aujourd’hui.
Le premier livre qui le tira de ce pêle-mêle, en lui donnant un terme de comparaison, et qui l’initia à la littérature classique, ce fut Gil Blas, qu’il vit entre les mains d’un ami ; le livre, à peine lu, le dégoûta à l’instant « de la faconde moderne, du roman d’intrigue, du roman de thèse, du roman de passion, et de tout cet absurde et de toute cette emphase qu’il avait tant aimés. » Ce prompt effet du naturel et du simple sur un esprit ferme et né pour le bon style est rendu à merveille.
Bertrand, plus au fait que lui des travaux modernes de mathématiques, lui demanda quel était le géomètre pur le plus en voie de se distinguer.
Trébutien a fait en ceci comme ces moines et ces clercs du Moyen-Age dont il porte volontiers lui-même l’habit austère, de ce Moyen-Age qu’il sait dans sa lettre comme dans son esprit et dont il a été l’un des premiers propagateurs et des rénovateurs parmi nous : loin de la foule, loin des bruits modernes, il s’est voué dans sa cellule de bibliothécaire à une sainte amitié pour les deux auteurs de sa prédilection et de son culte, Maurice et Eugénie !
Laujon, dans cette carrière facile, — pas si facile qu’il semblerait, — se proposait pour maître et pour modèle, il le reconnaît, l’ingénieux Benserade, ce véritable inventeur des ballets modernes et qui, à toutes les critiques dont il se voyait l’objet en son temps de la part du rigide Despréaux, avait pour réponse : « J’ai du moins imaginé un plaisir. » Collé, d’une humeur moins douce que Laujon, et qui sur la fin n’avait de gaieté que dans ses œuvres, fut aussi appelé à Berny.
L’idée de reprendre Bérénice devait venir du moment que mademoiselle Rachel était là ; et qu’à défaut de rôles modernes, elle continuait à nous rendre tant de ces douces émotions d’une scène qui élève et ennoblit.
En un mot, dans cette carrière ouverte au commencement du siècle par Racine fils et par Voltaire, et suivie si activement en des sens divers par Le Tourneur et Ducis, par Suard et l’abbé Arnaud, Léonard à son tour fait un pas ; il est de ceux qui tendent à introduire une veine des littératures étrangères modernes dans la nôtre.
Tandis que la poésie antique ne connaissait que la passion physique, et, pour rendre raison de la force de l’amour, regardait le désir allumé par Vénus dans la nature entière à la saison nouvelle, la poésie moderne, par une orientation toute contraire, assimilera l’amour humain à l’amour divin et en fondera la puissance sur l’infinie disproportion du mérite au désir Même quand le terme réel de l’amour appartiendra à l’ordre le plus matériel et terrestre, la pensée et la parole s’en détourneront, et c’est à peine si, comme indice de ses antiques et traditionnelles attaches au monde de la sensation physique, il gardera ces descriptions du printemps, saison du réveil de la vie universelle ; encore ces descriptions seront-elles de moins en moins sincères et vivantes, et ne subsisteront-elles chez la plupart des poètes que comme une forme vide de sens, un organe inutile et atrophié.
Paul Adam, outre l’abondante et luxuriante fresque de ses romans byzantins ou modernes, donne depuis quelques années aux journaux une Critique des mœurs et des articles de politique générale autant que l’idéologie pure, qui témoignent d’un esprit supérieurement armé pour l’essai critique ; sa lumineuse intelligence touche à toutes choses, c’est un incomparable associateur d’analogies, une conscience pour la critique comparée.
Van Lerberghe, M. de Régnier, conservent fervement dans le vers moderne l’attitude.
La rédaction qui en est donnée par Cailhava est, il est vrai, plus moderne ; à défaut d’autre, nous devons nous contenter de la reproduire ; mais il nous sera permis de rétablir les noms de la troupe qui joua à Paris de 1662 à 1671.
Sans doute l’idéal national et étatiste doit être élargi dans notre système d’éducation moderne par l’idéal humanitaire.
Berthelot, est fondée sur l’hypothèse de l’unité de la matière ; elle est aussi plausible, au fond, que les théories modernes les plus réputées.
Il faudra recourir encore aux secours de la psychologie moderne, qui dénombre et classe les différentes opérations de l’intelligence : on aura de la sorte une nouvelle voie ouverte à l’enquête scientifique que nous poursuivons.
Il opère ou tente une quadruple révolution : une révolution économique, liée aux découvertes maritimes qui transportent du bassin de la Méditerranée aux bords de l’Atlantique le siège du grand commerce, qui ouvrent d’immenses débouchés à l’Europe soit aux Indes soit en Amérique, qui accélèrent la substitution de la richesse mobilière à la richesse terrienne, base du régime féodal ; une révolution intellectuelle qu’on a baptisée la Renaissance et qui n’est pas seulement la résurrection de l’antiquité classique, qui est aussi le réveil de l’esprit d’examen, l’essor de la pensée moderne, le point de départ d’une activité féconde dans les sciences, les lettres, la philosophie ; une révolution religieuse qu’on appelle la Réformation et qui, séparant l’Europe occidentale en deux confessions rivales, cause les guerres les plus atroces dont la différence de croyance ait jamais ensanglanté le monde ; enfin une révolution politique, conséquence des trois autres, qui ébranle les bases de la royauté, suscite des théories libérales et républicaines, des soulèvements populaires et même des appels au régicide.
Il s’agit, présentement, non de réparer une longue injustice — car depuis beaucoup d’années, l’opinion des connaisseurs est faite sur ce point — mais d’accélérer une heureuse réaction, en ce qui concerne l’œuvre d’un grand musicien moderne, d’un maître, César Franck.
Il constate, implacable : « Les fantaisies de Lycurgue coûtèrent à Sparte son intelligence ; les hommes y furent beaux comme des chevaux de course et les femmes y marchaient nues drapées de leur seule stupidité ; l’Athènes des courtisanes et de la liberté de l’amour a donné au monde moderne sa conscience intellectuelle. » Ce redoutable destructeur des apparences, seules divinités adorées par la tourbe, cet amoureux de l’unique réalité, l’individu, a bien conscience d’être un monstre fort haïssable non seulement pour la foule, mais aussi pour les « âniers innocents qui accompagnent mais ne guident pas la caravane ».
En tout cas, quand on est jeune, fût-on la distinction même, on glisse vite sur ces défauts à une première lecture ; on s’attache à ce qui plaît, à ce qui nous offre l’expression idéalisée la plus moderne de nos sentiments, de notre situation ou de notre désir.
Rappelez-vous maintes pages de La Bruyère, de Fénelon, de Bernardin, de Chateaubriand, de Nodier, et toute une anthologie de poètes-musiciens, depuis Olivier de Magny, Rémy Belleau, Philippe Desportes, jusqu’aux modernes maîtres de la Lyre, en passant par Malherbe, Racan, Segrais, Jean Racine, La Fontaine, André Chénier.
La connaissance des mots nuira à la connaissance des choses, l’étude des langues anciennes sera abandonnée pour celle des langues modernes.
Il n’en est pas ainsi de l’histoire moderne, tant ecclesiastique que profane.
Pour reconstituer le monde antique, en réintégrer le principe dans la civilisation moderne, il ne fallait pas un érudit, il fallait un artiste, un poète, une âme aimante angoissée par le présent.
.) — Joignez-y même (vous ne serez pas au bout, mais vous atteindrez au moins un chiffre consacré) comme une septième lignée la plus ancienne, la plus obscure, la moins écrite, et, dans les temps modernes, la source vraie des autres : tout l’ordre religieux qui cristallise dans l’église catholique autour de la confession auriculaire et qui pousse encore au XIXe siècle, de Lamennais à l’abbé Bremond, de vigoureux rameaux.
Il n’est pas indifférent d’en étudier la puissance chez une nation moins musicale que les Hellènes, moins née pour la spéculation et la poésie, mais partageant le même culte, attirée par la même gloire, et demeure le dernier modèle antique sur lequel devait se greffer et croître à l’avenir le génie moderne.
» L’adulateur moderne qui renouvelait ce souvenir pour l’inexorable cardinal, ajoutait : « Aux paroles de ces hommes obscurs, proférées sans contrainte et sans flatterie, César fut si touché que, par comparaison, il comptait pour peu les plus honorifiques décrets du sénat, les noms inscrits des nations subjuguées, les trophées qu’on lui élevait et ses propres triomphes. » On le croira sans peine : le pouvoir d’Octave était fondé sur la réalité de la dictature et l’apparence de la démocratie.
Aucun écrivain, au dix-septième siècle, n’a plus complètement que Bossuet représenté l’union des deux antiquités et de l’esprit moderne. […] Le Discours sur l’histoire universelle, c’est le christianisme, par la bouche du plus grand de ses docteurs modernes, jugeant l’antiquité païenne. […] Tite-Live n’a pas plus aimé sa Rome et son sénat que Bossuet, dans ce sublime chapitre où il a tracé la suite, et résumé l’esprit des huit premiers siècles de Rome, mettant en relief ce qu’il y a de solide et d’exemplaire dans cette gloire, devenue nationale pour tous les peuples du monde moderne. […] C’est à jamais le plus beau jugement des temps modernes sur l’antiquité.
Car voici « la pièce moderne » ; mi-partie drame, mi-partie comédie, on ne saurait lui donner un nom plus précis. […] En vérité, il fonda l’esthétique moderne ; bien ingrat qui le renierait. […] Théâtre spécial pour public spécial, car, parmi la foule moderne, il va polariser un certain monde qui donnera le ton et qu’on suivra. […] La mise en scène moderne évoluant vers la simplicité et vers la nudité, il ne sera pas malaisé ici de faire quelque chose avec pas grand-chose : un peu de goût y suffira.
Plus il s’élève dans l’échelle des généralisations, plus il incline, bon gré mal gré, à doter les lois de ce caractère impératif : il faut vraiment lutter contre soi-même pour se représenter les principes de la mécanique autrement qu’inscrits de toute éternité sur des tables transcendantes que la science moderne serait allée chercher sur un autre Sinaï. […] On se rappelle la description de Lucrèce : l’illusion porte seulement ici sur les qualités de l’objet aimé, et non pas, comme l’illusion moderne, sur ce qu’on peut attendre de l’amour. […] Nous la trouvons à l’état implicite partout où le christianisme n’a pas pénétré, chez les modernes comme chez les anciens. […] L’idée moderne de justice a progressé ainsi par une série de créations individuelles qui ont réussi, par des efforts multiples animés d’un même élan. — L’antiquité classique n’avait pas connu la propagande ; sa justice avait l’impassibilité sereine des dieux olympiens.
Cette science toute moderne, née en France sous l’impulsion féconde de Lavoisier, Bichat, Magendie, etc., était jusqu’à présent restée, il faut le dire, à peu près sans encouragements, tandis qu’elle en recevait, par contre, de considérables dans les pays voisins. […] Tel est le problème de la physiologie moderne, et nous ne saurions certainement arriver à sa solution ni au moyen des doctrines spiritualistes ou vitalistes, ni à l’aide des doctrines matérialistes. […] On a cru pouvoir attribuer à Lavoisier la première idée de cette dualité ; mais les écrits de l’illustre fondateur de la chimie moderne qu’on a invoqués ne me semblent pas conclure en ce sens. […] Cette expérience fut vraiment le point de départ de l’opposition chimique moderne des animaux et des végétaux. […] Constitution anatomique et création morphologique de l’être vivant, animal ou végétal ; historique. — Période ancienne : Galien, Morgagni, Fallope, Pinel, Bichat, Mayer. — Période moderne : de Mirbel, R.
Le lyrisme pour Ronsard, contrairement à ce qu’il était déjà un peu et à ce qu’il devait de plus en plus devenir chez les modernes, était poésie presque absolument impersonnelle. […] On lit leurs disciples, qui, plus modernes, attirent toute l’attention ; on ne fréquente plus le maître ; on admire les fils, on ne songe plus à admirer les fils dans leur père et l’on se contente d’admirer le père dans ses fils. […] Il croyait que l’humanité changeait peu, et c’est pour cela que si souvent, trop souvent peut-être, il expliquait les faits et les caractères antiques par des analogies toutes modernes : « Le saint-simonisme, très intéressant, me disait-il. […] Ce qui est sûr, c’est qu’il a voulu le transformer en une philosophie pratique conciliable avec le tour d’esprit scientifique des modernes ; et que, soit qu’il l’ait ébranlé, soit qu’il l’ait soutenu, il l’a respecté et aimé très profondément. — Cette philosophie chrétienne, est-ce le christianisme de demain ? […] » des sujets anciens et des sujets modernes, des sujets païens et des sujets chrétiens : « Et dès lors, s’écrie Proudhon, que m’importe que M.
Puis, Mme de La Fayette abandonna ce genre démodé ; elle écrivit La Princesse de Clèves, roman simple de lignes, d’un intérêt si concentré : elle inventait le roman moderne. […] Je crois qu’il la voudrait anéantir (comme, par l’incendie, l’usine Fabrecé) et reconstruire plus largement, sur le patron d’un idéal plus commode, plus accueillant, plus moderne. […] Les modernistes de l’armée considèrent, les malheureux, que tout évolue et que l’armée est dans l’alternative « de mourir ou d’acquérir le sens des réalités modernes ». […] Le plus moderne émoi revêt ici un caractère cornélien. […] C’est, je crois, un trait significatif de la civilisation moderne : nous sommes des antiquaires, nous avons un sentiment juste et archéologique des époques qui ont précédé la nôtre.
Leur auteur a-t-il trouvé le moyen de traduire la sensibilité la plus hardiment moderne dans des vers dont la facture relève de Boileau ? […] Ce trouveur (trouvère) moderne venait d’imprimer une allure gigantesque à un genre de composition, injustement appelé secondaire. […] Or c’est l’étude, poussée très à fond, d’une anomalie toute voisine des troubles que la psychiatrie moderne qualifie de l’étiquette de « schizophrénie ». […] Ces contradictions de la nature humaine ne sont pas une découverte moderne. […] Vous vous rendrez mieux compte du travail énorme qui se cache sous les fictions d’un romancier moderne.
C’est aux temps modernes et à la renaissance qu’il faut demander les autres hommes que nous cherchons : Shakspeare, Cervantes, Rabelais, Molière, et deux ou trois depuis, à des rangs inégaux, les voilà tous ; on les peut caractériser par les ressemblances. […] Sans doute Mascarille, tel qu’il apparaît d’abord, n’est guère qu’un fils naturel direct des valets de la farce italienne et de l’antique comédie, de l’esclave de l’Épidique, du Chrysale des Bacchides, de ces valets d’or, comme ils se nomment, du valet de Marot ; c’est un fils de Villon, nourri aussi aux repues franches, un des mille de cette lignée antérieure à Figaro : mais, dans les Précieuses, il va bientôt se particulariser, il va devenir le Mascarille marquis, un valet tout moderne et qui n’est qu’à la livrée de Molière. […] Les Précieuses ridicules, jouées en 1659, attaquèrent les mœurs modernes au vif.
Quant aux marchands qui sont morts ou qui ont déserté ces boulevards, ils sont remplacés par des vendeurs de meubles modernes, aux expositions se composant de mobiliers de salon en bois de chêne pour dentistes, de pendules de cabinet en marbre noir, de baromètres en noyer, de coffres-forts Huret et Fichet, entremêlés de vieux anges coloriés d’églises et de fausses poteries étrusques. […] Et ce livre je le composerai de quatre études : une sur Okousai le rénovateur moderne du vieil art japonais ; une sur Outamaro, le Watteau de là bas, une sur Korin, et une autre sur Ritzono, deux célèbres peintres et laqueurs. […] Mais la réalité du décor dans les pièces modernes, semble aux directeurs de théâtre, sans grande importance.
Pendant deux heures qu’il reste au Grenier, il touche à un tas de questions anciennes et modernes, et parle spirituellement de la rapidité, à l’heure présente, avec laquelle les produits matériels passent d’un pays dans l’autre, et de la lenteur avec laquelle se transmettent les produits intellectuels, ce qu’il explique un peu par l’abandon de la langue latine, de cette langue universelle, qui était le volapuck d’autrefois entre les savants et les littérateurs de tous les pays. […] Maintenant l’impression là-dedans, c’est un sentiment d’abomination pour ce bourgeois de Louis-Philippe, qui, avec son Musée, ses peintures au rabais, a tué la belle antiquaillerie de cette demeure de la monarchie française, aux xviie et xviiie siècles, et n’a pas craint de faire la nuit avec un grand vilain tableau moderne, fermant la fenêtre de la salle de bain de Mme Adélaïde, qui est peut-être le plus riche spécimen de la décoration intérieure, au xviiie siècle. […] Il trouve avec sa mauvaise foi habituelle, que mon théâtre — notez que je n’ai eu connaissance de Charles Demailly, qu’à la lecture faite aux acteurs, et que la critique que j’en ferais, c’est qu’elle est trop faite d’après les principes de Sarcey — il trouve donc que mon théâtre est le néant, et que ce n’est ni du théâtre ancien, ni du théâtre moderne.
Si nous parvenons à montrer qu’il y a encore beaucoup d’idées chez le poète qui passe aujourd’hui pour n’avoir eu « aucune idée », il s’ensuivra que les idées, surtout avec les progrès de la société moderne, contribuent plus qu’on ne croit à la grande poésie, même à celle qui semble toute d’imagination aux esprits superficiels ; il s’ensuivra enfin que l’introduction des doctrines philosophiques, morales et sociales, dans le domaine de la poésie, est bien un des traits caractéristiques de notre siècle. […] Victor Hugo a eu, comme notre société moderne, — j’entends la société pensante, — le sentiment de ce qu’on appelle aujourd’hui l’inconnaissable. […] La pensée du Lac est la pensée épicurienne d’Horace sur la fuite des jours : « Hâtons-nous, jouissons », qui est assez mal fondue avec l’idée de l’océan des âges, et avec le sentiment moderne de l’amour.
Ballanche ne portait pas l’horizon le plus lointain de cette émancipation moderne au delà des limites du Christianisme lui-même ; il proclamait la perfection de celui-ci en tant qu’institution spirituelle et divine, et s’il croyait que les sociétés humaines dussent se gouverner désormais selon une loi de liberté, le résultat de cette action immense ne lui semblait pouvoir être autre chose que l’introduction de plus en plus profonde du Christianisme dans la sphère politique et civile. […] Ballanche, cette pensée éternelle d’un hymen à la fois accordé et impossible, cette initiation au vrai et au bien par la chasteté et par la douleur : « La douleur, dit Orphée, sera le second génie qui m’expliquera les destinées humaines. » Chaque page nous offre des pensées de tous les temps, dans la magnificence de leur expression : « Souvenez-vous que les Dieux immortels couvrent de leurs regards l’homme voyageur, comme le ciel inonde la nature de sa bienfaisante lumière. » Et encore : « Toutes les pensées d’avenir se tiennent ; pour croire à la vie qui doit suivre celle-ci, il faut commencer par croire à cette vie elle-même, à cette vie passagère. » Enfin, les approches de la mort d’Orphée, les troubles et l’agonie orageuse de cette grande âme qui, comme toutes les âmes divines au terme, se croit un moment délaissée, ont une sublimité égale aux plus belles scènes des épopées modernes.
« Il trempe alors dans l’eau claire et glacée ses lèvres sèches, et il agite l’eau courante avec ses mains pour faire évaporer l’ardeur de ses veines, etc... » La forêt enchantée du Tasse, imitée de cette aventure de l’Arioste et d’abord imitée de Virgile, se rencontre merveilleusement racontée ici pour la première fois en italien moderne. […] XI Tout à coup Arioste redevient grave en faisant parcourir à Bradamante la galerie d’un château enchanté dans lequel des tableaux prophétiques font apparaître d’avance à ses yeux toute l’histoire de la maison d’Este, mêlée à l’histoire de l’Europe moderne ; il s’élance de là à la suite d’Astolphe monté sur l’hippogriffe, et qui jetait du haut des airs un coup d’œil géographique sur l’univers.
Ce sont là à peu près les seules nations antiques ou modernes et les seules époques qui aient eu des philosophies transcendantes ; les autres n’ont eu que des philosophies populaires. […] Quant à sa philosophie, qui n’est nulle part aussi complètement exposée que dans le dialogue de Phédon, elle se résume, à travers un trop long flux de paroles et un trop grand appareil de questions, de réponses, de dialectique, de polémique, de circonlocutions plus scolastiques que philosophiques, dans un très petit nombre de vraisemblances théologiques et de vérités morales auxquelles toutes les philosophies modernes ont peu ajouté.
C’était un Poussin moderne tout à fait italianisé par son talent et par son culte pour Raphaël, dont il recherchait les moindres vestiges, et dont il légua, à sa mort, les reliques retrouvées au musée de sa ville natale, Montpellier. […] XXXIII Peu de temps avant mon départ de France pour mon poste à Florence, le plus grand, selon moi, de tous les poètes modernes, était mort en Grèce, tout jeune encore et dans le seul acte généreux, désintéressé, héroïque, qu’il eût tenté jusque-là pour racheter par la vertu les excentricités et les juvénilités peu sensées et peu louables de sa vie.
La fin du seizième siècle avait vu naître, de la double imitation des anciens et des Italiens modernes, un essai de comédie où des traits de mœurs véritables et des indications de caractères sont perdus parmi des scènes de nuit, des travestissements, des reconnaissances, dans un dialogue assaisonné d’obscénités. […] Enfin, ces valets de fantaisie, venus, d’imitation en imitation, de la Grèce en France, par l’Italie ancienne et moderne, sous ce costume bizarre auquel l’imagination de chaque auteur avait cousu quelque lambeau, ils vivent ; car ils sont possibles.
On ne fait une humanité défunte, qu’en lui mettant sous sa chlamyde ou son pourpoint, un cœur et un cerveau modernes ; et tout ce qu’on peut reconstituer, ce sont les milieux de cette humanité ! […] — Dans la vie moderne actuelle, avec l’exiguïté des demeures, c’est bien difficile, de faire durer éternellement les chapelles des morts, les chambres d’agonie, qu’on veut toujours conserver, telles qu’elles étaient, lorsque a sonné la dernière heure d’une personne aimée ; — et ces jours-ci, ç’a été pour moi une véritable tristesse, quand j’ai entendu les coups de pioche, jetant à bas les cloisons de la chambre de mon frère, et détruisant cette espèce de survie d’un être cher, parmi les objets et les choses de son entour, brutalement démolis.
Un romancier moderne rapproche la sensation que fait éprouver l’amour ardent à celle de l’asphyxie naissante. […] Boutroux, applaudissent à tous les arguments dirigés contre la nécessité ou, de son nom moderne, le déterminisme ; eux aussi voient volontiers dans les lois de simples habitudes, et c’est ce que M.
L’éternel effort de nos arts modernes est de remonter à ces types du beau dans l’architecture et dans la sculpture ; et comme les arts prennent ordinairement leur niveau dans une même époque, tout fait conjecturer que les arts de l’esprit égalaient en perfection ceux dont la matière plus solide nous a conservé les chefs-d’œuvre. […] etc., etc. » On voit qu’en sens inverse du matérialisme moderne, qui fait naître l’intelligence des sensations brutales de la matière douée d’organes, le spiritualisme déjà raffiné des sages de l’Inde fait naître les phénomènes matériels de l’intelligence.
[Kant et sa philosophie] Kant est le père de la philosophie allemande : il est l’auteur ou plutôt l’instrument de la plus grande révolution philosophique qui ait eu lieu dans l’Europe moderne depuis Descartes. […] Les physiciens modernes antérieurs à Galilée abandonnèrent les hypothèses, se mirent en présence de la nature, observèrent et recueillirent les phénomènes qu’elle leur présentait.
Que ce soient les femmes de telle société, de telle époque ou de telle autre dont on s’occupe et dont on jase, que ce soient les femmes de l’Antiquité ou du Moyen Âge, de la Renaissance ou des temps Modernes, de la Régence ou de la Révolution, peu importe ! […] Michelet, toutes ces femmes modernes qui ne sont pas de vraies chrétiennes, toutes ces femmes plus ou moins libres, avec les droits politiques qu’elles rêvent ou jalousent, avec leurs vaniteuses invasions dans les lettres et dans les arts, avec cet amour de la gloire, le deuil éclatant du bonheur , disait Mme de Staël, et qui est le deuil aussi de la vertu, toutes ces femmes, il ne faut pas s’y tromper, continuent les femmes de la Renaissance.
Avec l’attrait de curiosité qui nous fait épier et réunir les mille rayons épars, à longues distances, dans les vastes cieux de l’imagination, il nous serait aisé d’apercevoir un rapport d’émotions entre ces élans de mystique amour et les prières de plus d’un pieux sectaire moderne. […] La ferveur naît, pour ainsi dire, du travail prolongé de la méditation ; et le coloris est donné par l’abstraction même, comme on a dû parfois de nos jours en faire la remarque sur plus d’un métaphysicien poëte, inspiré par la contemplation solitaire et la liberté de quelque secte dissidente, dans l’ample sein du christianisme moderne.
Arago a composées avec le plus de goût et de succès est celle du célèbre Écossais James Watt, ce héros de l’industrie, cet Hercule ingénieux du monde moderne ; il se complaît, après une enquête complète et consciencieuse qu’il est allé faire sur les lieux, à nous exposer ses procédés d’invention en tout genre, ses titres à la reconnaissance des hommes.
C’est quelque chose en prose comme la supercherie des Poésies de Clotilde de Surville en vers ; mais ici on met un ouvrage de fabrique moderne sous un nom historique connu.
De même qu’il y eut dans l’Antiquité un peuple à part, qui, sous l’inspiration et la conduite de Moïse, garda nette et distincte l’idée d’un Dieu créateur et toujours présent, gouvernant directement le monde, tandis que tous les peuples alentour égaraient cette idée, pour eux confuse, dans les nuages de la fantaisie, ou l’étouffaient sous les fantômes de l’imagination et la noyaient dans le luxe exubérant de la nature, de même Bossuet entre les modernes a ressaisi plus qu’aucun cette pensée simple d’ordre, d’autorité, d’unité, de gouvernement continuel de la Providence, et il l’applique à tous sans effort et comme par une déduction invincible.
Mais les grands bergers astronomes de Bailly, sur le haut plateau de l’Asie, ou peut-être plus loin encore vers le nord (en ce temps où le Nord n’avait point de glaces), étaient bien autre chose : ils avaient amassé durant des milliers d’années, et dans des conditions naturelles plus faciles, toute une science égale peut-être à la nôtre, ou même supérieure, et que nous autres modernes nous avons été réduits pour notre compte à réinventer péniblement à la sueur de nos fronts.
Il faudra plus de vingt ans encore pour que le Werther de la France, celui qui s’approprie si bien à elle par sa beauté mélancolique, sa sobriété, même en rêvant, et son noble éclair au front, pour que René en un mot puisse naître ; il faudra plus de temps encore pour que l’élégie vraiment moderne, inaugurée par Lamartine, puisse fleurir et se propager.
[NdA] Dangeau, nommé ambassadeur en Suède, s’adressait à Chapelain pour lui demander s’il ne connaîtrait pas « quelque homme de bien et d’érudition qui pût, à des conditions honorables, lui tenir compagnie pendant son voyage de Suède, et lui servir soit par la conversation, soit par la lecture des bons livres anciens et modernes, le divertir des objets désagréables, etc. » C’est ce qu’on apprend d’une lettre (manuscrite) de Chapelain au marquis de Dangeau, datée d’avril 1671.
La moderne école poétique française, qui s’était plus d’une fois essayée sur Shakespeare, ne pouvait entièrement négliger Dante.
Il va continuer ainsi ses descriptions des lieux d’alentour, celle du torrent roulant au creux du vallon, celle du marais et du peuple aquatique qui s’y joue ; il arrive ensuite aux ruines gothiques, là où un moderne verrait le sujet de la ballade : Que j’aime à voir la décadence De ces vieux châteaux ruinés, Contre qui les ans mutinés Ont déployé leur insolence !
Rien n’était exagéré dans la première impression reçue en 1840 ; tout aujourd’hui se justifie et se confirme ; l’école moderne compte bien en effet un poète, un paysagiste de plus.
Pourquoi n’avoir point placé en tête de ces deux volumes un court abrégé de la constitution, de l’histoire politique de Genève au xviiie siècle, un petit tableau résumé des luttes, des querelles et guerres civiles entre les différentes classes, entre les citoyens et bourgeois, membres de l’État, parties du souverain, et les natifs exclus, tenus en dehors et revendiquant des droits ; querelles du haut et du bas, de patriciens et de plébéiens, renouvelées des Grecs et des Romains, inhérentes à la nature des choses, qui se sont reproduites plus tard, sous une forme un peu différente, dans la moderne Genève, et qui ont été finalement tranchées à l’avantage du grand nombre.
Et, ici encore, je n’ai point de parti pris, je ne suis qu’un observateur et un littérateur jugeant d’un livre d’histoire moderne, d’histoire contemporaine, et complétant mon idée des personnages par les traits mêmes qu’on me fournit.
si l’on est d’un art particulier, tout en restant le confrère et l’ami des artistes, savoir s’élever cependant peu à peu jusqu’à devenir un juge ; si l’on a commencé, au contraire, par être un théoricien pur, un critique, un esthéticien, comme ils disent là-bas, de l’autre côté du Rhin, et si l’on n’est l’homme d’aucun art en particulier, arriver pourtant à comprendre tous les arts dont on est devenu l’organe, non-seulement dans leur lien et leur ensemble, mais de près, un à un, les toucher, les manier jusque dans leurs procédés et leurs moyens, les pratiquer même, en amateur du moins, tellement qu’on semble ensuite par l’intelligence et la sympathie un vrai confrère ; en un mot, conquérir l’autorité sur ses égaux, si l’on a commencé par être confrère et camarade ; ou bien justifier cette autorité, si l’on vient de loin, en montrant bientôt dans le juge un connaisseur initié et familier ; — tout en restant l’homme de la tradition et des grands principes posés dans les œuvres premières des maîtres immortels, tenir compte des changements de mœurs et d’habitudes sociales qui influent profondément sur les formes de l’art lui-même ; unir l’élévation et la souplesse ; avoir en soi la haute mesure et le type toujours présent du grand et du beau, sans prétendre l’immobiliser ; graduer la bienveillance dans l’éloge ; ne pas surfaire, ne jamais laisser indécise la portée vraie et la juste limite des talents ; ne pas seulement écouter et suivre son Académie, la devancer quelquefois (ceci est plus délicat, mais les artistes arrivés aux honneurs académiques et au sommet de leurs vœux, tout occupés qu’ils sont d’ailleurs, et penchés tout le long du jour sur leur toile ou autour de leur marbre, ont besoin parfois d’être avertis) ; être donc l’un des premiers à sentir venir l’air du dehors ; deviner l’innovation féconde, celle qui sera demain le fait avoué et’reconnu ; ne pas chercher à lui complaire avant le temps et avant l’épreuve, mais se bien garder, du haut du pupitre, de lui lancer annuellement l’anathème ; ne pas adorer l’antique jusqu’à repousser le moderne ; admettre ce dernier dans toutes ses variétés, si elles ont leur raison d’être et leur motif légitime ; se tenir dans un rapport continuel avec le vivant, qui monte, s’agite et se renouvelle sans cesse en regard des augustes, mais un peu froides images ; et sans faire fléchir le haut style ni abaisser les colonnes du temple, savoir reconnaître, goûter, nommer au besoin en public tout ce qui est dans le vestibule ou sur les degrés, les genres même et les hommes que l’Académie n’adoptera peut-être jamais pour siens, mais qu’elle n’a pas le droit d’ignorer et qu’elle peut même encourager utilement ou surveiller au dehors ; enfin, si l’on part invariablement des grands dieux, de Phidias et d’Apelle et de Beethoven, ne jamais s’arrêter et s’enchaîner à ce qui y ressemble le moins, qui est le faux noble et le convenu, et savoir atteindre, s’il le faut, sans croire descendre, jusqu’aux genres et aux talents les plus légers et les plus contemporains, pourvu qu’ils soient vrais et qu’un souffle sincère les anime.
Léonce de Lavergne ou Arthur Young ; quand, par exemple, il étudie l’étable et le bétail ; quand il nous montre à l’œuvre et en ardeur de piocher, hiver comme été, le bon bêcheur à son compte ; quand il nous fait assister au premier essai de la nouvelle charrue, de l’instrument aratoire moderne qui a contre soi la routine et bien des jaloux ; quand il nous décrit la race des bœufs du mezenc (montagne du pays) qui, au labour, craignent peu de rivaux, et qui rendent au maître plus d’un office : Le lait, le trait, la chair, c’est triple bénéfice.
» — Faisant le procès, dans le même journal (5 octobre 1855), à la peinture d’Overbeck et à son école, il concluait ainsi : « L’école allemande moderne, ainsi que l’ancienne, n’a donc eu qu’une aurore sans midi. » Nonobstant ces cacophonies, M.
Cervantes a fait un chef-d’œuvre sans obscurité, d’une clarté parfaite, agréable, sensé, où la chimère n’a rien à faire que pour y être raillée, un de ces livres qu’eût goûté Horace comme le goûtait Saint-Évremond, un chef-d’œuvre pourtant sans analogue chez les Anciens, d’une étoffe toute moderne, aussi vif et aussi amusant en son genre que celui de l’Arioste dont il est le vrai pendant.
En classant les notes innombrables que le jeune attaché avait recueillies dès ce temps dans la mine inépuisable des Archives, son digne fils (car on est dans cette famille à la troisième génération diplomatique) me faisait remarquer combien la jeunesse de son père avait été laborieuse, et avec quel soin il s’était appliqué, pour mieux comprendre l’Europe moderne, à étudier jusque dans ses plus minutieux détails et aux sources les plus authentiques l’Europe du xviiie siècle, celle du cardinal de Fleury, de Marie-Thérèse, de Frédéric le Grand, du duc de Choiseul.
Il a fait de Fréron le fils, le proconsul, le roi de la jeunesse dorée, l’amoureux évincé d’une future princesse, une esquisse vivante, rapide, et qui semble une page arrachée d’un Gil Blas moderne.
Jules Philippe, les Poëtes de la Savoie 50, qui se recommande par une Introduction sur les anciens poëtes et versificateurs du pays, et par un choix des modernes, y compris les vivants, j’ai été frappé de la notice sur Jean-Pierre Veyrat, né en 1810, mort en 1844, que l’éditeur n’hésite pas à saluer du titre, non pas de « poëte souverain », mais de « grand poëte. » Les extraits qui suivent, dans le volume, ne me paraissant pas tout à fait suffisants pour motiver un pareil éloge, j’ai voulu remonter à la source, aux œuvres mêmes, et, pour achever de m’éclairer, j’ai consulté un de mes amis, un proche parent de Veyrat, et qui m’avait déjà entretenu de lui à la rencontre, M.
Les premières guerres de la Révolution, nées d’un sublime élan, enfantées des entrailles du sol pour le défendre, pour repousser l’agression des rois, nous reportèrent un moment aux beaux jours de l’héroïsme antique ; elles dégénérèrent vite, même en se perfectionnant, mais aussi en s’agrandissant outre mesure au gré du génie et de l’ambition du plus prodigieux comme du plus immodéré capitaine des temps modernes.
Par malheur, ce qui glace aussitôt, c’est que le moderne Orphée nous raconte que … jamais sous les yeux de l’auguste Cybèle La terre ne fit naître un plus parfait modèle Entre les dieux mortels que le comte du Luc.
., à 5 sous par feu et par an, ce qui fut exécuté. « Ce n’est que depuis peu qu’on en a cessé la perception, quoique, par les reconnaissances modernes, tous les habitants se soient reconnus sujets auxdits guet et garde du château. » 10° Droit de péage pour toutes les marchandises et denrées qui passent par la ville de Blet, sauf les blés, grains, farines et légumes.
M. de Sénarmont, Cours professé à l’École polytechnique, cité par Saigey, La Physique moderne, p. 216.
Bodin et son temps, 1853 ; Publicistes modernes (J.
Ce gentilhomme qui abhorre les « philosophicailleries modernes », qui l’ait de la religion la base de la société, qui sollicite du despotisme royal des lettres de cachet contre fils, femmes et filles, cet homme de vieille roche, ce dur, cet intraitable féodal est l’ennemi des prêtres, des commis, des financiers, des courtisans, fait des avances à Jean-Jacques, bénit Quesnay, ne rêve que progrès, améliorations sociales, bonheur du peuple, et se fait mettre à Vincennes pour le libéralisme de sa théorie de l’impôt.
Mais elle fait un pas de plus, et un pas décisif : les littératures modernes sont des littératures chrétiennes, et la littérature française s’est placée dans des conditions désavantageuses en s’imposant les formes et les règles des œuvres anciennes et païennes.
Même dans les rôles modernes elle garde cette étrangeté que lui donnent sa maigreur élégante et pliante et son type de juive orientale.
D’ailleurs, pourquoi l’Académie française aurait-elle plus d’influence sur les lettres, et les encouragerait-elle mieux que la moderne Académie des Goncourt qui n’a pas voulu connaître Alfred Jarry et Charles-Louis Philippe.
Regardons les créateurs modernes : tous nous donneront un exemple de sobre tenue, de pauvreté fière et nette, de vie travailleuse, ordonnée, saine, de discrétion dans le geste et le discours, d’élégance et de distinction nées du seul sentiment de porter en soi une grande âme.
Arlequin va nous faire une théorie de la faillite qu’on serait tenté de croire plus moderne.
Afin de secouer le joug odieux, nos modernes anarchistes rêvent de bouleverser le monde et de s’ouvrir le chemin de la liberté à coups de bombes.
La plupart de ses peintures ont encore aujourd’hui la force de l’antique et la fraîcheur du moderne, et peuvent être comparées à ces tableaux d’un coloris sombre et effrayant, qui sortaient des ateliers des Michel-Ange et des Carrache et donnaient à des sujets empruntés de la religion une sublimité qui parlait à tous les yeux.
L’enfantement de la société moderne, de l’égalité civile, du respect des droits de tous, s’y opérait péniblement à travers des scènes barbares et au moyen du fanatisme même.
Madame aimait l’esprit, le distinguait en lui-même, l’allait chercher, le réveillait chez les vieux poètes, comme Corneille, le favorisait et l’enhardissait chez les jeunes, comme Racine ; elle avait pleuré à Andromaque, dès la première lecture que le jeune auteur lui en fit : « Pardonnez-moi, madame, disait Racine en tête de sa tragédie, si j’ose me vanter de cet heureux commencement de sa destinée. » Dans toutes les cours qui avaient précédé de peu celle de Madame, à Chantilly, à l’hôtel Rambouillet et à l’entour, il y avait un mélange d’un goût déjà ancien, et qui allait devenir suranné : avec Madame, commence proprement le goût moderne de Louis XIV ; elle contribua à le fixer dans sa pureté.
Cette revue du théâtre ancien et moderne démontrera à qui voudra l’entreprendre l’universalité de cette proposition, à savoir, que tout le rire humain tient dans l’intervalle de l’angle bovaryque, dans l’écart qui se forme entre la réalité de quelque personnage et la fausse conception de lui-même à laquelle il s’attache.
Il l’est davantage si l’on considère par contraste l’extraordinaire puissance d’assimilation dont témoigne le Japon et si l’on remarque que les parties connues de l’histoire de ce petit peuple, nous le montrent de tout temps instable et changeant, présentant des phases variées et s’acheminant vers les temps modernes à la façon de nos barbares d’occident par la pratique d’institutions féodales qui impliquent par la multiplicité des foyers d’influence et d’initiative possible, une multiplicité aussi d’expériences diverses.
« Quant à la preuve à faire, par un poète, du moderne savoir assez disant partiellement pour une unanime vérité, une œuvre immense et simple est à venir : qui serait en une adéquate parole la philosophie de la matière en mouvement évolutive et transformiste. » Traité du Verbe.
Les âmes de Flaubert et de Leconte de l’Isle nous sont connues ; le pessimisme ironique de l’un, hautain de l’autre, leur amour d’une sorte de beauté opulente, barbare et dure, leur fuite vers les époques lointaines qui la réalisent et leur mépris tacite ou haineusement exprimé pour les temps modernes qui la nient, sont autant de traits aisément discernables de leur physionomie morale, que leur œuvre cache mais moule.
Leibnitz et Hegel sont les seuls philosophes parmi les modernes qui aient joint une grande érudition à une grande spontanéité.
Un Américain ne doit être ni vêtu ni logé comme un Français, ni un Français comme un ancien Romain, ni même comme un Espagnol moderne.
Je ne connais presque aucune composition moderne qui résistât à cet essai.
Les personnages allegoriques modernes sont ceux que les peintres ont inventez depuis peu et qu’ils inventent encore, pour exprimer leurs idées.
Louis Veuillot, ce rude contempteur des temps modernes, eut aussi sa petite faiblesse pour le talent, en tant que talent, de l’insolente ennemie du Catholicisme.
Il y eut de tout temps, en matière poétique, les novateurs et les conservateurs, les anciens et les modernes.
On ne saurait trop le redire : c’est ici ce que n’ont pas compris nos modernes naturalistes, Flaubert en tête, M.
Je ne citerai qu’un passage, où le mythe primitif et le drame tout moderne, quoique séparés par tant de siècles, se mêlent et se fondent harmonieusement dans l’imagination du spectateur subtil. […] Avec eux, on peut dire que l’amour moderne, plus profond, plus mélancolique, plus tendre, plus imprégné d’âme et en même temps plus troublé par les obscures influences de la vie nerveuse, fait son entrée dans notre littérature. […] Elle répète des comédies avec son père, cet aimable Brigard, le plus moderne et le moins grave des pères. […] Le domestique Gontran, raisonneur et indulgent pour son maître, est une esquisse d’une touche bien fine et bien moderne. […] Il convient aussi qu’Orphée soit un mari trompé, le « cocuage » étant le fond même du comique moderne.
Il avait amassé dans sa mémoire tous les documents rassemblés par l’Allemagne, l’Angleterre et la France ; il avait comparé, contrôlé l’une par l’autre toutes les leçons de l’érudition moderne. […] Le prêtre dans la société moderne, tel est le sujet de Jocelyn. […] À neuf ans, il avait étudié une langue moderne, et comme il trouvait l’occasion de se familiariser tous les jours avec les secrets de ce nouvel idiome, de le parler aussi souvent que le sien, il a pu tromper sans peine la surveillance ignorante de ses maîtres. […] Indiana et Valentine, en traduisant sous la forme dramatique ce vice de la société moderne, n’ont pas voulu le défendre et l’amnistier. […] La nuit qui décide le sort de Valentine et de Bénédict est à coup sûr une des plus admirables créations de la poésie moderne.
— Les archaïsmes des ronsardisants modernes ont été fort agréablement raillés par Rabelais, pour ne rappeler que des souvenirs nationaux, car s’il faut en croire Suétone, Auguste reprochait à son neveu Tibère ce genre de cruauté. […] Ainsi s’affirmait en sa vieillesse celui qu’on a surnommé le Villon moderne. […] Il a lu certainement tout ce qu’ont produit les poètes anciens et modernes, hindous, chinois, arabes, grecs, latins, anglais et français. […] Le marin rigide et sentimental est essentiellement moderne. […] Pierre Loti, qui se vante, avec un peu trop d’ostentation, d’ignorer complètement les auteurs modernes.
De même, quand le poète moderne personnifie les forces de la nature, quand il leur donne une sorte de vie, des sentiments avec lesquels il sympathise, lui aussi sait bien que ce n’est qu’un jeu, une illusion dans laquelle il s’enfonce à plaisir, par attrait du merveilleux, pour se, donner la représentation d’un état d’âme étrange et surprenant, celui que l’on pourrait prêter aux choses. […] De même dans les descriptions de nos modernes poètes, nous passons par transitions insensibles des personnifications les plus fantaisistes de la nature à sa représentation réaliste ; et parfois les deux modes de représentation se superposent, transparaissent l’un à travers l’autre, comme il arrive pour les deux courants de pensée qui se développent simultanément dans une phrase métaphorique. […] Dans ses Problèmes de l’esthétique contemporaine, Guyau défend contre Sully-Prudhomme la poésie des machines modernes, de la locomotive « courant sur les rails de fer qu’elle fait trembler, puissante comme la volonté humaine », des escadres qui échangent leur salut, du canon qui tonne. […] Et ce centaure qui tranquillement se fait ferrer en plein village moderne, dédaigneux de l’anachronisme ? […] Berlioz, Grand traité d’instrumentation et d’orchestration modernes, p. 138.
L’aventure de Dresde est éternelle, mais les explications de la princesse Louise font écho aux tirades des pièces modernes. […] Quelle leçon, alors, pour tous ces gens qui, sous prétexte d’émotion moderne, produisent dans leurs livres un lamentable balbutiement ! […] Aussi bien n’était-il pas logique de rencontrer un moderne exemple de la perfection classique chez celui qui, sans y songer peut-être, en a livré le secret dans une phrase prodigieuse, où il parle de « cette volupté qui n’est connue que des rivages de la mer, de contenir sans aucune perte une vie montée à son comble, et irritée… ». […] Henry Bidou raconte avec simplicité et vérité scrupuleuse une aventure où beaucoup de romanciers que vous connaissez aussi bien que moi n’eussent découvert que prétextes à décors, à mièvres attitudes et à descriptions de meubles anciens ou de costumes plus que modernes. […] D’autre part, s’ils voulurent réellement écrire le roman de l’Algérie moderne, le symbole qu’ils choisirent, quelle que soit sa valeur esthétique, apparaît insuffisant.
On voudrait, à cette occasion, montrer comment a grandi, puis s’est développée cette âme d’un admirable chrétien, preuve vivante que le divorce ou l’accord entre le monde moderne et la foi relèvent essentiellement du domaine individuel. […] Il lit Corneille, il lit Racine, mais surtout les modernes. […] Le resserrement de Florence a fait d’elle un des chefs-d’œuvre de la nature politique, une réussite quasi sans pareille dans l’histoire moderne et qui la rapproche des cités antiques, Athènes et la Rome d’avant l’Empire, où l’unité des morts et des vivants donnait un caractère de personne à l’organisme collectif élaboré sur un tout petit coin de terre. […] Le père d’Ernest Dupré, qui occupait, si mon souvenir ne me trompe pas, une chaire importante du lycée Condorcet, avait transmis à son fils un goût des beaux vers et de la belle prose qui se manifestait sans cesse par des citations, tantôt classiques, tantôt modernes. […] En pensant et agissant ainsi, Bismarck avait pratiqué cette grande loi de la continuité, si méconnue dans les temps modernes où l’on veut que le gouvernement, selon le dangereux système issu de Jean-Jacques, soit l’expression de la volonté nationale, c’est-à-dire de la majorité des habitants actuels du pays.
L’Homme Moderne est en progrès. […] Dans son dernier article, notre éminent collaborateur Zola a reproché à Daudet cet amour de jeune fille ; il me semble qu’il se trompe ; Il y a des jeunes filles romanesques, et celle-là l’est au point qu’elle ne lit aucun de nos romans modernes, sous prétexte qu’ils ressemblent trop à la vie. […] Et quelques pages plus loin : Jean se mit à parler de Tartuffe moderne a, « le livre à faire ». […] On juge, d’après ces extraits, du style général de l’ouvrage ; si nous avons insisté sur ce livre qui n’est qu’une réimpression, c’est qu’il nous a paru sortir de la banalité et du commun de trop d’œuvres modernes. […] Veuillot n’y va pas de main morte pour juger les commencements du maître du théâtre moderne.
Bérenger, comme à ses maîtres et à ses confrères, la vue du monde moderne inspirait à Walt Whitman une morale toute d’action et de compassion. […] Dans les villes, où il ne demeurait qu’à contrecœur, à peine s’il avait pu voir de loin les inventions de la science moderne ; et il n’en était que plus à l’aise pour les vénérer. […] Animer des personnages d’autrefois de sentiments et de pensées modernes, comme ont fait Walter Scott et tous ses successeurs, n’est pas moins déraisonnable que de vouloir échapper à ce défaut, comme a fait Flaubert, en créant des personnages d’autrefois qui n’ont ni sentiments ni pensées. […] Pater ont, malgré toute leur science, prêté à des personnages anciens des sentiments modernes ? […] Et, sans revenir sur la possibilité ou la valeur du roman historique, nous devons bien avouer que nul roman de mœurs modernes ne nous a donné de ce type singulier une image aussi distincte que l’histoire du Romain Marius et celle du Cavalier Inglesant.
C’est comme une pente inévitable : dès qu’il bouge, l’esprit moderne la descend. […] On n’a jamais été impunément raïa : comme les Bulgares ou les Arméniens de la Turquie moderne, les raïas de la Horde d’Or garderont longtemps au cœur et au cerveau les stigmates du joug tartare. […] Gogol se trouvait dans d’heureuses conditions, refusées à tous les modernes faiseurs d’épopées. […] Guizot, disait naguère qu’à son avis Tarass Boulba est le seul poème épique vraiment digne de ce nom chez les modernes. […] Le moderne se rapproche en ce point de l’homme primitif ; il se subordonne et se livre chaque jour davantage à la puissance mystérieuse de la terre.
Lysidas dans le salon d’Uranie, sa critique a suivi les progrès de la philosophie moderne, et les derniers combats qu’il a livrés à Molière, en Allemagne, sont de grands et sérieux efforts de dialectique, au prix desquels son escarmouche contre L’École des femmes n’était qu’une parade. […] À propos de la critique que Schlegel fait du théâtre d’Euripide, Goethe a dit : « Quand un moderne comme Schlegel relève un défaut dans un si grand ancien, il ne doit lui être permis de le faire qu’à genoux. » (Entretiens avec Eckermann.)
Quant au « grand-papa », M. de Choiseul, « comme un petit rhume le tient au lit, il se fait lire des contes de fées toute la journée : c’est une lecture à laquelle nous nous sommes tous mis ; nous la trouvons aussi vraisemblable que l’histoire moderne. […] Ajoutez l’absence des causes qui font la tristesse moderne et mettent au-dessus de nos têtes un pesant ciel de plomb.
Il y a plus : l’amour des sens inspire souvent des vices et des crimes ; l’amour des âmes inspire, au contraire, des chefs-d’œuvre et des vertus : c’est ainsi que vous voyez dans l’antiquité l’amour sensuel caractérisé par Hélène, Phèdre, Clytemnestre ; et que vous voyez dans les temps modernes l’amour des âmes se caractériser dans la chevalerie, dans Héloïse, dans Laure, par l’héroïsme, par la fidélité, par la sainteté même la plus idéale et la plus mystique. […] On ne vit, dans les temps modernes, de triomphe intellectuel comparable qu’au retour de Voltaire dans Paris, après une absence de quarante ans, pour être couronné et pour mourir.
Madame Récamier ne laissa jamais fléchir sa justice de femme sous ces théories de convention ; elle n’était point femme de parti ; elle n’aimait ni le napoléonisme, ni l’orléanisme : la Restauration, légitime par son antiquité et moderne par ses institutions, était le régime de son esprit tempéré et juste ; c’est à cause de cette conformité d’opinion qu’elle avait pour moi quelque préférence. […] Réveillée de fort bonne heure, et ayant toujours donné beaucoup de temps à la lecture, sa première matinée était consacrée à se faire lire rapidement les journaux, puis les meilleurs parmi les livres nouveaux, enfin à relire ; car peu de femmes ont eu, au même degré, le sentiment vif des beautés de notre littérature et une connaissance plus variée des littératures modernes. » XXX La mort tomba bientôt tête par tête sur ce salon qui paraissait immuable.
La lecture, l’écriture, un peu de latin pour qu’elle pût suivre plus tard les études domestiques de son jeune frère, l’intelligence et le goût des livres classiques français qui étaient le fond de la bibliothèque de la vieille maison, quelques-uns des modernes, tels que Chateaubriand et Lamennais, qui venaient de revernir le catholicisme, enfin un petit nombre de livres tout à fait nouveaux, venus de Paris par des amis qui les prêtaient au Cayla : voilà l’éducation de mademoiselle de Guérin, éducation toute passée d’abord par l’âme du père, comme l’eau suspecte filtrée par le crible. […] Le bonheur a voulu que, par une série de heureux hasards et de fidèle affection (celle de M. d’Aurevilly, un écrivain qui ne peut être caractérisé que par lui-même, parce qu’il ne ressemble à personne), le hasard et le bonheur ont voulu que ce journal et ces lettres n’aient pas péri dans les cendres du Cayla ; mais que des mains pieuses les aient recueillies le lendemain de sa mort pour édifier tout un siècle, et, après M. de Sainte-Beuve, moi, qui vais essayer d’inspirer à mes lecteurs la passion de les lire comme une Imitation de Jésus-Christ en action, le plus beau des livres modernes dans la plus tendre des âmes et dans le plus confidentiel des styles.
Quand le plus grand homme de l’Allemagne moderne eut vieilli sans perdre une seule des facultés de son âme et sans perdre un seul des cheveux blanchis de sa large tête, le ciel lui envoya Eckermann, comme le soir envoie au voyageur son ombre prolongée qui le suit dans sa route afin de lui certifier son image. […] Mais nous, modernes, si nous avons aussi de grandes idées, nous pouvons rarement les produire au dehors avec la force et la fraîcheur de vie qu’elles avaient dans notre esprit. » Je vis alors arriver Riemer, Meyer, le chancelier de Müller et plusieurs autres personnes, hommes et dames de la cour.
A moins donc de prétendre que la Renaissance n’a été pour les modernes qu’une confiscation du génie national, et qu’il eût été plus glorieux que, séparée du passé, enfermée dans son, territoire chaque nation recommençât pour ainsi dire tout l’esprit humain, comment ne vouloir pas qu’un poème qui rattachait par quelques fils, même grossiers, le génie français au génie antique, ait plus mérité de vivre que tant d’écrits oubliés par la France, pour n’avoir su que l’amuser ? […] L’époque où cette assimilation sera complète verra fleurir la plus belle littérature des temps modernes, ou plutôt la troisième forme de la littérature universelle.
Et il ajoute : « Dorénavant je n’ai plus rien à faire avec votre théâtre moderne ». […] Mais pour les œuvres de la maturité de Wagner il y a cette difficulté spéciale, c’est que ce sont bien des drames, mais que ces drames s’éloignent à tel point de notre théâtre moderne et de toutes les idées généralement reçues sur l’art dramatique, que les éléments nécessaires à leur réalisation scénique font défaut.
Cette complexité de toute émotion pourrait se déduire des deux conceptions dominantes de la physiologie moderne. […] La théorie de Platon et d’Aristote40 nous semble éclairée et confirmée par la physiologie moderne.
Vous ne trouverez plus sur les corps modernes les attitudes grandies et raidies à Rome par la vie à la dure, en beaux gestes longs et tranquilles, en poses héroïques à larges tombées de plis. […] Jeudi 21 mai Création dans une œuvre moderne d’un médecin qui, ressuscitant les traditions charlatanesques du xviiie siècle, prendrait la spécialité des débilités, de tous les hommes de 35 ans de Paris ; un homme qui aurait assez étudié la chimie et le corps humain pour savoir la dose la plus forte de dépuratif qu’il peut supporter dans un temps donné, — et un temps assez court ; un homme qui aurait fait des expériences assez grandes sur les choses alimentaires et fortifiantes pour refaire, avec des jus de viande, du bordeaux, etc., un tempérament et une jeunesse à un corps usé et à des organes las.
Il nous parle spirituellement de l’aveuglement des peintres à ce qui est devant leurs yeux, et qui ne voient absolument que les choses qu’on les a habitués à voir : une opposition de couleur par exemple, mais rien du moral de la chair moderne. […] Parmi les dîneurs, deux revenants : Gautier très pâle, ses yeux de lion encore plus affaissés ; Claude Bernard, qui a le masque d’un homme qu’on a retiré de son tombeau… Et la conversation s’en va au mariage moderne, ce mariage sans cour, sans flirtation aucune, ce mariage brutal, cynique que nous appelons un viol par-devant le maire, avec l’encouragement des parents.
— Les génies que l’on renomme ne savent trouver que douleurs dans l’exil, les commerçants qui s’expatrient au Sénégal, aux Indes, ces pays de fièvres et d’hépatites, après des dix et vingt ans d’exil ne parviennent à amasser qu’une pelote de quelques centaines de mille francs, s’ils ont en poupe le vent de la chance ; et lui Victor Hugo, le Prométhée moderne, vit dans une île délicieuse, où les médecins envoient leurs invalides, il s’entoure d’une cour d’adulateurs empressés, qui le font mousser, il voyage tranquillement en Europe, il thésaurise des millions et il obtient la palme du martyre ! […] Son gigantesque cerveau resta hermétiquement bouché à la critique démolisseuse des encyclopédistes et aux théories philosophiques de la science moderne.
Il passait alors pour un homme léger, qui, avec de l’esprit, n’avait fait que des folies, qui avait obéi à des fantaisies et à des fougues, qui avait pris de grands partis sans les tenir : Impie, dévot, jaloux amant, Courtisan, héros de province, disait ou allait dire de lui la chanson ; on l’appelait le Don Quichotte moderne ; des gens qui valaient moins que lui par l’esprit et par le cœur le raillaient, et il n’y était pas insensible.
Daru prit depuis lors une part active aux travaux de ses collègues et suivit la ligne de l’opposition modérée qui, dans plus d’un cas, et sans déroger aux idées de gouvernement, eut à défendre les principes constitutifs de la société moderne, les bases mêmes du Code civil qu’on osait remettre en cause.
C’est dans la 7e partie où, après avoir passé en revue les tombeaux chez tous les peuples anciens et modernes, j’arrive aux tombeaux chrétiens ; je parle de cette fausse sagesse qui fit transporter les cendres de nos pères hors de l’enceinte des villes, sous je ne sais quel prétexte de santé.
Bossuet, dans la sphère supérieure de l’épiscopat, demeurait l’oracle, le docteur, un Père moderne de l’Église, le grand orateur qui intervenait aux heures funèbres et majestueuses ; qui reparaissait quelquefois dans la chaire à la demande du monarque, ou pour solenniser les Assemblées du clergé, laissant chaque fois de sa parole un souvenir imposant et mémorable.
Il est et sera inébranlable sur certains principes d’égalité et de bon sens équitable, qui sont et resteront vrais à travers toutes les fluctuations successives, principes conquis une fois pour toutes et sur lesquels repose désormais l’ordre moderne ; il ne se trompe pas en appréciant ces premiers et grands actes du tiers état auxquels il eut l’honneur de participer, de présider : « Voilà ce qu’elles ont fait seules, dit-il des Communes par opposition aux deux autres ordres privilégiés et résistants ; voilà ce qui fut la base de la Constitution française.
La valeur du chef moderne, pour être moins d’homme à homme, n’en est pas moins réelle ni moins virile : elle participe davantage de l’intelligence et relève de la Minerve-Pallas plus que de Mars.
Un écrivain moderne, M.
Dans tout cet ordre moral et pratique, Charron, à son heure, est un instituteur utile et l’un des artisans éclairés qui préparent l’esprit de la société moderne.
Parmi les modernes, Louis XIV, quoiqu’on ait publié ce qu’on appelle ses œuvres, ne saurait être appelé un écrivain.
Les grandes choses, et qui sont simples à la fois, ont été dites de bonne heure : les anciens moralistes et poètes ont dessiné et saisi la nature humaine dans ses principaux et larges traits ; il semble qu’ils n’aient laissé aux modernes que la découverte des détails et la grâce des raffinements.
Frédéric, dans les singuliers vers qu’il rimait vaille que vaille dans les courts entractes des combats, et qui couraient ensuite presque autant que des bulletins, avait manifesté un dessein plus antique que moderne : c’était, après avoir tenté un dernier grand coup, de ne point survivre à sa ruine, de se donner la mort.
Se peut-il un plus frais, un plus net tableau, et mieux découpé et mieux éclairé, et où le ressouvenir de la forme antique soit mieux déguisé à la moderne ?
Pardon si je n’ai pu m’empêcher d’exhaler une souffrance que j’ai tant de fois éprouvée (et je ne suis pas le seul) en lisant des écrits modernes qui traitent du xviie siècle.
La première édition des Caractères (1688), sans nom d’auteur, semble d’abord tout à l’intention et à l’honneur de l’ancien Théophraste, dont on offrait au public la traduction : le Théophraste moderne venait, comme on dit, par-dessus le marché.
« J’ai connu dans ma province, disait-il, des savants qui ne pouvaient lire que dans leur propre bréviaire. » — « Il en est de messieurs les savants, disait-il encore, comme de nos relieurs de Weimar : le chef-d’œuvre qu’on demande au nouveau venu, pour être reçu dans la corporation, n’est pas du tout une jolie reliure dans le goût le plus moderne.
quels étaient les auteurs de ces propositions ultra-royalistes et vraiment révolutionnaires, qui allaient pleuvoir coup sur coup, qui tendaient à tout remettre en question, les idées et les intérêts modernes, à constituer la société entière en état de suspicion, à aggraver toutes les peines, à proposer la peine de mort de préférence à toute autre, à substituer le gibet à la guillotine, les anciens supplices aux nouveaux40, à maintenir la magistrature dans un état prolongé et précaire d’amovibilité, à excepter de l’amnistie des catégories entières de prétendus coupables, à rendre la tenue des registres civils au Clergé, à revenir sur les dettes publiques reconnues, etc., etc. ?
Un critique latin d’entre les modernes, un savant en us a qualifié non moins heureusement la merveilleuse et presque ineffable aménité de Térence.
Que de jolies pièces qui semblent telles encore, même après toutes les merveilles des rhythmes modernes !
Elle a profité du livre de l’abbé Proyart sans s’y noyer, et des révélations toutes modernes sans s’y trop distraire.
Le socinianisme, sous sa forme moderne la plus mystique, ne l’abuse pas.
Hippocrate l’avait pressenti, dès l’antiquité, dans son traité des Airs, des Eaux et des Lieux ; aux Anciens la vue et le pressentiment dans sa largeur : aux Modernes le détail, l’exactitude et la preuve.
Dans les visites que nous allions faire dans l’après-midi du dimanche à notre aimable et cordial professeur, il nous entretenait souvent de ces idées de réforme, de ces plans d’amélioration pour le sort du grand nombre, de ces rêves de bon et philanthropique gouvernement et de régime sensé, humain, égal pour tous, essentiellement moderne ; le souffle, qui lui était venu, le matin, de cet ancien ami de Joseph II, respirait dans ses paroles et arrivait jusqu’à nous ; il nous communiquait, tout pénétré qu’il était, une véritable inspiration de bienfaisance.
Chacun sut, grâce à lui, à quoi s’en tenir désormais sur tout ce système habile et merveilleux de créations à l’intérieur, sur ce mécanisme savant et simple, essentiellement moderne, dont le public n’avait pas la clef auparavant ou dont on ne se faisait que de vagues idées.
Or la société moderne française est loin de là: les sommités officielles d’un état dit égalitaire et démocratique se montrent fort jalouses de ce même titre qui faisait les rebuts de la cour de Louis XV.
Malouet savait décrire ; et déjà, à son premier voyage d’Amérique, allant à Saint-Domingue, il avait occupé les loisirs de la trame, dans lequel la périphrase continuelle rachète amplement l’absence de la rime, ressemble tout à fait à une traduction élégante d’un poème moderne en vers latins.
Il y a, en un mot, dans les débris du La Mennais chrétien, de quoi faire encore le plus vertueux, le plus fervent, le plus désintéressé des glorieux modernes, de même qu’il y a, dans les ruines de son autorité vraie, de quoi faire une popularité immense.
Conçoit-on que, dans une pièce de vers inspirée par un tableau de la Charité, la femme soit décrite avec des traits et des mots qui semblent réservés aux alcôves de nos romans modernes ?
Chénier se rattache de préférence aux Grecs, de même que Regnier aux Latins et aux satiriques italiens modernes.
Il y avait dans la philosophie des anciens plus d’imagination et moins de méthode que dans la philosophie des modernes.
Rabelais en effet n’est pas seulement un helléniste, un médecin, un curieux investigateur de l’antiquité et de la nature : il sait beaucoup, mais surtout il y a en lui une âme, un esprit de savant ; il a eu le culte et la notion de la science, et son programme d’éducation, chimérique même pour ses géants, est le programme du travail de la raison moderne.
Fouillée : la Philosophie de Platon (1869) ; la Liberté et le déterminisme (1873 et 1884) ; l’Idée moderne du droit (1878) ; la Science sociale contemporaine, 1880, in-18, Hachette
Comment n’a-t-il pas senti ce qu’il y a dans ses négations de grossier, de rudimentaire, d’enfantin, d’attardé, de dépassé par l’esprit moderne ?
Sa seule utilité, pensent nos modernes, c’est de nous fournir d’un diplôme.
Elle n’est cependant qu’une vulgaire maison moderne, mais je pense, et ne riez pas, que la fréquentation du poète l’avait imprégnée de charme.
D’ailleurs, nous autres modernes habitués à la doctrine de la pluralité des causes, nous ne répugnons nullement à admettre non pas un beau en soi, mais des beaux.
On y a peut-être fait jouer d’autres ressorts autrefois, il y a bien longtemps ; mais les peuples modernes seront plus longtemps encore comme il les a peints.
Ce portrait est très singulier de physionomie chez La Bruyère, et ressemble tout à fait pour la forme à quelque page moderne.
Ce neveu, élevé, adopté par lui, et dont la mémoire ne saurait se séparer de la sienne, est une des figures les plus aimables et, à notre égard, (si l’on peut dire) les plus modernes de l’Antiquité.
Je traduis tout cela en prose bourgeoise et à la moderne.
Ajoutez un dernier inconvénient qui affecte l’ensemble de cette éducation tout à la moderne et sans contrepoids : le sentiment de l’Antiquité, le génie moral et littéraire qui en fait l’honneur, l’idéal élevé qu’il suppose, y est tout à fait absent, et n’y semble même pas soupçonné.
Le Napoléon des dernières années y est parfois avec des traits où M. de Lamartine a combiné son style nouveau et quelque chose de ses anciennes préventions ; il a retraduit dans sa manière moderne son ancienne poésie.
On sortait de la langue du xvie siècle : que cette prose de Rabelais, de Montaigne, de d’Aubigné et de tant d’autres, fût en partie très regrettable et préférable même à celle qu’on essayait de former, ce n’était pas la question, puisque la société n’en voulait plus et prétendait, depuis Malherbe, s’en composer une moderne, plus choisie et toute réformée à son usage.
En dénonçant l’abus de l’esprit philosophique, l’auteur ne fait ni comme Bonald, ni comme de Maistre, ni même comme Rivarol ; il n’en accuse pas amèrement, il n’en proscrit pas absolument l’usage, et il se montre attentif à extraire du grand mouvement moderne tout ce qui sert la raison sans détruire la morale et l’État.
Carrel n’avait rien de ces saillies à la moderne et un peu hasardées : sa forme est sévère ; elle est véritablement classique.
C’est là que, dans les loisirs d’une vie toute pieuse, toute studieuse, et où les plus nobles amitiés avaient leur part, il composa les deux premiers volumes de l’ouvrage intitulé Esquisse de Rome chrétienne, destiné à faire comprendre à toutes les âmes élevées le sens et l’idée de la Ville éternelle : « La pensée fondamentale de ce livre, dit-il, est de recueillir dans les réalités visibles de Rome chrétienne l’empreinte et, pour ainsi dire, le portrait de son essence spirituelle. » Interprète excellent dans cette voie qu’il s’est choisie, il se met à considérer les monuments, non avec la science sèche de l’antiquaire moderne, non avec l’enthousiasme naïf d’un fidèle du Moyen Âge, mais avec une admiration réfléchie, qui unit la philosophie et la piété : L’étude de Rome dans Rome, dit-il encore, fait pénétrer jusqu’aux sources vives du christianisme.
Les bons vers de Conaxa sentent le Régnier et le ton de la vieille satire : si l’auteur moderne les avait introduits dans son courant limpide, ils y auraient fait tache.
Il était de ceux qui, à cette date, pouvaient se dire des plus éclairés dans le sens moderne ; il avait causé à Dantzig avec l’illustre astronome Hévélius et avait recueilli de sa bouche les notions les plus exactes de l’univers physique ; il avait acquis, chemin faisant, sur les différentes familles de langues et sur leur génération relative, des idées très justes aussi et qui n’étaient pas communes en ce temps.
Quoi qu’il en soit, l’idée de travail et de paix, qui, malgré les échecs qui lui arrivent de temps en temps, semble devoir dominer de plus en plus les sociétés modernes, doit beaucoup à Franklin.
Lui, l’habile et le spirituel crayonneur, le brillant et savant aquafortiste, le maître au cochon, affecte doctoralement de répudier toutes les habiletés, les adresses, les procédés, tout ce dont est fait son petit, mais très réel talent, pour n’estimer que les maîtres primitifs, les maîtres spiritualistes, et ne reconnaître dans toute l’école moderne qu’un seul homme : M.
Barthélémy Saint-Hilaire qui fait autorité en cette question, qu’il succomba, après plusieurs années de souffrances, à une maladie d’estomac, qui était héréditaire dans sa famille et qui le tourmenta toute sa vie. » Même dans les temps modernes, il faut se défier des anecdotes un peu extraordinaires.
Il a eu de mauvais imitateurs, soit ; mais nos plus grands écrivains modernes ne viennent-ils pas de lui en droite ligne et par une filiation facile à saisir ?
Pas d’inversion, voilà une grosse différence de construction entre la strophe ancienne et la strophe moderne.
Au contraire, le Moyen Âge a produit en masse des œuvres imparfaites, où des idées profondes, des pressentiments sublimes ont pris des formes souvent vagues et imprécises qui permettent à l’imagination moderne de les interpréter et de les compléter à son gré. Le Moyen Âge que Wagner voulait faire revivre, en le transfigurant par le sentiment moderne, c’était le Moyen Âge allemand. […] Celle-ci n’est qu’une variante — relativement assez moderne — d’un thème très antique et très répandu, l’aventure du mortel qui, grâce à l’amour d’une déesse, pénètre tout vivant dans la région surnaturelle où brille un éternel printemps, où règne un immuable bonheur. […] » Il prête ici son nom au chasseur éternel, ancien dieu germanique ou celtique, remplacé ailleurs par d’autres personnages plus ou moins modernes comme Hérode, le roi Hugon, Théodoric, Arthur, etc. […] Pierre Alphonse était très versé dans la littérature arabe, qui elle-même, généralement à travers le pehlvi d’abord (langue perse du temps des Sassanides), puis le syriaque, avait emprunté à l’Inde cette masse de contes qui ont si longtemps passé pour le produit de l’imagination arabe et que la science moderne rend aujourd’hui à leur vraie patrie.
Tel est le point d’arrivée d’un roman italien que je viens de lire et qui laisse bien loin derrière lui les dernières études analytiques, les examens assidus et persistants du moi, qui constituent une des évolutions de la littérature moderne. […] Son héros, un premier rôle de la politique moderne, courait grand risque de ressembler à ceux que MM. […] Quelque déchéance que le snobisme ait infligé à notre haut monde moderne, il n’a pu sévir qu’exceptionnellement, et la répulsion qu’il inspire ne peut porter que sur quelques êtres sans que la généralité en soit atteinte. Or, le tort du roman moderne est de ne voir que l’exception et de généraliser d’après elle ; qu’il soit bien convenu que l’héroïne de M. […] Quand ce fut fini, le vieux logis gothique, biscornu, plein de mystère et de recoins sombres, où nichaient les toiles d’araignée et les fantômes, se trouva transformé en une agréable maison moderne, spacieuse et claire, où jouait l’air pur, où riait la lumière de Dieu.
Il est probable, du moins je le crains, que la politique locale des États interviendra trop dans le plan de gouvernement qu’une sagesse et une prévoyance dégagées de préjugés auraient dicté plus large, plus libéral ; et nous pourrons commettre bien des fautes sur ce théâtre immense, avant d’atteindre à la perfection de l’art… » Mais la lettre tout à fait monumentale et historique est celle qui a pour date : Mount-Vernon, 1er février 1784, aussitôt après la résignation du commandement : « Enfin, mon cher marquis, je suis à présent un simple citoyen sur les bords du Potomac, à l’ombre de ma vigne et de mon figuier… » On est dans Plutarque, on est à la fois dans la réalité moderne. […] Permettons-lui, sous ce rapport, d’en vouloir un peu à la philosophie moderne qui tend à désenchanter le monde du prestige des conquêtes, et qui, modifiant l’opinion de l’Europe et le ton de l’histoire, fait demander quelles furent les vertus d’un héros, et de quelle manière la victoire influa sur le bien-être des nations. […] Il eut cette idée, et elle est grande ; elle est digne en elle-même de tout ce que l’antiquité peut offrir de stoïque au temps des triumvirs, et elle a de plus l’inspiration sociale, qui est la beauté moderne.
Sous cette forme neutre, cette espèce de cote mal taillée qu’est une traduction, sous ces Empereur et Galiléen, « un drame historique en deux parties…, qui synthétise toutes les idées du dramaturge norvégien et prend les proportions d’un réquisitoire dressé contre les bases de la morale et de la société moderne. » C’est au nom d’une sorte de christianisme intransigeant et radical qu’Ibsen s’insurge contre les conventions et les hypocrisies. […] C’est à eux que nous devons la plus grande révolution religieuse des temps modernes. […] Comment un sentiment qui ne joue qu’un rôle secondaire dans l’existence moderne reste-t-il, aujourd’hui comme il y a deux siècles, le pivot de toutes les combinaisons dramatiques ? […] Une rhétorique terrible sévit à l’origine des littératures modernes ou, pour mieux dire, au moment où elles ont fait la rencontre des littératures antiques. […] En outre, un préjugé moderne veut que l’infidélité de la femme « déshonore », l’époux, sans que la réciproque soit vraie.
« La marche de l’esprit moderne a été plus hardie. […] A l’exception de trois ou quatre grands modernes qui appartiennent encore à demi au siècle dernier, vous verrez que Racine, Corneille, La Fontaine, Boileau, Molière, Pascal, Fénelon, La Bruyère et Bossuet, ont répandu plus d’idées justes et véritablement profondes que ces écrivains à qui on a donné l’orgueilleuse dénomination de penseurs, comme si on n’avait pas su penser avant eux avec moins de faste et de recherche. » La théorie littéraire de Fontanes est là ; son originalité, comme critique, consiste, sur cette fin du xviiie siècle, à déclarer fausse l’opinion accréditée, « si agréable, disait-il, aux sophistes et aux rhéteurs, par laquelle on voudrait se persuader que les siècles du goût n’ont pas été ceux de la philosophie et de la raison. » C’était proclamer, au nom des Écoles centrales, précisément le contraire de ce que Garat venait de prêcher aux Écoles normales. […] Il croyait cela vrai des grands États modernes, même des États anciens et de ces républiques grecques qui n’avaient acquis, selon lui, une grande gloire que dans les moments où elles avaient été gouvernées comme monarchiquement sous un seul chef, Miltiade, Cimon, Thémistocle, Périclès. […] Et puis Talma s’est beaucoup varié sur les dernières années, et a grandi dans des rôles modernes.
Allez, allez toujours dans cette voie, écrivains mes frères, qui êtes l’exemple et l’honneur du journal français, une des gloires de l’Europe moderne ; allez dans cette voie ; on y rencontre, il est vrai, toutes sortes d’intelligences médiocres, toutes sortes de lecteurs imbéciles, et des ignorants, et des niais, et des frivoles, et des beaux esprits de café, et des idiots qui courent après l’aventure, après le hasard, empêtrés dans les fêtes sanglantes de la cour d’assises, dans les événements de la rue, ou dans les émotions du carrefour. […] On a beaucoup parlé, de nos jours, et, Dieu merci, on n’en parle plus, de la liberté que s’était donnée le drame moderne, de cet admirable vagabondage de la poésie dramatique qui ne connaît plus d’obstacles ; les poètes se sont tendrement embrassés les uns les autres, en l’honneur de ce prétendu affranchissement de la comédie ; on a crié bien haut que les unités étaient réduites au silence, et chacun de se féliciter comme s’il avait inventé Shakespeare ! […] C’était l’opinion des moralistes anciens, tout aussi bien que des moralistes modernes ; mais les Grecs, ces hommes presque divins, redoutaient la déclamation et l’emphase plus qu’ils ne redoutaient la famine et la peste17. […] Alexandre Dumas avait imaginé d’encadrer l’intermède de Molière dans un intermède de la composition de l’auteur d’Antony, et il arriva, chose étrange et chose incroyable, et toute à la louange du poète moderne, que cet habile et intelligent auditoire du Théâtre-Français confondit d’un bout à l’autre, de ces trois petits actes, beaucoup trop allongés, le principal et l’accessoire, la comédie et la mise en scène, la sauce et le poisson !
Virginie Tahar, professeur agrégé de lettres modernes, Allocataire moniteur à Paris-Est Marne-la-Vallée À André Breton et Paul Éluard Lénine, dans Matérialisme et Empiriocriticisme, constate, dès l’introduction, que : Diderot arrive presque aux vues du matérialisme contemporain, d’après lesquelles, les syllogismes ne suffisent pas à réfuter l’idéalisme, car, il ne s’agit pas, en l’occurrence, d’arguments théoriques a. […] Et même ceux qui prétendent ne point tomber dans le piège des confusions mélomaniaques, les disciples modernes de M. de Voltaire, après avoir consenti à répéter la phrase célèbre : « Si Dieu a fait l’homme à son image, l’homme le lui a bien rendu m » ces professionnels de l’ironie s’autoriseront de la vieille boutade2 pour continuer à tolérer, c’est-à-dire encourager, de toute leur fielleuse bonasserie, les idées, les idées chrétiennes que le monde se fit au soir angoissé de l’empire romain. […] Et ils concluaient : Sans préjudice des conquêtes qu’il présage sous le rapport de la liberté, nous le tenons, au point de vue de la poétique moderne, pour un remarquable critérium. […] Que soit, grâce aux efforts et recherches d’un petit nombre, levé ce que Breton appelait le terrible interditau , de quoi cela servira-t-il, si, à nouveau, les anciennes zones interdites se trouvent morcelées en jardins d’agrément ou de désagréments individuels, si, par veulerie panthéiste, elles se laissent tourner en terrain vague, ou si, tout au long des avenues qui se prétendront modernes, poussent des gratte-ciel scolastiques.
On vient de me dire qu’ici on aime la France3 ; je m’en suis aperçu déjà, depuis le peu de temps que je suis au Canada, et ce que je veux essayer de faire, c’est, en vous parlant de nos écrivains, des écrivains du xixe siècle, vous montrer ce qu’il y a, dans cette littérature moderne, de bon, d’intéressant et qui, je le crois, peut faire aimer davantage encore cette France. […] Et nous allons voir ainsi se succéder l’époque primitive, patriarcale, les temps de la Bible ; nous verrons les temps anciens, nous verrons le moyen âge ; nous arriverons jusqu’à l’époque moderne ; plus loin que l’époque moderne, nous arriverons jusqu’à la fin du monde ; plus loin que la fin du monde, jusqu’au jugement dernier, et plus loin que le jugement dernier. […] Ces sonnets portent sur l’histoire ancienne, sur le moyen âge, sur la découverte de l’Amérique, sur les temps modernes.
Puis on dissertait, tout en faisant collation d’exquises confitures, sur les bons ouvrages anciens et modernes, tant grecs et latins, que français, italiens et espagnols. […] Au surplus, Théophile, comme firent de tout temps les poètes étourdis et sans doctrine, n’oublie point de s’écrier : « Il faut écrire à la moderne. » Et là-dessus il part en guerre contre la mythologie. […] Racine, qui s’en est servi sans se demander ce que c’est que d’écrire à la moderne, fut le plus de son temps et le plus vraiment original, bien que ne répugnant pas à « ces larcins qu’on appelle imitation des auteurs anciens », comme tu dis. […] Comme jadis dans la maison de Louise Labé, on dissertait sur les bons ouvrages, anciens et modernes, et l’on faisait peut-être aussi collation d’exquises confitures, non de Lyon, mais d’Orient. […] Ils soutenaient qu’il était allé de chute en chute, et que l’art moderne ne lui réussissait guère plus que la routine.
A un ancien fond, qui est la comparaison, déjà plus libre que dans Homère, moins parallèle, on voit superposé le champ moderne de la métaphore. […] C’est en ce sens que l’on a dit que la meilleure histoire de France serait un Recueil de textes ; chimérique pour les périodes modernes, cela a été commencé et cela se continue pour les périodes primitives. […] C’est une des rares traces de l’ancien français restées dans le français moderne. […] Pourquoi ne pas expliquer ces nuances, pourquoi ne pas joindre aux grammaires modernes quelques vieux textes ? […] Presque toute la critique moderne, faute de notions scientifiques, est de la littérature légère.
Cela ne cadre point avec notre impatience moderne, qui est si grande — excessive, je le reconnais — que les dramatistes ont dû abandonner les proportions même d’Emile Augier et de Dumas fils. […] Nous rions des disparates, c’est-à-dire de ce que nous appelons en argot moderne les « gaffes » et les « impairs ». […] Mais Talma, qui n’avait jamais joué la comédie moderne, au moins depuis sa jeunesse, prit a part Casimir et lui dit : « C’est moi qui jouerai Danville… Oui ! […] Il y montrait encore que le fils Vanderk est quelque chose — et que cela est donc moderne encore ! […] On peut dire de tous en général ce qu’un poète moderne a dit de l’un d’eux : Artiste au front paisible avec les mains en feu.
La vie moderne laisse une grande marge au désir. […] Qu’ils viennent et qu’ils confessent que leur gaie science ne vaut pas l’art savant et délié de nos conteurs modernes ! […] Guy de Maupassant un assez beau cortège de conteurs anciens et modernes. […] Pourtant, elle ne choque aucune de nos idées modernes, n’est en contradiction absolue avec aucune de nos doctrines. […] Il vaudrait peut-être mieux embrasser moins de temps, s’en tenir aux âges modernes et les étudier avec toutes les circonstances qui en révèlent l’esprit et la vie.
Tout au rebours de ce qui s’est passé pour d’autres peuples, — et, notamment, dans les temps modernes, pour les Allemands ou les Italiens, — ni la langue ni la littérature ne paraissent avoir été, comme on dit, les facteurs essentiels de la nationalité, et encore moins de l’unité française. […] et l’homme qui l’a exercée n’est-il pas digne qu’on le compte, aussi lui, parmi les « précurseurs » ou les « initiateurs » de la littérature moderne ? […] Or, Rousseau est sans doute autre chose, mais, avant tout et par-dessus tout, c’est un Lyrique, le premier des Lyriques modernes, et, à ce titre, le maître ou l’ancêtre commun de Byron, de Gœthe et de Schiller, de Lamartine et d’Hugo. […] Mais ce qui fait de Rousseau le premier des lyriques modernes, c’est autre chose encore : c’est la mobilité, c’est surtout la capacité, et, si je puis ainsi parler, c’est le pouvoir d’absorption et de rayonnement de son Moi. […] C’est le Lyrisme que je veux dire ; et, sans m’embarrasser ici de la diversité de sens qu’on a pu donner à ce mot, qu’il faudrait même lui donner, si l’on voulait qu’il enveloppât les lyriques anciens et modernes, — Pindare et Byron à la fois, Pétrarque et Ronsard, Lamartine et Sapho, — je le prends comme significatif et comme abréviatif de cette exaltation du sentiment personnel que nous avons vu paraître tout à l’heure, presque pour la première fois, dans les littératures modernes, avec la Nouvelle Héloïse et les Confessions.
Le compliment du maréchal de Biron qui le visite en passant est un autre trait qui montre bien les restes de chevalerie et de féodalité à la Froissart dans cette bataille déjà moderne ; voyant les prisonniers dans la chambre du blessé, et l’étendard conquis près de son chevet : Adieu, monsieur mon compagnon, lui dit le maréchal ; vous ne devez point plaindre vos plaies ni votre sang répandu, puisque vous remportez une des plus signalées marques d’honneur que saurait désirer un cavalier le jour d’une bataille, et que vous avez là des prisonniers qui vous fourniront de quoi payer vos chevaux tués, faire panser vos blessures, et boire du bon vin pour faire de nouveau sang.
On l’a opposé à Colbert ; il est surtout l’opposé de Law, et fermé à toutes les idées modernes de crédit.
Le Français, selon lui, a un mérite distinctif : « Il est le seul peuple dont les mœurs peuvent se dépraver sans que le cœur se corrompe et que le courage s’altère. » Il voudrait voir l’éducation publique se réformer et s’appliquer mieux désormais aux usages et aux emplois multipliés de la société moderne ; il prévoit à temps ce qui serait à faire, et, connaissant le train du monde, il craint toutefois qu’on ne le fasse pas à temps : « Je ne sais, dit-il, si j’ai trop bonne opinion de mon siècle, mais il me semble qu’il y a une certaine fermentation de raison universelle qui tend à se développer, qu’on laissera peut-être se dissiper, et dont on pourrait assurer et hâter les progrès par une éducation bien entendue. » Duclos veut une réforme en effet, et non point une révolution.
Daru lui fit une réponse moins brève, pleine de bonté, de sens et d’élévation, qui serait applicable encore aux plaintes et aux révoltes de bien des Gilbert et des Chatterton modernes : Puisque vous me le permettez, lui écrivait-il de Königsberg (24 juillet 1807), nous allons causer de vos affaires.
Et nous, retenons jusque dans les âges modernes quelque chose de ces mâles échos.
D’Argenson sait bien où est l’excès, et ayant dans la suite à parler des historiens modernes comparés aux anciens, il dira, en rendant aux autres le conseil qu’il avait reçu : J’ai déjà prévenu d’une des plus grandes difficultés pour les auteurs : ils devraient être en même temps hommes de cabinet et hommes du monde.
La margrave de Bareith qui avait eu une éducation très soignée, qui savait les langues modernes, l’histoire, la littérature, et qui aurait pu écrire ses mémoires en anglais aussi bien qu’en allemand, les a écrits en français, de même que c’est en français qu’elle correspondait toujours avec son frère.
À propos de cette critique de Commynes dans la bouche de Jacques Ier, faisons pourtant remarquer nous-même que, loin d’être léger dans son jugement des Anglais et des institutions anglaises, Commynes est bien informé, plein de sens, de prévoyance, et que dans la différence qu’il établit entre la manière dont les choses se passaient de son temps en France et en Angleterre, il devance tout à fait les publicistes modernes et Montesquieu.
. — Tout ce qui a touché au romantisme, du temps des belles ardeurs, doit lui savoir gré de la manière dont il remet au pas une de ses plus vieilles connaissances, un classique maussade et saugrenu, à qui l’envie était venue un peu tard d’entrer en lice, satire ou comédie en main, et de pulvériser les modernes.
Il y a bien des manières d’être voyageur, et je ne voudrais en exclure aucune ; mais je ne puis m’empêcher d’opposer cette façon d’aller de Montaigne à celle d’un grand écrivain moderne, voyageur par ennui plus encore que par curiosité, et qui, dès qu’il avait saisi les grands horizons, les vastes contours, les ciels et les sommets dominants d’un pays, ne daignait y rien, regarder de plus.
N’ayant pas reçu de bonne heure toute l’éducation qu’il aurait fallu, s’étant refusé par vertu, par scrupule, par esprit étroit de bourgeoisie, toute celle même qui était à sa portée, l’expérience de Versailles et de la Cour, celle des femmes et des grands seigneurs, et plus tard le spectacle de l’ambition la plus gigantesque dans le sein du plus grand héros moderne, il avait pourtant des débris, des fragments de poète pathétique et terrible.
On sourit de voir Catinat dans cette auberge, dans ce conciliabule à trois et ce guet-apens, — un guet-apens pour le bon motif, — jouer si bien le rôle qu’on supposerait chez un personnage d’un de nos mélodrames modernes.
Entre les modernes, l’une a lu et préfère à tout Lamartine et, comme la vigne de l’Évangile « entourée de haies », à laquelle elle se compare, elle s’est gardée de la contagion des romans ravageurs et troublants.
je crois sentir dans ce simple récit de Rochambeau l’homme déjà moderne, l’homme de la guerre d’Amérique et qui a traversé honorablement 89.
Ce n’est certes pas nous qui le blâmerons jamais d’avoir mis des conditions de régime moderne au rétablissement des Bourbons et d’avoir stipulé des garanties.
La partie politique de son recueil est celle qui a le moins d’originalité : la langue d’abord en devient aisément toute française, car le patois n’a point, dans son fonds, ce vocabulaire moderne.
La société moderne, lorsqu’elle sera un peu mieux assise et débrouillée, devra avoir aussi son calme, ses coins de fraîcheur et de mystère, ses abris propices aux sentiments perfectionnés, quelques forêts un peu antiques, quelques sources ignorées encore.
Il y avait entre les cercles doctrinaires studieux, raisonneurs, bien nobles alors assurément, mais surtout fructueux, et les cercles purement aristocratiques et frivoles, il y avait un intervalle fort marqué, un divorce obstiné et complet ; d’un côté les lumières, les idées modernes, de l’autre le charme ancien, séparés par des prétentions et une morgue réciproque.
En sorte que le monde ancien, histoire, poésie, arts, métiers, civilisation, mœurs, religion, est tout entier dans Homère ; que le monde littéraire, même moderne, procède à moitié de lui, et que, devant ce premier et ce dernier des chantres inspirés, aucun homme, quel qu’il soit, ne pourrait, sans rougir, se donner à lui-même le nom de poète.
Le poison de la flatterie, le flambeau de la sédition, le torrent de la démocratie, la hache du despotisme, le bandeau de la superstition, les ténèbres de l’ignorance, le glaive de la loi, la balance de la justice, l’hermine du magistrat, l’aigle de Meaux, le cygne de Cambrai, la perfide Albion et la moderne Babylone, l’Athènes de la Champagne ou l’Athènes du Midi, l’esclavage ou la tyrannie des passions, les foudres de l’éloquence ou de la vengeance divine, et les lions, les lauriers, les astres, les trésors métaphoriques qui depuis trois cents ans ont régné, débordé, fleuri dans la littérature ; etc., etc. : autant de vieilleries, dont on ne saurait trop sévèrement s’interdire l’usage.
« Moderne » par insuffisance d’éducation et inintelligence de l’antiquité, irrespectueux jusqu’à mettre en style burlesque et insipide l’Iliade et le Télémaque, Marivaux était qualifié pour se faire bien venir de Fontenelle et de La Motte, pour être accueilli dans les salons de Mme de Lambert et de Mme de Tencin : voilà le groupe où il se classe.
la formule est là ; notre révolution moderne n’a pas d’autre base ; c’est la mort fatale de l’antique société, c’est la naissance d’une société nouvelle, et c’est nécessairement la poussée d’un nouvel art, dans ce nouveau terrain… Oui, on verra la littérature qui va germer pour le prochain siècle de science et de démocratie !
Il aurait ensuite pu reconnaître que quelques-uns de nos écrivains modernes procurent précisément le même plaisir, et excitent de même la rêverie, c’est-à-dire qu’ils ont comme les poètes du nord un style compréhensif.
J’ai voulu exprès citer ce passage, parce qu’avec les mérites de vaillance et de labeur qui s’y déclarent et qui honorent M. de Balzac, on y saisit à nu le côté moderne, et la singulière inadvertance par laquelle il dérogeait et attentait aussitôt à cette beauté même qu’il prétendait poursuivre.
Toutefois, le style de Rousseau reste encore le plus sûr et le plus ferme qu’on puisse offrir en exemple dans le champ de l’innovation moderne.
Nous faisons plus qu’entrevoir, nous embrassons déjà fort clairement, dans ces nobles pages de d’Aguesseau, la théorie de plus d’un illustre moderne, ce qui sera la métaphysique de M.
En art, il a le goût riche et fin, libre à la fois et compliqué, antique tout ensemble et moderne, tout à fait particulier et original.
Quand on voyait Mme Gay en compagnie de ses filles, de Mme de Girardin et de Mme la comtesse O’Donnell, ce qu’il y avait de plus jeune, de plus moderne de façon, de plus élégant en celles-ci, ce que leur esprit avait, si je puis dire, de mieux monté dans son brillant et de mieux taillé par toutes les facettes, ne faisait que mieux ressortir ce qu’il y avait de vigoureux et de natif en leur mère.
Jusque dans cette désagréable Satire contre les Femmes, j’ai vu les plus ardents admirateurs de l’école pittoresque moderne distinguer le tableau de la lésine si affreusement retracé dans la personne du lieutenant criminel Tardieu et de sa femme.
Le caractère de la conversation comme nous l’entendons en société, et ce qui la distingue chez les modernes, c’est que les femmes y ont été admises ; et c’est ce qui fait qu’au Moyen Âge, aux beaux moments, dans certaines cours du Midi, en Normandie, en France ou en Angleterre, il a dû y avoir de la conversation charmante.
II La Vie de Bohême m’offre une belle occasion de faire de l’indignation contre les autobiographies modernes.
c’est cette ère des personnalités fortes, ouverte par Louis XIV, mais qui n’est pas fermée, c’est cette réserve de Dieu quand les peuples sont à bout de malheurs et de fautes et qui est peut-être toute la question des temps modernes dans ce qu’ils ont de passé déjà et ce qui leur reste d’avenir, c’est celle nécessité et cette grandeur qu’il n’est pas permis aux esprits fermes en politique de méconnaître.
Il est un Trissotin surveillé, correct, moderne, à linge blanc, ayant du monde, certainement moins cuistre que l’autre, mais nonobstant excessivement Trissotin, ayant, comme l’autre, son latin et son grec et de bien autres langues à sa disposition ; un Trissotin compliqué, perfectionné et polyglotte, qui se permet de cracher toutes sortes de mots étrangers et savants en ces Lettres, qui font l’effet d’un dégorgement de perroquet indigéré.
Cette forme élargie et flottante de la Critique moderne, qui, à propos d’un ouvrage à serrer dans son étau, peut embrasser le monde tout entier, cette forme qui n’était plus le livre et qui n’était pas non plus l’article de journal, était née.
Pas un cheveu de l’Église catholique n’a été touché dans cette discussion sur les miracles de l’Évangile, sur ces miracles de thaumaturge à homme, expliqués par le magnétisme et les sciences modernes que Rousseau ne connaissait pas.
Vous aurez besoin à chaque instant de cette opération dans la philosophie moderne.
L’esprit humain, toujours curieux, aime à revenir quelquefois sur ces temps de son enfance ; mais quand on a jeté un coup d’œil sur des masures ou des palais gothiques, on aime ensuite à se reposer sur les grands monuments de l’architecture moderne.
Songeons, pour être justes, en dépit des grossières peintures échappées au chantre délicat du Moineau de Lesbie, que du même foyer est sorti le grand lyrique de Rome, demeuré tel pour le monde moderne.
Nous ne voulons pas tomber tout à la fois dans le paradoxe et dans le lieu commun qui faisaient de Voltaire le Sénèque de la poésie moderne.
À l’Italie moderne. […] C’est que, comme l’Italie moderne (celle de 1792), « l’antique royaume des Sésostris, gouverné en apparence par des monarques, en réalité par un pontife maître de l’opinion, se composait de magnificence et de faiblesse ». […] C’est en somme ce vaste désir d’inexploré qui lui a fait entreprendre, à vingt-cinq ans, ce voyage de l’esprit à travers le monde ancien et le monde moderne, et chercher des visions dans le temps, comme il avait cherché des images dans l’espace. […] Il recommence à comparer les philosophes grecs et les philosophes modernes. […] Mais, encore une fois, il s’agit de beauté (du moins on nous l’avait dit) ; et, sur ce point, il s’en faut que l’auteur établisse la supériorité de la poésie moderne, arrêtée à la fin du dix-huitième siècle.
La plupart des modernes sont romantiques, non pas parce qu’ils sont récents, mais parce qu’ils sont faibles, maladifs, malades ; l’antique n’est pas classique parce qu’il est antique, mais parce qu’il est vigoureux, frais, serein et sain. […] Nous croyons écrire d’une façon meilleure, plus moderne, plus vivante. […] Si quelque souverain plus moderne ou plus près de Goethe eût eu certains traits de ressemblance avec lui, c’eût été, peut-être, un des Hohenzollern, prédécesseurs de Frédéric II, souverains d’un État modique, ambitieux de s’accroître, bien plus en tout cas que l’honnête Charles-Auguste. […] Néanmoins, j’aime à croire qu’Henrik Ibsen, ou tout autre écrivain moderne que tenterait le sujet, en pénétrerait mieux le sens humain et profond. […] Le réveil n’en fut que plus cruel. — Ne sont-ce pas là des éléments bien dignes en effet de tenter un écrivain moderne, un de ceux que hante le difficile problème des rapports de l’individu et de la société et qui se plaisent à transporter sur la scène l’image des conflits douloureux que multiplient les conditions de la vie actuelle entre l’être isolé et le monde qui l’entoure ?
Les scrupules modernes n’étaient pas nés. […] Il faut que leur poëte soit dialecticien comme un docteur d’école ; il a besoin de toute la rigueur de la logique ; il s’y accroche en nouveau converti, tout imbu des preuves qui l’ont arraché à la foi nationale et qui le soutiennent contre la défaveur publique, fécond en distinctions, marquant du doigt le défaut des arguments, divisant les réponses, ramenant l’adversaire à la question, épineux et déplaisant pour un lecteur moderne, mais d’autant plus loué et aimé de son temps. […] Il a traduit Perse, Virgile, une partie d’Horace, de Théocrite, de Juvénal, de Lucrèce et d’Homère, et mis en anglais moderne plusieurs contes de Boccace et de Chaucer.
La « transposition » complète, moderne et parisienne, telle que ta pourrait essayer un Courteline, en serait sans doute impayable. […] Et je crois que les anciens surtout l’ont connu Les modernes, peu ; car toujours ils y ajoutent ou de l’ironie, ou de la misanthropie, ou du pessimisme, ou une recherche morose du laid (G. […] L’impureté moderne, avec ses détours, ses inquiétudes et ses feintes, a un bien autre aiguillon. […] En comparaison, les modernes font de la peine, et, pour conclure, nous ne sommes que de la chiasse… Je parle des autres, bien entendu. » Mais, décidément, elle se tient trop mal, cette duchesse Gibou. […] Ce serait plutôt, par la simplicité et la vérité du sujet et par je ne sais quel comique élémentaire et puissant, quelque chose comme l’équivalent moderne des farces de Molière.
Voilà le seul fil par lequel seront reliées les comédies qui vont venir ; seulement il faut prévenir le lecteur que mademoiselle Mars n’est pas seulement dans les œuvres passées, elle se retrouvera dans les œuvres modernes, avec les poètes qui vont venir, Hélas ! […] Voilà pourquoi il a créé si peu de rôles dans les comédies modernes, pourquoi il a excellé dans la comédie de Molière, de Regnard, de Beaumarchais, de Marivaux surtout. […] Ceci nous explique comment cette comédie des Femmes savantes est restée pour nous une comédie toute moderne, pendant que des chefs-d’œuvre de la même famille : Tartuffe et Le Misanthrope, ressemblent à ces admirables portraits passés de mode, que les amateurs conservent précieusement dans leur cadre d’or, par le double respect qui est dû à la main d’un ouvrier de génie, et au souvenir des ancêtres vénérés. […] Nous avons déjà dit que dans les idées modernes, dans le respect que les nations chrétiennes portent à la jeune fille, l’action du jeune homme qui viole, de gaieté de cœur, et même sans trop savoir à qui il s’adresse, une enfant sans défense, est un crime horrible, hideux, insupportable et qu’on ne saurait montrer à d’honnêtes gens sans les insulter. […] Par l’esclavage, ou, ce qui revient au même, par le vice, vous pouvez rattacher les personnages de la comédie grecque ou latine aux personnages de la comédie moderne.
« Il n’y a pas d’hybrides en pathologie nerveuse », répétait Charcot, affirmant, à propos des phénomènes les plus complexes qui soient, le grand principe qui domine la médecine moderne : la spécificité des maladies. […] Il a goûté et connu la fleur suprême du monde antique et du monde moderne, d’Athènes et de Venise, de la Toscane et de l’Espagne, du Moyen Âge et de la Renaissance. […] Or il se trouve que Gautier a donné la formule la plus nette et l’exemple le plus accompli de cette peinture-là. — Baudelaire a entrepris de dégager la poésie de la vie moderne et parisienne. […] Il consiste tout entier dans cette remarque qu’une société humaine, surtout une société moderne, est un organe vaste et compliqué. […] Ayant pris leur parti d’un ordre de choses qu’ils jugeaient inévitable, leur sincère ralliement aux idées modernes devait s’accommoder à merveille du régime à demi démocratique de 1830.
Les poèmes de M. de Vigny sont classés sous deux titres, plus singuliers que motivés : Livre antique, Livre moderne. […] La liberté moderne nous dotera d’une poésie ; mais cette poésie ne ressemblera pas plus à la poésie antique que la liberté des anciens ne ressemble à la nôtre. […] Est-ce assez d’un grand poète, en nos temps modernes, pour distraire les nations du sentiment de leurs maux domestiques ? […] Il n’y a guère d’exemples, dans les poètes, tant anciens que modernes, d’une verve si nourrie, et d’une tenue si longue. […] La vérité politique existe-t-elle pour plus d’un siècle ou de deux siècles dans les temps anciens ; pour plus d’un an ou de deux ans dans les temps modernes ?
Chez aucun écrivain du temps, ce don ne manque ; ils n’ont point peur des mots vrais, des détails choquants et frappants d’alcôve et de médecine ; la pruderie de l’Angleterre moderne et la délicatesse de la France monarchique ne viennent point voiler les nudités de leurs figures ou atténuer le coloris de leurs tableaux. […] Les dieux grecs et tout l’Olympe antique, les personnages allégoriques que les artistes peignent alors dans leurs tableaux, les héros antiques des légendes populaires, tous les mondes, le réel, l’abstrait, le divin, l’humain, l’ancien, le moderne, sont fouillés par ses mains, amenés sur la scène pour fournir des costumes, des groupes harmonieux, des emblèmes, des chants, tout ce qui peut exciter, enivrer des sens d’artistes.
On aurait à produire bien des divulgations sur ces trompe-l’œil de la publicité ; et il en ressortirait une vue comparative fort singulière de la population des auteurs modernes. […] C’est un métier nouveau, issu comme beaucoup d’autres choses bonnes ou mauvaises des modernes fièvres industrialistes, réagissant sur les travaux de la pensée.
Nous avons vu que s’il est une idée qui tende à prévaloir dans les sciences modernes, c’est celle de progrès, d’évolution, de développement. […] L’homme commence par reconnaître les séquences de jour et de nuit ; puis les séquences mensuelles produites par la lune ; puis le cycle annuel du soleil ; puis le cycle des éclipses de lune ; puis les périodes des planètes supérieures ; tandis que l’astronomie moderne détermine le long intervalle, après lequel l’axe de la terre reviendra occuper le même point dans le ciel ; et l’époque à peine concevable dans laquelle se reproduiront les perturbations planétaires142. » Un nouveau progrès consiste en ce que la correspondance croît en spécialité.
Granier de Cassagnac a la conscience du renseignement, l’intérêt varié du récit, la hauteur des appréciations ; mais tout cela ne lui donnerait pas sa place encore, s’il ne les couronnait et ne les achevait par la qualité excellemment historique, pour nous autres modernes : la vigueur de touche dans le portrait. Cette qualité inconnue aux anciens, qui composaient grandement l’histoire, mais qui n’y jetaient pas la vie dans les proportions où la pensée moderne a le besoin de l’y verser, est le mérite le plus en saillie du talent très riche et très complexe de Cassagnac.
On aura plus tard d’éclatants retours, et plus d’un jet moderne surpassera en puissance et en largeur la source première : on ne retrouvera plus cette veine charmante et trop peu suivie, qui n’a d’ancien qu’une plus douce couleur, cette veine non plus italienne, ni grecque, ni espagnole, mais purement française de ton et de goût jusque dans ses réminiscences d’Horace.
On croyait alors à son roi, on croyait surtout à son Dieu ; on y croyait non pas en général et de cette manière toujours un peu vague et abstraite, dans ce lointain où la science moderne, si on n’y prend garde, le fait de plus en plus reculer, mais dans une pratique continuelle et comme si Dieu était présent même physiquement dans les moindres occurrences de la vie.
Il se joue cependant avec Catulle ; il s’applique déjà à Horace ; puis une bien autre ambition le tente, l’épopée elle-même, l’épopée moderne avec toutes ses difficultés et ses réalités positives, ennemies du merveilleux ; âgé de vingt ans, il ne voit là rien d’impossible : il compose donc son Washington ou la Liberté de l’Amérique septentrionale, et, choisissant le siège de Boston comme fait principal et comme centre de l’action, il achève un poème en douze chants dont on pourrait citer des vers honorables, et qu’il accompagne d’une préface modeste et judicieuse.
Il est inépuisable dans le thème et le motif toujours renaissant de cette quiétude bénie du foyer, et il y joint une élégance toute moderne, tout anglaise, qui fait parfois que telle de ses demi-pages ressemble à une vignette de Westall dans tout son joli et son scintillant.
Cependant, sincèrement amoureux des lettres, dilettante à sa manière, il employait la fleur de ses matinées dans son joli et commode appartement, et en vue des jardins de l’évêché, à lire ou plutôt à se faire lire (goutteux et myope qu’il était) les modernes et même les anciens, à les parcourir en tous sens, à en tirer, non pas une science solide et continue, mais de jolies pensées, des anecdotes curieuses, des raretés galantes et graveleuses même dès qu’il s’en offrait, le tout pour en enrichir ses cahiers de lieux communs et ses tiroirs : il songeait qu’un moment pouvait venir où tous ces magasins d’esprit lui seraient utiles et lui feraient honneur à débiter.
Mme de Créqui, née au commencement du xviiie siècle, pouvait-elle, en parlant de je ne sais quelle cérémonie monastique dont elle avait été témoin dans son enfance, ajouter ce trait classique plus convenable chez une lectrice de La Gazette : « Je n’ai rien vu dans les nouveaux romans qui fut aussi romantique que cette scène nocturne et qui fût aussi pittoresque surtout. » Pouvait-elle, en citant une complainte du vieux temps qui se serait chantée au berceau de son petits-fils, dire à ce dernier : « Vous vous rappellerez peut-être, en lisant ceci, que Mlle Dupont, votre berceuse, vous chantait précisément la même complainte, et qu’elle en usait toujours de la sorte, en guise de somnifère et pour le service de votre clinique. » On rencontre à chaque pas de ces anachronismes évidents de couleur et de langage, et qui donneraient droit de conclure avec certitude que, quand même il y aurait eu un fonds primitif d’anciens papiers, d’anciens récits, l’éditeur les avait retouchés et arrangés à la moderne.
messieurs les érudits et les chercheurs, les déchiffreurs de chartes et de parchemins d’archives, les infatigables transcripteurs de tous authentiques documents, je vous estime, je vous révère pour votre science et vos travaux dans ce qui est du Moyen Âge ; mais que de mal, vous et les vôtres, vous avez fait sans vous en douter en propageant jusque dans la littérature moderne le culte des vieux papiers !
Il faut l’entendre parler de cette source de curiosité aimable : « J’ai parfaitement aimé ces choses-là, dit-il, et je les aime encore… Ceux qui ont été une fois touchés de cette sorte d’affection ne la sauraient presque abandonner, tant elle a de charmes par son admirable variété. » Il avait la mémoire présente de tout ce qu’il possédait en ce genre : on pouvait lui montrer une pièce quelconque ou antique ou moderne, il disait à l’instant s’il l’avait ou non parmi les siennes, et, dans ce dernier cas, il indiquait l’endroit juste où elle était classée : « Ce serait peut-être malaisé à croire d’un nombre aussi prodigieux que l’est celui des estampes que j’ai assemblées, si je ne l’avais éprouvé plusieurs fois.
M. de Chateaubriand était trop le dieu présent et régnant dans unlieu, pour qu’on ne trouvât pas étrange que M. de Maistre parût le premier des grands écrivains modernes dans l’autre.
Un écrivain moderne a dit de lui, d’un ton un peu plus leste et plus familier : « C’était le mieux loti et le mieux pourvu des princes.
La comtesse, « qui savait assez bien l’anglais et l’allemand, qui possédait parfaitement l’italien et le français et connaissait à fond ces diverses littératures, qui n’ignorait pas non plus tout ce qu’il y avait d’essentiel dans les littératures anciennes, ayant lu les meilleures traductions de l’antiquité qu’on trouve dans ces quatre langues modernes, pouvait causer de tout avec lui », et elle lui était une ressource continuelle d’esprit comme de cœur.
Et en effet, esprit essentiellement moderne, Sismondi n’aura rien de l’art antique ; il appréciera peu ce je ne sais quoi qui fait la finesse rare et la simplicité exquise des anciens.
Il a commencé à nous ouvrir son trésor, y compris celui de son érudition, dans deux volumes, où il est un peu question de tout et où il a tenu à faire montre d’abord de ce qui concerne l’antiquité ; mais l’antiquité n’est pas précisément ce qu’on lui demande, et, si instruit qu’il soit, il n’est pas là non plus dans son domaine : on l’attendait avec impatience sur les époques modernes, et aujourd’hui il vient nous en offrir un avant-goût en extrayant de son tome troisième des lettres de Henri IV, de la reine Marguerite, de Du Plessis-Mornay, et aussi de Montaigne.
Collé, de sa personne, était et reste, à nos yeux, le plus parfait exemple, et peut-être le dernier, de la pure race gauloise non mélangée ; c’est le dernier des Gaulois : ennemi de l’anglomanie, de la musique italienne, des innovations en tout genre, ennemi des dévots et des Jésuites, il ne pouvait non plus souffrir Voltaire, trop brillanté selon lui, trop philosophique, trop remuant, un Français du dernier ton et trop moderne, il l’appelait « ce vilain homme », et il abhorrait aussi Jean-Jacques à titre de charlatan.
Nous avons aussi nos infortunes d’Ilion, et, à ce sujet, notre curiosité n’est jamais à bout ; mais c’est sous forme moderne qu’elle se marque, c’est surtout à l’occasion de documents historiques retrouvés, de lettres inédites ; notre manie s’y mêle.
Ce n’est pas connaître le monde, en effet, que de vivre jusqu’à l’âge de trente-deux ans au fond d’une campagne, n’ayant qu’un seul ordre étroit et sévère de rapports et d’intérêts moraux, de n’avoir jamais observé la société moderne dans l’infinie variété de ses conditions, de ses opinions, de ne s’être pas accoutumé de bonne heure à considérer de plain-pied les hommes nos semblables dans la diversité de leurs goûts, de leurs aptitudes, de leurs talents et de leurs mérites, dans les directions multipliées de leur, zèle et de leur ardeur, dans leur indifférence même, qui serait bien souvent de la sagesse si elle était plus réfléchie.
Le genre humain en masse est perdu sans retour ; il se rue en délire selon une pente de plus en plus croulante ; il n’y a plus de possible que des protestations isolées, des fuites individuelles au vrai : « Hommes forts, hâtez-vous, le sort vous a servis en vous faisant vivre tandis qu’il en est temps encore dans plusieurs contrées ; hâtez-vous, les jours se préparent rapidement où cette nature robuste n’existera plus, où tout sol sera façonné, où tout homme sera énervé par l’industrie humaine. » L’athéisme, le naturisme de ce Spinosa moins géométrique que l’autre, et poétiquement rêveur, nous rappelle toutefois le raisonneur enthousiaste dans sa sobriété chauve et nue, de même que cela nous rappelle, par l’effet des peintures, par l’inexprimable mélancolie qui les couvre et l’effroi désolé qui y circule, Lucrèce, Boulanger, Pascal et l’Alastor du moderne Shelley. — Shelley !
La portion la plus ardente et la plus ferme de cette pensée dramatique ne se préoccupait même pas d’une initiation graduelle et indirecte de la foule à l’œuvre moderne, moyennant d’habiles reproductions d’œuvres antérieures ; elle était pour une application immédiate et franche, pour une mêlée décisive, pour une descente et un assaut au cœur du siècle.
Il avait compris de bonne heure que la société moderne ne serait pas satisfaite en son mouvement de révolution avant d’avoir appliqué en toute matière le principe de liberté ; il se rattacha à cette idée, et, à part les inconséquences personnelles, il en demeura le fidèle organe.
« Plusieurs philosophes anciens et modernes ont écrit sur ce sujet.
Et dans tout sujet les modernes sont en présence d’une masse de documents, qui rejette les esprits littéraires vers les genres où l’invention est plus libre, vers l’observation morale ou vers l’analyse dramatique.
Ailleurs il lui arrive de mêler, dans la même phrase, des archaïsmes et des locutions toutes modernes.
Mais le travail était sur tout rendu malaisé parce qu’il s’agit de deux poètes modernes qui, en véritables poètes, ont dit indirectement ce qu’ils avaient à dire en réfléchissant leur pensée sur des images et des symboles.
Bien qu’il ne soit pas malaisé de montrer, dans les drames religieux de l’Inde ancienne, l’image d’une vie tout intérieure mais que des cultes pieux faisaient sociale ; dans les tragi-comédies du moyen âge espagnol, la double expression du mélange trouble, d’un obscurantisme fanatique et d’une nature lumineuse ; dans les licencieuses fantaisies du théâtre italien plus moderne, la mise en scène d’une société brillante et dissolue ; — mieux vaut rappeler, pour convaincre par des exemples tout à fait décisifs, les deux peuples dont la vie sociale fut le plus harmonieuse, et la vie théâtrale le plus artistique, la Grèce et la France.
Bien qu’il ne soit pas malaisé de montrer, dans les drames religieux de l’Inde ancienne, l’image d’une vie tout intérieure, mais que des cultes pieux faisaient sociale ; dans les tragi-comédies du moyen âge espagnol, la double expression du mélange trouble, d’un obscurantisme fanatique et d’une nature lumineuse ; dans les licencieuses fantaisies du théâtre italien plus moderne, la mise en scène d’une société brillante et dissolue ; — mieux vaut rappeler, pour convaincre par des exemples tout à fait décisifs, les deux peuples dont la vie sociale fut le plus harmonieuse, et la vie théâtrale le plus artistique, la Grèce et la France.
Telle est l’histoire des Danaïdes, écrite et fixée par les mythographes : la critique moderne l’a liquéfiée en l’analysant.
Parmi les modernes, on a les lettres latines d’Héloïse ; celles d’une Religieuse portugaise ; Manon Lescaut, la Phèdre de Racine, et quelques rares productions encore, parmi lesquelles les lettres de Mlle de Lespinasse sont au premier rang.
Il parle français parfaitement, il sait beaucoup de latin et de grec, et il a l’histoire ancienne et moderne au bout des doigts.
Supposez un moment un Saint-Simon non plus à Versailles, mais dans une de ces grandes assemblées modernes, et demandez-vous ce qu’il y verra.
Il n’est jamais revenu sans un éclair au front et sans une larme dans le regard au souvenir de ce qu’il appelait ces camps de sa jeunesse, « dont est sortie la plus belle et la meilleure armée qui ait existé dans les temps modernes, et qui, si elle est égalée, ne sera certainement jamais surpassée : je veux dire l’armée qui campa deux ans sur les côtes de la Manche et de la mer du Nord, et qui combattit à Ulm et à Austerlitz ».
J’ai imaginé aussi (car c’est mon plaisir d’opposer ces noms à la fois voisins et contraires), j’ai plus d’une fois, dans le courant de ce travail, imaginé à Paul-Louis Courier un interlocuteur et un contradicteur plus savant et non moins fait pour lui tenir tête, dans la personne de l’illustre et respectable Quatremère de Quincy, cette haute intelligence qui possédait si bien le génie de l’Antiquité, mais qui résistait absolument aux révolutions modernes.
À quel point Montesquieu n’était-il pas imbu de l’ancien esprit parlementaire ou de l’idée philosophique moderne, le jour où il lui échappa une telle parole !
Il a, sur ce sujet, de l’inégalité moderne comparée à l’antique esclavage, des paroles plus énergiques qu’on ne l’attendrait de lui.
Voir l’idée moderne du droit et la Critique des systèmes de morale contemporains.
Il faut, pour comprendre cet art, se transporter à cette époque, se réadapter à ce milieu social factice, se dépouiller de son moi moderne ; tout le monde ne le fait pas volontiers.
Le pessimisme n’est ni un sentiment religieux, ni un sentiment moderne, encore qu’il ait pris très souvent la forme religieuse, et que les pessimistes les plus célèbres appartiennent au dix-neuvième siècle. […] Rien ne se modifie que les mots ; j’use des termes modernes, n’ayant pas les anciens sous la main. […] On le voit bien en France où les régions qui se stérilisent sont celles que les formes modernes de la civilisation ont privées à la fois de religion, d’art et de littérature ; où les régions encore fécondes vivent, comme la Bretagne, dans une idéalité de religion et de poésie. […] A une époque où on lisait encore les banales et prolixes transcriptions des vieux poèmes français, il eût été possible de les faire revivre sous une forme moderne ; Ronsard ennuya avec Francus que tout le monde ignorait, on eût écouté l’histoire d’Amadis ou celle de Fierabras. […] 12. — Pour les temps modernes, Muratori rapporte (Rer. ital.
Comme les civilisations antiques de la Grèce et de Rome323, comme les civilisations modernes de la Provence et d’Espagne, comme toutes les civilisations du Midi, elle porte en soi un vice irrémédiable, une mauvaise et fausse conception de l’homme ; les Allemands du seizième siècle, comme les Germains du quatrième siècle, en ont bien jugé ; avec leur simple bon sens, avec leur, honnêteté foncière, ils ont mis le doigt sur la plaie secrète. […] Si la forte et âpre acclamation de l’Arabe qui éclate comme une trompette à l’aspect du soleil levant et de la nudité des solitudes348, si les secousses intérieures, les courtes visions du paysage lumineux et grandiose, si le coloris sémitique manque, du moins le sérieux et la simplicité ont subsisté, et le Dieu hébraïque transporté dans la conscience moderne n’est pas moins souverain dans cette étroite enceinte que dans les sables et dans les montagnes d’où il est sorti. […] Tout cela est fort libre, débraillé même, bien éloigné de la décence moderne. […] Car c’est le trait marquant des hommes de cet âge et de cette école, de n’avoir point l’esprit nettoyé, aplani, cadastré, muni d’allées rectilignes, comme les écrivains de notre dix-septième siècle et comme les jardins de Versailles, mais plein et comblé de faits circonstanciés, de scènes complètes et dramatiques, de petits tableaux colorés, tous pêle-mêle et mal époussetés, en sorte que, perdu dans l’encombrement et la poussière, le spectateur moderne crie à la pédanterie et à la grossièreté.
Cet amour de la nature, nous le respirons à présent dès l’enfance, dans les premiers vers que nous épelons ; il fait désormais partie des sentiments essentiels et constitutifs de l’homme moderne ; et je suis tenté de croire que, parmi les causes qui nous ont rendus si différents des hommes d’autrefois, il faut tenir grand compte de celle-là. […] Et je sais bien tout ce qu’on peut dire là contre ; mettons que le cas de Lamartine est et restera probablement unique dans la poésie moderne. […] Ces « psaumes modernes », comme Lamartine avait voulu les nommer, sont en effet un vaste cantique au Divin perçu et considéré successivement dans toutes ses manifestations et tous ses modes ; mais ils suivent, si je ne m’abuse, une espèce d’ordre logique, naturel et ascendant. […] … Et d’autre part il est évident que ce sont les progrès de l’industrie, parallèles à ceux de la science, qui ont créé les grandes villes modernes, qui ont compliqué les « questions sociales », qui en ont même fait surgir de nouvelles, et qui en même temps empêchent de les résoudre : car c’est seulement dans les médiocres agglomérations, où les hommes se peuvent tous approcher et connaître, que la répartition des biens et des maux a quelque chance de devenir un peu plus conforme à la justice.
La signification précise de ces rites échappe aux recherches de la pensée moderne. […] Ne lui demandez pas, cependant, les excès des douleurs modernes. […] Il était évidemment égaré dans le monde moderne. […] Ce roi réputé avare est le premier banquier du budget moderne. […] La Grèce moderne à gardé l’antipathie qu’inspirait au génie hellène l’image physique de la destruction.
Certes, les artistes parfaits sont rares : nous avons, au premier rang, Sophocle dans l’antiquité, Racine dans les temps modernes. […] Après avoir rêvé longtemps pour trouver quelque chose à blâmer dans ce chef-d’œuvre de la moderne poésie italienne, je ne vois à reprendre qu’un peu d’obscurité dans deux ou trois passages, et une ou deux tournures de phrases trop directement empruntées du latin. » Je ne sais pas si Lamartine n’a suivi que de bons modèles. […] Les observateurs retrouveront toute la société moderne dans les Voisins, le Mariage de raison, Cassandre et ses domestiques, les Plaideurs malgré eux, le Miroir de Colombine, l’Homme au cabriolet et les Dragons de Catachysterium. […] C’était un brouhaha, un amoncellement… Poètes de Terroir Les modernes sont en nombre dans le recueil de M. van Bever, et chacun fait honneur à sa province. […] Cet Espagnol du Nouveau-Monde, encore que très moderne, boulevardier et cosmopolite, n’a pas rompu néanmoins les liens qui rattachent à ses origines ; et, par son esprit, comme par son cœur, il fait songer, plus d’une fois, aux personnages de Cervantes, à ce gentil bachelier Carrasco et à ce fantasque licencié Vidriéra.
Il faut bien que cette structure soit particulière, puisque entre tous les théâtres de l’antiquité et des temps modernes celui-ci se détache avec une forme distincte, et présente un style, une action, des personnages, une idée de la vie qu’on ne rencontre en aucun siècle et en aucun pays. […] La sereine et noble Grèce a pour chef de ses poëtes tragiques un des plus accomplis et des plus heureux de ses enfants28, Sophocle, le premier dans les choses du chant et de la palestre, qui, à quinze ans, chantait nu le pæan devant le trophée de Salamine, et qui, depuis, ambassadeur, général, toujours aimé des Dieux et passionné pour sa ville, offrit en spectacle dans sa vie comme dans ses œuvres l’harmonie incomparable qui a fait la beauté du monde antique, et que le monde moderne n’atteindra plus. […] C’est la première explosion de la jeunesse ; rappelez-vous les brigands de Schiller, et comment notre démocratie moderne a reconnu pour la première fois son image dans les métaphores et les cris de Charles Moor.
Vous sentez combien tout cela est ennuyeux et inutile : ainsi, j’attends sans impatience que la bonne compagnie reprenne ses anciens droits ; car je me trouverais fort déplacé au milieu de tous ces petits Machiavels modernes.
[NdA] Ce mot dans sa concision est un peu arrangé à la moderne ; il n’est pas tout à fait exact ni du temps.
Il reproche aux modernes de ne connaître que la politique pratique et de n’avoir pas même l’idée de la philosophie politique, de cette science « qui a pour principal objet de subordonner les hommes les uns aux autres pour les policer et les rendre heureux ».
Je n’ai jamais vu mieux rendre l’impression que m’a faite à moi-même Rulhière et son procédé d’histoire classique appliqué à des temps modernes, ce genre honorable, mais froid, mais artificiel, et qui a l’inconvénient de ne laisser aucune trace profonde : « Le bruit des violons (d’un bal voisin) a été couvert par notre lecture de l’Histoire de Pologne par Rulhière.
Si sur quelques points l’auteur est enclin et entraîné à trop accorder à Henri IV, à le faire plus libéral dans le sens moderne qu’il ne l’était, à donner une trop grande consistance à ce qui n’a été que fort court, à croire qu’il aurait tout fait s’il avait plus vécu, il y a un train général de bien-être et de félicité bien ordonnée pendant ce règne, sur quoi il est pleinement dans le vrai et ne se méprend pas ; et il nous apporte toutes les pièces à l’appui, les démonstrations victorieuses.
Ne venons pas prononcer, à son sujet, le nom de Bossuet, ni même celui de Byron et des don Juan modernes.
En effet, cet article du 19 mars 1815, si l’on s’en souvient, où il se déchaînait en style d’émigré contre Bonaparte, Attila et le Gengiskhan moderne, se terminait par une profession de foi, et cette profession de foi elle-même se couronnait par un serment que personne ne lui demandait et qu’il proférait devant tous, la main étendue et comme à la face du Ciel : « … Je n’irai pas, misérable transfuge, me traîner d’un pouvoir à l’autre, couvrir l’infamie par le sophisme, et balbutier des mots profanes pour racheter une vie honteuse. » Quand Lamennais s’écria dans un moment solennel : « Je vous ferai voir ce que c’est qu’un prêtre », et qu’ensuite il donna à cet engagement si éclatant le démenti qu’on sait, il eut beau faire désormais, être un grand écrivain, et plus grand même que par le passé, un homme sincère, désintéressé, un cœur dévoré de l’amour des hommes : il se déconsidéra.
Au lieu de cela, Gœthe, le plus grand des critiques modernes et de tous les temps (car il a profité des bénéfices de son siècle), est toujours resté pour nous un étranger, un demi-inconnu, une sorte de majestueuse énigme, un Jupiter-Ammon à distance dans son sanctuaire ; et tous les efforts qu’on fait, non pour le populariser (cela ne se pourra jamais), mais pour le naturaliser parmi nous, n’ont réussi jusqu’à présent qu’à demi.
Voir le volume intitulé l’Art moderne, page 95.
L’époque, en tant que nouvelle et que moderne, n’avait rien produit encore de grand et de vraiment beau ; je parle de ce beau et de ce nouveau qui est propre à chaque époque et qui la marque d’un cachet à elle.
C’est à Lützen, à deux lieues de Leipzig, sur ce champ de bataille deux fois célèbre et qui était consacré dès lors par le trépas du moderne Alexandre, que le jeune Maurice reçut le sacrement héroïque dont il était digne et auquel il devait faire honneur avec tant d’éclat : « On me mit un fusil sur le corps dans la colonelle du premier bataillon7, et on me fit jurer à l’enseigne.
Ce moderne historien du maréchal (M.
C’était le principe moderne : nourrir la guerre par la guerre.
Mais comment reprocher à des hommes de vingt-cinq ans qui, en présence d’une littérature contemporaine futile, fade, puérile, triviale ou sophistiquée, viennent de se plonger dans ces belles lectures de l’Antiquité dont l’art de l’imprimerie ressuscitait les textes désormais tout grands ouverts et accessibles, comment leur reprocher d’en être tout remplis, d’en vouloir communiquer l’émotion généreuse, d’en vouloir verser la sève et comme transfuser le sang dans une langue moderne qui, certes, à cette date (je ne parle ni de Rabelais ni de sa prose), laissait si fort à désirer pour les vers et pour toute élocution sérieuse, élevée ?
Il a peu lu nos auteurs modernes ; en arrivant, il ne les connaissait guère que de nom, même le très-petit nombre de ceux qui mériteraient de lui agréer.
Fauriel, soit enfin en son propre lieu, dans la chaire du Collége de France, d’appliquer à l’histoire littéraire moderne les résultats de ses instincts divers, de ses études variées, et il a fini par les concentrer exclusivement sur l’histoire de la littérature française, dont il publie une introduction développée et approfondie pour les temps qui précèdent le douzième siècle164 ; dans le moment actuel de son enseignement oral, il en est arrivé au seizième.
Il penchait assez décidément pour les modernes, et s’il avait fallu placer Mme de Pontivy au milieu de quelque querelle, il aurait mieux aimé qu’elle fût dans celle-ci que dans l’autre.
« Elle ne se le chante pas toujours avec des vers ou des paroles mesurées, mais avec des expressions et des images où il y a un certain sens, un certain sentiment, une certaine forme et une certaine couleur qui ont une certaine harmonie l’une avec l’autre et chacune en soi. » Par l’attitude de sa pensée, il me fait l’effet d’une colonne antique, solitaire, jetée dans le moderne, et qui n’a jamais eu son temple.
Nous n’y songeons pas, habitués que nous sommes aux tons intenses de nos coloristes modernes : la couleur de Boileau nous paraît bien terne.
Assurément il s’entendait à manier les âmes, ce bon maréchal de Champagne et Romanie, qui savait que, là où échouent tous les arguments, quand il s’agit de persuader ce que le devoir, la conscience et parfois l’intérêt réprouvent, le mot magique qui perce les cœurs et l’ait tout faire, c’est l’honneur, l’honneur qu’on définit : « rester avec les autres, ne pas dépecer l’armée » : en langage moderne, ne pas lâcher les camarades.
Il arrive souvent que le costume y est seul moderne, et que l’aventure vient de loin, de bien loin dans l’espace et la durée.
Augustin & autres auteurs de la basse latinité, & quelques-uns de nos modernes, comme Saint-Evremont : le tour de phrase toûjours le même & toûjours uniforme déplaît extrèmement ; ce contraste perpétuel devient symmétrie, & cette opposition toûjours recherchée devient uniformité.
Il y avait une sorte de proportion en toutes choses, et la plus grande des sociétés modernes se laissait voir dans ce moment de repos, où il faut prendre le portrait des nations comme des personnes.
L’esclavage moderne a sans doute été condamné avant tout par nos principes de philosophie ; mais quelques vertus d’esclaves ont aussi concouru à la même fin.
Il est naturel que le meilleur poète comique de l’Europe moderne appartienne à la nation la plus mondaine de cette Europe, et que le meilleur poète comique de la France appartienne à l’époque la plus mondaine de son histoire.
Même en recomposant l’immense perspective du théâtre attique, le goût moderne a peine à comprendre, dans la plupart de ses drames, cette figuration gigantesque ; elle excédait les dimensions de la vie.
Il serait injuste de lui refuser l’agilité de l’allure et la souplesse du tour, mais, en revanche, quelle disparate dans sa facture ; de quelles nuances, incohérentes et criardes, est plaquée cette mosaïque de procédés et de centons, ou les tournures de Molière s’embarrassent dans les enjambements de la poésie moderne et coudoient les pointes de Dorat et de Marivaux ?
Ce n’est pas une guerre de détail que je viens faire à un poète que j’admire ; mais cette guerre, cet examen de détail, veuillez le remarquer, on n’en a fait grâce pourtant jusqu’ici à aucun des poètes modernes, excepté Béranger.
Son ami le raille de sa simplicité et lui expose la théorie moderne : Si ce sonnet n’est guère intelligible, tant mieux, mon ami.
Doué d’une grande facilité de travail, d’une vaste mémoire, en possession des langues anciennes et de la plupart des langues modernes, il lit les auteurs et les livres d’un bout à l’autre ; il s’instruit en les contrôlant ; il est impartial pour ceux mêmes envers qui il se montre sévère.
Il semble croire que l’esprit de ces farces antiques a pu se perpétuer dans l’original moderne, et lui-même, le petit abbé, il en avait hérité quelque chose, même la bouffonnerie et la licence.
Je ne nie pas qu’il n’y ait au fond de ce dévergondage et de cette exaltation un sentiment d’inspiration patriotique, si l’on veut, et d’amour sincère de la liberté, de l’égalité moderne.
Les modernes éditeurs (Petitot, Michaud) avaient négligé de consulter ce manuscrit, et l’on continuait de réimprimer les anciennes éditions où le texte avait été retouché, et où il y avait des inexactitudes de noms propres et quelques omissions.
C’est l’honneur, disons-le hautement, c’est le rachat moral de Mirabeau d’avoir ainsi souffert, d’avoir été homme en tout, non seulement par ses fautes, par ses entraînements, et, nommons les choses à regret, par ses vices, mais aussi par le cœur et par les entrailles ; d’avoir été pauvre et d’avoir su l’être ; d’avoir été père et d’avoir pleuré ; d’avoir été laborieux comme le dernier des hommes nouveaux ; d’avoir été captif et persécuté, et de n’avoir point engendré le désespoir, de ne s’être point aigri ; d’avoir prouvé sa nature ample et généreuse en sortant de dessous ces captivités écrasantes, à la fois dans toute sa force et dans toute sa bonté et même sa gaieté, ni énervé, ni ulcéré, sans ombre de haine, mais résolu à conquérir pour tous, à la clarté des cieux, les droits légitimes et les garanties inviolables de la société libre et moderne.
Épousseter, sabler, douche de fleurs, voilà le détestable style moderne, le style matériel, prétentieux et grossier, que certes on ne s’aviserait jamais d’aller chercher si près du tombeau de Racine, et qui, j’ose le dire, n’aurait jamais dû entacher non plus et charger le berceau de notre école romantique, telle du moins que je l’ai toujours conçue.
« J’aime beaucoup quelques-uns de nos philosophes modernes, mais je n’aime point leur philosophie », disait Mme Necker.
Quand il s’est avisé de vouloir corriger le Venceslas de Rotrou pour complaire à une fantaisie de Mme de Pompadour, Grimm a remarqué que c’était là une entreprise de mauvais goût que d’habiller ainsi Rotrou à la moderne : « Mais cette remarque, ajoute-t-il sévèrement, ne peut se faire que pour ceux qui ont véritablement du goût.
Le sentiment moderne de patrie était créé, et Saint-Simon s’en fait, en cette occasion, l’organe éloquent et incorruptible : il qualifie cette désertion comme nous le ferions aujourd’hui.
Pendant les journées qui suivirent, Marmont était des plus vifs à défendre les intérêts de l’armée, le maintien des couleurs nationales qui représentaient pour lui tout un ordre de sentiments patriotiques et modernes.
Ce caractère restrictif et négatif, à l’article de la poésie moderne, n’est point particulier à Carrel ; il le partageait avec la plupart des hommes de l’école historique et politique ; mais il faut qu’il l’ait ressenti bien vivement pour s’être complu si fort à l’exprimer.
Parlant des écrivains latins qui imitèrent le style de Salluste et forcèrent sa manière, il fait un retour sur les écrivains modernes qui se piquent aussi d’imiter les deux plus beaux esprits du siècle (Fontenelle et Voltaire), et qui veulent prendre notamment à ce dernier « le ton philosophique, la manière brillante, rapide, superficielle, le style tranchant, découpé, heurté ; les idées mises en antithèses et si souvent étonnées de se trouver ensemble.
Les modernes partisans de la sensation transformée profitent de ce que les sensations superficielles des cinq sens, ou du moins celles de la vue, de l’ouïe et du toucher, sont devenues aujourd’hui presque indifférentes, presque des sensations pures et en apparence passives, tandis que les sensations organiques et celles mêmes du goût ou de l’odorat enveloppent clairement émotion et réaction ; ils brouillent le tout et supposent des sensations isolément passives et indifférentes, qui, combinées, produiraient : 1° l’apparence de l’activité ou de la volonté, 2° la réalité du plaisir ou de la douleur.
Dimanche 15 mai Je suis un auteur d’une tout autre école, et cependant les auteurs que je préfère parmi les modernes ce sont Henri Heine et Poë.
Dans le discours du colporteur boiteux, on trouve encore quelques traces du vieux burlesque ; dans certains tomes modernes offerts aux loisirs démocratiques, on ne découvrira rien qui émerge au-dessus de la platitude.
Les sentiments de Heine, comme ceux de tous les poètes, sont excités par des causes minimes, et, comme ceux de presque tous les poètes modernes, ne vibrent qu’à propos d’idées attristantes.
Les génies modernes seuls ont cette profondeur dans le sourire qui, en même temps qu’une élégance, fait voir un abîme.
Grâce au malentendu que nous venons d’expliquer, la cause de la liberté de penser, quelques progrès qu’elle ait faits dans la société moderne depuis le xvie siècle, est loin d’être entièrement gagnée, même auprès des esprits éclairés.
Chez les modernes, Césalpin et Harvey ont aussi pratiqué cette méthode.
S’il étoit permis d’appliquer ici l’idée de l’abbé Galliani que l’histoire moderne n’est que l’histoire ancienne sous d’autres noms, je vous dirois que ces bas-reliefs si purs, si corrects, n’étoient que des copies de mauvais bas-reliefs anciens dont on avoit gardé toute la platitude, pour leur conserver la vénération des peuples.
C’est de ce côté que les langues anciennes avaient un avantage infini sur les langues modernes ; c’était un instrument à mille cordes, sous les doigts du génie, et ces anciens savaient bien ce qu’ils disaient, lorsqu’au grand scandale de nos froids penseurs du jour, ils assuraient que l’homme vraiment éloquent s’occupait moins de la propriété rigoureuse que du lieu de l’expression.
Je ne crois pas même qu’aucun poëte moderne de ceux qui ont composé dans les langues qui se sont polies depuis trois siécles, ait mis plus de cadence et de mélodie que Malherbe en a mis dans les siens, apparemment au prix d’une peine et d’une perseverance dont il avoit obligation au païs où il étoit né.
Sofficiak, « Etre à la mode, cela veut dire être moderne… une mode artistique passe et après une période d’oubli elle reparaît.
Plus préoccupé, comme critique, — et selon nous avec raison, — de la moralité des œuvres, de leur portée dans l’intelligence humaine et des épouvantables dangers qu’elles créent aux sociétés qui les admirent que de leur valeur esthétique, il se recommande et se distingue par cette noble préoccupation, devenue un peu trop la distraction de la Critique moderne, exclusivement attachée à l’autre côté des choses et ne voyant guère, comme on sait, que la question de la forme en littérature.
Telle est aussi la regle de nos Modernes : ainsi on écrit au singulier bon, & au plurier bons ; fort au singulier, forts au plurier ; par conséquent puisqu’on écrit au singulier gâté, gâtée, on doit écrire au plurier gâtés, gâtées, ajoûtant simplement l’s au plurier masculin, comme on l’ajoûte au féminin. […] Celui qui écrivoit, tortilloit sur son rouleau une laniere de parchemin, sur laquelle il écrivoit en long ce qu’il vouloit ; ensuite il l’envoyoit à son correspondant qui l’appliquoit sur son cylindre ; ensorte que les traits de l’écriture se trouvoient dans la même situation en laquelle ils avoient été écrits ; ce qui pouvoit aisément être deviné : les Modernes ont usé de plus de rafinemens. […] Dans la plûpart des Auteurs modernes qui ont écrit en Grec ou en Latin, on trouve des phrases qui sont analogues au tour de leur langue naturelle, mais qui ne sont pas conformes au tour propre à la langue originale qu’ils ont voulu imiter. […] Cependant Sanctius & plusieurs autres Grammairiens modernes ne veulent pas mettre l’anti-phrase au rang des figures, & rapportent ou à l’ironie ou à l’euphémisme, tous les exemples qu’on en donne. […] M. l’abbé Gedoyn observe (dissertation des anciens & des modernes, p. 94.
Et la préciosité n’est-elle point d’ailleurs dans la poésie moderne la langue la plus habituelle à l’amour ? […] Dans cet embryon, l’on peut reconnaître déjà le sens des correspondances qui fera le lyrisme moderne, la poursuite des rapports qui hantera obstinément Mallarmé. […] Telle, en l’authenticité de fragments distincts, la mise en scène de la religion d’état, par nul cadre encore dépassée et qui, selon une œuvre triple, invitation directe à l’essence du type (ici le Christ), puis invisibilité de celui-là, enfin élargissement du lieu par vibrations jusqu’à l’infini, satisfait étrangement un souhait moderne philosophique et d’art. […] « Je crois, écrit-il dans un fragment de lettre cité par M.Vittorio Pica, que la Littérature, reprise à sa source qui est l’Art et la Science, nous fournira un Théâtre, dont les représentations seront le vrai culte moderne ; un Livre, explication de l’homme suffisante à nos plus beaux rêves… Cette œuvre existe, tout le monde l’a tentée sans le savoir ; il n’est pas un génie ou un pître ayant prononcé une parole, qui n’en ait retrouvé un trait sans le savoir.
La vie moderne a besoin de vocables tout neufs pour exprimer les choses nouvelles qu’elle a apportées et pour lesquels les mots anciens manquent de précision. […] On ne peut plus aujourd’hui écrire deux cents pages de lieux communs sans les escorter de ces sous-titres : étude parisienne, ou : étude moderne (ô la modernité !) […] Il faut d’abord savoir gré à M. de Bonnières de ne nous parler que de ce qu’il a vu, du monde où il a vécu et aussi d’avoir su présenter des observations autrement que sous la forme prétendue moderne, d’inventaire d’huissier.
Dans les temps modernes, si la poésie proprement dite a fait défaut à ce genre de tradition, le roman n’a pas cessé ; sous une forme ou sous une autre, certaines douces figures ont gardé le privilège de servir d’entretien aux générations et aux jeunesses successives. […] Lorsque l’abbé Prevost publia l’Histoire d’une Grecque moderne, assez agréable roman où l’on voit une jeune Grecque, d’abord vouée au sérail, puis rachetée par un seigneur français qui en veut faire sa maîtresse, résister à l’amour de son libérateur, et n’être peut-être pas aussi insensible pour un autre que lui, on crut qu’il avait songé à notre héroïne.
Aucun historien ancien ou moderne n’a si bien exposé les affaires, si bien démêlé les négociations, si bien compris les campagnes. […] Jamais, dans les temps modernes, on ne trouva un plus habile conducteur d’assemblée.
Elle communique avec un salon, qui nous ramène aux temps modernes, grâce aux murs couverts de tableaux tout actuels : une vue d’Aix signée par Guillemet ; des œuvres de Manet, de Monet, de Berthe Morizot, de Pissaro, de Cézanne le terrible impressionniste. […] … Mais restons dans les temps modernes : nous trouvons que Villon, Rabelais et bien d’autres pensaient, comme M.
Ce qu’il y a d’original dans sa verve blagueuse, c’est que sa blague moderne, est émaillée d’épithètes de poètes symboliques et décadents, d’expressions archaïques, de vieux verbes comme « déambuler », remis en vigueur : un méli-mélo, un pot-pourri de parisianismes de l’heure présente, et de l’antique langue facétieuse de Panurge. […] Après dîner, Mme Ménard-Dorian vient s’asseoir dans un fauteuil proche le mien, et nous causons art moderne.
C’est ainsi, je pense, qu’on peut expliquer l’existence de beaucoup de formes représentatives modernes ou tertiaires sur les côtes orientales et occidentales des régions tempérées de l’Amérique du Nord ; et le fait encore bien plus étonnant, mentionné dans l’admirable ouvrage de Dana, que des Crustacés, quelques Poissons et quelques autres animaux marins d’espèces proche-alliées se trouvent, d’un côté, dans la Méditerranée, de l’autre, dans la mer du Japon, c’est-à-dire dans deux stations marines séparées par un vaste continent et presque par un hémisphère d’océan équatorial. […] En effet, si l’axe de rotation de la terre se déplace, l’équateur se déplace avec lui, et les latitudes terrestres sont variables ; mais la question ne saurait encore être décidée par la comparaison des mesures modernes avec les observations anciennes qui manquent de l’exactitude nécessaire.
Cependant, il se pourrait que quelque langue très ancienne se fût peu altérée, et qu’elle n’eût donné naissance qu’à un petit nombre de langues modernes ; tandis que d’autres, par suite des migrations, de l’isolement ou des différents états de civilisation des races qui les ont parlées, se sont altérées considérablement et ont donné naissance à un grand nombre de langues ou de dialectes modernes.
La querelle des anciens et des modernes, jamais terminée, s’envenime. […] Souvent durant les longues soirées d’automne, alors que le grand silence des choses exalte l’esprit et l’incite au recueillement, après de délicieuses promenades solitaires à travers les bois endeuillés, au long des ruisseaux tout pleins de murmures limpides, ou sur les coteaux encore léchés par les derniers rayons d’un soleil en allé, — sous le regard ami de la lampe et entouré de la plus grande partie des œuvres poétiques contemporaines, mes fidèles conseillères, j’ai rêvé d’une esthétique assez puissante pour endiguer tous les courants impétueux de l’art moderne, assez généreuse pour accueillir toutes les manifestations de la vie en perpétuel changement, assez vaste pour permettre à chaque œuvre de se réaliser suivant sa tendance propre, assez belle pour y faire entrer notre chère tradition nationale sans porter atteinte à aucune liberté individuelle.
On les compare aux visages modernes, où les traits fins et complexes semblent frissonner sous le contact changeant de sensations ébauchées et d’idées innombrables. […] Je n’oserais traduire devant un lecteur moderne les gigantesques périodes qui ouvrent le Traité de la Réforme. […] Si je l’ai prévue, la prescience n’a point d’influence sur leur faute, qui, non prévue, n’eût pas été moins certaine… Ainsi, sans la moindre impulsion, sans la moindre apparence de fatalité, sans qu’il y ait rien de prévu par moi immuablement, ils pèchent, auteurs en toutes choses, soit qu’ils jugent, soit qu’ils choisissent517. » Le lecteur moderne n’est pas si patient que les Trônes, les Séraphins et les Dominations ; c’est pourquoi j’arrête à moitié la harangue royale.
Encore aujourd’hui, dans la défiance et la tristesse des mœurs modernes, c’est à table, pendant le café, qu’apparaissent la haute politique et la philosophie première. […] La culture moderne fait entrer dans le raisonnement technique la liberté des entretiens et l’ampleur des idées générales. […] « Les Anglais ont ordinairement vingt ans avant d’avoir parlé à quelque personne au-dessus de leur maître d’école et de leurs compagnons de collége ; s’il arrive qu’ils aient du savoir, tout se termine au grec et au latin, mais pas un seul mot de l’histoire ou des langues modernes.
Telle est, par exemple, la relation de la géométrie (les modernes à celle des anciens. […] On peut sans doute, pour plus de rigueur, éliminer de nos procédés mathématiques toute considération de mouvement ; il n’en est pas moins vrai que l’introduction du mouvement dans la genèse des figures est à l’origine de la mathématique moderne. Nous estimons que, si la biologie pouvait jamais serrer son objet d’aussi près que la mathématique serre le sien, elle deviendrait à la physico-chimie des corps organisés ce que la mathématique des modernes s’est trouvée être à la géométrie antique.
La poésie pure Les modernes théoriciens de la poésie pure, Edgar Poe, Baudelaire, Mallarmé, M. […] la grande hérésie moderne est de faire de la vérité l’objet suprême de la poésie… entre poésie et vérité, nulle sympathie. […] Il est comme le pivot non seulement duquel rayonna le développement de la poésie française nouvelle, mais qui unit tous les divers rayonnements passés de la poésie véritable dans toutes les littératures anciennes et modernes.
Camille Flammarion, d’Uranie, ce livre étrange et captivant qui, sous une forme légère, nous donne le résumé de toutes les conclusions de la science et de la philosophie modernes. […] Et bien d’autres choses, toutes aussi vraies et toujours exprimées avec cette franchise, cette netteté que les prétendus modernes rendent si précieuses aujourd’hui. […] Il est intitulé : Études d’art antique et moderne et se compose d’une suite d’études écrites ou sur l’esthétique proprement dite ou sur certains événements d’art tels que la découverte d’un beau vestige de l’antiquité, un Salon ou un anniversaire glorieux. […] On sent, en présence de cette sorte d’apparition, que son âme habitait un monde invisible, et son désespoir nous dévoile les incurables tristesses qui chez l’homme moderne se mêlent à l’amour de la beauté. […] Car, cet héritier du plus grand capitaine des temps modernes rêvait d’être Napoléon le Pacifique !
Mais, dans ce pendant moderne à la Tentation, je ne vois qu’un inventaire, rédigé par un notaire méphistophélique, dans le style éteint qui convient, et qui paraît, comme certaines pages de Stendhal, la démission lucide et désabusée du style. […] Or, presque toutes les autres littératures modernes ont comporté leur critique, et il suffit de lire la grande History of criticism de M. […] Lanson la direction d’une série moderne où devaient être semblablement commentés les grands textes du xixe siècle. […] Les réclamations ne se sont guère élevées que contre les applications de cette méthode aux œuvres de poésie, — et singulièrement de poésie moderne, dont les professeurs passent d’ailleurs pour mauvais juges. […] La belle occasion, pour les humanités modernes, de se révéler, et de prouver le mouvement en marchant !
Pendant ces années 1798-1799, où se fit l’expédition d’Égypte, Roederer, comme s’il eût compris qu’il n’y avait qu’à attendre, s’occupa moins de discussions politiques ; il écrivit de préférence sur la littérature ; il s’attacha à réfuter l’ouvrage de Rivarol contre la philosophie moderne ; car, en fait de doctrines philosophiques et autres, la pensée de Roederer était de rectifier le xviiie siècle sans l’abjurer.
Ce goût du simple et du réel le conduisit à un genre d’idylle qu’il mit à exécution, et dans lequel il visait à reproduire les mœurs pastorales, modernes et chrétiennes, en les reportant vers le xvie siècle, et sans intervention de fausse mythologie.
Pourtant, en 1796 ou 97, il envoyait au concours de je ne sais quelle académie de province un discours dans lequel il combattait avec beaucoup de chaleur la moderne philosophie, et qu’il terminait par un tableau animé de la Terreur.
Le cours de littérature qu’il professe à Lausanne avec éclat lui a fait d’abord passer en revue toute l’époque moderne, l’Empire, la Restauration ; des portions considérables du cours ont été lithographiées, et sont mieux que des promesses ; il en sortira bientôt un livre qui achèvera de consacrer parmi nous l’autorité du maître.)
Toujours le cœur brisé qui chante, toujours le cri en poésie de cette autre parole dite à voix plus basse, en prose plus résignée, et que bien des existences sensibles ont pensée en avançant : « Il n’y a qu’une date pour les femmes et à laquelle elles devraient mourir, c’est quand elles ne sont plus aimées. » Mais je touche à l’élégie moderne, et je n’y veux pas rentrer aujourd’hui196.
Piccolos, dans les notes d’une traduction de Paul et Virginie en grec moderne (Firmin Didot, 1841), a cru pouvoir signaler avec précision quelques traces, encore inaperçues, du roman de Théagène et Chariclée, dans l’œuvre de Racine.
Ce sont vraiment des nouvelles et des romans, au sens moderne du mot.