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2051. (1836) Portraits littéraires. Tome I pp. 1-388

La lecture, je l’avoue, m’a rangé à l’opinion de Garrick, mais par des motifs tout différents. […] Je m’en tiens à ma première opinion, je pense que le style épique exige une correction plus grande que le style lyrique. […] C’est beaucoup mieux et beaucoup plus qu’un extrait ; mais il semble indiquer qu’il n’a pas eu la prétention de composer un poème, et c’est aussi notre opinion. […] C’est là que l’auteur énonce catégoriquement son opinion sur la rime et le mètre, et les déclare incompatibles avec le mouvement du dialogue. […] Les sentiments et les opinions sur l’ordre social où nous vivons s’y révèlent plus nettement, mais sans troubler la continuité harmonieuse de la vie littéraire de l’auteur.

2052. (1858) Du roman et du théâtre contemporains et de leur influence sur les mœurs (2e éd.)

Les écrivains, au lieu d’être les interprètes sérieux et les guides de l’opinion, devinrent ses complaisants et ses vils flatteurs. […] Entre les deux hommes, il y avait plus d’une ressemblance, particulièrement au point de vue des idées morales et des opinions philosophiques ; entre les deux œuvres, il y a une incontestable analogie et comme un air de parenté étroite, aussi bien pour la forme que pour le fond. […] L’Adultère Les opinions que nous venons d’exposer au sujet du mariage, conduisaient directement à la justification de l’adultère. Qu’est-ce en effet que l’adultère, au point de vue de ces opinions, sinon l’exercice d’un droit imprescriptible, contre lequel n’ont pu prévaloir ni des lois arbitraires, ni d’absurdes serments ? […] L’ignoble Vautrin a, ou peu s’en faut, les mêmes opinions sur la société.

2053. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Je n’ai plus qu’une passion, c’est la soif de changer d’opinion, le délire palinodique. Il me semble que changer d’opinion ce serait recommencer une nouvelle vie. […] On a toujours l’opinion de son talent. […] Ils n’ont pas du tout mes opinions. […] Il donne des raisons de cette opinion sinistre.

2054. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Mais au cours des années il fut forcé, une fois d’abord, puis cent fois, de changer d’opinion sur ce point. […] Qu’il y ait là-dedans un atome d’altruisme, après tout il est possible ; mais ce qu’on y voit le plus distinctement, c’est un égoïsme sournois et hypocrite, qui se dissimule, qui s’ingénie, qui se masque, qui s’insinue et qui n’a pas le courage de son opinion, ni peut-être conscience de son opinion. […] Le bien est bon, certainement ; seulement le mal est meilleur. « Ce sont les esprits les plus forts et les plus méchants qui ont, jusqu’à présent, fait faire les plus grands progrès à l’humanité : ils allumèrent toujours à nouveau les passions qui s’endormaient — toute société organisée endort les passions, — ils éveillèrent toujours à nouveau le sens de la comparaison, de la contradiction, le plaisir de ce qui est neuf, osé, non éprouvé ; ils forcèrent l’homme à opposer des opinions aux opinions, un type idéal à un type idéal. […] Le lecteur est perdu, lorsqu’il veut connaître exactement l’opinion de Sterne sur un sujet et savoir si l’auteur prend un air souriant ou attristé. […] Et puis il est très bon, il est de première importance que, de temps en temps, que souvent, quelqu’un tasse des opinions humaines, des croyances humaines et des plus enracinées et des plus imposantes une révision complète, absolue, intégrale et radicale.

2055. (1895) Nos maîtres : études et portraits littéraires pp. -360

Depuis lors, en tout cas, nous avons pris d’autres mœurs ; et les temps ont bien exagéré la monogamie de nos opinions. […] Il cite avec admiration, dans plusieurs passages d’Isis, le nom et les opinions du scolastique allemand. […] Tous les citoyens y peuvent avoir des opinions, et toutes les opinions des valeurs égales. Aussi les Albains suivent-ils des chefs, seuls capables — en fait — d’opinions. […] Parmi les opinions de M. 

2056. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Le Chevalier de Méré ou De l’honnête homme au dix-septième siècle. »

Sa politesse est compassée, et je le soupçonne fort d’avoir été de ceux qui sont frivoles dans le sérieux et pédants dans le frivole  ; mais c’était certainement un homme de beaucoup d’esprit, établi sur ce pied-là dans le monde, ayant commerce avec ce qu’il y avait de plus considérable dans les lettres et à la cour, désigné par l’opinion, à un certain moment (de 1649 à 1664), pour un arbitre ou du moins pour un maître d’élégance. […] L’honnête homme, en son large sens, c’était l’homme comme il faut, et le comme il faut , le quod decet , varie avec les goûts et les opinions de la société elle-même. […] Je vous avertis aussi que vous perdez par là un grand avantage dans le monde… » Et plus loin, sur la division à l’infini : « Ce que vous m’en écrivez me paroît encore plus éloigné du bon sens que tout ce que vous m’en dites dans notre dispute… » Il n’en faudrait pas plus qu’une pareille lettre pour perdre celui qui l’a pu écrire dans l’opinion de la postérité, et Leibniz a traité le chevalier avec bien du ménagement quand il a dit : « J’ai presque ri des airs que M. le chevalier de Méré s’est donnés dans sa lettre à M. 

2057. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIIe entretien. Vie du Tasse (3e partie) » pp. 129-224

« Vous ne pourriez avoir trouvé une meilleure méthode pour obtenir votre pardon, recouvrer votre honneur, et pour me consoler moi et vos amis, que de confesser vos torts et de détruire vous-même, dans tous les esprits, une opinion aussi ridicule qu’odieuse (ses prétendues persécutions). […] Dans mon opinion, je ne puis trouver un site plus solitaire et moins exposé aux outrages odieux ! […] Et dans mon opinion la chose ne tardera pas !

2058. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (2e partie) » pp. 409-488

Combattant sans beaucoup de difficulté l’opinion exagérée qu’on pourrait se faire de la chasteté de Virgile, il ajoute : “Plus délicat de tempérament qu’Horace, Virgile s’abandonna avec moins d’emportement que son ami, mais avec aussi peu de scrupule, aux plaisirs de Vénus. […] Restons ce que nous sommes, et ne trempons pas plus qu’en 1847 dans ces coalitions de vengeance et de colère incapables de rien réparer, car elles n’apportent à l’opinion que des passions contraires, unies par le besoin commun de détruire, et dont l’union inconsidérée ne présente à l’analyse que la ligue inopportune et inconséquente des républicains et des royalistes combattant ensemble un jour avec le radicalisme socialiste pour conquérir le champ de bataille où ils s’entre-détruiront le lendemain de la victoire. […] On a supposé que ce morceau du IIIe livre des Géorgiques y avait été inséré après coup par le poète, et lorsque déjà il s’occupait de l’Énéide ; il y a des détails qui semblent en effet avoir été ajoutés un peu plus tard ; mais le cadre premier existait, je le crois, et le sens général, selon l’opinion de Heine, est plutôt prophétique qu’historique.

2059. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CIIIe entretien. Aristote. Traduction complète par M. Barthélemy Saint-Hilaire (1re partie) » pp. 5-96

Et le voilà étendu sur le plancher, fondant en larmes, comme un vil esclave, craignant la loi et le blâme des hommes, lui qui doit être la loi des autres et la règle de toute justice, puisqu’il n’a vaincu que pour être seigneur et maître, et nullement pour servir et pour se soumettre à une vaine opinion ! […] Il ne se souvenait donc plus d’avoir promis d’accréditer par ses écrits l’opinion qui faisait de ce prince un fils de Jupiter Ammon ? […] Il faut bien plutôt en demander l’origine à cette opinion des hommes à grandes fortunes, qui croient que l’égalité politique n’est pas juste entre ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas.

2060. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Figurines »

Elle suit en tout les goûts et les opinions des gens de son monde, ou de sa coterie, ou de son âge. […] En littérature, il n’a touché aux opinions traditionnelles que pour les redresser rudement, souvent pour en prendre le contre-pied. […] Il tenait à l’opinion du Temps et du Journal des Débats.

2061. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre VII : Instinct »

La posture de l’arrêt peut n’être que l’exagération de celle que prendrait tout naturellement l’animal en se préparant à s’élancer sur sa proie : telle est du moins l’opinion assez généralement adoptée. […] On a prétendu que le Coucou d’Amérique pondait aussi ses œufs dans le nid d’autres oiseaux ; mais je tiens du docteur Brewer, dont le témoignage fait autorité en pareille matière, que cette opinion est erronée. […] Quelques autres phénomènes concernant les instincts viennent encore appuyer plus fortement mes opinions.

2062. (1911) Lyrisme, épopée, drame. Une loi de l’histoire littéraire expliquée par l’évolution générale « Appendices » pp. 235-309

Croce à laquelle je me rallie complètement ; et quoi qu’il dise, ses opinions sont toujours suggestives et fortement motivées. […] II, p. 86) ; il lui reproche d’avoir cédé trop souvent à l’opinion commune (je dirais : à la mode, à la réclame du succès bruyant) et d’avoir abusé du mot : « se renouveler ou mourir ». […] Ils n’ont pas davantage à se soucier de l’opinion et encore bien moins de la justice des hommes, puisqu’en fait ils en sont eux-mêmes la source et la sanction.

2063. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Charles Magnin ou un érudit écrivain. »

Cependant il partageait les vivacités de ce temps, les opinions nettes et tranchées de l’Opposition libérale incomplètement satisfaite, et, sa plume se trouvant libre et disponible depuis la dissolution du Globe, il ne se tint pas dans la neutralité : il entra au National sous Carrel. […] Paris prête ici son opinion à M. 

2064. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite et fin.) »

Le succès dépendra aussi du jugement et de l’opinion qui prévaudra alors sur le maître tout-puissant qu’il a servi et abandonné. […] Vous avez parfaitement raison quand vous inclinez vers l’opinion qui le regarde comme un des instigateurs de l’arrestation et du meurtre du duc d’Enghien.

2065. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Quelques documents inédits sur André Chénier »

… Partout sur des autels j’entends mugir Apis, Bêler le dieu d’Ammon, aboyer Anubis. » Mais voici le génie d’expression qui se retrouve : « Des opinions puissantes, un vaste échafaudage politique ou religieux, ont souvent été produits par une idée sans fondement, une rêverie, un vain fantôme, Comme on feint qu’au printemps, d’amoureux aiguillons La cavale agitée erre dans les vallons, Et, n’ayant d’autre époux que l’air qu’elle respire, Devient épouse et mère au souffle du Zéphire. » J’abrège les indications sur cette portion de son sujet qu’il aurait aimé à étendre plus qu’il ne convient à nos directions d’idées et à nos désirs d’aujourd’hui ; on a peine pourtant, du moment qu’on le peut, à ne pas vouloir pénétrer familièrement dans sa secrète pensée : « La plupart des fables furent sans doute des emblèmes et des apologues des sages (expliquer cela comme Lucrèce au livre III). […] Bref, je me borne à dire, sur les trois portefeuilles, que je ne les ai jamais bien conçus ; qu’aujourd’hui que j’ai vu l’unique, c’est moins que jamais mon impression de croire aux autres, et que j’ai en cela pour garant l’opinion formelle de M. 

2066. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « George Farcy »

Et pour moi même, tout prend dans mes rapports avec les autres un caractère plus positif ; sans entrer dans les affaires, je ne me défie plus de mes idées ou de mes sentiments, je ne les renferme plus en moi ; je dis aux uns que je les désapprouve, aux autres que je les aime ; toutes mes questions demandent une réponse ; mes actions, au lieu de se perdre dans le vague, ont un but ; je veux influer sur les autres, etc. » En même temps que cette défiance excessive de lui-même faisait place à une noble aisance, l’âpreté tranchante dans les jugements et les opinions, qui s’accorde si bien avec l’isolement et la timidité, cédait chez lui à une vue des choses plus calme, plus étendue et plus bienveillante. […] Quant aux individus célèbres, représentants des opinions qu’il partageait, auteurs des écrits dont il se nourrissait dans la solitude, il les aimait, il les révérait sans doute, mais il ne relevait d’aucun, et, homme comme eux, il savait se conserver en leur présence une liberté digne et ingénue, aussi éloignée de la révolte que de la flatterie.

2067. (1860) Cours familier de littérature. X « LVIIIe entretien » pp. 223-287

Alexandre, sache bien qu’une opinion, quelle qu’elle soit, n’est point du domaine des poètes. […] parce que l’opinion est transitoire, et que le charme est immortel.

2068. (1862) Cours familier de littérature. XIII « LXXVIe entretien. La passion désintéressée du beau dans la littérature et dans l’art. Phidias, par Louis de Ronchaud (1re partie) » pp. 177-240

Pourquoi ai-je quitté moi-même les coteaux vineux de mon pays, comme la poussière quitte le sillon, pour aller chercher du bruit, de la vanité, de la popularité plus venteuse que le vent sur la mer ondoyante des opinions humaines, à Paris, à Londres, à Stamboul, à Rome, à Athènes, et pour errer, à la fin de mes jours, exilé par ma faute de la porte fermée de mon propre foyer natal ? […] Cet oncle, M. de Lamartine de Monceau, était, par son esprit, par son érudition attique et par ses opinions libérales, quoique royaliste, très digne de correspondre avec ces correspondants de Voltaire ; c’est à lui que je dois, non ma poésie, mais ma prose.

2069. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIIe entretien. Considérations sur un chef-d’œuvre, ou Le danger du génie. Les Misérables, par Victor Hugo (1re partie) » pp. 305-364

IV J’ai toujours aimé Victor Hugo, et je crois qu’il m’a toujours aimé lui-même, malgré quelques sérieuses divergences de doctrines, de caractère, d’opinions fugitives, comme tout ce qui est humain dans l’homme ; mais, par le côté divin de notre nature, nous nous sommes aimés quand même et nous nous aimerons jusqu’à la fin sincèrement, sans jalousie, malgré l’absurde rivalité que les hommes à esprit court de notre temps se sont plu à supposer entre nous. […] » il serait bien embarrassé de répondre, « Par ennui », répondrait-il peut-être, mais à coup sûr pas par opinion.

2070. (1892) Boileau « Chapitre I. L’homme » pp. 5-43

Despréaux, avec une adresse perfide, se fait prier et supplier par un Père Jésuite de lui nommer l’unique moderne qui surpasse à son gré les anciens ; à ce nom de Pascal, si malignement retenu et brusquement lâché, stupeur du bon Père, qui gratifie d’une épithète injurieuse l’auteur des Provinciales ; là-dessus, voilà notre poète hors de lui, qui oublie son artificieuse ironie, et s’emballe à fond, criant, trépignant, et courant d’un bout de la chambre à l’autre, sans plus vouloir approcher d’un homme capable de trouver Pascal faux : cette merveilleuse page, dont je ne puis reproduire la couleur et la vie, donne la sensation de l’homme même : c’est bien lui, avec sa malice railleuse et sa sincérité passionnée, et toujours prenant trop au sérieux les idées pour s’en jouer avec la grâce indifférente de l’homme du monde, qui sacrifie sans hésiter n’importe quelle opinion à la moindre des bienséances. […] Malgré les précautions qu’il avait prises, le mélange habile des opinions, et l’approbation du père La Chaise, les jésuites prirent l’épître sur l’Amour de Dieu pour un acte d’hostilité.

2071. (1920) Enquête : Pourquoi aucun des grands poètes de langue française n’est-il du Midi ? (Les Marges)

Il n’y en a pas dans toute la terre de langue d’oc, parce que la race a perdu sa langue, qui était une des plus propres à la poésie que l’Humanité ait connue : Ce fait d’une répartition si tranchée des grands poètes de langue française nous a semblé tellement intéressant que nous croyons utile de recueillir à son sujet des opinions autorisées. […] D’autre part, quelle opinion qu’on ait de Rostand, son succès universel — en dehors bien entendu d’une grande partie des milieux littéraires — ne permet pas de l’oublier, ni Paul Arène, qui a fait des vers exquis — Navarrot, béarnais, était aussi un excellent poète français.

2072. (1841) Matinées littéraires pp. 3-32

Les beautés nous apparaissent dans tout leur jour, les défauts ne peuvent nous échapper, et nous pouvons alors prononcer notre opinion en pleine connaissance de cause. […] Ce qui empêche de lire aujourd’hui, c’est la situation actuelle des esprits ; c’est cette agitation constante qui ne leur permet pas de se fixer ; c’est ce flux et reflux des opinions qui laisse à peine le temps de réfléchir ; c’est cette préoccupation, inévitable dans les temps de révolution, qui tourmente les hommes, les uns par l’inquiétude, les autres par l’espérance ; ceux-ci par la cupidité, ceux-là par l’ambition ; tous par l’égoïsme et la peur.

2073. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Conclusion »

L’esprit chrétien peut seul expliquer comment tant de sévérité, — pour ne rien dire de plus, — dans les opinions, se concilie avec tant de tendresse dans les sentiments. […] Il n’y a pas de risque que la raison moderne s’accommode jamais de ses exagérations ; mais telles de ses opinions qui ont fâché si fort ses contradicteurs, au temps des premières illusions de la liberté, suggéreront toujours des doutes utiles à qui saura de quels fonds de tendresse et de bonté elles sont sorties.

2074. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1855 » pp. 77-117

… Parce que j’ai changé tous les quinze jours d’opinion… Si je disais toujours la même chose, il n’y aurait plus d’intérêt, plus de curiosité de mon feuilleton… on me saurait par cœur, avant de me lire. » — Je lis dans un journal que Valentin, le dessinateur de L’Illustration, est mort d’une attaque d’apoplexie, à Strasbourg. […] Avec cela, une grande affectation d’indépendance de l’opinion consacrée, des théories reçues, des principes adoptés, et ne voyant dans les formes gouvernementales quelconques d’un pays que des formes diverses de corruption et de vénalité.

2075. (1856) Cours familier de littérature. II « IXe entretien. Suite de l’aperçu préliminaire sur la prétendue décadence de la littérature française » pp. 161-216

Cette institution, plus forte que la main qui prétendait la façonner à la servitude, n’avait pas tardé à créer contre tout despotisme une force ingouvernable par tout autre puissance que l’opinion. […] En concentrant dans un seul foyer toutes les individualités littéraires éparses et isolées dans la nation, on leur a donné ainsi le sentiment de leur force, de leur dignité et de leur ascendant sur l’opinion et même sur le pouvoir politique.

2076. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VII. M. Ferrari » pp. 157-193

Il est d’abord dans la décision même du livre, qui rompt du haut avec les opinions intermédiaires. […] Ferrari, historien, qui pose que l’Italie est normalement ce qu’elle doit être avec la nette formule : « Pape désarmé, Empereur absent. » Une telle opinion sous la plume d’un homme qui a l’air de maudire ses anciennes amours, a, dit-on, fait bondir le mazzinisme.

2077. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Émile Zola »

Il est de l’opinion de Victor Hugo, ce fort porcher poétique, qui n’a pas craint d’écrire : J’ai nommé par son nom le cochon, — pourquoi pas ? […] Il y en a tant dans ses livres, qu’il est impossible de ne pas croire qu’il brave l’opinion en les y mettant.

2078. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « La princesse Mathilde » pp. 389-400

Comprendre ainsi la vie, quand on est des privilégiés du sort, accorder le moins possible aux opinions vaines, s’en remettre à l’impression vraie, à la lumière naturelle ; distribuer ce qui vous est donné en surcroît ; remplir sa part d’un rôle auguste, et mener une existence ornée, mais simple ; jouir des arts, des élégances, de la nature aussi et de l’amitié, ce n’est pas seulement avoir un beau lot, ce n’est pas seulement savoir être heureuse, c’est répandre le bonheur et cultiver l’affection autour de soi.

2079. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. Vitet à l’Académie française. »

., 1809) ; l’opinion de d’Alembert sur le président s’y peut lire au tome I, pages 232 et 251.

2080. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « M. Victor Vousin. Cours de l’histoire de la philosophie moderne, 5 vol. ix-18. »

Qui dit éclectisme suppose la curiosité des opinions du dehors et le goût des voyages intellectuels. 1816 se trouvait un moment bien choisi pour inoculer ce goût en France à l’élite de la jeunesse.

2081. (1874) Premiers lundis. Tome II « Jouffroy. Cours de philosophie moderne — III »

La matière, pour être relevée, en fait, de l’interdit sous lequel l’avait placée le christianisme, pour être travaillée et fécondée sans scrupule dans la nature par toute la portion industrielle de la société, pour être ménagée et soignée par chacun de nous dans nos besoins personnels, la matière n’est pas encore absoute pleinement dans l’opinion des moralistes, et ils lui assignent toujours, à elle et à ceux qui la cultivent, un rang inférieur par opposition à l’esprit.

2082. (1874) Premiers lundis. Tome II « Thomas Jefferson. Mélanges politiques et philosophiques extraits de ses Mémoires et de sa correspondance, avec une introduction par M. Conseil. — I »

Madison son opinion détaillée sur la constitution qui se discutait alors.

2083. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre premier. Pour faire des Tragédies qui puissent intéresser le public en 1823, faut-il suivre les errements de Racine ou ceux de Shakspeare ? » pp. 9-27

Cette question semble usée en France, et cependant l’on n’y a jamais entendu que les arguments d’un seul parti ; les journaux les plus divisés par leurs opinions politiques, la Quotidienne, comme le Constitutionnel, ne se montrent d’accord que pour une seule chose, pour proclamer le théâtre français, non seulement le premier théâtre du monde, mais encore le seul raisonnable.

2084. (1895) Histoire de la littérature française « Avant-propos »

Brunetière : j’ai estimé plus utile, en une matière où il n’y a point de vérité dogmatique ni rationnelle, d’apporter les opinions, les impressions, les formes personnelles de pensée et de sentiment que le contact immédiat et perpétuel des œuvres a déterminées en moi.

2085. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre II. Littérature bourgeoise — Chapitre II. Le lyrisme bourgeois »

Qui veut connaître l’opinion de la bourgeoisie parisienne sur le règne de saint Louis, n’a qu’à le consulter : c’est un témoin qui dépose sans crainte et sans flatterie.

2086. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VII. La littérature française et les étrangers »

Elle devient le modèle sur lequel toutes les cours, toutes les classes polies de l’Europe se règlent, et c’est à son prestige, à l’autorité de nos modes et de nos opinions mondaines que notre littérature doit la moitié de son crédit.

2087. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Baudelaire, Œuvres posthumes et Correspondances inédites, précédées d’une étude biographique, par Eugène Crépet. »

C’est la recherche la plus puérile des opinions singulières.

2088. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre XII. L’antinomie morale » pp. 253-269

. — L’ouvrier anticlérical confond volontiers casuistique et jésuitisme ; de plus il est intolérant dans les choses qui touchent à la conduite comme dans celles qui touchent aux opinions et il ne respecte guère la liberté individuelle.

2089. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « La Plume » pp. 129-149

Toutes ces revues, d’ailleurs, se spécialisaient tellement qu’il était nécessaire de les suivre toutes pour arriver à se faire une opinion.

2090. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XI. Le royaume de Dieu conçu comme l’événement des pauvres. »

Proverbe qui veut dire : « L’opinion des hommes est aveugle.

2091. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XVIII. Institutions de Jésus. »

Il semble parfois que son plan était d’entourer sa personne de quelque mystère, de rejeter les grandes preuves après sa mort, de ne se révéler complètement qu’à ses disciples, confiant à ceux-ci le soin de le démontrer plus tard au monde 824. « Ce que je vous dis dans l’ombre, prêchez-le au grand jour ; ce que je vous dis à l’oreille, proclamez-le sur les toits. » Cela lui épargnait les déclarations trop précises et créait une sorte d’intermédiaire entre l’opinion et lui.

2092. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre III : Théorie psychologique de la matière et de l’esprit. »

L’auteur, qui se plaint de la façon dont sa doctrine a été reçue par ceux « dont les opinions étaient déjà faites », reconnaît que le jugement le moins défavorable a été celui des partisans de Berkeley ou de tout autre idéaliste.

2093. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXXIII » pp. 378-393

« Je désire plus ardemment que jamais, écrivait-elle, d’être hors d’ici, et je me confirme de plus dans l’opinion que je ne puis y servir Dieu.

2094. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre V. Chanteuses de salons et de cafés-concerts »

[Sully-Prudhomme] Sully-Prudhomme est un peu agacé de l’opinion qui le classe obstinément parmi les parnassiens.

2095. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1854 » pp. 59-74

Un tailleur, homme du monde, ami des lettres, ayant des opinions, des goûts, des manies artistiques.

2096. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre troisième. De la sympathie et de la sociabilité dans la critique. »

Pauvre Boileau, qui attachait une si capitale importance aux opinions de l’Académie, et aux siennes propres !

2097. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire des gens-de-lettres ; et principalement de leurs querelles. Querelles particulières, ou querelles d’auteur à auteur. — L’abbé d’Aubignac, avec Ménage, Pierre Corneille, Mademoiselle de Scudéri et Richelet. » pp. 217-236

Ménage soutient son opinion.

2098. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre II : La littérature — Chapitre I : Une doctrine littéraire »

En cela, elle n’a qu’à suivre les indications que lui donne l’opinion elle-même, un instant attachée à de fausses beautés, mais qui finit toujours par s’en dégager, et ne conserve dans ses admirations que ce qui est solidement vrai et solidement beau.

2099. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre II. Mademoiselle Mars a été toute la comédie de son temps » pp. 93-102

Quelle est, je vous prie, votre opinion sur Alceste ?

2100. (1760) Réflexions sur la poésie

Tant qu’elle a proposé et fixé les sujets de ces pièces, si elle a eu quelque chose à se reprocher dans ses décisions, ce n’est pas d’avoir usé d’une rigueur excessive ; elle a quelquefois encouragé le germe du talent, plutôt que le talent même ; et le bas peuple des critiques, qui se plaît à déchirer lourdement les ouvrages couronnés, et qui ne remporterait pas même le prix de la satyre s’il y en avait un, doit être persuadé, sans craindre d’avoir trop bonne opinion de l’académie, qu’elle a pu donner le prix à certaines pièces, et les croire en même temps fort éloignées de la perfection.

2101. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XV. Mme la Mise de Blocqueville »

II Et pour ne parler que de celle-là, à qui l’Opinion, cette femelle, décerne actuellement le titre d’homme de génie, Mme George Sand, qui, dans sa Lélia, ayant voulu montrer des abstractions et des types revêtus d’une humanité agrandie, a glissé bien vite, de cette hauteur de conception et de résolution, dans cette fatalité des portraits, imposés, de par la nature, à la femme, laquelle ne pense guère que quand elle se souvient.

2102. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’ancien Régime et la Révolution »

Et sans même aller si loin, sans avoir pour jamais fixé l’opinion dans la lumière de ses découvertes, a-l-il au moins assez éclairé le confluent de ces deux faits, qui sont à eux seuls toute l’histoire de France ?

2103. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Les civilisations »

Mais une opinion si virile paraît bien dure à Faliés, qui finit par aller jusqu’à dire que c’est là une erreur et une impossibilité aujourd’hui.

2104. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rigault » pp. 169-183

de ne pas prendre les images des poètes pour leurs opinions, quoique cela se ressemble beaucoup, dans les poètes, et rien n’est plus comique que cette peine effrayée chez le rédacteur des Débats de voir Horace compromis avec le pouvoir impérial d’Auguste.

2105. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Louis Vian » pp. 373-387

Certes, qui ne se serait attendu à des phrases d’avocat et à des opinions d’avocat, dans ce pourchas d’avocat !

2106. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Ernest Hello » pp. 389-403

Il rame, depuis des années, sur les galères de la publicité, qui n’est pas pour lui comme pour nous, profanes écrivains, la publicité de l’amour-propre, mais celle de la charité, et certainement il n’a pas trouvé dans l’opinion des hommes une récompense en proportion de ses efforts et de ses travaux.

2107. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La Grèce antique »

C’est à Lerminier qu’il faudrait appliquer ce mot, écrit par lui de Montesquieu « : Il a la passion de l’impartialité, mais c’est une passion contenue, surveillée, sûre de son désir et de son effort, moins une passion qu’un art réfléchi, calculateur et caché, qui va du rayonnement du Beau jusqu’au rayonnement, plus pur encore, de la Justice, par le fait de cette loi magnifique qui veut que toutes les vérités se rencontrent, à une certaine profondeur. » Nous avons dit qu’après avoir lu cette histoire il n’était plus possible de garder la moindre illusion sur la valeur morale et politique des Grecs, mais, en exprimant une telle opinion, nous n’avons point entendu parler des partis.

2108. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Le roi René »

L’honneur chevaleresque, encore la religion de ce temps et qui passait alors avant l’intérêt matériel des patries, s’était indigné, et la chrétienté tout entière, qui était l’opinion, avait poussé un terrible cri.

2109. (1880) Goethe et Diderot « Note : entretiens de Goethe et d’Eckermann Traduits par M. J.-N. Charles »

Voici l’article, cité dans la préface, qui fit fermer la porte du journal le Pays à l’auteur, et qui prouve, du reste, que ses opinions ne datent pas de la guerre de 1870.

2110. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIII. M. Nicolardot. Ménage et Finances de Voltaire » pp. 297-310

C’est un dieu debout qui continue de régner sur l’opinion subjuguée, et qu’il est bon de révéler tout entier pour le faire renier à la foule de ses adorateurs.

2111. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. H. Wallon » pp. 51-66

Wallon a voulu ajouter un Saint Louis de sa façon à tous les autres Saint Louis qui encombrent la place ; car Saint Louis, ce fascinateur historique, a eu des masses d’historiens de toute époque, de toute opinion, de tout renseignement.

2112. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « MM. Jules et Edmond de Goncourt » pp. 201-216

Et tant qu’on ne l’aura pas montré avec une évidence, si claire que sa scélératesse soit une opinion à laquelle personne n’ose plus toucher ni contredire, on n’en aura jamais fini avec le xviiie  siècle.

2113. (1893) Les œuvres et les hommes. Littérature épistolaire. XIII « Horace Walpole »

Horace Walpole reste un homme d’esprit, malgré ses opinions sur Turgot et Malesherbes, et ses Lettres le renseignement le plus vrai, le plus amusant et le plus cinglant contre la dernière moitié du xviiie  siècle.

2114. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « III. Donoso Cortès »

Il a laissé, presque dès son début, des traces trop vives et trop profondes dans l’opinion contemporaine, pour qu’on pût oublier de réunir les écrits dus à cette plume brillante que la mort a si tôt brisée, et qu’il eût brisée lui-même, s’il avait vécu davantage, tant elle satisfaisait peu son âme sainte !

2115. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « E. Caro »

Mais l’opinion impose ses lieux communs même aux esprits distingués qui les détestent.

2116. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Edgar Quinet »

Le fossoyeur d’Hamlet disait ce qu’il y avait eu dans le crâne d’Yorick, parce qu’il l’avait connu durant sa vie ; mais Quinet, le fossoyeur des cimetières antédiluviens, raconte tout le monde… qu’il ne connaît pas. « Dans le crâne surbaissé du Néanderthal », dit-il, il voit apparaître « les premières opinions grossières de l’esprit, de l’homme, les embûches tendues aux espèces gigantesques, l’émulation avec l’elephas antiquus — (le bonus, bona, bonum de Sganarelle !)

2117. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « André Chénier »

Je n’ignore pas que ce que j’écris là est contraire à la donnée commune de la Critique, mais ce n’est point une raison pour moi de ne pas risquer mon opinion.

2118. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Arsène Houssaye » pp. 271-286

Après avoir fait rêver René, chanter Corinne, immolé Delphine à l’opinion, il n’y avait plus rien.

2119. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « Honoré de Balzac » pp. 1-15

Poitou descend aux détails et continue de reprendre en sous-œuvre les opinions usées.

2120. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Paul Féval » pp. 145-158

Gil Blas est respecté non-seulement comme le chef-d’œuvre du roman et le génie du roman au dix-huitième siècle, mais comme un chef-d’œuvre de l’esprit humain, et une telle opinion ne m’étonne pas, venant, comme elle en vient, du dix-huitième siècle… Pour mon compte, cela ne m’étonne nullement que le siècle qui admira cette brillante canaille de Casanova, d’Aventuros Casanova, comme l’appelait le prince de Ligne, ait trouvé Gil Blas une œuvre charmante et sublime.

2121. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXXI. De Mascaron et de Bossuet. »

Ainsi, dans l’oraison funèbre de Henriette d’Angleterre, il dit, en parlant des princes, « Qu’ils s’imaginent avoir un ascendant de raison comme de puissance ; qu’ils mettent leurs opinions au même rang que leurs personnes, et qu’ils sont bien aises, quand on a l’honneur de disputer avec eux, qu’on se souvienne qu’ils commandent à des légions ».

2122. (1854) Nouveaux portraits littéraires. Tome I pp. 1-402

Les opinions qu’il avait soutenues pendant quinze ans avec une infatigable énergie ont triomphé d’une façon définitive, et le poète est resté après le triomphe aussi admiré que pendant le combat. […] Après avoir combattu trente-trois ans pour la liberté, après avoir conquis sur l’opinion une autorité toute-puissante, il devait à son pays les conseils de son expérience. […] Quelle que soit l’opinion de la science moderne sur l’origine des races humaines, la Genèse rattache toutes les races à une seule famille. […] Il paraît que cette opinion, généralement accréditée, ne repose sur aucun fondement ; c’est du moins l’avis de M. de Lamartine. […] L’opinion générale est plus indulgente pour les héros de roman que pour les héros de théâtre ; la même foule qui, assise sur les banquettes du parterre, ne pardonne pas au poète la violation de la vérité, se montre volontiers crédule lorsqu’elle suit des yeux les pages d’un roman.

2123. (1905) Propos littéraires. Troisième série

dans l’opinion qui était le moins la sienne. […] Et maintenant l’opinion qu’il a d’eux ? Elle m’est bien indifférente, l’opinion qu’il a eue d’eux. […] C’est probablement son opinion. […] Il suffira pour cela qu’il partage ou croie partager mes opinions politiques.

2124. (1914) En lisant Molière. L’homme et son temps, l’écrivain et son œuvre pp. 1-315

Sur un autre point Molière semble peut-être s’écarter de l’opinion générale du public de bourgeois pour lequel il travaille et dont il s’inspire. […] « L’hérétique, disait Bossuet, est celui qui a une opinion particulière », autrement dit l’hérétique est l’homme qui pense. […] La famille Corneille a flairé l’ennemi et sans tarder veut le décréditer dans l’opinion. […] Molière, n’a pas dit son opinion là-dessus, mais ce qu’il y a de certain c’est que, dès le début, il apportait des pièces où il n’y a pas de sujet du tout. […] Le gentiment d’autrui n’est jamais pour lui plaire ; Il prend toujours en main l’opinion contraire.

2125. (1891) La vie littéraire. Troisième série pp. -396

Là jamais de consentement unanime ni d’opinion stable. […] En vain, il s’autorise d’une opinion de M.  […] Il y a quelque impertinence à se faire brûler pour une opinion. […] Cette opinion prouve son endurcissement. […] C’est là une opinion singulière et pleine de fantaisie.

2126. (1891) Essais sur l’histoire de la littérature française pp. -384

Nisard sait mettre les livres de Rollin et même Gil Blas bien au-dessus de la place que leur assigne l’opinion générale des classiques. […] C’est ce don d’éviter le lieu commun en exposant des opinions communes et de se dégager de principes invétérés au moment où ils vont prendre un air de préjugé, que nous avions à cœur de signaler par quelques exemples. […] Je comprends votre opinion. […] Les juges les plus autorisés se rencontraient là-dessus avec ces critiques obscurs perdus dans la foule, qui n’en sont souvent que mieux placés pour exprimer avec à-propos certains courants de l’opinion. […] où est l’opinion si nécessaire à une femme ?

2127. (1904) Zangwill pp. 7-90

J’ai donc bien le droit, j’ai le devoir de chercher dans Renan et dans Taine la première pensée du monde moderne, la pensée de derrière la tête, comme on dit, qui est toujours la pensée profonde, la pensée intéressante, la pensée intérieure et mouvante, la pensée agissante, la pensée cause, la source et la ressource de la pensée, la pensée vraie ; et pour trouver l’arrière-pensée de Renan, passant à l’autre bout de sa pleine carrière, on sait que c’est dans les dialogues et les fragments philosophiques, dans les drames qu’il faut la chercher ; je me reporte aux Dialogues et fragments philosophiques, par Ernest Renan, de l’Académie française, quatrième édition ; je sais bien que la citation que je vais faire est empruntée à la troisième partie, qui est celle des rêves ; certitudes, probabilités, rêves ; je sais que mon personnage est celui de Théoctiste, celui qui fonde Dieu, si j’ai bonne mémoire ; je sais que les objections lui sont présentées par Eudoxe, qui doit avoir bonne opinion ; je n’oublie point toutes les précautions que Renan prend dans sa préface ; mais enfin mon personnage dit, et je copie tout au long ; je passe les passages où ce Théocrite rêve de la Terreur intellectuelle ; nous y reviendrons quelque jour ; car ils sont extrêmement importants, et graves ; et je m’en tiens à ceux où il rêve de la Déification intellectuelle : « Je vous ai dit que l’ordre d’idées où je me tiens en ce moment ne se rapporte qu’imparfaitement à la planète Terre, et qu’il faut entendre de pareilles spéculations comme visant au-delà de l’humanité. […] Remarquez bien que je ne parle pas seulement de la vie dans l’opinion, de la réputation, du souvenir. […] L’influence vraie est l’influence cachée ; non que l’opinion définitive de l’histoire soit en somme très fausse ; mais elle pèche tout à fait par la proportion. […] L’opinion que la conscience absolue a de lui, le souvenir qu’elle garde de lui, voilà la vraie vie du juste, et cette vie-là est éternelle.

2128. (1856) Leçons de physiologie expérimentale appliquée à la médecine. Tome I

Je n’entrerai donc pas dans l’exposition ni dans la discussion des opinions philosophiques précédentes, ce qui nous éloignerait entièrement de notre sujet. […] Vers la fin du dix-huitième siècle, d’après les opinions physiologiques du temps, on pensait que le suc gastrique changeait de nature suivant les substances qu’il avait à digérer, qu’il était alcalin dans l’alimentation animale, et devenait acide dans l’alimentation végétale, etc. […] Cette opinion ne peut plus être soutenue aujourd’hui, depuis que nous avons établi que la matière sucrée se renouvelle constamment dans l’organisme aux dépens des éléments du sang et indépendamment de la nature de l’alimentation. […] Nous verrons, du reste, que, d’après des expériences sur le grand sympathique, nous sommes autorisés à émettre cette opinion que la matière coagulable n’est pas la fibrine, au moins suivant la définition que l’on donne ordinairement de cette substance. […] J’ai été amené à cette opinion par des découvertes faites dans une autre voie, que je vous demanderai la permission de vous exposer avec quelques détails, en vous montrant par quelles séries d’idées j’ai dû passer pour arriver aux résultats que j’ai à vous annoncer dans cette séance.

2129. (1875) Premiers lundis. Tome III « Les poètes français »

et comme il est attentif à mettre jusqu’à la fin ses motifs d’excuse, ses raisons trop légitimes en pleine évidence, à avoir pour lui l’opinion et le cri public de ses anciens et de ses pairs ! […] Cette opinion avait fait du chemin depuis ; mais je crois qu’elle ne résiste pas à l’examen et que Villon gardera son rang, qui est le premier.

2130. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXIIe entretien. Chateaubriand, (suite.) »

Contre toi, du peuple critique, Que peut l’injuste opinion ? […] Mais, en dépit de toutes les menaces et de toutes les injures, l’opinion préparait ce retour salutaire, et secondait les pensées du génie qui veut reconstruire l’édifice social.

2131. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Première partie. De la parole et de la société » pp. 194-242

Je ne discuterai point, au reste, les assertions que je viens d’exposer ; mais je n’ai pas voulu laisser ignorer au lecteur que ce sont des opinions plus ou moins admises par la plupart des archéologues qui se sont occupés du problème de la formation du langage, et par tous les théosophes sans exception. […] C’est là, comme nous l’avons expliqué, le système de Smith ; mais ce système est contredit par l’expérience : on ne trouve à asseoir une telle opinion ni sur les monuments de l’histoire, ni sur les monuments de la fable.

2132. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Alphonse Daudet »

Telle déjà l’opinion qui commence. […] Il ne s’agit pas de ses opinions à lui.

2133. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire de la Restauration, par M. Louis de Viel-Castel » pp. 355-368

Dès la fin de l’année 1814, nous dit M. de Viel-Castel, dont l’opinion compte d’autant plus qu’il ne se montre point favorable au régime impérial antérieur, il était évident pour tout le monde que les gouvernants n’étaient pas en accord avec le sentiment public, que les lois, les institutions qu’ils appliquaient avec plus ou moins de fidélité n’avaient pas leurs sympathies, et qu’un penchant irrésistible les entraînait, sinon à les violer, au moins à en éluder l’esprit.

2134. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « M. Viguier »

Toutefois, si j’avais beaucoup l’occasion de vous voir, indépendamment du goût que j’aurais à causer après la pièce de ce que j’aime mieux penser comme vérité, — je m’attacherais dans votre intérêt au point de vue de la prudence qui, sans exiger de vous le sacrifice de vos opinions, doit vous conseiller beaucoup de mesure, en proportion même des applaudissements que recevez.

2135. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

Celui-ci avait laissé le jeune abbé en train de fortes études et de thèses théologiques ; il se le figurait toujours sous cet aspect : « Vous avez trop bonne opinion de ma vocation à l’état ecclésiastique, lui écrivait Rancé : pourvu qu’elle ait été agréable à Dieu, c’est tout ce que je désire… » On a beau relire et presser les lettres de cette date, on y trouve de bons et respectueux sentiments pour son ancien précepteur, un vrai ton de modestie quand il parle de lui-même et de ses débuts dans l’école ou dans la chaire, de la gravité, de la convenance, mais pas le plus petit bout d’oreille de l’amant de Mme de Montbazon.

2136. (1874) Premiers lundis. Tome II « Mémoires de Casanova de Seingalt. Écrits par lui-même. »

Je ne réponds pas ici de la rigoureuse exactitude philosophique de cette manière de voir et de dire ; je ne parlais là qu’en littérateur et d’après l’opinion spécieuse généralement reçue (Note des Portraits contemporains, tome II, page 509).

2137. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIII. Des tragédies de Shakespeare » pp. 276-294

La découverte de l’imprimerie a nécessairement diminué la condescendance des auteurs pour le goût national : ils pensent davantage à l’opinion de l’Europe ; et quoiqu’il importe que les pièces qui doivent être jouées aient avant tout du succès à la représentation, depuis que leur gloire peut s’étendre aux autres nations, les écrivains évitent davantage les allusions, les plaisanteries, les personnages qui ne peuvent plaire qu’au peuple de leur pays.

2138. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Est-ce que nous avons laissé (comme à Saint-Germain-l’Auxerrois ou à l’archevêché de Paris, en 1830) violer ou saccager le temple, vociférer contre le prêtre, attenter à la libre et inviolable opinion des âmes, la foi ?

2139. (1895) Histoire de la littérature française « Troisième partie. Le seizième siècle — Livre IV. Guerres civiles conflits d’idées et de passions (1562-1594) — Chapitre I. Les mémoires »

Henri Estienne, dénonçant par la bouche de son Celtophile tous ces vocables étrangers qui supplantaient les bons et natifs français, procéda à une épuration nécessaire : il fut de ceux qui amenèrent l’opinion à cet état où le succès de Malherbe était assuré.

2140. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre V. Indices et germes d’un art nouveau — Chapitre II. Signes de la prochaine transformation »

Et le type de la poésie voltairienne, avec les règles et la langue qu’elle impliquait, pesait sur la littérature, scrupuleusement maintenu par l’opinion du inonde, bien qu’en contradiction avec ses secrètes aspirations.

2141. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Il discutait régulièrement toutes les opinions, rejetant avec liberté ce qu’il avait des raisons de rejeter, content chaque fois qu’il pouvait constater la conformité de son sentiment personnel avec une tradition collective ou avec le sentiment d’un autre esprit individuel.

2142. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — B — Banville, Théodore de (1823-1891) »

OPINIONS.

2143. (1890) L’avenir de la science « IV » p. 141

Quelque opinion qu’on se fasse sur les tendances du XIXe siècle, il serait juste au moins de reconnaître que, la somme d’activité ayant augmenté, il a pu y avoir accroissement d’un côté, sans qu’il y eût déchet de l’autre.

2144. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre IV. Cause immédiate d’une œuvre littéraire. L’auteur. Moyens de le connaître » pp. 57-67

Et encore n’ai-je rien dit des écrivains qui, pour un motif ou un autre, ont cru devoir dissimuler une partie de leurs opinions.

2145. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre IV. La littérature et le milieu psycho-physiologique » pp. 126-137

Il fait dire au Vicaire savoyard, interprète fidèle de ses propres opinions : « Quand tous les philosophes du monde prouveraient que j’ai tort, si vous sentez que j’ai raison, je n’en veux pas davantage. » Sa démonstration de l’immortalité de l’âme ne repose pas sur une autre base.

2146. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. James Mill — Chapitre III : Sentiments et Volonté »

Bain ; quand on voit combien la dernière l’emporte en richesse de faits observés, en précision, en exactitude descriptive, on ne peut s’empêcher de concevoir une bonne opinion de la méthode expérimentale en psychologie, — d’une méthode qui, prenant la tache où les devanciers l’ont laissée, profite des résultats acquis, du progrès des années, des découvertes, en ajoute de nouveaux et accroît ainsi la science, au lieu de la recommencer toujours.

2147. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Avertissement sur la seconde édition. » pp. 23-54

  Nous ne réfuterons pas une infinité d’autres plaintes que l’intérêt d’opinion, l’intérêt personnel, l’intérêt de société, l’intérêt de fantaisie, l’intérêt de rivalité, l’intérêt d’irréligion, & tous les intérêts particuliers ont articulées contre nos jugemens.

2148. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Cours de littérature dramatique, par M. Saint-Marc Girardin. (2 vol.) Essais de littérature et de morale, par le même. (2 vol.) » pp. 7-19

Lors même que la décadence du goût est déjà avancée, quand Tacite (ou tout autre) écrivait ce Dialogue des orateurs, où toutes les opinions, même celles des romantiques du temps, sont représentées, l’agrément et la raillerie ne nuisaient pas au sérieux ; aucun système n’est sacrifié dans cet excellent dialogue, et chaque côté de la question est défendu tour à tour avec les meilleures raisons et les plus valables.

2149. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre IV. Littérature dramatique » pp. 202-220

Nous ne partageons pas pourtant l’opinion des gens de théâtre qui condamnent à l’avance la réalisation sur la scène de ces œuvres.

2150. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre dixième. »

C’est l’opinion de M. 

2151. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « L’Empire Chinois »

Tous, à quelque pâturage d’opinion qu’ils appartiennent, ont senti l’importance de ce document qui leur tombait presque du ciel — car c’était de la main d’un pieux missionnaire — et qui brillait des deux qualités distinctives de tout document imposant : la probité et l’intelligence.

2152. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le capitaine d’Arpentigny »

, mais tous les deux appartiennent à des opinions qui faussent leur nature et dépravent leur talent ; tous les deux ils étaient mieux faits que pour soutenir et défendre, chacun à sa manière, les doctrines avouées ou secrètes du matérialisme démocratique.

2153. (1909) Les œuvres et les hommes. Critiques diverses. XXVI. « Le comte Gaston de Raousset-Boulbon »

si toutes les qualités et toutes les forces pouvaient créer les circonstances comme elles ont l’art d’en profiter, Raousset serait dans l’opinion un grand homme comme il l’est pour nous… N’est-on pas potentiellement un grand homme quand on a une grande âme, et d’ailleurs qui niera que le vainqueur d’Hermosillo n’ait agi ?

2154. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « Léon XIII et le Vatican »

Il est un coup de baguette miraculeux qu’une grande situation frappe sur les hommes et qui éveille le genre de génie qu’il faut pour cette situation même, et ce coup de baguette doit être encore plus puissant sur les papes que sur les autres hommes, puisque, dans l’opinion catholique, leur situation est plus qu’humaine.

2155. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Théodore de Banville »

Les Œuvres complètes qu’il offre à la postérité avec une coquetterie sans courage, — car, de toutes ces pièces, il pouvait en oublier quelques-unes, et le livre y aurait gagné ; les Œuvres complètes ne changent rien à l’opinion exprimée par nous sur les Odelettes, ici retrouvées, et les Odes funambulesques, qu’on n’y retrouve pas.

2156. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « Léon Gozlan » pp. 213-230

Et c’est pourquoi, malgré l’art du détail qu’il avait autant que Balzac, et certainement bien plus que Stendhal, il est, dans l’opinion des hommes qui s’y connaissent, et il y doit rester, bien inférieur à tous les deux.

2157. (1904) Les œuvres et les hommes. Romanciers d’hier et d’avant-hier. XIX « L’Abbé Prévost et Alexandre Dumas fils » pp. 287-303

Mais la Critique, mais tous ceux qui, depuis quarante ans et plus, conduisent l’opinion littéraire, et qui avaient la prétention de décider des œuvres de l’esprit humain !

2158. (1922) Le stupide XIXe siècle, exposé des insanités meurtrières qui se sont abattues sur la France depuis 130 ans, 1789-1919

22° Toutes les opinions sont bonnes et valables, du moment que l’on est sincère. […] Ni l’un ni l’autre ne pouvait servir de chef, ni de guide et on le vit bien dans la tourmente dreyfusienne de 1887 à 1900 où, maîtres de l’opinion française, ils se firent battre, sur le terrain de cette opinion, par un politicien de quatorzième ordre, qui était Waldeck-Rousseau. […] » Il est vrai que peu d’hommes ont eu, au même degré que Drumont, la faculté de ne pas écouter un argument, qui contrariait leur opinion. […] L’autre Normand appartient à la race des géants, des initiateurs, dont le regard domine et outrepasse la foule des ânonneurs d’opinions toutes faites et des adorateurs de faux chefs-d’œuvre. […] L’opinion absurde, que professe sur tel ou tel problème politique ou social, dans son coin, un instituteur primaire n’a relativement que peu d’importance.

2159. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome I

Elles expriment des opinions et non des certitudes géométriques. […] Les médecins peuvent différer d’opinion sur la lésion qui fut l’origine du désordre. […] Quoiqu’il eût à peine quarante ans, Ernest Dupré occupait déjà dans l’opinion médicale une place de tout premier plan. […] Je transcris ici l’opinion d’un des hommes qui passent pour connaître le mieux le dessous des cartes engagées dans cette sanglante partie. […] Les attaches du combattant et du milieu familier ne sont pas rompues assez complètement pour que l’avant ne subisse pas sans cesse le contrecoup des opinions de l’arrière.

2160. (1923) Nouvelles études et autres figures

Comme il est difficile de se faire une opinion personnelle sur une œuvre dont on a reçu l’admiration en héritage et de cueillir une impression fraîche sur un domaine foulé depuis si longtemps et en tous sens par la critique ! […] Le Jansénisme entreprend de déconsidérer la Compagnie dans l’opinion des chrétiens et de lui arracher la direction intellectuelle et spirituelle de la jeunesse. […] Ils s’installaient au collège, y vivaient des semaines et des mois et apprenaient lentement à se faire une opinion. […] Je ne partage donc pas l’opinion de M.  […] Obermann en est une ; la Delphine de Mme de Staël en est une autre ; mais je ne partage pas opinion de M. 

2161. (1765) Articles de l’Encyclopédie pp. 7172-17709

Chacun a son opinion, c’est un gallicisme où l’usage autorise la transgression de la syntaxe de concordance, pour ne pas choquer l’oreille par un hiatus desagréable. Le principe d’identité exigeoit que l’on dit sa opinion ; l’oreille a voulu qu’on fît entendre sonn-opinion, & l’oreille l’a emporté suavitatis causâ. […] Consultons de bonne foi ces décisions, & comparons y sans préjugé les pratiques usuelles ; nous serons bientôt en état d’apprécier l’opinion du P. […] Je laisse au lecteur à juger du poids de ces opinions, & je me réduis à conclure tout de nouveau que toutes ces analogies de la lettre h avec les autres consonnes, lui en assûrent incontestablement la qualité & le nom. […] Nous disons mon ame, & l’on ne diroit pas meus anima ; ton opinion, & l’on ne peut pas dire tuus opinio : c’est que les Latins avoient pour éviter l’hiatus occasionné par le concours des voyelles, des moyens qui nous sont interdits par la constitution de notre langue, & dont il étoit plus raisonnable de faire usage, que de violer une loi aussi essentielle que celle de la concordance que nous transgressons : ils pouvoient dire anima mea, opinio tua ; & nous ne pouvons pas imiter ce tour, & dire ame ma, opinion ta.

2162. (1880) Une maladie morale : le mal du siècle pp. 7-419

A côté de son opinion sur le suicide, il expose consciencieusement celle de son correspondant inconnu, comme, après avoir décrit les bienfaits de la solitude, il en révèle tous les maux, avec une exactitude qui enlève au tableau qu’il en trace le prestige dangereux de ce sujet. […] Mme Sand lui a consacré une étude enthousiaste qui a eu du retentissement et qui a donné, en quelque sorte, le mouvement à l’opinion. […] N’a-t-il pas eu précisément pour but de donner à nos opinions flottantes une base désormais inébranlable ? […] Sans disputer sur certains détails, il faut reconnaître à l’opinion d’Alfred de Musset à l’égard de ses contemporains quelque autorité. […] On a lu plus haut à ce sujet l’opinion de Lamartine qui attribue à cette communication intime et mystérieuse, la tristesse des hommes « dont la vie date de ces jours funestes. » Du reste, en pourrait-il être autrement ?

2163. (1907) Propos de théâtre. Quatrième série

Je ne partage point tout à fait cette opinion. […] L’opinion universelle était que ce qui devait rester éternellement de Voltaire, c’était ses tragédies. […] Le public a cette opinion qu’un honnête homme ne doit jamais trahir le secret d’une femme qui a été sa maîtresse. […] Non, sans doute ; mais, comme toujours, ce n’est pas au succès que je songe, mais à mon opinion. […] à pic », parce que mon opinion est plutôt qu’il n’y aurait pas de mal à mettre !

2164. (1891) Impressions de théâtre. Cinquième série

Et je m’excite sur eux, et je ne suis pas très loin de dire moi aussi (comme font couramment, aujourd’hui, les personnes d’opinions distinguées) : « Qu’est-ce que nos romanciers auprès de Tolstoï et d’Elliot ? […] Si l’on n’admet pas cela, si l’on diffère d’opinion avec lui sur la beauté morale des âmes de Catherine et de Gérard, et si le duc de Septmonts n’inspire qu’une horreur tempérée, le drame n’a plus de sens. […] La vérité c’est que, à défaut de dogmes proprement dits, il n’y a jamais eu tant d’opinions « distinguées » et dont il n’est presque pas permis de s’écarter. […] Et de même, j’ai si bonne opinion des hommes que je crois, d’autre part, qu’une histoire comme celle de l’Abbé Constantin, réduite aux faits, peut être vraie. […] On ne sait pas s’ils ont une opinion là-dessus ni sur quoi que ce soit.

2165. (1892) La vie littéraire. Quatrième série pp. -362

L’opinion presque générale, il est vrai, favorise certaines œuvres. […] Sans lui les opinions seraient en matière d’art beaucoup plus diverses encore qu’elles ne sont. […] Il n’est pas en matière de littérature une seule opinion qu’on ne combatte aisément par l’opinion contraire. […] Il est éloquent, un peu glorieux, impatient de se jeter dans le mouvement des opinions et des idées et très heureux de commercer avec les hommes de science et de pensée. […] On attribuait adroitement à toute la société des opinions extravagantes de plusieurs jésuites espagnols et flamands.

2166. (1854) Causeries littéraires pp. 1-353

Telle fut du moins, à Ouglitch, l’opinion générale, et elle éclata avec tant de violence, que, peu d’instants après la mort du jeune prince, les habitants d’Ouglitch, ayant à leur tête la tzarine, folle de douleur et de colère, massacrèrent tous ceux qui, de près ou de loin, passaient pour appartenir à Boris. […] Qu’importe maintenant qu’Héloïse cite du grec et du latin, invoque à l’appui de son opinion les philosophes païens et les Pères de l’Église, appelle son fils Astrolabe, et mêle sans cesse ses souvenirs de savante à ses sentiments d’héroïne ? […] Vos opinions, je veux bien le croire, sont de vous, mais les mots de Napoléon sont de lui, et il n’est ni très prudent, ni très modeste de s’approprier les mots historiques des grands hommes. […] Mignet a eu, dans deux de ces circonstances solennelles, à rendre un funèbre hommage à deux représentants de la tradition religieuse, chevaleresque et monarchique, à deux hommes éminents dont l’un avait prêté à ses opinions tout le charme de son esprit, dont l’autre avait mis au service de sa foi toute l’autorité de ses vertus. […] Ainsi, grâce à la marche parallèle des événements dans la vie publique et des opinions dans les esprits justes, ce qui, au point de départ, nous eût séparés, nous rapproche aujourd’hui.

2167. (1887) Études littéraires : dix-neuvième siècle

De 1841 à 1848 sans jamais se classer dans aucun parti, il se range peu à peu à une opinion. […] Ses opinions politiques d’alors étaient représentées par le journal Le Rappel, fondé vers la fin de l’Empire par ses parents et alliés. […] C’est l’intrépidité de bonne opinion du Français des classes moyennes, qui s’admire sans hésitation et veut qu’on l’admire avec discipline. […] Nous sommes bien loin de cette opinion du bon Malherbe que les poètes ne sont non plus utiles à l’État que les joueurs de quilles. […] Cette opinion d’Hugo n’a pas laissé d’avoir quelque influence sur ses œuvres, surtout les dernières.

2168. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre III. L’âge classique. — Chapitre II. Dryden. »

Ses lectures sont d’un homme instruit et d’un esprit critique, qui songe peu à se divertir où à s’enflammer, mais qui apprend et qui juge : Virgile, Ovide, Horace, Juvénal, Perse, voilà ses auteurs favoris ; il en traduit plusieurs, il a leurs noms sans cesse sous la plume ; il discute leurs opinions et leur mérite, il se nourrit de cette raison que les habitudes oratoires ont imprimée dans toutes les œuvres de l’esprit romain. […] Il recevait une bourse d’or pour chaque dédicace, allait remercier, introduisait les uns sous des noms déguisés dans son Essai sur le Drame, écrivait des introductions pour les œuvres des autres, les appelait Mécène, Tibulle ou Pollion, discutait avec eux les œuvres et les opinions littéraires. […] … Zimri769, —  homme si divers qu’il semblait ne point être — un seul homme, mais l’abrégé de tout le genre humain. —  Roide dans ses opinions, et toujours du mauvais côté, —  étant toute chose par écarts, et jamais rien longtemps ; —  vous le trouviez, dans le cours d’une lune révolue, —  chimiste, ménétrier, homme d’État et bouffon, —  puis tout aux femmes, à la peinture, aux vers, à la bouteille, —  outre dix mille boutades qui mouraient en lui en naissant. —  Heureux fou, qui pouvait employer toutes ses heures — à désirer ou à goûter quelque chose de nouveau ! […] In the first rank of these did Zimri stand ; A man so various that he seem’d to be Not one, but all mankind’s epitome : Stiff in opinions, always in the wrong, Was ev’ry thing by starts, and nothing long But, in the course of one revolving moon, Was chemist, fiddler, statesman, and buffoon ; Then all for women, painting, rhyming, drinking, Besides ten thousand freaks that died in thinking.

2169. (1856) Le réalisme : discussions esthétiques pp. 3-105

Si peu de place que tiennent dans les intérêts les doctrines artistiques et littéraires, elles engagent les gens de la profession et froissent ou contredisent quelquefois des opinions antérieurement émises. […]  » Mais vous savez mieux que personne, madame, quelle singulière ville est Paris en fait d’opinions et de discussions. […] Véronèse, Rubens, seront toujours de grands peintres, à quelque opinion qu’on appartienne, à quelque point de vue qu’on se place. […] Aussi est-il du devoir de tous ceux qui luttent de s’entraider, d’attirer au besoin les colères des médiocrités, d’être solides dans leurs opinions, sérieux dans leurs jugements, et de ne pas imiter la prudence du vieillard Fontenelle. […] Ils devancent l’opinion, ils la forment, précisément parce qu’ils n’ont pas besoin de la consulter pour asseoir leur jugement.

2170. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome I

L’opinion s’en est émue et le principe de la propriété des lettres privées a été posé de nouveau. […] C’est, dans la critique, une opinion courante que Balzac écrit mal. […] » Ouvrez maintenant les Pensées et lisez-y ces lignes : « Le peuple a des opinions très saines, par exemple : 1° d’avoir choisi le divertissement et la chasse plutôt que la poésie ; 2° d’avoir distingué les hommes par le dehors, comme par la noblesse et le bien… » Et Pascal insiste : « Opinions du peuple saines : être brave n’est pas trop vain, c’est montrer qu’un grand nombre de gens travaillent pour vous. […] Léon Daudet, au « stupide dix-neuvième siècle », ont provoqué dans l’opinion un émoi très significatif. […] C’est bien ce que sent obscurément l’opinion, et voilà pourquoi elle s’est émue à ce degré rien qu’au titre du livre que M. 

2171. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LONGUEVILLE » pp. 322-357

J’ai si bonne opinion de votre sagesse, que je crois que vous eussiez été bien aisément consolée si votre mal y eût laissé des marques. […] Elle se reproche, en se condamnant elle-même, de désirer out bas de voir ses condamnations condamnées, et de vouloir découvrir, par cette sorte de provocation détournée, si on n’a pas d’elle quelque peu de bonne opinion : « Je me défigure en partie, dit-elle, pour m’attirer le plaisir de connoître qu’on croit plus de bien de moi, et c’est même un artifice de mon amour-propre et de ma curiosité de me pousser à me dépeindre défectueuse, pour savoir au vrai ce que l’on croit de moi, et satisfaire par même voie mon orgueil et ma curiosité. » Toujours la méthode d’esprit de l’hôtel Rambouillet ; c’est l’application seule qui a changé.

2172. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre III. Combinaison des deux éléments. »

Jusqu’alors, dans le gouvernement des actions et des opinions humaines, la raison n’avait eu qu’une part subordonnée et petite. […] Nous croyons aujourd’hui au progrès indéfini à peu près comme on croyait jadis à la chute originelle ; nous recevons encore d’en haut nos opinions toutes faites, et l’Académie des sciences tient à beaucoup d’égards la place des anciens conciles.

2173. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXVIe entretien. J.-J. Rousseau. Son faux Contrat social et le vrai contrat social (2e partie) » pp. 417-487

Rousseau, le premier des hommes doués du don d’écrire, était par sa nature, par son éducation, par sa place subalterne dans la société, par sa haine innée contre l’ordre social, par son égoïsme, par ses vices, le dernier des hommes comme législateur et comme politique, faux prophète s’il en fut jamais, et dont les dogmes, s’ils étaient adoptés par l’opinion séduite de son siècle, devaient nécessairement aboutir aux plus déplorables catastrophes pour le peuple qui se livrerait à ce philosophe des chimères. […] Les opinions flottent comme les mœurs ; la rotation sans limite de la fortune et des familles empêche toute autorité morale de s’établir ; la roue de la fortune, en tournant si vite, précipite tout dans un égoïsme funeste à l’ensemble ; le peuple même n’a plus ni protection, ni centre, ni représentants puissants dans le pays, pour défendre ses droits, ses instincts, ses libertés.

2174. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

La modération et la douceur rendent la vieillesse agréable ; les défauts contraires font le malheur de l’homme âgé, comme ils feraient celui de l’homme jeune. » Il cite ces vers de Pindare à l’appui de son opinion, sur le bonheur de vieillir dans l’honneur et dans l’aisance : « L’espérance l’accompagne en berçant doucement son cœur et allaitant sa vieillesse, l’espérance, qui gouverne à son gré l’esprit flottant des mortels, etc. […] « Voilà ce que j’hésitais depuis longtemps à dire, prévoyant bien que je révolterais par ces paroles l’opinion commune ; en effet, il est difficile de concevoir que le bonheur public et particulier tienne à cette condition.

2175. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIIe entretien. Vie du Tasse (2e partie) » pp. 65-128

Un préjugé puéril met les poètes en suspicion de démence ; ce préjugé est né assez naturellement, dans le monde, de l’opinion que l’imagination prédomine exclusivement dans les poètes, et que cette prédominance de l’imagination seule les prédispose à l’égarement d’esprit. […] L’opinion générale du temps est que le Tasse avait célébré la beauté et l’amour de Léonora d’Este sous les traits et sous le nom de Sophronie.

2176. (1911) La morale de l’ironie « Chapitre III. Les immoralités de la morale » pp. 81-134

Je les lui emprunte volontiers, parce que Hugo a la prétention — moins légitime qu’il ne l’a cru, mais bien plus justifiée qu’on ne l’a dit — d’être non pas un simple artiste, mais un penseur et un conducteur d’esprits, et que, en tous cas, il reflète et condense des opinions réelles. […] Je les trouve dans un immense ensemble de doctrines, d’opinions, d’idées, de sentiments plus ou moins coordonnés en système et variant d’une époque à l’autre, d’un groupe social à un autre groupe, et même d’un individu à un autre individu.

2177. (1883) Souvenirs d’enfance et de jeunesse « Chapitre IV. Le Séminaire d’Issy (1881) »

C’était un parfait honnête homme, dont les opinions se rapprochaient de celles de l’école universitaire modérée, si décriée alors dans le clergé. […] Esprit faible, prétentieux et fat, incapable de penser et de réfléchir par lui-même, d’ailleurs ignorant et sans connaissances d’aucune sorte sur aucun sujet, il oppose, à son malheureux père, des foules de difficultés contre la morale, la religion, et le christianisme en particulier, comme s’il avait le droit d’avoir une opinion sur des matières dont l’étude demande tant de lumières et consume tant d’années.

2178. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 mai 1886. »

Malgré elles, cette exposition donnerait une opinion désolante de l’état actuel et futur de la peinture française. […] — Je pense qu’il est beaucoup trop tôt pour donner une opinion.

2179. (1891) Journal des Goncourt. Tome V (1872-1877) « Année 1876 » pp. 252-303

C’est ainsi que si mes opinions conservatrices avaient triomphé, et si monsieur Buffet n’avait pas été battu, La Fille Élisa aurait bien pu être poursuivie. […] Je ne partage pas cette opinion et je crois que le même morceau, écrit à quatre époques différentes, dans des dispositions d’esprit dissemblables, aura dans chacune de ses élaborations, s’il est écrit par un homme de talent, une excellence, une perfection autre, mais adéquate.

2180. (1878) La poésie scientifique au XIXe siècle. Revue des deux mondes pp. 511-537

— Sur ce point se produisent des opinions contradictoires. […] Le public même incompétent se laisse volontiers émouvoir, persuader par l’opinion de l’élite ; il s’associe à l’enthousiasme des connaisseurs ; il ne comprend pas toujours, mais avec un instinct qui ne se trompe guère et qui ne demande qu’à être averti, il conçoit, il sent qu’il y a ici ou là une œuvre irrésistible, entraînante ; de confiance il applaudit, et il devient l’ouvrier d’un succès, même quand il n’en connaît pas bien les hautes et délicates raisons.

2181. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Edmond et Jules de Goncourt »

Leur opinion de moralistes ne rayonne pas à travers leurs peintures, comme les grands romanciers, comme Balzac, par exemple, la font rayonner à travers les leurs, même alors qu’ils ne l’expriment pas. L’opinion du moraliste dans le romancier, le Réalisme l’a supprimée… et c’est par là, chose lamentable !

2182. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Étude sur la vie et les écrits de l’abbé de Saint-Pierre, par M. Édouard Goumy. L’abbé de Saint-Pierre, sa vie et ses œuvres, par M. de Molinari. — I » pp. 246-260

Il était persuadé, comme Fontenelle, qu’avant Descartes on ne raisonnait presque point avec solidité ni avec justesse dans les matières qui n’étaient point du ressort de la géométrie : « Avant lui, le sens de la démonstration, le sens de la conséquence juste, ce sens qui met une si grande différence entre homme d’esprit et homme d’esprit, ce sens si précieux n’était presque point exercé ailleurs que dans la géométrie… Nous avions quantité d’orateurs et d’agréables discoureurs ; nous n’avions point de solides démontreurs. » Trop souvent on confondait la certitude qui vient de l’évidence véritable avec celle que l’on tirait des habitudes de l’éducation et des préjugés de l’enfance ou de l’opinion du grand nombre.

2183. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Mémoires de l’impératrice Catherine II. Écrits par elle-même, (suite.) »

Entouré de flatteurs de bas étage qui comptaient se servir de lui et l’exploiter, ivre la plupart du temps, se croyant un grand soldat et fier de son admiration servile, non pour le génie, mais pour les uniformes et les parades du grand Frédéric, il avait fait venir du Holstein tout un détachement, une troupe à lui (1,300 hommes), qu’il fit camper près d’Oranienbaum, et qu’il soignait comme la prunelle de ses yeux ; il s’en fit le colonel, n’en porta plus que l’uniforme et s’aliéna l’opinion russe par cette affectation tout allemande.

2184. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « M. Ernest Renan »

On s’insurge aussitôt contre toute opinion professée qui n’est pas nôtre.

2185. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « LA REVUE EN 1845. » pp. 257-274

Quelles qu’en puissent être les causes très-complexes, le fait subsiste ; il s’est élevé depuis lors toute une race sans principes, sans scrupules, qui n’est d’aucun parti ni d’aucune opinion, habile et rompue à la phrase, âpre au gain, au front sans rougeur dès la jeunesse, une race résolue à tout pour percer et pour vivre, pour vivre non pas modestement, mais splendidement ; une race d’airain qui veut de l’or.

2186. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Le Brun »

La Révolution, qui brisa tant de liens, dispersa tout d’abord la petite société choisie que nous aurions voulu peindre, et Le Brun, qui partageait les opinions ardentes de Marie-Joseph, se trouva emporté bien loin du sage André.

2187. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre premier. De la première époque de la littérature des Grecs » pp. 71-94

Donnons encore à cette opinion quelques nouveaux développements.

2188. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre V. De la lecture. — Son importance pour le développement général des facultés intellectuelles. — Comment il faut lire »

S’il est excellent de se mesurer avec certaines opinions hautaines, extrêmes, injustes, proclamées par des esprits puissants et sincères en un bon style, on ne saurait trop éviter l’erreur terne et sans relief, capable de s’insinuer parce qu’elle n’a pas la force de choquer, les demi-vérités dont les esprits vulgaires et laborieux, cherchant la gloire du paradoxe, font de pleines et plates erreurs.

2189. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Joséphin Soulary »

Soulary, l’opinion courante, où il y a, naturellement, à prendre et à laisser.

2190. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Deux tragédies chrétiennes : Blandine, drame en cinq actes, en vers, de M. Jules Barbier ; l’Incendie de Rome, drame en cinq actes et huit tableaux, de M. Armand Éphraïm et Jean La Rode. » pp. 317-337

Ç’a été une « opinion distinguée », du moins parmi les journalistes, et c’est devenu un lieu commun, de rapprocher nos révolutionnaires les plus emportés, et spécialement nos anarchistes, des chrétiens de la primitive Église, et d’affirmer qu’ils se ressemblent comme des frères.

2191. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Gautier, Théophile (1811-1872) »

OPINIONS.

2192. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Lamartine, Alphonse de (1790-1869) »

OPINIONS.

2193. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — V — Verlaine, Paul (1844-1896) »

OPINIONS.

2194. (1913) Les antinomies entre l’individu et la société « Chapitre V. L’antinomie esthétique » pp. 109-129

L’opinion est également assez tolérante pour les manifestations de l’individualisme esthétique.

2195. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VI. Jean-Baptiste  Voyage de Jésus vers Jean et son séjour au désert de Judée  Il adopte le baptême de Jean. »

A toutes les époques, d’ailleurs, Jésus céda beaucoup à l’opinion, et adopta bien des choses qui n’étaient pas dans sa direction, ou dont il se souciait assez peu, par l’unique raison qu’elles étaient populaires ; seulement, ces accessoires ne nuisirent jamais à sa pensée principale et y furent toujours subordonnés.

2196. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre VIII. Jésus à Capharnahum. »

J’adopte l’opinion de M. 

2197. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XV. Commencement de la légende de Jésus  Idée qu’il a lui-même de son rôle surnaturel. »

Mais l’opinion ici lui fit une sorte de violence.

2198. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre I : Des sens, des appétits et des instincts. »

De là, on doit conclure, contrairement à l’opinion reçue, que le cerveau ne constitue pas seul le sensorium, qu’il n’est pas seul le siège de l’esprit : son siège, qui est partout où il y a des courants nerveux, comprend le cerveau, les nerfs, les muscles, les organes des sens et les viscères.

2199. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre IV : La Volonté »

Peut-être ne pouvons-nous mieux exprimer notre opinion sur sa valeur qu’en disant : l’ouvrage de M. 

2200. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXV » pp. 259-278

L’orgueil étant désintéressé, elle se laissa aller à ce que pensait et pratiquait le couvent, soit par cette disposition à sympathiser avec des opinions générales, disposition qui formait un des traits de son caractère, soit par cette ambition d’estime, d’affection, de considération qui lui était propre aussi, et qui commençait à se développer en elle.

2201. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Troisième Partie. De la Poësie. — I. La Poësie en elle-même. » pp. 234-256

Quelques modernes se sont fait gloire d’adopter l’opinion de ce philosophe, & ont encore chargé le portrait.

2202. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre VI. Les localisations cérébrales »

Gratiolet paraissait incliner à l’opinion opposée.

2203. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre V : La religion — Chapitre I : Philosophie religieuse de M. Guizot »

Sans vouloir mêler ici prématurément la critique à l’exposition, il est impossible cependant de ne pas être frappé de cette imprudence, au moins apparente, qui fait reposer le dogme fondamental de la religion et l’espoir de l’humanité sur une opinion toute scientifique.

2204. (1949) La vie littéraire. Cinquième série

Il ne demande compte aux citoyens ni de leurs opinions présentes ni de leurs actes passés. […] Qu’a-t-il fait dans ce grand ouvrage des Origines de la France contemporaine, que se brouiller tour à tour avec toutes les opinions qui se partagent la France ? […] Pour m’inquiéter de l’opinion, j’en sais trop bien les incertitudes. […] Et il a toujours eu sous les yeux, nous dit-il encore, cette devise : « Guerre aux opinions ! […] Avec un instinct particulier aux hommes d’intrigue, ils entrevirent là le moyen de perdre dans l’opinion l’homme qu’ils redoutaient.

2205. (1896) Le livre des masques

L’attitude du public est moins bénigne lorsqu’on l’entretient du désaccord qui s’observe entre lui, public, maître obscur des gloires, et l’opinion du petit nombre oligarchique : habitué à accoupler ces deux idées, renommée et talent, il montre de la répugnance à les disjoindre ; il n’admet pas, car il a un sens secret de la justice ou de la logique, qu’un auteur illustre ne le soit que par hasard, ou qu’un auteur obscur mérite la lumière. […] Sur ce terrain-là, comme on se comprendra moins, l’accord sera plus facile et ensuite l’on admettra volontiers la légitime différence des opinions, puisqu’il s’agit non de capter la Vérité — ce reflet de lune dans un puits, — mais de mesurer par approximation, comme on fait pour les étoiles, la distance ou la différence qu’il y a entre le génie d’un poète et l’idée que nous en avons. […] Kahn, la Pluie et le Beau temps, n’a pas modifié l’opinion que l’on a de son talent et de son originalité : il y demeure égal à lui-même avec ses deux tendances, ici moins bien d’accord, au sentiment et au pittoresque, très visibles si l’on compare avec Image, si dolent cantique, Ô Jésus couronné de ronces, Qui saigne en tous cœurs meurtris, le Dialogue de Zélande, Bonjour mynher, bonjour myffrau, joli et doux comme telle vieille estampe d’almanach. […] Voici un exemple évident d’ironie : « Toi, jeune homme, ne te désespère point, car tu as un ami dans le vampire, malgré ton opinion contraire.

2206. (1805) Mélanges littéraires [posth.]

Je n’examinerai point si la plupart d’entre eux n’étaient point intéressés par leur état à défendre cette opinion, ou déterminés à la suivre par une admiration trop souvent aveugle pour ce que les anciens ont pensé : il s’agit ici de raison et non pas d’autorité, et la question vaut bien la peine d’être examinée en elle-même. J’observe d’abord que nous avons assez peu de connaissance de la manière dont se faisait chez les anciens l’éducation tant publique que privée, et qu’ainsi, ne pouvant à cet égard comparer la méthode des anciens à la nôtre, l’opinion de Quintilien, quoique peut-être bien fondée, ne saurait être ici d’un grand poids. […] En vain le génie même s’efforcerait de braver à cet égard les opinions reçues ; l’orateur est l’homme du peuple, c’est à lui qu’il doit chercher à plaire ; et la première loi qu’il doit observer pour réussir, est de ne pas choquer la philosophie de la multitude, c’est-à-dire, les préjugés. […] Bien pénétrés de l’importance de cette vérité, les éditeurs de l’Encyclopédie après avoir déclaré qu’ils ne prétendaient point adopter tous les éloges qui pourraient y avoir été donnés par leurs collègues, soit à des gens de lettres, soit à d’autres, comme ils ne prétendaient pas non plus adopter les critiques, ni en général les opinions avancées ou soutenues ailleurs que dans leurs propres articles, puisque tout est libre dans cet ouvrage, excepté la satire, et que par cette raison chacun devant y répondre au public de ce qu’il avançait, de ce qu’il blâmait et de ce qu’il louait, ils s’étaient fait la loi de nommer leurs collègues sans aucun éloge.

2207. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Delacroix s’est livré aux immenses travaux, et il n’a pas désarmé l’opinion. […] Ses paysans sont des pédants qui ont d’eux-mêmes une trop haute opinion. […] Les vastes et magnifiques groupes qui ornent les jardins de Versailles ne sont pas une réfutation complète de mon opinion ; car, outre qu’ils ne sont pas toujours également réussis, et que quelques-uns, par leur caractère de débandade, surtout parmi ceux où presque toutes les figures sont verticales, ne serviraient au contraire qu’à confirmer ladite opinion, je ferai de plus remarquer que c’est là une sculpture toute spéciale où les défauts, quelquefois très-voulus, disparaissent sous un feu d’artifice liquide, sous une pluie lumineuse ; enfin c’est un art complété par l’hydraulique, un art inférieur en somme.

2208. (1889) La bataille littéraire. Première série (1875-1878) pp. -312

Philippe Gille, bien que ne changeant rien à ses opinions passées, a dû forcément supprimer, abréger et condenser. […] Ce n’est là qu’un prélude, et, il faut bien le dire, les opinions politiques de Michel ne sont guère plus solides que ses affections. […] C’est là du moins mon opinion, et j’espère que ceux qui auront lu ces extraits seront de mon avis. […] À vingt-deux ans, mon oncle Barbassou s’était fait Turc par opinion politique : c’était sous les Bourbons. […] Nos militaires paraissent avoir une très bonne opinion de l’armée autrichienne et très médiocre des Prussiens.

2209. (1912) Pages de critique et de doctrine. Vol I, « I. Notes de rhétorique contemporaine », « II. Notes de critique psychologique »

Je voudrais penser que vous trouverez à feuilleter ces Pages de Critique et de Doctrine, rédigées de même, un peu du plaisir que j’avais autrefois à rencontrer, dans quelque journal, vos Opinion et vos Billets du matin. […] L’opinion courante pose le problème dans des termes plus simples. […] Dans son opinion, ces écrivains occupaient le premier rang. […] Quelque opinion que l’on professe sur son parti pris final, il faut du moins reconnaître qu’il y déploya des vertus qui, par elles seules, demeurent un bienfait d’exemple. […] Pas plus que l’opinion contemporaine, et quelle ironie que la prétendue justice de l’histoire !

2210. (1892) Sur Goethe : études critiques de littérature allemande

Mais l’opinion qu’il se formait de l’Univers-Dieu n’a-t-elle pas contribué beaucoup à l’égarer et à le perdre ? […] Sklower n’a pas écrit son petit ouvrage pour prêter à Goethe une opinion de plus, et faire de lui un pur napoléonien. […] Or, en des opinions de cette nature, c’est surtout la pratique qui nous importe. […] Nous ne voulons pas creuser trop avant les opinions religieuses de M.  […] Goethe, dans ses fragments, trop négligés, de littérature et de philosophie, émet à ce propos une opinion caractéristique.

2211. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre septième. Les altérations et transformations de la conscience et de la volonté — Chapitre deuxième. Troubles et désagrégations de la conscience. L’hypnotisme et les idées-forces »

. — Cette opinion, soutenue par MM.  […] Dessoir, à l’appui de son opinion, a réuni de curieux documents sur le miroir magique. […] C’est aussi l’opinion de Wundt.

2212. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

C’était inutile à prouver pour Molière. » Comment concilier cette opinion avec le fait indiscutable que Louis XIV fut le constant défenseur de ce prétendu révolutionnaire ? […] Sa communication à l’Académie n’a pas d’autre but : émouvoir l’opinion sur cette lacune de notre hygiène sociale. […] « Opinions saines du peuple », disait Pascal. […] Or, c’est précisément cette fixité sociale que les trois écrivains, dont l’opinion hardiment exprimée sert de prétexte à cette note, considèrent comme menacée, et l’histoire, hélas ! […] Les discussions auxquelles je viens de faire allusion marquent assez à quel degré ce problème intéresse l’opinion.

2213. (1884) La légende du Parnasse contemporain

On ne sait pas assez quelle influence désastreuse sur la destinée d’un homme de lettres et sur l’opinion de ses contemporains peut avoir sa chevelure ! […] Il était bien obligé de s’en rapporter à l’opinion de ceux qui avaient assumé la responsabilité d’être ses guides II y a, entre le public et les écrivains, le journal, comme il y a, entre le public et les auteurs dramatiques, le directeur de théâtre. […] Ce sont ici des opinions personnelles et que nous ne prétendons imposer à personne. […] Incomplet encore en ce temps-là, composé de quelques jeunes hommes, presque des enfants, non soumis à la grave direction des maîtres, le groupe des poètes nouveaux se distinguait surtout par la témérité des opinions, et par impertinence aussi de l’attitude. […] On a des opinions pour soi auxquelles on se conforme, mais qu’il ne faut jamais prétendre imposer aux autres !

2214. (1912) Réflexions sur quelques poètes pp. 6-302

Quand Mercure eut fini la défense de Folie, Jupiter voyant les Dieus estre diversement afeccionnez et en contrarietez d’opinions, les uns se tenans du côté de Cupidon, les autres se tournans à aprouver la cause de Folie : pour apointer le diferent, va prononcer un arrest interlocutoire en cette manière : « Pour la difficulté et importance de vos diferens, et diversité d’opinions, nous avons remis votre affaire d’ici à trois fois sept fois neuf siècles. […]   Dans un discours, en guise de préface, Remy Belleau explique qu’il a voulu suivre l’opinion des anciens auteurs sur les vertus et les propriétés particulières des pierres précieuses. […] Ronsard estimait le savoir de Théodore de Bèze, et il lui avait conservé son amitié, tout en condamnant ses opinions. […] « Quant à sa religion, dit Goujet, il est sûr qu’il a toujours été sincèrement ennemi des nouvelles opinions et très attaché à la foi de l’Église catholique. » Les mercenaires allemands qui désolaient alors le pays, étaient pour notre poète, non seulement de désagréables pillards, mais de méchants hérétiques. […] la juste opinion a sa tare comme la fausse.

2215. (1891) Esquisses contemporaines

Pour qu’un peuple arrive à borner son action collective — et tout le problème politique est au fond là — il faut et il suffit qu’un nombre de citoyens capables de déterminer un mouvement de l’opinion aient appris, chacun pour son compte, à se gouverner eux-mêmes. » La crise économique se résoudrait sur le même terrain : « Il faut avant tout éteindre les haines, désarmer la défiance afin de pouvoir éclairer le peuple sur ses intérêts et la limite de ses droits. […] Ce « renforcement de certains mobiles par rapport à d’autres », — par où il faut entendre des mobiles désintéressés par rapport aux mobiles intéressés — a-t-il quelque chance de se faire valoir à l’heure où « l’opinion qui se pique de monopoliser la science » s’apprête à « éteindre la responsabilité dans le déterminisme », à « résoudre la conscience morale en illusion héréditaire », et à « flétrir la croyance en Dieu comme une superstition puérile » ? […] Tout au moins faudra-t-il s’efforcer de reconquérir de haute lutte cette opinion égarée ; il faudra se défendre vigoureusement contre les attaques spécieuses, argumenter, opposer preuves à preuves, raisonnements à raisonnements et produire au grand jour ceux qui militent en faveur de la conception du monde qui seule va de pair avec les intérêts de la vie et comporte la possibilité de l’idéal entrevu. […] Sans révélation, les idées morales ne seraient autres choses que des opinions plus ou moins individuelles… La morale ne peut nous venir que de Dieu, et Dieu n’a parlé que par le Christ, son Fils éternel. […] Pour un esprit que maîtrisait la logique et qui, au temps même de sa plus grande ferveur religieuse, réduisait « les idées morales » à « des opinions individuelles », le dualisme de conscience devait s’apaiser dans la même harmonie finale.

2216. (1902) Le problème du style. Questions d’art, de littérature et de grammaire

Impersonnel, il professe volontiers, pour une journée, l’opinion de sa dernière lecture ; il accumule volontiers les opinions ; il les collectionne, les classe et les catalogue ; Sarcey lui a confié que Taine « avait plus tard coloré son style artificiellement », et cela lui suffit. […] Giraud rapporte l’opinion de M.  […] L’une et l’autre opinion me semblent identiques au fond, c’est-à-dire fausses, car je crois que l’art est, par essence, absolument inintelligible au peuple. […] Mais l’opinion, et même celle des femmes, sera rebelle, très probablement. […] Bréal s’est rangé à l’avis des Conservateurs ; là où l’on voyait deux camps, il n’y a plus que des goûts personnels et des opinions esthétiques.

2217. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Il y a eu un véritable duel entre la critique qualifiée, mandatée, généralement universitaire, d’une part, et l’opinion littéraire, d’autre part : j’entends par opinion littéraire le goût et le jugement des professionnels de la littérature. […] Lui-même d’ailleurs accrédite dans la préface de 1874 à Un Été dans le Sahara une opinion analogue à celle que lui prête le Journal. […] Il l’a portée dans sa critique d’art qu’il a localisée sur un point : les maîtres de Belgique et de Hollande, n’ayant connu ni Florence ni Rome, n’ayant rien retenu de Venise, n’ayant jamais formulé la moindre opinion, hasardé Je moindre point de vue sur Raphaël, Michel-Ange, Léonard, Titien. […] Professeur peu écouté, tourné en ridicule par l’opinion, cette critique locale l’exaspérait, non seulement comme une injure, mais comme une laideur, un provincialisme, un instar misérable de Paris. […] Amiel admire alors son esprit, son style, mais lui reproche l’absence de sérieux, un scepticisme de façade qui recouvre la complaisance à l’opinion, une facilité de style qui fait corps avec la facilité de conscience, une « adresse obséquieuse envers le chauvinisme français ».

2218. (1900) Molière pp. -283

Il est enfin en pleine possession de la faveur et de la renommée ; mais il n’est pas encore en pleine possession de son génie ; il ne produit encore que des essais, assez remarquables toutefois pour donner une haute opinion de ce qu’il fera plus tard. […] Je m’érigerai en censeur des actions d’autrui, jugerai mal de tout le monde, et n’aurai bonne opinion que de moi. […] Dom Juan, jeune, brillant, arrogant, plein d’honneur, ne lui aurait été alors qu’un prétexte à exposer ses propres opinions, à lancer en son propre nom ces mots si étranges à la date où ils sont lancés : « Je crois que deux et deux font quatre. » Ou, quand Dona Elvire invoque le ciel contre Dom Juan, à faire dire à Dom Juan : « Sganarelle, le ciel !  […] La preuve que Molière n’accepte pas les opinions de Chrysale, c’est qu’il les a mises sous une forme ridicule dans ce passage du rôle d’Arnolphe, pour qui certes il ne prétend nous inspirer aucune admiration. […] C’est un résultat abusif de l’autorité morale acquise de longue main sur lui, de la confiance qu’on lui inspire ; craignez et prenez garde qu’il n’ait une opinion qu’il n’aurait pas, qu’il ne fasse un choix qu’il ne ferait pas, s’il était moins mené et mieux éclairé.

2219. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Quelques « billets du matin. » »

Je suis si peu musicien que, si je m’avisais d’avoir une opinion sur l’œuvre nouvelle de Massenet, vous me ririez au nez et vous me diriez, comme Loulou à Stendhal : « Ta parole ?  […] Au reste, il nous dit qu’elle ne s’ouvre qu’à de rares élus ; cela non plus ne saurait s’appliquer à la Revue des Deux-Mondes, car, s’il n’y a pas plus de trois mois qu’elle s’est avisée de l’existence de Loti et de Maupassant, et si elle ferme soigneusement sa porte à Alphonse Daudet, à Bourget et à France, elle l’a toujours ouverte à deux battants aux Tartempions qui avaient de l’assurance, de l’entregent, des opinions convenables, une position ou un parentage. […] Avoir son sentiment et son jugement à soi, et non pas le jugement ni le sentiment des autres, professer une opinion parce qu’on l’a, non parce que d’autres l’ont et parce que c’est l’opinion présumée d’une circonscription électorale ou l’opinion affichée d’un groupe parlementaire… Ah ! […] … Ne dites point qu’il y aurait alors autant d’opinions que de têtes.

2220. (1856) Réalisme, numéros 1-2 pp. 1-32

Le public a un réel sentiment de ce qui est bon ; malgré les conseils des feuilletonistes, malgré les préjugés des classes qui se disent intelligentes, son opinion fait loi tôt ou tard. […] De là les opinions erronées, les estimations à contresens, les préjugés littéraires qui se transmettent et se perpétuent. […] … La religion, la philosophie, le passé, le présent, la pratique, l’abstraction, tout cela s’embrouille, fait gâchis ; les idées les plus contraires s’entrechoquent dans son esprit ; trop faible pour faire sortir une opinion de ce chaos, il s’en rapporte à la parole du maître. […] Il est un parti littéraire qui prône la religion de l’antique, parti très intolérant, qui foudroie avec une gravité comique tout ce qui n’est pas de son opinion : c’est la littérature atrophiante. […] Dépeindre un caractère c’est dépeindre un homme avec ses passions, ses opinions, ses habitudes.

2221. (1899) Arabesques pp. 1-223

Par conséquent, ses opinions n’ont aucune valeur. » J’avais pourtant expliqué dans la préface d’Aspects, et même auparavant, que j’entendais par là ma conception de l’univers en général et du microcosme où évolue la gent-de-lettres en particulier. […] Donc, une fois pour toutes, qu’il soit entendu que publier son opinion sur quelqu’un, c’est renseigner le lecteur sur la façon dont on se représente ce quelqu’un. […] Une autre critique formulée contre moi est celle-ci : j’ai varié dans mes opinions. […] Mais, en ce qui concerne Dreyfus, il y avait, pour les Pharisiens et les marchands de nouvelles, trois motifs de se mettre en branle et d’embourber dans un cloaque cette bourrique aveugle : l’opinion. […] Ceux-là se montrent susceptibles d’une action féconde ; il sied donc d’exposer quelques-unes de leurs opinions : M. 

2222. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLVIIIe Entretien. Montesquieu »

Cette force, plus grande, doit produire bien des effets : par exemple, plus de confiance en soi-même, c’est-à-dire plus de courage ; plus de connaissance de sa supériorité, c’est-à-dire moins de désir de la vengeance ; plus d’opinion de sa sûreté, c’est-à-dire plus de franchise, moins de soupçons, de politique et de ruses. […] Son opinion sur l’esclavage ne le repousse pas ; il ne tend qu’à l’adoucir.

2223. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « Edmond et Jules de Goncourt »

Ils ont aimé passionnément les lettres, avec une sincérité entière et un désintéressement rare ; poussant bravement leur manière jusqu’à l’extrême, sans consentir jamais à des atténuations qui eussent peut-être suffi à leur amener le grand public ; poussant dans les derniers temps le courage de leur opinion jusqu’au baragouin le plus distingué. […] Il se trouvait que ce farceur, ce paradoxeur, ce moqueur enragé des bourgeois avait, pour les choses de l’art, les idées les plus bourgeoises, les religions d’un fils de Prudhomme… Il avait le tempérament non point classique, mais académique comme la France…12 … Ce tableau était, en un mot, la lanterne magique des opinions d’Anatole, la traduction figurative et colorée de ses tendances, de ses aspirations, de ses illusions… Cette sorte de veulerie tendre qui faisait sa bienveillance universelle, le vague embrassement dont il serrait toute l’humanité dans ses bras, sa mollesse de cervelle à ce qu’il lisait, le socialisme brouillé qu’il avait puisé çà et là dans un Fourier décomplété et dans des lambeaux de papiers déclamatoires, de confuses idées de fraternité mêlées à des effusions d’après boire, des apitoiements de seconde main sur les peuples, les opprimés, les déshérités, un certain catholicisme libéral et révolutionnaire, le Rêve de bonheur de Papety entrevu à travers le phalanstère, voilà ce qui avait fait le tableau d’Anatole … 13 Anatole présentait le curieux phénomène psychologique d’un homme qui n’a pas la possession de son individualité, d’un homme qui n’éprouve pas le besoin d’une vie à part, d’une vie à lui, d’un homme qui a pour goût et pour instinct d’attacher son existence à l’existence des autres par une sorte de parasitisme naturel, etc.

2224. (1831) Discours aux artistes. De la poésie de notre époque pp. 60-88

On nous citera en foule des œuvres et des noms d’artistes qui paraissent détruire cette opinion. […] Voilà la grande question sur cette question de l’art ; voilà ce qui n’a guère été compris, ce nous semble, et ce qui a engendré tant d’opinions diverses qui se combattent.

2225. (1886) Revue wagnérienne. Tome I « Paris, 8 novembre 1885. »

On peut en discuter d’une façon tout individuelle, selon le goût, établir les relations entre les tendances de l’artiste et celles du critique, apprécier, approuver, dénigrer, sans que rien de supérieur intervienne dans ce débat aux opinions particulières de celui qui le suscite. […] On y voit que contrairement à l’opinion d’Assézat et d’autres, Diderot était très au courant de la théorie et de la pratique de l’art musical, et qu’il avait en quelque sorte prévu l’œuvre d’art Wagnérien.

2226. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « Introduction »

Or, à moins d’admettre l’opinion cartésienne des bêtes machines, qui n’a plus de partisan que je sache, il faut bien reconnaître que les animaux ont leurs sensations, leurs sentiments, leurs désirs, leurs plaisirs et leurs douleurs, leur caractère, tout comme nous ; qu’il y a là un ensemble de faits psychologiques qu’on n’a aucun droit de retrancher de la science. […] Il combat d’ailleurs cette opinion.

2227. (1914) Boulevard et coulisses

Quelque opinion que l’on ait sur les doctrines qui en sortirent, on ne peut nier leur retentissement et l’impression qu’elles firent sur les esprits contemporains. […] N’allez pas cependant vous imaginer, messieurs, que je cherche à laisser dans votre esprit une méchante opinion de nous et de notre temps.

2228. (1870) De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés « De l’origine des espèces par sélection naturelle, ou Des lois de transformation des êtres organisés — Chapitre XIV : Récapitulation et conclusion »

Comme la sélection naturelle agit au moyen de la concurrence, elle n’adapte l’organisation des habitants d’une contrée que dans la mesure du degré de perfectionnement de leurs associés ; nous ne pouvons donc être surpris de ce que les habitants d’une région quelconque, que, selon l’opinion commune, on suppose avoir été spécialement créés pour elle et adaptés aux conditions locales, soient vaincus et supplantés par les produits naturalisés d’un autre pays. […] Le jour viendra où l’on citera cet exemple de l’aveuglement causé par les opinions préconçues.

2229. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — II. (Fin.) » pp. 296-311

Ce qui manque pourtant à ce discours, c’est l’originalité ; Vicq d’Azyr s’y montre ouvert à tous les courants d’opinions et de jugements de son siècle.

2230. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Montluc — I » pp. 56-70

C’est de sa part une opinion réfléchie.

2231. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Les Chants modernes, par M. Maxime du Camp. Paris, Michel Lévy, in-8°, avec cette épigraphe. « Ni regret du passé, ni peur de l’avenir. » » pp. 3-19

Dans ces tours d’opinions où chaque académicien développe son avis, j’ai vu les hommes politiques qui y prenaient part motiver excellemment, et avec ce bon sens libre qui est la critique des honnêtes gens du monde, leur jugement détaillé sur des ouvrages dramatiques ou autres dont on avait à mesurer le mérite et à graduer le rang.

2232. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Mémoires et journal de l’abbé Le Dieu sur la vie et les ouvrages de Bossuet, publiés pour la première fois par M. l’abbé Guettée. — II » pp. 263-279

Telle n’est pas la doctrine de Bossuet, qui remontre dès le premier jour à l’Assemblée qu’elle a tout pouvoir de s’occuper des questions de doctrine, et qu’il est séant qu’elle le fasse ; que c’est l’usage, la tradition constante, « et que jamais les évêques ne se sont trouvés réunis pour quelque sujet que ce fût, pour la conservation des églises, pour le sacre des évêques leurs confrères, ou dans tout autre cas, qu’ils n’en aient pris occasion de traiter des affaires spirituelles de leur ministère, suivant les occurrences et les besoins présents », L’Assemblée, dès ce moment où Bossuet a parlé, et sous l’impression de cette grave remontrance, se trouve conduite, bon gré mal gré, à faire acte de concile, et tous les évêques, même ceux qui diffèrent avec lui d’opinion, lui accordent la louange d’avoir parlé comme un apôtre et un Père de l’Église.

2233. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Histoire du Consulat et de l’Empire, par M. Thiers (tome xviie ) » pp. 338-354

Quand un gros nuage chargé de foudre passe dans l’air, tous les corps s’en ressentent aussitôt et reprennent chacun le genre d’électricité qui leur est propre, bien souvent une électricité contraire : ainsi arriva-t-il en 1840 dans le conflit des opinions sur la grande mesure : Faut-il, ou ne faut-il pas fortifier Paris ?

2234. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Chateaubriand, jugé par un ami intime en 1803, (suite et fin) » pp. 16-34

De même qu’on peut changer d’opinion bien des fois dans sa vie, mais qu’on garde son caractère, de même on peut changer de genre sans modifier essentiellement sa manière.

2235. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

Mais les femmes qui ont succombé peut-être à pareille épreuve lui savent gré d’avoir supposé qu’elles s’en sont tirées à bon marché, et de leur avoir ouvert une fausse porte pour entrer dans la bonne opinion de leur vertu.

2236. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Souvenirs d’un diplomate. La Pologne (1811-1813), par le baron Bignon. (Suite et fin.) »

L’opinion prit alors ce caractère énergique qui la rend maîtresse des événements ; et c’est ainsi que le grand mouvement qui a abattu la puissance gigantesque créée par la Révolution, loin de démentir l’esprit primitif de celle-ci et le génie du siècle, n’a fait que déployer le principe fondamental de l’une et de l’autre, sous de plus nobles auspices et dans une direction plus heureuse. » Quand il écrivait ainsi, M. de Senfft était encore libéral, et il avait foi encore en l’avenir des peuples. — Mêlant des idées mystiques et des pensées de l’ordre providentiel à ses observations d’homme politique, il voyait, l’année suivante (1812) et lors de la gigantesque expédition entreprise pour refouler la Russie, il voyait, disait-il, dans « cette réunion monstrueuse » de toutes les puissances de l’Europe entraînées malgré elles dans une sphère d’attraction irrésistible et marchant en contradiction avec leurs propres intérêts à une guerre où elles n’avaient rien tant à redouter que le triomphe, « un caractère d’immoralité et de superbe, qui semblait appeler cette puissance vengeresse nommée par les Grecs du nom de Némésis » et dont le spectre apparaît, par intervalles, dans l’histoire comme le ministre des « jugements divins. » Il lisait après l’événement, dans l’excès même des instruments et des forces déployées, une cause finale providentielle en vue d’un résultat désiré et prévu : car telle grandeur d’élévation, telle profondeur de ruine.

2237. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Entretiens sur l’histoire, par M. J. Zeller. Et, à ce propos, du discours sur l’histoire universelle. (suite.) »

Pour parler sans figure, cette seconde partie a perdu considérablement et elle perdra de plus en plus dans l’opinion de ceux qui examinent.

2238. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « M. de Sénancour — Note »

D’ailleurs le malheur devrait à la longue influer bien plus sur mon humeur que sur mes opinions : or, j’aime extrêmement la gaieté de l’intimité, et je rirais comme un autre, quoique je sente le poids de cette main de fer qui reste appuyée sur moi : mais je pense que c’est dans ce qu’on appelle (bien ou mal) mélancolie que nous trouverons les lumières désormais utiles. 

2239. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Sur la reprise de Bérénice au Théâtre-Français »

Geoffroy remarque avec raison que Titus serait sifflé, s’il agissait ainsi au théâtre, « et Rousseau, ajoute-t-il, mérite de l’être pour avoir consigné cette opinion dans un livre de philosophie. » Tout se tient en morale : c’est pour n’avoir pas senti cette délicatesse particulière, cette religion de dignité et d’honneur qui enchaîne Titus, que Jean-Jacques a gâté certaines de ses plus belles pages par je ne sais quoi de choquant et de vulgaire qui se retrouve dans sa vie, et que l’amant de madame de Warens, le mari de Thérèse, n’a pas résisté à nous retracer complaisamment des situations dignes d’oubli.

2240. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre IV. Poésie lyrique »

Le jeu-parti est un débat aussi, où le premier poète offre à son confrère deux opinions contradictoires à choisir, et soutient celle dont l’autre n’a pas voulu : la décision est laissée à un ou deux arbitres nommés dans l’envoi.

2241. (1863) Molière et la comédie italienne « Chapitre XIV. La commedia dell’arte au temps de Molière (à partir de 1662) » pp. 265-292

Dominique, le confirmèrent dans son opinion, et nous voyons la forme qu’ils donnèrent au caractère d’Arlequin, qui est bien différente de l’ancienne… Depuis lors, le caractère d’Arlequin est devenu l’effort de l’art et de l’esprit du théâtre.

2242. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre VIII. Les écrivains qu’on ne comprend pas » pp. 90-110

Oui, quand il déplore l’obscurité de la littérature récente, ce jeune homme résume l’opinion d’un lot honorable de lecteurs mondains : même il leur fournit, avec un ou deux raisonnements, diverses métaphores excellentes à la conversation.

2243. (1890) L’avenir de la science « XII »

L’œuvre intellectuelle cesse de la sorte d’être un monument pour devenir un fait, un levier d’opinion.

2244. (1863) Histoire des origines du christianisme. Livre premier. Vie de Jésus « Chapitre XXIV. Arrestation et procès de Jésus. »

., XXVI, 30, et Marc, XIV, 26, vient de l’opinion où sont ces deux évangélistes que le dernier repas de Jésus fut le festin pascal.

2245. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Deuxième partie. Ce qui peut être objet d’étude scientifique dans une œuvre littéraire — Chapitre II. L’analyse interne d’une œuvre littéraire » pp. 32-46

Il y a des auteurs qui étalent ce qu’ils pensent de la religion, de la politique, de la destinée humaine et dont les opinions forment un système fort bien lié : tel est Bossuet, par exemple, ou Montaigne.

2246. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIX. Cause et loi essentielles des variations du gout littéraire » pp. 484-497

Chacun de ces ensembles, où un principe commun unit opinions, croyances, institutions, tendances, peut être considéré comme le produit d’une force unique qui agit sur les hommes durant une longue période, et l’on peut dire que cette force va d’abord croissant, s’assimilant ce qui l’entoure, conquérant et organisant à son profit le milieu où elle évolue, jusqu’au moment où elle atteint son maximum d’extension ; après quoi, épuisée par son effet même (car vivre, c’est se tuer à petit feu), elle décline, perd de sa vigueur et finit par laisser se désagréger les éléments de tout genre dont elle était l’âme et le Jien.

2247. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Raphaël, pages de la vingtième année, par M. de Lamartine. » pp. 63-78

Avec un mari qui n’est pour elle qu’un père, et qui, dans sa philosophie indulgente, lui permettrait beaucoup, avec des opinions et des doctrines positives comme celles qu’elle s’est formées, on est réduit à reconnaître que Julie ne peut être protégée dans ses longs tête-à-tête avec son jeune ami (et elle en convient) que par son mal même et par la singularité de sa nature.

2248. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Madame Récamier. » pp. 121-137

Pourtant, comme on ne peut bien comprendre le caractère et le doux génie de Mme Récamier, cette ambition de cœur qui, en elle, a montré tant de force et de persistance sous la délicatesse ; comme on ne peut bien saisir, disons-nous, son esprit et toute sa personne sans avoir une opinion très nette sur ce qui l’inspirait en ce temps-là, et qui ne différait pas tellement de ce qui l’inspira jusqu’à la fin, j’essaierai de toucher en courant quelques traits réels à travers la légende, qui pour elle, comme pour tous les êtres doués de féerie, recouvre déjà la vérité.

2249. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Saint Anselme, par M. de Rémusat. » pp. 362-377

Anselme, qui a de beaux mots et des paroles heureuses pour exprimer sa pensée, disait en écrivant à Baudouin, roi de Jérusalem : « Il n’est rien qui soit plus cher à Dieu en ce monde que la liberté de son Église. » Ç’a été comme la devise et la maxime des seize dernières années de sa vie, et l’opinion catholique universelle lui en a su gré avec une solennelle reconnaissance.

2250. (1876) Du patriotisme littéraire pp. 1-25

Prenez la prose anglaise à sa grande époque avec des écrivains tels qu’Addison, Johnson, Swift, Richardson, Fielding, leur originalité consiste exclusivement dans la pensée et le tour d’esprit : la langue que parlent ces hommes ingénieux est peu variée, assez monotone dans ses constructions, et parfois même, si j’ose dire toute mon opinion, quelque peu languissante et plate.

2251. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Troisième partie — Section 16, des pantomimes ou des acteurs qui joüoient sans parler » pp. 265-295

Monsieur Calliachy Candiot, mort vers l’année 1708, professeur en belles lettres dans l’université de Padoüe, prétend que l’art des pantomimes fut plus ancien qu’Auguste, mais il prouve mal son opinion.

2252. (1759) Observations sur l’art de traduire en général, et sur cet essai de traduction en particulier

Nous n’ignorons pas que des littérateurs modernes qui se piquaient d’esprit philosophique, et qui en ont montré quelquefois, ont soutenu l’opinion contraire ; absurdité qu’on a, suivant l’usage, très injustement reprochée à l’esprit philosophique, qui était bien éloigné de la dicter.

2253. (1899) Psychologie des titres (article de la Revue des Revues) pp. 595-606

Le Spectateur, d’Addison, ayant été traduit en 1714 à Amsterdam, sous ce nom : le Spectateur ou le Socrate moderne où l’on voit un portrait naïf des mœurs de ce siècle et plusieurs éditions de l’ouvrage s’étant vendues avec une rapidité prodigieuse, tous les libraires se mirent à commander à leurs auteurs à gages des Spectateurs de tendances et d’opinions diverses.

2254. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre III. Les explications anthropologique, idéologique, sociologique »

c’est que des « héros » lui ont imposé leur opinion personnelle.

2255. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre V. La Renaissance chrétienne. » pp. 282-410

Aussi leurs blasphèmes sont affreux…, et dans les vengeances leur cruauté est atroce ; quand ils ne peuvent se défaire de leurs ennemis d’une autre façon, ils leur dressent des guet-apens dans les églises, tellement que l’un fendit la tête à son ennemi devant l’autel… Souvent, dans les funérailles, il y a des meurtres à propos des héritages… Ils célèbrent le carnaval avec une inconvenance et une folie extrêmes, pendant plusieurs semaines, et ils y ont institué beaucoup de péchés et d’extravagances, car ce sont des hommes sans conscience qui vivent en des péchés publics et méprisent le mariage… Nous Allemands, et les autres nations simples, nous sommes comme une toile nue ; mais les Italiens sont peints et bariolés de toutes sortes d’opinions fausses, et encore plus disposés à en embrasser de pires… Leurs jeûnes sont plus splendides que nos plus somptueux festins. […] En vain le roi, dans sa proclamation, avait ordonné aux gens « de ne pas trop accorder à leur propre sens, à leurs imaginations, à leurs opinions ; de ne pas raisonner publiquement là-dessus dans leurs tavernes publiques et dans leurs débits de bière, mais d’avoir recours aux gens doctes et autorisés » ; la semence germait, et on aimait mieux en croire Dieu que les hommes. […] Avec une gravité et une simplicité soutenues, il montre aux puritains que les lois de la nature, de la raison et de la société sont, comme la loi de l’Écriture, d’institution divine, que toutes également sont dignes de respect et d’obéissance, qu’il ne faut pas sacrifier la parole intérieure, par laquelle Dieu touche notre intelligence, à la parole extérieure, par laquelle Dieu touche nos sens ; qu’ainsi la constitution civile de l’Église et l’ordonnance visible des cérémonies peuvent être conformes à la volonté de Dieu, même lorsqu’elles ne sont point justifiées par un texte palpable de la Bible, et que l’autorité des magistrats, comme le raisonnement des hommes, ne dépasse pas ses droits en établissant certaines uniformités et certaines disciplines sur lesquelles l’Écriture s’est tue pour laisser décider la raison. « Car si la force naturelle de l’esprit de l’homme peut par l’expérience et l’étude atteindre à une telle maturité, que dans les choses humaines les hommes puissent faire quelque fond sur leur jugement, n’avons-nous pas raison de penser que, même dans les choses divines, le même esprit muni des aides nécessaires, exercé dans l’Écriture avec une diligence égale, et assisté par la grâce du Dieu tout-puissant, pourra acquérir une telle perfection de savoir que les hommes auront une juste cause, toutes les fois qu’une chose appartenant à la foi et à la religion sera mise en doute, pour incliner volontiers leur esprit vers l’opinion que des hommes si graves, si sages, si instruits en ces matières, déclareront la plus solide366 ?  […] Il était né « dans le rang le plus bas et le plus méprisé », fils d’un chaudronnier, lui-même chaudronnier ambulant, avec une femme aussi pauvre que lui, « tellement qu’entre eux deux ils n’avaient pas une cuiller ni un plat de mobilier. » On lui avait enseigné dans son enfance à lire et à écrire, mais depuis « il avait perdu presque entièrement ce qu’il avait appris. » L’éducation distrait et discipline l’homme ; elle le remplit d’idées diverses et raisonnables ; elle l’empêche de s’enfoncer dans la monomanie ou de s’échauffer par l’exaltation ; elle substitue les pensées approuvées aux inventions excentriques, les opinions mobiles aux convictions roides ; elle remplace les images impétueuses par les raisonnements calmes, les volontés improvisées par les décisions réfléchies ; elle met en nous la sagesse et les idées d’autrui, elle nous donne la conscience et l’empire de nous-mêmes. […] So we travailed with this woman till we brought her to a good opinion ; and at length showed her the king’s pardon, and let her go.

2256. (1929) Amiel ou la part du rêve

Cette opinion répandue n’en est pas moins sotte. […] À peine des histoires avec le doyen, avec ses parents, avec l’opinion. […] Une fois rassurées du côté de l’opinion, elles n’ont pas l’ombre des scrupules qu’on leur attribue chez les niais. […] Et l’Université, l’opinion ! […] Et il est peu de ses opinions qui aient été, même et d’abord chez ses concitoyens, si volontiers partagées.

2257. (1896) Les époques du théâtre français (1636-1850) (2e éd.)

Ils n’ont pas davantage à se soucier de l’opinion, et encore bien moins de la justice des hommes, puisqu’en fait ils en sont eux-mêmes la source et la sanction. […] Et comme une volonté ferme est peut-être ce qu’il y a de plus rare parmi nous, — qui, sous le nom de notre volonté, ne suivons guère en général que l’impulsion de nos instincts ou l’opinion de la foule, — il y trouvera justement ce qu’il lui faut pour exciter l’admiration… Je ne veux pas dire par là, Messieurs, que sa Rodogune ne demeure une œuvre singulièrement forte, et toute pleine encore de quelques-unes de ses plus rares qualités. […] Les Précieuses ridicules sont une opinion sur l’éducation des femmes, et l’École des maris aussi, et pareillement l’École des femmes 49. […] Et nous ne dirons pas pour cela que Molière fût un « penseur » lui-même, mais il était un « moraliste », — ce que Regnard, par exemple, ou Dancourt, ne seront à aucun degré ; — mais il avait son opinion à lui, persistante et tranchante, aisée à connaître, sur toutes les questions qu’il souleva ; et c’est en ce sens qu’il faut dire de l’École des femmes qu’elle est une comédie à thèse. […] Telle était du moins, cent ans encore après Racine, l’opinion d’un savant grammairien, qui, dans son Traité des tropes, énumérant les principaux usages de la métaphore, nous apprend qu’elle sert : « sixièmement, à traduire ou à déguiser ce que la pudeur et la politesse nous interdisent de nommer par son nom. » Le langage le plus cynique n’est pas toujours le plus naturel, quoi qu’on en ait pu dire ; et la nature elle-même n’est pas toujours d’accord avec les exigences de la vie sociale.

2258. (1894) Dégénérescence. Fin de siècle, le mysticisme. L’égotisme, le réalisme, le vingtième siècle

Contre le fou et le demi-fou délirant rebondit toute démonstration de l’absurdité de ses aperceptions ; nulle contradiction, nulle raillerie, nul mépris ne le touchent ; l’opinion de la majorité lui est indifférente ; les faits qui ne sont pas à son gré, il les ignore ou les interprète de telle sorte qu’ils semblent venir en aide à son délire ; les obstacles ne l’effraient pas, parce que, contre la puissance de son délire, son instinct de conservation même est incapable de lutter, et en vertu de la même raison il est très souvent prêt à aller pour eux jusqu’au martyre. […] Il la transporte dans l’objet en vertu d’une opinion préconçue. […] Ils réunissaient à la fois tous les signes caractéristiques des dégénérés et des faibles d’esprit : la vanité sans bornes et l’opinion exagérée de leur propre mérite, la forte émotivité, la pensée confuse et incohérente, le caquetage (la « logorrhoée » de la psychiatrie), l’inaptitude complète au travail sérieux et soutenu.

2259. (1882) Autour de la table (nouv. éd.) pp. 1-376

je partage votre opinion. […] Ne puis-je dire ici mon opinion autour de la table sans froisser l’orgueil de ceux que je critique ? […] Avant de faire parler Théodore, il doit m’être permis de dire mon opinion personnelle. […] Ce sera toujours une simple fille de village, vaine au point de se laisser séduire par des présents, soumise à l’opinion au point de commettre un infanticide. […] Est-ce l’opinion ou les lois humaines qu’il faut détester pour avoir poussé Marguerite à ce crime ?

2260. (1863) Histoire de la vie et des ouvrages de Molière pp. -252

Son opinion sur le génie de La Fontaine. […] L’approbation du Roi change subitement l’opinion de la cour. […] L’opinion que nous émettons ici est aussi celle de Voltaire et de Palissot. […] Mais nous ne craignons pas d’affirmer, ce que les faits que nous avons rapportés plus haut ont d’ailleurs démontré, que cette opinion ne repose que sur une erreur en histoire médicale, sur une sorte d’anachronisme. […] Après Le Festin de Pierre, Molière n’eut que trop d’occasions de se confirmer dans les opinions qu’il avait prêtées à Dom Juan sur l’inviolabilité des charlatans de religion.

2261. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Seulement, si vous vous rangez à l’opinion de M. de Noailles et de quelques autres honnêtes gens, il s’ensuivra que Mme de Maintenon est arrivée intacte, à cinquante ans, aux mains de Louis XIV. […] J’ai trouvé que l’École des Vieillards ne manquait ni de vérité, ni de force, et que la confession de Louis XI à François de Paule était une scène singulièrement dramatique ; et j’ai goûté, dans les Poésies posthumes, le rythme berceur et le charme gris des Limbes… Je n’avais pas lu une Famille au temps de Luther, mais j’en avais d’avance assez bonne opinion, et je comptais que la représentation serait, pour le moins, intéressante. […] Thécla s’est faite luthérienne ; Luigi hésite encore ; la gentille Elsi n’a pas d’opinion ; le vieux Marco ne se prononce pas. […] Sans doute ce laquais pourrait avoir été soudoyé par la princesse et lui remettre directement ce billet ; mais, tout de même, une police si parfaite pourrait lui faire tort dans notre opinion, à cette noble femme ! […] Le comique vient de ce contraste entre l’opinion qu’ils ont de soi-même et celle que nous concevons d’eux, entre ce qu’ils croient être et ce qu’ils sont.

2262. (1895) La vie et les livres. Deuxième série pp. -364

Mon opinion est que la règle morale et légale du mariage sera changée. […] On professe que toutes les opinions humaines, se rapportant à des choses passagères, ont une égale valeur. […] Anatole France court au-devant du martyre, ce sera pour confesser la doctrine de la relativité de la connaissance, pour affirmer le néant des opinions humaines et pour attester, au prix de son sang, qu’il n’y a point de vérité. […] J’ai vu apparaître dans ses deux derniers livres, si ingénieux et si pleins, non plus des corps, vêtus de haillons historiques, mais des âmes où la lutte des opinions contradictoires se déchaîne en de violentes tempêtes, suivies par des calmes plats. […] Origène, saint Augustin, Hegel et Schopenhauer proposent leurs opinions qui sont jugées saugrenues.

2263. (1890) Derniers essais de littérature et d’esthétique

William Morris était parfois beaucoup plus scandinave que grec, et le volume que nous avons maintenant sous les yeux ne modifie pas cette opinion. […] Image offrit des rafraîchissements à son auditoire après avoir terminé son discours, et il fut extrêmement intéressant d’entendre les différentes opinions exprimées par la Grande École de critique des Five o’clock, qui était largement représentée. […] Ils sont si imparfaits qu’on ne peut leur attribuer aucune valeur comme données pour prendre une mesure ou formuler une opinion. […] Nous arrivons en définitive à un chaos d’opinions, au doute universel ; nous tombons dans la vulgaire habitude d’argumenter, et celui-là seul argumente, qui est perdu au point de vue intellectuel. […] C’est seulement à propos de choses qui ne vous intéressent pas que vous pouvez exprimer une opinion vraiment impartiale, et c’est sans doute pour cela qu’une opinion impartiale est toujours dépourvue de valeur.

2264. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre II. Le Roman (suite). Thackeray. »

En vérité, vous auriez bien mauvaise opinion de la littérature moderne et des modernes littérateurs, si vous doutiez qu’un seul d’entre nous hésitât à enfoncer un couteau dans le corps de son confrère en cas de besoin public. […] Nous savons même l’orthographe mieux que vous ; nous sommes capables de raisonner aussi juste ; nous ne voulons point vous avoir pour maître, ni cirer plus longtemps vos souliers1357. » Cette opinion du politique ne fait que résumer les remarques du moraliste. […] You have a very bad opinion indeed of the present state of literature and of literary men, if you fancy that any one of us would hesitate to stick a knife into his neighbour penman, if the latter’s death could do the state any service.

2265. (1772) Discours sur le progrès des lettres en France pp. 2-190

  Cet Art par excellence, qui peut seul, d’âge en âge, transmettre tous les autres Arts à la postérité la plus reculée, & qui, dépositaire des pensées, des opinions & des sentimens divers des hommes, fixe invariablement l’esprit de tous les siècles, ressuscita les Lettres, en tirant de l’oubli, & répandant de tous côtés les restes précieux de l’Antiquité. […] Comme il est vide, ses idées toujours vagues, quelquefois brillantes, ne sont jamais solides : présomptueux, il croit saisir tous les objets qu’il n’est pas capable d’atteindre ; superficiel, il les effleure tous & n’en embrasse aucun : fier, autant de ce qui lui manque, que de ce qu’il posséde, il s’arroge la supériorité, prend le ton, prononce & décide en maître ; son goût est toujours ou faux, ou bizarre, ou frivole : esclave de l’imagination, il en est tyrannisé & séduit tour-à-tour ; sans jugement & sans principes, il se laisse emporter au premier vent des opinions, l’erreur l’entraîne, & c’est envain que la raison & la vérité tentent de le ramener : il est trop aveuglé pour les reconnoître ; il n’est pas assez fort pour rétrograder sur lui-même. […] Romans, dont souvent le seul but est de fronder les usages reçus, d’établir des opinions nouvelles, & de faire l’Apologie des écarts & des erreurs dans lesquels les passions jettent une jeunesse indocile & fougueuse, en lui faisant contracter des alliances également condamnées par la raison, par l’honneur & par les loix.

2266. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE LA FAYETTE » pp. 249-287

Je suis honteuse des louanges que vous me donnez, et d’un autre côté j’aime que vous ayez bonne opinion de moi, et je ne veux vous rien dire de contraire à ce que vous en pensez. […] Nulle part comme dans la Princesse de Clèves, les contradictions et les duplicités délicates de l’amour n’ont été si naturellement exprimées : « Mme de Clèves avoit d’abord été fâchée que M. de Nemours eût eu lieu de croire que c’étoit lui qui l’avoit empêchée d’aller chez le maréchal de Saint-André ; mais, ensuite, elle sentit quelque espèce de chagrin que sa mère lui en eût entièrement ôté l’opinion… » — « Mme de Clèves s’étoit bien doutée que ce prince s’étoit aperçu de la sensibilité qu’elle avoit eue pour lui ; et ses paroles lui firent voir qu’elle ne s’étoit pas trompée.

2267. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Charles Nodier »

Duméril confirma depuis cette opinion, ou même, selon son jeune et jaloux devancier, s’en empara : il y eut réclamation dans les journaux167. […] Il s’était prononcé dans ses Questions de Littérature légale contre l’authenticité des premières Poésies de Clotilde, et s’était même appuyé alors de l’opinion exprimée par M. de Roujoux187.

2268. (1866) Cours familier de littérature. XXI « CXXIIe entretien. L’Imitation de Jésus-Christ » pp. 97-176

Celui à qui parle le Verbe éternel est délivré de bien des opinions. […] Lisez encore : XVIII Celui qui estime les choses suivant ce qu’elles sont, et non d’après les discours et l’opinion des hommes, est vraiment sage, et c’est Dieu qui l’instruit plus que les hommes.

2269. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1860 » pp. 303-358

25 mai Il y a en nous un instinct irraisonné qui nous pousse à l’encontre des despotismes d’hommes, de choses, d’opinions. […] Le prévenu est un gros homme, à épaules de bœuf, sanguin, interrupteur qui veut toujours parler, donner l’opinion de ses idées, et dont l’émotion se trahit par un croissant de transpiration sous les aisselles, sur sa blouse.

2270. (1886) Quelques écrivains français. Flaubert, Zola, Hugo, Goncourt, Huysmans, etc. « Gustave Flaubert. Étude analytique » pp. 2-68

Masqué par une esthétique qui consiste à montrer de la vie une image et non pas une impression, l’écrivain garde en lui ses opinions et ses haines, ne fournissant qu’à l’analyse de légers mais suffisants indices. […] « Quelle forme faut-il prendre pour exprimer parfois son opinion sur les choses de ce monde sans risquer de passer plus tard pour un imbécile ?

2271. (1856) Cours familier de littérature. I « IIIe entretien. Philosophie et littérature de l’Inde primitive » pp. 161-239

Ce ne sont point des certitudes, ce sont des opinions. […] Ne consulte pas tes vaines opinions ou tes vaines terreurs ; ne consulte que ta conscience et ton devoir, qui te commandent de mourir pour tes frères et pour la cause de ton peuple.

2272. (1898) Manuel de l’histoire de la littérature française « Livre premier. Le Moyen Âge (842-1498) » pp. 1-39

. — Que cette opinion est prouvée par les conditions mêmes de la représentation des Mystères. — Et cela ne veut pas dire qu’ils ne contiennent parfois des « aventures » intéressantes, comme quelques Mystères du Cycle des saints ; — des scènes où se retrouve quelque chose de la grandeur du modèle, comme les Mystères du Cycle de l’Ancien Testament ; — et des « épisodes » curieux, d’un caractère plus ou moins réaliste, comme les Mystères du Cycle du Nouveau Testament ; — mais cela veut dire qu’ils n’ont aucune valeur littéraire ; — que l’on n’a pas à regretter leur décadence ni leur mort, — et qu’il n’a rien passé d’eux, même dans le théâtre « chrétien » de l’époque classique. […] Originalité de Commynes. — Il est lui-même, ce qui le distingue des chroniqueurs ses contemporains ; — lesquels ne sont guère, en français ou en latin, que l’expression de leur temps ; — et la voix de l’opinion plutôt que celle de leur pensée. — Son expérience des affaires. — Qualités de ses Mémoires ; — ils sont d’un politique ; — et aussi d’un psychologue [Cf. 

2273. (1840) Kant et sa philosophie. Revue des Deux Mondes

Kant remarque, à cette occasion, que si Hume, au lieu de s’en tenir au principe de causalité, eût examiné tous les autres principes nécessaires, tous les autres jugemens synthétiques à priori, il aurait peut-être reculé devant les conséquences rigoureuses de son opinion. […] Ce n’est pas de son propre génie qu’il a une grande opinion, c’est de celui de sa méthode.

2274. (1782) Plan d’une université pour le gouvernement de Russie ou d’une éducation publique dans toutes les sciences « Plan d’une université, pour, le gouvernement de Russie, ou, d’une éducation publique dans toutes les sciences — I. Faculté des arts. Premier cours d’études. » pp. 453-488

L’examen des opinions et des systèmes… En un mot le traité des lieux philosophiques (Loci philosophici) comme le théologien Melchior Canus a fait le traité des Lieux théologiques. […] Voyez là-dessus les dernières pages de cet ouvrage, où j’expose les raisons d’une opinion qui peut être contredite. — (Note du manuscrit do la main de Diderot.)

2275. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Le buste de l’abbé Prévost. » pp. 122-139

Duchange, adopter l’opinion commune et la tradition sur la mort de l’abbé Prévost, attribuée à la promptitude d’un chirurgien ignorant ; d’autre part, dans le discours qu’il a prononcé, M. le docteur Danvin a dit : Il existe, sur la fin de l’abbé Prévost, une histoire lugubre que l’on rencontre reproduite partout : on rapporte que, trouvé sur un grand chemin dans un état de mort apparente, il aurait été, de son vivant, soumis à l’autopsie, et aurait pu rouvrir les yeux pour voir le misérable état où il était.

2276. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres de François Arago. Tome I, 1854. » pp. 1-18

Cette opinion de M. 

2277. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Vicq d’Azyr. — I. » pp. 279-295

La diffamation alors ne l’effrayait pas ; il la méprisait avec ce courage facile que donne la jeunesse, et qui se fondait sur une confiance encore entière dans l’opinion des honnêtes gens.

2278. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Journal du marquis de Dangeau — I » pp. 1-17

Tandis qu’un peintre comme Saint-Simon commande l’opinion du lecteur par ses tableaux et ne laisse pas toujours de liberté au jugement, un narrateur plat, mais véridique et sans projet comme Dangeau, permet à cette impression du lecteur de naître, de se fortifier et de parler quelquefois aussi énergiquement toute seule qu’elle le ferait à la suite d’un plus éloquent.

2279. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — II » pp. 76-92

Ç’a été l’opinion de deux grands savants de delà les monts, Sperone et Castelvelro, dont le dernier, comme vous avez pu voir dans les livres que je vous ai envoyés, le compare et le préfère à son adversaire Caro dans la plus belle chose et de plus de réputation qu’il ait jamais faite, et le premier le loue ex professo dans une élégie latine qu’il fit incontinent après la publication de ses odes pindariques.

2280. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Tallemant et Bussy ou le médisant bourgeois et le médisant de qualité » pp. 172-188

Parlant tout d’abord de M. de Candale, l’un des beaux les plus à la mode en son moment, Bussy le définissait de la sorte : « Le génie en était médiocre ; mais, dans ses premiers amours, il était tombé entre les mains d’une dame qui avait infiniment de l’esprit, et comme ils s’étaient fort aimés, elle avait pris tant de soin de le dresser, et lui de plaire à cette belle, que l’art avait passé la nature, et qu’il était bien plus honnête homme que mille gens qui avaient bien plus d’esprit que lui. » — Mme de Châtillon, accueillant avec une faveur marquée la déclaration de M. de Nemours et lui laissant voir qu’elle a bonne opinion de son mérite, s’attire cette réponse : « Ah !

2281. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Divers écrits de M. H. Taine — II » pp. 268-284

Les matières, les opinions changent, le procédé reste le même.

2282. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Charles-Victor de Bonstetten. Étude biographique et littéraire, par M. Aimé Steinlen. — I » pp. 417-434

Le véritable maître du jeune homme, c’est l’opinion de ce qu’on appelle le monde, et dans le monde celle de ses contemporains.

2283. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) « Correspondance diplomatique du comte Joseph de Maistre, recueillie et publiée par M. Albert Blanc » pp. 67-83

J’aime à croire que non, car le fond de mon opinion est le même ; mais j’aime tout ce qui est de l’homme quand l’homme est distingué et supérieur ; je me laisse et me laisserai toujours prendre à la curiosité de la vie, et à ce chef-d’œuvre de la vie, — un grand et puissant esprit ; avant de la juger, je ne pense qu’à la comprendre et qu’à en jouir quand je suis en présence d’une haute et brillante personnalité.

2284. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir à l’histoire de mon temps. Par M. Guizot. »

Et cependant, d’enfants que nous étions, nous avons grandi à leur ombre, et quelquefois malgré leur ombre ; nous aussi, nous avons vécu, nous avons vieilli ; nous avons nos opinions faites et qui ont le droit, à leur tour, de se dire mûres.

2285. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Mémoires pour servir a l’histoire de mon temps. Par M. Guizot »

Molé devait tôt ou tard laisser voir sa faiblesse au sein des Chambres, pourquoi devancer l’heure, brusquer l’opinion et former contre lui cette entreprise générale où l’on apporta pour l’abattre le feu et la hache, comme s’il s’agissait d’un grand chêne, et comme si la nouvelle monarchie elle-même, tout à côté, était assez enracinée déjà pour n’en pas ressentir le contrecoup ?

2286. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Essais de politique et de littérature. Par M. Prevost-Paradol. »

Lui, venu plus tard, il a rapproché de beaucoup l’objet de son rêve : c’est l’époque de la Restauration et celle de Louis-Philippe qu’il embrasse avec prédilection dans ses regrets, et qu’il confond presque dans une admiration commune ; il les aime pour le régime de publicité, de tribune, de libre discussion qui y régnait, et où chaque opinion comme chaque talent trouvait son compte.

2287. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Louis XIV et le duc de Bourg, par M. Michelet. (suite.) »

Mais quand j’ai payé ces hommages aux individus et aux personnes, je me hâte d’ajouter que, eût-on réussi pour un temps en quelqu’un de ces biais et de ces remèdes palliatifs de l’ancien régime, on ne serait parvenu après tout qu’à faire ce qu’on appelle une cote mal taillée, rien de nettement tranché ni de décisif, et qu’il est mieux (puisqu’enfin les choses sont accomplies et consommées) qu’on en soit venu à cette extrémité dernière de n’avoir eu qu’un seul et grand parti à prendre, le parti à la Mirabeau et à la Sieyès : la France, en un mot, n’a pas perdu pour attendre ; et quand tout récemment, dans le compte rendu des séances du Sénat, je lisais ces déclarations spontanées d’un duc de La Force et d’un cardinal Donnet, si empressés à se replacer dans les rangs de tous, lorsqu’une parole inexacte avait paru un moment les en vouloir séparer, je pensais qu’au milieu de nos divisions mêmes d’opinions, il était consolant qu’on en fût venu à ce grand et magnifique résultat, aussi clair que le jour, à savoir qu’il n’y a plus en France qu’un seul ordre, une seule classe, un seul peuple.

2288. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Salammbô par M. Gustave Flaubert. (Suite.) » pp. 52-72

J’aurai peut-être à discuter, à ce propos, l’opinion de quelqu’un de mes confrères en critique, qui a parlé de l’ouvrage.

2289. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « M. Octave Feuillet »

C’est insensé : car d’abord Raoul n’a point là-dessus de parti pris absolu et irrévocable ; car, de plus, Sibylle, qui exerce un grand ascendant sur lui, doit espérer, Dieu aidant, de modifier son opinion et de l’amener à la sienne ; car, même chrétiennement parlant, il n’y a pas lieu, en pareil cas, de jeter le manche après la cognée, puisque saint Paul a écrit que « la femme fidèle justifierait le mari infidèle. » Aussi, à partir de ce moment, tout intérêt selon moi, cesse raisonnablement de s’attacher à Sibylle, qui se conduit en personne peu éclairée, en fille volontaire et opiniâtre, en fanatique fidèle à la lettre plus qu’à l’esprit, et, pour trancher le mot, comme une petite sotte.

2290. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier. »

Et qu’était-ce d’abord que cette noble et quasi royale personne, morte en 1824, qui avait titre la comtesse d’Albany, et qui bien qu’en partie Française par les opinions, par les relations, par les lectures, n’a jamais été naturalisée comme elle l’aurait pu l’être au cœur et au centre de notre monde français ?

2291. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre. »

Celui-ci, interpellé soudainement sur un sujet aussi délicat, répondit avec un peu d’embarras qu’aucune instruction de sa Cour ne l’autorisait à traiter d’un mariage entre une princesse de Naples et le fils de l’Impératrice : « Il ne pouvait donc soumettre à la reine que ses opinions personnelles ; il lui semblait que, dans l’intérêt de sa maison et de ses peuples, elle devrait favoriser une semblable union ; Eugène de Beauharnais avait toute l’affection de l’Empereur, et de grandes destinées semblaient promises à ce jeune homme. » La reine demeura quelque temps sans répondre : un sourire amer parut un moment sur ses lèvres ; elle semblait agitée intérieurement par des réflexions pénibles ; enfin elle rompit le silence et dit, comme avec effort, qu’elle n’avait aucune objection à élever contre la personne du jeune Beauharnais : « Mais il n’avait pas encore de rang dans le monde ; si, plus tard, la Providence l’élevait à la dignité de prince, les obstacles qui s’opposaient aujourd’hui à une pareille alliance pourraient être écartés. » Le moment une fois manqué ne revint pas.

2292. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Gisors (1732-1758) : Étude historique, par M. Camille Rousset. »

Je le connaissais beaucoup, et j’avais aussi bonne opinion de lui qu’en avait tout le monde.

2293. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres choisies de Charles Loyson, publiées par M. Émile Grimaud »

Dans ce roman, il y a en effet un chapitre intitulé l’Année 1817, qui est tout rempli de contrastes et de singularités historiques ou littéraires, tournant au ridicule et au grotesque ; par exemple : « Il y avait un faux Chateaubriand appelé Marchangv, en attendant qu’il y eût un faux Marchangy appelé d’Arlincourt… La critique faisant autorité préférait Lafon à Talma… L’opinion générale était que M. 

2294. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre III. Inconvénients de la vie de salon. »

Elles ne sont exercées qu’au duel, et, presque tout de suite, la brutalité de l’opinion va, par des voies de fait, barrer le chemin aux combats polis.

2295. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Livre quatrième. Les conditions physiques des événements moraux — Chapitre III. La personne humaine et l’individu physiologique » pp. 337-356

Opinion commune sur la personne humaine et sur ses facultés. — Sens du mot faculté ou pouvoir. — Forces mécaniques. — Force de la volonté. — Ces mots ne désignent aucun être occulte. — Ils ne désignent qu’un caractère d’un événement, à savoir, la particularité qu’il a d’être suivi constamment par un autre. — Illusion métaphysique qui érige les forces en essences distinctes.

2296. (1869) Cours familier de littérature. XXVII « CLXe Entretien. Souvenirs de jeunesse. La marquise de Raigecourt »

Le moment était difficile ; les opinions étaient agitées et confuses.

2297. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre I. La préparations des chefs-d’œuvre — Chapitre III. Trois ouvriers du classicisme »

Mais il y a pourtant grande différence entre les résolutions qui procèdent de quelque fausse opinion et celles qui ne sont appuyées que sur la connaissance de la vérité : d’autant que, si on suit ces dernières, on est assuré de n’en avoir jamais de regret ni de repentir, au lieu qu’on en a toujours d’avoir suivi les premières lorsqu’on en découvre l’erreur295. » En un mot, « la volonté est tellement libre qu’elle ne peut jamais être contrainte… ; et ceux même qui ont les plus faibles âmes pourraient acquérir un empire très absolu sur leurs passions, si l’on employait assez d’industrie à les dresser et à les conduire ».

2298. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre I. La littérature pendant la Révolution et l’Empire — Chapitre III. Madame de Staël »

Si elle a raison, le suffrage universel aurait détruit le régime parlementaire, et mis en danger la propriété : mais alors cette opinion justifierait les attaques des socialistes contre le « parlementarisme bourgeois ».

2299. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « La comtesse Diane »

C’est aussi une mine très riche que les « erreurs de l’opinion ».

2300. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Les deux Tartuffe. » pp. 338-363

Il y a des gens qui s’admirent et qui se croient l’âme belle, énergique et généreuse parce qu’ils ont sur tout des opinions violentes, insolentes, absolues et instantanées ; comme si la manie affirmative était une présomption de beauté morale !

2301. (1897) Le monde où l’on imprime « Chapitre IX. Inquiets et mystiques » pp. 111-135

Il sera bon, pendant deux ou trois ans encore, qu’ils se limitent à un mouvement d’opinion ; il faut faire tomber dans le mépris les produits de la littérature infâme (sans doute celle des négatifs : Renan, Taine, Zola, etc.).

2302. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mme de Graffigny, ou Voltaire à Cirey. » pp. 208-225

L’insulte sanglante qu’il reçut un soir du chevalier de Rohan, et la protection qui couvrit ce misérable, l’impuissance où se vit tout à coup l’homme de cœur outragé de laver son affront, ces iniquités sociales qu’on ne juge bien que quand on les a senties, l’avertirent que l’esprit pourtant n’était pas tout en France, et qu’il y avait un pouvoir despotique qui mettait quelques privilégiés au-dessus des lois, au-dessus même de l’opinion.

2303. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Madame la duchesse d’Angoulême. » pp. 85-102

L’opinion de la ville lui était toute favorable et dévouée ; c’étaient les troupes et la garnison qui semblaient incertaines, du moment que l’aigle et le grand capitaine reparaissaient.

2304. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — III. (Suite et fin.) » pp. 47-63

Disons tout le gouvernement de Juillet n’était pas, à l’égard de l’opinion, en position de combattre le préjugé populaire qui régnait encore sur les événements de 1814, et particulièrement sur ceux de 1830, dont il était issu.

2305. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame, duchesse d’Orléans. (D’après les Mémoires de Cosnac.) » pp. 305-321

Il ne fut ni ému, ni embarrassé de l’opinion de Madame ; il dit qu’il fallait donner de cette eau à un chien ; il opina, comme Madame, qu’on allât quérir de l’huile et du contrepoison, pour ôter à Madame une pensée si fâcheuse.

2306. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Les regrets. » pp. 397-413

Ayez meilleure opinion de l’homme et de vous-même.

2307. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Franklin. — II. (Suite.) » pp. 149-166

— Aucun pouvoir, si grand qu’il soit, ne peut forcer les hommes à changer leurs opinions.

2308. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — II. (Fin.) » pp. 206-223

Au moment où il conçut l’idée de son ouvrage, l’abbé Barthélemy avait lu ses anciens auteurs ; il les relut alors plume en main, « marquant sur des cartes tous les traits qui pouvaient éclaircir la nature des gouvernements, les mœurs et les lois des peuples, les opinions des philosophes ».

2309. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 24, des actions allegoriques et des personnages allegoriques par rapport à la peinture » pp. 183-212

Mais ces mêmes divinitez ne doivent pas avoir part à l’action dans les compositions historiques qui répresentent des évenemens arrivez depuis l’extinction du paganisme, et dans des tems où elles avoient déja perdu l’espece d’ être que l’opinion vulgaire leur avoit donné en d’autres siecles.

2310. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Préface de la seconde édition »

On nous imputa, en effet, certaines opinions que nous n’avions pas soutenues, sous prétexte qu’elles étaient « conformes à nos principes ».

2311. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre IX. Seconde partie. Nouvelles preuves que la société a été imposée à l’homme » pp. 243-267

L’ère nouvelle n’est donc point, comme on l’a cru, celle de la liberté civile, ni même celle de l’égalité devant la loi, et de l’admissibilité de tous à tous les emplois : c’est l’ère de l’indépendance et de l’énergie de la pensée ; celle des lois écrites substituées aux lois traditionnelles ; celle des institutions sociales et des institutions religieuses marchant sur deux lignes séparées ; celle du bien-être social appliqué à toutes les classes ; celle de la raison humaine devenue adulte, et s’ingérant de décider par sa propre autorité ; celle de la démonstration rigoureuse, qui repousse les axiomes en géométrie et les préjugés en politique ; celle du discrédit des faits antérieurs pris comme base convenue et incontestable ; celle de l’opinion consultée à chaque instant, et à part même de toute conjoncture nouvelle.

2312. (1900) Le lecteur de romans pp. 141-164

Mais je soutiens que l’immense majorité des lecteurs ont une opinion très nette sur la question.

2313. (1903) Considérations sur quelques écoles poétiques contemporaines pp. 3-31

Toutes leurs opinions étoient puisées de la boutique de quelque rêveur qu’ils suivoient en tout et partout… Ils vinrent à dire beaucoup de mots anciens, qui leur sembloient fort bons et très utiles en notre langue et dont ils n’osoient pourtant se servir, parce que l’un d’entre eux1 qui étoit leur coryphée, en avoit défendu l’usage.

2314. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre VIII : M. Cousin érudit et philologue »

II Tel est cet orateur que l’imagination poétique et l’esprit d’érudition ont promené dans l’érudition et égaré dans la philosophie, qui, après avoir voyagé parmi divers systèmes et hasardé un pied, et même deux pieds, dans le panthéisme, est venu se rasseoir dans les opinions moyennes, dans la philosophie oratoire, dans la doctrine du sens commun et des pères de famille ; qui, pensant faire l’histoire du dix-septième siècle, en a fait le panégyrique ; qui, croyant tracer des portraits et composer des peintures, n’a su que recueillir des documents et assembler des textes ; mais qui, dans l’exposition des vérités moyennes et dans le développement des sujets oratoires, a presque égalé la perfection des écrivains classiques, et qui, par la patience de ses recherches, par le choix de ses publications, par la beauté et la solidité de ses monographies, a laissé des modèles aux érudits qui continueront son œuvre, et des matériaux aux philosophes qui profiteront de son travail.

2315. (1730) Discours sur la tragédie pp. 1-458

J’entens par orgueil, une haute opinion de son propre mérite et de sa supériorité sur les autres. J’entens par vanité, l’envie d’occuper les hommes de soi et de ses talens, et la préférence de cette opinion étrangere à la réalité même du mérite. […] Si les acteurs agissent par vertu, voilà nôtre raison contente ; s’ils agissent par passion, voilà nôtre sensibilité exercée : mais si la passion et la vertu sont d’accord, voilà tous nos besoins remplis ; et nos émotions et nos larmes sont d’autant plus douces, qu’elles nous donnent meilleure opinion de nous-mêmes. […] Cependant la confusion de dom Sanche et la grande opinion qu’elle a de Rodrigue, doivent lui laisser encore assez d’incertitude, pour souhaiter d’être mieux instruite : mais Corneille a crû devoir prolonger l’erreur de Chimene, pour pouvoir prolonger aussi sa passion ; et c’est en vûë de ce pathétique, qu’il a arrangé le silence et les discours de ses personnages. […] L’opinion établie de la superiorité de Corneille sur tous les auteurs dramatiques, n’est pas le fruit de chacune de ses piéces en particulier ; c’est le tribut légitime du mérite surprenant répandu dans tous ses ouvrages ; et c’est au génie consideré en son entier, et non pas séparément, à aucune de ses productions, qu’est dû le prix de la poësie dramatique.

2316. (1928) Quelques témoignages : hommes et idées. Tome II

» s’exclamait-il, « un immense bonhomme, mais de second ordre. » Nous assistons aujourd’hui à un revirement d’opinion dans l’élite intellectuelle, qui fait, au contraire, de Balzac, un des maîtres de la philosophie politique. […] Ils n’ont pas vu qu’avec le caractère français, un système législatif qui donne à un Parlement l’initiative des lois doit produire nécessairement une anarchie dans l’opinion. […] Ce ne sont que projets et contre-projets, combinaisons de couloirs et rivalités de groupes, d’où un appel constant à cette opinion et par suite une véritable guerre civile des esprits, encore exacerbée par les ferments de discorde qu’étaient les souvenirs toujours vivants de la Révolution et de l’Empire. […] Qu’il ait des opinions, une conduite, des chapeaux et des gants comme le public, cela regarde le public. […] Cette image de l’empereur allemand est d’autant plus saisissante qu’elle diffère étrangement de celle que l’opinion européenne se faisait de lui avant 1914.

2317. (1903) La vie et les livres. Sixième série pp. 1-297

Il manifesta son opinion avec un tel sans-gêne, que le général Hulin et les cinq colonels, malgré la timidité qui enchaînait leurs paroles, ne purent cacher leur mécontentement. […] Hulin recueillit les voix, en commençant par le plus jeune en grade, le président, selon l’usage, émettant son opinion le dernier. […] Le gouvernement fut d’accord avec l’opinion pour accueillir comme un bienfaiteur public celui que Mme de Staël appelait « le meilleur républicain de France ». […] Pour toujours il avait conquis l’opinion du monde et dominait son pays, son siècle, d’autant plus indiscutablement qu’il affectait plus de simplicité, de réserve et d’impassibilité. […] Collaborait-il au Jiji Shimpô, organe ministériel, ou bien au Yorozu, qui s’imprime sur papier rose et qui est toujours d’un avis contraire à l’opinion du gouvernement ?

2318. (1927) Des romantiques à nous

Ils ont occupé une place, non plus brillante, mais plus émouvante, en ce sens qu’entre leurs opinions et passions personnelles et les opinions et passions du monde qui les entourait n’ont cessé de s’exercer, du moins au fort de leur gloire, les actions et les réactions les plus vives, les plus chaudes, parfois les plus orageuses. […] Car, mis à part quelques sages que l’habitude d’embrasser et de tenir sous leur regard toutes les données des problèmes préserve des impulsions variables de chaque jour, et dont les opinions ont des assises assez profondes pour ne pas demeurer sans cesse à la merci des souffles publics, il est de la faiblesse des hommes de régler l’orientation générale de leur esprit sur le jeu changeant des faits et des informations de surface plutôt que sur la marche réelle et la véritable substance des choses. […] — de confesser, je ne cesserais de prêcher à mes pénitents des deux sexes le contraire de l’opinion reçue et de la vérité apparente sur les difficultés respectives de l’examen de conscience et de l’aveu. […] Il avait des opinions politiques ardentes.

2319. (1925) Portraits et souvenirs

Charles Chassé ne peut que nous confirmer dans cette opinion. […] Je relève ce fait qui marque assez bien le caractère de l’ouvrage de Moréas ; ce n’est point à proprement parler un ouvrage de critique, mais bien plutôt une suite d’opinions et de remarques. […] Qu’importaient alors les quelques boutades pittoresques où il exprimait énergiquement ses opinions dédaigneusement définitives. […] Lucien Muhlfeld disait ce qu’il pensait, et si parfois il atténuait son opinion, c’était pour dire de la mauvaise pièce ou du four indéniable plus de bien et moins de mal qu’il eût été rigoureusement juste d’en dire. […] Je savais toutes sortes de chansons et, en particulier, une que j’avais apprise récemment qui me parut propre à émerveiller mon grand-père et à lui donner bonne opinion de mes talents, et à toute voix, fièrement j’entonnai à tue-tête le refrain de la Marseillaise !

2320. (1883) Le roman naturaliste

Ils commencent par faire une espèce d’enquête générale sur l’état de l’opinion. […] - Non, miss, je n’ai pas bonne opinion des Hollandais. […] Nos opinions les plus extravagantes, — et qui de nous n’a les siennes ? […] Nous raisonnons comme Luke toutes les fois que nous mettons nos opinions sous l’autorité de quelqu’un « qui en savait long !  […] Je voudrais bien avoir ici sur le roman de M. de Goncourt l’opinion de M. 

2321. (1922) Gustave Flaubert

Et, en gros, après tout, Flaubert a souscrit à l’opinion de Bouilhet. […] La plus belle découverte, la seule, qu’ait faite Flaubert dans son voyage d’Orient, c’est une découverte intérieure. « Je veux pour vivre tranquille avoir mon opinion sur mon compte, opinion arrêtée et qui me règlera sur l’emploi de mes forces. […] Aujourd’hui, Salammbô reste cependant plus discutée que les Fleurs du mal, elle a contre elle une partie ; assez considérable en qualité, de l’opinion littéraire. […] Toujours est-il que les opinions sur Bouvard et Pécuchet restent très partagées.

2322. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Alfred de Vigny. »

Cette pièce, qui donne le degré de chaleur de ses opinions politiques d’alors, est curieuse dans sa vie morale : on peut la rapprocher de celle des Destinées qui a pour titre les Oracles et qui semble une leçon à l’adresse de tous les rois : Et nunc, reges, intelligite. […] On était tenté de lui en vouloir par moments de cet excès de conscience et de l’invariable obstination qu’il mettait en toute rencontre à maintenir son opinion et son idée, même lorsqu’il était seul contre tous, ce qui lui arrivait quelquefois.

2323. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Madame de Verdelin  »

A…, et il n’y a pas un mot de bégueulerie ni prêche sur aucune opinion. […] Il tient comme un diable à l’opinion du moment, qu’on est tout étonné de le voir abandonner le quart d’heure d’après, sans qu’on l’eu prie.

2324. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Deuxième partie. — L’école critique » pp. 187-250

Pourquoi donc sont-ils l’un et l’autre si entiers dans leur opinion, si ardents du désir de la communiquer, et si incapables chacun d’être convaincu ou de convaincre ? […] « Je conjure mes critiques d’avoir assez bonne opinion d’eux-mêmes pour ne pas croire qu’une pièce qui les touche, et qui leur donne du plaisir, puisse être absolument contre les règles. » (Préface de Bérénice.)

2325. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre deuxième. Les mœurs et les caractères. — Chapitre II. La vie de salon. »

. — Ainsi relâché, le lien finit par se rompre sous l’ascendant de l’opinion. « Il est de bon air de ne pas vivre ensemble », de s’accorder mutuellement toute tolérance, d’être tout entier au monde. En effet, c’est le monde qui fait alors l’opinion, et, par elle, il pousse aux mœurs dont il a besoin.

2326. (1858) Cours familier de littérature. VI « XXXIVe entretien. Littérature, philosophie, et politique de la Chine » pp. 221-315

Nous allons essayer de vous le démontrer, non par des considérations systématiques qui n’auraient d’autre autorité que celle d’une opinion, mais par des textes et par des faits, ces arguments sans réplique. […] « 5º Enfin la bonne foi, ce grand jour réciproque qui permet aux hommes en société de voir clairement dans le cœur et dans les actions les uns des autres… (N’est-ce pas ce que nous appelons l’opinion ?)

2327. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIe entretien. Cicéron » pp. 81-159

— En suivant toujours tes propres inspirations, et non l’opinion de la multitude », lui répondit l’oracle. […] Enfin c’était un petit nombre de jeunes gens des premières maisons de Rome, tels que Clodius, César, Catilina, Crassus, Céthégus, qui, ayant gardé le crédit en perdant les vertus de leur ancêtres, corrompus de mœurs, pervertis de débauche, ruinés de prodigalités, signalés de scandales, indifférents d’opinions, avides de fortune, trahissant leur sang, leur caste, leurs traditions, la gloire de leur nom, se faisaient les flatteurs, les instigateurs, les tribuns, les complices masqués ou démasqués de la populace, et cherchaient leur richesse perdue et leur grandeur future dans l’abîme de leur patrie !

2328. (1864) Cours familier de littérature. XVIII « CVIe entretien. Balzac et ses œuvres (1re partie) » pp. 273-352

Je m’étais dit : « Un homme est né ; si l’opinion le comprend, et si l’adversité ne l’effeuille pas dans le ruisseau de la rue de Paris, ce sera un jour un grand homme !  […] La France redevint militaire et calme, sous un despotisme intelligent et modéré ; le gouvernement parlementaire recommence à poindre dans les coalitions d’opinions incompatibles.

2329. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxve entretien. Histoire d’un conscrit de 1813. Par Erckmann Chatrian »

J’avoue même que moi, qui vivais, qui pensais et qui sentais déjà en ce temps-là, moi qui partageais les angoisses du peuple pauvre et sacrifié à la noblesse des barons d’empire, je retrouve dans ce livre la mémoire minutieuse de cette époque de la grandeur d’un homme de guerre et de la servitude d’un peuple ébloui de ses chaînes : il n’y a pas de plus grande leçon de dédain pour l’opinion de l’humanité que celle que l’humanité donne elle-même en divinisant quarante ans après le maître qui faisait de l’héroïsme avec le sang inutilement versé de quelques millions de ses pareils. […] Dieu sait si j’ai tort ou raison dans mon opinion ; mais en tout cas, elle est le plus sincère hommage à ce duo de talent des fils qui les grandit par leurs pères.

2330. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre V. Jean-Jacques Rousseau »

Car alors l’égoïsme naturel, légitime et charmant, fait place à l’intérêt, injuste et odieux ; la lutte et la misère naissent de la multiplication des besoins, par l’invention artificielle de plaisirs d’opinion, par la prévoyance contre nature des utilités futures. […] La société selon la nature, c’est celle que peut rêver un homme de peuple, ennemi du luxe et des aises dont il se passe, heureux dans sa vie simple, mais humilié par l’opinion qui en fait une vie inférieure : un homme du peuple qui a pâti, a vu pâtir autour de lui, jalousement égalitaire pour ces deux causes, et réduisant tout à l’antithèse de la richesse et de la pauvreté.

2331. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Et je suis très embêté, parce que, avec ça, j’adore la ligne et Ingres… Mon opinion sur Molière, vous voulez l’avoir, sur Molière et Le Misanthrope. […] La phrase du nommé Massillon : « Ses opinions n’avaient pas à rougir de sa conduite », est acquittée par Flaubert et Gautier, mais la phrase de Lamartine : « Il pratiquait l’équitation… ce piédestal des princes », est condamnée sans appel.

2332. (1888) Journal des Goncourt. Tome III (1866-1870) « Année 1869 » pp. 253-317

* * * Il est rare que les faiseurs de l’opinion en art et en littérature ne subissent pas la tyrannie des imbéciles : les guides du goût public en sont généralement les domestiques. […] Au premier mot de cette lettre je devinais quelque cancan d’ennemi… Allons, jusqu’à la fin, même au bord de sa tombe, Sainte-Beuve sera le Sainte-Beuve de toute sa vie, l’homme toujours mené dans sa critique par les infiniment petits, les minces considérations, les questions personnelles, la pression des opinions domestiques autour de lui9.

2333. (1894) Journal des Goncourt. Tome VII (1885-1888) « Année 1887 » pp. 165-228

Mercredi 12 janvier Duval, ce voleur faisant du vol, une opinion politique, ce voleur plaidant carrément devant un tribunal, que le vol est une restitution légitime du superflu de ceux qui ont trop, au profit de ceux qui n’ont pas assez, et soutenu par un public d’amis et de disciples, qui, à un moment donné, a manqué culbuter le tribunal. […] J’étais dans le moment sur le pont, et j’ai vu l’autre disparaître… C’était très curieux. » Mardi 24 mai Ce soir, au dîner de Brébant, Perrot de l’Instruction publique affirmait, que les jeunes gens qu’il voyait, ne lisaient plus les journaux, n’avaient plus d’opinion politique, tant ils étaient écœurés par les blagues et le charlatanisme des hommes politiques du moment, et il signalait comme un danger, cette génération nouvelle complètement désintéressée de la politique.

2334. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIe entretien. Boileau » pp. 241-326

Voilà pourquoi nous ne plaçons, dans notre opinion personnelle, ce genre de littérature qu’à un degré inférieur dans les œuvres de l’esprit humain. […] Cette coterie littéraire, toute-puissante et comme inviolable dans l’opinion, rappelait assez l’école dogmatique qui a prévalu depuis trente ans parmi nous en politique et même en littérature, par une volonté tenace et bien disciplinée plus que par une véritable supériorité de génie.

2335. (1857) Cours familier de littérature. III « XVIIe entretien. Littérature italienne. Dante. » pp. 329-408

Les ténèbres se répandirent sur l’intelligence pendant qu’une nouvelle morale et une nouvelle théologie s’emparaient des opinions et des cœurs. […] C’est la poésie qu’il faut chercher dans ce livre ; ce ne sont pas des opinions posthumes ou des allusions mortes.

2336. (1857) Cours familier de littérature. IV « XXIIIe entretien. I. — Une page de mémoires. Comment je suis devenu poète » pp. 365-444

Cette lettre me disait que le saint vieillard ne m’écrivait pas lui-même, parce qu’il pensait que les opinions et les événements avaient élevé trop de barrières entre lui et moi. Il se trompait bien : les opinions et les événements ne prescrivent pas contre les devoirs du cœur.

2337. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre II. De la multiplicité des états de conscience. L’idée de durée »

Ce qui confirmerait d’abord cette opinion, c’est qu’on emprunte nécessairement à l’espace, les images par lesquelles on décrit le sentiment que la conscience réfléchie a du temps et même de la succession : il faut donc que la pure durée soit autre chose. […] Les opinions auxquelles nous tenons le plus sont celles dont nous pourrions le plus malaisément rendre compte, et les raisons mêmes par lesquelles nous les justifions sont rarement celles qui nous ont déterminés à les adopter.

2338. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Mézeray. — I. » pp. 195-212

Cette coïncidence m’a frappé, et je me suis dit que pour que deux esprits sérieux, appliqués, travaillant en conscience et loin du bruit, l’un à Dijon et dans un ordre d’idées et de considérations catholiques, l’autre à Alais dans la communion protestante, que pour que ces deux esprits, ayant fait chacun de Mézeray une étude spéciale, se fussent ainsi rencontrés dans une opinion commune, il fallait que l’historien, à bien des égards, le méritât.

2339. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Gabrielle d’Estrées. Portraits des personnages français les plus illustres du XVIe siècle, recueil publié avec notices par M. Niel. » pp. 394-412

Mais, en admettant ces obligations, il serait singulier qu’un homme de bon sens et de ferme jugement, comme Sully, fût tenu d’affaiblir son opinion d’historien sur une femme, parce qu’elle lui aurait rendu quelques bons offices dans un intérêt tout personnel.

2340. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Massillon. — II. (Fin.) » pp. 20-37

Il semblait que, Louis XIV ayant abusé de sa méthode de régner, une nouvelle et plus douce manière devait être plus efficace et d’une application désormais certaine : Les rois ne peuvent être grands qu’en se rendant utiles aux peuples… Ce n’est pas le souverain, c’est la loi, Sire, qui doit régner sur les peuples… Les hommes croient être libres quand ils ne sont gouvernés que par les lois… Oui, Sire, il faut être utile aux hommes pour être grand dans l’opinion des hommes… Il faut mettre les hommes dans les intérêts de notre gloire si nous voulons qu’elle soit immortelle ; et nous ne pouvons les y mettre que par nos bienfaits.

2341. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — II. (Fin.) » pp. 62-79

Elle n’était pas, sur le chapitre de la comédie, de l’avis de Bossuet, de Bourdaloue et des autres grands oracles religieux d’alors ; elle devançait l’opinion de l’avenir et celle des moralistes plus indulgents : À l’égard des prêtres qui défendent la comédie, écrivait-elle assez irrévérencieusement, je n’en parlerai pas davantage : je dirai seulement que, s’ils y voyaient un peu plus loin que leur nez, ils comprendraient que l’argent que le peuple dépense pour aller à la Comédie n’est pas mal employé : d’abord, les comédiens sont de pauvres diables qui gagnent ainsi leur vie ; ensuite la comédie inspire la joie, la joie produit la santé, la santé donne la force, la force produit de bons travaux ; la comédie est donc à encourager plutôt qu’à défendre.

2342. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Froissart. — I. » pp. 80-97

Kervyn de Lettenhove réfute cette opinion (t. 

2343. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Œuvres complètes de Buffon, revues et annotées par M. Flourens. » pp. 55-73

Réaumur tenait en France le sceptre de l’histoire naturelle quand Buffon parut, et, pour le lui mieux enlever, celui-ci prit plaisir à le combattre, à le harceler même et à le diminuer peu à peu dans l’opinion.

2344. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Agrippa d’Aubigné. — I. » pp. 312-329

Le roi de Navarre parla d’abord et posa cette première question : si, dans les circonstances présentes et nouvelles, les huguenots devaient avoir les mains croisées durant le débat des ennemis, envoyer tous leurs gens de guerre dans les armées du roi sans en faire montre (ce qui était l’opinion de plusieurs), ou s’ils devaient prendre séparément les armes pour secourir le roi en leur propre nom, et profiter de toutes occasions pour s’affermir ?

2345. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Henri IV écrivain. par M. Eugène Jung, ancien élève de l’École normale, docteur es lettres. — I » pp. 351-368

Henri essaye encore de la détromper, ou plutôt de lui laisser quelque illusion : « Mon cœur, j’enrage quand je vois que vous doutez de moi, et de dépit je ne tâche point de vous ôter cette opinion.

2346. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Santeul ou de la poésie latine sous Louis XIV, par M. Montalant-Bougleux, 1 vol. in-12. Paris, 1855. — II » pp. 39-56

L’abbé de Rancé, qui ne se payait pas de faux fuyants, lui répondait (octobre 1868) : Vous dites que la régularité s’est maintenue dans votre communauté plus qu’en aucune autre : en vérité, ce n’est pas l’opinion du monde ; elle est dans un décri universel, et il n’y a guère de chose plus connue que sa décadence.

2347. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres inédites de P. de Ronsard, recueillies et publiées par M. Prosper Blanchemain, 1 vol. petit in-8°, Paris, Auguste Aubry, 1856. Étude sur Ronsard, considéré comme imitateur d’Homère et de Pindare, par M. Eugène Gandar, ancien membre de l’École française d’Athènes, 1 vol. in-8°, Metz, 1854. — I » pp. 57-75

Aujourd’hui, l’opinion moyenne sur Ronsard et sa tentative est assez fixée pour qu’il ait été possible à M. 

2348. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Œuvres de Voiture. Lettres et poésies, nouvelle édition revue, augmentée et annotée par M. Ubicini. 2 vol. in-18 (Paris, Charpentier). » pp. 192-209

Je connus alors que vous aviez de si saines opinions de tout ce qui a accoutumé à tromper les hommes, que les choses qu’ils considéraient le plus en vous étaient celles que vous y estimez le moins, et que personne ne juge d’un tiers avec moins de passion que vous jugez de vous-même.

2349. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le duc de Rohan — III » pp. 337-355

D’alléguer qu’on lui avait mandé de Paris qu’on le voulait arrêter, c’était un dire, lequel, s’il était public, n’était pas vrai ; s’il était secret, il ne l’avait pu savoir… Bref, c’était lui-même qui se jugeait coupable ; ce que nous avons marqué pour fautes passaient pour crimes d’État en son opinion, qui, ayant de très grandes lumières des choses du monde, savait assez connaître ce qui était bien ou mal.

2350. (1863) Nouveaux lundis. Tome I « Œuvres complètes d’Hyppolyte Rigault avec notice de M. Saint-Marc Girardin. »

Il serait peu bienséant de les défendre contre lui, quoiqu’il fasse pénitence tous les lundis de les avoir partagées ; mais enfin, au début, la réforme littéraire était assez sage, comme le sont les réformes qui commencent… Quand les partis auront achevé de désarmer, quand les opinions seront tout à fait calmes, l’heure et le jour viendront alors, — l’heure bienveillante et le jour favorable.

2351. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français »

Du Méril estime que « les six légendes que Hrotsvitha a mises en dialogue sont sans doute de véritables essais dramatiques imités de Térence, mais d’une imitation toute littéraire, sans aucune pensée de représentation : c’est un livre qui ne s’adresse qu’à des savants. » Et il s’applique à démontrer cette opinion.

2352. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Le Mystère du Siège d’Orléans ou Jeanne d’Arc, et à ce propos de l’ancien théâtre français (suite.) »

Louis Paris, diffèrent d’opinion sur cette question et se combattent.

2353. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid. »

La double opinion de ceux qui préfèrent ouvertement Corneille à Racine et de ceux qui, au contraire, préfèrent incomparablement Racine à Corneille, ou encore le suffrage impartial et équitable des arbitres entre ces deux illustres rivaux, ont été exprimés d’une façon heureuse et sans réplique par ces plumes fines et d’une qualité rare, Saint-Évremond, Fontenelle, Fénelon, Vauvenargues, La Bruyère, Voltaire, même La Harpe ; nous nous tourmentons fort pour dire autrement ; nous ne dirons jamais mieux ni aussi bien.

2354. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Histoire des cabinets de l’Europe pendant le Consulat et l’Empire, par M. Armand Lefebvre (suite et fin.) »

L’avènement de Louis-Philippe n’avait fait qu’infirmer ou amortir cette contradiction de jugements, et, grâce à la tolérance de ce régime mixte, sous ce gouvernement mi-parti, se recrutant à la fois des orateurs constitutionnels et des vieux généraux de l’Empire, il s’était formé une opinion de bon sens, mais où il entrait bien de l’amalgame.

2355. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine, Recueillements poétiques (1839) »

Un poëte, au contraire, qui, avec les hautes facultés et le renom de M. de Lamartine, arrivant à la politique (puisqu’il faut de la politique absolument), ne donnerait que des livres plus rares, mais venus à terme, et de plus en plus mûris par le goût, ne ferait qu’apporter à tout l’ensemble de sa conduite politique, dans l’opinion, un appui véritable et solide ; il finirait, en étant de plus en plus un poëte incontestable, bien économe et jaloux de sa gloire, par triompher plus aisément sur les autres terrains, et par forcer les dernières préventions de ses collègues les plus prosaïques, même dans les questions de budget et dans le pied-à-terre des chemins vicinaux. 

2356. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Mathurin Regnier et André Chénier »

Pourtant, et sans vouloir ériger notre opinion en précepte, il nous semble que comme en ce bas monde, même pour les rêveries les plus idéales, les plus fraîches et les plus dorées, toujours le point de départ est sur terre, comme, quoi qu’on fasse et où qu’on aille, la vie réelle est toujours là, avec ses entraves et ses misères, qui nous enveloppe, nous importune, nous excite à mieux, nous ramène à elle, ou nous refoule ailleurs, il est bon de ne pas l’omettre tout à fait, et de lui donner quelque trace en nos œuvres comme elle a trace en nos âmes.

2357. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Réception de M. le Cte Alfred de Vigny à l’Académie française. M. Étienne. »

Entre les innombrables brochures publiées alors, quatre pièces principales suffisent pour éclairer l’opinion et fixer le jugement : 1° la préface explicative que M.

2358. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre II. Les formes d’art — Chapitre IV. Le roman »

Chaque philosophe met sur le roman l’empreinte de son tempérament comme de sa doctrine : Voltaire y porte son esprit mordant, sensé, léger, son ironie dissolvante et meurtrière, peu de sensibilité, peu de tirades ; il excelle à trouver les faits menus, secs et précis, qui font apparaître l’absurdité d’une opinion.

2359. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre VI, « Le Mariage de Figaro » »

Quelques événements, par le dégagement d’opinions et de sentiments qu’ils provoquent, indiquent à quel ton les esprits sont montés.

2360. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre I — Chapitre quatrième »

Ils peuvent être grands par cette impatience et cette audace même, comme Abélard, ou quand ils y joignent les qualités du caractère et l’action, comme saint Bernard ; mais, comme écrivains de choses durables, il faut beaucoup rabattre de l’opinion qu’on en a.

2361. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre dixième »

Et quand il ajoute : « Si l’on écrit comme l’on pense (mettez : si l’on parle), si l’on est convaincu de ce qu’on veut persuader, cette bonne foi avec soi-même, qui fait la bienséance pour les autres et la vérité du style (mettez : du langage), lui fera produire tout son effet… » le précepte s’adresse-t-il aux auteurs seulement ou à tout honnête homme qui veut amener les autres à son opinion ?

2362. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Bien que cette opinion n’ait aucune chance d’être adoptée ni par les physiciens, ni par les philosophes, il est bon d’être averti, afin de ne pas se laisser glisser sur la pente qui y mènerait.

2363. (1890) L’avenir de la science « V »

La science doit se comporter comme si le monde était libre d’opinions préconçues et ne pas s’inquiéter des difficultés qu’elle soulève.

2364. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre V. La littérature et le milieu terrestre et cosmique » pp. 139-154

Au siècle dernier, en 1755, le tremblement de terre qui détruisit Lisbonne devint aussitôt l’occasion d’un tournoi fameux entre deux rois de l’opinion, Voltaire et Rousseau.

2365. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Bain — Chapitre III : Les Émotions »

Telle est aussi l’opinion de M. 

2366. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre VI. Pour clientèle catholique »

Ou bien faut-il déclarer, en soulignant sévèrement les derniers mots : « Aimer d’un même amour la mère et la fille, c’est un crime, et qui a un nom : c’est un inceste. » En une dispute alternée que les Muses n’aimeront point, Malclerc et d’Audiguier, personnages sans vie, mais avocats tenaces et savants de toutes les subtilités connues, soutiennent les deux opinions.

2367. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Des lectures publiques du soir, de ce qu’elles sont et de ce qu’elles pourraient être. » pp. 275-293

Si l’on me demande ce que j’entends par ce mot, je répondrai que j’entends cette amélioration dans un sens qui ne saurait être contesté par les honnêtes gens d’aucun parti et d’aucune nuance d’opinion.

2368. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres inédites de l’abbé de Chaulieu, précédées d’une notice par M. le marquis de Bérenger. (1850.) » pp. 453-472

Cette école qu’il fit en Pologne l’y aida beaucoup et acheva sa maturité : « Au moins, si je n’ai rien profité à mon voyage, écrivait-il, me trouverez-vous revenu avec une bonne opinion de moi, et une fierté qui vous paraîtra extraordinaire pour un homme dont les affaires ne sont pas en meilleur état que les miennes. » Cette fierté est décidément un des traits du caractère de Chaulieu ; lui-même il est convenu de l’avoir poussée un peu loin : Avec quelques vertus, j’eus maint et maint défaut : Glorieux, inquiet, impatient, colère, Entreprenant, hardi, très souvent téméraire, Libre dans mes discours, peut-être un peu trop haut.

2369. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Pline le Naturaliste. Histoire naturelle, traduite par M. E. Littré. » pp. 44-62

Et ici Pline se sépare des opinions populaires de son temps ; il ne croit pas (est-il besoin de le dire ?)

2370. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Mme de Genlis. (Collection Didier.) » pp. 19-37

Quelque opinion qu’on puisse garder d’elle en définitive, on conviendra qu’à cet âge elle dut être une enfant séduisante : les défauts ne se marquent comme tels que plus tard, la jeunesse couvre tout, et, puisque avec Mme de Genlis nous sommes à moitié dans la mythologie, je dirai : la jeunesse prête à nos défauts des ailes qui les empêchent de se faire trop sentir et de peser.

2371. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur Droz. » pp. 165-184

Droz n’abjurera point ce premier culte de Montaigne : c’est en cela qu’il est permis de s’étonner sans doute et de différer d’opinion avec lui.

2372. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le surintendant Fouquet. (Article Fouquet, dans l’Histoire de Colbert, par M. P. Clément.) 1846. » pp. 294-312

L’extrême rigueur dont on usa envers Fouquet désormais abattu et sans ressource, la justice exceptionnelle à laquelle on le livra, la partialité de quelques-uns des commissaires et de ceux qui étaient chargés de l’examen des papiers et du rapport, les pensées cruelles dont ses ennemis ne se cachaient point à son sujet, l’âpreté des vengeances politiques qui n’allaient pas à moins qu’à demander sa tête, les lenteurs et les péripéties du procès qui dura plus de trois ans à instruire, tout concourut à retourner l’opinion et à gagner à l’accusé la pitié universelle.

2373. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « L’abbé Gerbet. » pp. 378-396

Celui-ci, voyant le succès d’un recueil consacré à de si graves sujets, en conclut qu’on pouvait, à plus forte raison, créer un organe analogue pour les opinions qui étaient les siennes et celles de ses amis.

2374. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre III. Zoïle aussi éternel qu’Homère »

Faites un tour d’opinions sur Homère ; demandez à Scaliger, à Terrasson, à Lamotte, ce qu’ils en pensent.

2375. (1867) Le cerveau et la pensée « Chapitre V. Le génie et la folie »

Je ne dis pas que le cas soit si grave ; mais, à coup sûr, celui qui a fait cela n’est pas un esprit du commun : il a le droit de se ranger lui-même au nombre des esprits distingués qu’ont eu des pensées bizarres ; et son ouvrage ne serait pas un faible argument en faveur de son opinion.

2376. (1912) L’art de lire « Chapitre VIII. Les ennemis de la lecture »

Mon opinion est même qu’il l’est toujours.

2377. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « Michelet »

— des religieuses, franchirent les vaines barrières de convenance ou d’opinion, comme on fait quand on est malade… ».

2378. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « III — Un symbole »

Chaigneau, dont j’ai tout à l’heure cité l’opinion sur l’œuvre de la Basilique, a, dans un petit roman d’une poignante intensité, rendu d’une façon très pénétrante l’impression que l’on ressent, quand, du sommet de la butte, le regard domine l’immense et chaotique étendue : « Une vapeur de clarté où se fondaient les fumées blanches essaimées de toitures, enveloppait Paris d’un vague et radieux frémissement qui noyait les détails rectilignes, pour n’accuser, en ébauche, que les ressauts capricieux des faîtages.

2379. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre XIV : De la méthode (Suite) »

Il avait une grande place et l’a quittée pour garder ses opinions.

2380. (1888) Portraits de maîtres

Le Docteur cherche à le guérir de cette fantaisie en lui racontant ces trois histoires de poètes méconnus par les trois gouvernements qui se partagent l’opinion et la monde. […] D’intermittentes erreurs, des sophismes passagers ne peuvent infirmer dans sa vérité générale notre sincère opinion. […] C’était donc pour un adversaire de ses opinions que Sainte-Beuve déployait tant de zèle charitable et de passion amicale. […] Homme bienfaisant dans sa vie privée, vif dans ses ressentiments, mais plus d’une fois généreux et capable d’affections tenaces, il se fût élevé plus haut dans la sphère morale, s’il eût déployé plus tôt la vaillance des opinions. […] La vérité d’appréciations ne résiderait-elle pas entre ces deux opinions extrêmes ?

2381. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Mais la même lettre parle de ses « débuts dans la littérature dramatique qui n’a commencé qu’avec Nos Sous-officiers, en 1890 » ; et j’ai eu peur de la hardiesse de ses opinions littéraires. […] A vendre tant de paroles, elle parle souvent sans avoir rien à dire, se fait des opinions par art, parce qu’une opinion en tant de lignes vaut, à tel journal, tant de francs. […] Ne la jugez pas sur les livres qui éblouirent ces pauvres immortels : vous auriez d’elle trop mauvaise opinion, car elle a fait bien mieux, les Lettres d’une Amoureuse. […] Moi je crois comprendre ceci : un jour, vous vous êtes amusée d’une subtilité ; le lendemain, vous vous êtes réjouie d’une antithèse : jamais vous n’avez pensé. — Son opinion sur l’avarice n’est pas moins hésitante que son sentiment sur l’oubli. […] On n’y trouve pas grand effort de critique personnelle, mais, les opinions des Italiens y sont tantôt résumées, tantôt délayées.

2382. (1884) Propos d’un entrepreneur de démolitions pp. -294

Il fut toute sa vie de chrétien un Tartuffe croyant, un chaste impur, un justicier capricieux, un sentimental implacable absurde synthèse vivante de contradictions morales, proie désignée d’avance pour le plus solennel festin de ce sphinx à tête d’âne que Pascal appelait l’Opinion. […] l’opinion, il aurait tant voulu qu’elle l’adorât cette reine du monde ! […] Ce sera la seule et j’ose dire qu’elle est instructive : « Jacques faisait le portrait d’une dame mondaine, riche, impertinente, hardie en opinions, au demeurant belle personne et encore jeune. […] Aujourd’hui que l’immortelle est décédée, l’infâme drôlesse qui l’a détrônée, l’Opinion publique, nage dans les splendeurs, car son concubin préféré est le plus incontinent des aveugles riches et il s’appelle le Succès. […] L’opinion, cette Junon aux yeux de bœuf, s’amuse à cracher dans ces puits et, quelquefois, elle s’étonne bêtement de leur profondeur, qui la devrait épouvanter, si ces sortes d’yeux pouvaient s’épouvanter ou s’affoler d’autre chose que de l’écarlate liquide des égorgements.

2383. (1907) Jean-Jacques Rousseau pp. 1-357

Il dit qu’il secoue le joug de l’opinion, qu’il la brave : mais la braver de cet air, c’est toujours songer à elle. […] Ces dispositions s’étendent et s’affermissent à mesure que nous devenons plus sensibles et plus éclairés ; mais, contraintes par nos habitudes, elles s’altèrent plus ou moins par nos opinions. […] Tandis que le gouverneur d’Émile lui accordait toute la liberté possible et voulait qu’il ne fût jamais puni que par les choses, et tandis qu’il excitait son élève à penser par lui-même et à se mettre au-dessus du jugement des hommes, — deux Muses sévères, la Contrainte, et le Respect de l’Opinion, président à l’éducation des filles : Les filles doivent être gênées de bonne heure… La dépendance est un état naturel aux femmes, les filles se sentent faites pour obéir… (On peut les punir, elles.) — … Il résulte de cette contrainte habituelle une docilité dont les femmes ont besoin toute leur vie, puisqu’elles ne cessent jamais d’être assujetties ou à un homme, ou aux jugements des hommes, et qu’il ne leur est jamais permis de se mettre au-dessus de ces jugements. — Il n’importe pas seulement que la femme soit fidèle, mais qu’elle soit jugée telle par son mari, par ses proches, par tout le monde… L’apparence même est au nombre des devoirs des femmes… La femme, en faisant bien, ne fait que la moitié de sa tâche, et ce qu’on pense d’elle ne lui importe pas moins que ce qu’elle est en effet… Toute l’éducation des femmes est relative aux hommes. […] Or la tradition économise le temps en transmettant des parents aux enfants des opinions toutes faites. […] Premièrement un État très petit, où le peuple est facile à rassembler et où chaque citoyen peut aisément connaître tous les autres ; secondement, une grande simplicité de mœurs qui prévienne la multitude d’affaires et de discussions épineuses ; ensuite beaucoup d’égalité dans les rangs et les fortunes, sans quoi l’égalité ne saurait subsister longtemps dans les droits et l’autorité ; enfin peu ou point de luxe, car le luxe est l’effet des richesses, ou il les rend nécessaires ; il corrompt à la fois le riche et le pauvre, l’un par la possession, l’autre par la convoitise… ; il ôte à l’État tous ses citoyens pour les asservir les uns aux autres, et tous à l’opinion… … Ajoutons qu’il n’y a pas de gouvernement si sujet aux guerres civiles et aux agitations intestines que le démocratique ou populaire… … S’il y avait un peuple de dieux, il se gouvernerait démocratiquement.

2384. (1905) Pour qu’on lise Platon pp. 1-398

Il faut reconnaître pourtant que cette habitude est dangereuse et que l’on peut arriver ainsi assez vite, non seulement à ne pas se préoccuper du juste ou de l’injuste, ce qui était la discipline même des sophistes ; mais à croire qu’ils n’existent pas et à faire pénétrer doucement ou à laisser s’introduire insensiblement cette opinion dans l’esprit de ceux qu’on enseigne ou qu’on entretient. […] C’est une opinion que nous pouvons accepter pour nous en servir selon nos desseins. […] Et il arrivera qu’ils pourront devenir les esclaves de deux classes d’hommes très différentes : et de ceux qui seront assez forts pour résister aux plaisirs et de ceux mêmes qui s’y abandonnent sans fougue et comme à une habitude dépourvue de violent attrait. » — Cette opinion peut étonner et troubler quelque auditeur ; mais elle est digne de considération. […] Bien des raisons ont pu l’amener à cette opinion et l’y maintenir. […] Ne voit-on pas, à consulter sans parti pris et surtout sans hypocrisie les opinions des hommes, que la vie heureuse et, pour parler net, la vie normale est pour eux le déploiement large d’une volonté libre ?

2385. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Sully, ses Économies royales ou Mémoires. — II. (Suite.) » pp. 155-174

nous l’adorerons tous, et lui seul rétablira la France ; il y a plus de six ans que je l’ai dit, et Villandry avait même opinion que moi. » Ce sont là des mots qui ne s’inventent pas, et qui deviennent des pronostics après que l’histoire les a confirmés.

2386. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

Natalis de Wailly, conformément à l’opinion de Tillemont et par les mêmes raisons que lui, mais en appuyant davantage, se prononce sans hésiter pour le 25 avril 1214.

2387. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — I. » pp. 262-280

il n’y avait pas, à leur gré (et c’est, je le sais, l’opinion du grand nombre), assez de traits chez Bourdaloue.

2388. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Bourdaloue. — II. (Fin.) » pp. 281-300

Je ne veux point parler ici de cette science de dialectique et de ces ingénieuses subtilités de division, dans lesquelles on retrouve le théologien profond, l’ancien professeur de théologie morale : j’ai dans l’idée ces hardiesses et ces présences d’esprit de l’orateur, qui, même en développant ses thèmes généraux, s’adresse aux opinions, aux susceptibilités régnantes, et qui, pour déployer ses voiles et voguer presque contre le vent, consulte en bon pilote les courants et les flots.

2389. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — II. (Suite.) » pp. 434-453

Il désira que l’Académie française (la classe de l’Institut qui y répondait) fît un examen particulier du livre, énonçât à ce sujet une opinion motivée, et M. 

2390. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) «  Œuvres de Chapelle et de Bachaumont  » pp. 36-55

Chapelle, qui a si peu écrit et dont l’opinion avait une telle autorité sur les plus grands hommes de son temps, me représente assez bien une classe d’esprits peu nombreuse parce qu’elle est très distinguée : c’est celle des hommes d’un goût singulièrement fin, délicat, difficile, qui ont tout lu, qui savent toutes choses, et qui décrivent rien ou presque rien, parce que la volupté du repos est bien grande et que le sentiment très vif de la perfection décourage de produire.

2391. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Une Réception Académique en 1694, d’après Dangeau (tome V) » pp. 333-350

Ce sont des esquisses au naturel, faites sans idée de satire et selon l’opinion courante : « François de Clermont, évêque comte de Noyon, à qui tout le Vermandois est soumis, tire son illustre origine du tonnerre.

2392. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

Il n’en fut rien ; la mode s’en mêla ; on se fit nouvelliste et jugeur des événements du jour : « Et véritablement, dit-il, nous frondions quelquefois tout notre soûl. » L’abbé de Pomponne, homme d’esprit, mais tête de linotte, allait répétant partout l’opinion qu’il venait d’entendre, et ébruitait d’un air de mystère des conversations bonnes à huis clos.

2393. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Le baron de Besenval » pp. 492-510

[NdA] C’est là une opinion particulière à Besenval, et dont il faut lui laisser la responsabilité.

2394. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « II » pp. 21-38

Quelque jugement qu’on porte sur l’ensemble de ce travail, il le conçut à bonne fin et le commença avec un zèle extrême : L’entreprise est délicate, écrivait-il à un de ses amis de Paris, M. de Chénevières ; il s’agit d’avoir raison sur trente-deux pièces ; aussi je consulte l’Académie toutes les postes, et je soumets toujours mon opinion à la sienne.

2395. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Correspondance inédite de Mme du Deffand, précédée d’une notice, par M. le marquis de Sainte-Aulaire. » pp. 218-237

Mais, entre nous soit dit, il doit nous être assez agréable de voir les tyrans de nos opinions se détruire par les mêmes arguments qu’ils ont employés pour subjuguer nos esprits.

2396. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Le journal de Casaubon » pp. 385-404

Ô souverain maître du monde, tu m’as donné, il est vrai, la volonté de diriger ma vie selon tes préceptes ; mais, au moment où je cherche ton propre vouloir, quelquefois je me sens incertain entre les variétés merveilleuses des opinions des hommes.

2397. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Montaigne en voyage »

A Bade, ville catholique, il est frappé de la pratique sévère du plus grand nombre, qui va jusqu’à faire maigre le mercredi, et il y vérifie cette observation, qu’il n’est rien de tel, pour se tendre et se resserrer dans sa dévotion, que d’être en regard et en contradiction permanente de l’opinion contraire.

2398. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Il y a aujourd’hui une opinion sur Beyle que je vois adoptée et professée par un des hommes dont je prise le plus la vigueur, la portée d’esprit et le talent, par M. 

2399. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Ducis épistolaire. »

Après une vie assez errante à l’étranger où il fut attaché d’abord à l’ambassade devienne, puis à l’éducation du duc de Parme, revenu à Paris et très mêlé aux Encyclopédistes, il portait dans cette société si tranchée d’opinion et si mordante d’accent une âme timide, craintive, rongée de scrupules.

2400. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Œuvres complètes de Molière »

Il s’est fait une règle fort sage, de ne jamais critiquer ni discuter les opinions des commentateurs qui l’ont précédé ; cela irait trop loin : « Lorsqu’ils commettent des erreurs, dit-il, il suffît de les passer sous silence : lorsqu’ils ont bien exprimé une réflexion juste, nous nous en emparons.

2401. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Oeuvres inédites de la Rochefoucauld publiées d’après les manuscrits et précédées de l’histoire de sa vie, par M. Édouard de Barthélémy. »

L’historien de Port-Royal, qui élève fort haut la valeur de tous les habitants de l’abbaye, me paraît en cette circonstance peu « logique, car il dément constamment le jugement porté par les pieuses amies de Mme de Sablé, et qui doivent cependant ici éclairer l’opinion et la former.

2402. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Théophile Gautier (Suite et fin.) »

Thiers, Stendhal, — Jal, expression de l’opinion moyenne, — avaient pu se rencontrer souvent et causer avec des artistes, mais ils ne l’étaient pas eux-mêmes.

2403. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Don Quichotte (suite et fin.) »

J’ai dit le meilleur ou le plus mauvais, s’empresse-t-il d’ajouter, mais il ne saurait être le plus mauvais, et je me repens de l’avoir dit ; car, d’après l’opinion de mes amis, il doit atteindre au plus haut degré d’excellence littéraire possible, humainement parlant. » On voit quelle était l’affection et la prédilection de Cervantes pour ce dernier-né de son intelligence.

2404. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Pour me confirmer dans cette idée et dans cette bonne opinion, j’ai consulté dès longtemps et j’invoquerai le témoignage de tous ceux qui l’ont connue ou rencontrée.

2405. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

La reine, dans ce cercle resserré qu’elle parcourt d’un coup d’œil juste, se rend compte désormais de tous les périls : du premier jour elle s’est mise à la raison par nécessité ; c’en est fait de toutes ses vivacités passées : « Le seul moyen, pense-t-elle, de nous tirer d’ici est la patience, le temps, et une grande confiance qu’il faut leur inspirer. » Elle se fait d’ailleurs bien peu d’illusions ; après les premiers mois écoulés, elle ne voit qu’accroissement de dangers autour d’elle et sombres présages pour l’avenir ; de faibles et rares retours de l’opinion, des fluctuations d’une heure en sens favorable ne l’abusent point ; le courant général est trop fort ; les violents et les ardents entraînent les faibles.

2406. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat. »

Y avait-il lieu à une révolution dans l’idée qu’on doit se former dorénavant de ces illustres personnes, à un bouleversement d’opinion du tout au tout ?

2407. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Mlle Eugénie de Guérin et madame de Gasparin, (Suite et fin.) »

M. de Rémusat, en parlant de Mme de Gasparin48, a été surtout frappé de voir combien ses ouvrages différaient de ses origines, et combien le talent de l’auteur ressemblait peu à ses opinions, à ses croyances premières, toutes calvinistes et genevoises.

2408. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Marie-Thérèse et Marie-Antoinette. Leur correspondance publiée par le chevalier d’Arneth »

La catastrophe étant donnée, il y aurait eu bien vite un parti pris absolu, une unité souveraine de couleur et de ton sur les précédents de cette destinée : c’eût été la satire ou l’apothéose qui eût prévalu ; on eût eu une première Antoinette, toute divine et adorable ou tout odieuse et détestable, tout une ou tout autre, selon le courant d’opinion qui eût soufflé et régné : il n’y aurait pas eu de milieu.

2409. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Idées et sensations : par MM. Edmond et Jules de Goncourt. »

La religion de l’histoire, le numen historiæ de Pline le Jeune et de Tacite, ils n’en ont pas une bien haute idée, ils ne l’admettent pas : « L’histoire, disent-ils, est un roman qui a été ; le roman est de l’histoire qui aurait pu être. » — La tragédie, ils n’en pensent pas mieux que de l’histoire, mais ils la redoutent davantage, et ils lui en veulent comme au fantôme ennemi qu’on évoque de temps en temps et qu’on fait semblant de ressusciter contre les genres vivants et modernes ; ils disent : « Il est permis en France de scandaliser en histoire : on peut écrire que Néron était un philanthrope, ou que Dubois était un saint homme ; mais en art et en littérature les opinions consacrées sont sacrées : et peut-être, au xixe  siècle, est-il moins dangereux, pour un homme de marcher sur un crucifix que sur les beautés de la tragédie. » Artistes jusqu’à la moelle, ils voient le monde par ce côté unique de l’art ; c’est par là qu’ils sont offensés, c’est par là qu’ils jouissent ; c’est à être un artiste indépendant, sincère, absolu et sans concession, qu’ils mettent le courage civil : « Il faut plus que du goût, il faut un caractère pour apprécier une chose d’art.

2410. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Le comte de Clermont et sa cour, par M. Jules Cousin. »

L’habileté et la vivacité avec lesquelles vous conduisez, Monseigneur, cette opération intéressante, méritent les plus grands éloges et ne laissent certainement rien à désirer. » A quoi le prince répondait : « Être loué par vous, cela me donne bonne opinion de moi. » La bataille de Raucoux suivit de près la prise de Namur.

2411. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « THÉOPHILE GAUTIER (Les Grotesques.) » pp. 119-143

En y corrigeant les inexactitudes de faits, en y revisant les jugements pour en modifier l’excessif et le juvénile, en persistant toutes les fois qu’il croirait avoir raison, en daignant par instants discuter les opinions des autres, en complétant aussi sa galerie par quelques autres portraits du temps qui y manquent, et où il apporterait désormais plus de précaution (comme il en a su prendre dans son article Scarron, d’ailleurs si amusant), il aurait fait, non pas une histoire régulière de la poésie sous Louis XIII, mais un piquant, un mémorable essai, dans lequel le sentiment très-vif et très-filial qu’il a de cette poésie, et qu’il rend d’une manière unique, compenserait heureusement bien des écarts.

2412. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN FACTUM contre ANDRÉ CHÉNIER. » pp. 301-324

En général, tout ce début n’est pas net ; l’auteur voudrait dire et ne dit pas ; mais j’arrive à l’opinion fondamentale, et je la résume ainsi : André Chénier, en regard de l’antiquité, n’est qu’un copiste, un disciple qui s’attache à la superficie et aux couleurs plutôt qu’à l’esprit ; il abonde en emprunts forcés, il pille au hasard et fait de ses larcins grecs et latins un pêle-mêle avec les fausses couleurs de son siècle.

2413. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME DE SÉVIGNÉ » pp. 2-21

Mais au moins les convenances sont observées ; l’opinion commence à flétrir ce qui est ignoble et crapuleux.

2414. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXVIIIe entretien. Tacite (1re partie) » pp. 57-103

XVI On se perd quand on analyse ce sublime discours d’empire dans les profondeurs de raison, de pénétration, de prévoyance, de connaissance du cœur humain et de l’opinion des différentes classes du peuple qu’il révèle chez le vieux Galba.

2415. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Émile Zola, l’Œuvre. »

Saisissez-vous clairement la relation entre l’avènement de la démocratie et celui du naturalisme, qui est une littérature d’aristocrates et de mandarins   « Qui dit psychologue dit traître à la vérité », voilà une opinion d’une singulière candeur.

2416. (1904) Prostitués. Études critiques sur les gens de lettres d’aujourd’hui « Chapitre IV. Précieuses et pédantes »

André Gide quand il expose ses opinions critiques et j’aime à lire par-dessus son épaule ses souriantes Lettres à Angèle.

2417. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

On était catholique et royaliste par le même train d’opinion, presque en vertu des mêmes idées et des mêmes intérêts.

2418. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Lettres de la marquise Du Deffand. » pp. 412-431

Née en 1697, morte en 1780, elle a traversé presque tout le xviiie  siècle, dont, encore enfant, elle avait devancé d’elle-même les opinions hardies, et, à aucun moment, elle ne s’est laissé gagner par ses engouements de doctrine, par son jargon métaphysique ou sentimental.

2419. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Histoire du chancelier d’Aguesseau, par M. Boullée. (1848.) » pp. 407-427

Il se reproche en un endroit assez vivement de n’avoir pas étudié, comme il aurait dû, l’histoire ; malgré les emplois importants dont il fut de bonne heure chargé, il aurait certes pu le faire encore : « Mais, d’un côté, les charmes des belles-lettres qui ont été pour moi, dit-il, une espèce de débauche d’esprit, et, de l’autre, le goût de la philosophie et des sciences de raisonnement, ont souvent usurpé chez moi une préférence injuste… » Pourtant, il s’en fallut de peu, nous raconte-t-il agréablement, qu’il ne se ruinât tout à fait dans l’esprit du père Malebranche, qui avait conçu une bonne opinion de lui par quelques entretiens sur la métaphysique ; mais ce père le surprit un jour un Thucydide en main, non sans une espèce de scandale philosophique.

2420. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Nouveaux documents sur Montaigne, recueillis et publiés par M. le docteur Payen. (1850.) » pp. 76-96

Son opinion est « qu’il se faut prêter à autrui, et ne se donner qu’à soi-même ».

2421. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Maintenon. » pp. 369-388

Mme Du Deffand, qui est littérairement de la même école, a très bien rendu l’effet que font les lettres de Mme de Maintenon, et on ne saurait mieux les définir : Ses lettres sont réfléchies, dit-elle ; il y a beaucoup d’esprit, d’un style fort simple ; mais elles ne sont point animées, et il s’en faut beaucoup qu’elles soient aussi agréables que celles de Mme de Sévigné ; tout est passion, tout est en action dans celles de cette dernière : elle prend part à tout, tout l’affecte, tout l’intéresse ; Mme de Maintenon, tout au contraire, raconte les plus grands événements, où elle jouait un rôle, avec le plus parfait sang-froid ; on voit qu’elle n’aimait ni le roi, ni ses amis, ni ses parents, ni même sa place ; sans sentiment, sans imagination, elle ne se fait point d’illusions, elle connaît la valeur intrinsèque de toutes choses ; elle s’ennuie de la vie, et elle dit : « Il n’y a que la mort qui termine nettement les chagrins et les malheurs… » Il me reste de cette lecture beaucoup d’opinion de son esprit, peu d’estime de son cœur, et nul goût pour sa personne ; mais, je le dis, je persiste à ne la pas croire fausse.

2422. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Rulhière. » pp. 567-586

Le trait malin, proverbial, les alliances heureuses de noms et d’idées, la concision élégante, tout ce qui constitue le genre moral tempéré et en fait l’ornement, s’y trouve placé avec art, et il n’y manque vraiment qu’un souffle poétique moins sec et plus coloré, quand l’auteur tente de s’élever et de nous peindre, par exemple, le temple de l’Opinion promené dans les airs sur les nuages : c’est ici que l’on sent le défaut d’ailes et d’imagination véritable, l’absente de mollesse, de fraîcheur et de charme, comme dans toute la poésie de ce temps-là.

2423. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « La princesse des Ursins. Lettres de Mme de Maintenon et de la princesse des Ursins — II. (Suite et fin.) » pp. 421-440

Sur ce que Mme de Maintenon lui avait mandé que les Jésuites et les jansénistes s’étaient tour à tour entremis pour contrarier le choix qu’on voulait faire de deux ambassadeurs à Rome : De quoi se mêlent, s’écrie-t-elle, ceux qu’on appelle jansénistes, et le parti contraire, d’empêcher qu’on envoie à Rome des personnes qui soient ou ne soient pas dans leurs opinions ?

2424. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « L’abbé Barthélemy. — I. » pp. 186-205

L’abbé Barthélemy sut ramener l’opinion par sa modération et en renonçant de lui-même à une petite pension qu’il avait sur le Mercure.

2425. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Saint François de Sales. Son portrait littéraire au tome Ier de l’Histoire de la littérature française à l’étranger par M. Sayous. 1853. » pp. 266-286

Henri IV disait hautement qu’il ne connaissait aucun homme, « plus capable d’apporter quelques remèdes à la nouveauté des opinions qui troublaient son royaume que l’évêque de Genève, d’autant que c’était un esprit solide, clair, résolutif, point violent, point impétueux, et lequel ne voulait emporter les choses de haute lutte ou de volée ».

2426. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Marguerite, reine de Navarre. Ses Nouvelles publiées par M. Le Roux de Lincy, 1853. » pp. 434-454

À voir les passages des lettres dans lesquelles elle recommande Berquin, on dirait qu’elle épouse toutes ses opinions et sa créance ; mais il ne faut point demander à Marguerite tant de rigueur dans les idées et dans l’expression.

2427. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — II. (Fin.) » pp. 476-495

Frédéric recommande à Milord Maréchal de lui ménager un asile et de lui faire tenir des secours : Je vois que nous pensons de même ; il faut soulager ce pauvre malheureux, qui ne pèche que pour avoir des opinions singulières, mais qu’il croit bonnes.

2428. (1897) Préface sur le vers libre (Premiers poèmes) pp. 3-38

Mais Molière et La Fontaine ne voyaient dans ce qu’il serait plus juste de dénommer chez eux le vers familier, qu’un choix de mètres, joliets, souples, à cadence soigneusement distincte de celle du vers héroïque, de l’alexandrin en longues traînes de périodes ; c’est par convenance, respects des opinions, et même des fantômes de préjugés de leurs délicats qu’ils furent amenés à varier leur jeu toujours sans dissonances.

2429. (1767) Salon de 1767 « Adressé à mon ami Mr Grimm » pp. 52-65

De celles surtout qui rarement exposées à nos yeux, telles que le ventre, le haut des reins, l’articulation des cuisses ou des bras, où le (…) et le (…) sont sentis par un si petit nombre d’artistes, ne tiennent pas le nom de belles de l’opinion populaire que l’artiste trouve établie en naissant et qui décide de son jugement.

2430. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre III. Personnages merveilleux des contes indigènes »

) me confirme dans cette opinion.

2431. (1913) Essai sur la littérature merveilleuse des noirs ; suivi de Contes indigènes de l’Ouest-Africain français « Essai sur la littérature merveilleuse des noirs. — Chapitre V. Séductions pour la compréhension de la psychologie indigène. — Conclusion »

On peut cependant invoquer à l’appui de l’opinion contraire l’antipathie violente dont ils témoignent contre l’avarice.

2432. (1892) L’anarchie littéraire pp. 5-32

Le comble, c’est qu’il a réussi à se faire passer pour un être dangereux auprès de François Coppée, Paul Bourget et Leconte de Lisle qui le signalent comme un écueil à tous les vents de l’opinion.

2433. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « IX. Mémoires de Saint-Simon » pp. 213-237

Ils l’ont trouvé dans ces Mémoires, que dans l’intérêt de la vérité il ne faut point appeler terribles, car on les croirait redoutables, comme ils le trouvent encore dans l’opinion d’un temps perdu de panthéisme, et qui n’a plus la vraie notion de la grandeur individuelle.

2434. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Le poème de Marie, qui fut publié là pour la première fois et qui est resté le chef-d’œuvre de son auteur dans l’opinion générale, ne fut qu’un succès de nuances.

2435. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « M. Jean Richepin »

Je lui ai dit franchement mon opinion sur son œuvre, mais je ne lui ai pas dit toute mon impression.

2436. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre IV. L’unification des sociétés »

Le fait est si constant que Fustel de Coulanges, qui se défiait pourtant des lois sociologiques, a cru pouvoir énoncer cette loi214 : « Les inégalités sociales sont toujours en proportion inverse de la force de l’autorité. » Si l’avènement des puissances centrales diminue réellement certaines inégalités, de combien ne doit-elle pas les diminuer toutes dans l’opinion ?

2437. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre X : M. Jouffroy psychologue »

Avant eux, on l’avait étudiée en accessoire, la consultant par occasion, par intérêt, en vue d’un objet étranger, pour y chercher les preuves d’une opinion logique ou métaphysique, légèrement, irrégulièrement, sans préparation, sans découvertes, sans attention et sans fruit.

2438. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XXVI. Des oraisons funèbres et des éloges dans les premiers temps de la littérature française, depuis François Ier jusqu’à la fin du règne de Henri IV. »

Les hommes de lettres et les savants, qui commençaient en France à s’emparer de l’opinion et dirigeaient déjà la renommée, durent célébrer à l’envi le prince qui les honorait.

2439. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIII. »

Coleridge, excessif dans ses opinions, inégal et rêveur dans sa vie, était un élève de la Muse allemande : il en avait aimé le tour vague et mystique, l’abondance descriptive, avant d’y mêler les passions de la liberté.

2440. (1890) Impressions de théâtre. Quatrième série

Voilà mon opinion, et je la prouve. […] Mais ce qu’il exprime là, ce n’est qu’une opinion personnelle, fort sujette à discussion. […] Enfin, il faut que je vous rapporte l’opinion de M.  […] L’opinion de Molière est nette, tranchée, absolue. […] Les deux opinions sont plausibles.

2441. (1920) Essais de psychologie contemporaine. Tome II

Il semble qu’un tel poète devait occuper devant l’opinion de notre pays une place unique, analogue à celle que nos voisins d’outre-Manche ont faite à Tennyson. […] Les circonstances finissent par être la raison dernière des vices et des vertus, comme elles sont de plus en plus la raison dernière des opinions. […] Telle qu’elle se présente, ou douloureuse ou mesquine, leur existence n’est pas une œuvre d’opinion. […] Vivre à Paris, et dans une société choisie, c’est subir l’épreuve de beaucoup d’opinions malignes, volontiers hostiles, c’est traverser une critique continue et fine, se sentir jugé par beaucoup d’intelligences adverses. […] Rien de rare à Paris comme une pensée vraiment indépendante, c’est-à-dire qui ne soit ni soumise à l’opinion, ni révoltée contre elle.

2442. (1870) De l’intelligence. Deuxième partie : Les diverses sortes de connaissances « Livre quatrième. La connaissance des choses générales — Chapitre II. Les couples de caractères généraux et les propositions générales » pp. 297-385

. — Opinion qui les considère comme des vérités d’expérience. — Plusieurs d’entre eux sont en outre des propositions analytiques. — Principe de l’inertie. — Énoncé exact de l’axiome. — La différence de lieu et d’instant est sans influence ou nulle, par hypothèse. — Limites de l’axiome ainsi entendu et démontré. — Principe du parallélogramme des vitesses et des forces. — Énoncé exact de l’axiome. — La coexistence d’un second mouvement dans le même mobile est sans influence ou nulle, par hypothèse. — Passage de l’idée de vitesse à l’idée de force. […] Importance de la question. — Origine, formation, valeur des axiomes et des théorèmes qui en dérivent. — Opinion de Kant. — Opinion de Stuart Mill. — Conclusions de Kant et de Stuart Mill sur la portée de l’esprit humain et sur la nature des choses. — Théorie proposée. — Ce qu’elle concède et ce qu’elle nie dans les deux précédentes. — Il y a une liaison intrinsèque et forcée entre les deux idées dont le couple fait un théorème. — Il y a une liaison intrinsèque et forcée entre les deux caractères généraux qui correspondent à ces deux idées. — Il reste à savoir si ces caractères généraux se rencontrent effectivement dans les choses. — Ils s’y rencontrent partout où les théorèmes s’appliquent.

2443. (1894) La vie et les livres. Première série pp. -348

Non, cette fois, notre savant allemand trouve que les écrivains français ont une opinion vraiment trop défavorable de l’esprit de leurs lecteurs. […] C’est surtout à l’âge où les opinions sont intransigeantes et fougueuses, que toute occupation étrangère au plaisir d’enregistrer des sensations fines, lui parut un labeur servile et roturier. […] Voici comment il parvint à se former une opinion raisonnée sur l’école dite « symboliste », qu’il choisit de préférence, la jugeant mûre pour une étude scientifique, comme tous les objets déjà fossiles. […] Mais, enfin, ils auront une opinion. […] Puis, très soigneusement, avec un choix très méritoire d’expressions et de tours, sur un ton que Callimaque aurait adopté s’il avait connu la Tentation de saint Antoine et les Opinions de M. 

2444. (1896) La vie et les livres. Troisième série pp. 1-336

Pierre Veber nous propose, par la voix de deux personnages qu’il a chargés spécialement de faire paraître ses propres opinions : « Enfin, où sommes-nous ? […] — On ne peut pourtant demander à ces gens de faire une contre-enquête après chaque pièce ou chaque roman. — Avouons plutôt, bonnement, que nous faisons le possible pour entretenir la fâcheuse opinion qu’ils ont de notre vie sociale. […] — Mais il est un point sur lequel je voudrais attirer votre attention, car il contribue plus que tout le reste à fausser l’opinion étrangère, et parce qu’en somme cela se réduit à une question de probité. […] Je ne voudrais pas que l’on donnât à ce regret, d’ailleurs superflu, la valeur d’une opinion. […] Superstition, fanatisme, malpropreté, contravention perpétuelle aux lois les plus élémentaires de l’hygiène, tels étaient, selon l’opinion la plus répandue, les principaux traits de nos ancêtres.

2445. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLVIe entretien. Examen critique de l’Histoire de l’Empire, par M. Thiers (3e partie) » pp. 249-336

Thiers ; la naissance, le caractère, l’opinion, le talent de M.  […] C’est là une de ces questions que l’histoire, trop récente et trop partiale pour le vainqueur, n’a pas encore étudiée et sur laquelle nous ne partageons nullement les opinions de l’auteur du Consulat.

2446. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCVe entretien. Alfred de Vigny (2e partie) » pp. 321-411

» Ma première pensée fut, non pas de la réduire, c’eût été trahir la patrie, mais de la faire plus départementale que nationale, c’est-à-dire de la diviser organiquement en quelques grands corps recrutés dans certaines zones départementales du pays, y résidant toujours sous l’influence de l’opinion locale et sous le commandement de généraux pris, autant que possible, dans les mêmes provinces, de peur que l’ascendant naturel d’un Auguste popularisé par le nom de César ne pût disposer de l’armée entière et rétablir l’empire, œuvre des soldats, au lieu de la république ou de la monarchie tempérée, œuvre des citoyens. — Les raisons que je me donnais à moi-même pour cette organisation de nos forces étaient puissantes. […] Ses opinions politiques étaient au fond monarchiques, mais ses mœurs, aristocratiques avant tout.

2447. (1865) Cours familier de littérature. XX « CXXe entretien. Conversations de Goethe, par Eckermann (2e partie) » pp. 315-400

On dit des feuilles d’un arbre que l’on n’en trouverait pas deux absolument semblables ; de même dans un millier d’hommes on n’en trouverait pas deux entre lesquels il y eût harmonie complète pour la pensée et les opinions. […] Goethe dit qu’en général un sujet purement poétique était aussi préférable à un sujet politique que l’éternelle vérité de la nature l’est à une opinion de parti.

2448. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. Herbert Spencer — Chapitre II : La psychologie »

Au point où nous en sommes, dit l’auteur, il est bien aisé de voir que l’ouvrage est en désaccord complet avec les opinions courantes sur le libre arbitre. […] C’est au raisonnement qualificatif qu’il faut rapporter l’induction, l’analogie et le syllogisme, au sujet duquel « on ne saurait s’expliquer comment tant de logiciens ont soutenu qu’il représente le procédé de l’esprit par lequel nous raisonnons habituellement, n’était l’immense influence de l’autorité sur les opinions humaines. » L’auteur montre très bien qu’il n’est qu’un procédé de vérification.

2449. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « L’abbé de Bernis. » pp. 1-22

Le digne fondateur a sur ce sujet de belles et nobles paroles qui décèlent, sous cette monarchie de Louis XV, un cœur de citoyen ; j’en veux citer quelques-unes, ne fût-ce que pour moraliser ce sujet de Bernis, dont les débuts sont un peu amollissants : Ce que vous me dites, monsieur, écrit Duverney à Bernis, de l’opinion de l’étranger sur cet établissement n’est guère propre à modérer mon impatience ; j’en ai toujours beaucoup dans les choses qui contribuent à la gloire de notre maître et au bien de la nation… Les objections ne m’ont jamais rebuté.

2450. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « De l’état de la France sous Louis XV (1757-1758). » pp. 23-43

Ses nerfs s’affectent ; en butte à l’attaque universelle de l’opinion qui, à cette heure, est toute déclarée en faveur du roi de Prusse, sans moyens directs de remédier aux maux et aux désastres de chaque jour, obligé de pourvoir aux subsides des alliés, sensible à l’idée de manquer à ses engagements si l’argent lui fait défaut (et l’argent très souvent est en retard), il pousse des cris de détresse et n’hésite pas à entrer en désaccord avec Mme de Pompadour.

2451. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Malherbe et son école. Mémoire sur la vie de Malherbe et sur ses œuvres par M. de Gournay, de l’Académie de Caen (1852.) » pp. 67-87

Mais sans Malherbe, sans sa juste et ferme direction, on peut croire que Racan n’eût point été ce qu’on l’a vu, et lui-même, s’adressant à son maître, a dit : « Je sais bien que votre jugement est si généralement approuvé, que c’est renoncer au sens commun que d’avoir des opinions contraires aux vôtres. » Né en 1589 au château de La Roche-Racan, en Touraine, aux confins du Maine et de l’Anjou, Racan, de trente-quatre ans plus jeune que son maître, connut Malherbe étant page de la chambre de Henri IV.

2452. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Histoire de la maison royale de Saint-Cyr, par M. Théophile Lavallée. » pp. 473-494

Mme de La Maisonfort était de ces personnes rares comme on en connaît quelques-unes en tout temps, qui se portent d’abord au sommet de toutes les curiosités de leur époque, juges suprêmes et raffinés des ouvrages de l’esprit, oracles et prosélytes des opinions en vogue : elle eût fait agréablement du jansénisme avec Racine ou avec M. de Tréville, comme elle distillait du quiétisme avec Fénelon, comme au xviiie  siècle elle se fût éprise de David Hume avec la comtesse de Boufflers, comme au xixe elle eût brillé dans un salon doctrinaire, eût discuté sur la psychologie ou l’esthétique, et peut-être eût poussé jusqu’aux Pères de l’Église, non sans effleurer le socialisme en passant.

2453. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — II. (Fin.) » pp. 513-532

Quand on en vient à Joinville, qui est le quatorzième en ordre, le légat, qui était comme chargé par le roi de faire le tour d’opinions, l’interroge, et Joinville se prononce, mais avec un surcroît d’énergie, pour l’avis du comte de Jaffa, disant hardiment « que le roi n’a encore rien mis de ses deniers dans l’entreprise, qu’il n’a dépensé que les deniers des clercs (du clergé) ; que si donc le roi y va de ses propres deniers pour la dépense et qu’il envoie quérir des chevaliers en Morée et outre-mer, à la nouvelle des avances et largesses du roi il lui viendra des chevaliers de toutes parts ; par quoi il pourra tenir la campagne l’espace d’un an ; et que, par le fait de sa demeurance, seront délivrés les pauvres prisonniers qui ont été pris au service de Dieu et au sien, lesquels n’en sortiront jamais si le roi s’en vaai ».

2454. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Nouvelles lettres de Madame, mère du Régent, traduites par M. G. Brunet. — I. » pp. 41-61

Ils différaient tous trois dans leurs croyances ; je pris la quintessence de leurs opinions et m’en formai ma religion. » Dans cette religion catholique ainsi définie en gros, qu’elle crut et qu’elle pratiqua en toute bonne foi, il restait des traces et bien des habitudes de son premier culte.

2455. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « M. Daru. Histoire de la république de Venise. — I. » pp. 413-433

Le père Chapet m’a dit que vous aviez dans la société les allures d’un homme fait, que tous ne donniez point dans le luxe, et que, si on avait quelque chose à vous reprocher, c’était peut-être un peu de singularité dans les opinions.

2456. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « William Cowper, ou de la poésie domestique (I, II et III) — I » pp. 139-158

Comme il s’est, dans la suite, prononcé en toute occasion contre les inconvénients de l’éducation publique, telle surtout qu’elle existait alors, on a cherché dans les circonstances de ses premières années à expliquer cette opinion qui s’accorde si bien d’ailleurs avec toute sa manière de sentir et de craindre.

2457. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Le président Hénault. Ses Mémoires écrits par lui-même, recueillis et mis en ordre par son arrière-neveu M. le baron de Vigan. » pp. 215-235

Et ce qui ne laisse pas d’être assez joli, le discours de M. de Morville eut beaucoup plus de succès que celui du président et l’effaça même dans l’opinion du jour.

2458. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « Une petite guerre sur la tombe de Voitture, (pour faire suite à l’article précédent) » pp. 210-230

Dès ce premier ouvrage il opposait assez finement la modestie de Voiture, ou du moins son bon goût à repousser les éloges trop directs, à la passion bien connue de Balzac pour les compliments, et à ce grand appétit de louange qu’il ne craignait pas de lui rappeler, en l’en supposant gratuitement guéri : Je suis assuré que s’il (Voiture) revenait au monde, et qu’il fût informé des bonnes qualités de M. de Girac et de la franchise de son procédé, il ferait tous ses efforts pour le satisfaire, et pour l’éclaircir de ses doutes ; car je suis obligé de rendre ce témoignage de lui, que je n’ai connu personne, jusques ici, qui souffrît de meilleure grâce qu’on le contredît et qu’on eût des opinions contraires aux siennes.

2459. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « La marquise de Créqui — I » pp. 432-453

Dans une même tête on trouve amassées les opinions de Pythagore et la philosophie de Kant, le pyrrhonisme de Voltaire et la croyance aux enchantements, etc.

2460. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « I » pp. 1-20

Mais cette opinion de quelques témoins clairvoyants et bien informés se transmit peu.

2461. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « Vie de Maupertuis, par La Beaumelle. Ouvrage posthume » pp. 86-106

Et ce piège, voyez combien vous étiez imprudent et coupable de le tendre : vous y avez fait tomber tout le premier un homme de votre sang et de votre nom, l’historiographe estimable, qui, en publiant votre ouvrage posthume et ce que vous y aviez préparé de pièces à l’appui, a cru vous rendre service, venger votre mémoire, réhabiliter votre caractère ; et il n’aura aidé, bien involontairement et de la meilleure foi du monde, qu’à confirmer en définitive l’opinion sévère qu’on avait conçue de vous, et à prouver à tous que vous étiez incurable dans votre procédé d’homme d’esprit foncièrement léger et sans scrupule.

2462. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Mémoires de l’abbé Legendre, chanoine de Notre-Dame secrétaire de M. de Harlay, archevêque de Paris. (suite et fin). »

On peut, entre autres passages de cette singulière oraison funèbre, citer le suivant, pour montrer à quel point l’opinion était alors défavorable à M. de Harlay, et quelle clameur publique il y avait à surmonter et à combattre lorsqu’on en venait à toucher l’article de ses mœurs : « Quand du côté de la paix et de la vérité, disait l’orateur, il n’aurait rien eu à se reprocher, est-il pour cela entièrement justifié ?

2463. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « La comtesse d’Albany par M. Saint-René Taillandier (suite et fin.) »

On a quelques témoignages directs de sa vie, à elle, par des lettres qu’elle écrivait en ces années, et dont MM. de Goncourt ont donné des extraits96 : « C’est un grand plaisir, disait-elle (décembre 1802), que de passer son temps à parcourir les différentes idées et opinions de ceux qui ont pris la peine de les mettre sur le papier.

2464. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance »

Mais ce qu’avait voulu le docte et impertinent Schlegel dans sa brochure, c’était surtout de se divertir avec ironie et de nous irriter, et comme il l’a dit ensuite lui-même : « C’était une expérience que je m’amusais à faire sur l’opinion littéraire, sachant d’avance qu’un orage épouvantable éclaterait contre moi. » Un autre Allemand, moins distingué et plus bizarre, un hôte de passage, le poète tragique et mystique, Zacharias Werner, qui séjourna à Coppet et qui passa ensuite par Florence, est annoncé par Sismondi à la comtesse en des termes assez piquants, et plus gais qu’on ne l’attendrait d’une plume aussi peu badine ; mais Werner y prêtait : « Werner, disait Sismondi, est un homme de beaucoup d’esprit ; — de beaucoup de grâce, de finesse et de gaieté dans l’esprit, ce à quoi il joint la sensibilité et la profondeur ; et cependant il se considère comme chargé d’aller prêcher l’amour par le monde.

2465. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid(suite et fin.)  »

L’opinion du voisin compte pour beaucoup.

2466. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Collé. »

Il s’appuie d’une opinion de Marivaux qui, ayant connu Rousseau plus jeune et quinze ans avant sa célébrité, lui avait assuré « qu’il l’avait vu l’homme du monde le plus simple, le plus uni et le moins enthousiaste », comme si cet enthousiasme couvant dans l’âme de Rousseau n’avait pas pu se dérober et se cacher à tous jusqu’au jour où il éclata.

2467. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette »

Marie-Antoinette, arrivée jeune en France et après des efforts bien sincères pour faire le bien, pour être approuvée et pour réussir, se trompa un peu de chemin et de moyens : rien ne saurait prévaloir contre cette opinion universelle qui est devenue un fait acquis de l’histoire.

2468. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite et fin.) »

On était dans une de ces dispositions bien connues où l’opinion a besoin d’apprendre quelque injustice du pouvoir et où elle s’en empare avidement, tout heureuse de l’exagérer.

2469. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Essai sur Talleyrand (suite.) »

« J’adopte cette opinion, et je crois que M. 

2470. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ALFRED DE MUSSET. » pp. 177-201

Bien qu’un poëte ne soit pas nécessairement un critique, que mille éléments suspects animent les jugements littéraires qu’il laisse tomber d’un ton d’oracle, et qu’on ne doive pas lui en demander un compte trop scrupuleux, pourtant la préface en vers de M. de Musset renferme, entre autres opinions contestables, un rapprochement entre Mérimée et Calderon, qui m’a semblé dépasser toutes les bornes de la licence poétique en pareille matière : L’un, comme Calderon et comme Mérimée, Incruste un plomb brûlant sur la réalité, etc.

2471. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « GRESSET (Essai biographique sur sa Vie et ses Ouvrages, par M. de Cayrol.) » pp. 79-103

. — Pour moi, en tout ceci, à l’occasion du livre de M. de Cayrol, je n’ai guère fait que commenter et développer, en l’adoucissant convenablement, l’opinion qu’avait exprimée Voltaire avec un bon sens malin et intéressé, je l’avoue, mais d’autant mieux aiguisé.

2472. (1861) La Fontaine et ses fables « Troisième partie — Chapitre II. De l’expression »

En cela encore, La Fontaine s’est écarté de l’opinion de son siècle.

2473. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXIIIe entretien. Chateaubriand, (suite) »

Tout le monde était d’accord dans ce salon, tant les grands crimes effacent les différences d’opinions et ne laissent survivre que l’honneur.

2474. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVII. Rapports d’une littérature avec les littératures étrangères et avec son propre passé » pp. 444-461

On ne saurait trop se défier de ces mirages du passé ou de l’éloignement : ils faussent à chaque instant l’opinion qu’une moitié de l’humanité se fait de l’autre moitié.

2475. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

Ce jeune célibataire a, sur elles, les opinions d’un vieux turc.

2476. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Adrienne Le Couvreur. » pp. 199-220

Le fidèle d’Argental, nommé légataire universel, ne crut pas compromettre son caractère de magistrat en acceptant cette mission de confiance, et il s’honora par là dans l’opinion.

2477. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de lord Chesterfield à son fils. Édition revue par M. Amédée Renée. (1842.) » pp. 226-246

Sur la religion, il dira, en répondant à quelques opinions tranchantes qu’avait exprimées son fils : « La raison de chaque homme est et doit être son guide ; et j’aurais autant de droit d’exiger que tous les hommes fussent de ma taille et de mon tempérament, que de vouloir qu’ils raisonnassent absolument comme moi. » En toutes choses, il est d’avis de connaître et d’aimer le bien et le mieux, mais de ne pas s’en faire le champion envers et contre tous.

2478. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Fontenelle, par M. Flourens. (1 vol. in-18. — 1847.) » pp. 314-335

Comme il n’est nullement touché du sentiment des autres, il ose être de son opinion non seulement avec bonne foi, mais avec une sorte d’audace et d’impudeur tranquille.

2479. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Saint-Évremond et Ninon. » pp. 170-191

Montaigne et Charron étaient alors les auteurs à la mode, et leur esprit aidait à cette liberté d’opinion.

2480. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Le duc de Lauzun. » pp. 287-308

Vous me prouviez, l’autre jour, que leur opinion avait un grand poids.

2481. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Essai sur Amyot, par M. A. de Blignières. (1 vol. — 1851.) » pp. 450-470

Dans sa dédicace des Vies de Plutarque à Henri II, il parle de lui humblement, plus humblement même qu’on ne le voudrait : « Non que j’eusse opinion qu’il pût issir (sortir) de moi, dit-il, personne si basse et si petite en toute qualité, chose qui méritât d’être mise devant les yeux de Votre Majesté. » Au concile de Trente, en septembre 1551, ayant eu à présenter les lettres de protestation du roi aux Pères du Concile et trouvant l’assemblée peu disposée à les recevoir : « Je filais le plus doux que je pouvois, écrit-il à son ambassadeur, me sentant si mal, et assez pour me faire mettre en prison si j’eusse un peu trop avant parlé. » Certes, un simple secrétaire, mais qui eût été de l’étoffe d’un Mazarin ou d’un D’Ossat, ou même d’un Fleury, se serait exprimé et se serait présenté autrement.

2482. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Le Brun-Pindare. » pp. 145-167

Voltaire, ainsi interpellé, tressaillit et vibra : il appela sans retard auprès de lui la nièce de Corneille, et Le Brun resta, dans l’opinion, le médiateur honorable et comme le parrain qui avait amené cette adoption.

2483. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Œuvres de Louis XIV. (6 vol. in-8º. — 1808.) » pp. 313-333

[NdA] Les poètes ne sont pas, en général, des témoins bien sûrs, mais leur suffrage ne fait ici que nous traduire l’opinion unanime.

2484. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le cardinal de Richelieu. Ses Lettres, instructions et papiers d’État. Publiés dans la Collection des documents historiques, par M. Avenel. — Premier volume, 1853. — I. » pp. 224-245

Richelieu cependant travaille à éclairer l’opinion ; il pense à l’Europe et dépêche trois ambassadeurs extraordinaires, l’un en Angleterre, l’autre en Hollande, et M. de Schomberg en Allemagne.

2485. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Œuvres de Frédéric le Grand (1846-1853). — I. » pp. 455-475

Nous allons représenter l’Œdipe de Voltaire, dans lequel je ferai le héros de théâtre ; j’ai choisi le rôle de Philoctète ; il faut bien se contenter de quelque chose… M. de Suhm, qui l’a compris, et qui lit, à travers cette indifférence soi-disant philosophique, le regret et le tourment d’une âme amoureuse des grandes choses, lui va toucher la fibre secrète et le rassure en lui disant : La réflexion que vous faites, Monseigneur, sur le bonheur qu’il y a à venir à propos dans le monde est des plus justes, et serait très propre à consoler le héros (le prince d’Anhalt) dont Votre Altesse Royale a une si haute opinion, si à ses qualités guerrières il savait joindre votre philosophie, Monseigneur.

2486. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Zaïre, d’après son opinion, n’était qu’une comédie. — Un jour, à la suite d’une discussion sur la tragédie, il avait dit à Arnault : « Faisons une tragédie ensemble. » Le poète avait répondu avec plus de fierté et de malice que de curiosité et de confiance : « Volontiers, général, mais quand nous aurons fait ensemble un plan de campagne. » Revenu en France avant que Bonaparte fût de retour d’Égypte, Arnault avait fait représenter sa tragédie des Vénitiens qui eut beaucoup de succès (16 octobre 1799) ; il la dédia « à Bonaparte, membre de l’Institut », et reconnut dans la dédicace que l’idée du cinquième acte était due au général.

2487. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Ivan Tourguénef »

Quand il a touché aux grands mouvements d’opinion qui ont agité la Russie contemporaine, sa franchise a blessé de tous côtés.

2488. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Saint-Simon »

Au fond, ce n’est pas là grand chose pour moi, qui méprise les opinions collectives et toutes les espèces de rassemblements, — ceux des Instituts comme ceux de la rue, — mais, je suis forcé de le dire : le mérite du livre existe, quoique reconnu et même couronné… En publiant les Lettres et Dépêches de l’ambassade d’Espagne 54, Drumont est un des premiers à bénéficier de la levée de ces scellés incompréhensibles mis, pendant si longtemps, sur les papiers du duc de Saint-Simon par d’imbécilles gouvernements.

2489. (1917) Les diverses familles spirituelles de la France « Chapitre v »

C’était son opinion avant la guerre ; il s’y confirme en décembre 1915, deux mois avant sa fin héroïque, « Je viens de lire la Bible.

2490. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XX. Le Dante, poëte lyrique. »

À elle appartenait ce premier âge des troubadours, qui sécularisa l’esprit en Europe, suscita devant l’Église une autre puissance d’opinion, commença le débat de la pensée libre contre le plus fort, et forma dans le midi de la France une race de chanteurs hardis et de poëtes populaires.

2491. (1890) La vie littéraire. Deuxième série pp. -366

Encore serait-il très fâché qu’elles demeurassent chastes à son préjudice, mais cela suffit pour former l’opinion. […] Il était fier et ambitieux ; il tenait à l’opinion comme y tiennent les enfants. […] Puis, regrettant, par une contradiction bien humaine, de paraître tel qu’il s’était montré, et d’avoir réussi à cacher ses bonnes qualités, il se plaignait d’être mal jugé, injustement condamné par l’opinion. […] Ceux qui me lisent savent que ma critique est bienveillante et que je me fais un agréable devoir d’exprimer toujours l’opinion la plus large sous la forme la plus douce. […] Selon Pyrrhon, « n’avoir d’opinion ni sur le bien ni sur le mal, voilà le moyen d’éviter toutes les causes de trouble.

2492. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre II. La Renaissance. — Chapitre I. La Renaissance païenne. » pp. 239-403

Les opinions chrétiennes se soumettent aux théologiens, qui se soumettent aux Pères. […] Vingt vers d’un poëte, douze lignes d’un traité sur l’agriculture, une colonne d’in-folio sur les armoiries, la description des poissons rares, un paragraphe d’un sermon sur la patience, le compte des accès de fièvre dans l’hypocondrie, l’histoire de la particule que, un morceau de métaphysique, voilà ce qui a passé dans son cerveau en un quart d’heure : c’est un carnaval d’idées et de phrases grecques, latines, allemandes, françaises, italiennes, philosophiques, géométriques, médicales, poétiques, astrologiques, musicales, pédagogiques, entassées les unes sur les autres, pêle-mêle énorme, prodigieux fouillis de citations entre-croisées, de pensées heurtées, avec la vivacité et l’entrain d’une fête de fous. « J’apprends, dit-il, de nouvelles nouvelles tous les jours,  — et les rumeurs ordinaires de guerre, pestes, incendies, inondations, vols, meurtres, massacres, météores, comètes, spectres, prodiges, apparitions, villes prises, cités assiégées en France, en Germanie, en Turquie, en Perse, en Pologne, etc. ; les levées et préparatifs journaliers de guerre et autres choses semblables qu’amène notre temps orageux, batailles livrées, tant d’hommes tués, monomachies, naufrages, pirateries, combats sur mer, paix, ligues, stratagèmes et nouvelles alarmes,  — une vaste confusion de vœux, désirs, actions, édits, pétitions, procès, défenses, proclamations, plaintes, griefs,  — sont chaque jour apportés à nos oreilles. —  De nouveaux livres chaque jour, pamphlets, nouvelles, histoires, catalogues entiers de volumes de toute sorte, paradoxes nouveaux, opinions, schismes, hérésies, controverses en philosophie, en religion, etc. […] Ses écrits ne sont que des opinions qui se donnent pour des opinions ; même le principal est une réfutation des erreurs populaires. […] I hear new news every day : and those ordinary rumours of war, plagues, fires, inundations, thefts, murders, massacres, meteors, comets ; spectrums, prodigies, apparitions ; of towns taken, cities besieged in France, Germany, Turkey, Persia, Poland, etc., daily musters and preparations, and such like, which these tempestuous times afford, battles fought, so many men slain, monomachies, shipwrecks, piracies and sea-fights, peace, leagues, stratagems, and fresh alarms — a vast confusion of vows, wishes, actions, edicts, petitions, lawsuits, pleas, laws, proclamations, complaints, grievances — are daily brought to our ears : new books every day, pamphlets, currantoes, stories, whole catalogues of volumes of all sorts, new paradoxes, opinions, schisms, heresies, controversies in philosophy, religion, etc.

2493. (1913) Poètes et critiques

Mais c’est ici le point à noter : Richepin a besoin de faire rentrer ces pièces d’origine grecque dans son cadre des Gueux des Champs, et de les rallier, en quelque sorte, à l’opinion communiste qui inspire les morceaux voisins ; il imagine donc que c’est un vieux gueux qui a façonné la flûte, et que les enfants à cheval sur le bouc sont de tout petits mendiants. […] Les gens enquête d’idées toutes faites et d’opinions toutes mâchées ont adopté sans discussion cette formule dédaigneuse. […] C’est au lendemain de la mort que s’opère, pour la poésie, le départ, entre l’œuvre qui doit survivre, et l’œuvre, qui, malgré les apparences, ou en dépit parfois de l’opinion, ne survivra pas, parce qu’elle n’a jamais vécu. […] Presque aussitôt, par besoin de s’attacher à l’opinion « la plus nouvelle et la plus poétique », se produit l’adhésion, très réfléchie, et non moins obstinée, à la métaphysique panthéiste. […] N’allons pas nous tromper à cette bonhomie d’allures ; elle voile une âme de feu : « Je ne puis pas souffrir qu’on ne soit pas de mon avis… Il n’y a pas des opinions, il y a de la vérité. » Ce n’est pas celui-ci qui se résignerait à préférer ce qui lui plaît, sans exclure avec force ce qu’il n’aime pas.

2494. (1899) La parade littéraire (articles de La Plume, 1898-1899) pp. 300-117

Il est donc inutile, selon moi (et je crois exprimer ici l’opinion générale de toute la jeunesse intellectuelle), il est donc inutile d’essayer de relever des institutions qui se sont compromises par tant d’intrigues dégoûtantes, de bas marchandages et de scandales. […] On se souvient sans doute de mon opinion sur l’école Romane, je l’ai exposée incidemment et j’accepte avec joie le prétexte qui me permet aujourd’hui de la préciser davantage. […] Il est, au contraire, beaucoup plus convenable d’envisager cet ouvrage comme une suite de pensées et d’opinions dont Napoléon n’aurait été que le prétexte.

2495. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

Jouir d’une mine qu’on a jugée la plus avantageuse, qu’on ne voudrait pas changer pour une autre, et voir devant ses yeux un maudit visage qui vient chercher noise à la bonne opinion que vous avez du vôtre, qui vous présente hardiment le combat, et qui vous jette dans la confusion de douter un moment de la victoire ; qui voudrait enfin accuser d’abus le plaisir qu’on a de croire sa physionomie sans reproche et sans pair : ces moments-là sont périlleux ; je lisais tout l’embarras du visage insulté : mais cet embarras ne faisait que passer.

2496. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Sénac de Meilhan. — II. (Fin.) » pp. 109-130

Je ne me charge pas de serrer de trop près les contradictions qu’on relèverait en lui ; il est de ceux qui eurent le moins à rétracter et à retirer après 89 de leurs opinions d’auparavant.

2497. (1870) Causeries du lundi. Tome X (3e éd.) « Saint-Martin, le Philosophe inconnu. — I. » pp. 235-256

Ils croient traiter des vérités d’intelligence, tandis qu’ils ne traitent que des affections et des sentiments ; ils ne voient pas que la femme passe tout, pourvu qu’elle trouve l’harmonie de ses sentiments ; ils ne voient pas qu’elle sacrifie volontiers à cette harmonie de ses sentiments l’harmonie des opinions… Tenons-nous en garde contre les fournaises.

2498. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — II » pp. 112-130

Ceux qui ne le connaissent pas le croient dévoré d’ambition ; non, il n’en est qu’occupé ; il la médite même gaiement, à cause de l’opinion qu’il a de sa supériorité ; il se voit lui-même au-dessus de tout, il croît apercevoir les fils des marionnettes, il se moque de tout, il se rit de tout et perpétuellement.

2499. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Souvenirs militaires et intimes du général vicomte de Pelleport, publiés par son fils. » pp. 324-345

Je ne puis formuler d’opinion à ce sujet, n’ayant rien constaté par moi-même ; ce que je sais, c’est qu’en 1810 toute l’armée, et par armée j’entends la réunion de ceux qui combattent ; et non des fournisseurs et de tant d’autres, était restée pure et honnête.

2500. (1870) Causeries du lundi. Tome XIV (3e éd.) « François Villon, sa vie et ses œuvres, par M. Antoine Campaux » pp. 279-302

L’éminent critique crut devoir défendre de tout point l’aperçu de Boileau et l’appuya par des raisons réfléchies : il voyait dans Villon un novateur, mais utile et salutaire, un de ces écrivains qui rompent en visière aux écoles artificielles, et qui parlent avec génie le français du peuple ; contrairement à l’opinion qui lui préférait l’élégant et poli Charles d’Orléans, il rattachait à l’écolier de Paris le progrès le plus sensible qu’eût fait la poésie française depuis le Roman de la rose.

2501. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe, et d’Eckermann »

Le grand poëte n’avait cessé d’être de loin son « étoile polaire. » En recevant le volume de poésies, Gœthe reconnut vite un de ses disciples et de ses amis comme le génie en a à tous les degrés ; non content de faire à l’auteur une réponse de sa main, il exprima tout haut la bonne opinion qu’il avait conçue de lui.

2502. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite.) »

Lorsque plus tard, tout rempli de ce qui lui semblait sa découverte, Horace Vernet voulut faire prévaloir ses idées devant l’Institut, lorsqu’il soutint son opinion, sa thèse sur certains rapports qui existent entre le costume des anciens Hébreux et celui des Arabes modernes, il trouva les esprits prévenus.

2503. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Gavarni. »

C’est l’opinion commune, et elle a prévalu, bien qu’elle ne soit point exacte.

2504. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Dieu m’est témoin pourtant que c’est bien une crainte que j’exprimais, et non une opinion tant soit peu favorable à une telle issue, ni l’ombre d’un assentiment.

2505. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Corneille. Le Cid (suite.) »

Il exprime en cela l’opinion de la plupart des seigneurs et gentilshommes français qui écoutaient le Cid.

2506. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Jean-Bon Saint-André, sa vie et ses écrits. par M. Michel Nicolas. (suite et fin.) »

Il disait en juin 1795, désavouant en partie la rigueur de ses premières opinions : « Je voyais alors la France sous un point de vue différent de celui où je la vois aujourd’hui. » 34.

2507. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Catinat (suite.) »

Catinat avait là-dessus une certaine inquiétude : « Je l’ai faite si agité et avec tant de précipitation, écrivait-il à son frère, que je ne sais si tu la trouveras bien ; je te prie que le tout ne soit que pour toi. » Et en apprenant l’approbation qu’elle avait reçue : « Je l’écrivis dans l’enthousiasme ; quand elle fut partie, je la relus et je n’en avais pas trop bonne opinion, je te l’ai même mandé : c’est qu’il y a des occasions où il faut laisser parler la nature.

2508. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Œuvres françaises de Joachim Du Bellay. [II] »

Il ne se pique point d’ailleurs d’une stoïque opiniâtreté d’opinion, « principalement en matière de Lettres ».

2509. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Lamartine — Lamartine »

La Révolution frappa sa famille comme toutes celles qui tenaient à l’ordre ancien par leur naissance et leurs opinions : les plus reculés souvenirs de Lamartine le reportent à la maison d’arrêt où on le menait visiter son père.

2510. (1869) Portraits contemporains. Tome I (4e éd.) « Victor Hugo — Victor Hugo en 1831 »

Ses opinions politiques et religieuses ont subi quelque transformation avec l’âge et la leçon des événements ; ses idées de poésie et d’art se sont de jour en jour étendues et affermies.

2511. (1870) Portraits contemporains. Tome II (4e éd.) « M. ULRIC GUTTINGUER. — Arthur, roman ; 1836. — » pp. 397-422

Guttinguer avait publié vers 1828, Amour et Opinion, les mœurs de l’époque impériale, celles de 1815, étaient déjà bien exprimées : élégie de fin d’Empire, écrite par un ex-garde d’honneur, où les personnages sont de beaux colonels et des généraux de vingt-neuf ans, de jeunes et belles comtesses de vingt-cinq ; où la scène se passe dans des châteaux, et le long des parcs bordés d’arbres de Judée et de Sainte-Lucie : en tout très-peu de Waterloo. — Mais Arthur est le vrai, le seul roman de M.

2512. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « LE COMTE XAVIER DE MAISTRE. » pp. 33-63

. ; son opinion était partagée par plusieurs personnes de sa société.

2513. (1870) Portraits contemporains. Tome III (4e éd.) « M. CHARLES MAGNIN (Causeries et Méditations historiques et littéraires.) » pp. 387-414

En introduisant ce brin de politique entre des pages plus fraîches et restées plus neuves, en y oubliant, comme par mégarde, ce coin de cocarde, le critique littéraire a voulu sans doute témoigner qu’il avait sur certains points des opinions, des principes, rappeler qu’il les avait soutenus, et faire entendre qu’il s’en souvenait comme de tout le reste.

2514. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Pierre Corneille »

Il se mit en relation avec les beaux esprits et les poëtes du temps, surtout avec ceux de son âge, Mairet, Scudery, Rotrou : il apprit ce qu’il avait ignoré jusque-là, que Ronsard était un peu passé de mode, et que Malherbe, mort depuis un an, l’avait détrôné dans l’opinion ; que Théophile, mort aussi, ne laissait qu’une mémoire équivoque et avait déçu les espérances, que le théâtre s’ennoblissait et s’épurait par les soins du cardinal-duc ; que Hardy n’en était plus à beaucoup près l’unique soutien, et qu’à son grand déplaisir une troupe de jeunes rivaux le jugeaient assez lestement et se disputaient son héritage.

2515. (1869) Cours familier de littérature. XXVIII « CLXVIIIe entretien. Fénelon, (suite) »

C’était la justification, par les textes tirés des livres et des opinions même des oracles de l’Église, de l’amour désintéressé de Dieu.

2516. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre III. L’Histoire »

Un immense mouvement d’opinion, en Angleterre et par toute la chrétienté, obligea le roi assassin à s’humilier, et à faire pénitence sur le tombeau du martyr.

2517. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre II. La première génération des grands classiques — Chapitre II. Corneille »

Rien de plus simple que les mouvements coordonnés des caractères qui s’opposent : qiu’on regarde, si l’on veut, les relations d’Attale et de Nicomède, et l’évolution du caractère d’Attale, soit en lui-même, soit dans l’opinion que Nicomède en prend, il y a aussi du mouvement dans chaque caractère, grâce au déplacement de la volonté qui suit la raison : je n’en veux pour exemple que Polyeucte et Pauline, et surtout cet admirable Auguste.

2518. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « La jeunesse du grand Condé d’après M. le duc d’Aumale »

Il y a tels sentiments qu’ils doivent avoir, telles opinions qu’ils doivent professer, et cela quand même dans leur for intérieur ils en auraient de toutes différentes.

2519. (1854) Histoire de la littérature française. Tome I « Livre II — Chapitre premier »

Il y a des opinions tranchées ; il y en a d’intermédiaires, qui hésitent entre le blâme et l’éloge et qui atténuent toutes choses.

2520. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre quatrième »

S’il fallait avoir une opinion sur les élégiaques des deux époques, je préférerais au naturel de Parny et de Bertin même, le galant de Fontenelle ; et combien plus celui dont s’est moqué Boileau !

2521. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XVIII. Formule générale et tableau d’une époque » pp. 463-482

Bossuet ne le nomme pas, mais il le commente et reproduit celles de ses opinions qui ne sont pas opposées au dogme.

2522. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — CHAPITRE XIV »

Que nous importent les opinions de ce drôle sur Dieu et sur l’âme ?

2523. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Huet, évêque d’Avranches, par M. Christian Bartholmèss. (1850.) » pp. 163-186

Vous êtes si prompt, et vous soutenez vos opinions avec une impétuosité si grande, qu’il semble qu’elles vous deviennent une passion.

2524. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « La duchesse du Maine. » pp. 206-228

… L’idée qu’elle a d’elle-même est un préjugé qu’elle a reçu comme toutes ses autres opinions.

2525. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Œuvres de Condorcet, nouvelle édition, avec l’éloge de Condorcet, par M. Arago. (12 vol. — 1847-1849.) » pp. 336-359

Dans l’intervalle du 20 juin au 10 août, Condorcet ne cesse, par ses articles, de chauffer ou du moins de caresser l’opinion exaltée, et de témoigner hautement son désir de la voir se porter jusqu’au dernier éclat.

2526. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « L’abbé de Choisy. » pp. 428-450

Ce voyage de Siam réhabilita jusqu’à un certain point l’abbé de Choisy dans l’opinion et acheva de le rendre singulier, mais d’une singularité moins compromettante que celle qu’il s’était faite dans sa jeunesse.

2527. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame de Lambert et madame Necker. » pp. 217-239

Elle n’était pas insensible à ces traits, car elle tenait avant tout à l’opinion.

2528. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Madame Necker. » pp. 240-263

., etc. » C’était cette foule de beaux esprits plus ou moins galants et mécréants ; c’était l’abbé Arnaud, l’abbé Raynal, c’était l’abbé Morellet à qui elle s’adressait, l’un des premiers, pour fonder son salon : La conversation y était bonne, nous dit Morellet, quoiqu’un peu contrainte par la sévérité de Mme Necker, auprès de laquelle beaucoup de sujets ne pouvaient être touchés, et qui souffrait surtout de la liberté des opinions religieuses.

2529. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « L’abbé Maury. Essai sur l’éloquence de la chaire. (Collection Lefèvre.) » pp. 263-286

Celle des sciences ne signifiait rien dans l’opinion, non plus que celle des inscriptions.

2530. (1865) Causeries du lundi. Tome V (3e éd.) « Rivarol. » pp. 62-84

Et ceci encore : Que l’histoire vous rappelle que partout où il y a mélange de religion et de barbarie, c’est toujours la religion qui triomphe ; mais que partout où il y a mélange de barbarie et de philosophie, c’est la barbarie qui l’emporte… En un mot, la philosophie divise les hommes par les opinions, la religion les unit dans les mêmes principes ; il y a donc un contrat éternel entre la politique et la religion.

2531. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Armand Carrel. — II. (Suite.) Janvier 1830-mars 1831. » pp. 105-127

Voici le point très net : ne point continuer la Chambre née avant les événements, ne point la proroger, mais la dissoudre franchement, et consulter l’opinion vive du pays ; obtenir de lui la même Chambre à très peu près peut-être, mais retrempée et munie d’un droit incontestable.

2532. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Beaumarchais. — II. (Suite.) » pp. 220-241

Le lendemain de son blâme par le Parlement et de son triomphe devant l’opinion, Beaumarchais me paraît être entré dans un léger état d’ivresse et d’exaltation dont il ne sortira plus, et qui se conciliera très bien toujours avec beaucoup d’habileté et de présence d’esprit dans le détail.

2533. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Bernardin de Saint-Pierre. — I. » pp. 414-435

Cela ne diminue rien à ma reconnaissance, et me donne de vous la plus haute opinion, puisque vous m’avez obligé alors que je devais vous être suspect.

2534. (1893) La psychologie des idées-forces « Tome second — Livre sixième. La volonté — Chapitre premier. Existence de la volonté »

Ne voir des actes que là où les bras font de grands gestes et où les jambes se remuent, c’est une opinion enfantine.

2535. (1888) Préfaces et manifestes littéraires « Histoire » pp. 179-240

On a reproché aux auteurs, ici, des opinions ; là, des indifférences politiques. — Les auteurs n’ont rien à répondre.

2536. (1889) L’art au point de vue sociologique « Introduction »

On a dit que l’art, en devenant plus réaliste, devait se matérialiser ; Guyau montre ce qu’il y a d’inexact dans cette opinion.

2537. (1889) Écrivains francisés. Dickens, Heine, Tourguénef, Poe, Dostoïewski, Tolstoï « Henri Heine »

Ce qui est constitutionnel dans Heine, c’est l’instabilité des sentiments et des sensations, une instabilité qui rompt la suite de ses moindres poèmes, qui le fait terminer une pièce triste par une gambade, et une épigramme par un sanglot, qui le pousse dans tous les genres, dans toutes les opinions, dans toutes les liaisons, et du salon de Rahel Lewin dans le mariage d’une grisette à peu près nulle.

2538. (1864) William Shakespeare « Deuxième partie — Livre I. Shakespeare — Son génie »

En reviendrions-nous peu à peu, dans les régions doctes, à la métonymie terme de chimie, et à l’opinion de Pradon sur la métaphore ?

2539. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre I. La critique » pp. 45-80

Inversement à l’opinion générale la vente d’un livre est en raison directe de son succès moral.

2540. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre X. Des Livres nécessaires pour l’étude de la Langue Françoise. » pp. 270-314

Ces entretiens avoient été extrêmement goûtés, malgré le style maniéré de l’auteur ; mais après la lecture de la critique, ceux qui avoient été le plus favorables à cet ouvrage, rabbatirent bien de l’opinion trop avantageuse qu’ils en avoient conçue.

2541. (1759) Réflexions sur l’élocution oratoire, et sur le style en général

Le propre de l’éloquence est non seulement de remuer, mais d’élever l’âme ; c’est l’effet même de celle qui ne paraît destinée qu’à nous arracher des larmes ; le pathétique et le sublime se tiennent ; en se sentant attendri, on se trouve en même temps plus grand, parce qu’on se trouve meilleur ; la tristesse délicieuse et douce, que produisent en nous un discours, un tableau touchant, nous donne bonne opinion de nous-mêmes par le témoignage qu’elle nous rend de la sensibilité de notre âme ; ce témoignage est une des principales sources du plaisir qu’on goûte en aimant, et en général de celui que les sentiments tendres et profonds nous font éprouver.

2542. (1818) Essai sur les institutions sociales « Chapitre X. Première partie. Théorie de la parole » pp. 268-299

L’homme a besoin d’être aidé à produire ses pensées ; s’il n’a pas la confiance intime d’un appui dans l’opinion ou le sentiment de ses contemporains, il s’effraie de sa solitude ; s’il ne sent pas dans les autres l’influence qu’il se croyait appelé à exercer, le découragement vient le saisir, et il garde un silence qui le dévore : il n’est pas assez assuré dans sa propre conscience parce qu’il est éminemment un être social.

2543. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Deuxième partie — Chapitre I. La quantité des unités sociales : nombre, densité, mobilité »

C’est en ce sens que l’extension de l’Empire aidait l’opinion romaine à penser l’humanité.

2544. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIV. »

Là, plus qu’ailleurs, se sont marqués les rapides contrecoups de la France sur l’imagination et la pensée des hommes : d’abord, l’action des lettres françaises et de cette liberté spéculative reçue avec tant d’ardeur par les Italiens, depuis le noble philanthrope Beccaria jusqu’au noble poëte Alfieri ; bientôt après, un sentiment tout opposé, l’inquiétude, la résistance, soulevées dans quelques âmes du moins par les instincts de liberté et de justice contre le despotisme de la conquête et de l’opinion ; enfin, comme un dédommagement de tout, l’association plus ou moins apparente ou réelle du peuple assujetti dans les grandeurs du peuple conquérant assujetti lui-même.

2545. (1908) Esquisses et souvenirs pp. 7-341

Je ne reviendrai pas sur cette affaire ; j’y chercherai seulement l’occasion de rappeler l’opinion littéraire de Sainte-Beuve sur Hugo. […] Contre l’opinion générale, deux ou trois journaux s’étaient mis dans la tête d’empêcher le spectacle : « Hé ! […] L’opinion de Descartes sur les bêtes n’a rien de choquant, bien que le blasphémateur de Caria ait pu l’interpréter dans un sens dérisoire. […] Vous voulez ménager l’opinion des sots ? […] Il y monte, il se redresse, il se croise les bras. « Messieurs, commence-t-il, vous connaissez mes opinions… mon passé… ma famille… etc., etc. » Il traite les ministres de δέρματα, mot que je suis obligé de traduire librement par sales peaux.

2546. (1900) Quarante ans de théâtre. [II]. Molière et la comédie classique pp. 3-392

Si vous arrivez au spectacle avec cette opinion préconçue, vous vous gâterez vous-même tout votre plaisir, et vous ne jouirez pas, comme il faut, du jeu si fin, si varié, de Delaunay. […] Inspire-nous le mépris des opinions reçues, et le courage de porter la main sur les vaines idoles ! […] Ce nombre inaccoutumé de vers, traînant dans la prose du maître, avait accrédité cette opinion, qui, une fois émise, avait été acceptée sans contrôle, que Molière avait d’abord songé à écrire Le Sicilien en vers, que, pressé par le temps, il s’était réduit à la prose pour aller plus vite, et c’est ce qui expliquait comment il subsistait dans sa seconde version quelques vestiges épars du premier travail. […] C’est ma grande querelle avec Coquelin cadet ; nous nous enfonçons de plus en plus, chacun de notre côté, dans notre opinion, et il est probable à cette heure que nous mourrons tous les deux dans l’impénitence finale.

2547. (1888) Impressions de théâtre. Première série

Je m’érigerai en censeur des actions d’autrui, jugerai mal de tout le monde, et n’aurai bonne opinion que de moi. […] Je me contente de n’avoir aucune opinion sur une question insoluble et qui, au surplus, m’intéresse médiocrement. […] Cette thèse peut, à la rigueur, se soutenir aussi bien que l’opinion contraire, et ce n’est point aux arguments des lévites de Molière que je trouve à reprendre. […] Cette opinion est radicalement antichrétienne, mais elle n’est pas prodigieusement originale. […] Aussi est-ce l’Opinion publique qui traîne le malheureux à la recherche d’une compagne qui ne pouvait le sentir.

2548. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Mademoiselle Aïssé »

Craufurd72 rentre tout à fait dans cette opinion qu’on avait généralement, et on sent qu’il ne change d’avis que sur la prétendue preuve écrite. […] Lorsque d’Alembert publia en 1753 ses deux premiers volumes de Mélanges, Mme du Deffand consulta les diverses personnes de sa société ; elle alla, pour ainsi dire, aux voix dans son salon, et mit à part les avis divers pour que l’auteur en pût faire ensuite son profit ; c’est sans doute ce qui a procuré l’opinion du chevalier d’Aydie qu’on trouve recueillie dans les Œuvres de d’Alembert82.

2549. (1866) Histoire de la littérature anglaise (2e éd. revue et augmentée) « Livre V. Les contemporains. — Chapitre I. Le Roman. Dickens. »

Plantez ce talent dans une terre anglaise ; l’opinion littéraire du pays dirigera sa croissance et expliquera ses fruits. Car cette opinion publique est son opinion privée ; il ne la subit pas comme une contrainte extérieure, il la sent en lui comme une persuasion intime ; elle ne le gêne pas, elle le développe, et ne fait que lui répéter tout haut ce qu’il se dit tout bas.

2550. (1861) Cours familier de littérature. XI « LXIIIe entretien. Cicéron (2e partie) » pp. 161-256

Je veux de même, sans oublier mon ancien caractère d’orateur, m’attacher aux matières de philosophie : je les trouve infiniment plus grandes, plus abondantes, plus fécondes que celles de la tribune ; mon opinion a toujours été que ces questions élevées, pour ne rien dire de leur intérêt et de leur beauté, doivent être traitées avec étendue et avec toutes les perfections de style qui dépendent du langage. […] Puisque donc le consentement de tous les hommes est la voix de la nature, et que tous les hommes, en quelque lieu que ce soit, conviennent qu’après notre mort il y a quelque chose qui nous intéresse, nous devons nous rendre à cette opinion, et d’autant plus qu’entre les hommes ceux qui ont le plus d’esprit, le plus de vertu, et qui, par conséquent, savent le mieux où tend la nature, sont précisément ceux qui se donnent le plus de mouvement pour mériter l’estime de la postérité……………………………………………………………………………………………… « C’est ce dernier sentiment que j’ai suivi dans ma Consolation, où je m’explique en ces termes : On ne peut absolument trouver sur la terre l’origine des âmes, car il n’y a rien dans les âmes qui soit mixte et composé, rien qui paraisse venir de la terre, de l’eau, de l’air ou du feu.

2551. (1864) Cours familier de littérature. XVII « CIe entretien. Lettre à M. Sainte-Beuve (1re partie) » pp. 313-408

Il méprise l’opinion ou plutôt la néglige, et sait surtout que le bonheur vient du dedans. […] À une époque d’ailleurs où les haines s’apaisent, où les partis se fondent, et où toutes les opinions honnêtes se réconcilient dans une volonté plus éclairée du bien, les réminiscences de colère et d’aigreur seraient funestes et coupables, si elles n’étaient avant tout insignifiantes.

2552. (1896) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Sixième série « Louis Veuillot »

Cet homme fut d’une étrange franchise et, contre l’opinion commune, doux et humble de coeur. […] Et c’est encore une des marques de cette dureté de logique, qui eût pu faire tout aussi bien de lui, certaines circonstances étant données, un sectaire du socialisme ou de l’anarchie, et qui, en tout cas, ne lui permettait pas de s’en tenir à aucune de ces opinions qu’on appelle « modérées » et qui sont comme de faux ménages (souvent commodes) d’idées et de sentiments contradictoires.

2553. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Et au sujet de Veuillot, il s’étend sur son intimité avec l’écrivain catholique, malgré les divergences d’opinions, et sur le dîner qu’ils faisaient, toutes les semaines, ensemble, déclarant que Veuillot lui pardonnait plutôt de n’avoir pas fait baptiser son fils, que de s’être marié à une huguenote. […] Il célèbre leur discrétion à l’égard de votre vie, de vos opinions, de vos lectures, de vos journaux, et ne trouve dans sa mémoire comme blâme de ses relations, quand il recevait la visite des actrices du Théâtre-Libre, ou de femmes du quartier Latin, en toilette exubérante, que ce rappel ironique du frère qui le soignait, jetant à haute voix dans ce monde féminin : « C’est l’heure de prendre votre lavement ! 

2554. (1925) La fin de l’art

Je sais bien que l’opinion des lecteurs bourgeois d’un journal n’est pas l’opinion publique, mais seulement l’opinion moyenne.

2555. (1889) Essai sur les données immédiates de la conscience « Chapitre III. De l’organisation des états de conscience. La liberté »

C’est dans les circonstances solennelles, lorsqu’il s’agit de l’opinion que nous donnerons de nous aux autres et surtout à nous-mêmes, que nous choisissons en dépit de ce qu’on est convenu d’appeler un motif ; et cette absence de toute raison tangible est d’autant plus frappante que nous sommes plus profondément libres. […] D’où résulte enfin, quelque paradoxale que cette opinion puisse paraître, que la supposition d’un rapport d’inhérence mathématique entre les phénomènes extérieurs devrait entraîner, comme conséquence naturelle ou tout au moins plausible, la croyance à la liberté humaine.

2556. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « La religion dynamique »

Telle a d’ailleurs été l’opinion des grands mystiques eux-mêmes. […] Et, certes, celui qui professe une telle opinion n’aura pas de peine à la faire accepter.

2557. (1932) Les deux sources de la morale et de la religion « L’obligation morale »

Il y a d’ailleurs une forte part de vérité dans cette opinion ; car s’il est relativement aisé de se maintenir dans le cadre social, encore a-t-il fallu s’y insérer, et l’insertion exige un effort. […] L’ironie qu’il promène avec lui est destinée à écarter les opinions qui n’ont pas subi l’épreuve de la réflexion et à leur faire honte, pour ainsi dire, en les mettant en contradiction avec elles-mêmes. […] Car la justice relativement stable, close, qui traduit l’équilibre automatique d’une société sortant des mains de la nature, s’exprime dans des usages auxquels s’attache « le tout de l’obligation », et ce « tout de l’obligation » vient englober, au fur et à mesure qu’elles sont acceptées par l’opinion, les prescriptions de l’autre justice, celle qui est ouverte à des créations successives.

2558. (1925) Proses datées

Or, ces deux opinions peuvent sembler au moins discutables, mais, pour Dumas fils, elles veulent dire : « Comment, quand il y a un Dumas, un Hugo oserait-il aviser de toucher au théâtre et au roman, d’écrire un Hernani ou une Notre-Dame de Paris ?  […] En pareil cas, le rôle du critique est d’aider l’écrivain par une sympathie plutôt volontairement exagérée et de contribuer ainsi à faire partager au grand public une opinion encore pour lui prématurée. […] Pendant la révolution, malgré ses opinions républicaines, il rendit d’importants services à cette famille dont l’influence le fit attacher sous l’Empire à l’administration du Sénat. […] Ses opinions les plus étranges offrent on ne sait quoi de froidement, de profondément judicieux. […] En les lisant avec quelque peu d’attention, on y reconnaît aisément les préférences des signataires et les deux camps qu’ils forment arborent les couleurs distincte de leurs opinions ; mais, si tranchées et si contradictoires qu’elles semblent en apparence, elles aboutissent néanmoins, en fin de compte, à une entente qui n’est pas plus en faveur de la prédominance de l’esprit classique quelle l’intransigeance de l’esprit romantique et conclut entre eux à une sorte d’égalité.    

2559. (1878) Nos gens de lettres : leur caractère et leurs œuvres pp. -316

Baudelaire, entrer de plain-pied dans ses Fleurs du Mal ; mais j’avais à cœur de détruire l’opinion absurde et généralement admise qui l’apparente à Théodore de Banville : ce ne sont pas les bourdes les plus pesantes qui font le moins vite leur chemin. […] L’un dit : « En somme, c’est corsé » ; Le second : « Cela ne manque pas de chien » ; Le troisième assura « que l’auteur avait du tempérament » ; Et les trois feuilletons allèrent, chacun de son côté, faire l’opinion parisienne du lendemain. La conclusion, je le répète, était loin de combler mes désirs, bien que je comprisse la valeur des termes où ces messieurs avaient résumé leur opinion, et que je ne fusse pas absolument étranger à cette formule, sacrée aux critiques du jour : « Il a du tempérament, « Il n’a pas de tempérament. » Avez-vous du tempérament, ami romancier ? […] C’est l’avis de l’horloger, l’opinion de l’instituteur, la conviction des adjoints. […] Critiques à la main Une page de Chamfort. — Le vers, la rhingrave et l’habit noir. — Jules Janin et le style à rallonges. — Je prends ton bien où je le trouve. — Celui qui veut se faire passer pour l’auteur. — Les mots incompris. — La fosse aux ours. — Raffinements de Sainte-Beuve. — Phrases à proscrire. — Opinion du jeune homme « qui a du bon sens » sur Balzac et sur Scribe. — S’il est avantageux d’être pauvre pour écrire. — Ce fragment est-il de Paul-Louis Courier ?

2560. (1874) Portraits contemporains : littérateurs, peintres, sculpteurs, artistes dramatiques

Les portraits peu flattés qu’il a tracés d’Étienne Lousteau, de Nathan, de Vernisset, d’Andoche Finot, représentent assez bien son opinion réelle à l’endroit de la presse. […] A dater de là, Balzac grandit considérablement dans l’opinion, et l’on cessa enfin de le considérer « comme le plus fécond de nos romanciers », phrase stéréotypée qui l’irritait autant que celle-ci « l’auteur d’Eugénie Grandet. […] Absorbé par son œuvre, Balzac ne pensa qu’assez tard au théâtre, pour lequel l’opinion générale jugea, à tort selon nous, d’après quelques essais plus ou moins chanceux, qu’il n’était guère propre. […] La Main droite et la Main gauche fut un des grands succès de l’Odéon et prouva, malgré l’opinion des charpentiers dramatiques, qu’un romancier pouvait faire une pièce. […] Il ne désespérait pas, disait-il, de me ramener à son opinion.

2561. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « M. Boissonade. »

Il était des élégants du temps, des muscadins et un peu de la jeunesse dorée ; il put être soupçonné d’en avoir les opinions.

2562. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Racine — I »

Ces deux ouvrages si soudains, si imprévus, si différents des autres, ne démentent-ils pas notre opinion sur Racine ?

2563. (1862) Portraits littéraires. Tome I (nouv. éd.) « Du génie critique et de Bayle »

On ne sera pas fâché de lire ici l’opinion de La Fontaine sur Bayle ; elle est digne de tous deux.

2564. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre troisième. L’esprit et la doctrine. — Chapitre IV. Construction de la société future »

Du moment où, entrant dans un corps, je ne réserve rien de moi-même, je renonce par cela seul à mes biens, à mes enfants, à mon Église, à mes opinions.

2565. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre III. Les grands artistes classiques — Chapitre I. Les mondains : La Rochefoucauld, Retz, Madame de Sévigné »

Saint-Evremond nous intéresse surtout par ses opinions philosophiques.

2566. (1895) Histoire de la littérature française « Quatrième partie. Le dix-septième siècle — Livre IV. La fin de l’âge classique — Chapitre II. La Bruyère et Fénelon »

Désireux de plaire à tout le monde, il proposa une dizaine de raisons pour et contre l’une et l’autre opinion, encouragea les modernes en approuvant les anciens, et finit par s’échapper sans conclure.

2567. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre III. Les tempéraments et les idées — Chapitre II. La jeunesse de Voltaire, (1694-1755) »

Le siècle l’avertit de se donner au combat philosophique, s’il veut rester maître de l’opinion.

2568. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Deuxième série « Ferdinand Fabre  »

Quelques-uns même des sentiments dont est formée sa vertu sont réprouvés ou suspectés par l’Église : ainsi, dans certains cas, le souci de l’honneur, la tolérance pour les opinions, l’indulgence pour certaines faiblesses.

2569. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Victor Hugo, Toute la Lyre. »

C’est affaire de sentiment et d’ « opinion » matière aux disputes et aux jugements incertains des hommes.

2570. (1895) La musique et les lettres pp. 1-84

Les gouvernements changent ; toujours la prosodie reste intacte : soit que, dans les révolutions, elle passe inaperçue ou que l’attentat ne s’impose pas avec l’opinion que ce dogme dernier puisse varier.

2571. (1889) Histoire de la littérature française. Tome IV (16e éd.) « Chapitre huitième »

Montesquieu nous fait plutôt des confidences à voix basse sur des choses supérieures, curieuses, rares, qu’il ne veut nous amener de force à des opinions contentieuses.

2572. (1911) La valeur de la science « Première partie : Les sciences mathématiques — Chapitre IV. L’espace et ses trois dimensions. »

Les souris japonaises n’ont que deux paires de canaux ; elles croient, paraît-il, que l’espace n’a que deux dimensions, et elles manifestent cette opinion de la façon la plus étrange ; elles se rangent en cercle, chacune d’elles mettant le nez sous la queue de la précédente, et, ainsi rangées, elles se mettent à tourner rapidement.

2573. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’expression de l’amour chez les poètes symbolistes » pp. 57-90

C’est qu’alors son expression est libre, à travers les secousses et le désordre de l’État et l’indifférence de l’opinion, embesognée ailleurs.

2574. (1890) L’avenir de la science « XXII » pp. 441-461

On se raille de ceux qui s’enquièrent encore de la réalité des choses, et qui, pour se former une opinion sur la morale, la religion, les questions sociales et philosophiques, ont la bonhomie de réfléchir sur les raisons objectives, au lieu de s’adresser au critérium plus facile des intérêts et du bon ton 191.

2575. (1881) La psychologie anglaise contemporaine « M. John Stuart Mill — Chapitre II : La Psychologie. »

Il pense que cette question est mal posée, et toute l’école qui nous occupe ici professe la même opinion en termes différents.

2576. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — Y. — article » pp. 529-575

J'ai consulté les Philosophes, j'ai feuilleté leurs livres, j'ai examiné leurs diverses opinions : je les trouve tous fiers, affirmatifs, dogmatiques, même dans leur septicisme prétendu, n'ignorant rien, ne pouvant rien, se moquant les uns des autres ; & ce point commun m'a paru le seul sur lequel ils ont tous raison : triomphans quand ils attaquent, ils sont sans vigueur en se défendant.

2577. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Émile Augier — Chapitre VIII »

Elle choque des opinions respectables, elle vise la loi qui régit le mariage dans notre pays.

2578. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XV »

L’opinion du monde, l’opprobre d’un procès public, l’honneur de sa famille, le respect de son nom, la voilà prête à fouler aux pieds tout cela, pour posséder l’homme qu’elle aime et pour se perdre avec lui.

2579. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Bussy-Rabutin. » pp. 360-383

Une heure après on vient réveiller le maréchal, en lui amenant un page qui s’est échappé du camp des ennemis, et sur le rapport duquel il se confirme dans l’idée de livrer bataille le lendemain : Et après, dit Bussy, il se recoucha pour se reposer seulement ; car j’ai trop bonne opinion de lui pour croire qu’ayant une bataille à donner six heures après, où sa vie était la moindre chose dont il s’agît, il pût dormir aussi tranquillement que si le lendemain il n’eût eu rien à faire.

2580. (1864) William Shakespeare « Conclusion — Livre III. L’histoire réelle — Chacun remis à sa place »

L’aristocratie anglaise, qui a parfois de ces bonnes idées-là, a imaginé de donner à une opinion politique le nom d’une vertu.

2581. (1872) Les problèmes du XIXe siècle. La politique, la littérature, la science, la philosophie, la religion « Livre I : La politique — Chapitre III : Examen de la doctrine de Tocqueville »

Enfin, quelque peu métaphysicien que je sois, j’ai toujours été frappé de l’influence que les opinions métaphysiques avaient sur les choses qui en paraissaient le plus éloignées et sur la condition même des sociétés.

2582. (1913) La Fontaine « IV. Les contes »

Cela ne pouvait convenir au caractère ni au génie de La Fontaine, et ici nous avons son avis a lui-même, il n’a pas caché son opinion : il n’a pas voulu que ses contes fussent jamais tristes, et vous savez qu’on lui a même reproché de les avoir faits un peu trop joyeux.

2583. (1868) Curiosités esthétiques « IV. Exposition universelle 1855 — Beaux-arts » pp. 211-244

Depuis longtemps l’opinion a fait un cercle autour d’eux comme autour de deux lutteurs.

2584. (1898) L’esprit nouveau dans la vie artistique, sociale et religieuse « II — La solidarité des élites »

C’est à eux qu’il appartient de créer une opinion internationale devant laquelle toute autorité se dissipera comme un fétu de paille emporté par le vent.

2585. (1888) La vie littéraire. Première série pp. 1-363

Tel était le bonhomme Peignot, qui recueillait les opinions des auteurs pour en faire des livres. […] Benjamin Constant a puisé toutes ses inspirations sur des lèvres aimées ; ce sont les femmes qui ont réglé ses opinions, ses discours et ses actes. […] Je ne crois pas, en effet, que rien puisse motiver mon renvoi au dépôt : à peine sorti de l’École militaire, bien portant, aussi capable de servir que qui que ce soit, fermement décidé à faire mon devoir, il n’appartient pas à de vaines opinions de me fermer une carrière qu’on nous montre comme celle de l’honneur, à moins que des mots à peine définis ne soient des garantis de dévouement pour les uns et des titres d’exclusion pour les autres. […] Il n’y avait point de nuances d’opinion pour des hommes qui servaient également bien. […] Par la force de son caractère plus encore que par celle de son talent, il conquit d’emblée l’opinion.

2586. (1874) Histoire du romantisme pp. -399

Seulement, si vous admirez Racine plus que Shakespeare et Calderón, c’est une opinion que vous ferez bien de garder pour vous : la tolérance n’est pas la vertu des néophytes. […] Ce parut être l’opinion d’Alexandre Dumas, qui, cinq ou six ans plus tard, fit sur cette donnée, que Gérard lui avait sans doute communiquée, Charles VII chez ses grands vassaux. […] Il ne nous déplaît pas, d’ailleurs, de laisser de nous cette idée ; elle est farouche et hautaine, et, à travers un certain mauvais goût de rapin, montre un assez aimable mépris de l’opinion et du ridicule. […] L’attitude générale était hostile, les coudes se faisaient anguleux, la querelle n’attendait pour jaillir que le moindre contact, et il n’était pas difficile de voir que ce jeune homme à longs cheveux trouvait ce monsieur à face bien rasée désastreusement crétin et ne lui cacherait pas longtemps cette opinion particulière. […] — Quand l’âge est venu, un grand poète l’a dit, il ne faut revoir ni les opinions ni les femmes qu’on aimait à vingt ans.

2587. (1896) Les Jeunes, études et portraits

Et parce qu’il se rend bien compte, comme moraliste, qu’il avance une énormité, et, comme auteur dramatique, qu’il fait violence à l’opinion du public, il se contente d’autoriser de l’exemple du fantaisiste Sire de Pontamafrel la thèse de la réciprocité. — Dans les dernières pages de Crime d’Amour, le héros de M.  […] De même ils ont écarté du débat tout élément étranger, intervention du scandale, souci de l’opinion du monde. […] Il ne m’appartient pas d’en juger, et ce n’est pas mon rôle que d’avoir une opinion en pareille matière. […] L’esprit est fait d’observation, d’une vue nette et précise des choses, d’une aptitude à découvrir dans toutes les opinions et dans toutes les coutumes la part d’exagération et de mensonge. […] Mais il dispose, pour écrire ses chroniques, d’un moyen qui n’appartient qu’à lui. « Courant à son journal dire son opinion des menus faits de son temps, il y est poursuivi, clopin-clopant, par ce vieux charmant crampon de La Fontaine, à qui, ma foi, à bout de patience, il se résout à passer la plume dans la salle de rédaction : « Eh !

2588. (1863) Cours familier de littérature. XVI « XCIVe entretien. Alfred de Vigny (1re partie) » pp. 225-319

Il est maître de lui et de beaucoup d’âmes qu’il entraîne du nord au sud, selon son bon vouloir ; il tient un peuple dans sa main, et l’opinion qu’on a de lui le tient dans le respect de lui-même, et l’oblige à surveiller sa vie. — C’est le véritable, LE GRAND ECRIVAIN. […] Le rideau tombé, les actes se dévoilent, ils font horreur aux bons sentiments ; mais comme l’Angleterre, pays de la liberté individuelle et audacieuse, est en même temps le pays du paradoxe, une partie de l’opinion des jeunes gens et des femmes se laisse prendre à l’amorce du coup de pistolet et fait de Chatterton un martyr de génie et de vertu.

2589. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des pièces de théâtre — Préface de « Cromwell » (1827) »

Il n’a point, pour attirer sur lui l’intérêt des opinions politiques, l’avantage du veto de la censure administrative, ni même, pour lui concilier tout d’abord la sympathie littéraire des hommes de goût, l’honneur d’avoir été officiellement rejeté par un comité de lecture infaillible. […] On a pu remarquer que dans cette course un peu longue à travers tant de questions diverses, l’auteur s’est généralement abstenu d’étayer son opinion personnelle sur des textes, des citations, des autorités.

2590. (1911) Études pp. 9-261

Seuls peuvent accepter cette opinion ceux qui ne savent ni ce qu’est Gide ni ce qu’est le christianisme, et pour qui douter de la physiologie c’est entrer en religion.

2591. (1927) Quelques progrès dans l’étude du cœur humain (Freud et Proust)

Je vais tout de suite exagérer mon idée : tous nos sentiments sont des rêves, toutes nos opinions sont le strict équivalent des symptômes névrotiques. […] Quand je prétends que tous nos sentiments, toutes nos opinions sont des rêves ou des actes obsessionnels, je veux dire que ce sont des états impurs, masqués, hypocrites ; je veux dire une chose enfin qu’il faut bien voir en face : c’est que l’hypocrisie est inhérente à la conscience. […] Et pourtant je dois avouer, si mon opinion a quelque intérêt, que je ne vais pas tout à fait aussi loin que Proust dans le pessimisme, qu’il y a des moments tout au moins où sa conception de l’amour me paraît un peu partiale, ou plutôt inégale à son objet, et où certains éléments de l’amour me paraissent avoir été négligés par lui. […] C’est que la petite phrase au contraire, quelque opinion qu’elle pût avoir sur la brève durée de ces états de l’âme, y voyait quelque chose, non pas comme faisaient tous ces gens, de moins sérieux que la vie positive, mais au contraire de si supérieur à elle que seul il valait la peine d’être exprimé.

2592. (1873) Molière, sa vie et ses œuvres pp. 1-196

Je ne partage pas l’opinion de M.  […] Il suffirait, pour appuyer notre opinion, de comparer L’Étourdi, par exemple, à la fantaisie italienne d’où Molière a tiré ce pimpant chef-d’œuvre. […] Cette opinion humouristique de l’acteur anglais vaut bien celle d’un critique allemand ou français. […] — L’opinion que nous partageons sur l’accueil fait à Molière est celle-ci : « Au xviie  siècle, les acteurs introduisaient parfois dans leurs rôles des réflexions et des allusions qui n’en faisaient pas partie, esprit fin et railleur, Molière s’abandonna probablement en scène à quelque répartie piquante qui fut immédiatement relevée par des spectateurs peu endurants, inde iræ. » La Voix de la province, revue littéraire, année 1862, ier  numéro, Chronique : — Molière, on l’a répété bien des fois, fut sifflé à Limoges ; mais ce que tout le monde ne sait pas, c’est qu’il s’attira cette humiliation en jouant la tragédie ; il ne put jamais réussir dans ce genre, de l’aveu même de ses amis.

2593. (1895) Hommes et livres

Et Rome s’inquiétait parfois : Ruinart était attaqué ; la congrégation de l’Index demandait des explications à Mabillon, qui maintenait son opinion avec une inflexible douceur. […] On peut hésiter en lisant les tragédies : un poète qui prend pour sujet la mort de la catholique Marie Stuart, et qui lui fait maudire « la folle opinion d’une rance hérésie », sans donner aux interlocuteurs protestants un mot contre le papisme, peut-il n’être pas catholique ? […] De là le peu de place que tiennent dans son œuvre toutes les opinions qui divisent, tous les mots qui décèlent le fanatisme et la haine. […] Mais il y a pourtant grande différence entre les résolutions qui procèdent de quelque fausse opinion et celles qui ne sont appuyées que sur la connaissance de la vérité ; d’autant que si on suit ces dernières, on est assuré de n’en avoir jamais de regret ni de repentir, au lieu qu’on en a toujours d’avoir suivi les premières lorsqu’on en découvre l’erreur. […] Cette incurable manie va si loin que les classes mêmes qui devraient avoir le plus de souci de la conservation sociale, se font, par honte ou par peur, les complices des meneurs bruyants de l’opinion.

2594. (1881) Études sur la littérature française moderne et contemporaine

Toutes les espérances déçues excitèrent le mécontentement à tel point, que les mots d’oppression et de tyrannie ne furent jamais prononcés, dans les jours qui précédèrentla chute du trône, avec plus de passion et de véhémence. » Ennuyé, inquiet peut-être de cette explosion de l’opinion et toujours ballotté d’un parti à l’autre, le malheureux Louis XVI ne tarda pas à revenir sur son interdiction. […] L’esthétique à la mode honore singulièrement un mot que depuis Molière on n’est pas habitué à prendre en bonne part, c’est le mot préciosité ; elle contredit l’opinion commune qui a toujours vu le signe principal de la décadence littéraire dans une recherche de style disproportionnée avec l’importance des choses, et elle soutient que les littératures périssent non par l’excès de l’ornementation, mais par la platitude. […] Je doute que cette opinion trouve beaucoup de partisans ; mais déjà on la tolère, on souffre qu’elle s’exprime ; si elle provoque une juste contradiction, elle ne cause plus de surprise extrême ni de scandale. […] Toute création fière et hardie sort des formes reçues et choque plus ou moins l’opinion régnante ; il faut un certain temps pour s’y habituer. […] Une chose peut bien avoir égaré l’opinion sur la valeur poétique de l’Année terrible, puisqu’elle rend encore très difficile de juger ce livre pertinemment : ce sont les passions politiques.

2595. (1886) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Première série

Et voulez-vous mon opinion entière ? […] Ses opinions exotériques s’embrouillent si bien avec ses « pensées de derrière la tête » que lui-même, je pense, ne s’y retrouve plus et se perd avant nous dans le mystère de ces « nuances ». […] S’il était dupe de quelque chose, ce serait plutôt de sa défiance même à l’endroit de la mode et de toute opinion qui a pour elle un certain nombre de sots. […] J’appelle préjugé (comme tout le monde) l’opinion des autres quand je ne la partage pas ; mais j’appelle aussi préjugé une croyance que vous estimez appuyée sur la raison et qui n’est pourtant, en réalité, qu’une préférence de votre tempérament ou un sentiment tourné en doctrine. […] Ce sont celles qui m’intéressent le plus, et d’ailleurs je l’y trouve tout entier, puisqu’il ne juge les écrivains d’aujourd’hui que par comparaison avec ceux du XVIIe siècle et que l’opinion qu’il a de ceux-ci est contenue dans le jugement qu’il porte sur ceux-là.

2596. (1932) Le clavecin de Diderot

Sans doute les opinions des laïcs officiels et semi-officiels ne valaient-elles pas mieux que les balivernes du mêle-tout enjuponné. […] Mais personne, jamais, ne manquera d’avoir bonne opinion de soi. […] Sur la foi de ces découvertes, un courant d’opinion se dessine, à la faveur duquel l’explorateur humain pourra pousser ses investigations.

2597. (1870) Portraits de femmes (6e éd.) « MADAME ROLAND — I. » pp. 166-193

On voit dans la Correspondance avec Bancal figurer fréquemment Blot et Lanthenas, que des dissidences d’opinion éloignèrent bientôt de leurs illustres amis.

2598. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre quatrième. La propagation de la doctrine. — Chapitre III »

En second lieu, tant de fournisseurs, grands et petits, qui, sur tous les points du territoire, sont en compte avec l’État pour leurs travaux et fournitures, véritable armée qui s’accroît tous les jours, depuis que le gouvernement, entraîné par la centralisation, se charge seul de toutes les entreprises, et que, sollicité par l’opinion, il multiplie les entreprises utiles au public : sous Louis XV, l’État fait six mille lieues de routes, et, sous Louis XVI, en 1788, afin de parer à la famine, il achète pour quarante millions de grains.

2599. (1911) Enquête sur la question du latin (Les Marges)

Et souhaitons que l’unanimité des opinions les frappe et les convainque.

2600. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

La vie littéraire de Balzac fut attristée, après quelques années brillantes, par une double disgrâce : ses qualités ne lui valurent pas les récompenses solides qu’il ambitionnait, et ses défauts suscitèrent contre lui un injuste retour d’opinion.

2601. (1890) L’avenir de la science « VIII » p. 200

Ces fictions de rois, de patrices, d’empereurs, de Césars, d’Augustes, transportées en pleine barbarie, ces légendes de Brut, de Francus, cette opinion que toute autorité doit remonter à l’Empire romain comme toute haute noblesse à Troie, cette manière d’envisager le droit romain comme le droit absolu, le savoir grec comme le savoir absolu, d’où venaient-elles, si ce n’est du grossier à-peu-près auquel on était réduit sur l’antiquité, du jour demi-fantastique sous lequel on voyait ce vieux monde, auquel on aspirait à se rattacher ?

2602. (1899) Esthétique de la langue française « La métaphore  »

C’est l’opinion de Brachet.

2603. (1889) L’art au point de vue sociologique « Chapitre deuxième. Le génie, comme puissance de sociabilité et création d’un nouveau milieu social »

Avec les capacités modérées que je possède ; il est vraiment surprenant que j’aie pu influencer à un degré considérable l’opinion des savants sur quelques points importants. » A ces diverses qualités, il faut en ajouter une dont Darwin ne parle pas et dont ses biographes font mention : la faculté de l’enthousiasme, qui lui faisait aimer tout ce qu’il observait, aimer la plante, aimer l’insecte, depuis la forme de ses pattes jusqu’à celle de ses ailes, grandir ainsi le menu détail ou l’être infime par une admiration toujours prête à se répandre.

2604. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre III. Le théâtre est l’Église du diable » pp. 113-135

Ils veulent être les premiers dans leur opinion. — Méfiez-vous aussi des critiques qui arrivent, la règle et le compas à la main, jaugeant et toisant une comédie ainsi qu’ils feraient un bâtiment.

2605. (1772) Bibliothèque d’un homme de goût, ou Avis sur le choix des meilleurs livres écrits en notre langue sur tous les genres de sciences et de littérature. Tome II « Bibliotheque d’un homme de goût — Chapitre III. Des Livres nécessaires pour l’étude de l’Histoire sacrée & ecclésiastique. » pp. 32-86

D’autres Ministres plus modérés que lui l’ont moins été dans cette occasion ; & le sage Jacques Lenfant ne craignit point d’établir l’absurde opinion répandue dans le vulgaire de la secte dans son histoire de la Papesse Jeanne 1694.

2606. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre III : Règles relatives à la distinction du normal et du pathologique »

Et chacun trouve à l’appui de son opinion des syllogismes qu’il juge bien faits.

2607. (1913) La Fontaine « VII. Ses fables. »

Alors la fable prend un tout autre caractère, elle prend celui d’un poème où les animaux font leur leçon aux hommes et leur montrent combien les hommes sont inférieurs aux animaux ; elle prend le caractère du voyage de Gulliver aux pays des chevaux, ni plus ni moins, et l’opinion de Gulliver est absolument manifeste ; mais l’intention de La Fontaine, à mon avis, ne l’est pas moins, car voyez un peu comme il fait parler les bêtes.

2608. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « XIX. M. Cousin » pp. 427-462

Il est de l’opinion des antichambres contre les grands résultats de l’histoire.

2609. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Michelet » pp. 167-205

Après l’Amour, l’opinion, qui avait le palais en feu de la cuisine poivrée de physiologie et d’amour conjugal que lui avait servie Michelet, s’attendait sans doute, puisqu’on devait continuer dans cet ordre de sensations, à quelque chose de plus pimenté et de plus mordant que ce karrick dont elle s’était régalée, et elle a été trompée dans son attente.

2610. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

indépendamment des opinions, des vues et de la conclusion de l’auteur, qu’il soit pour ou contre son héros, qu’il le tue sous la société ou qu’au contraire il tue la société sous lui.

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