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1113. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — R — Rency, Georges (1875-1951) »

Rency, Georges (1875-1951) [Bibliographie] Vie (1896). — Madeleine (1898). […] Rency ne nous donne point l’impression de la vie, il nous clame réellement des hymnes de vie, d’un horizon de joie immense.

1114. (1860) Cours familier de littérature. X « LVe entretien. L’Arioste (1re partie) » pp. 5-80

Très jeune, on a ce franc rire de l’enfance qui n’a point de remords ou de retour sur les tristesses de la vie encore en fleur ; très vieux, on a ce rire un peu amer des derniers jours, où l’esprit, trop expérimenté des illusions de la vie, se moque du cœur qui s’est refroidi dans les poitrines. Nous ne conseillerons donc jamais à un homme dans la maturité active de la vie, de lire l’Arioste ; à l’âge où les passions sont sérieuses, on ne comprendrait pas ce badinage avec l’héroïsme ou l’amour. […] Quand le vent de Libecio agitait les vagues, on voyait frissonner la mer et courir l’écume avec ce sentiment de gaieté et d’immortalité que donne au regard cette surabondante vie et cette renaissante jeunesse des éléments qui semblent vivre et qui vivent en effet d’une nouvelle vie tous les matins. […] Les deux chevaliers courent l’un contre l’autre ; Renaud traverse du fer de sa lance le corps de Polinesso ; le vaincu demande la vie. […] La mémoire est un vase où la vie s’égoutte, et qui se remplit de larmes secrètes jusqu’à ce qu’il déborde dans l’abîme de l’éternité.

1115. (1864) Cours familier de littérature. XVII « XCVIIe entretien. Alfieri. Sa vie et ses œuvres (2e partie) » pp. 1-80

Après ces seize mois de bonheur caché, libres de leur séjour et de leur vie, les deux amants partirent enfin pour Paris. […] L’honneur délicat de la comtesse y resta, mais la vie des deux amants fut assurée. […] Tout fut bouleversé dans sa vie et dans sa tête. […] Ces licences classiques détruiraient, si elles étaient vraies, le dernier charme qui reste à sa vie, le charme de la fidélité reconnaissante à cet amour. […] Il y mettait le sérieux que sa vie avait perdu depuis tant de variations éclatantes à Paris et à Londres.

1116. (1888) Revue wagnérienne. Tome III « IX »

C’est toute une théorie de la nature même de l’art, théorie intuitive par son origine, philosophique et historique par sa méthode, et qui aboutit à la démonstration de la suprême importance que pourrait et devrait avoir l’art dans la vie de l’homme et dans la vie de la société. Cette conviction a été exprimée par Wagner : dans sa vie entière, dans ses écrits, dans son « Festspielhaus » de Bayreuth. […] Mais les hommes dont je parle mènent tous une vie très retirée et fuient la publicité ; leur cercle d’action est donc très restreint. […] Jullien, Richard Wagner, sa vie et ses œuvres, est bien le livre le plus déplorable de toute la littérature wagnérienne. […] La revue a répandu les théories de Wagner développées dans ses écrits théoriques, elle a permis la connaissance de sa vie, de ses œuvres.

1117. (1887) Journal des Goncourt. Tome I (1851-1861) « Année 1857 » pp. 163-222

Vous ne trouverez plus sur les corps modernes les attitudes grandies et raidies à Rome par la vie à la dure, en beaux gestes longs et tranquilles, en poses héroïques à larges tombées de plis. […] Les gens qui se dépensent trop dans la passion ou dans le tressautement d’une existence nerveuse, ne feront pas d’œuvres et auront épuisé leur vie à vivre. […] Comme c’est l’imagination de la vie et non la vie ! […] * * * — Un joli titre pour des souvenirs publiés de son vivant : Souvenirs de ma vie morte. […] Deux tueurs de temps et deux amis de la femme restée femme du peuple sous la soie, et qui gagne sa vie avec le plaisir.

1118. (1895) La comédie littéraire. Notes et impressions de littérature pp. 3-379

Vers la fin de sa vie il parut se régler. […] Et l’œuvre de Richepin s’est modelée sur sa vie. […] Sa vie, que M.  […] C’est que la vie est autrement complexe que le roman. […] Puis sa colère tombe, puis il s’attendrit, puis il raconte sa vie, sa triste vie, tissu de souffrances et de hontes.

1119. (1800) De la littérature considérée dans ses rapports avec les institutions sociales (2e éd.) « Première partie. De la littérature chez les anciens et chez les modernes — Chapitre XIV. De la plaisanterie anglaise » pp. 296-306

La vie domestique, des idées religieuses assez sévères, des occupations sérieuses, un climat lourd, rendent les Anglais assez susceptibles des maladies d’ennui ; et c’est par cette raison même que les amusements délicats de l’esprit ne leur suffisent pas. […] L’intermédiaire qu’on appelle la société n’existe presque point parmi eux ; et c’est dans cet espace frivole de la vie que se forment cependant la finesse et le goût. […] Dans les pièces même telles que L’Avare, Le Tartufe, Le Misanthrope, qui peignent la nature humaine de tous les pays, il y a des plaisanteries délicates, des nuances d’amour-propre, que les Anglais ne remarqueraient seulement pas ; ils ne s’y reconnaîtraient point, quelque naturelles qu’elles soient ; ils ne se savent pas eux-mêmes avec tant de détails ; les passions profondes et les occupations importantes leur ont fait prendre la vie plus en masse. […] On dirait que, voulant être gais, ils ont cru nécessaire de s’éloigner le plus possible de ce qu’ils sont réellement, ou que, respectant profondément les sentiments qui faisaient le bonheur de leur vie domestique, ils n’ont pas permis qu’on les prodiguât sur leur théâtre. […] La société efface les singularités, la vie de la campagne les conserve toutes.

1120. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Prosper Mérimée. »

.) — Don Juan de Marana a été pieux, puis sa vie n’est que meurtres et débauches. Un jour, une vision l’épouvante et le convertit, et sa vie n’est que pénitence furieuse. […] Le charitable interprète qui la veille avait sauvé la vie à six esclaves… lui adressa quelques paroles de consolation. […] Il goûte par-dessus tout les époques et les pays de vie ardente, de passions fortes et intactes : le XVIe siècle, la Corse des maquis, l’Espagne picaresque  Et ce sceptique a écrit le plus beau récit de bataille qui soit : L’enlèvement de la redoute. […] Il nous dit, se peignant sous le nom de Saint-Clair : « Il était né avec un cœur tendre et aimant ; mais, à un âge où l’on prend trop facilement des impressions qui durent toute la vie, sa sensibilité trop expansive lui avait attiré les railleries de ses camarades.

1121. (1890) L’avenir de la science « VII »

Si tant de laborieux travailleurs, auxquels la science moderne doit ses progrès, eussent eu l’intelligence philosophique de ce qu’ils faisaient, s’ils eussent vu dans l’érudition autre chose qu’une satisfaction de leur vanité ou de leur curiosité, que de moments précieux ménagés, que d’excursions stériles épargnées, que de vies consacrées à des travaux insignifiants l’eussent été à des recherches plus utiles. […] Pour moi, je le dis du fond de ma conscience, si je voyais une forme de vie plus belle que la science, j’y courrais. […] Comment se mettre soi-même au rebut, accepter un rôle de parade, quand la vie est si courte, quand rien ne peut réparer la perte des moments qu’on n’a point donnés aux délices de l’idéal ? Ô vérité, sincérité de la vie ! […] Et à cette heure sérieuse à laquelle il faut toujours se transporter pour apprécier les choses à leur vrai jour, qui pourra mourir tranquille, si, en jetant un regard en arrière, il ne trouve dans sa vie que frivolité ou curiosité satisfaite ?

1122. (1890) L’avenir de la science « XX »

Groupant à part et comme en une gerbe inutile les soins religieux, nous faisons l’essentiel de la vie des intérêts vulgaires. […] En effet, du moment que la fortune devient le but principal de la vie humaine, ou du moins la condition nécessaire de toutes les autres ambitions, voyons quelle direction vont prendre les intelligences. […] Celui qui consacre sa vie à la science peut se tenir assuré de mourir dans la misère, s’il n’a du patrimoine, ou s’il ne peut trouver à utiliser sa science, c’est-à-dire s’il ne peut trouver à vivre en dehors de la science pure. […] Vico gagnait sa vie en composant des pièces de vers et de prose de la plus détestable rhétorique pour des princes et seigneurs, et ne trouva pas d’éditeur pour sa Science nouvelle. […] Chez nous, au contraire, il y a une tendance imposée à quiconque veut se faire une place dans la vie extérieure.

1123. (1913) Le bovarysme « Troisième partie : Le Bovarysme, loi de l’évolution — Chapitre II. Bovarysme essentiel de l’être et de l’Humanité »

Désintéressé des buts illusoires que s’obstine à convoiter une entité imaginaire, il est donc plus aisé de s’attacher, ainsi qu’on a résolu de le faire ici, aux phénomènes qui, parmi l’écoulement des individus, demeurent à travers la durée sur la scène du monde, à ces fins que réalise le désir humain détourné des objets chimériques pour lesquels il se consume : la vie de l’Espèce et la Connaissance. […] Quelque effort que fasse l’esprit pour attribuer à la vie une autre signification, il n’aboutit qu’à des conceptions puériles où il construit, avec des matériaux fragiles et éphémères, dont l’instabilité fait seule le charme, un état qu’il imagine heureux et parfait. […] L’esprit s’élève-t-il au-dessus de cette conception contradictoire, il ne trouve un terme et un but à la vie phénoménale que dans la cessation de celle-ci, dans sa résorption en un état d’unité absolue hors de la conscience de soi-même : c’est à quoi aboutissent tous les efforts logiques du souci religieux ou métaphysique, le Boudhisme avec une entière sincérité, le Brahmanisme et le Déisme avec la confusion en Dieu assignée comme but au perfectionnement individuel. […] Ces héros ne conquièrent donc le sentiment d’une liberté antérieure que pour voir dans les événements de leur vie les effets incommutables de cette liberté et pour se poser en spectateurs devant l’image de leur destin. […] On ne peut que constater ici, du point de vue nouveau sous lequel on envisage la vie, combien cette illusion est utile à réaliser la fin de connaissance que l’on attribua à l’existence phénoménale, comme le seul but qu’il fût permis de lui prêter.

1124. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Seconde partie. Poétique du Christianisme. — Livre troisième. Suite de la Poésie dans ses rapports avec les hommes. Passions. — Chapitre VIII. La religion chrétienne considérée elle-même comme passion. »

Nous savons que le siècle appelle cela le fanatisme ; nous pourrions lui répondre par ces paroles de Rousseau : « Le fanatisme, quoique sanguinaire et cruel 49, est pourtant une passion grande et forte, qui élève le cœur de l’homme et qui lui fait mépriser la mort ; qui lui donne un ressort prodigieux, et qu’il ne faut que mieux diriger pour en tirer les plus sublimes vertus ; au lieu que l’irréligion, et en général l’esprit raisonneur et philosophique, attache à la vie, effémine, avilit les âmes, concentre toutes les passions dans la bassesse de l’intérêt particulier, dans l’abjection du moi humain, et sape ainsi à petit bruit les vrais fondements de toute société : car ce que les intérêts particuliers ont de commun est si peu de chose, qu’il ne balancera jamais ce qu’ils ont d’opposé50. » Mais ce n’est pas encore là la question : il ne s’agit à présent que d’effets dramatiques. […] Quiconque, selon l’expression des Pères, n’eut avec son corps que le moins de commerce possible, et descendit vierge au tombeau ; celui-là, délivré de ses craintes et de ses doutes, s’envole au Lieu de vie, où il contemple à jamais ce qui est vrai, toujours le même et au-dessus de l’opinion. […] « Certes, l’amour est une grande chose, l’amour est un bien admirable, puisque lui seul rend léger ce qui est pesant, et qu’il souffre avec une égale tranquillité les divers accidents de cette vie : il porte sans peine ce qui est pénible, et il rend doux et agréable ce qui est amer. […] Si vous pouviez comprendre et le peu qu’est la vie, Et de quelles douceurs cette mort est suivie ! […] Adore-les, te dis-je, ou renonce à la vie !

1125. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre quatrième. Éloquence. — Chapitre II. Des Orateurs. — Les Pères de l’Église. »

» Mais mon bonheur eût été d’être aimé aussi bien que d’aimer ; car on veut trouver la vie dans ce qu’on aime… Je tombai enfin dans les filets où je désirais d’être pris : Je fus aimé, et je possédai ce que j’aimais. […] vous me fîtes alors sentir votre bonté et votre miséricorde, en m’accablant d’amertume ; car, au lieu des douceurs que je m’étais promises, je ne connus que jalousie, soupçons, craintes, colère, querelles et emportements. » Le ton simple, triste et passionné de ce récit, ce retour vers la Divinité et le calme du Ciel, au moment où le saint semble le plus agité par les illusions de la terre, et par le souvenir des erreurs de sa vie : tout ce mélange de regrets et de repentir est plein de charmes. Nous ne connaissons point de mot de sentiment plus délicat que celui-ci : « Mon bonheur eût été d’être aimé aussi bien que d’aimer, car on veut trouver la vie dans ce qu’on aime. » C’est encore saint Augustin qui a dit cette parole : « Une âme contemplative se fait à elle-même une solitude. » La Cité de Dieu, les épîtres et quelques traités du même Père, sont pleins de ces sortes de pensées. […] Nous nous écrivons souvent, mon cher Héliodore ; nos lettres passent les mers, et à mesure que le vaisseau fuit, notre vie s’écoule : chaque flot en emporte un moment185. » De même que saint Ambroise est le Fénélon des Pères, Tertullien en est le Bossuet. […] Il y fait l’histoire de sa vie et de ses souffrances… Il prie, il enseigne, il explique les mystères, et donne des règles pour les mœurs… Il voulait donner à ceux qui aiment la poésie et la musique des sujets utiles pour se divertir, et ne pas laisser aux païens l’avantage de croire qu’ils fussent les seuls qui pussent réussir dans les belles-lettres191. » Enfin, celui qu’on appelait le dernier des Pères, avant que Bossuet eût paru, saint Bernard, joint à beaucoup d’esprit une grande doctrine.

1126. (1909) Les œuvres et les hommes. Philosophes et écrivains religieux et politiques. XXV « Léon Bloy »

Jusque-là, de maigres notices, menteuses ou dérisoires, griffonnées sur Christophe Colomb, avaient montré qu’elles étaient dignes des mains qui avaient raturé son nom pour en mettre un autre à sa place sur sa grandiose découverte… et, pour la première fois, la vie de Christophe Colomb fut écrite. […] Il avait trop indissolublement attaché sa noble vie à la vie colossale de Christophe Colomb pour qu’il fût possible de l’en détacher. […] Enfermé, comme le prophète Daniel, dans la fosse aux bêtes, mais aux bêtes qui n’étaient pas des lions, il recommença de faire ce qu’il avait fait toute sa vie. […] Cette partie dogmatique du livre de Léon Bloy est réellement de l’histoire sacrée, comme aurait pu la concevoir et l’écrire le génie même de Pascal, s’il avait pensé à regarder dans la vie de Christophe Colomb et à expliquer la prodigieuse intervention, dans les choses humaines, de ce Révélateur du Globe, qu’on pourrait appeler, après le Rédempteur Divin, le second rédempteur de l’humanité !

1127. (1773) Essai sur les éloges « Chapitre XV. De Tacite. D’un éloge qu’il prononça étant consul ; de son éloge historique d’Agricola. »

Nous savons qu’il exerça pendant la plus grande partie de sa vie la profession d’orateur, et il ne s’appliqua à l’histoire que dans sa vieillesse. […] Sa pompe funèbre, ajoute-t-il, a honoré le prince, son siècle, Rome et la tribune romaine ; et il n’a rien manqué au bonheur de sa vie, car il a été loué après sa mort par le plus éloquent des hommes43. » Un tel éloge, prononcé par Tacite, devait être intéressant ; mais nous ne l’avons plus : heureusement il nous reste de lui le chef-d’œuvre et le modèle de tous les éloges historiques, c’est sa vie d’Agricola. […] Les recherches des délateurs nous ont ôté jusqu’à la liberté de parler et d’entendre, et nous eussions perdu le souvenir même avec la voix, s’il était aussi facile à l’homme d’oublier que de se taire44. » Il se représente ensuite, au sortir du règne de Domitien, comme échappé aux chaînes et à la mort, survivant aux autres, et, pour ainsi dire, à lui-même, privé de quinze ans de sa vie, qui se sont écoulés dans l’inaction et le silence, mais voulant du moins employer les restes d’un talent faible et d’une voix presque éteinte, à transmettre à la postérité et l’esclavage passé, et la félicité présente de Rome. « En attendant, dit-il, je consacre ce livre en l’honneur d’Agricola mon beau-père ; et dans ce projet ma tendresse pour lui me servira ou d’excuse, ou d’éloge45. » Alors il parcourt les différentes époques de la vie de son héros, peignant partout comme il sait peindre, et montrant un grand homme à la cour d’un tyran, coupable par ses services même, forcé de remercier son maître de ses injustices, et obligé d’employer plus d’art pour faire oublier sa gloire, qu’il n’en avait fallu pour conquérir des provinces et vaincre des armées.

1128. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Préface pour les Maximes de La Rochefoucauld, (Édition elzévirienne de P. Jannet) 1853. » pp. 404-421

La vie de La Rochefoucauld est difficile, et même, selon moi, impossible à traiter avec détail. […] Dans l’habitude de la vie, il fuyait le fracas du sentiment. […] Cela dit, je m’empresse de reconnaître que son à peu près, comme tant d’autres à peu près qu’il a poursuivis dans sa vie, est très éloquent. […] Plus on avance dans la vie, dans la connaissance de la société, et plus on lui donne raison. […] À chaque expérience qui se fait devant eux dans la vie, ils ferment les yeux et continuent leur démonstration après comme devant.

1129. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Madame Bovary par M. Gustave Flaubert. » pp. 346-363

On se donne souvent bien de la peine pour réveiller des choses passées, pour ressusciter d’anciens auteurs, des ouvrages que personne ne lit plus guère et auxquels on rend un éclair d’intérêt et un semblant de vie : mais quand des œuvres vraies et vives passent devant nous, à notre portée, à pleines voiles et pavillon flottant, d’un air de dire : Qu’en dites-vous ? […] Lui, il est heureux pour la première fois de sa vie, et il le sent ; occupé de ses malades tout le jour, il trouve, en rentrant au logis, la joie et la douce ivresse ; il est amoureux de sa femme. […] Cela est entretenu et interrompu par les gênes de leur vie très observée, par la difficulté de se voir, par leur timidité à tous deux. […] Dans ces vies de province, où il y a tant de tracasseries, de persécutions, d’ambitions chétives et de coups d’épingle, il y a aussi de bonnes et belles âmes, restées innocentes, mieux conservées qu’ailleurs et plus recueillies ; il y a de la pudeur, des résignations, des dévouements durant de longues années : qui de nous n’en sait des exemples ? […] Il y a de ces âmes dans la vie de province et de campagne : pourquoi ne pas aussi les montrer ?

1130. (1864) Nouveaux lundis. Tome II « Le Poëme des champs par M. Calemard de Lafayette. »

Jean-Jacques, notre grand aïeul, a dit : « Quand le cœur s’ouvre aux passions, il s’ouvre à l’ennui de la vie. » Ç’a été notre histoire à tous, c’est l’épigraphe à mettre à tous les Werther, à tous les René et à ceux qui en descendent. […] Il n’a rien oublié, ni le mal ni le bien ; le méchant et le lâche l’a mordu, et il en frémit encore : il souhaite aux autres meilleure chance, plus de fortune, une lutte moins étroite avec la vie. […] Le Poëte et la Vie fait, dans ce recueil, tout un petit poëme dans lequel le poëte est considéré comme une sorte d’Hamlet, un rêveur inactif qui n’est point pour cela à mépriser ni à rejeter. […] pourquoi flétrir d’un baiser des lèvres qui ont l’air de sourire pour la jeunesse et la vie ? […] Nous redisions ces mots, descendant le sentier, Pensifs, loin de la vue auguste et solennelle, Et nous trouvions la vie, oh !

1131. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Entretiens de Gœthe et d’Eckermann (suite) »

La science, l’étude de la nature et de la physique, tint de tout temps une grande place dans sa vie et dans sa pensée. […] Ma vie, c’est le roulement perpétuel d’un rocher qui veut toujours être soulevé de nouveau. […] Si j’avais pu me retirer davantage de la vie publique et des affaires, si j’avais pu vivre davantage dans la solitude, j’aurais été plus heureux, et j’aurais fait bien plus aussi comme poëte. […] Que cela arrive dans la vie de l’esprit jusqu’à sept fois, et que les ennemis en soient confus ! […] Mais c’est que nous tous, en réalité, nous menons une misérable vie d’isolement !

1132. (1911) La valeur de la science « Troisième partie : La valeur objective de la science — Chapitre XI. La Science et la Réalité. »

Ainsi, en ce qui concerne l’origine de la vie, on peut conclure qu’il y a toujours eu des êtres vivants, puisque le monde actuel nous montre toujours la vie sortant de la vie ; et on peut conclure aussi qu’il n’y en a pas toujours eu, puisque l’application des lois actuelles de la physique à l’état présent de notre globe nous enseigne qu’il y a eu un temps où ce globe était tellement chaud que la vie y était impossible. […] Quand donc une théorie scientifique prétend nous apprendre ce qu’est la chaleur, ou que l’électricité, ou que la vie, elle est condamnée d’avance ; tout ce qu’elle peut nous donner, ce n’est qu’une image grossière. […] On s’est étonné de cette formule : la Science pour la Science ; et pourtant cela vaut bien la vie pour la vie, si la vie n’est que misère ; et même le bonheur pour le bonheur, si l’on ne croit pas que tous les plaisirs sont de même qualité, si l’on ne veut pas admettre que le but de la civilisation soit de fournir de l’alcool aux gens qui aiment à boire. […] Et cependant — étrange contradiction pour ceux qui croient au temps — l’histoire géologique nous montre que la vie n’est qu’un court épisode entre deux éternités de mort, et que, dans cet épisode même, la pensée consciente n’a duré et ne durera qu’un moment.

1133. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « La reine Marguerite. Ses mémoires et ses lettres. » pp. 182-200

Quelque habileté et quelque finesse qu’ait pu montrer la reine Marguerite dans plusieurs circonstances politiques de sa vie, nous l’entrevoyons assez déjà, ce n’était point une femme politique : elle était trop complètement de son sexe pour cela. […] On a cité d’elle un mot d’observation pratique, qui nous dit mieux le secret de sa vie : « Voulez-vous cesser d’aimer ? […] Sa vie bien déduite et bien racontée ferait la matière d’un plein et intéressant volume. […] Depuis lors sa vie ne retrouva plus jamais sa première et riante félicité. […] Ce n’était point précisément le bon sens qui présidait à sa vie.

1134. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Regnard. » pp. 1-19

La nature, je le sais, fait des exceptions encore : nous avons eu Désaugiers ; sans trop chercher, nous trouverions après lui d’aimables gens qui mènent légèrement la vie et portent avec eux la joie. […] Ici, à moins d’être averti qu’il s’agit d’une histoire vraie, on croirait être en pure fiction, comme du temps de Théagène et Chariclée ; c’est la vie qui imite le roman à s’y méprendre. […] Je jetai d’abord la vue sur les agitations de ma vie passée, les desseins sans exécution, les résolutions sans suite et les entreprises sans succès. Je considérai l’état de ma vie présente, les voyages vagabonds, les changements de lieux, la diversité des objets et les mouvements continuels dont j’étais agité. […] Il ne songea plus désormais qu’à jouir de la vie en sage épicurien ou en cynique mitigé (c’est son expression), et à se livrer à ses goûts, où les sens se mêlaient agréablement à l’esprit.

1135. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « La Fontaine. » pp. 518-536

La vie de La Fontaine a été écrite avec détail par M.  […] Il fut bon pour La Fontaine que la faveur de Fouquet l’initiât à la vie du monde, et lui donnât toute sa politesse ; mais il lui fut bon aussi que ce cercle trop libre ne le retînt pas trop longtemps, et qu’après la chute de Fouquet il fût averti que l’époque devenait plus sérieuse et qu’il avait à s’observer davantage. […] Mais, répliqua La Fontaine, si les rois sont maîtres de nos biens, de nos vies et de tout, il faut qu’ils aient droit de nous regarder comme des fourmis à leur égard, et je me rends si vous me faites voir que cela soit autorisé par l’Écriture. — Hé quoi ! […] Car la vie de La Fontaine est devenue comme une légende, et il suffit de commencer à raconter de lui une anecdote pour que tout lecteur l’achève aussitôt. […] Je ferai remarquer encore qu’il y a sous l’idéal de Bernardin de Saint-Pierre un arrière-fond de réalité, comme il convient à un homme qui a beaucoup vécu de la vie pauvre et naturelle.

1136. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Ma biographie »

Les faits de ma vie littéraire sont bien simples. […] Cette petite scène et mon entrée a été peinte assez au vif dans Victor Hugo, raconté par un témoin de sa vie. […] Sa vie de Liège et les travaux qu’il y prépara se trouvent indiqués et résumés dans ces volumes. […] Sainte-Beuve, à l’autre extrémité de sa vie, à ses derniers mois, lorsque M. de Lamartine est mort (le 28 février 1869), M.  […] Sainte-Beuve se redisait à lui-même le chant funèbre de plus d’une illusion, à la fin de sa vie.

1137. (1859) Cours familier de littérature. VIII « XLIIIe entretien. Vie et œuvres du comte de Maistre (2e partie) » pp. 5-80

Sur ces rives désolées, d’où la nature semblait avoir exilé la vie, Pierre assit sa capitale et se créa des sujets. […] Si cela était démontré, ce serait un argument terrible contre les rémunérations et les expiations de la vie future. […] Dès que vous sortez du règne insensible, vous trouvez le décret de la mort violente écrit sur les frontières mêmes de la vie. […] Ces jours de halte furent sans aucun doute les plus doux de toute sa vie ; c’est alors que j’eus le bonheur de le connaître. […] Sa vie n’avait été qu’un long acte de foi.

1138. (1892) Journal des Goncourt. Tome VI (1878-1884) « Année 1884 » pp. 286-347

Qu’il y ait eu quelques coucheries du souverain avec des femelles, ce sont des épisodes sans importance dans le bien portant fonctionnement de la vie d’une nation. […] Chez les peintres, l’envie est tempérée par une certaine gaminerie, par une enfance de toute la vie, qui rend cette envie moins amère, moins noire que chez l’homme de lettres. […] C’est très honorable, mais ce n’est pas l’inattendu, cet inattendu que je n’ai jamais rencontré dans ma vie. […] Mes dix mille livres de rente réduits à neuf par les impositions, avec le prix de la vie actuelle, et dans une grande installation comme la mienne, c’est vraiment bien peu d’argent. […] Maupassant m’avoue, que Cannes est un endroit merveilleux pour la documentation de la vie élégante.

1139. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — T — Tessyl, Paul-Henri »

Tessyl, Paul-Henri [Bibliographie] Les Frissons de vie (1899). […] Paul-Henri Tessyl nous affirme en la préface de ses Frissons de vie que nous allons « vers un horizon de bonté, de douceur, de vie simple et lumineuse ».

1140. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — M. — article » p. 238

Avec du talent pour écrire l’Histoire, il ne s’est attaché qu’à des Vies particulieres, dont on ne peut blâmer que le style quelquefois inégal, & souvent trop diffus. […] Les Vies de S. […] La Vie de l’Abbé de Rancé a été fort durement critiquée ; aussi étoit-ce par un Solitaire.

1141. (1922) Nouvelles pages de critique et de doctrine. Tome II

Cette vie individuelle en a été faussée jusqu’au fond. […] Ce raisonnement, aisément vérifiable pour ce qui concerne la vie littéraire, ne l’est pas moins pour ce qui concerne la vie politique et économique. […] Dans tous les ordres, la vie veut être prise au sérieux. […] La cherté de la vie ne semble pas avoir touché au bien-être. […] Ce n’est pas une vie.

1142. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Il faut vivre et la vie est chose grossière. […] Quelle doit être la pureté de vie de ce paladin du journalisme ! […] Un des plus sûrs moyens de moins souffrir, c’est de se réfugier souvent dans le rêve, c’est de se figurer, en dehors et au-dessus de la vie réelle, une vie meilleure, une vie idéale. […] Vous voulez rendre la vie à la poésie, vous lui retirez ce qui est la vie même de l’univers, l’amour, l’éternel amour. […] Mais ce n’est pas tout : ce genre de dessin, qui ne sait traduire que la vie des corps, est par là même très propre à rendre la vie des multitudes, la vie collective où l’expression particulière des visages s’efface et se noie.

1143. (1860) Cours familier de littérature. IX « Le entretien. Les salons littéraires. Souvenirs de madame Récamier (2e partie) » pp. 81-159

Rentré en France après la Terreur, il y porta dans la société renouvelée un homme nouveau ; l’austérité chrétienne de sa vie n’enlevait rien à l’émotion de son cœur et à la séduction de sa personne. […] Ce caractère est évidemment celui de sa vie entière ; elle appelait tout, elle trompait tout, excepté l’amitié. […] Ce n’était pas un homme, c’était un sublime somnambule dans la vie. […] Ma vie maintenant se déroule vite ; je ne descends plus, je tombe !  […] La vieillesse réhabilite la vie de ce grand homme, désenchanté de lui-même et de tout.)

1144. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Appendice » pp. 453-463

Il y est parlé délicatement de la dignité des lettres, de leur rôle dans la société, et surtout de leur part dans la vie. […] Mais elle est encore autre chose, messieurs, elle est un instrument plus puissant, ou du moins plus actif, l’expression et l’organe perpétuel des pensées, des travaux de toute une vie. […] Ces portraits et caractères composés si savamment, mais composés et concertés, auraient pris plus de naturel et de vie ; les originaux vrais auraient apparu, se seraient développés avec ampleur, abandon, et je ne sais quel charme qui leur manque ; je le suppose toujours à l’abri du trop de facilité et du laisser-aller. […] Ici se rencontre une question forcément matérielle, et que les esprits mêmes qui aimeraient le moins à s’occuper de ce côté de la vie ne peuvent éviter. […] Quoi qu’il en soit, et vous en jugerez tout à l’heure, messieurs, le concours a eu de la vie, et la poésie qu’on y couronne n’est pas une poésie froide et morte.

1145. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série « (Chroniqueurs parisiens III) Henri Rochefort »

Ajoutez que la vie de ce grand railleur (comme son style) paraît se moquer fortement de ses opinions. […] Mais alors il me semble qu’un certain degré d’outrance dans certaines doctrines impose absolument à celui qui les professe une vie qui ne les contredise point. […] Il est condamné à faire la Lanterne toute sa vie. […] Il aime, pour lui-même et pour les siens, la vie large et facile, et son humeur généreuse lui a mis sur les bras des charges de toutes sortes. […] Il jouit de ce qui nous scandalise, du paradoxe de sa double vie.

1146. (1894) Propos de littérature « Chapitre III » pp. 50-68

Griffin et Régnier on pourrait déduire, presque à coup sûr et sans avoir recours à l’exégèse, les formes musicales et plastiques en lesquelles se condense leur vision de la vie. […] Griffin, poète épris de vie, la morale de l’activité se traduit d’elle-même : c’est le geste et le rythme qui caractérisent la strophe en l’enveloppant d’un souple et mouvant tissu. […] Il est aussi deux peintures ; l’une s’appuie immédiatement à la Vie en ses multiples apparences, — c’est le tableau de chevalet, par exemple ; — l’autre, architecturale et décorative, (et la plus hautement esthétique, il faut oser l’écrire), semble ne donner de la Vie qu’un reflet en une synthèse épurée. […] Vielé-Griffin rétrécit les proportions des siens pour y faire glisser et chanter la vie aux cent voix. […] C’est aussi la différence des décors : l’un de songe, l’autre de vie mouvante.

1147. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Marie-Antoinette. (Notice du comte de La Marck.) » pp. 330-346

Marie-Antoinette avait cet idéal de vie heureuse qu’elle eût pu réaliser sans inconvénients si elle fût restée simple archiduchesse à Vienne, ou si elle eût simplement régné en quelque Toscane ou en quelque Lorraine. […] Il est des personnes dont la préoccupation consiste à nier absolument toute légèreté et toute faiblesse de cœur de Marie-Antoinette (supposé qu’il s’en rencontre quelqu’une à cette époque de sa vie). […] Elle pouvait aimer comme elle faisait la liberté des entretiens et des jeux, la familiarité des intérieurs ; elle pouvait jouer à la vie de bergère ou de femme à la mode, il lui suffisait de se lever, de reprendre en un rien son air de tête : elle était reine. […] Elle continuait sa vie de féerie et d’illusion, quand déjà les propos odieux, les couplets satiriques et les pamphlets infâmes couraient Paris, et lui imputaient une influence secrète et continue qu’elle n’avait pas. […] » C’est là le cri suprême qui domine sa vie, le cri qui va aux entrailles et qui retentira pour elle dans l’avenir.

1148. (1867) Cours familier de littérature. XXIII « cxxxviiie entretien. Littérature germanique. Les Nibelungen »

À cause d’elle beaucoup de héros devaient perdre la vie. […] Bien des guerriers depuis en perdirent la vie. […] « Un grand nombre d’animaux perdirent la vie. […] Qui pourrait vous décrire la vie que le roi mena depuis ? […] vous y pourrez perdre et la vie et l’honneur.

1149. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Charles Labitte »

Les souvenirs les plus doux de la vie sont en effet les souvenirs du cœur. […] Il semblait étudier non pas pour connaître seulement et pour apprendre, mais pour échapper à un dégoût de la vie. […] de la vie terrestre, de cette sorte de vision aussi qu’on a non moins justement appelée le songe incompréhensible. […] C’est assez insister sur ce principal épisode de la vie littéraire de notre ami. […] La vie n’est qu’une auberge où il faut toujours avoir sa malle prête.

1150. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Additions et appendice. — Treize lettres inédites de Bernardin de Saint-Pierre. (Article Bernardin de Saint-Pierre, p. 420.) » pp. 515-539

Ceux qui sont curieux de voir les hommes au naturel, et que les détails de la vie commune ne rebutent pas, peuvent lire cet appendice. […] Soyez persuadé que je vous aimerai et vous estimerai toute ma vie. […] Je redescends la montagne de la vie, mais par une pente bien douce. […] la vie n’est qu’un petit voyage. […] Aimé Martin (page 435 du Mémoire sur la vie et les ouvrages de Bernardin de Saint-Pierre, 1826).

1151. (1827) Principes de la philosophie de l’histoire (trad. Michelet) « Principes de la philosophie de l’histoire — Livre premier. Des principes — Chapitre II. Axiomes » pp. 24-74

Chaque nation grecque ou barbare, a follement prétendu avoir trouvé la première, les commodités de la vie humaine, et conservé les traditions de son histoire depuis l’origine du monde. […] C’est un passage précieux que celui de Jamblique, sur les mystères des Égyptiens : les Égyptiens attribuaient à Hermès Trismégiste toutes les découvertes utiles ou nécessaires à la vie humaine. […] Ainsi les Égyptiens rapportaient au type du sage dans les choses de la vie sociale toutes les découvertes utiles ou nécessaires à la vie, et comme ils ne pouvaient atteindre cette abstraction, encore moins celle de sagesse sociale, ils personnifiaient le genre tout entier sous le nom d’Hermès Trismégiste. […] Voyez la vie du premier dans Plutarque. […] Enfin pour s’assurer la vie commode dont ils jouissent, ils inclinèrent naturellement à se soumettre au gouvernement d’un seul ; voilà les nobles sous la monarchie.

1152. (1895) De l’idée de loi naturelle dans la science et la philosophie contemporaines pp. 5-143

Et il juge ces phénomènes inexplicables sans la vie. […] La vie, on l’a dit, est essentiellement un « cercle vicieux ». […] Sabatier, produit la vie, c’est qu’elle n’est pas purement matière. […] Or la vie est la synthèse d’une très riche multiplicité. […] L’adaptation aux conditions extérieures est ainsi le caractère commun de la vie de l’âme et de la vie du corps.

1153. (1889) Impressions de théâtre. Troisième série

Vraiment cette parole débordait de vie, et cette vie, elle la communiquait à flots aux figures pâlies du vieux drame. […] Il n’eût été toute sa vie qu’un reflet. […] La vie matérielle, toujours. […] Qu’est-ce que je connais de la vie ? […] Le drame doit imiter la vie, fût-ce de très loin ; et l’histoire, c’est la vie du passé.

1154. (1870) Causeries du lundi. Tome XV (3e éd.) «  Œuvres et correspondance inédites de M. de Tocqueville — I » pp. 93-106

Juge auditeur à Versailles avant la révolution de juillet 1830, il prend part aux travaux du ministère public ; il est plusieurs fois appelé à parler devant la Cour d’assises : En général, écrivait-il à son début (23 juillet 1827), il y a chez moi un besoin de primer qui tourmentera cruellement ma vie. […] Je suis tout à la fois l’homme le plus impressionnable dans mes actions de tous les jours, le plus entraînable à droite et a gauche du chemin dans lequel je marche, et à la fois le plus obstiné dans mes visées. » Sa noble vie sera tout d’une teneur, mais on y sentira la ténacité, et ce mot non plus ne lui déplaît pas (tome i, page 433). […] Même lorsqu’il se croira un peu détendu et calmé, il rendra cet effet par un mot qui est bien du même ton : « J’attends moins de la vie, je cave moins haut. […] Quand il entreprend vers la fin de sa vie cet ouvrage de L’Ancien Régime et la Révolution, que de difficultés il se pose pour ses lectures dans un sujet si ouvert et si exploité (tome i, page 403) ? […] De nos jours, d’ailleurs, je ne vois pas d’emploi plus honorable et plus agréable de la vie que d’écrire des choses vraies et honnêtes qui peuvent signaler le nom de l’écrivain à l’attention du monde civilisé, et servir, quoique dans une petite mesure, la bonne cause.

1155. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « De la poésie en 1865. »

A mesure qu’il avancera dans la vie, que le nuage doré s’abaissera et qu’il verra plus clair en lui-même, il lui faudra pourtant choisir. — Je mettrais dans le même groupe, si j’avais le temps de m’y arrêter, Albert Glatigny, un osé et un téméraire, qui, après les Vignes folles, est venu lancer les Flèches d’or 38 : quelques-unes portent loin. […] Cet homme de modestie et de mérite a fait de sa vie deux parts : il livre l’une à la nécessité, au travail ; il réserve l’autre, inviolable et secrète. […] Abel Jeandet (de Verdun), prend soin de nous expliquer dans une introduction avec le zèle et la sympathie d’un compatriote ; je parcours le recueil : c’est tout un monde bourguignon, des souvenirs du cru, des amitiés d’enfance, des paysages naturels, de riches aspects qu’anime la Saône ; puis le combat, la lutte et la mêlée, la souffrance, bien des amertumes, des injustices même éprouvées ou commises, le fouet de la satire qui siffle, et finalement une sorte de tristesse grave et de découragement austère ; — toute une vie, enfin, de quinze années qui se reflète dans des vers inégaux, rudes parfois, vrais toujours et sincères, et dont quelques-uns attestent une force poétique incontestable. […] Il y aurait plaisir à examiner et à suivre son nouveau système dans les applications ingénieuses qu’a imaginées son talent, à lui demander s’il n’y apporte pas encore un peu trop de construction savante, s’il ne garde pas un peu trop d’art, de son premier art sculptural, s’il donne assez de jeu au molle atque facetum, à cette charmante familiarité de la vie ; il y aurait à introduire des comparaisons avec les poëmes de la vie intime que possèdent nos voisins les Anglais, maîtres en ce genre. […] E. de Montlaur, esprit élégant, cultivé, nourri du suc des poëtes, et qui, sous ce titre : la Vie et le Rêve 49, a recueilli des impressions légères ou touchantes, des esquisses de voyage, des lettres en vers, tout un album, image des goûts et des sentiments les plus délicats ?

1156. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Lettres de Rancé abbé et réformateur de la Trappe recueillies et publiées par M. Gonod, bibliothécaire de la ville de Clermont-Ferrand. »

On serait très-aisément disposé ainsi de nos jours ; on irait faire volontiers un pèlerinage dont on parlerait longtemps ensuite, et dont on raconterait au public les moindres circonstances et les impressions ; mais il y a dans l’idée de durée attachée à une telle vie quelque chose qui effraie, qui glace et qui rebute ; or ce quelque chose, on le ressent inévitablement à chaque page des lettres du réformateur de la Trappe. […] Cependant, comme il est difficile de se voir peint en beau sans en prendre quelque complaisance, j’appréhende avec raison que je n’y en aie pris plus qu’il n’appartient à un mort, et que vous n’ayez en cela donné une nouvelle vie à mon orgueil et à ma vanité, et je vous en dis ma coulpe. » Voilà qui est de l’homme d’esprit resté tel sous le froc, de celui dont Nicole disait qu’il avait un style de qualité. […] Quelle plus haute pensée, par exemple, que celle-ci, qui pourrait servir comme d’épigraphe et de devise à la vie du grand réformateur : « Il faut faire de ces œuvres et de ces actions qui subsistent indépendamment des passions différentes des hommes !  […] (Voir Madame Swetchine, sa Vie et ses OEuvres, tome II, page 207.) […] J’avais déjà parlé de Rancé à propos de sa Vie par M. de Chateaubriand (Voir au tome Ier, page 36, des Portraits contemporains) ; depuis j’ai reparlé de Rancé tout à fait à fond, au tome III de Port-Royal, pages 532 et suiv.

1157. (1858) Cours familier de littérature. V « Préambule de l’année 1858. À mes lecteurs » pp. 5-29

Est-ce que nous n’avons pas fait respecter, au péril de notre popularité et de notre vie, à la porte des journaux menacés, le droit de nous injurier nous-même ? […] Mais tous ces sarcasmes ne nous font ni changer de pensée, ni changer de cœur ; nous vivrions mille vies que nous les dévouerions encore à vous préserver autant qu’il serait en nous, non pas seulement d’une blessure au cœur, mais d’une piqûre à l’épiderme. […] Il fait banqueroute de lui-même à ceux auxquels il doit le produit de son activité et le pain de leur vie. […] Ainsi mourut, au site où se plaisait sa vie, La gloire des Romains, l’ennemi de Fulvie ! […] Qui ne voudrait trembler et mourir à ce prix, Léguant comme ce sage, au sortir de la vie, Son âme à l’univers et sa tête à Fulvie ?

1158. (1925) Méthodes de l’histoire littéraire « I. Leçon d’ouverture du Cours d’éloquence française »

Cet esprit souple, étendu successivement vers tant d’objets divers, cette vie riche, où s’assemblent tant de formes ordinairement incompatibles de l’action, dépassent les limites de mon information actuelle et de ma compétence. […] Larroumet s’est révélé à la Faculté des Lettres et au public, en décembre 1882, par sa thèse de doctorat : « Marivaux, sa vie et ses œuvres, avec deux portraits et deux fac-similé, in-8, pp. […] Et ce qui, dans le Marivaux, disparaissait un peu par l’effort critique et sous, l’amoncellement des matériaux, se dégageait ici avec puissance : la couleur et le mouvement de la vie. […] Mais, en lui, la prudence critique s’affermit par le sens aigu de la vie, par la connaissance désabusée et sans amertume de l’humanité, par la disposition avisée à ne voir la nature ni en noir ni en bleu. Dans les articles rapides de ses dernières années, il s’est laissé aller à causer, à se souvenir ; il s’est mis à l’aise, laissant jouer son esprit et sa sensibilité, suivant les images de sa vie et de la vie qui s’évoquaient en lui.

1159. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — L — Leconte de Lisle, Charles-Marie (1818-1894) »

Leconte de Lisle a le malheur de n’être pas chrétien, il aurait pu, du moins, s’abstenir d’un titre (Dies iræ) qui rappelle à toutes les mémoires la plus sublime, la plus terrible de nos prières funèbres ; il aurait pu se souvenir que la poésie a mieux à faire qu’à enlever à la vie la croyance et l’espérance de la mort : ceci soit dit sans rien ôter au mérite de cette pièce où se traduit, d’une façon vraiment saisissante, non plus le désabusement humain dont parlait M.  […] Vous voulez rendre la vie à la poésie, et vous lui retirez ce qui est la vie même de l’Univers : l’amour, l’éternel amour. […] Au contraire, les poèmes Védiques et Brahmaniques qui eurent lieu peu après, entremêlés de superbes paysages des îles et de tableaux d’animaux : Les Éléphants, le Condor, et cette terrible eau-forte, les Chiens, révélèrent un poète épris du néant par dégoût de la vie moderne ; ce qui n’empêcha pas le maître de donner bientôt toute sa mesure dans ce colossal livre des Poèmes barbares, études d’une couleur inouïe sur le Bas-Empire et le moyen âge. […] [La Vie littéraire (1892).] […] [La Vie et les Livres, 2e série (1895).]

1160. (1890) L’avenir de la science « Préface »

Ma vie se prolongeant au-delà de ce que j’avais toujours supposé, je me suis décidé, en ces derniers temps, à me faire moi-même mon propre éditeur. […] Le français ne veut exprimer que des choses claires ; or les lois les plus importantes, celles qui tiennent aux transformations de la vie, ne sont pas claires : on les voit dans une sorte de demi-jour. […] Trop peu naturaliste pour suivre les voies de la vie dans le labyrinthe que nous voyons sans le voir, j’étais évolutionniste décidé en tout ce qui concerne les produits de l’humanité, langues, écritures, littératures, législations, formes sociales. […] Je le dis franchement, je ne me figure pas comment on rebâtira, sans les anciens rêves, les assises d’une vie noble et heureuse. […] J’eus donc raison, au début de ma carrière intellectuelle, de croire fermement à la science et de la prendre comme but de ma vie.

1161. (1888) La critique scientifique « La critique scientifique — Évolution de la critique »

Partant du principe que les choses morales ont, comme les choses physiques, des dépendances et des conditions, il esquisse la vie de chacun des écrivains qu’il veut étudier, montre le pays où il est né, le lieu où il a vécu, puis, analysant son œuvre et en dégageant les principaux caractères, il exprime fame qu’ils révèlent, en une formule à plusieurs termes. Saint-Simon est ainsi un gentilhomme féodal contraint à la vie des cours, ambitieux, passionné, artiste par tempérament et écrivain par nécessité ; Tite-Live, un orateur forcé par les circonstances à écrire l’histoire ; Balzac un homme d’affaires, un Parisien, un tempérament expansif, un esprit à la fois savant, philosophique et visionnaire. […] Installé à Paris à partir de 1860, il entre à la rédaction du Temps, puis devient une figure importante de la vie intellectuelle française protestante, comme en témoignent ces lignes combatives de Zola, publiées dans Le Figaro en 1881 : « c’est notre République surtout qui est menacée d’une invasion de protestants. […] Il s’est surtout fait connaître pour sa critique d’art, favorable aux impressionnistes, qu’il réunit dans les huit volumes de sa Vie artistique (1892-1903). […] Georg Brandès (1842-1927) : critique et penseur danois, il eut une très grande influence sur la vie intellectuelle et littéraire de son pays.

1162. (1895) Les règles de la méthode sociologique « Chapitre I : Qu’est-ce qu’un fait social ? »

De même, les croyances et les pratiques de sa vie religieuse, le fidèle les a trouvées toutes faites en naissant ; si elles existaient avant lui, c’est qu’elles existent en dehors de lui. […] Il est une résultante de la vie commune, un produit des actions et des réactions qui s’engagent entre les consciences individuelles ; et s’il retentit dans chacune d’elles, c’est en vertu de l’énergie spéciale qu’il doit précisément à son origine collective. […] La sociologie ne peut se désintéresser de ce qui concerne le substrat de la vie collective. […] Il y a ainsi toute une gamme de nuances qui, sans solution de continuité, rattache les faits de structure les plus caractérisés à ces libres courants de la vie sociale qui ne sont encore pris dans aucun moule défini. […] Les uns et les autres ne sont que de la vie plus ou moins cristallisée.

1163. (1861) Les œuvres et les hommes. Les historiens politiques et littéraires. II. « VIII. M. de Chalambert. Histoire de la Ligue sous le règne de Henri III et de Henri IV, ou Quinze ans de l’histoire de France » pp. 195-211

Il faut bien qu’on le sache, le catholicisme était alors la société même, une société armée, vivante et qui, comme toute société vigoureuse, comme tout être vivant et normal ne voulait pas être blessée, et se sentait une vie trop puissante pour se résigner à mourir. […] On a le droit de s’étonner du silence des historiens qui ne parlent jamais de l’industrie protestante qu’à propos de la révocation de l’édit de Nantes, sous Louis XIV, et négligent de poser au xvie  siècle cette question de vie et de mort qui donne un intérêt si suprême, un instant si marqué, une âme si forte à l’intérêt catholique ! […] Le peuple, menacé au xvie  siècle dans tout ce qui était sa vie, sentait absolument cette identité que les historiens devraient montrer davantage pour expliquer une action qui ne fut point une révolte dans le sens que les révolutions modernes ont donné à ce terrible mot, et pour l’expliquer aux penseurs politiques de nos jours qui ont rayé, il est vrai, les questions de foi de leurs programmes, c’est-à-dire toute l’économie de la vie morale, mais qui, en présence des intérêts matériels, comprendront peut-être que la Ligue, c’est-à-dire la société même, courût aux armes pour se sauver ! […] Nous ne savons rien de la vie de cet écrivain ; mais nous ne serions point étonné qu’il eût écrit son livre dans la simplicité de son cœur, sous les clématites de sa province, loin des hommes auxquels il faut arracher les préjugés d’une main plus ferme quand ils en ont dans la pensée, quitte à les faire saigner un peu, comme les Chirurgiens, pour les guérir. […] La vie manque sous les traits dispersés.

1164. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Gustave Flaubert » pp. 61-75

On sentirait dans ces machines autant de vie, d’âme, d’entrailles humaines que dans l’homme de marbre qui a écrit Madame Bovary avec une plume de pierre, comme le couteau des sauvages. […] Gustave Flaubert dans le milieu de la vie, A la vigueur de son observation, on sent qu’il s’est attendu, cette chose héroïque dans un temps où tout le monde est si pressé. […] Ces hommes aux manières inconnues, qui ont froissé sa robe en valsant avec elle, lui ont communiqué la peste des désirs coupables et le dégoût de la vie qu’elle retrouve en rentrant au logis. […] Il refuse d’empêtrer sa vie dans cet enlèvement d’une femme mariée qui parle d’emporter sa fille avec elle, et il la plante là avec des façons insolemment paternelles et la prudence d’un sage qui défend ses quinze mille livres de rente. […] La vie en commun qu’il mène avec cette maîtresse, exigeante de passion, exigeante de caprice, et, par dessus le marché, exigeante des raffinements de l’existence matérielle, l’oblige à des dépenses qui menacent sa fortune et compromettent son avenir.

1165. (1861) Cours familier de littérature. XII « LXXIIe entretien. Critique de l’Histoire des Girondins (3e partie) » pp. 369-430

L’homme m’explique l’événement, le visage m’explique l’homme, les traits me révèlent le caractère, la vie privée me dévoile les motifs souvent cachés de la vie publique. […] Cela ne prouve pas que ce livre a du style, mais cela fait présumer qu’il a de la vie. […] Fille de Marie-Thérèse, elle avait commencé sa vie dans les orages de la monarchie autrichienne. […] Mais, comme la vie tout entière d’un homme le résume à toutes les dates de sa vie dans la qualification qu’un historien lui donne, ma plume a été étourdie, sinon coupable, en donnant alors à Robespierre une qualification à double interprétation, capable de fausser l’esprit de la jeunesse sur ce Marius civil, sur ce proscripteur-bourreau de la Révolution. […] Ce serait demander la force à la faiblesse et le suicide à la vie.

1166. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre XIV. La littérature et la science » pp. 336-362

On relève les transformations microscopiques par où ont passé les mots, les lettres, les sons ; on analyse à la loupe les métamorphoses incessantes de la vie linguistique d’une nation. […] Il ne faut pas être trop sévère pour des livres, d’ailleurs si magnifiquement dorés et reliés, dont l’apparition fut une fête dans la vie d’une multitude de petits hommes et de futures femmes. […] Les enfants prêtent la vie à tout ce qui les entoure ; ils se figurent comme des êtres bienfaisants ou malfaisants ces forces invisibles dont ils sentent les effets ; ils injurient le feu qui ne veut pas brûler ; ils se mettent en colère contre la porte qui s’obstine à ne pas s’ouvrir. […] La science nous a donné de nos jours le sentiment puissant de la vie universelle. […] Tantôt elle s’occupe avec prédilection de la vie mentale ; elle scrute, à l’aide de la conscience, ce microscope interne, les pensées, les aspirations, les rêves de l’âme ; elle s’envole dans l’au-delà, poursuit l’absolu, s’aventure dans l’infini, vogue en plein ciel au risque de se perdre dans les nues.

1167. (1887) Revue wagnérienne. Tome II « Paris, le 8 juillet 1886. »

Maints hasards de sa vie, qui jadis lui avaient paru indifférents, il les revoit, et leur suite logique. […] Il éprouve un bonheur fiévreux, quelque rapide grandissement de soi, dans cette vie évoquée, et qu’il revit. […] Pour suggérer les émotions, mode subtil et dernier de la vie, un signe spécial a été inventé : le son musical. […] La passion, contenue encore, de Tristan et d’Iseult émerge lentement des tumultes de la vie extérieure. […] Kurwenal ne tient guère à la vie !

1168. (1857) Cours familier de littérature. III « XVe entretien. Épisode » pp. 161-239

Viens, reconnais la place où ta vie était neuve, N’as-tu point de douceur, dis-moi, pauvre âme veuve, À remuer ici la cendre des jours morts ? […] III         Puis ces bruits d’année en année Baissèrent d’une vie, hélas ! […] Je me mis à genoux dans l’herbe, le visage tourné vers cette vallée principale de ma vie, non ma vallée de larmes, mais ma vallée de paix. […] Le vieux curé les suivait en récitant quelques versets de liturgie latine sur la brièveté de la vie ; un père et une mère pleuraient, en chancelant, derrière lui. […] La vie est un cantique dont toute âme heureuse ou malheureuse est une note. — Adieu !

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