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717. (1887) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (deuxième série). IX « Proudhon » pp. 29-79

Si le piédestal n’est pas de granit, la statue tombera le nez en terre. […] Lorsqu’après plus de soixante ans on voit cet attardé reprendre par terre, où elles étaient tombées, toutes les impiétés de Voltaire, on ne craint pas, malgré le talent dont il abuse, de lui dire sur la tête qu’il est un esprit inférieur. […] Pour bien comprendre la différence de la vigueur de ces deux hommes, partis tous les deux du principe de Descartes (l’examen individuel), qui n’était en somme que le principe protestant tombé de l’ordre religieux dans l’ordre métaphysique pour retomber dans l’ordre politique, comme toujours, il n’y a qu’à regarder leur point d’arrivée… Après Rousseau, que n’y a-t-il pas ? […] En d’autres termes, il se trompait du tout au tout, Proudhon, et comme un homme comme lui devait se tromper… car la chute se mesure à la hauteur d’où l’on tombe. […] Mais c’est bien moins la corruption qui est terrible, que le dogmatisme de la corruption » Ce n’est pas le nombre des femmes tombées, ce n’est pas même le nombre (disons le mot) des courtisanes s’accroissant chaque jour chez un peuple, qui fait le danger de la Famille et qui l’atteint.

718. (1900) Le rire. Essai sur la signification du comique « Chapitre II. Le comique de situation et le comique de mots »

Nous pourrions aussi bien penser à des soldats de plomb rangés à la file les uns des autres : si l’on pousse le premier, il tombe sur le second, lequel abat le troisième, et la situation va s’aggravant jusqu’à ce que tous soient par terre. […] Voici par exemple (j’ai pris au hasard une « série d’Épinal ») un visiteur qui entre avec précipitation dans un salon : il pousse une dame, qui renverse sa tasse de thé sur un vieux monsieur, lequel glisse contre une vitre qui tombe dans la rue sur la tête d’un agent qui met la police sur pied, etc. […] Même arrangement encore dans certaines scènes de Don Quichotte, par exemple dans celle de l’hôtellerie, où un singulier enchaînement de circonstances amène le muletier à frapper Sancho, qui frappe sur Maritorne, sur laquelle tombe l’aubergiste, etc. […] Qu’elle tombe maintenant au fond d’une cuve, son mari refusera de l’en tirer : « cela n’est pas sur son rôlet ». […] Tantôt il commence par constituer les séries indépendantes et s’amuse ensuite à les faire interférer entre elles : il prendra un groupe fermé, une noce par exemple, et le fera tomber dans des milieux tout à fait étrangers où certaines coïncidences, lui permettront de s’intercaler momentanément.

719. (1856) Mémoires du duc de Saint-Simon pp. 5-63

Ce couvert se mettait en retour au bout de la table ; puis elle disait à M. de Guise de s’y mettre, et il s’y mettait. » M. de Boufflers qui à Lille avait presque sauvé la France, reçoit en récompense les grandes entrées ; éperdu de reconnaissance, il tombe à genoux et embrasse les genoux du roi. […] Dans quel océan de minuties, de tracasseries poussées jusqu’aux coups de poings « et de griffes » ; dans quel abîme de petitesses et de ridicules, dans quelles chicanes inextricables de cérémonial et d’étiquette la noblesse était tombée, c’est ce qu’un mandarin chinois pourrait seul comprendre. […] C’est « la plus grande plaie que la patrie pût recevoir, et qui en devint la lèpre et le chancre. » Lorsqu’il apprend que d’Antin veut être pair, « à cette prostitution de la dignité », les bras lui tombent ; il s’écrie amèrement : « Le triomphe ne coûtera guère sur des victimes comme nous. » Quand il va faire visite chez le duc du Maine, bâtard parvenu, c’est parce qu’il est certain d’être perdu s’il y manque, ployé par l’exemple « des hommages arrachés à une cour esclave », le cœur brisé, à peine dompté et traîné par toute la volonté du roi jusqu’à « ce calice. » Le jour où le bâtard est dégradé est une « résurrection. » « Je me mourais de joie, j’en étais à craindre la défaillance. […] Écoutez ce style : « Je dis au roi que je n’avais pas pu vivre davantage dans sa disgrâce, sans me hasarder à chercher à apprendre par où j’y étais tombé... ; qu’ayant été quatre ans durant de tous les voyages de Marly, la privation m’en avait été une marque qui m’avait été très-sensible, et par la disgrâce et par la privation de ces temps longs de l’honneur de lui faire ma cour... ; que j’avais grand soin de ne parler mal de personne ; que pour Sa Majesté j’aimerais mieux être mort (en le regardant avec feu entre deux yeux). […] Nulle part on n’a vu une telle force, une telle abondance de raisons si hardies, si frappantes, si bien accompagnées de détails précis et de preuves ; tous les intérêts, toutes les passions appelées au secours, l’ambition, l’honneur, le respect de l’opinion publique, le soin de ses amis, l’intérêt de l’État, la crainte ; toutes les objections renversées, tous les expédients trouvés, appliqués, ajustés ; une inondation d’évidence et d’éloquence qui terrasse la résistance, qui noie les doutes, qui verse à flots dans le cœur la lumière et la croyance ; par-dessus tout une impétuosité généreuse, un emportement d’amitié qui fait tout « mollir et ployer sous le faix de la véhémence » ; une licence d’expressions qui, en face d’un prince du sang, se déchaîne jusqu’aux insultes, « personne ne pouvant plus souffrir dans un petit-fils de France de trente-cinq ans ce que le magistrat et la police eussent châtié il y a longtemps dans tout autre » ; étant certain « que le dénûment et la saleté de sa vie le feraient tomber plus bas que ces seigneurs péris sous les ruines de leur obscurité débordée ; que c’était à lui, dont les deux mains touchaient à ces deux si différents états, d’en choisir un pour toute sa vie, puisque après avoir perdu tant d’années et nouvellement depuis l’affaire d’Espagne, meule nouvelle qui l’avait nouvellement suraccablé, un dernier affaissement aurait scellé la pierre du sépulcre où il se serait enfermé tout vivant, duquel après nul secours humain, ni sien ni de personne, ne le pourrait tirer. » Le duc d’Orléans fut emporté par ce torrent et céda.

720. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 149

Il y a réussi, sans tomber, d’un côté, dans la morgue du pédantisme, & sans rien sacrifier, de l’autre, au ton de frivolité qui regne aujourd’hui dans tout ce qu’on appelle Production agréable.

721. (1887) Journal des Goncourt. Tome II (1862-1865) « Année 1863 » pp. 77-169

Dennery laisse ainsi tomber, de temps en temps, quelque méchanceté drolatique, quelque féroce aphorisme, quelque inouïe maxime d’attachement à soi-même. […] Et l’on ne sait comment le nom de Racine tombe dans la conversation. […] Elle tombe très gravement malade, sans le sou, à l’hôtel Valin, aux Champs-Élysées. […] Dans le mouvement de son refus, un peu de l’eau de la tasse, choquée par lui, tomba sur sa tunique. […] Le jour est tombé.

722. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Conclusions »

Conclusions 1° Une école littéraire qui se réclame des procédés d’investigation scientifique — et en particulier de l’observation médicale — tombe sous le coup d’une expertise médico-littéraire.

723. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — E — Esquiros, Alphonse (1812-1876) »

Évidemment résolu à ne jamais tomber dans le poncif de la diction courante, il trouve parfois des effets de mots et d’images très pittoresques.

724. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — S — Scheffer, Robert (1889-1926) »

Vers étranges et singuliers, chansons qui sanglotent, voix qui mord, mélancolie et passion qu’exaltent l’eau qui passe, la feuille qui tombe, la rose qui saigne, l’étoile qui descend.

725. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — H — article » p. 486

Harduin ne laisse rien échapper ; il discute des points essentiels que nos Grammairiens les plus célebres avoient oubliés, & releve les fautes dans lesquelles ils étoient tombés.

726. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 2-3

Quoiqu’il paroisse tomber quelquefois dans les travers des Ecrivains voyageurs, qui observent mal & exagerent toujours, on trouve néanmoins des détails vrais & intéressans dans son Nouveau Voyage aux Isles de l’Amérique.

727. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » p. 63

Lambert de se recopier & de tomber en contradiction avec lui-même, défaut ordinaire aux longues compilations.

728. (1763) Salon de 1763 « Peintures — Casanove »

Cet autre tombe, on ne peut mieux.

729. (1901) Des réputations littéraires. Essais de morale et d’histoire. Deuxième série

Ce cri a délivré l’âme du mort et délié enfin sa langue qui avait dû se taire ; car, sans le bruit qui se fit sur sa tombe, le monde n’aurait probablement pas connu la lettre si belle qu’il avait écrite à M.Trarieux. […] Mais, comme il était étranger, l’orgueil espagnol reporta toute la gloire de la défense sur Palafox, dont le nom continue d’éblouir la postérité, tandis que celui du brave et modeste général Saint-Marc est tombé dans l’oubli. […] Cette confusion de la critique avec le génie créateur est l’erreur où me semble être tombé M.  […] Vous pouvez, Cratès, entasser fautes sur fautes, mensonges sur mensonges ; si vous avez le don de l’autorité, tout écrit échappé de votre plume aura toujours du poids ; toute parole tombée de votre bouche gardera du crédit. […] Je crois qu’il mérite mieux que cette dernière ; mais je ne vois pas comment la critique contemporaine pourrait avec assurance se prononcer sur ce point, sans tomber dans un paralogisme.

730. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome IV pp. 5-

Il me semble que tout reproche tombe devant cette simple explication. […] Celle de l’inspiration secrète qu’on appelle divine, qui tantôt propre, tantôt figurée, ne doit jamais laisser refroidir le sentiment, ni tomber la pensée, ni s’obscurcir les peintures, ni s’avilir les termes, et qui, dans tout, porte le mouvement, la couleur et le feu. […] Delille nous apprit à imiter les coups portés sur l’enclume par les cyclopes, « ………………… Levant de lourds marteaux « Qui tombent en cadence et domptent les métaux. […] « Mourante de frayeur, elle tombe : Là, le vers, par sa chute, semble s’évanouir avec elle ; et deux syllabes inattendues viennent en soutenir la fin, en relevant la phrase poétique. […] Et de ces lieux si tranquilles, Nisus va courir à de nouveaux dangers pour y rejoindre Euryale, tombé dans les mains des assaillants.

731. (1853) Histoire de la littérature dramatique. Tome II « Chapitre IV. Que la critique doit être écrite avec zèle, et par des hommes de talent » pp. 136-215

Non, mais par hasard il passe devant la tombe du Commandeur ; il s’arrête, encore tout chaud du combat qu’il vient de livrer, et très heureux d’avoir un nouveau rendez-vous d’amour pour le soir. […] Pas une scène de ce drame n’explique mieux le caractère de notre héros ; enfin, savez-vous une façon plus nette et plus vive de préparer l’entrée de Don Juan dans la tombe du Commandeur et la terrible péripétie qui va venir ? […] quels honneurs ont suivi Montesquieu dans sa tombe ? […] Alors la voix grondeuse s’éloigne, et c’est le roi qui éteint la bougie en se jetant aux pieds de la jeune personne à demi pâmée ; ici la toile tombe, heureusement, pour les chastes regards. […] La cellule est étroite, le lit est de pierre, et l’on voit circuler, dans cette tombe anticipée, les victimes infortunées d’un crime si digne d’excuse et de pardon !

732. (1932) Le clavecin de Diderot

Dès la douane, et à plus forte raison, hors de leur continent, de leur continence, ils sentent tomber l’uniforme des contraintes. […] Il tomberait de haut, ce très subtil, à s’entendre dire, que son imprécision n’est qu’un bigoudi, ajouté à tous les bigoudis de faux-semblants, une hypocrisie pour empapilloter le classique dégueulis, quant à l’inégalité des races. […] Jésus tombait, se relevait, c’est-à-dire avait joui, se retrouvait prêt à jouir, avait rejoui sous le fouet des athlètes aux costumes suggestifs. […] Il tombe amoureux d’Hermione. […] Mais parfois la truffe fraîche, humide, palpitante tombait sur de l’inodore.

733. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Horace Vernet (suite et fin.) »

En grâce, mon cher Delaroche, écoutez-moi ; écoutez les conseils d’un grand-père qui vous parle de ses petits-enfants par-dessus la tombe de leur mère ! […] Pour mon compte, je viens de subir une rude épreuve contre laquelle je me roidissais depuis bien longtemps ; elle m’a confirmé dans la pensée que rien n’est plus fatal à un artiste que son éloignement de la multitude et du froissement du monde : l’isolement ne laisse prendre aucun repos à sa pensée dominante ; son sommeil même ne lui procure plus le moindre délassement ; une seule idée le domine sans cesse : elle l’use et l’énerve à force d’y songer, et, au bout du compte, il finit par ne plus savoir où il en est, faute d’objet de comparaison d’une part, et de l’autre parce qu’il ne rencontre plus sur sa route cet imprévu qui donne à chacun de nous la connaissance de sa force. » « Je suis convaincu, mon cher ami, que l’affaiblissement dans lequel je suis tombé est prématuré, que si les circonstances déplorables qui depuis une année ont changé mes rapports avec la société32 ne s’étaient pas présentées, je suis persuadé, dis-je, qu’il m’aurait été possible de soutenir plus longtemps le rang que mes travaux m’avaient assigné. […] » Il aurait voulu tomber frappé d’une balle. […] Il tombe dans un embarras de voitures ; le cabriolet est renversé.

734. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Sismondi. Fragments de son journal et correspondance. »

« Quant à l’homme qui tombe aujourd’hui, écrivait-il en mars 1814, j’ai publié quatorze volumes sous son règne, presque tous avec le but de combattre son système et sa politique, et sans avoir à me reprocher ni une flatterie ni même un mot de louange, bien que conforme à la vérité ; mais au moment d’une chute si effrayante, d’un malheur sans exemple dans l’univers, je ne puis plus être frappé que de ses grandes qualités. » Et dans une page mémorable où l’éloquence de l’âme se fait sentir, il balance ces hautes qualités et les énumère. […] … » Apparemment lady Holland était aussi enthousiaste de l’Empereur tombé que Mme d’Albany l’était peu. […] Sismondi a écrit en faveur de celui qui est tombé… Sa conduite ne m’a pas étonnée non plus que celle de son beau-frère10. […] Ceux que vous avez plaints et révérés dans le malheur, vous les aimez aussi dans la prospérité ; ceux que vous avez exécrés quand ils exerçaient la tyrannie, vous les exécrez encore quand ils sont tombés… En comparant ces deux manières de fidélité, l’une aux principes, l’autre aux personnes, je remarquerai, quoi que vous en puissiez dire, que la vôtre est beaucoup plus passionnée, beaucoup plus jeune que la mienne, et que, quelques efforts que vous ayez faits pour vous calmer par l’étude de la philosophie et une longue retraite, vous avez encore le cœur plus chaud et les sentiments plus ardents que celui que vous accusiez quelquefois de trop de jeunesse. » Bientôt la correspondance cessa, s’interrompit ; en la renouant l’année suivante, Sismondi s’y prit d’un ton fort digne, pas trop humblement, et sans faire son mea culpa du passé.

735. (1870) Nouveaux lundis. Tome XII « Madame Desbordes-Valmore. »

» Sa sœur Eugénie, qui habite Rouen, tombe mortellement malade, et l’on n’attend plus que sa fin. […] Quand il faut de part et d’autre travailler durement pour ne pas tomber dans la dernière indigence, les ailes de l’âme se replient et remettent tous les élans à l’avenir. » Dans des lettres à une amie, Mme Derains, elle revient sur cette misère des logements à trouver, et elle exprime en vives images le trouble moral et le bouleversement de pensées qui résulte de ces déplacements continuels : Ma bonne amie, vous me dites des paroles qui résument des volumes que j’ai en moi. […] Il est mort selon son vœu : il disait un jour, en pleine santé, qu’il fallait que l’homme de lettres mourût comme Eugène Delacroix, en ne laissant tomber le pinceau qu’au dernier moment. La plume ne lui est tombée de même à lui, définitivement, des mains que le jour où il s’est alité pour mourir.

736. (1889) Histoire de la littérature française. Tome II (16e éd.) « Chapitre premier »

Balzac y tombe, quand il dit : « J’ai un éventail qui lasse les mains de quatre valets, et qui fait un vent en ma chambre qui ferait des naufrages en pleine mer. » Goulu relève le défaut de couler d’une pensée noble dans une pensée basse. […] Le livre n’ajouta pas à sa réputation, et donna fort à railler à ceux qui avaient dit que « qui le tirerait hors de ses lettres lui ferait tomber la plume de la main, et que ce genre d’écrire, dans lequel on a la liberté de finir quand on veut, était la borne de son insuffisance. » On avait opposé le Prince de Machiavel à celui de Balzac, pour relever d’autant ce dernier. […] L’enthousiasme tomba ; mais il resta l’estime. […] Après un récit qui a pu paraître extraordinaire à l’aimable précieuse, il ajoute : « Il me vient de tomber dans l’esprit que vous imaginerez que tout cela est faux, et que ce que j’en ai dit n’était que pour trouver moyen de remplir ma lettre.

737. (1863) Le réalisme épique dans le roman pp. 840-860

Si la pécheresse, au bord de la tombe, demande sa consolation et sa force au plus mystérieux sacrement de la religion catholique, la peinture de cette scène a juste autant de valeur dans l’ensemble du roman que la description d’une casquette ridicule sur la tête d’un collégien de province. […] Cette action d’Hamilcar, qui fut le chef-d’œuvre et la couronne de son savoir dans l’art militaire, et le salut d’une république très puissante tombée dans les extrémités les plus tristes, cette action, dis-je, se trouve dépouillée d’une infinité de circonstances très importantes pour l’intelligence d’un événement si mémorable. […] Au moment où il tombe, elle meurt. […] L’auteur n’échappe pas cependant à l’ironie de Chénier ; relisez les sarcasmes dont le satirique accablait l’école de Delille, vous verrez qu’ils tombent avec la même force sur l’auteur de Salammbô.

738. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Monsieur de Latouche. » pp. 474-502

Nous ferons comme les autres, et nous dirons notre mot sur l’homme d’esprit, sur l’homme de talent disparu, en tâchant d’être juste, et en adoucissant par endroits cette justice d’un peu de cette indulgence dont chacun de nous a besoin le jour où il tombe. […] Ce que seraient devenues ces adorables Poésies d’André Chénier si elles étaient tombées en d’autres mains, en des mains académiques de ce temps-là, ce qu’elles auraient subi de retranchements, de corrections, de rectifications grammaticales, on n’ose y songer. […] M. de Latouche, pendant toute la Restauration, chercha vainement ce grand succès littéraire, né du génie et de l’occasion, et qui fait tomber sur un front la couronne. […] Mais sa violence permanente et fixe ne data que du jour où La Reine d’Espagne, comédie sur laquelle, par une étrange illusion, il fondait les plus grandes espérances, tomba au Théâtre-Français, le 5 novembre 1831.

739. (1902) Les œuvres et les hommes. Le roman contemporain. XVIII « Octave Feuillet »

En effet, fêlé dans le père, le Borgia va crouler et tomber dans le fils, morceau par morceau, comme une vitre cassée, et nous allons avoir affaire à un caractère non pas vertueux, non ! […] Ainsi, il tombe comme un milan sur la femme de son meilleur ami, laquelle ne lui fait pas ombre de résistance, et après l’avoir possédée, il lui crache son mépris à la figure. […] Ainsi encore quand il s’éprend de sa cousine Charlotte, qui pourra faire illusion aux petits jeunes gens, mais qui n’a pas d’autre grandeur que celle de la beauté ; qui tente et tombe comme toute femme ; qui craint moins, dit-elle (toujours les mêmes charlatanes de mots !) […] » Voyez enfin la scène du billet par lequel elle se donne à lui, corps et âme, et qui le foudroie de plus belle, qui le fait tomber sous ce pied qui le roule dans la fange et qui l’y maintient jusqu’au moment (car il faut bien que les romans finissent) où une autre femme, la sienne, et son enfant, l’arrachent à cette domination honteuse, si longtemps subie, pour le faire mourir de désespoir !

740. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — G — article » p. 386

Mais celui-ci est tombé dans l’extrémité opposée ; il n’a fait qu’un squelette.

741. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l'esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu'en 1781. Tome IV « Les trois siecles de la littérature françoise.ABCD — S. — article » pp. 269-270

Si l'imagination est, après le génie, le premier mérite des Gens de Lettres ; Mlle de Scudery a sujet de se plaindre de l'oubli où elle est tombée.

742. (1823) Racine et Shakspeare « Chapitre II. Le Rire » pp. 28-42

Voyez passer ce jeune homme paré avec tant de recherche : il marche sur la pointe du pied, sur sa figure épanouie se lisent également et la certitude des succès, et le contentement de soi-même ; il va au bal, le voilà déjà sous la porte cochère, encombrée de lampions et de laquais ; il volait au plaisir, il tombe et se relève couvert de boue de la tête aux pieds ; ses gilets, jadis blancs et d’une coupe si savante, sa cravate nouée si élégamment, tout cela est rempli d’une boue noire et fétide. […] Que le beau jeune homme qui allait au bal, et qui est tombé dans un tas de boue, ait la malice, en se relevant, de traîner la jambe et de faire soupçonner qu’il s’est blessé dangereusement, en un clin d’œil le rire cesse, et fait place à la terreur.

743. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XXII » pp. 222-236

Mademoiselle de Montpensier rapporte à la page déjà citée que peu après les propos dont elle réprimanda Montespan, « madame de Montausier étant dans un passage derrière la chambre de la reine, où l’on met ordinairement un flambeau en plein jour, elle vit une grande femme qui venait droit à elle, et qui, lorsqu’elle en fut proche, disparut à ses yeux, ce qui lui fit une si vive impression dans la tête et une si grande crainte qu’elle en tomba malade. » Le duc de Saint-Simon raconte ce fait singulier et mystérieux d’une manière plus significative. […] Elle empêcha ses gens de la maltraiter, et tout éperdue remonta chez elle, s’y trouva mal, et tomba incontinent dans une maladie de langueur qui lui fit fermer sa porte à tout le monde.

744. (1824) Notes sur les fables de La Fontaine « Livre neuvième. »

Une souris tomba du bec d’un chat-huant…. […] Tomba dans ses mains, etc… C’est une métaphore, pour dire, en son pouvoir ; autrement il faudrait, dans ses griffes.

745. (1905) Les ennemis de l’art d’écrire. Réponse aux objections de MM. F. Brunetière, Emile Faguet, Adolphe Brisson, Rémy de Gourmont, Ernest Charles, G. Lanson, G. Pélissier, Octave Uzanne, Léon Blum, A. Mazel, C. Vergniol, etc… « VII »

Quant à identifier Homère avec le traducteur, c’est un ridicule où nous ne sommes pas tombés, quoi qu’on dise ; nous avons même fait soigneusement cette distinction. […] Nul danger pour eux de tomber dans l’imitation servile, parce qu’en effet « il est aussi impossible de revenir au style d Homère que de reprendre l’arc et le bouclier ».

746. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre II. Mme Le Normand »

Est-ce sur tout cela que vous allez faire tomber un jour plus vrai ? […] Et depuis, si Mme de Staël fut exilée, elle qui compta bien moins, pour les salons, par son esprit que par ses deux cent mille livres de rente, ses relations et la position qu’avait eue son père, ce n’est pas que l’Empereur eût peur de ces salons dont on la disait la reine, mais c’est qu’il était agacé d’entendre toujours tomber de petits coups d’éventail sur son sceptre ; c’est que les lions, tout lions qu’ils soient, s’impatientent et jouent de la griffe, quand une mouche, fût-elle bleue, leur entre dans le nez !

747. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre XIII. Mme Swetchine »

Tout ce qu’elle a écrit sur la plupart des sujets même mondains qui ont occupé sa pensée, sue cette sueur d’un sang apaisé qui coule doucement sans se révolter contre les blessures d’où elle tomber. […] C’est encore une manière de perdre un enfant que de n’en pas avoir, et il avait fallu se résigner à ne voir jamais, dans sa vie, de berceau sur lequel on puisse sourire, ce qui équivaut pour une âme de femme à une tombe sur laquelle on doit, hélas !

748. (1906) Les œuvres et les hommes. À côté de la grande histoire. XXI. « Royalistes et Républicains »

On a cité ce livre, qui, au fond, n’en est pas un… Il a eu son succès, ce succès d’un jour qui marque sur le cours de l’opinion, comme une feuille qui y tombe marque sur le ruisseau qui coule et qui l’emporte. […] Cet homme, au fond de juste milieu, quand les passions n’en faisaient pas un homme d’extrémité, avait, comme il disait, emporté dans la tombe les débris d´une monarchie dont il voulait sauver le dernier des lambeaux qu’il avait déchirés !

749. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « M. Antoine Campaux » pp. 301-314

Né dans les ruisseaux de Paris, que Madame de Staël aimait seulement rue du Bac, François Villon (qu’on me permette ce mot moderne), le voyou du xve  siècle, l’escholier qui ne fut jamais maître, si ce n’est en poésie, est resté toujours un peu vautré dans la bouc noire de son origine et masqué comme un marmouset par cette fange, quoiqu’à plusieurs reprises un rayon d’or soit tombé sur lui. […] Campaux a mis, avec beaucoup de tact, à part de tout, dans l’analyse qu’il fait du génie de son poète, cette fusion divinement humaine du rire et des larmes qui fait tomber des pleurs dans la coupe rose des lèvres souriantes, et passer à travers les épanouissements des rires le cruel fausset des sanglots.

750. (1905) Les œuvres et les hommes. De l’histoire. XX. « La révocation de l’Édit de Nantes »

Au lieu de pénétrer la pensée politique qui se cache sous cette dure mesure de la révocation de l’Édit de Nantes, il a été plus tôt fait et bien plus facile de redire de Louis XIV, tombé sous la quenouille de madame de Maintenon, les lieux communs que débite, depuis plus d’un siècle, cette haïsseuse de tout pouvoir : la Philosophie. […] Obligé, par le sujet même de son livre, de parler d’hommes qui n’eurent jamais nulle part, à l’exception de quatre ou cinq d’entre eux peut-être, ce haut pavé historique qui agit tant et tout d’abord sur l’imagination du lecteur, il n’a pas, selon nous, assez contenu son récit entre ces quelques hommes vraiment dignes du regard de l’histoire, et il est tombé dans les infiniment petits d’une longue suite de biographies.

751. (1906) Les œuvres et les hommes. Femmes et moralistes. XXII. « Vauvenargues » pp. 185-198

Un homme de la fin du même siècle qui n’a exprimé aussi de sa pensée que quelques gouttes, mais autrement puissantes, d’un citron autrement pénétrant et parfois autrement mortelles que celles que Vauvenargues fit tomber de la sienne, Chamfort, si au-dessus de Vauvenargues par tout excepté par le caractère, n’est pas un moraliste non plus, quoiqu’il en ait révélé les profondes aptitudes. […] La renommée qu’il doit à Voltaire tombera en miettes devant la Critique qui le touchera d’un doigt ferme, comme un vieux tableau pulvérisé.

752. (1888) Les œuvres et les hommes. Les Historiens. X. « M. Félix Rocquain » pp. 229-242

Quand on tombe de son titre dans le volume de M. Félix Rocquain, on tombe d’un quatrième étage… L’auteur de L’Esprit révolutionnaire avant la Révolution, n’a vu, en se vantant, que ce que tout le monde a vu, sans se vanter.

753. (1860) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (première série). I « XV. Vauvenargues »

Un homme de la fin du même siècle, qui n’a exprimé aussi de sa pensée que quelques gouttes, mais autrement puissantes, d’un citron, autrement pénétrant, et parfois autrement mortelles que celles que Vauvenargues fit tomber de la sienne, Chamfort, si au-dessus de Vauvenargues par tout, excepté par le caractère, n’est pas un moraliste non plus, quoiqu’il en ait révélé les profondes aptitudes. […] La renommée qu’il doit à Voltaire tombera en miettes devant la Critique qui le touchera d’un doigt ferme, comme un vieux tableau pulvérisé.

754. (1899) Les œuvres et les hommes. Les philosophes et les écrivains religieux (troisième série). XVII « L’abbé Brispot »

L’abbé Brispot accompagne le texte concordé des Évangiles de commentaires, explications et notes, tirés des écrivains les plus illustres de l’Église dans l’ordre de la sainteté ou de la science, et c’est dans le choix de ces annotations, qui viennent ajouter leur lumière à celle du texte souvent d’une trop divine pureté pour tomber dans des yeux charnels sans les offenser, que l’abbé Brispot a montré les richesses d’une forte érudition religieuse et le tact supérieur qui sait s’en servir. […] Nous sommes arrivés à une époque où les discussions tombent d’elles-mêmes, où ce qu’on appelle la logique en a tant fait qu’elle est déshonorée, et où les épouvantables fatigues de l’anarchie nous guériront peut-être de l’anarchie.

755. (1906) Les œuvres et les hommes. Poésie et poètes. XXIII « Henri Cantel »

Cependant le remords, le dégoût ou l’ennui d’une forme fausse qui n’a point été tirée d’où les poètes puissants tirent la leur, c’est-à-dire des entrailles, s’emparent, vers le milieu de son volume, de ce moderne, dont les langes furent sans doute parfumés de ce christianisme de nos mères qui tomba sur tous nos berceaux ; et voilà que, lassé et des éternels marbres de Paros et de toutes les rondeurs païennes qui sont les globes de ses horizons, il s’écrie… à la fin : ……… pauvre muse égarée ; Nous souffrirons encore et ne nous plaindrons pas. […] à force d’y tomber, les feuilles mortes peuvent tuer les racines.

756. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Ronsard »

En définitive, c’est Ronsard, qui, après son trépas, est sorti de sa tombe pour enterrer Malherbe, et qui l’a enterré : À quatre pas d’ici, je te le fais savoir ! […] Chez les Hongrois et chez leurs ancêtres les Huns, on avait pour coutume d’égorger les esclaves ennemis sur les tombes entrouvertes… Sur la tombe vidée de Ronsard montant tout à coup dans l’assomption de sa gloire, nous ne nous sommes pas contentés de Malherbe, nous avons égorgé Boileau.

757. (1889) Les œuvres et les hommes. Les poètes (deuxième série). XI « Milton »

Le calme d’une âme forte tomba bientôt sur elles. […] Sans le Paradis perdu, en effet, sans cette rose née sur une tombe entrouverte, sans cette production tardive d’une vie dévorée, que serait en réalité Milton, malgré ses soixante ans de travaux, d’efforts, de science et même de renommée, — de cette renommée qui fait du bruit quelques jours, puis qui meurt ?

758. (1865) Les œuvres et les hommes. Les romanciers. IV « M. Théophile Gautier. » pp. 295-308

Or, précisément c’est ce que j’ai fait, moi, avec toute la conscience dont je suis capable, et, en fait d’aventures et d’événements créés par une imagination souveraine, voici exactement ce que j’ai trouvé : Écoutez : Le baron de Sigognac est le dernier descendant mâle de l’antique famille de ce nom, tombée du haut d’une splendeur historique dont les rayons remontaient aux croisades, dans une de ces ruines si profondes, qu’on peut les nommer une splendide pauvreté. […] Je n’y ai pas reconnu non plus l’écrivain au vaste dictionnaire dans le recureur d’une vingtaine de mots tombés en désuétude, entre lesquels il roule la langue de tout le monde, et c’est surtout cette disparition totale de l’écrivain et du poëte, dont l’union donne M. 

759. (1773) Essai sur les éloges « Morceaux retranchés à la censure dans l’Essai sur les éloges. »

Il ne faut pas oublier que, par arrêt du parlement, son innocence fut reconnue ; mais c’était après la mort du cardinal, et sa tête, en attendant, était tombée sur l’échafaud. […] L’esprit de servitude et d’oppression semble errer encore autour de la tombe des rois et des ministres.

760. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

La tombe attend ; elle est avide ! […] La peur du ridicule ferait tomber son exaltation et son amour. […] Le jour du mariage, au moment où il va, avec les membres et les amis de la famille, embrasser Madeleine, il tombe en faiblesse. […] Il décide de partir, fait ses adieux, et c’est le moment inévitable où ils tombent dans les bras l’un de l’autre. […] Amiel est lourd, ses épaisses méditations non seulement vont vers un centre, mais elles y tombent, elles y sont entraînées par des semelles de plomb.

761. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome I « Les trois siecles de la litterature françoise. — A — article » p. 147

L’abus regne, l’art tombe, & la raison s’enfuit.

762. (1767) Salon de 1767 « Peintures — Monnet » p. 281

Au sortir des mains de Pierre, il tomba dans celles de Bachelier, qui l’a livré cette année à Parocel, à Brenet, à Lépicié, à Monnet qui le tient à présent.

763. (1889) Histoire de la littérature française. Tome III (16e éd.) « Chapitre quatorzième. »

Fénelon n’a d’ailleurs attaché son nom à aucune de ces erreurs fécondes où la poursuite acharnée de l’incompréhensible a fait tomber quelques esprits sublimes. […] La même imagination qui rêvait tout à l’heure une armée formée de tous les jeunes gens inutiles à l’agriculture et au commerce, invente une sorte d’espionnage licite, fait à contre-cœur, et par pur dévouement, « par d’honnêtes gens, dit-il, que le prince obligerait malgré eux à veiller, à observer, à savoir ce qui se passe, à l’en avertir secrètement. » Ces chimères, d’ailleurs fort innocentes, sont la marque, je dirais presque le châtiment de la contradiction où tomba cet homme illustre, en voulant renouveler dans sa personne la fortune de Richelieu et de Mazarin. […] « J’espère, lui écrit le duc de Bourgogne, par la grâce de Dieu, non pas telle que les jansénistes l’entendent, mais telle que la connaît l’Eglise catholique, que je ne tomberai jamais dans les pièges qu’ils voudront me dresser. » Le sage Mentor a oublié le conseil qu’il donnait au roi Idoménée de ne point se mêler des affaires de religion, et d’en laisser les débats aux prêtres des dieux165. […] Quant aux erreurs, en si grand nombre, où il est tombé, le caractère en est le même que celui des vérités ; elles y paraissent moins de l’humanité que d’un homme. […] Mais s’il est tombé dans toutes les erreurs attachées au sens propre, il a toute la gloire d’invention et de nouveautés solides que le sens propre pouvait donner de son temps.

764. (1879) À propos de « l’Assommoir »

59 Inclinant ensuite la patène, il en fait doucement tomber l’hostie sur le milieu de la partie antérieure du corporal, sans la toucher des doigts… Art. 79…. […] L’auteur des Rougon-Macquart a bien changé depuis ce temps-là : il a grossi, ses cheveux sont un peu tombés, mais il a conservé son bon regard, son sourire bienveillant, cet air tranquille et serein qui lui gagnent de suite la sympathie. […] Que le drame soit bon ou mauvais, qu’il réussisse ou qu’il tombe, je n’en veux pas moins dire d’avance mon sentiment très net sur le livre d’où il est tiré. […] (Il tombe comme une masse sur le matelas où il meurt). […] Elle tombe d’inanition, littéralement morte de faim.

765. (1896) Journal des Goncourt. Tome IX (1892-1895 et index général) « Année 1893 » pp. 97-181

Après Rochegrosse, Jean Lorrain tombe chez moi, de retour d’Alger, de Tunis. […] C’était dans le jardin des Missions Étrangères, la nuit presque tombée, un chœur d’hommes chantant des Laudate, un chœur de mâles voix s’élevant — Montesquiou suppose, que c’était devant de mauvaises peintures, représentant les épouvantables supplices dans les pays exotiques — s’élevant et s’exaltant en face de ces images du martyre, comme si les chanteurs du jardin étaient pressés de leur faire de sanglants pendants. […] Villard m’entretenait d’un voyage qu’il avait fait en Norvège, où il était tombé dans une verrerie, qui était une colonie française, réfugiée là, à la suite de la révocation de l’édit de Nantes, ayant conservé très reconnaissable le type français, mais n’ayant gardé de leur ancienne langue, que le mot « Sacré nom de Dieu ». […] Mercredi 19 juillet Daudet nous disait, ce soir qu’il était tombé à huit ans, sur un volume dépareillé de Tom Jones, et qu’il avait lu, que la chose qui avait amené sa naissance, avait été une distraction d’une demi-heure. […] Et l’auteur de Pœuf se remémore quelques impressions de son enfance coloniale, entre autres, l’écoute, à l’orée d’une grande forêt, vers la tombée de la nuit, l’écoute de l’éveil de la forêt, où, de temps en temps, au-dessus de tous les bruits, s’élevait une grande lamentation d’animal, que toute la ville allait entendre : lamentation mystérieuse, et qu’on ne savait à quelle bête attribuer.

766. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — G — Guttinguer, Ulric (1787-1866) »

Ainsi nul œil, Ulric, n’a pénétré les ondes De tes douleurs sans borne, ange du ciel tombé ; Tu portes dans ta tête et dans ton cœur deux mondes, Quand le soir, près de moi, tu viens triste et courbé.

767. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — P. — article » p. 464

Amis, de mauvais Vers ne chargez pas ma tombe.

768. (1888) Impressions de théâtre. Deuxième série

Mais un autre bouquet lui tombe sous la main, un bouquet de roses. […] M. de Bardannes et ses invités entrent à pas de loup, sont près de tomber en extase. […] Mais aussi c’est si affreux que le drame en tombe dans l’aphasie. […] » mais elle tombe roide avant d’avoir pu frapper… Tout cela est rapide, pittoresque et brutal. […] Les bonnes amies couronnées ensemble tombent dans les bras l’une de l’autre comme Élise et Esther.

769. (1817) Cours analytique de littérature générale. Tome III pp. 5-336

Le terme de cette révolution périodique pour les individus, et pour les nations, amène communément l’usage de tout décomposer : dès lors tombe l’idéal et rien de ce qui excède la mesure ordinaire de l’intelligence répartie à la multitude, ne paraît admissible à la raison : la crainte du chimérique et de l’absurde repousse le brillant voile dont la fiction habille la vérité. […] « Un bruit s’épand qu’Enguien et Condé sont passés ; « Condé, dont le seul nom fait tomber les murailles, « Force les escadrons, et gagne les batailles ; « Enguien, de son hymen le seul et digne fruit, « Par lui dès son enfance à la victoire instruit. […] Son talent ne fût pas tombé dans mille écarts qui le forcèrent à revenir en sens contraire sur tous ses pas, s’il eût appuyé sa marche d’un système exact et régulier, qui seul empêche de s’égarer dans les études littéraires. […] La capacité des hommes ne recevant que les choses qui se présentent sous des formes sensibles n’eût pas conçu la pure idée d’un Dieu suprême qui créa le monde et qui le gouverne, ni celle des divinités secondaires qui concourent à la coordonnance universelle, si leur imagination n’eut revêtu ces êtres de raison de quelque figure matérielle qui tombât sous leurs sens, et qu’ils pussent envisager d’une vue intuitive. […] « Que diras-tu de voir, dans leur âge tombées, « Les comètes se fondre en mes feux absorbées ?

770. (1868) Curiosités esthétiques « V. Salon de 1859 » pp. 245-358

Je craindrais de tomber dans le vice de feu Girardin, de sophistique mémoire, qui reprochait un jour à Théophile Gautier de faire payer son imagination beaucoup plus cher que les services d’un sous-préfet. […] Mais ces beaux temps sont passés ; nous sommes tombés plus bas, et M.  […] Je vous raconterai simplement ce que j’ai appris de la bouche d’un maître homme, et, de même qu’à cette époque je vérifiais, avec la joie d’un homme qui s’instruit, ses préceptes si simples sur toutes les peintures qui tombaient sous mon regard, nous pourrons les appliquer successivement, comme une pierre de touche, sur quelques-uns de nos peintres. […] La plupart tombent dans le défaut que je signalais au commencement de cette étude : ils prennent le dictionnaire de l’art pour l’art lui-même ; ils copient un mot du dictionnaire, croyant copier un poème. […] Et puis il tombe dans le fameux défaut moderne, qui naît d’un amour aveugle de la nature, de rien que la nature ; il prend une simple étude pour une composition.

771. (1856) À travers la critique. Figaro pp. 4-2

Jules Janin sur la tombe de la jeune comédienne. […] Ce masque d’érudition, sous lequel étouffait un talent aimable, tombe ; le vrai, le naturel reparaissent, et avec eux l’homme d’esprit et l’homme de goût. […] Resté noblement serviteur d’une cause tombée, en présence d’événements qui ont pu le surprendre, il a su s’effacer sans s’aplatir… comme tant d’autres. […] J’ai vu le moment où, dans un travail à sa louange la gloire du fils tombait asphyxiée aux côtés de celle du père, aspirant à pleins poumons, l’oxygène d’un éloge à forte dose. […] Le traître n’avait plus de profil et les longues souffrances faisaient tomber en écailles les couleurs flamandes de la noble duchesse de Brabant.

772. (1929) Amiel ou la part du rêve

Les barrières de caste qui à Genève empêchaient Amiel de pénétrer dans certains milieux genevois, tombent à l’étranger. […] Il y tombait en plein comme professeur. […] ne deviez-vous pas — je l’ose dire à peine — Voir de quelle hauteur mon rêve tomberait ? […] Le demi-siècle de célibat tomberait. […] » a reçu le mot de passe de la confrérie des absents. « Celui qui sème pour l’esprit, ont inscrit ses amis sur la tombe d’Amiel, moissonnera de l’esprit la vie éternelle. » Les éternels sont les hors-durée.

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