Ils prenaient possession de la terre non encore parcourue, non encore décrite ; étonnés de chaque jouissance, de chaque production de la nature, ils y plaçaient un dieu pour l’honorer, pour en assurer la durée. […] Moins il y avait de communications faciles entre les divers pays, plus le récit des faits se grossissait par l’imagination ; les brigands et les animaux féroces qui infestaient la terre, rendaient les exploits des guerriers nécessaires à la sécurité individuelle de leurs concitoyens ; les événements publics ayant une influence directe sur la destinée de chacun, la reconnaissance et la crainte animaient l’enthousiasme.
Bossuet se fait-il l’avocat du vice, quand il défend à des religieuses la recherche de la perfection, et leur recommande le terre à terre des petites vertus et des devoirs journaliers ?
Que l’ignorance confonde l’homme de Lettres avec ces hommes livrés à la paresse sous le nom de repos, qui se dérobent à l’agitation générale pour vivre dans le desœuvrement, qui dorment mollement sur des fleurs, en s’abandonnant au cours enchanteur d’une riante imagination ennemie du travail, & amie de la paix, dont la longue carrière peut être considerée comme un doux rêve, & qui tombent dans les bras de la mort, sans avoir daigné graver sur la terre le souvenir de leur existence ; cette injustice ne m’étonnera point, elle sera digne d’elle : mais l’œil qui aura suivi les travaux de l’homme de Lettres jugera différemment, il le verra souvent insensiblement miné par de longues études, périr victime de son amour pour les Arts, tomber en poursuivant avec trop d’ardeur la vérité, comme l’oiseau harmonieux des bois tombe de la branche au milieu de ses chants, ou plutôt comme ces illustres Artistes dont la main intrépide interrogeant dans la région enflammée de l’air le phénomene électrique, couronnent tout à coup leur vie par une mort fatale & glorieuse. […] Ce Sexe l’ornement de la terre destiné à élever nos premiers ans, sera-t il toujours condamné à la frivolité ?
Francesco Andreini, par exemple se faisait annoncer par son valet de la manière suivante : « Tu diras que je suis le capitaine Spavente de la vallée infernale, surnommé l’endiablé prince de l’ordre de la chevalerie ; Trismégiste, très grand bravache, très grand frappeur, très grand tueur ; dompteur et dominateur de l’univers, fils du tremblement de terre et de la foudre, parent de la mort et ami très étroit du grand diable d’enfer. » Dans La Prigione d’Amore (la Prison d’Amour), de Sforza Oddi nell’academia degli Insensati detto il Forsennato (membre de l’académie des Insensés, surnommé le Furieux), comédie récitée à Pise par les étudiants, pendant le carnaval de 1590, le rôle du capitan est très développé, et se termine par le récit suivant, qui pourra servir de spécimen. […] Je pris de la main gauche le trésorier et m’en servis comme d’un bouclier ; et, tirant Durandal du fourreau, je la dirigeai vers le roi qui s’avançait pour me frapper ; d’un coup, je fendis le pavé, j’ouvris la terre jusqu’aux abîmes où Neptune fut frappé de stupeur.
En Judée, Jean ne paraît pas avoir été inquiété par Pilate ; mais dans la Pérée, au-delà du Jourdain, il tombait sur les terres d’Antipas. […] Dissimulant son dessein, elle feignit de vouloir faire un voyage à Machéro, sur les terres de son père, et s’y fit conduire par les officiers d’Antipas 325.
Malheur à vous, qui parcourez les terres et les mers pour gagner un prosélyte, et qui ne savez en faire qu’un fils de la Géhenne ! […] La Sagesse de Dieu a eu bien raison de dire 987 : « Je vous enverrai des prophètes, des sages, des savants ; vous tuerez et crucifierez les uns, vous ferez fouetter les autres dans vos synagogues, vous les poursuivrez de ville en ville ; afin qu’un jour retombe sur vous tout le sang innocent qui a été répandu sur la terre, depuis le sang d’Abel le juste jusqu’au sang de Zacharie, fils de Barachie 988, que vous avez tué entre le temple et l’autel. » Je vous le dis, c’est à la génération présente que tout ce sang sera redemandé 989. » Son dogme terrible de la substitution des gentils, cette idée que le royaume de Dieu allait être transféré à d’autres, ceux à qui il était destiné n’en ayant pas voulu 990, revenait comme une menace sanglante contre l’aristocratie, et son titre de Fils de Dieu qu’il avouait ouvertement dans de vives paraboles 991, où ses ennemis jouaient le rôle de meurtriers des envoyés célestes, était un défi au judaïsme légal.
Et il ressemble à un grand vase plein d’humanité que la main qui est dans la nuée secouerait, et d’où tomberaient sur la terre de larges gouttes, brûlure pour les oppresseurs, rosée pour les opprimés. […] Car il est beau, sur cette terre sombre, pendant cette vie obscure, court passage à autre chose, il est beau que la force ait un maître, le droit, que le progrès ait un chef, le courage, que l’intelligence ait un souverain, l’honneur, que la conscience ait un despote, le devoir, que la civilisation ait une reine, la liberté, et que l’ignorance ait une servante, la lumière.
Cependant le mal est sur la terre. […] Ainsi l’apparition subite de la vie, des espèces animales, de l’homme sur la terre, prouve la création.
des voyages par terre, faits dans toutes les parties du monde : contenant ce qu’il y a de plus remarquable & de mieux avéré dans tous les pays où les voyageurs ont pénétré, touchant leur situation, leur étendue, leurs limites, leurs divisions, leurs climats, leur terroir, leurs productions, leurs lacs, leurs rivieres, leurs montagnes, leurs mines, leurs habitations, leurs principales villes, leurs ports, leurs rades, &c. ; avec l’histoire, les mœurs, & les usages des habitans, leur religion, leur gouvernement, leurs arts, leurs sciences, leur commerce, leurs manufactures, &c. : ouvrage enrichi de Cartes géographiques nouvellement composées sur les observations les plus authentiques, de plans & de perspectives, de figures d’animaux, de végétaux, habits, antiquités, &c. […] Mr. de Querlon a pour associé dans cette entreprise M. de Surgi, à qui l’on doit les Mélanges intéressans, ou l’Abrégé de l’Histoire naturelle, de l’Asie, de l’Afrique & des terres polaires, en dix vol.
La cervelle du sculpteur s’échauffait, et il ne prenait la terre molle et l’ébauchoir que quand il avait conçu l’image orthodoxe. […] Les hommes seront descendus de cheval, et laissant paître en liberté leurs animaux, étendus sur la terre, ils continueront l’entretien, ou ils s’amuseront à lire l’inscription de la tombe.
Mais heureusement pour nous, et j’ose dire heureusement pour elle, — car l’âme des saints doit être avide, même dans le ciel, de faire, par leur exemple, d’autres saints sur la terre, — il y eut dans sa vie, toujours cachée ou empêchée, le hasard providentiel de la rencontre d’un poëte et d’un cœur religieux, sans lequel nous n’aurions aujourd’hui ni l’immense poëte qu’elle fut, elle, ni la sainte aux grâces transcendantes, que M. […] regardez les acteurs de ce drame qui se joua une fois sur la terre et dont le ciel fut spectateur, et jugez si la vision de notre Mystique ne nous les a pas reproduits, dans l’esprit éternel de leur personnage, quoique éclairés par mille côtés et mille détails que, pour des raisons de providence, l’Évangéliste avait laissés dans l’ombre.
Tous les grands hommes n’ont pas que des filles à la manière d’Épaminondas… Tous les grands ministres, même ceux qui furent cardinaux, ne sont pas des moines comme Ximénès et ne sombrent pas tout entiers sous leur cilice et dans la tombe, et il est intéressant de suivre, après eux, la destinée de ces familles au sein desquelles ils ont brillé, — dont ils étaient l’âme et la puissance ; il est intéressant d’apprendre comment se sont écartées et rompues ces racines, verticales et horizontales (comme dit un écrivain allemand), qui les attachaient à la terre ! […] Il y a une biographie du marquis de Vardes qui fait rentrer sous terre les Améric Vespuce de sa gloire, les Lauzun, les Richelieu, et toute cette race de fats heureux, le caprice des femmes et leurs tyrans.
» disait un jour Sophie Arnould au duc de la Vallière, en jetant son cordon bleu par terre. « Agenouillez-vous là-dessus », dit l’Académie aux écrivains qui ont méprisé ses fauteuils, en mettant par terre les livres dans lesquels ils les ont méprisés, — et ils obéissent comme la vieille ducaille !
Guillaume a soutenu qu’elle consistait essentiellement à prendre pour horloge la propagation de la lumière, et non plus la rotation de la Terre. […] Mais ces résultats sont incompatibles avec la constance du jour sidéral, car d’après eux les marées doivent agir comme un frein sur la rotation de la Terre.
Thompson, après avoir décrit toutes les découvertes de ce grand homme sur la gravitation, sur les comètes, sur la lumière, sur la chronologie, après avoir peint la douceur de ses mœurs et l’élévation tranquille et calme de son caractère, s’interrompt tout à coup : « N’entends-je pas, dit-il, une voix semblable à celle qui annonce les grandes révolutions sur la terre ? […] (si quelque chose de cette poussière de la terre peut encore monter jusqu’à toi) pardonne un vain éloge inutile de ta gloire.
Blémont donne ses chansons normandes, qui ont la saine senteur de la terre des bons pommiers.
Qu’il sommeille donc le poète dont la mémoire nous défend des félonies envers l’art et envers les hommes, et que nul ne révèle l’intime trésor de cette âme fière et douce, douloureuse de se sentir recluse en soi-même par un trop noble amour des êtres vivants, des lueurs et des frissons qui troublent d’inquiétudes passagères la terre et le ciel, et des immuables étoiles qu’il avait entrevues !
[La Terre provençale (1890).]
Dans cette œuvre malheureusement parcimonieuse, de rares beautés s’imposent, parterre de fleurs qui s’inclinent à mourir et regrettent parmi les marbres d’automne une terre ensoleillée qu’elles n’ont point connue.
Le bassin du Rhône, par exemple, se découpe à première vue en trois parties qui ont chacune leur caractère particulier : la première, depuis le glacier d’où il sort torrent aux ondes grises et limoneuses jusqu’au point où il entre dans le lac Léman ; la seconde, depuis l’endroit où il y pénètre jusqu’à celui où il disparaît sous terre, étranglé dans une fente de rochers ; la dernière, depuis le moment où il revoit le soleil et peut porter de grands bateaux jusqu’à celui où il se mêle aux flots bleus de la Méditerranée.
La terre, en tous endroits, produira toutes choses ; Tous métaux seront or, toutes fleurs seront roses.
Priam, ce monarque tombé du sommet de la gloire, et dont les grands de la terre avaient recherché les faveurs, dùm fortuna fuit ; Priam, les cheveux souillés de cendres, le visage baigné de pleurs, seul au milieu de la nuit, a pénétré dans le camp des Grecs.
Enfin, vers le treizième siècle, la religion chrétienne, après avoir lutté contre mille obstacles, ramena en triomphe le chœur des Muses sur la terre.
la tête de Psyche devrait être penchée vers l’Amour ; le reste de son corps porté en arrière, comme il l’est lorsqu’on s’avance vers un lieu où l’on craint d’entrer et dont on est prêt à s’enfuir, un pied posé et l’autre effleurant la terre ; et cette lampe, en doit-elle laisser tomber la lumière sur les yeux de l’Amour ?
Et vous ne songez pas que ces arbres doivent être touchés fortement, qu’il y a une certaine poésie à les imaginer selon la nature du sujet, sveltes et élégans, ou brisés, rompus, gercés, caducs, hideux ; qu’ici pressés et touffus, il faut que la masse en soit grande et belle ; que là rares et séparés, il faut que l’air et la lumière circulent entre leurs branches et leurs troncs ; que cette terrasse veut être chaudement peinte ; que ces eaux imitant la limpidité des eaux naturelles, doivent me montrer comme dans une glace l’image affaiblie de la scène environnante ; que la lumière doit trembler à leur surface ; qu’elles doivent écumer et blanchir à la rencontre des obstacles ; qu’il faut savoir rendre cette écume ; donner aux montagnes un aspect imposant ; les entr’ouvrir, en suspendre la cime ruineuse au-dessus de ma tête, y creuser des cavernes, les dépouiller dans cet endroit, dans cet autre les revêtir de mousse, hérisser leur sommet d’arbustes, y pratiquer des inégalités poétiques ; me rappeller par elles les ravages du temps, l’instabilité des choses, et la vétusté du monde ; que l’effet de vos lumières doit être piquant ; que les campagnes non bornées doivent, en se dégradant, s’étendre jusqu’où l’horizon confine avec le ciel, et l’horizon s’enfoncer à une distance infinie ; que les campagnes bornées ont aussi leur magie ; que les ruines doivent être solennelles, les fabriques déceler une imagination pittoresque et féconde ; les figures intéresser, les animaux être vrais ; et que chacune de ces choses n’est rien, si l’ensemble n’est enchanteur ; si composé de plusieurs sites épars et charmans dans la nature, il ne m’offre une vue romanesque telle qu’il y en a peut-être une possible sur la terre.
Qui n’a point entendu parler de cette fameuse contrée qu’on imagine avoir été durant un tems le sejour des habitans les plus heureux qu’aucune terre ait jamais portez ?
Et, malgré moi je songe, avec un commencement d’inavouable plaisir, aux sottises prodigieuses que ne manquera pas de faire ce Joseph de la terre glaise, qui a la vertu, mais qui n’a pas la grâce. […] Ici, c’est Mme Jane Hading qui se roule par terre, et qui gigote, et qui avale son mouchoir, et qui lâche un gros mot, dont l’auteur est très fier, — comme si c’était difficile de lâcher un gros mot. […] Les deux premiers sont l’Abbesse de Jouarre et la Terre. […] Vous avez pu le remarquer : il est difficile de s’indigner contre la Terre sans abonder tout aussitôt en plaisanteries grasses ; et c’est pourquoi tant de gens se sont indignés. […] Et des petites filles de douze ans, des premières communiantes, toutes nues, prêtresse des carnavals à venir, un peu soulevées de terre, dans les attitudes d’anges qui volent, suivent le cortège fou.
Il retombait quelquefois de tout son poids jusqu’à terre. […] Et c’est à ce moment aussi que les « voix de la Terre » commencent enfin d’arriver jusqu’à lui. […] et, suspendue ainsi au-dessus de la Terre, pourquoi n’y aborde-t-elle pas ? […] Des mers, des plaines, des forêts, quelques ruines, et, au milieu d’elles, rendue à elle-même par la mort de l’homme, la Nature en liberté, c’est maintenant la Terre. […] C’est Stella qui l’encourage ; à l’approche de la Terre, le besoin de souffrir et de se dévouer s’est réveillé plus impérieux dans la chair de la femme.
La terre est mauvaise ; ce sont des collines nues où souvent la récolte manque. […] Sur cette terre ainsi préparée et dans ce triste climat, le presbytérianisme a enfoncé ses âpres racines. […] Un perruquier chez lui fait tourner le ciel et la terre autour de ses perruques ; si la Révolution française prend pied partout, c’est que les magistrats ont renoncé à cet ornement. « Prenez garde, Monkbarns, dit-il piteusement en retenant par la basque de l’habit une des trois pratiques qui lui restent, au nom de Dieu, prenez garde. […] Bref, ils écrivent en bourgeois et pour des bourgeois, c’est-à-dire pour des gens rangés, enfermés dans une profession, dont l’imagination vit à terre et regarde les choses à la loupe, incapables de rien goûter franchement en fait de peinture, sinon des intérieurs et des trompe-l’œil ; demandez à une cuisinière quel tableau elle préfère au Musée, elle vous montrera une cuisine où les casseroles sont si bien faites qu’on est tenté d’y tremper la soupe. […] On y vogue entre ciel et terre, dans l’abstraction, le rêve et le symbole ; les êtres y flottent comme ces figures fantastiques qu’on aperçoit dans les nuages, et qui tour à tour ondoient et se déforment, capricieusement, dans leur robe de neige et d’or.
— Regardez-y bien. — Cette Angleterre de l’an 1200 n’était pas un vide chimérique, une terre de songes, peuplée par de simples fantômes vaporeux, par les Fœdera de Rymer, par des doctrines sur la constitution, mais une solide terre verte où poussaient le blé et diverses autres choses. […] Aujourd’hui les coulées inertes jonchent la terre ; leur poids rebute les mains qui les touchent ; si on veut les ployer à quelque usage, elles résistent ou cassent : telles que les voilà, elles ne peuvent servir ; et cependant telles que les voilà, elles sont la matière de tout outil et l’instrument de toute œuvre ; c’est à nous de les refondre. […] Puis l’envoyé céleste est rappelé ; son vêtement de terre tombe, et bientôt devient pour les sens eux-mêmes une ombre évanouie. […] Ainsi, comme une armée d’esprits enflammés, créés par Dieu, nous sortons du vide, nous nous hâtons orageusement à travers la terre, puis nous nous replongeons dans le vide. […] Nous avons pour aristocratie des marchands rapaces qui réduisent leur vie au calcul du prix de revient et du prix de vente, et des amateurs oisifs dont la grande préoccupation est de bien garder le gibier de leurs terres.
« … Lu aujourd’hui le troisième chant de l’Art poétique, la troisième et la neuvième des Réflexions critiques sur Longin, et visité les terres de l’abbaye du Val Richer. […] Qu’on la remette à sa véritable place, qu’on lui rende son soleil, sa terre, qui sait ? […] La rose emprunte sa sève, sa grâce et son éclata la terre où sont ses racines ; le génie emprunte tout ce qu’il est au temps et au lieu de sa floraison. […] Ils ne sont pas endormis, ces gros bourgeois qui aiment la joie ; je les voyais, actifs dans leur prospérité, braves sur terre, héroïques sur mer, conquérir leur pays sur les flots, leur liberté politique sur Philippe II, et faire respecter à tous les peuples le pavillon de leurs vaisseaux marchands407. […] Il y a une tombe élevée d’un pied hors de terre. » 322.
Voilà le manteau de fausse humilité, et voici les trous : Moi, pensif je veillais quand toute la terre dormait. […] J’appartiens à un pays, monsieur, où tout est poésie, depuis le long et voluptueux regard des jeunes filles qui nous enflamme, jusqu’au soleil splendide qui revêt la terre de couleurs éblouissantes. […] La terre est sienne. […] Les propriétaires amoncellent et brûlent les mauvaises herbes pour fumer leurs terres, le journaliste-industriel brûle le chroniqueur pour fumer le petit journal. […] Mais telle est l’éducation française en telle matière, que viennent les Anglais, et les uns leur reprocheront de faire de la peinture de dessous, de la peinture qui ne tient pas ; les autres s’extasieront au contraire sur cette même sorte de peinture, ne comprenant jamais que le côté matériel, et enfin les plus fins, en face de cet art spirituel, s’écrieront : C’est original, mais terre à terre.
Les déesses et les anges marchent à fleur de terre.
Des villes d’Italie où j’osai, jeune et svelte, Parmi ces hommes bruns montrer l’œil bleu d’un Celte, J'arrivais, plein des feux de leur volcan sacré, Mûri par leur soleil, de leurs arts enivré ; Mais, dès que je sentis, ô ma terre natale, L'odeur qui des genêts et des landes s’exhale, Lorsque je vis le flux, le reflux de la mer, Et les tristes sapins se balancer dans l’air, Adieu les orangers, les marbres de Carrare, Mon instinct l’emporta, je redevins barbare, Et j’oubliai les noms des antiques héros, Pour chanter les combats des loups et des taureaux !
[La Terre provençale (1890).]
La ligne du nez continue celle du front, comme aux âges heureux où les divinités marchaient sur la terre, car il a été donné au poète que ses filles fussent véritablement créées et modelées à l’image de sa pensée.
Sainte-Beuve fut ce poète de la nostalgie de l’âme sur la terre.
Anatole France Futura est un poème largement, pleinement, abondamment optimiste, et qui conclut au triomphe prochain et définitif du bien, au règne de Dieu sur la terre… Un souffle de bonté passe sur ce grand poème.
Quand un peu de terre eut couvert la marquise de Rambouillet, le roi ne laissa pas à la duchesse de Montausier le temps de pleurer sa mère : il la fit passer de la place de gouvernante des enfants de France, à celle de dame d’honneur de la reine, la première dignité du palais.
Son regard semble farouche ; L'écume sort de sa bouche ; Prêt au moindre mouvement, Il frappe du pied la terre, Et semble appeler la guerre Par un fier hennissement.
On raconte qu’ayant voulu mettre, dans toute la délicatesse & dans toute la pureté de la langue, un sermon de Bourdaloue, & que le lui ayant rapporté avec les changemens, Bourdaloue, ce génie mâle & rapide, fut tellement indigné de voir son ouvrage défiguré, qu’il le jetta par terre, & protesta qu’il ne prêcheroit de sa vie, s’il falloit qu’il le fît dans un goût si misérable & si puérile.
Cette timidité l’a forcé d’user des petits ressorts de la magie, tandis qu’il pouvait tirer un parti immense du tombeau de Jésus-Christ qu’il nomme à peine, et d’une terre consacrée par tant de prodiges.
La jouissance des sentiments honnêtes sur la terre n’est que l’avant-goût des délices dont nous serons comblés.
Il faut séparer la vie terrestre de la vie céleste de cette sainte : sur la terre, elle ne fut qu’une femme ; sa divinité ne commence qu’avec son bonheur dans les régions de la lumière éternelle.
Si c’était le titre de citoyen, plutôt que celui de sujet qui fit exclusivement l’historien, pourquoi Tacite, Tite-Live même, et, parmi nous, l’évêque de Meaux et Montesquieu, ont-ils fait entendre leurs sévères leçons sous l’empire des maîtres les plus absolus de la terre ?
Dans les petites rues du quai à gauche, la nuit semble sortir de terre, des pavés, des devantures de boutiques sombres, monte dans les jambes de ceux qui vont, et ne laisse de couleur que le bleu d’une blouse, le linge d’un bonnet ; en haut, dans le ciel, une petite fumée rousse coupe la lanterne du Panthéon, en blanchissant dessus. […] Le voyageur réussit là, où les expéditions échouent, et ce sont toujours des explorateurs solitaires, un Caillé, un Barth, un Livingstone, qui conquièrent l’inconnu de la terre. […] Des bois faisant des taches noires sur une terre de cendres blanches, des bouquets de verdure sombre se dressant sèchement çà et là. […] La femme s’était furieusement défendue, et, dans sa lutte avec les assassins, avait bousculé, renversé, répandu à terre tous les engins de son commerce, sur lesquels reposait son cadavre. […] 24 novembre À travers l’eau des ornières, la terre grasse, les mottes molles, les prés détrempés et gluants, nous sommes arrivés à La Bécassière.
Quand Lefèvre arriva, le prince était par terre, zagaïé, et dépouillé de tous ses vêtements. […] La critique de l’heure présente veut en faire un grand monsieur : non, Guys est un dessinateur rondouillard, et le plus sale enlumineur de la terre. […] Et alors cet homme, qui parle très mal le français, en sorte qu’il parle anglais, quand il s’anime, avait été de la plus grande éloquence, disant que cette prière lui revenait aux lèvres, toutes les fois qu’il avait vu un danger sur la mer, sur la terre, dans le ciel. […] Enfin il se décidait à se rendre chez son frère, un alcoolique prédicant, auquel il demandait la place par terre pour son corps. […] On déjeune dans une salle à manger, en laquelle, à la suite d’un dîner végétarien, a été peint un Sarcey énorme, dans une épouvantable peinture décorative, le représentant au milieu de tous les légumes de la terre.
Alors j’ôterai mon chapeau jusqu’à terre. […] « J’ai secoué les credo de la terre, j’ai pris mon vol au-dessus des religions et des politiques de passage ; je me repose dans l’amour de ceux qui m’aiment et je souhaite le bien de ceux qui me haïssent : j’aime l’humanité telle qu’elle est, et je l’adore telle qu’elle doit être : je suis entré dans l’Éternel. […] Ce qui aura été mauvais de moi, périra comme aura péri dès la terre tout l’inutile et tout le fangeux de la terre ; mais le pur et le beau retourneront à la source infinie, et de même que j’arrive en ce moment à Dieu, se rejoindront à lui. […] Le livre se termine par un acte de foi dans un panthéisme mystique si ardent et si profond qu’en le revivant à la suite du Centaure, on se sent enlevé et emporté loin de la terre : « Je ne suis plus ici ou là, sur tel point du globe terrestre, à la cime des montagnes désertes ou sur les plaines ; ensanglantées que traversent les génies de l’air, ou guidant le vol de mes bataillons ; je suis où j’étais ; dans les jours des jours. […] Desdevises du Dèzert, professeur à la Faculté des lettres de Clermont, dans la Terre Nouvelle, revue lyonnaise aujourd’hui disparue.
Qu’une torche tombe sur la terre nue et dépouillée, elle s’éteint. […] nous pouvons vous dire que jamais les âmes ne sont mieux unies sur la terre que lorsqu’elles viennent de se rencontrer, purifiées et rassérénées, au pied du trône de Dieu. […] l’inconnu, je ne m’en inquiète guère… je crois au néant absolu ; nous servirons à fumer des terres ; voilà ce qu’il y a de plus clair pour moi. » Telle est la théologie de la bohème. […] La misère peut être secourue, diminuée, adoucie, consolée, utilisée, mais elle ne disparaîtra jamais de la face de la terre, tant que la terre sera peuplée par l’humanité déchue. […] N’a-t-il pas placé la livrée de Ruy-Blas le laquais à côté du manteau royal de la reine d’Espagne, le ver de terre auprès de l’étoile, Hernani le bandit face à face avec Charles-Quint ?
La terre ne fut plus qu’un lieu d’exil, la vie que le rêve d’une ombre, et la mort, anéantissant ce qui n’était point, prit la force d’une double négation ; elle délivra l’esprit de son élément fini, et lui ouvrit les portes de la vraie et réelle existence179. […] Mais si ces petites âmes prennent au sérieux leurs petites passions, si elles s’enferment, sans rien apercevoir au-delà, dans les étroites limites de leur propre sottise, au point de poursuivre l’impossible, l’absurde et le faux avec une âpre volonté de réussir, puis d’être consternées et tout abattues par leur échec final, cette lourde et stupide impuissance de l’homme à s’élever au-dessus de sa propre contradiction offre le spectacle le plus pénible, et retient la comédie à terre bien loin de l’idéal. […] Falstaff, « cet effronté poltron, cette énorme tonne de vin d’Espagne, ce doyen du vice, cette iniquité en cheveux gris », Falstaff est un sage ; il raisonne ; il débite des maximes ; il donne de bons conseils ; il fait au prince de Galles, comme s’il était le chapelain du roi son père, un excellent sermon sur le danger des mauvaises compagnies ; il déclare que le monde est corrompu, qu’il n’y a plus sur la terre ni tempérance, ni chasteté, et en attendant l’heure du rendez-vous avec mistriss Ford ou mistriss Page, il verse trois bouteilles de vin d’Espagne dans son ventre majestueux. […] Quand il perd son or, incapable de se consoler philosophiquement de sa ruine, il se roule à terre avec des gémissements et des sanglots. […] Le moment où l’Esprit universel, dans son développement qui constitue l’histoire absolue, entre en harmonie avec, lui-même, est marqué par l’apparition de Dieu sur la terre.
À présent nous sommes préparés, et nous pouvons entrer dans son second poëme, la Dunciade ; il faut beaucoup d’empire sur soi pour ne pas jeter par terre ce chef-d’œuvre comme insipide et même dégoûtant. […] Maintenant qu’il est à terre, les critiques le ramassent, le pendent à la vue de tous dans leur musée de curiosités antiques, le secouent et tâchent de conjecturer d’après lui les sentiments des beaux seigneurs et des beaux parleurs qui le portaient. […] Sous Louis XIV et Louis XV, le pire malheur pour un gentilhomme était d’aller moisir dans ses terres ; hors des sourires du roi et des beaux entretiens de Versailles, il n’y avait qu’à bailler et à mourir. […] Tout le long du jour les nuages gonflés versent leurs ondées bienfaisantes, et la terre arrosée se gorge profondément de vie végétale, jusqu’à ce que, dans le ciel occidental, le soleil penché sorte resplendissant du milieu de la pourpre des nuages qu’il a rompus. […] Figurez-vous un père malheureux qui célèbre « le silence et l’obscurité, ces deux sœurs solennelles, ces deux jumelles filles de l’antique Nuit » ; un prêtre qui « fait sa cour à la sœur du jour, la déesse aux doux yeux », se déclare « le rival d’Endymion1133 » et quelques pages plus loin apostrophe le ciel et la terre à propos de la résurrection de Jésus-Christ.
La diplomatie de chaque nation est l’expression de son caractère : Égoïste, superbe, religieuse, humanitaire et philosophique, en Angleterre ; Héroïque, généreuse et versatile, en France ; Immorale, cauteleuse et improbe, en Prusse ; Modeste, honnête et intéressée, en Hollande ; Ombrageuse et amphibie, en Belgique ; Persévérante, longanime, sans scrupule, mais non sans honnêteté, en Autriche ; Vaine, chevaleresque et loyale, en Espagne ; Grecque, habile, à petits manèges et à grandes vues, en Russie ; Consommée, universelle, sachant toutes les langues des cabinets, à Rome, Rome, la grande école de la diplomatie moderne, puissance qui ne vit que de politique sur la terre, d’empire sur les consciences, de ménagements avec les cours, de résistance derrière ce qui résiste, d’abandon de ce qui tombe, d’acquiescement aux faits accomplis ; Dépendante et adulatrice, dans les petites cours d’Allemagne et d’Italie, clientes de la force et de la victoire ; Hardie, inquiète, insatiable, en Piémont ; prompte à tout recevoir, quelle que soit la main qui donne ; prête à tout prendre, quelle que soit la main qui laisse envahir ; Alpestre, rude, pastorale, probe, mais intéressée, en Suisse ; non dépourvue d’une sorte d’habileté villageoise, se faisant appuyer par tout le monde, mais n’appuyant elle-même personne contre la fortune ; Enfin, simple et franche en Turquie, jouissance arriérée dans la voie de la corruption des cabinets européens ; puissance de bonne foi, dont la candeur est à la fois la vertu et la faiblesse ; puissance naïve qui n’a jamais eu de diplomatie que la ligne droite ; puissance qui a toujours cru à toutes les paroles, et qui n’a jamais manqué à la sienne ; puissance, enfin, destinée à être la grande et éternelle dupe de tous les cabinets, dupeurs de son ignorance et de sa loyauté. […] Il ne croyait nullement que des levées en masse indisciplinées, et dont le courage n’était que des accès, pussent faire face sur des champs de bataille de terre ou de mer aux armées et aux flottes d’une coalition universelle. […] XXVI Voici ces actes, exprimés en paroles dignes de leur grandeur : Les honneurs de la sépulture rendus à l’infortuné souverain pontife Pie VI, mort dans la captivité en France, et resté jusque-là sans sépulture royale ou pontificale à Valence : « Il est de la dignité de la nation française et conforme à son caractère de donner des marques de considération à un homme qui occupa un des premiers rangs sur la terre, des honneurs funèbres et un monument conforme au caractère du prince enseveli sans décrets. » Des envoyés dans toutes les cours où ils peuvent être reçus avec dignité sont nommés pour saisir et renouer les fils rompus des relations internationales : le général Bournonville à Berlin, M. […] Cette diplomatie d’état-major n’a plus besoin de cabinet ; ses notes sont des boutades aux Tuileries, des victoires sur terre, des défaites sur mer. […] Soit ressouvenir de son premier état, soit regret du scandale qu’il avait donné aux hommes religieux en sortant du sanctuaire, quoique affranchi de ses liens sacerdotaux par le souverain pontife, soit désir de laisser une mémoire en paix avec tout le monde, il négociait secrètement, depuis quelques années, une réconciliation consciencieuse ou politique avec l’Église, par l’intermédiaire de l’archevêque de Paris : il voulait une sépulture chrétienne en terre chrétienne.
Je suis encore la nation des grands sentiments, le peuple des grands réveils, la terre des grands sursauts de l’humanité ! […] Qu’on dise ce qu’on voudra, l’âme de cette terre est mobile, mais c’est une belle âme parmi toutes les âmes populaires de l’antiquité ou du temps présent. […] V Or, à quoi tient cette popularité fabuleuse, posthume, et par conséquent sincère, qui abandonne tant de noms vivants ou morts, et qui s’obstine au nom et à l’amour de Béranger jusque sous la terre ? […] Ces classes sont la base immense, solide, respectable de la nation, mais elles n’en sont pas la tête ; c’est là qu’on multiplie, c’est là qu’on travaille, c’est là qu’on éprouve le patriotisme du sol plus vivement, parce qu’on y est plus près de terre ; c’est là qu’on répand son âme et son sang pour la patrie ; c’est là qu’on sent juste et fort, parce que c’est là qu’est le cœur de ce grand être collectif qu’on appelle un peuple : mais ce n’est pas là qu’on pense, qu’on lit, qu’on épure le goût, qu’on crible les langues, qu’on médite les livres universels, qu’on chante les poèmes immortels, qui sont les monuments intellectuels de la nationalité ou de l’esprit humain. […] Mes bras sont pourtant las de cultiver la terre.
Ainsi le veut la mode : l’art plane au-dessus des misérables intérêts de la terre. […] N’a-t-il pas appelé la Terre de M. […] Il vous dira que tel pays est pour lui une terre de dilection. […] Ganderax traiter l’art romantique et échevelé aussi mal que l’art bourgeois et terre à terre, qu’il est un fougueux réaliste, adepte des théories de M. […] Il voudrait s’envoler dans le bleu du ciel, et son âme atteinte par le doute retombe sur terre, comme un oiseau blessé.
« N’entendez-vous pas la terre qui crie et demande du sang ? […] Toutes ces considérations reviennent à constater la présence du mal sur la terre […] Vous prouvez Dieu uniquement par la présence du mal sur la terre ; c’est le fin du fin sans doute, et comme un logicien dilettante goûte ce tour ou ce détour-là ! […] atteignait… J’étais déjà seul sur la terre… Toute la nature semblait me dire que j’allais à jamais cesser d’être aimé. […] Mais les violences, les éclats et les tremblements de terre, je ne les comprends pas.
Eh bien non, je n’admets pas que le génie de Wagner, pas plus que celui d’un autre, ne puisse se révéler que dans un petit coin de la terre et à quelques douzaines d’initiés : le génie est le génie, la lumière est la lumière, une étoile se voit de partout ; c’est une question de hauteur, Shakespeare, Goethe, Molière, Dante, Corneille, Raphaël, Racine, Homère, Virgile, Weber, Schiller, Beethoven, Mozart, sont beaux sous toutes les latitudes, dans tous les musées, tous les théâtres, toutes les bibliothèques ; inutile de voyager pour les admirer. […] Si elle est réellement belle, je saurai l’admirer et rendre justice au génie de l’auteur, tout en méprisant son caractère, Je n’ai pas besoin, pour arriver à cet éclectisme, que l’on me commente éloquemment la fameuse maxime : « L’art ne connaît point de patrie. » J’ai l’esprit plus terre à terre. […] Il serait à souhaiter que beaucoup de villes de France en fissent autant ; la condition des compositeurs français en serait du tout au tout changée, et l’on verrait éclore sur notre terre de France une magnifique floraison musicale.