La reine, on le voit par ce début, aimait assez les Lettres ; elle allait un peu vite en appelant d’emblée Voltaire son pauvre Voltaire ; elle eut bientôt, parmi les gens d’esprit d’alors, d’autres choix et des préférences : on la verra plus tard goûter Fontenelle, le président Hénault, se plaire surtout avec ce dernier et avec Moncrif ; mais pourtant, malgré les lectures sérieuses qu’elle faisait, c’est tout au plus si l’on peut dire,-avec son nouveau biographe, « qu’elle ne s’isolait pas du mouvement intellectuel de l’époque. » Cette idée de mouvement ne cadrait en rien avec sa nature d’esprit, et si c’est un éloge, ce n’est pas elle, c’est Mme de Pompadour, à son heure, qui le méritera. […] Pourquoi la vertu n’est-elle pas visitée aussi du génie ou du démon de plaire ?
Frédéric se plut, en toute occasion, à faire honneur de cette paix de Teschen à l’esprit de modération et d’équité de l’impératrice. […] On formait toutes les années des camps dans les provinces, où les troupes étaient exercées par des commissaires-inspecteurs instruits et formés aux grandes manœuvres de la guerre ; l’impératrice se rendit elle-même à différentes reprises dans les camps de Prague et d’Olmütz, pour animer les troupes par sa présence et par ses libéralités- : elle savait faire valoir mieux qu’aucun prince ces distinctions flatteuses dont leurs serviteurs font tant de cas ; elle récompensait les officiers qui lui étaient recommandés par ses généraux, et elle excitait partout l’émulation, les talents et le désir de lui plaire.
L’esprit admet une à une chaque proposition, sans avoir essayé de les juger ; il crée ensuite des rapports factices dont l’apparente vérité lui plaît et l’exalte ; car l’imagination est saisie par ce qui est abstrait, tout aussi fortement que par les tableaux les plus animés. […] Les idées religieuses qui plaisent tant aux âmes pures, animent et consacrent cette élévation spontanée, la plus noble et la plus sûre garantie de la morale.
* * * Stéphane Mallarmé (c’est ainsi qu’il se plut longtemps à écrire son nom) était un petit homme, à la mise correcte et soignée, aux yeux fleuris de douceur, aux oreilles pointues de faune, d’une affabilité extrême et d’une absolue distinction. […] Nous nous y plaisions car le lieu était frais et solitaire, avant que le corbillard de Verlaine, menant à sa suite une horde étrange, n’y soulevât l’amère poussière des réclames.
Les écrivains torturent volontiers le dictionnaire et se plaisent à martyriser la syntaxe ; l’Université repousse toutes les innovations, même parfois les mieux justifiées. […] Tant qu’on a considéré le Beau littéraire comme un absolu, ou, plus exactement peut-être, tant qu’on n’a pas tenté l’analyse du Beau littéraire, la critique a pu demeurer ce qu’elle avait été à ses débuts, ce qu’on la voit dans les « Examens » de Corneille et de ses contemporains, dans le « Spectator » d’Addison, dans la « Dramaturgie de Hambourg » de Lessing : une discussion conduite en vue de rechercher si l’œuvre étudiée s’éloigne ou se rapproche d’un certain type d’œuvre admis comme type idéal ; si elle respecte ou viole certaines règles, tirées de l’examen des chefs-d’œuvre antiques et acceptées par une convention d’ailleurs tout arbitraire ; ou même, simplement, si elle plaît ou déplaît, soit au critique lui-même, soit à un groupe de personnes qu’il croit représenter, et qu’il appelle suivant les époques les « bons esprits » les « lettrés », le « public ».
De nos jours, au contraire, au sein d’une paix que fête l’univers, sous un prince qui se plaît tant à voir prospérer les choses de la nature et les arts, non seulement on n’ajoute rien aux découvertes déjà faites, mais encore on ne se tient pas même au niveau des connaissances des anciens. […] Il est peu de sujets de la vie, et surtout de ceux qui tiennent à l’habitude des choses de l’esprit, sur lesquels il ne nous offre quelque pensée ingénieuse, brillante et polie, une de ces expressions qui reluisent comme une pierre gravée antique, ou comme les blancs cailloux qu’il se plaît à nous montrer en nous décrivant les belles eaux de ses fontaines.
Il évitait ce qui eût trop rappelé l’infinie distance ; il sentait qu’il était là pour plaire et non pour solliciter, et il savait observer une réserve, une dignité, qui ne laissait pas d’être utile. […] Sur les femmes, toutes les fois qu’il a à en parler, il y a de petites hymnes galantes et comme de petits couplets destinés à plaire aux belles et sensibles lectrices ; il a de ces tirades dans le procès Goëzman, il en aura plus tard dans le procès Kornman : « Et je serais ingrat au point de refuser, dans ma vieillesse, mes secours à ce sexe aimé qui rendit ma jeunesse heureuse !
« Je ne rencontre, disait-il, que des gens qui veulent me ramener à des opinions que je professe, ou qui prétendent partager avec moi des opinions que je n’ai pas. » … « Je plais, a-t-il dit encore, à beaucoup de gens d’opinions opposées, non parce qu’ils m’entendent, mais parce qu’ils trouvent dans mon ouvrage, en ne le considérant que d’un seul côté, des arguments favorables à leur passion du moment. » L’entreprise originale de M. de Tocqueville a donc été de considérer la démocratie comme un objet, non de démonstration, mais d’observation, et si l’on veut repasser dans son souvenir les noms des plus grands publicistes modernes, on verra qu’il n’y en a pas un qui ait eu cette idée et qui ait accompli ce dessein. […] Toutes les fois qu’on se mêle des intérêts des hommes, on est sûr de ne pas leur plaire.
Le livre très ancien est franchement d’un autre temps, il a tout son caractère archaïque ; il peut plaire pleinement ainsi ; il peut n’en plaire que davantage.
Nous causerons, et, s’il se dit quelque chose d’utile, vous en ferez ce qu’il vous plaira. » Le soir venu, il me prit la main avec sa grâce ordinaire, m’installa dans un fauteuil, me versa du thé, m’avertit d’en boire beaucoup, disant qu’il voulait me tenir éveillé, qu’il en avait besoin, qu’il allait faire le professeur, que c’était la première fois de sa vie, et que d’avance il m’en demandait pardon. « Je ne vous parlerai que d’analyse. […] « Le génie de la France est monarchique. » Comme il vous plaira, et grand bien nous fasse.
Pour moi, ce qui me plaît le plus, ce sont ses cheveux fins, ses bouclettes, ce sont les touffes jumelles de son front. […] Quand il me plaît, je me couche, et aux chants des grillons, le rossignol amoureux fait contre-partie. […] Pour notre part, nous ne voyons nul inconvénient à ce qu’un poète prêtre, célèbre, autant qu’il lui plaira, quelques Iris imaginaires. […] ne parlons pas, s’il vous plaît, de ces gens-là, ils ont du talent à faire frémir dans leur cercueil les cendres de M. […] » Elle ne dit pas non. — Alors nous nous mettons à table ; — je l’assieds sur mes genoux. — Allons, mange ce qui te plaît ; — tiens !
Qui ne sait d’ailleurs que la touche ironique et légère d’Arvède Barine se plaît à ces contrastes, excelle à en tirer parti, et met ainsi dans la ressemblance comme un air de malice qui l’égaie sans y nuire ? […] mon ami, s’il y avait un Dieu, nous ne pourrions qu’aimer sa grandeur, mais sans l’admirer ni la craindre, ni lui plaire, ni l’offenser, enchaînés par les lois éternelles qui gouvernent l’univers. […] Non content de plaire, il conçut, aussi lui, l’ambition, s’il le pouvait, « d’encourager et de consoler les cœurs qui luttent », ainsi que l’y avait plusieurs fois invité la critique. […] Dans les appétits ou dans les instincts des animaux le poète se plaît à nous montrer l’origine lointaine, la genèse obscure des nôtres, et en effet, nous nous y reconnaissons. […] alors, messieurs, c’est alors que la guerre éclaterait ; … et à Dieu ne plaise que je la provoque !
J'aimerais mieux un simple narré, tel que pouvait faire dom Le Nain38, que l’éloquence affectée. » — Ce n’est ni aux bénédictins, ni même aux jésuites qu’on songe à plaire de nos jours, mais à flatter madame Sand, à ne pas choquer M. de Lamennais, à chatouiller M. de Béranger, leurs noms et leurs doctrines, et de là une dégradation véritable du sujet.
se plaît-il à dire ; de bons Flamands, des Hollandais renforcés, gens de peu d’esprit, de nulle imagination, mais à idées saines et correctes, ne s’en départant jamais. » Lui-même, pour le distinguer des autres ministres, les habitués de Versailles lui donnaient le surnom de d’Argenson la bête, et il dut s’en faire gloire.
Son naturel aimant, sa simplicité d’esprit, sa défiance naïve de lui-même, son dévouement sublime pour Henri, et surtout cette amitié plus familière, mais pourtant respectueuse encore, qui l’unit à Richard, tout en lui attache et plaît ; il est presque entre les nègres ce que la Rébecca d’Ivanhoë est parmi les Juives.
L’uniformité pratique de la mode virile, s’opposant au bariolage, à la diversité superficielle et aux artifices contraignants de la mode féminine, signifie aux yeux que l’homme est né pour agir et la femme pour plaire, et nous suggère cette idée que l’extrême différenciation des costumes entre les sexes est peut-être une des marques de l’extrême civilisation.
L’Almaviva tente de plaire davantage avec six pages qu’avec quatre.
Serait-il capable d’arrêter un siècle sur la pente où il roule et de lui imprimer la direction qu’il lui plaît ?
Les rapports du rythme ou de la symétrie, par exemple, ne nous plaisent pas seulement, comme le supposait Euler, parce qu’ils accroissent notre connaissance des choses ; on peut dire plutôt qu’ils nous les font connaître et apprécier par le plaisir même qu’ils nous causent.
Le peintre et le poëte ne nous affligent qu’autant que nous le voulons, ils ne nous font aimer leurs heros et leurs heroïnes qu’autant qu’il nous plaît, au lieu que nous ne serions pas les maîtres de la mesure de nos sentimens ; nous ne serions pas les maîtres de leur vivacité comme de leur durée, si nous avions été frappez par les objets mêmes que ces habiles artisans ont imitez.
Il les dit comme ils lui viennent, sans arrangement ni style, en manière de conversation, sans songer à faire un effet ou à combiner une phrase, avec les mots de métier et les tournures vulgaires, revenant au besoin sur ses pas, répétant deux et trois fois la même chose, n’ayant pas l’air de soupçonner qu’il y a des moyens d’amuser, de toucher, d’entraîner ou de plaire, n’ayant d’autre envie que de décharger sur le papier le trop-plein des renseignements dont il s’est muni. […] Nous aimons l’art, et vous n’en avez guère ; nous souhaitons qu’on nous plaise, et vous n’y songez pas. […] Il en devient grotesque, tant il est naïf et près de la brute ; il se laisse mener, il a des mots d’enfant : « Je ne sais pas comment cela arrive ; mais le diable m’emporte, Allworthy, si vous ne me faites pas toujours faire justement ce qu’il vous plaît. […] Nous demandons aux gens ce qui peut leur plaire dans cet ours bourru, qui a des habitudes de bedeau et des inclinations de constable. […] Nous nous rappelons alors qu’en Angleterre les sermons plaisent, et ces Essais sont des sermons.
Mais s’il m’est impossible de lui écrire comme il me plaît, n’est-ce pas toute la liberté de la correspondance, une forme de la liberté de conscience, qui est supprimée ? […] Les libraires auraient donc le droit de vendre comme il leur plaît des manuscrits de tous les politiciens, savants, poètes qui ont laissé des textes depuis que le parchemin existe. […] Dans le chapitre précédent, j’ai montré que la famille a la faculté de s’opposer comme il lui plaît à la publication des missives du défunt. […] Il peut conserver votre lettre ou la détruire, la montrer à qui lui plaît, en faire l’objet d’un prêt, d’une donation, d’un legs, d’une vente : d’où le commerce des marchands d’autographes. […] Mais, cinquante ans après, ce scandale cesse et le cours naturel des choses reprend, qui exige que toute œuvre devienne anonyme aussitôt qu’elle plaît aux hommes et qu’elle dure.
Il y a deux phrases qui me plaisent beaucoup et que j’ai la manie de répéter souvent. […] Enfin, l’ordonnateur des pompes funèbres paraît à la porte du fond : « Messieurs de la famille, s’il vous plaît… » Rideau. […] Il fait, avec une extrême douceur, ce qui lui plaît. […] Seulement Luther lui plaît assez, parce que c’est « un homme ». […] Bref, je lui reproche de ne pas nous avoir présenté ce type sous l’angle où il me plaît, à moi, de le voir.
Ils se plaisent à dépouiller les passions de ce, qu’elles ont de trop exalté. […] Ce n’est qu’avec leur secours que l’imitation peut plaire ; en voulez-vous la preuve ? […] Plût à Dieu que, de son côté, il reconnût avec la même franchise les erreurs de son client ! […] Champfleury plaira aux esprits droits et honnêtes. […] Il ne plaît actuellement qu’au peuple et aux chercheurs.
Mon curé va chez les riches (bien sûr), chez les pauvres (ça lui plaît moins), chez les sportifs et même (qu’il dit), chez les poètes. […] Depuis longtemps, la Religion se plaisait à croire qu’elle avait, dans la personne de Pasteur, annexé la science. […] Le même Français se plaît à répéter urbi et orbi que la parole a été donnée à l’homme pour cacher sa pensée. […] Le piano jouait un rôle restrictif qui ne me plaisait guère, et d’autant moins que notre piano était un piano crapaud, un piano eunuque, un piano sans queue, dont ma mère qui passait de longues heures en sa compagnie, n’avait certes pas à craindre qu’il la violât. […] Comme je me plaisais à imaginer la peau que les autres se plaisaient à cacher, mon adoration ne connut plus de bornes, le jour qu’elle vint, pour la leçon, vêtue d’une robe dont la transparence révélait un fourreau de couleur chair.
Quand j’aurais l’heur de vous plaire, Ce serait perdre du temps. […] A Dieu ne plaise que, avec tout cela, j’aie l’air de faire peu de cas de Georges Dandin ! […] (Relisez, s’il vous plaît, Spiridion, les Sept Cordes de la lyre, et l’insupportable mais très significative Lélia. […] Et je n’y vois de remède que de plaire à leurs femmes et d’épouser leurs filles. […] C’est une habileté qui s’exerce dans le vide, qui ne plaît que par elle-même ; et cela ne nous suffit point tout à fait.
Même après les grands éloges qu’il se plaît à leur donner, il continue de ne parler du père Massillon et du père Maur que comme venant après lui et à titre de jeunes talents qui promettent : « Pour le père Massillon et le père Maur, c’est une réputation naissante que la leur.
Tournez et retournez vos souvenirs comme il vous plaira, c’était un naufrage, et le plus humiliant des naufrages ; la France entière était sur un radeau ; elle avait besoin, après trois années d’expédients et de misères, de se retrouver voguant à pleines voiles sous le plus noble pavillon.
Être éloquent sur des sujets difficiles et sérieux, de manière à plaire à la majorité de quarante membres qui pensent différemment sur toute chose et qui particulièrement ne sauraient être d’accord en matière de goût, c’est à peu près impossible.
— Mademoiselle de la Seiglière, roman de Jules Sandeau, dans la Revue des Deux Mondes, plaît généralement et réussit. — Le Juif Errant achève de révolter.
Joubert, l’ami intime, l’ami du cœur et du génie de M. de Chateaubriand, écrivait à madame de Beaumont, inquiète et craintive, à la veille de la publication d’Atala (mars 1801), cette lettre qui est restée le jugement définitif et qu’enregistre la postérité : « Je ne partage point vos errantes, car ce qui est beau ne peut manquer de plaire ; et il y a dans cet ouvrage une Vénus, céleste pour les uns, terrestre pour les autres, mais se faisant sentir à tous.
Il se plaît à écrire de courtes pages d’un art subtil et parfait.
Cette solitude plut à Charles Cros qui logeait en face et qui abandonna pour elle le café de Versailles où, chaque soir, il allait rejoindre Coppée, Richepin et Raoul Ponchon.
. — Comme il nous plaira (Georges Rency). — Mâtines (Serge Basset). — Anthologie-Revue (Edward Sansot).
On devait se plaire à la peinture d’amours dégagés d’un érotisme grossier, accueillir même l’exagération des plaisirs attachés à des communications purement intellectuelles et morales.
Voiture, après avoir donné la main à Julie pour passer d’un appartement dans un autre, voulut lui baiser le bras ; elle lui témoigna sérieusement que cette hardiesse ne lui plaisait pas.
Qu’il oublie tant qu’il lui plaira qu’il parle à des hommes sensés, il n’y a pas grand mal à cela, mais qu’il ne se souvienne jamais qu’il parle à des hommes libres, c’est une inadvertance qui blesse partout et qui est très-dangereuse dans ce pays-ci.
Sur cela seul Rousseau pourrait le condamner, mais il lui plaît d’entrer dans le détail. […] Un jour, il leur annonce qu’il va s’absenter une semaine, et qu’il lui plaît qu’ils restent ensemble. […] Depuis l’âge de dix ans, il n’avait lu que ce qui lui plaisait. […] Reste à la place que la nature t’assigne dans la chaîne des êtres, rien ne t’en pourra faire sortir ; ne regimbe point contre la dure loi de la nécessité, et n’épuise pas, à vouloir lui résister, des forces que le ciel ne t’a point données pour étendre ou prolonger ton existence, mais seulement pour la conserver comme il lui plaît et autant qu’il lui plaît. […] Pour le surplus, la femme doit plaire.
Paris, tel qu’il est, lui plaît beaucoup. […] À Dieu ne plaise, monsieur Léon Say, que vous sachiez ces choses aussi bien que moi. […] Elles plaisent à la raison par leur exactitude et à l’imagination par leur étendue. […] Il devine, et c’est dans la divination qu’il se plaît. […] Je peins un paysage bien triste qui me plaît pour cette raison.
… » Mais s’il vous plaît : ces raisons, elle les a ! […] Et le profil de Mme Delvair me plaît toujours beaucoup, ce qui probablement lui est bien égal. […] Quoi qu’il en soit, elle plut infiniment à Casimir Bonjour. […] Pour leur plaire, je sais les plus secrètes routes. […] Elle peut ne plus plaire ; elle est sans doute inférieure aux pièces qui traversent les siècles sans jamais
Elle était faite pour y obtenir de véritables succès ; mais l’affectation dans laquelle elle avait été élevée, le faux esprit qu’on lui avait inspiré dès son enfance, lui avaient ravi tout moyen de plaire aux gens que n’avait point encore gagnés cette fièvre du mauvais goût. […] Un des premiers commentateurs de Boileau, Saint-Marc, a dit qu’à ces vers, … Un esprit sublime en vain veut s’élever À ce degré parfait qu’il tâche de trouver ; Et, toujours mécontent de ce qu’il vient de faire, Il plaît à tout le monde et ne saurait se plaire, Molière s’était écrié en interrompant son ami qui lui lisait sa satire : « Voilà la plus belle vérité que vous ayez jamais dite. […] À qui espérait-il donc faire croire que notre premier comique se plût à entretenir d’aussi longues liaisons avec un vrai squelette privé du commun bon sens ? […] Le lendemain de la première représentation du Misanthrope, représentation qui fut assez froide, un spectateur, croyant lui plaire, accourut lui dire : « La pièce est tombée ; rien n’est si faible. […] Mais, avec tout cela, quoi que je puisse faire, Je confesse mon faible, elle a l’art de me plaire : J’ai beau voir ses défauts et j’ai beau l’en blâmer, En dépit qu’on en ait, elle se fait aimer.
Et puis, quand même, ça ne me plairait guère. […] il n’y a rien qui ne plaise autant aux grands garçons que ces barbotages ! […] Il mettait vite à l’aise parce qu’il avait le don de la familiarité et le désir de plaire. […] Cette partie du livre plaira certainement à tous les lecteurs. […] Te plaît-il ?
Que d’autres invoquent donc tant qu’il leur plaira la parole muette, nous rirons en paix de ce faux Dieu, attendant toujours avec une tendre impatience le moment où ses partisans détrompés se jetteront dans nos bras, ouverts bientôt depuis trois siècles. » Tout ce passage est d’un bel accent. […] M. de Maistre, me dit-on encore, était à certains égards un homme inconséquent : il se plaisait à tout, à toute lecture, au trait qui l’attirait. […] Admirateur passionné des femmes, il trouvait dans ce commerce pur une sorte de charme idéal pour sa vie austère ; il recherchait volontiers leur suffrage et se plaisait à cultiver leur amitié. […] Rien n’empêche que l’acteur qui joue Orosmane sur les planches ne soit réellement amoureux de Zaïre ; alors donc lorsqu’il lui dira : Je veux avec excès vous aimer et vous plaire, il dit la vérité. […] Si nous venions à réfléchir bien sérieusement qu’une vie commune de vingt-cinq ans nous a été donnée pour être partagée entre nous, comme il plaît à la loi inconnue qui mène tout, et que, si vous atteignez vingt-six ans, c’est une preuve qu’un autre est mort à vingt-quatre, en vérité chacun se coucherait et daignerait à peine s’habiller.
On se plaît à dire que l’apprentissage des vertus civiques se fait dans la famille, et que de même, à chérir sa patrie, on se prépare à aimer le genre humain. […] On se plaît à dire que si une religion apporte une morale nouvelle, elle l’impose par la métaphysique qu’elle fait accepter, par ses idées sur Dieu, sur l’univers, sur la relation de l’un à l’autre. […] Mais nous pourrons toujours répondre qu’il ne nous plaît pas d’entendre ainsi notre intérêt, et l’on ne voit pas alors pourquoi nous nous sentirions encore obligés. […] On se plaît à dire que la religion est l’auxiliaire de la morale, en ce qu’elle fait craindre ou espérer des peines ou des récompenses. […] On se plaît à dire que la société existe, que dès lors elle exerce nécessairement sur ses membres une contrainte, et que cette contrainte est l’obligation.
Je définis la cour un pays où les gens, Tristes, gais, prêts à tout, à tout indifférents, Sont ce qu’il plaît au prince, ou, s’ils ne peuvent l’être, Tâchent au moins de le paraître. […] Il se tourne à demi vers son cher camarade comme pour lui demander permission, lui fait un petit salut poli, et dit agréablement pour égayer la chose : Messire loup vous servira, S’il vous plaît, de robe de chambre. […] L’ébattement pourrait nous en être agréable, : Vous plaît-il de l’avoir ? […] Aux dieux ne plaise ! […] et plaise à Dieu qu’ils puissent en profiter !
Les moindres choses à quoi ils mettent la main, ils les commencent en disant: Au nom de Dieu ; et jamais ils ne parlent de rien faire qu’ils n’ajoutent: S’il plaît à Dieu. […] Le 10 novembre, assez matin, je partis de ce château, étant convenu avec mon camarade des voies que je tiendrais pour le tirer de Mingrélie, s’il plaisait à Dieu de me donner un heureux voyage. […] Ainsi, il se contenta de réprimander sévèrement le joueur de luth de ce qu’il ne s’étudiait pas mieux à plaire à son maître. […] Il est vrai que ceux-ci même ne le bénissent pas, car il empêche le roi de faire des prodigalités et de dissiper ses trésors comme ses devanciers ; ce qui ne plaît guère à la cour, qui est pauvre d’ordinaire quand le roi n’est pas libéral. […] Si l’eau-de-vie n’est forte comme l’esprit-de-vin, elle ne plaît point en Perse, et le vin qu’on estime davantage est celui qui est très-violent et qui enivre le plus vite.
On m’avertissait qu’en haine de mon temps je me plaisais à repeupler de fantômes les nécropoles du passé, et que dans mon amour exclusif de la poésie grecque, j’en étais arrivé à nier tout l’art postérieur. […] Plût aux dieux, en effet, que je me fusse retiré au fond des antres de Samothrace ou des sanctuaires de l’Inde, comme on l’a prétendu, en affirmant que nul ne me suivrait dans mon temple ou dans ma pagode. […] Je ne désire ni plaire ni déplaire. […] Il n’est pas bon de plaire ainsi à une foule quelconque. […] Est-ce le désir de plaire à la race impure des Philistins modernes ?
Il connut Conrart, secrétaire perpétuel de l’Académie française, et qui se plaisait à produire les talents nouveaux. […] C’est un disciple uu peu moins vif, mais doux, et qui fait bien comprendre, et par principes en quelque sorte, cette manière honnête et non sauvage de vivre avec le sexe ; l’abbé Goussault, dans cet écrit où il recommande « les réduits de gens d’esprit et de qualité », ne fait qu’imiter Fléchier, dans l’oraison funèbre de la duchesse de Montausier, se souvenant si complaisamment « de ces cabinets que l’on regarde encore avec tant de vénération, où l’esprit se purifiait, où la vertu était révérée sous le nom de l’incomparable Arthénice… » Ce que Saint-Simon a vivement exprimé et résumé à sa manière lorsqu’au sujet de M. de Montausier, dans ses notes sur Dangeau, il a dit : « L’hôtel de Rambouillet était dans Paris, une espèce d’académie des beaux esprits, — de galanterie, de vertu et de science —, car toutes ces choses-là s’accommodaient alors merveilleusement ensemble. » Je crois maintenant que nous sommes préparés à bien entendre le Fléchier des Grands Jours, celui qui même dans la bagatelle et le divertissement ne déroge jamais à l’homme comme il faut, et annonce par endroits l’homme vertueux : mais il était jeune, mais il voulait plaire, mais il avait sa fortune et sa réputation d’esprit à faire ; mais on lui avait dit en partant de Paris : « M. […] Fléchier se plaît à décrire le chemin et le paysage qui remplit agréablement l’intervalle.
Avide de saisir tout ce qui s’offrait à ses impressions, elle s’était bien gardée de ne pas connaître celles que peut inspirer l’aspect d’un beau site et d’une riante verdure ; elle demeurait en extase devant un point de vue qui lui plaisait ; elle écoutait avec ravissement le chant des oiseaux, elle aimait à contempler une belle fleur, et tout cela jusque dans les dernières années de sa vie. […] Dans un excellent morceau que je lis, daté de 1813, sur la coquetterie, elle n’avait eu besoin que de consulter son observation de moraliste, son jugement sain et ses goûts délicatement sérieux, pour dire, par exemple : « C’est de trente à quarante ans que les femmes sont ordinairement le plus portées à la coquetterie : plus jeunes, elles plaisent sans effort, et par leur ignorance même. […] Il est plus facile, croyez-moi, d’abandonner son cœur à l’amour et au repos dans la retraite, que de servir Dieu dans le monde ; c’est l’œuvre aussi d’une vraie piété d’y parvenir en cette dernière voie… Gravez au dedans de vous-même cette première vérité, que la religion veut l’ordre avant tout, et que, puisqu’elle a permis et consacré l’établissement des sociétés, elle se plaît à encourager tous les devoirs qui concourent à les maintenir… Mais surtout chassez de votre esprit cette erreur, que les peines seules peuvent nous rendre agréables à Dieu.
C’est un point lumineux dans ce demi-jour des premières années où tout est confondu, plaisirs, espérances, regrets, et où les souvenirs sont brouillés et incertains, parce qu’aucune pensée ne les a gravés dans la mémoire ; amour charmant qui ne sait pas ce qu’il veut, qui se prend aux yeux bleus d’une fille comme le papillon aux roses du jardin par un instinct de nature, par une attraction dont il ne sait point les causes et dont il n’entrevoit pas la portée ; innocent besoin d’aimer, qui plus tard se changera en un désir intéressé de plaire et de se voir aimé ; passion douce et sans violence, rêve en l’air ; première épreuve d’une sensibilité qui se développera plus tard ou qui plutôt s’éteindra dans des passions plus sérieuses ; petite inquiétude de cœur qui tourmente souvent un jeune écolier, un de ces enfants aux joues roses que vous croyez si insouciant, mais qui déjà éprouve des agitations inconnues, qui étouffe, qui languit, qui se sent monter au front des rougeurs auxquelles la conscience n’a point part. » — La grâce facile où se jouera si souvent la plume de Charles Labitte se dessine déjà dans cette page délicate où je n’ai pas changé un mot. […] de Pongerville, dont il était neveu à la mode de Bretagne, et qu’il se plaisait à nommer son oncle. […] Les érudits, en définitive, étaient satisfaits, les gens instruits trouvaient à y apprendre, et tout esprit sérieux avait de quoi s’y plaire ; la conciliation était à point.
Un pauvre moine défroqué, qui n’échappa à ses ennemis que parce qu’il plut à quelques petits princes de le prendre sous leur protection. […] Il faut avouer aussi que le catholicisme, avec ses formes dures, absolues, sa réglementation rigoureuse, sa centralisation parfaite, devait plaire à la nation qui y voyait le plus parfait modèle de son gouvernement. […] Le scepticisme et l’impiété lui plaisaient pour eux-mêmes.
Rosny refusa net, et, Henri IV s’informant si son ordre avait été exécuté et si les Suisses allaient être payés, Sancy tout en colère répondit : « Non, je n’y vais pas, Sire ; car il ne plaît pas à votre M. de Rosny qui fait l’empereur dans son logis, et dit qu’il ne connaît personne… ; étant là assis sur ses caques d’argent comme un singe sur son bloc ; et ne sais si vous y aurez plus de crédit que les autres. » Cependant l’envoi était déjà fait, et l’argent porté au quartier des Suisses ; Rosny l’avait fait de lui-même après avoir bien marqué que ce n’était point en vertu de l’espèce d’ordre que lui avait envoyé Sancy. […] Or, combien que j’y reconnaisse une partie de ses défauts, et que je sois contraint de lui tenir quelquefois la main haute quand je suis en mauvaise humeur, qu’il me lâche ou qu’il s’échappe en ses fantaisies, néanmoins je ne laisse pas de l’aimer, d’en endurer, de l’estimer et de m’en bien et utilement servir, pource que d’ailleurs je reconnais que véritablement il aime ma personne, qu’il a intérêt que je vive, et désire avec passion la gloire, l’honneur et la grandeur de moi et de mon royaume ; aussi qu’il n’a rien de malin dans le cœur, a l’esprit fort industrieux et fertile en expédients, est grand ménager de mon bien ; homme fort laborieux et diligent, qui essaye de ne rien ignorer et de se rendre capable de toutes sortes d’affaires, de paix et de guerre ; qui écrit et parle assez bien, d’un style qui me plaît, pource qu’il sent son soldat et son homme d’État : bref, il faut que je vous confesse que, nonobstant toutes ses bizarreries et promptitudes, je ne trouve personne qui me console si puissamment que lui en tous mes chagrins, ennuis et fâcheries.
Une des choses qui me plaisent le plus dans Mézeray, à côté de l’agencement plein et facile de la narration, c’est le talent naturel et presque insensible avec lequel sont traités les caractères ; on les voit se développer successivement et sans parti pris selon les circonstances, avec tous leurs flux et reflux de passions ; Mézeray ne les fait jamais poser, il les laisse marcher et on les suit avec lui. […] Le jour de la visite que fit la reine Christine à l’illustre compagnie (11 mars 1658), c’est Mézeray qui, faisant l’office de secrétaire, lut, à l’article Jeu du Dictionnaire, cette locution proverbiale qui fit rire, dit-on, du bout des dents la princesse : « Jeux de prince, qui ne plaisent qu’à ceux qui les font.
Témoin, dans les dernières années de sa vie, de la Révolution française, il se plaisait à adhérer en tout à la profession de foi de Burke : « J’admire son éloquence, disait-il, j’approuve sa politique, j’adore sa chevalerie, et j’en suis presque à excuser son respect pour les établissements religieux. » Et il ajoutait qu’il avait quelquefois pensé à écrire un dialogue des morts, dans lequel Lucien, Érasme et Voltaire se seraient fait leur confession, seraient convenus entre eux du danger qu’il y a à ébranler les vieilles croyances établies et à les railler en présence d’une aveugle multitude. […] On a si souvent dans ces dernières années déclaré David Hume vaincu et surpassé, que je me plais à rappeler un témoignage si vif et si délicatement rendu.
Il suit donc dans toutes ses subtilités et ses retours ce vice de médisance qui, « non content de vouloir plaire et de s’ériger en censeur agréable, veut même passer pour honnête, pour charitable, pour bien intentionné : Car voilà, dit-il, un des abus de notre siècle. […] J’ai achevé ma course, et plût à Dieu que je pusse ajouter : J’ai été fidèle !
L’auteur ou le traducteur se plaît à trouver dans l’amour d’Hélène pour Jules Branciforte un de ces amours passionnés qui n’existent plus, selon lui, en 1838, et qu’on trouverait fort ridicules si on les rencontrait ; amours « qui se nourrissent de grands sacrifices, ne peuvent subsister qu’environnés de mystère, et se trouvent toujours voisins des plus affreux malheurs ». […] Je sais bien que Beyle a posé en principe qu’un Italien pur ne ressemble en rien à un Français et n’a pas de vanité, qu’il ne feint pas l’amour quand il ne le ressent pas, qu’il ne cherche ni à plaire, ni à étonner, ni à paraître, et qu’il se contente d’être lui-même en liberté ; mais ce que Fabrice est et paraît dans presque tout le roman, malgré son visage et sa jolie tournure, est fort laid, fort plat, fort vulgaire ; il ne se conduit nulle part comme un homme, mais comme un animal livré à ses appétits, ou un enfant libertin qui suit ses caprices.