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653. (1887) Discours et conférences « Appendice à la précédente conférence »

Rien de plus instructif que d’étudier ainsi, dans ses manifestations originales et sincères, la conscience de l’Asiatique éclairé.

654. (1900) La méthode scientifique de l’histoire littéraire « Troisième partie. Étude de la littérature dans une époque donnée causes et lois de l’évolution littéraire — Chapitre premier. Impossibilité de s’en tenir à l’étude de quelques grandes œuvres » pp. 108-111

Pour rester dans le domaine de la littérature, les grands hommes sont ceux qui apportent quelque chose de neuf et d’original ; ceux qui sont vraiment créateurs de formes, de sentiments, d’idées, de types, non encore réalisés ; ceux, comme dit le poète36, Dont les pas inventeurs ouvrirent les sentiers ; ceux ainsi qui devancent leurs contemporains, qui deviennent bientôt des modèles pour leurs admirateurs, qui sont le point de départ d’une longue vague d’imitation, précisément parce qu’ils ont été de puissants agents d’innovation.

655. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome II « Les trois siècles de la littérature françoise. — D. — article » pp. 169-178

Les Principes de la Philosophie morale ne sont qu’une Traduction très-libre de l’Essai sur le mérite & la vertu de Mylord Shafstersbury.Sans vouloir discuter ici le mérite de l’Original, c’est assez de faire remarquer qu’il ne s’agissoit pour le Traducteur, que d’employer un style clair, précis, & correct ; c’est ce que M.

656. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre IV »

Et en effet la beauté de ces douze mots est vraiment originale ; on ne peut rien reprendre dans leur sonorité et presque rien dans leur forme.

657. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Première partie — Section 3, que le merite principal des poëmes et des tableaux consiste à imiter les objets qui auroient excité en nous des passions réelles. Les passions que ces imitations font naître en nous ne sont que superficielles » pp. 25-33

Car pour l’avanture d’Abdere, le fait, comme il arrive toujours, est bien moins merveilleux dans l’auteur original que dans la narration de ceux qui nous le donnent de la troisiéme ou de la seconde main.

658. (1906) Les idées égalitaires. Étude sociologique « Première partie — Chapitre I. Définition des idées égalitaires »

On ne saurait les égaliser sans tenir compte de ce fait qu’ils sont des personnes, c’est-à-dire des centres d’activité indépendants et originaux.

659. (1870) Portraits contemporains. Tome IV (4e éd.) « M. DAUNOU (Cours d’Études historiques.) » pp. 273-362

On ne conçoit pas qu’un homme aussi laborieux que Daunou, et qui savait si bien que le style seul fait vivre, n’ait pas exécuté un tel projet une fois entrepris ; mais, sans parler du découragement qui s’empara de lui à un certain jour, il n’avait pas non plus le sentiment de l’art en grand, l’idée passionnée de l’œuvre, de l’œuvre individuelle et originale, du monument. […] On a beaucoup cité son Discours sur l’état des lettres en France au treizième siècle, qui est, en effet, le plus beau frontispice qui se puisse mettre à l’un des corps d’une histoire monumentale, non originale ; ce discours forme, à lui seul, tout un ouvrage. […] Là il est original et exprime des opinions particulières sur Phèdre, sur Cornelius Nepos, qu’il ne craint pas de dégrader de leurs honneurs classiques usurpés. […] Voici un petit récit, entre autres, que je sais d’original. […] Daunou d’être sans complaisance pour le jeune et si original historien, qu’il loue sans doute et dont il constate le succès, mais qu’il ne classe point à son rang.

660. (1866) Petite comédie de la critique littéraire, ou Molière selon trois écoles philosophiques « Troisième partie. — L’école historique » pp. 253-354

Parmi les prédicateurs de ce lieu commun, les seuls qui puissent être encore originaux, ce sont les philosophes orthodoxes décidés d’avance à opérer au milieu de leurs phrases compromettantes le sauvetage impossible de l’absolu ; ceux-là resteront toujours divertissants par le spectacle héroï-comique de leurs efforts désespérés pour échapper à la terrible loi du relatif, que cette contradiction des goûts nationaux proclame avec une évidence accablante. […] Quand il perdit son père à dix-huit ans, le pauvre fils de pasteur n’ayant pas le sou, point de science et peu d’idées, pour vivre imagina d’écrire, et pour se faire lire imagina de n’avoir pas le sens commun, d’être original à tout prix, c’est-à-dire à peu de frais. Il réussit, et devint si original qu’« à côté de lui Sterne est un Cicéron pour la régularité de la pensée et du style 403 ». […] Il multiplie les incidents, parce que les situations étranges et variées sont très propres à mettre en lumière et à montrer sous toutes sortes de jours la nature spéciale de ses originaux. […] Mais déjà sa plus jeune fille, Angélique d’Angennes, méritait de servir d’original à Molière.

661. (1861) Questions d’art et de morale pp. 1-449

Si l’absence de respect ne suffit pas à prouver l’esprit indépendant, l’absence de règle, la fantaisie sans frein, l’innovation sans limites, supposent-elles mieux le génie original ? […] Alors, quelles que soient les exigences de la règle et l’insuffisance des moyens d’exécution, toute conception originale saura se produire, et, chose meilleure s’il est possible, rien ne pourra se produire que d’original ; le savoir-faire ne passera plus pour du génie. […] Ainsi plus une création est originale et puissante, plus elle témoigne d’une féconde énergie, et moins elle nous paraît personnelle à l’homme. […] Une erreur originale est quelquefois un trait de lumière ; l’imitation et la vulgarité n’éclairent jamais. […] Or l’antiquité, en ce qu’elle a d’original dans les arts et dans la philosophie, c’est la Grèce elle-même.

662. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « [Note de l’auteur] » pp. 422-425

Les uns croient que c’est outrager les hommes que d’en faire une si terrible peinture, et que l’auteur n’en a pu prendre l’original qu’en lui-même, ils disent qu’il est dangereux de mettre, de telles pensées au jour, et qu’ayant si bien montré qu’on ne fait les bonnes actions que par de mauvais principes, la plupart du monde croira qu’il est inutile de chercher la vertu, puisqu’il est comme impossible d’en avoir si ce n’est en idée ; que c’est enfin renverser la morale, de faire voir que toutes les vertus qu’elle nous enseigne ne sont que des chimères, puisqu’elles n’ont que de mauvaises fins.

663. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre II. De la sensibilité considérée comme source du développement littéraire »

Pour rendre toute l’intensité du sentiment qu’on éprouve, pour lui garder sa couleur originale, pour en noter les degrés, les phases et les nuances, pour dire enfin exactement tout ce que l’on sent, comme on le sent, il faut de l’esprit infiniment, du plus exercé et du plus pénétrant.

664. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Chirurgie. » pp. 215-222

« Il lui est permis alors de s’affranchir de toute tutelle et de s’enhardir à des opérations nouvelles et originales : il les réussira d’emblée. » C’est par ces fières paroles que se termine l’Introduction de la Technique chirurgicale du docteur Eugène Doyen, où j’ai puisé mon érudition d’aujourd’hui.

665. (1899) Esthétique de la langue française « Esthétique de la langue française — Chapitre Premier »

Tout en regrettant que le français se serve de moins en moins de ses richesses originales, je ne le verrais pas sans plaisir se tourner exclusivement du côté du vocabulaire latin chaque fois qu’il se croit le besoin d’un mot nouveau, s’il voulait bien, à ce prix, oublier qu’il existe des langues étrangères, oublier surtout le chemin du trop fameux Jardin des Racines grecques .

666. (1885) Préfaces tirées des Œuvres complètes de Victor Hugo « Préfaces des recueils poétiques — Préfaces des « Odes et Ballades » (1822-1853) — Préface de 1826 »

Choisissez donc du chef-d’œuvre du jardinage ou de l’œuvre de la nature, de ce qui est beau de convention ou de ce qui est beau sans les règles, d’une littérature artificielle ou d’une poésie originale !

667. (1887) La Terre. À Émile Zola (manifeste du Figaro)

Même les Pairs, même les Précurseurs, les Maîtres originaux, qui avaient préparé de longue main la bataille, prenaient patience en reconnaissance des services passés.

668. (1891) Études critiques sur l’histoire de la littérature française. Quatrième série

Neuf et original alors, on sait assez la fortune que devait faire ce procédé de perpétuelle allusion. […] Le Breton se termine par un joli chapitre sur la Princesse de Clèves, où il a trouvé le moyen d’être original après Sainte-Beuve et après M.  […] Une question plus douteuse, mais d’ailleurs assez indifférente, est encore si l’Amadis espagnol n’a pas été précédé d’un original portugais. […] Comment, d’ailleurs, Honoré d’Urfé a-t-il usé de son original ? […] Quelques-uns de leurs traits ont passé dans son œuvre, en y devenant d’ailleurs originaux et personnels.

669. (1868) Curiosités esthétiques « II. Salon de 1846 » pp. 77-198

Il y a des tons gais et folâtres, folâtres et tristes, riches et gais, riches et tristes, de communs et d’originaux. […] Géricault, qui revenait d’Italie, et avait, dit-on, devant les grandes fresques romaines et florentines, abdiqué plusieurs de ses qualités presque originales, complimenta si fort le nouveau peintre, encore timide, que celui-ci en était presque confus. […] Tassaert s’est préoccupé de la manière de Delacroix ; néanmoins il a su garder une couleur originale. […] Decamps étaient donc pleins de poésie, et souvent de rêverie ; mais là où d’autres, comme Delacroix, arriveraient par un grand dessin, un choix de modèle original ou une large et facile couleur, M.  […] Celui-là ressemblait à Jésus-Christ, et celui-ci, sec et mesquin, ne rend pas du tout la physionomie originale, anguleuse, moqueuse et flottante du modèle. — Du reste, il ne faut pas croire que ces gens-là manquent de science.

670. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « MÉLEAGRE. » pp. 407-444

A mon sens, il y aurait pourtant à gagner beaucoup, même pour des points actuels et toujours pendants d’art et de langage poétique, à cette appréciation exacte, à cette divulgation fidèle de la poésie ancienne originale, et il n’y a que la poésie grecque qui ait en elle cette première originalité. […] J’ai tâché de la calquer ici trait pour trait ; mais il est un certain lustre original qui ne se rend pas : idylle sur le printemps. […] Cette forme de badinage est familière à Méléagre ; d’autres fois, se souvenant d’Anacréon, il s’adresse à la cigale, il apostrophe la sauterelle ; voici une petite pièce à celle-ci, qui est fort jolie dans l’original.

671. (1870) De l’intelligence. Première partie : Les éléments de la connaissance « Note I. De l’acquisition du langage chez les enfants et dans l’espèce humaine » pp. 357-395

Voilà son premier mot général : la signification qu’elle lui donne n’est pas celle que nous lui donnons ; il n’en est que plus propre à montrer le travail original de l’intelligence enfantine ; car, si nous avons fourni le mot, nous n’avons pas fourni le sens ; le caractère général que nous voulions faire saisir à l’enfant n’est pas celui qu’elle a saisi ; elle en a saisi un autre, approprié à son état mental, et pour lequel aujourd’hui nous n’avons point de nom précis. […] Par cette délicatesse il est capable d’idées générales. — Nous ne faisons que l’aider à saisir ces idées en lui suggérant nos mots. — Il y accroche des idées sur lesquelles nous ne comptions pas, et généralise spontanément en dehors et au-delà de nos cadres. — Parfois, il invente non seulement le sens du mot, mais encore le mot lui-même. — Plusieurs vocabulaires peuvent se succéder dans son esprit, par l’oblitération d’anciens mots que de nouveaux mots remplacent. — Plusieurs significations peuvent se succéder pour lui autour du même mot qui reste fixe. — Plusieurs mots inventés par lui sont des gestes vocaux naturels. — Au total, il apprend la langue faite, comme un vrai musicien apprend le contre-point, comme un vrai poète apprend la prosodie ; c’est un génie original qui s’adapte à une forme construite pièce à pièce par une succession de génies originaux ; si elle lui manquait, il la retrouverait peu à peu ou en découvrirait une autre équivalente.

672. (1895) Histoire de la littérature française « Première partie. Le Moyen âge — Livre I. Littérature héroïque et chevaleresque — Chapitre I. Les chansons de geste »

Mais ici tout est original. […] Jamais on n’a besoin et presque toujours on aurait tort de retenir ce qu’on appelle aujourd’hui « l’écriture » du poète ; quiconque voit les scènes dramatiques par lesquelles s’ouvrent Girart de Viane ou le Charroi de Nîmes 30 refaisant en langage quelconque les dialogues nécessaires, peut être assuré d’avoir extrait des ouvrages originaux toute la beauté qu’ils contenaient. […] Mais je rajeunirai complètement l’orthographe, et d’autre part je conserverai tous les archaïsmes, toutes les constructions insolites qui me permettront de rendre fidèlement l’original sans nuire à la clarté.

673. (1895) Histoire de la littérature française « Sixième partie. Époque contemporaine — Livre II. L’époque romantique — Chapitre I. Polémistes et orateurs, 1815-1851 »

De tant d’hommes qui essayèrent par le journal ou le livre de combattre ou de développer les conséquences de la Révolution, quatre surtout, me semble-t-il, se distinguent par des dons originaux d’écrivains : Joseph de Maistre, Paul-Louis Courier, Lamennais et Proudhon. […] Le, défaut de Courier, c’est qu’on sent trop cet art, et l’effort de l’écrivain : nous aimerions un peu plus d’abandon ; et pourtant, en son genre, il fut un vrai artiste, et tout à fait original. […] Il conçut l’idée hardie et féconde d’un catholicisme démocratique681 ; il voyait dans les idées libérales et égalitaires un fruit lointain de l’Évangile, et si l’Eglise semblait actuellement tourner le dos à la société moderne, il croyait pouvoir l’en rapprocher par une originale conception de l’évolution du dogme682, toujours immuable en son essence et en ses formules, mais susceptible de divers sens et d’applications diverses, selon les époques et les esprits.

674. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « M. Paul Verlaine et les poètes « symbolistes » & « décadents ». »

Mais ce livre offre déjà certains caractères originaux. On dirait d’abord que ce poète est, peu s’en faut, un ignorant  Vous me répondrez que vous en connaissez d’autres, et que cela ne suffit pas pour être original  Mais je suppose ce point admis que, malgré tout et en dépit de ce qui lui manque, M.  […] — les artistes qui passent pour les plus rares et les plus originaux de ce temps, ceux qui ont été vénérés et imités dans les cénacles les plus étroits, ont été catholiques ou se sont donnés pour tels.

675. (1899) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Septième série « Mme Desbordes-Valmore » pp. 01-46

Venir en Italie pour guérir un cœur blessé à mort d’amour, c’est étrange et fatal. » Le mot « amour » a été effacé dans le texte original, et cette rature est étrangement expressive. […] J’espère que votre conviction sera faite sur ce point, après la lecture des fragments de lettres originales adressées par Mme Desbordes-Valmore à son mari, fragments que je viens de réunir pour vous. […] Il resterait à définir la profonde et l’originale piété de Marceline ; puis à caractériser sa poésie, — poésie d’ignorante géniale, poésie admirablement passionnée et spontanée (parmi quelque naïf fatras) essentiellement musicale, et qui tantôt fait ressouvenir de Lamartine, tantôt fait présager Verlaine.

676. (1830) Cours de philosophie positive : première et deuxième leçons « Deuxième leçon »

Le premier mode est évidemment celui par lequel commence, de toute nécessité, l’étude de chaque science naissante ; car il présente cette propriété, de n’exiger, pour l’exposition des connaissances, aucun nouveau travail distinct de celui de leur formation, toute la didactique se réduisant alors à étudier successivement, dans l’ordre chronologique, les divers ouvrages originaux qui ont contribué aux progrès de la science. […] C’est ainsi, par exemple, que l’éducation d’un géomètre de l’antiquité consistait simplement dans l’étude successive du très petit nombre de traités originaux produits jusqu’alors sur les diverses parties de la géométrie, ce qui se réduisait essentiellement aux écrits d’Archimède et d’Apollonius ; tandis qu’au contraire, un géomètre moderne a communément terminé son éducation, sans avoir lu un seul ouvrage original, excepté relativement aux découvertes les plus récentes, qu’on ne peut connaître que par ce moyen.

677. (1828) Préface des Études françaises et étrangères pp. -

On vit l’imitation des anciens devenue originale et créatrice, réfléchir, en l’embellissant encore, la civilisation la plus splendide de notre monarchie, et de cette fusion harmonieuse entre la peinture de l’antiquité et celle de l’âge présent, sortir un idéal ravissant et pur, objet de délices et d’enchantements pour toutes les âmes délicates et cultivées. […] — Nous répondrons d’abord que rien ne serait plus original et plus neuf pour le public, que la représentation naïve sur notre théâtre d’une grande tragédie de Shakespeare, avec toute la pompe d’une mise en scène soignée ; car les représentations anglaises où les trois quarts et demi des spectateurs n’entendent pas un mot, et les traductions en prose, privées de la magie du style et du jeu des acteurs, ne donnent du grand poète qu’une idée toujours imparfaite et quelquefois très fausse. […] Il est temps de montrer au public français ce grand Shakespeare, tel qu’il est, avec ses magnifiques développements, la variété de ses caractères, l’indépendance de ses conceptions, le mélange si bien combiné des styles comique et tragique, enfin avec ses beautés toujours si neuves et si originales, et même avec quelques défauts qui en sont inséparables et qui du moins ne ressemblent pas aux défauts de nos poètes.

678. (1867) Causeries du lundi. Tome VIII (3e éd.) « Joinville. — I. » pp. 495-512

C’est sur ce texte de Ménard que, faute de retrouver les manuscrits originaux, Du Cange a travaillé, et qu’il a donné son édition (1668), accompagnée de toutes les dissertations savantes. […] Il s’est donc décidé à donner, en 1867, les Œuvres de Jean Sire de Joinville comprenant l’Histoire de saint Louis, le Credo et la Lettre à Louis X, avec un texte rapproché du français moderne mis en regard du texte original (un vol. grand in-8º).

679. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « De la poésie de la nature. De la poésie du foyer et de la famille » pp. 121-138

Afin d’éviter les considérations générales et trop vagues, je m’attacherai tout d’abord à des noms connus, et prenant Saint-Lambert, l’auteur des Saisons, je me rendrai compte de son insuffisance autrement encore que par le talent ; puis je toucherai rapidement à Delille, et seulement par ce côté ; choisissant, au contraire, chez nos voisins, le poète qui, non pas le premier, mais avec le plus de suite, de force originale et de continuité, a défriché ce champ poétique de la vie privée, William Cowper, j’aurai occasion, chemin faisant, de rencontrer toutes les remarques essentielles et instructives. […] William Hughes, et qui a pu suivre avec certitude toutes les nuances de la pensée originale.

680. (1870) Causeries du lundi. Tome XII (3e éd.) « [Chapitre 5] — I » pp. 93-111

René d’Argenson, fils du très honorable membre de la Chambre des députés, en publiant de nouveau une partie des Essais de son grand-oncle (1825), les augmenta de quantité d’articles inédits tirés des manuscrits originaux. […] René d’Argenson ; en un mot, qu’il y a lieu, en revenant à la source, de se faire une idée non pas autre, mais plus particulière, plus singulière même, et plus caractéristique, de cet homme de bien original.

681. (1865) Nouveaux lundis. Tome III « Souvenirs de soixante années, par M. Étienne-Jean Delécluze, (suite et fin) »

Je vais droit à la partie originale et neuve, la seule qui vit pour nous de l’intérêt et qui ajoute quelque chose qu’on savait. […] Je conçois qu’un homme qui laisse des ouvrages achevés, des monuments peu accueillis d’abord et peu compris de ses contemporains, mais remplis de beautés ou de vérités qui éclatent après lui, soit proclamé, homme de génie sur sa tombe, tandis qu’il ne passait de son vivant que pour un original distingué.

682. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Les frères Le Nain, peintres sous Louis XIII, par M. Champfleury »

Comme il n’y a rien de tel en littérature que de lire, et en art que de regarder et d’observer, je décrirai encore deux de leurs tableaux d’intérieur dont j’ai vu les originaux chez l’auteur du présent livre, et je les rendrai sous l’impression exacte qu’ils m’ont laissée. […] Champfleury, qui a fort bien réussi et qui le mérite, car elle est d’une observation vraie et d’un tour original, — le Violon de faïence.

683. (1866) Nouveaux lundis. Tome VI « Vaugelas. Discours de M. Maurel, Premier avocat général, à l’Audience solennelle de la Cour impériale de Chambéry. »

Toute notre langue n’est fondée que sur l’usage ou l’analogie, « laquelle encore n’est distinguée de l’usage que comme la copie ou l’image l’est de l’original, ou du patron sur lequel elle est formée. » Ainsi il n’y a, à le bien voir et en définitive, qu’un seul et même principe et fondement. […] Vaugelas semble dire comme un bon professeur à l’élève brillant qui a fini ses études : « Maintenant vous savez écrire ; il ne vous reste qu’à trouver de beaux et heureux sujets, des emplois originaux à votre talent.

684. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Histoire de Louvois par M. Camille Rousset. Victor-Amédée, duc de Savoie. (suite et fin.) »

Ce dernier, en vertu des documents actuellement mis en œuvre, acquiert un relief qui le constitue un des caractères les plus originaux de l’histoire. […] Camille Rousset, les éléments originaux d’un portrait militaire, et moral aussi, de Catinat.

685. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

Je dis imitation, car avec son talent d’écrire Mme Roland n’est pas originale. […] que Mme de Staël, disciple également de Jean-Jacques, mais disciple plus libre dès ses débuts et bien autrement originale que Mme Roland par le tour d’esprit et la manière de dire, ah !

686. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Mémoires de madame Roland »

S’ils furent des artistes, ils ne furent en rien des artistes originaux, et Mme Roland, supérieure à la plupart, et je dirais hardiment, à tous s’il n’y avait Vergniaud, n’échappe point en cela à la condition commune. […] Mme Roland est parfois originale ou bien près de l’être.

687. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « La reine Marie Leckzinska (suite et fin.) »

On dit que pour la tête il a étudié le pastel de La Tour plus que l’original même. […] Le portrait par Tocqué, moins agréable peut-être au premier aspect, est plus original : elle est plus jeune, plus en mouvement, un peu théâtrale.

688. (1867) Nouveaux lundis. Tome VIII « Marie-Antoinette (suite et fin.) »

« La sérénité d’Élisabeth, disait la reine, nous soutient et nous relève tous. » — Madame Élisabeth, telle qu’elle ressort de cette Correspondance aujourd’hui complétée, se révèle comme une sainte des plus originales. […] Pourquoi, d’ailleurs, dans aucun des deux recueils, chaque lettre imprimée ne porte-elle pas avec elle l’indication précise de la provenance et du lieu où l’on pourrait, à la rigueur, vérifier sur l’original ?

689. (1868) Nouveaux lundis. Tome X « Saint-Simon considéré comme historien de Louis XIV, par M. A. Chéruel »

., il a pris simplement prétexte des inexactitudes de Saint-Simon pour traiter lui-même, à son tour, de quelques points importants du grand règne sur lesquels il avait fait de longue main des études originales et approfondies. […] Je courus aux batteries faire tirer, afin de venger la perte de l’État et la mienne. » De telles pages, toutes sincères et d’original, sont de ces bonnes fortunes qu’on ne saurait négliger en passant et dont on aime à faire partager l’impression à ses lecteurs.

690. (1892) Boileau « Chapitre VI. La critique de Boileau (Fin). La querelle des anciens et des modernes » pp. 156-181

D’où donc a-t-il tiré cette théorie originale et féconde ? […] Si c’était donc aux anciens que Boileau devait les parties les plus originales et les plus hautes de sa théorie, et si à une sincère admiration pour leurs ouvrages s’ajoutait le sentiment qu’en eux, et en eux seuls, sa doctrine trouvait une confirmation éclatante et complète, on concevra sans peine l’indignation qu’il ressentit quand il vit contester l’autorité et le mérite de la grande antiquité.

691. (1889) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Quatrième série « Alphonse Daudet, l’Immortel. »

Le malheureux a conservé cette illusion, que c’est la faute de l’Université s’il n’y a pas plus d’esprits originaux en France, et qu’un professeur de rhétorique est un homme qui s’est donné pour tâche d’étouffer le génie chez les pauvres potaches confiés à ses soins. […] Je songe là-dessus : « Croit-il donc avoir fait quelque chose de si héroïque, de si terrible et de si original ? 

692. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Le père Lacordaire orateur. » pp. 221-240

Il y a quelque temps, je parlais de M. de Montalembert, en l’envisageant au point de vue du talent : aujourd’hui, je voudrais parler au même titre d’un autre orateur, diversement et non pas moins éloquent, qui a passé par plusieurs des mêmes phases, qui s’est aussi dégagé à temps de la voie étroite de l’École, et qui, depuis déjà quatorze ans, s’est créé dans la chaire une place singulière, originale, éclatante. […] Je n’ai réussi que bien imparfaitement à rendre cette physionomie singulière, originale, attrayante, si peu gallicane et si française, qui plaît jusque dans ses hasards, où le naturel se dégage en jets heureux de quelques bizarreries de goût, où l’audace ne compromet pas de réelles beautés ; cet orateur au vêtement blanc, à l’air jeune, à la parole vibrante, aux prunelles de feu, et dont les lèvres, faites pour s’ouvrir et laisser courir la parole, expriment à la fois l’ardeur et la bonté.

693. (1857) Causeries du lundi. Tome I (3e éd.) « Mémoires d’outre-tombe, par M. de Chateaubriand. » pp. 432-452

Sans pouvoir se démontrer ce plus ou moins de mélange, on le sent pourtant bien un peu en le lisant, on en a une impression confuse ; et de même qu’en présence d’un portrait ressemblant dont on n’a jamais vu l’original, on s’écrie : Que c’est vrai ! […] M. de Chateaubriand est seulement le premier écrivain d’imagination qui ouvre le xixe  siècle ; à ce titre, il reste jusqu’ici le plus original de tous ceux qui ont suivi, et, je le crois, le plus grand.

694. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres et opuscules inédits de Fénelon. (1850.) » pp. 1-21

, rentre chez lui tout échauffé, et là, plume en main, à bride abattue, sans se reposer, sans se relire et bien avant dans la nuit, couche tout vifs sur le papier, dans leur plénitude et leur confusion naturelle, et à la fois avec une netteté de relief incomparable, les mille personnages qu’il a traversés, les mille originaux qu’il a saisis au passage, qu’il emporte tout palpitants encore, et dont la plupart sont devenus par lui d’immortelles victimes. […] Le Télémaque est autre chose, quelque chose de bien plus naïf et de plus original dans son imitation même.

695. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Monsieur de Balzac. » pp. 443-463

M. de Balzac fut bien un peintre de mœurs de ce temps-ci, et il en est peut-être le plus original, le plus approprié et le plus pénétrant. […] Mais les détails sont faibles souvent ; ils sont assez nombreux et variés, mais moins fins, moins fouillés, d’une observation bien moins originale et moins neuve que chez M. de Balzac.

696. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Les Confessions de J.-J. Rousseau. (Bibliothèque Charpentier.) » pp. 78-97

Les deux natures, celle de René et celle de Rousseau, ont un coin malade, trop d’ardeur mêlée à l’inaction et au désœuvrement, une prédominance de l’imagination et de la sensibilité qui se replient sur elles-mêmes et se dévorent ; mais, des deux, Rousseau est le plus vraiment sensible, celui qui est le plus original et le plus sincère dans ses élans chimériques, dans ses regrets, dans ses peintures d’un idéal de félicité permise et perdue. […] Mais ces folies et ces vices de l’homme ne sauraient prévaloir sur les mérites originaux, et nous masquer les grandes parties par lesquelles il se trouve encore supérieur à ses descendants.

697. (1857) Causeries du lundi. Tome III (3e éd.) « Florian. (Fables illustrées.) » pp. 229-248

Le chevalier de Florian se distingua tout d’abord par d’aimables productions qui sont encore ce qu’il a fait peut-être de plus original et de plus vrai, par son Théâtre. […] Il la lui lisait aussi en manuscrit, et il ne tenait qu’à elle de croire qu’elle était, à peu de chose près, l’original de l’innocente bergère.

698. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Madame Sophie Gay. » pp. 64-83

C’est de ce caractère original, de cette vitalité puissante de femme du monde et de femme d’esprit que je voudrais toucher ici quelque chose, en rapportant Mme Gay à sa vraie date, et en indiquant aussi, en choisissant quelques-uns des traits fins et des observations délicates qui distinguent ses meilleurs écrits. […] Les scènes du monde d’alors, les originaux qui y figurent et qu’on y raille, les talents divers qu’on y applaudit, depuis le chanteur Garat jusqu’au républicain Daunou, y sont retracés assez fidèlement, et ce premier tome de roman n’est guère, en bien des pages, qu’un volume de mémoires.

699. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Le président de Brosses. Sa vie, par M. Th. Foisset, 1842 ; ses Lettres sur l’Italie, publiées par M. Colomb, 1836. » pp. 85-104

Quand de Brosses visita le Vatican, il y trouva les élèves de notre Académie de peinture occupés à copier les tableaux de Raphaël, et il n’en fut point satisfait du tout : leur dessin lui parut correct, le contour exact : « Mais on n’y retrouve plus, disait-il, ce feu ni ce trait hardi des originaux. […] Les contemporains nous l’ont peint tel qu’il était dans la société et dans l’habitude ordinaire, très vif, extrêmement aimable, plein de saillies originales, plaisant, mais sans causticité, « facilement ému par la résistance et par la contradiction » ; ayant « de petites colères qui faisaient rire ceux qui en étaient témoins, et dont il ne tardait pas aussi à rire lui-même » ; il avouait qu’il lui était plus facile de se contenir sur de grands objets que sur de petits.

700. (1878) Les œuvres et les hommes. Les bas-bleus. V. « Chapitre VI. Daniel Stern »

[I à IV : article original paru dans Le Pays, 23 mars 1858.] […] [V à VIII : article original paru dans Le Constitutionnel, 14 avril 1873.] — Lévy.

701. (1862) Les œuvres et les hommes. Les poètes (première série). III « Brizeux. Œuvres Complètes »

Partout il pleure la vieille Bretagne et ses coutumes originales et fortes, et, tout en pleurant, ce singulier affligé, dont l’affliction la plus grande est encore l’inconséquence, abolit en lui, librement et volontairement, ces originalités savoureuses qui auraient donné à son talent la trempe vibrante et l’énergie que naturellement il n’avait pas. […] Comparez-le à un autre idyllique-élégiaque, — André Chénier, par exemple, — et malgré tout, malgré l’inspiration sensuelle et païenne, la vieille mythologie usée, tout un monde connu et l’imitation archaïque d’André qui se fait Grec, et aussi malgré l’inspiration chrétienne au contraire, qui donne toujours un accent profond, malgré des mœurs neuves en poésie, et supérieures en morale, enfin malgré tous les détails du pays moins connu et moins classique de ce Breton qui se défait Breton, voyez si l’originalité, l’inoubliable originalité, n’est pas du côté de celui qui devrait être, à ce qu’il semble, le moins original des deux !

702. (1868) Les philosophes classiques du XIXe siècle en France « Chapitre II : M. Royer-Collard »

Supposition inutile : car ne voyant que des portraits, nous ne pouvons savoir si le portrait ressemble à l’original. […] Vous vous croyiez parmi les arbres ; la représentation était si vive, que vous l’avez prise pour l’original.

703. (1859) Essais sur le génie de Pindare et sur la poésie lyrique « Deuxième partie. — Chapitre XXIII. »

C’est là le titre de gloire de Voltaire dans sa prose, et dans cette partie de ses poésies que le sujet, le temps, la libre humeur du peintre, pouvaient rendre quelque peu prosaïques, sans les laisser moins originales. […] Ainsi dominé, jusque dans sa fougue, le talent appartient moins à l’art qu’à la politique et demeure un symptôme du temps plutôt qu’une distinction originale.

704. (1870) Causeries du lundi. Tome XI (3e éd.) « Sur Adolphe de Benjamin Constant » pp. 432-438

J’ai lieu de croire qu’il y a plusieurs portraits d’originaux que j’avais vus, et qu’il ne se souciait pas de m’avoir pour témoin prêt à juger de leur ressemblance.

705. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « SAINTE-BEUVE CHRONIQUEUR » pp. -

Ce sont ces Chroniques que nous allons publier en leur conservant ou plutôt en leur rendant toute leur vivacité originale et de premier jet.

706. (1874) Premiers lundis. Tome I « M. Laurent (de l’Ardèche) : Réputation de l’histoire de France de l’abbé de Montgaillard  »

Il importait de rabaisser à sa juste valeur un ouvrage incomplet, incohérent, plein de mensonges, de contradictions et d’erreurs, qui, grâce à une certaine causticité originale et à une affectation cynique de franchise, mais grâce avant tout au patronage influent de ses tuteurs, a usurpé en peu de mois un succès de vogue que n’ont obtenu que lentement et à grand’peine d’admirables écrits sur les mêmes matières.

707. (1875) Les origines de la France contemporaine. L’Ancien Régime. Tomes I et II « Livre cinquième. Le peuple. — Chapitre V. Résumé. »

De là un déluge de plaisanteries sur la religion ; l’un citait une tirade de la Pucelle ; l’autre rapportait certains vers philosophiques de Diderot… Et d’applaudir… La conversation devient plus sérieuse ; on se répand en admiration sur la révolution qu’avait faite Voltaire, et l’on convient que c’était là le premier titre de sa gloire. « Il a donné le ton à son siècle, et s’est fait lire dans l’antichambre comme dans le salon. » Un des convives nous raconta, en pouffant de rire, qu’un coiffeur lui avait dit, tout en le poudrant : « Voyez-vous, monsieur, quoique je ne sois qu’un misérable carabin, je n’ai pas plus de religion qu’un autre »  On conclut que la révolution ne tardera pas à se consommer, qu’il faut absolument que la superstition et le fanatisme fassent place à la philosophie, et l’on en est à calculer la probabilité de l’époque et quels seront ceux de la société qui verront le règne de la raison  Les plus vieux se plaignaient de ne pouvoir s’en flatter ; les jeunes se réjouissaient d’en avoir une espérance très vraisemblable, et l’on félicitait surtout l’Académie d’avoir préparé le grand œuvre et d’avoir été le chef-lieu, le centre, le mobile de la liberté de penser. « Un seul des convives n’avait point pris de part à toute la joie de cette conversation… C’était Cazotte, homme aimable et original, mais malheureusement infatué des rêveries des illuminés.

708. (1890) Conseils sur l’art d’écrire « Principes de composition et de style — Première partie. Préparation générale — Chapitre III. De la sécheresse des impressions. — Du vague dans les idées et le langage. — Hyperboles et lieux communs. — Diffusion et bavardage »

Si grande est notre paresse, inaccoutumés que nous sommes à chercher des idées ou des mots, que souvent nous aurions quelque inclination à penser d’une manière : nous parlons d’une autre, non par modestie, non par timidité, mais parce qu’il est plus commode de répéter une phrase apprise que de créer pour une pensée personnelle une forme originale.

/ 1877