Pas de scènes de mœurs. […] C’est le trait de mœurs singulier et pittoresque. […] Est-ce que nous demandons vraiment à Madame Bovary des notions exactes sur les mœurs de province ? […] De menus détails de mœurs la révèlent, mieux encore les noms des personnages originaux qui furent les chefs de file des grandes besognes. […] Il est aussi une grâce spéciale aux femmes de chacune de ces villes, et quand Beyle entra pour la première fois à Milan, quelle liberté intacte des mœurs !
Les arcadiens de Shakspeare ont conservé quelque chose de leurs mœurs chevaleresques, et ses bergères nous charment les unes par la vérité de leurs mœurs champêtres, et les autres par le mélange de ces mœurs qu’elles ont adoptées, et de cet esprit cultivé qu’elles doivent à leurs premières habitudes. […] À travers la confusion des incidents et la brutalité des mœurs, l’intérêt et le pathétique n’ont peut-être jamais été portés plus loin que dans cette tragédie. […] Malgré cette confusion de temps, de noms et de mœurs ; malgré l’invraisemblance de la fable et l’absurdité du plan, Cymbeline est une des tragédies les plus admirées de Shakspeare. […] En général, toutes les scènes entre elle et Petruchio sont divertissantes, et ne manquent pas de poésie, quoique les inventions de Petruchio aient quelquefois une espèce de grossièreté qui répugne à l’élégance de nos mœurs modernes. […] Ce serait un spectacle assez triste que celui des emportements d’une jeunesse aussi désordonnée que celle de Henri V, dans des mœurs aussi rudes que celles de son temps, si, au milieu de cette grossière débauche, des habitudes et des prétentions d’un genre plus relevé ne venaient former un contraste et jouer un rôle d’autant plus amusant qu’il est déplacé.
Moins indépendant et moins âpre, le gouvernement paternel subsiste ailleurs, sinon dans la loi, du moins dans les mœurs. […] Je n’en ai pas encore vu un s’échauffer contre un soldat-paysan, et j’ai vu en même temps un air de respect filial de la part de ces derniers… C’est le paradis terrestre pour les mœurs, la simplicité, la vraie grandeur patriarcale : des paysans dont l’attitude devant les seigneurs est celle d’un fils tendre devant son père, des seigneurs qui ne parlent à ces paysans dans leur langage grossier et rude que d’un air bon et riant ; on voit un amour réciproque entre les maîtres et les serviteurs » Plus au sud, dans le Bocage, pays tout agricole et sans routes, où les dames voyagent à cheval et dans des voitures à bœufs, où le seigneur n’a pas de fermiers, mais vingt-cinq à trente petits métayers avec lesquels il partage, la primauté des grands ne fait point de peine aux petits. […] Çà et là, dans les Mémoires, on voit passer quelques-unes de ces étranges figures surannées, par exemple, en Bourgogne, « des gentilshommes chasseurs, en guêtres, en souliers ferrés, portant sous le bras une vieille épée rouillée, mourant de faim et refusant de travailler64 » ; ailleurs, « M. de Pérignan, en habit, perruque et figure rousses, faisant travailler à des murs de pierre sèche dans sa terre, et s’enivrant avec le maréchal-ferrant du lieu » ; parent du cardinal Fleury, on fit de lui le premier duc de Fleury Tout contribue à cette décadence, la loi, les mœurs, et d’abord le droit d’aînesse. […] Par leur résidence habituelle ou fréquente au centre, par leurs alliances ou leurs visites mutuelles, par leurs mœurs et leur luxe, par l’influence qu’ils exercent et les inimitiés qu’ils soulèvent, ils forment un groupe à part, et ce sont eux qui ont les plus vastes terres, les premières suzerainetés, les plus larges et les plus complètes juridictions.
On y sent la nudité innocente de l’homme et de la femme dans la pureté sans tache et sans ombre d’un autre Éden. » Nos mœurs, qui ne comportent plus cette naïveté de l’âme pour qui tout est sain, m’interdisent de reproduire ici ces extases de la littérature sacrée de l’Inde. […] De tels poèmes ne sont jamais pour un peuple que les archives illustrées de ses croyances, de ses mœurs, de ses événements nationaux, ou tout au moins de ses fables théogoniques. […] Les grands poètes se rencontrent égaux en dessin et en couleur devant leur éternel modèle la nature, à travers tous les siècles, toutes les mœurs, toutes les langues. […] Des scènes de mœurs orientales se déroulent pendant des chants intarissables, tantôt dans le palais de Damayanti, tantôt dans celui où Nala gémit inconnu sous le déguisement qui le cache et sous le faux nom de Wacouba.
Cet homme, aussi respectable par sa piété que par sa docte ardeur, était né en 1683, en Poitou, d’une famille fidèle aux vieilles mœurs. […] Tels qu’ils sont, ces récits en vers du Renart, ouvrage de divers auteurs, la plupart anonymes, plaisent, amusent, rebutent et dégoûtent quelquefois, mais instruisent toujours sur les mœurs et les opinions de nos pères.
Mais la différence qu’il y a entre ces modernes, ceux même qui sont plus exclusivement et plus uniquement fabulistes que La Fontaine, et les anciens trouvères, c’est que ceux-ci se complaisent beaucoup plus aux détails domestiques et familiers, à tout ce qui est du monde et des mœurs des animaux, et qu’ils ne craignent ni de déroger, ni d’ennuyer en y insistant. […] Quand tout changeait autour d’elle et que la littérature à la mode se surchargeait de vaines recherches d’école, l’Armorique un peu arriérée et cantonnée restait fidèle à la vieille forme poétique comme aux vieilles mœurs ; elle restait surtout fidèle à ce courage qui est toujours prêt en France à renaître et à sortir quelque part de terre, quand les grands raisonneurs disent qu’il a disparu.
Malherbe avait dit : « J’apprends tout mon français à la place Maubert. » Lui, Töpffer, il veut qu’à deux siècles de distance cette parole bien comprise signifie : Je rapprends et je retrempe mon français chez les gens simples, restés fidèles aux vieilles mœurs, comme il en est encore dans la Suisse romande, en Valais, en Savoie, en dessus de Romont, à Liddes, à Saint-Branchier, au bourg Saint-Pierre. C’est là qu’en accostant, dit-il, le paysan qui descend la chaussée, ou en s’asseyant le soir au foyer des chaumières, on a le charme encore d’entendre le français de souche, le français vieilli, mais nerveux, souple, libre et parlé avec une antique et franche netteté par des hommes aussi simples de mœurs que sains de cœur et sensés d’esprit ; … — en telle sorte que la parole n’est plus guère que du sens, mais franc, natif, et comme transparent d’ingénuité.
Dans quelques-unes, on doit reconnaître le ton sauvage qu’inspire la vue des Alpes et de l’Apennin ; longtemps réfugié au sein de leurs glaces éternelles, je ne sais si je suis de mise au milieu d’une grande ville, et c’est avec quelque méfiance que je viens y porter un ton et des mœurs étrangères. […] Il décrit dans un curieux détail les mœurs et le gouvernement des petits cantons ; il n’a rien gardé du vague et de la fougue qui dominaient dans ses précédents ouvrages ; la partie positive et commerciale l’occupe ; il ne néglige aucune des circonstances physiques des lieux qu’il parcourt ; il y mêle des considérations morales qui le montrent affranchi des lieux communs de son siècle, ou plutôt devançant l’esprit du siècle prochain.
Ce n’est pas l’histoire, mais c’est la matière de l’histoire, j’entends celle des mœurs. […] Les mœurs étaient telles dans la jeunesse de Dangeau que tous ceux qui ont parlé de lui et qui ont relevé son adresse et son bonheur, l’ont presque loué de n’avoir pas triché et volé au jeu.
Marolles, qui joindra plus tard (1627) à ce premier bénéfice l’abbaye de Villeloin, plus considérable, et qui en prit occasion de recevoir l’ordre de prêtrise moins par vocation que par convenance (les bulles y mettant cette condition), fut lié avec quelques-uns de messieurs de Port-Royal, fort sévères sur ce genre d’abus et de d’irrégularités ; mais, tout en se prévalant de leur amitié et en la leur rendant par de bonnes paroles et des témoignages publics d’intérêt, il ne fut touché en aucun temps de scrupules sur la manière dont il était entré dans les bénéfices et dans le sacerdoce ; il avait le christianisme assez large et coulant, et n’était rien moins que rigoriste, soit pour la doctrine, soit pour les mœurs : se contentant de vivre en honnête homme, comme on disait alors. […] Quant à la correction des mœurs de ses religieux, il n’estimait pas apparemment que son titre d’abbé commandataire lui conférât autorité suffisante pour cela, et, au lieu d’entrer en lutte avec ses moines, il avait mieux aimé patienter ; c’est à l’archevêque diocésain sous la juridiction duquel était placée l’abbaye, qu’il demanda enfin d’autoriser un rétablissement de règle devenu bien nécessaire.
., font les frais, il n’y avait en France aucune de ces suites mémorables comme celle que Fontenelle avait donnée sur la vie et les mœurs des Savants, et qui établissent un genre littéraire nouveau. […] si l’on est d’un art particulier, tout en restant le confrère et l’ami des artistes, savoir s’élever cependant peu à peu jusqu’à devenir un juge ; si l’on a commencé, au contraire, par être un théoricien pur, un critique, un esthéticien, comme ils disent là-bas, de l’autre côté du Rhin, et si l’on n’est l’homme d’aucun art en particulier, arriver pourtant à comprendre tous les arts dont on est devenu l’organe, non-seulement dans leur lien et leur ensemble, mais de près, un à un, les toucher, les manier jusque dans leurs procédés et leurs moyens, les pratiquer même, en amateur du moins, tellement qu’on semble ensuite par l’intelligence et la sympathie un vrai confrère ; en un mot, conquérir l’autorité sur ses égaux, si l’on a commencé par être confrère et camarade ; ou bien justifier cette autorité, si l’on vient de loin, en montrant bientôt dans le juge un connaisseur initié et familier ; — tout en restant l’homme de la tradition et des grands principes posés dans les œuvres premières des maîtres immortels, tenir compte des changements de mœurs et d’habitudes sociales qui influent profondément sur les formes de l’art lui-même ; unir l’élévation et la souplesse ; avoir en soi la haute mesure et le type toujours présent du grand et du beau, sans prétendre l’immobiliser ; graduer la bienveillance dans l’éloge ; ne pas surfaire, ne jamais laisser indécise la portée vraie et la juste limite des talents ; ne pas seulement écouter et suivre son Académie, la devancer quelquefois (ceci est plus délicat, mais les artistes arrivés aux honneurs académiques et au sommet de leurs vœux, tout occupés qu’ils sont d’ailleurs, et penchés tout le long du jour sur leur toile ou autour de leur marbre, ont besoin parfois d’être avertis) ; être donc l’un des premiers à sentir venir l’air du dehors ; deviner l’innovation féconde, celle qui sera demain le fait avoué et’reconnu ; ne pas chercher à lui complaire avant le temps et avant l’épreuve, mais se bien garder, du haut du pupitre, de lui lancer annuellement l’anathème ; ne pas adorer l’antique jusqu’à repousser le moderne ; admettre ce dernier dans toutes ses variétés, si elles ont leur raison d’être et leur motif légitime ; se tenir dans un rapport continuel avec le vivant, qui monte, s’agite et se renouvelle sans cesse en regard des augustes, mais un peu froides images ; et sans faire fléchir le haut style ni abaisser les colonnes du temple, savoir reconnaître, goûter, nommer au besoin en public tout ce qui est dans le vestibule ou sur les degrés, les genres même et les hommes que l’Académie n’adoptera peut-être jamais pour siens, mais qu’elle n’a pas le droit d’ignorer et qu’elle peut même encourager utilement ou surveiller au dehors ; enfin, si l’on part invariablement des grands dieux, de Phidias et d’Apelle et de Beethoven, ne jamais s’arrêter et s’enchaîner à ce qui y ressemble le moins, qui est le faux noble et le convenu, et savoir atteindre, s’il le faut, sans croire descendre, jusqu’aux genres et aux talents les plus légers et les plus contemporains, pourvu qu’ils soient vrais et qu’un souffle sincère les anime.
J’ai continué, l’intérêt a redoublé, j’ai regardé la signature : le piquant article, vers ou prose, scène de mœurs, esquisse populaire, réalité prise sur le fait, gaieté légère où brille une larme, était signé Ch. […] C’est ainsi qu’il a conçu de bonne heure sa galerie intitulée : les Oubliés et les Méprisés ou les Dédaignés, comprenant Linguet, Mercier, Dorat-Cubières, Baculard d’Arnaud… et finissant par le célèbre gastronome Grimod de La Reynière, « le plus gourmand des lettrés, le plus lettré des gourmands. » C’est à cette série qu’appartiennent encore, bien que publiés à part, Rétif de La Bretonne, le peintre ou mieux « le charbonnier de mœurs », et Fréron, non pas l’illustre, mais le fameux critique (famosus), sur lequel je veux un peu m’arrêter.
Il est naturel et il paraît juste qu’au moment même où l’unité de la France s’accomplit et se consomme en tous sens par l’immense réseau des communications et par une facilité, pour chacun, d’un déplacement à la minute, et presque d’une omniprésence universelle, il y ait un sentiment de résistance sur quelques points, un reploiement sur soi et un suprême effort de quelques fidèles pour sauver les vieilles mœurs ou du moins les vieilles chansons, pour les préserver et les clôturer, s’il est possible, pour leur assurer même, comme par défi, et grâce à un stimulant nouveau, une sorte de regain et de renaissance. […] Luzel de ses nobles sentiments de résistance, de sa foi au vieux culte, aux mœurs nationales.
Son génie, naturellement recueilli et paisible, eût-il suffi à cette intensité d’action que réclame notre curiosité blasée, à cette vérité réelle dans les mœurs et dans les caractères qui devient indispensable après une époque de grande révolution, à cette philosophie supérieure qui donne à tout cela un sens, et fait de l’action autre chose qu’un imbroglio, de la couleur historique autre chose qu’un badigeonnage ? […] Euripide d’ailleurs ne s’était pas fait faute, on le voit, de quelques anachronismes de mœurs et de moyens.
On remarquera que les êtres varient selon les temps et les lieux, et que, pour être vrai, il faut, avec les caractères, représenter les moeurs. […] Telle est la très-vraie noblesse Qui nobles moeurs en coeur adresse Le noble coeur trétout surmonte.
La naturalisation, quant aux caractères et aux mœurs, est aussi complète que possible. […] Dans une amusante folie intitulée Arlequin empereur dans la Lune, œuvre du même Nolant de Fatouville, qui fut le principal fournisseur du théâtre italien de 1682 à 1687, la fantaisie est aussi ramenée à la critique très directe de nos mœurs.
Par moralistes il faut entendre les écrivains, prosateurs ou poètes, qui traitent des mœurs, non parmi d’autres choses, mais à part, et comme sujet unique. […] A ne regarder que les circonstances principales, une noblesse abattue par Richelieu, et qui se relève à la faveur d’une régence ; un premier prince du sang qui veut régner comme Richelieu, ne comprenant pas que ce qui est possible à un évêque, séparé du trône par un abîme, ne l’est pas à un prince du sang, qui peut être tenté d’y monter ; des grandes dames excitant la guerre civile pour éloigner leurs maris ; de jeunes seigneurs qui s’y jettent par galanterie, et qui prennent pour drapeau l’écharpe d’une maîtresse ; un Parlement étourdi de sa puissance, et défendant l’ordre par la sédition ; des princes de l’Eglise organisant l’émeute armée, comme la dernière sorte de guerre que leur permettent les mœurs ; à ne regarder, dis-je, la Fronde que par ce côté extérieur et local, cette longue échauffourée n’est qu’un événement particulier.
Chez les Latins les mœurs sont trop libres, l’opinion trop indulgente pour que la théorie du dandysme pût s’y condenser dans toute son âpreté. […] Qu’on ne me parle point du dandysme de Barbey d’Aurevilly qui fut, je le veux bien, une protestation contre la vulgarité des mœurs plébéiennes, mais qui se résume en fin de compte à des hâbleries et à des pratiques de mascarade.
Voltaire, malheureux pour la première fois, s’exila en Angleterre ; il y étudia le gouvernement, les mœurs publiques, l’esprit philosophique, la littérature, et il revint de là tout entier formé et avec sa trempe dernière. […] Mme de Graffigny, en présentant une jeune Péruvienne, Zilia, brusquement transplantée en France, et en lui faisant faire, au milieu d’un cadre romanesque, la critique de nos mœurs et de nos institutions, comme cela a lieu dans les Lettres persanes, avait trop oublié de tenir compte des raisons de ces mêmes institutions et des causes naturelles de ces inégalités sociales, qui semblent choquer si vivement sa jeune étrangère.
La peinture a cela de commun avec la poésie, et il semble qu’on ne s’en soit pas encore avisé, que toutes deux elles doivent être bene moratae ; il faut qu’elle ait des mœurs. […] C’est que major e longinquo reverentia, et qu’en faisant nu on éloigne la scène, on rappelle un âge plus innocent et plus simple, des mœurs plus sauvages, plus analogues aux arts d’imitation.
On peut donc dire, en thèse générale, que les modifications doivent se faire successivement par le travail lent et graduel du temps et des mœurs. […] Pour obéir librement, il faut obéir avec amour ; mais n’oublions point que le consentement des peuples ne peut être qu’un acquiescement tacite, une reconnaissance de ce qui existe, ou plutôt un acquiescement qui résulte de la conformité aux mœurs.
Puis, à part ce souffle méridional, nous savons combien, par l’esprit de secte et de méditation, par la controverse et la lecture de la Bible, l’Orient a possédé l’imagination anglaise, mais tout cela, sous une première loi de formation du langage et des mœurs, très marquée dans le type anglais. […] « Parfois même, il se plut à les faire applaudir dans son ignoble Falstaff ; et, peintre admirable des mœurs, il n’en est pas le peintre moral.
Dans ce qu’il a dit de ses longs et patients travaux pour la mesure d’un arc du méridien, il a insisté sur les diversions littéraires que s’accordait le savant, et sur l’attention tout humaine qu’il ne cessait d’apporter à travers ses mesures et ses calculs, aux mœurs des populations parmi lesquelles il vivait.
Depuis que le tzar Pierre s’était imaginé que la perruque à la Louis XIV était une pièce essentielle de la civilisation européenne, la cour avait adopté l’étiquette et les modes françaises ; elle rougissait des mœurs du peuple, desquelles les siennes au fond se rapprochaient beaucoup.
Taine, au lieu d’étudier la littérature pour elle-même, l’a considérée trop souvent comme un moyen de mieux connaître la société dont elle exprime les mœurs, les tendances, les rêves.
Aucun Tragique ne l’a égalé dans l’art unique d’imaginer des plans hardis, de les subjuguer, de les varier selon le choix du sujet, de donner à ses personnages une ame, une dignité, une chaleur, un caractere toujours conforme à leur siecle, à leur nation, à leurs mœurs, à leur situation.
Tous ces Ouvrages sont plus que suffisans pour donner une idée avantageuse de cet Homme de Lettres, dont les mœurs douces & honnêtes méritoient autant d’égards que l’utilité de ses travaux.
Leurs poètes pèchent contre une des plus grandes lois de l’Épopée, la vraisemblance des mœurs, et transforment en innocents bergers d’Arcadie les rois pasteurs de l’Orient.
Platon reproche encore un autre inconvenient à la poësie : c’est que les poëtes en se mettant aussi souvent qu’ils le font à la place des hommes vicieux dont ils veulent exprimer les sentimens, contractent à la fin les moeurs vicieuses dont ils font tous les jours des imitations.
La donnée du roman est le sujet de roman ou de drame le plus commun dans l’histoire de nos mœurs présentes.
Il s’est avisé, lui, de montrer, dans le xviiie siècle le côté qui est resté le moins connu et le plus voilé des mœurs d’un temps où ce n’était pas le vice que l’on gazait, mais la vertu.
Quelque éloignés que ces éloges soient de nos mœurs, il est pourtant aisé d’en rendre raison.
De telles fables, de telles pensées et de telles mœurs, un tel langage et de tels vers s’appelèrent également héroïques, furent communs à des peuples entiers, et par conséquent aux individus dont se composaient ces peuples.
Et je te garantis qu’après leur départ tu ne serais pas à plaindre. » Quelles drôles de mœurs mondaines ! […] » Mais je suis assez tenté de croire au sans-gêne des mœurs de Molière. […] Les mœurs grossières du harem lui font horreur. […] Le jeune seigneur Perdican se décide, en un instant, à épouser une bergère : ce sont les mœurs de ce pays de rêve. […] Pour moi, ce rien de romanesque, mêlé à une vive esquisse de mœurs contemporaines, n’a rien qui me déplaise.
À l’époque de nos agitations et de nos anxiétés politiques (on doit les supposer finies), j’ai eu la naïveté de l’inviter gravement et périodiquement à écrire la comédie ou la satire des mœurs républicaines et des excès démagogiques : M. de Musset a dû bien rire de mes articles, s’il les a lus. […] On le sait, l’éminent conteur s’est toujours attaché de préférence, dans le roman, aux traits de passion ou de caractère qui dessinent un personnage et expliquent une catastrophe ; dans l’histoire, aux détails de mœurs et de couleur locale qui précisent une époque et expliquent un événement. […] Des conspirations s’ourdirent, et Démétrius les favorisa, d’abord par une confiance excessive, ensuite par une clémence tout à fait en désaccord avec les mœurs du temps. […] Aux mœurs du temps ou au ridicule particulier de l’individu ? […] À cette religion que menacent les vices des grands, l’abrutissement des petits, la dépravation des mœurs, le relâchement des disciplines, l’abaissement intellectuel et moral des prêtres et des évêques, il apporte une condition nouvelle de dissolution et de mort, un travail d’émancipation que son siècle ne peut ni comprendre, ni restreindre, ni modérer.
Bien des choses ont vieilli dans ce poème : le ciel d’abord, qui a été dépeuplé de ses dieux ; les nations ensuite, telles que les Troyens et les Hellènes, petits groupes d’hommes qui n’ont laissé que des cendres sur le cap Sigée et un nom sur les pages impérissables de leur poète ; les mœurs enfin, qui ne ressemblent pas plus aux nôtres aujourd’hui que la barbarie à la civilisation et que Troie ou Argos, bourgades classiques, ne ressemblent à Paris, à Rome, à Constantinople ou à Londres. […] Les mœurs sauvages de ces chefs de montagnards de l’Albanie éclatent dans toute leur rudesse. […] Écoutez par quelle autre comparaison inattendue le poète détend ici lui-même l’anxiété de l’imagination de ses auditeurs, tout en peignant les mœurs de l’Ionie où il est né : « Ainsi, quand une femme de Carie ou de Méonie a coloré en pourpre les plaques d’ivoire destinées à parer la tête des coursiers, beaucoup de guerriers désirent les posséder ; mais ces ornements précieux, réservés à un roi, seront un jour tout à la fois la parure et l’orgueil de son maître. […] Cette générosité, que nous appellerions aujourd’hui chevaleresque, atteste que la chevalerie, cette grâce dans l’héroïsme, était inventée bien avant les mœurs arabes et chrétiennes, et qu’elle était sortie du cœur de l’homme, même dans les temps que nous nommons barbares, comme une beauté innée des sentiments humains, beauté qui n’a pas d’autre date que celle du cœur humain lui-même. […] Voulez-vous connaître l’origine, le costume, le caractère, la géographie, les mœurs des nations qui peuplaient alors les confins de l’Asie et de l’Europe : le poète vous les montre du doigt, vous les décrit et vous les raconte, peuplade par peuplade, et pour ainsi dire homme par homme, dans cette double revue passée sous vos yeux dans la plaine de Troie !
Dans ces agglomérations des grandes villes où les riches et les pauvres ne se connaissent point et sont plus séparés par les mœurs qu’ils ne l’étaient jadis par les institutions, où toute communication semble coupée entre ceux qui pâtissent et ceux qui seraient disposés à les secourir, et où, par surcroît, on a à se garder des professionnels de la mendicité, il y a une chose aussi difficile que l’effort de donner, c’est de savoir à qui donner ; c’est d’atteindre les pauvres. […] Il nous a donné, dans la même quinzaine, Catherine et le Nouveau Jeu, c’est-à-dire la comédie la plus effrontément attendrissante et vertueuse, et la plus effrontée peinture de mauvaises mœurs amusantes. […] L’Aînée n’est point une pièce à thèse et n’est qu’accessoirement une comédie de mœurs. […] Cela me met à l’aise pour leur dire : Ma comédie, je le répète, n’est point une comédie de mœurs et est encore moins une pièce à thèse. Ma peinture ou, plus exactement, mon croquis de mœurs protestantes et pastorales est tout accessoire, assez superficiel, et fantaisiste à demi.
Son âge même était gravé dans toutes les mémoires, et la date, lorsque l’on s’interrogeait ces jours derniers, revenait voltiger en chanson : Dans ce Paris plein d’or et de misère, En l’an du Christ mil sept cent quatre-vingts, Chez un tailleur, mon pauvre et vieux grand-père, Moi nouveau-né, sachez ce qui m’advint… Sa vie fut simple ; par son bon sens, par sa probité, par la modération de ses mœurs et de ses goûts, il sut la rendre constante et digne.
L’une épouse, l’autre fille d’un ministre, elles furent portées dans la vie publique, plutôt qu’elles ne s’y jetèrent ; élevées, l’une dans le recueillement des mœurs bourgeoises, et l’autre au bruit des discussions philosophiques, elles avaient contracté dès l’enfance de fortes et sérieuses habitudes d’esprit, qu’elles déployèrent dans l’occasion avec toute l’énergie de la jeunesse et de la vertu.
Un pareil caractère serait peut-être moins comique qu’odieux ; il serait vrai du moins quant aux mœurs du jour, tandis que ce M.
Les mœurs enfin y sont joviales, sans férocité.
Les historiens consciencieux s’avouent impuissants à savoir autre chose que des états de civilisation, des ensembles de mœurs.
Observons, en finissant cet article, que Quinault ne fut pas moins estimable par ses mœurs que par ses talens.
Ces cloîtres, ces voûtes, ces tombeaux, ces mœurs austères en contraste avec l’amour, en doivent augmenter la force et la tristesse.
Ils nous ont sans doute laissé d’admirables peintures des travaux, des mœurs et du bonheur de la vie rustique ; mais, quant à ces tableaux des campagnes, des saisons, des accidents du ciel, qui ont enrichi la muse moderne, on en trouve à peine quelques traits dans leurs écrits.
Corollaire relatif aux mœurs héroïques.
Il met la raison à la portée des mœurs, et les institutions en rapport avec les habitudes. […] « S’agit-il de se conserver, de se reproduire, de se développer dans cette espèce de végétation lente et insensible que les peuples ont comme les grands végétaux ; s’agit-il de se maintenir en harmonie avec le milieu européen, de garder ses lois et ses mœurs, de préserver ses traditions, de perpétuer les opinions et les cultes, de garantir les propriétés et le bien-être, de prévenir les troubles, les agitations, les factions : la monarchie est évidemment plus propre à cette fonction qu’aucun autre état de société. […] Il est le roi du culte, de l’aristocratie, des lois, des mœurs, des abus et des erreurs de l’empire.
Mais il y a la différence des siècles et des mœurs : le xviie siècle est encore plus robuste qu’élégant ; il a plus de sève et de fougue que de raffinement et de mièvrerie. […] Ces Vitry, ces Vivonne, ces Gourville n’ont pas l’esprit plus réglé que les mœurs ; Barillon, l’ami de La Fontaine, appartient à ce groupe sceptique que Saint-Évremond représente devant la postérité ; et c’est chez Broussin, devant Boileau, que l’épicurien Molière, s’il faut en croire la légende, lisait sa traduction perdue de Lucrèce. […] Racine, ici, n’est pas plus vif que Boileau, c’est un trait des mœurs du siècle.
Lui qui attendit quarante ans avant d’avoir une opinion politique, en un mois, quinze jours, une demi-journée, il avait ses opinions sur les villes, sur leur histoire, il connaissait leurs mœurs. […] Non : il nous peint des personnages vulgaires, sans distinction d’esprit ni de caractère, des mœurs basses et communes, mais il relève tout cela par des sensations rares et par un style plus rare encore ; ainsi, pour certains bibliophiles, le contenu du livre importe moins que le papier et la reliure. […] Les voltairiens sont morts, et les bons esprits peuvent recommencer à lire Voltaire sans avoir la grotesque vision de cet homme ennemi de la poésie et des religions, liberâtre et déiste, solennel et riant jaune, qui de 1725 à 1730 faisait la guerre aux jésuites, aux préjugés, défendait la Charte et respectait les mœurs en caressant sa bonne.
Ici, ce n’est pas dans l’étude de mœurs, que Jacques Fréhel est intéressante. […] La vraie sincérité, celle qui n’est pas une attitude vaine d’arriviste politique ou littéraire, celle qui est dans la vie et non dans les professions de foi, dans les mœurs et non dans les mœurs oratoires, celle qui est « l’horreur du servilisme, de la palinodie et des concessions hypocrites », loin de se montrer banale comme une préface de Saint-Georges de Bouhélier, « ne semble plus que la vertu des seuls prédestinés ».
En apparence, ses mœurs, ses manières, ses dehors, son langage, sont les mêmes que ceux du vrai monde ; mais approchez, et les fêlures paraissent, les dissonances éclatent, les vernis s’écaillent, les fausses positions se trahissent, les fortunes scandaleuses montrent le vert-de-gris qui les ronge, les corruptions fardées développent leurs miasmes. […] Mais Olivier est un philosophe de trente ans, rompu à toutes les roueries de la vie pratique ; il a voyagé dans le demi-monde autant pour son instruction que pour son plaisir ; il n’a jamais pris au sérieux les comédies de mœurs et de prétentions qui s’y jouent. […] Une verve inextinguible, une observation pénétrante, des mœurs calquées à vif et toutes pareilles, dans leur vérité flagrante, à des empreintes de photographie morale colorées par l’art ; pas un hors-d’œuvre, pas une longueur, pas une scène qui languisse ou qui interrompe le mouvement d’intérêt, qui va s’accroissant et se renforçant jusqu’au dernier acte, dans un crescendo soutenu !
C’est un grand avantage pour un auteur de pouvoir faire beaucoup parler de soi, en se mettant sous la protection des lois, d’avoir un célèbre avocat qui puisse vous dire en face « que vous avez reçu une mission de votre génie pour rappeler notre littérature à la vérité, non à cette vérité de convention et d’artifice, mais à cette vérité qui se puise dans la réalité de notre nature, de nos mœurs et de nos habitudes ». […] Si les théâtres, pour un vieux peuple, sont devenus une nécessité, un besoin indispensable, il est du devoir du gouvernement de les soutenir convenablement, afin de pouvoir les diriger dans l’intérêt de la morale, des mœurs et de nos grandes institutions. […] Quant aux autres spectacles qui ne recevraient aucune rétribution du gouvernement, ils conserveraient la liberté de leur commerce, sauf à nos législateurs à empêcher par de bonnes lois la corruption des mœurs et les scandales publics ?
Fille de l’individualisme, qui a tout envahi, et de ces mauvaises mœurs, que la Comédie corrige en riant, disent les niais qui aiment le spectacle, la littérature de ce temps, — et il ne faut pas biaiser avec une chose si grave, — a fait une haute position à l’adultère dans l’imagination publique. […] C’est qu’il n’a pas de conclusion, non-seulement exprimée, mais sentie, et qu’il ne s’adresse qu’aux honteux souvenirs, que nous avons tous, quand il devrait s’adresser, ce livre, encore plus à l’avilissement de nos idées qu’à l’avilissement de nos mœurs. […] Il y a des duels, les duels, la seule chose poétique des romans modernes avec la platitude, s’accroissant chaque jour de nos mœurs, mais poétiques à trop bon marché, quand l’auteur qui se les permet n’en relève pas le lieu par trop aisément commun, par quelque chose qui leur donne du caractère, et, pour Dieu !
« … Les Crébillonet les autres auteurs de cette trempe, qui ont peint les mœurs du Grand-monde, ont travaillé d’après leur imagination : point de faits vrais, ils ont pris le résultat des mœurs pour en composer des Histoires morales vraisemblables, mais outrées. […] Je vais plus loin, j’ose dire que pour peindre la nature, il faut abandonner les Hautes Conditions, où la nature n’existe plus, il est certain que les mœurs communes, les mœurs bourgeoises ou même campagnardes étaient autrefois les mœurs de tous les états. […] Tout en a un peu souffert, les mœurs, ses affaires et son talent. […] Donc l’aspect d’un paysage peut donner une idée des mœurs des gens qui l’habitent. […] N’avons-nous pas d’autres passions, d’autres mœurs, d’autres vices ?
alors, les habitudes, les mœurs, les préjugés, l’atmosphère ambiante jette en quelque sorte un voile entre la théorie et la pratique. […] De la pensée il passe à la parole, et de la parole à l’acte, sans que rien l’arrête jamais, ni conventions sociales, ni mœurs, ni préjugés, ni habitudes. […] C’est que Tartuffe est, en même temps qu’une comédie de mœurs et une étude de caractère, un drame de situation. […] Mais c’étaient les mœurs du temps. […] En d’autres termes, c’est d’observer la vérité matérielle, qui est la ressemblance physique ; et la vérité morale, qui est la dissemblance de mœurs.
Si l’on ajoute à ces noms celui de Domitius Afer, l’heureux et habile avocat des mauvaises causes, éloquent jusqu’à faire ombrage à Caligula (comme Lucain poète faisait ombrage à Néron), trop perdu de mœurs, trop aisément accusateur, démentant le vir probus dicendi peritus, mais qui garde auprès de la postérité le mérite d’avoir eu pour disciple Quintilien ; — Marcus Aper, célèbre à meilleur titre, l’honneur du barreau sous Vespasien, qui joue un grand rôle et le principal dans le Dialogue sur la corruption de l’éloquence, dont quelques personnes même l’ont cru auteur, tant il y plaidé bien la cause des modernes ; — le sophiste Favorinus, né à Arles, célèbre dès le règne de Trajan, en haut crédit et en faveur sous Adrien, et le maître d’Aulu-Gelle ; qui parlait disertement sur tous sujets, qui fit en plaisantant l’éloge de la fièvre quarte (il écrivait en grec), mais qui ne portait pas seulement de l’esprit, qui avait quelquefois de la raison dans les thèses paradoxales qu’il soutenait ; — Fronton, le maître de Marc-Aurèle, dont les lettres retrouvées par M. […] Ses ouvrages d’ailleurs sont des plus intéressants par les côtés historiques ; ils sont riches en détails de toutes sortes sur la vie littéraire, sur ce monde des rhéteurs et des grammairiens, et sur les nuances précises qui séparaient les uns des autres, sur la vie domestique, sur les mœurs de cette société avancée qui ne songe qu’à couler la vie dans de charmantes villas, sur les rives du Rhin et de la Moselle, et qui s’amuse à analyser ses jouissances en vue des Barbares qui déjà s’amoncellent, et à la veille de la grande invasion qui va déborder sur le monde. […] La solitude, avec ses pures délices, est célébrée par saint Eucher, évêque de Lyon, et racontée dans ses détails, exprimée dans ses mœurs par Cassien, né peut-être dans la petite Scythie, au bord de la mer Noire, mais qui vécut et écrivit à Marseille. Je ne poursuivrai pas cette énumération, messieurs, pour le v e siècle : qu’il suffise de signaler Salvien, prêtre de Marseille, puissant dans l’accusation et dans l’invective, éloquent et déclamatoire, et Sidoine Apollinaire, évêque et politique, qui mêle un reste d’Ausone à la littérature chrétienne, — tous deux témoins curieux, expressifs, des malheurs et des mœurs du temps, et le dernier surtout (Sidoine), dont les ouvrages sont le répertoire le plus complet pour faire retrouver au vrai et pour nous représenter la société de ces âges dans sa civilisation raffinée encore, bien qu’expirante.