C’est Pascal, pessimiste comme un chrétien et comme un janséniste, c’est-à-dire comme un chrétien deux fois chrétien. […] Certains, et ce sont les chrétiens, placent l’objet de l’espérance seulement là-haut. […] Maurice de Guérin, très versatile, ou, plutôt, très impétueux, fut chrétien, fut païen, fut disciple de Lamennais et, enfin, redevint chrétien et orthodoxe sous la douce et onctueuse influence de sa sueur, qui fut pour lui, pour parler en style de Chateaubriand, « le chef de la prière ». […] Et La Fronde aurait été conservatrice et chrétienne que le résultat en sens inverse eût été exactement le même. […] ; égalité, égalité chrétienne, et fraternité, fraternité chrétienne ; que les hommes pensent et sentent, sous d’autres mots, des choses qu’ils pensent et sentent depuis très longtemps, et c’est comme phénomènes très actuels qu’il déteste les religions, « ces philosophies pensées par des imbéciles », comme il dit d’un mot qui aurait fait plaisir à Voltaire.
Mais, avant d’arriver à cet objet important, signalons, au point de vue esthétique, une innovation des plus hardies, l’introduction du sentiment chrétien dans notre littérature nationale. […] Il mêle à des idées plus modernes la philanthropie chrétienne de Fénelon et le fier sentiment de dignité que possédait le Tasse. […] Avec les meilleures pages de Lamartine, vous créez l’homme de dévouement et de sacrifice, le juste, le chrétien, le citoyen, le héros. […] Ces interprétations de l’Évangile pourraient même rallier les chrétiens de toutes les communions et les philosophes spiritualistes, car elles sont aussi larges qu’élevées. […] Quinet s’engage bien avant dans le dogme chrétien en donnant pour libérateur au martyr du Caucase les archanges Raphaël et Michel.
Là-dessus quelques chrétiens font un pas vers la philosophie, et plusieurs philosophes font six pas vers le christianisme. […] Il prétend le ramener à ses origines, lui rendre son sens primitif, le pousser dans sa voie naturelle ; il est plus chrétien que les chrétiens. […] Il paraîtra impie aux chrétiens, déraisonnable aux philosophes. […] Séparés en spéculation, nous nous réunissons en pratique pour défendre notre liberté, nos biens et notre vie ; un malfaiteur est l’ennemi des chrétiens aussi bien que des philosophes, et le chrétien comme le philosophe payera volontiers le gouvernement et le gendarme qui l’empêcheront d’être assassiné ou volé. […] Il a fondé ici des vertus chrétiennes parmi des institutions orientales, et purifié des mœurs que la loi semblait devoir dépraver.
On y travaillait avec un esprit chrétien, pour servir l’Ordre et l’Église, et pour trouver la vérité qui est Dieu. […] Mabillon prit cet aveu plus en chrétien qu’en érudit : loin d’en tirer avantage, il s’inclina devant un tel acte d’humilité. […] Feuilletons La Gaule chrétienne ; toute l’histoire du royaume s’y trouve faite, diocèse par diocèse. […] Ce qui apparaît évidemment, c’est qu’il est profondément chrétien. […] J’ai dit combien il était profondément chrétien, il n’est pas étonnant que ses plus heureuses inspirations lui viennent de sa foi.
On veut de l’amour, quelque bon chrétien que l’on soit… Telle est la corruption du genre humain ! […] Il en est de même de Zaïre : cette petite chrétienne faite à la hâte gémit tout bas d’avoir rencontré si mal à propos un père et un frère de hasard qui n’entendent pas raison. […] D’ailleurs, l’hommage que rend Sévère aux vertus des chrétiens, fait beaucoup plus d’impression que ses conjectures politiques et philosophiques. […] Pourquoi les chrétiens étaient-ils les sujets les plus soumis et les plus fidèles des empereurs mêmes qui les persécutaient ? […] Le seul avantage d’Idamé sur Pauline, aux yeux des philosophes, c’est qu’Idamé est femme d’un athée, au lieu que Pauline a pour époux un chrétien, crime que Voltaire n’a jamais pu lui pardonner.
Il fit servir des mets différents aux chrétiens et aux païens, mais de tout avec profusion. […] À l’exception du Tasse en Italie, il n’en a pas paru de plus poétique et de plus chrétienne et barbare à la fois. […] XXXI Quant aux mœurs des deux peuples combattant par leurs chevaliers, elles sont barbares dans le combat et chrétiennes dans les négociations, et après la victoire, l’honneur que nous croyons une fleur de vertu moderne, y dépasse presque les habitudes des armées de nos temps. […] est-ce des principes chrétiens commençant à civiliser ces peuples à peine encore baptisés ?
Accoutumée d’ailleurs à révérer l’Antiquité sous toutes ses formes, à reconnaître aux grands hommes, aux grands écrivains du paganisme des qualités et des vertus qui étaient un acheminement vers la morale chrétienne, elle trouvait mieux à concilier les objets de son admiration et de son culte dans la pleine et large doctrine de l’ordre catholique, dans cette voie latine qui ramène encore au Capitole, que dans ces autres voies plus strictes et particulières où la Réforme prise au sens de Calvin l’eût tenue confinée113. […] Cette personne honnête et probe croit à son lecteur, à son public, à l’affection qu’elle leur inspire, à l’intérêt que le monde témoigne pour la continuation et l’achèvement de son travail, à la compassion qu’il aura d’une interruption venue d’une cause si douloureuse ; elle se souvient de Cicéron pleurant sa fille Tullia, de Quintilien déplorant la perte d’un fils plein de promesses, et, tout en les imitant, elle verse de vraies larmes ; puis, en finissant, la mère chrétienne se retrouve et se soumet115.
Théologiquement, elle n’a jamais douté qu’elle ne possédât la vérité absolue dans le dogme et le symbole chrétien ; elle n’a varié que du moins au plus, en se faisant chaque jour plus strictement fidèle, plus catholique et plus orthodoxe. […] Celui-ci avait coutume de dire : « Je hais la paresse ; j’ai toujours dans ma tente un coq prêt à meréveiller, et, quand je veux dormir plus à mon aise, j’ôte un de mes éperons. » — « Paroles souvent répétées en Russie, ajoute M. de Falloux, et que Mme Swetchine devait bientôt transporter de l’héroïsme guerrier dans l’héroïsme chrétien. » — C’est égal, la comparaison reste bizarre et excessive.
On laissait ces vallées paisibles adorer Dieu à leur manière, selon l’esprit, et par une sorte de culte biblique et chrétien tout primitif. […] On aime à croire que lorsque Catinat, sur la fin de sa vie, se promenait à Saint-Gratien en philosophe et sans épée, il se disait qu’il avait parfois employé cette noble épée à une œuvre plus qu’équivoque, et qu’il en avait un léger remords comme sage ou même comme chrétien.
L’auteur de Marie pourtant a gardé chaste et noué le long vêtement de la Muse ; espèce de Bion chrétien, de Synésius artiste, en nos jours troublés ; jeune poëte alexandrin qui a maintenant rêvé sous les fresques de Raphaël, et qui mêle sur son front aux plus douces fleurs des landes natales une feuille cueillie au tombeau de Virgile. […] C’est assurément l’artiste le moins chrétien d’aujourd’hui, celui dont le caractère individuel est le plus purgé de toutes réminiscences doctrinales et sentimentales du passé. » — M.
Réfractaire à la séduction de l’idéal chrétien, la hauteur de la vertu païenne le saisissait. […] Quelqu’un s’était donné ce spectacle avant lui : c’était Bossuet ; et Montesquieu, qui du reste n’a rien de commun avec ce grand chrétien, ne pourra nier de l’avoir eu pour maître.
Car (pour ramener la complexité des choses à des expressions toutes simples) on aurait presque tout dit en disant que si la Grèce s’éleva par sa générosité charmante, elle périt par quelque chose d’assez approchant de ce que nous nommons le dilettantisme ; et de même, si c’est en somme par la vertu que grandit la république romaine, dire que, avant de mourir par les barbares, l’Empire mourut du mensonge initial d’Auguste et de n’avoir pas eu les institutions qui en eussent fait une patrie au lieu d’un assemblage de provinces, et à la fois de la corruption païenne et de l’indifférence chrétienne à l’égard de la cité terrestre, et encore de l’abus de la fiscalité qui amena la disparition de la classe moyenne, c’est dire, au fond, qu’il périt faute de franchise ou de bon jugement chez ses fondateurs, faute de liberté et d’égalité, faute de communion morale entre ses parties et, finalement, faute de bonté. — Et toutefois le sévère historien sait gré à Rome d’avoir eu quelque chose de ce qu’il lui reproche de n’avoir pas eu assez. Après tout, la conquête romaine, relativement douce aux vaincus, substitua aux lois étroites de la République les lois générales et moins dures de l’Empire ; elle aplanit sans le savoir, pour la propagande chrétienne, tout le champ méditerranéen, et, d’autre part, respecta presque toujours l’indépendance de la pensée philosophique et commença de fonder, à travers le monde, la république des libres esprits ; elle fut enfin, pour une portion considérable de la race humaine, un puissant agent d’unité, encore qu’imparfaite et bientôt défaite… Et puis, nous venons de Rome ; et Victor Duruy ne peut se défendre d’aimer en Rome, initiée de la Grèce et notre initiatrice dans le travail jamais achevé de la civilisation, l’aïeule même de la France.
Au moyen âge elles sont peu puissantes, peu nombreuses ; on n’en compte guère que cinq foyers principaux, l’antiquité profane et surtout latine, l’antiquité juive et chrétienne, le monde celtique, la civilisation germanique, l’Orient musulman. […] Les romantiques, au début de leur lutte contre la tradition classique, appellent à la rescousse le moyen âge ; ils le réhabilitent, l’idéalisent, le proclament poétique, et leur révolution littéraire est ainsi aidée par la restauration monarchique et chrétienne, qui trouve son compte à cette renaissance de la vieille France.
Mais Jason survint, revenant de la chasse : ému de pitié, comme le bon géant Christophe des légendes chrétiennes, il prit la vieille sur ses épaules et lui fit passer le torrent. […] Le Tartare païen, par ces deux supplices, égale les horreurs de l’Enfer chrétien.
Pour se rendre compte en lui de cette question assez singulière et de ce scrupule, il faut se rappeler que Saint-Simon était religieux, chrétien croyant, fervent et pratique ; qu’il allait souvent en retraite à La Trappe, dans l’intervalle de ses contestations nobiliaires et de ses médisances. […] Il était mal avec Monseigneur et avec ses entours ; aussi cette nouvelle soudaine du danger où se trouvait le malade lui fut tout d’abord des plus agréables ; il le confesse sans hypocrisie : « Je passai, dit-il, la journée dans un mouvement vague de flux et de reflux, tenant l’honnête homme et le chrétien en garde contre l’homme et le courtisan. » Mais il a beau faire et se tenir de son mieux, l’homme naturel l’emporte, et il se laisse aller à des espérances riantes d’avenir ; car il était très bien avec la petite cour du duc de Bourgogne, lequel, par la mort de son père, se trouvait ainsi à la veille de régner.
Saint-Simon, qui était un fort chrétien et qui croyait au péché originel, la seule explication qu’il y ait de la nature humaine, — et je défie ceux-là qui ne sont pas chrétiens d’en trouver une autre !
Il les accuse d’avoir le pédantisme de leur hardiesse, et de ne pas mettre dans la négation de la vérité chrétienne assez de placidité et d’amour. […] VII Ôtez, en effet, l’athéisme, — l’athéisme masqué et la haine de la tradition chrétienne — qui font le sens réel de ce livre et de tous livres écrits jusqu’ici par M.
Les libres penseurs issus du catholicisme ou du protestantisme vivent, pour une grande part, du vieux fonds chrétien ; durant des siècles, ils furent préparés dans les petites églises de village. […] Bloch s’empresse : il cherche, il trouve, il apporte au mourant le symbole de la foi des chrétiens.
Il errait entre deux sens qui s’excluent, et donnait à des prémisses païennes une conclusion chrétienne. […] Ici, comme ailleurs, il garde l’empreinte de ses deux natures : chrétien converti, philosophe tardif, conduit par une méthode sévère, appesanti par des souvenirs d’enfance, il s’est agité et il s’est meurtri ; la moitié de sa peine est demeurée stérile ; de ses mains inquiètes il a ouvert la science, et s’est assis blessé sur le seuil.
Quoi qu’on puisse dire pour ou contre, en louant ou en blâmant, on ne sort guère chrétien des écoles de l’Université.
Que les gens du siècle et les philosophes, et les chrétiens dissidents, ne s’étonnent pas trop de retrouver le clergé français si puissant : un tel corps ne s’écrase pas aisément, il renaît bien des fois ; c’est déjà beaucoup que ce clergé et les intérêts d’ambition encore plus que de conscience qu’il représente, ne soient plus qu’à l’état de parti.
J’indiquerai tel sermon, celui, par exemple, qu’il prêcha à Metz en 1652 pour le neuvième dimanche après la Pentecôte, dont la première partie est si profondément, si ingénument chrétienne, la seconde si hébraïque encore, et par endroits si cruelle d’images, d’expressions.
Dès lors son unique pensée est d’achever doucement de vivre, et de savourer à loisir la béatitude qu’elle s’est ménagée : dans sa lettre d’adieux à madame des Ursins, le rayonnement de l’amour-propre satisfait perce sous la froideur ascétique et les sentiments chrétiens : « Vous avez bien de la bonté, madame, d’avoir pensé à moi dans le grand événement qui vient de se passer ; il n’y a qu’à baisser la tête sous la main qui nous a frappés.
Le pape Pie XI annoncera par une suprême encyclique (Gaudeamus, fratres) à ce qui restera du monde chrétien qu’il remet ses pouvoirs aux mains de l’Académie des sciences de Berlin.
Même quand l’artiste qui pourtraicturait les comédiens a prétendu peindre ou crayonner leur tête à eux, leur tête d’homme et de chrétien, il a eu beau faire, il s’est souvenu de tel ou tel de leurs masques publics, et c’est cela qu’il a reproduit, peut-être à son insu.
D’abord, nulle trace, en lui, d’éducation chrétienne.
Venu de l’arabe par l’italien ; peut-être de la ville de Tarifa, port que les Arabes d’Espagne avaient ouvert au commerce des chrétiens.
En défendant aux avocats de faire le fond de leurs études de tant de livres inutiles à leur profession, ils les bornèrent à l’étude des loix naturelle, divine & humaine ; loix anciennes & nouvelles ; loix païennes & chrétiennes ; loix étrangères & loix du royaume.
Ce livre, — qu’il aurait été plus habile de traiter, quand il parut, avec le silencieux mépris qu’il méritait, mais sur lequel tout ce qui est chrétien s’est élancé comme sur une barricade, — éventré, démoli comme une barricade, a entraîné, dans sa démolition, son auteur.
∾ Certaines personnes qui ont l’esprit confus se plaisent à mêler les termes, et décorent du titre de catholique, de chrétien, de religieux tout idéaliste, tout homme détaché des avantages matériels.
Trois espèces de raisons La première est la raison divine, dont Dieu seul a le secret, et dont les hommes ne savent que ce qui en a été révélé aux Hébreux et aux Chrétiens, soit au moyen d’un langage intérieur adressé à l’intelligence par celui qui est lui-même tout intelligence, soit par le langage extérieur des prophètes, langage que le Sauveur a parlé aux apôtres, qui ont ensuite transmis à l’église ses enseignements.
Il y eut, certes, une vraie chrétienne parmi elles, une admirable pénitente qui sembla vouloir payer pour toutes, la princesse de Conti ; mais en revanche et à ses côtés, dans cette quantité de cousins et de cousines, que de païens et de païennes ! […] Ses fils, ces brillants et dissolus Conti, qui devaient répondre si étrangement à son vœu et aux espérances de leur éducation première, lui firent élever un monument dans l’église Saint-André-des-Arcs avec cette épitaphe où il n’y avait que la vérité : À la gloire de Dieu, et à l’éternelle mémoire d’Anne-Marie Martinozzi, princesse de Conti, qui, détrompée du monde dès l’âge de dix-neuf ans, vendit toutes ses pierreries pour nourrir, durant la famine de 1662, les pauvres de Berri, de Champagne et de Picardie ; pratiqua toutes les austérités que sa santé put souffrir ; demeura veuve à l’âge de vingt-neuf ans, consacra le reste de sa vie à élever en princes chrétiens les princes ses enfants, et à maintenir les lois temporelles et ecclésiastiques dans ses terres ; se réduisit à une dépense très modeste, restitua tous les biens dont l’acquisition lui était suspecte jusqu’à la somme de huit cent mille livres ; distribua toute son épargne aux pauvres dans ses terres et dans toutes les parties du monde, et passa soudainement à l’éternité, après seize ans de persévérance, le 4 février 1672, âgée de trente-cinq ans. […] Qu’on veuille penser à tout ce qu’il y avait de réfléchi et de profond d’éclairé au sens chrétien, dans cette piété qui sentait le besoin d’expier et de payer pour les autres, — pour son époux, le prince de Conti, fauteur de guerres civiles et artisan de désastres dans tant de villages et de chaumières, — pour son oncle le cardinal, acquéreur avide et si peu scrupuleux de richesses innombrables.
Sans doute il y a beaucoup de déistes, surtout depuis Rousseau ; mais je ne crois pas que, sur cent personnes du monde, on trouve encore à Paris dix chrétiens ou chrétiennes. « Depuis dix ans514, dit Mercier en 1783, le beau monde ne va plus à la messe ; on n’y va que le dimanche pour ne pas scandaliser les laquais, et les laquais savent qu’on n’y va que pour eux. » Le duc de Coigny515 dans ses terres auprès d’Amiens, refuse de laisser prier pour lui, et menace son curé, s’il prend cette licence, de le faire jeter en bas de sa chaire ; son fils tombe malade, il empêche qu’on apporte les sacrements ; ce fils meurt, il interdit les obsèques et fait enterrer le corps dans son jardin ; malade lui-même, il ferme sa porte à l’évêque d’Amiens qui se présente douze fois pour le voir, et meurt comme il a vécu. — Sans doute un tel scandale est noté, c’est-à-dire rare ; presque tous et presque toutes « allient à l’indépendance des idées la convenance des formes516 ». […] D’autres « évitent en chaire le nom de Jésus-Christ et ne parlent plus que du législateur des chrétiens ».
Entends, Dieu que j’implore, entends du haut des cieux Une voix plaintive et sincère ; Mon incrédulité ne doit pas te déplaire, Mon cœur est ouvert à tes yeux ; L’insensé te blasphème et moi je te révère ; Je ne suis pas chrétien, mais c’est pour t’aimer mieux. […] Il accorda au clergé, puis il retira, puis il accorda de nouveau une demi-formalité d’orthodoxie chrétienne nécessaire alors à la sépulture. […] Le christianisme et la philosophie ne cesseront pas de se disputer ce cercueil, l’un pour la malédiction, l’autre pour l’apothéose, tant que l’une ne l’aura pas définitivement emporté sur l’autre, ou tant que l’une et l’autre ne se seront pas réconciliés dans une philosophie chrétienne ou dans un christianisme philosophique.
Homme qui cherchait l’étincelle du feu sacré dans les débris du sanctuaire, dans les ruines encore fumantes des temples chrétiens, et qui, séduisant les démolisseurs même par la pitié, et les indifférents par le génie, retrouvait des dogmes dans le cœur, et rendait de la foi à l’imagination ! […] Qui m’aurait dit alors, que quinze ans plus tard, la poésie inonderait l’âme de toute la jeunesse française, qu’une foule de talents d’un ordre divers et nouveau, auraient surgi de cette terre morte et froide ; que la presse multipliée à l’infini ne suffirait pas à répandre les idées ferventes d’une armée de jeunes écrivains ; que les drames se heurteraient à la porte de tous les théâtres ; que l’âme lyrique et religieuse d’une génération de bardes chrétiens inventerait une nouvelle langue pour révéler des enthousiasmes inconnus ; que la liberté, la foi, la philosophie, la politique, les doctrines les plus antiques comme les plus neuves, lutteraient, à la face du soleil, de génie, de gloire, de talents et d’ardeur, et qu’une vaste et sublime mêlée des intelligences, couvrirait la France et le monde du plus beau comme du plus hardi mouvement intellectuel qu’aucun de nos siècles eût encore vu ? […] C’était le palais épiscopal de l’évêque arabe de Balbek qui surveille dans ce désert un petit troupeau de douze ou quinze familles chrétiennes de la communion grecque, perdues au milieu de ces déserts et de la tribu féroce des Arabes indépendants de Békàa.
Comme ils écrivent pour le monde, pour les femmes, leur public, qui méprise la science des collèges et n’est pas plié à la superstition de l’antiquité, leur inspire une doctrine, qui se trouve être essentiellement excellente : ils prennent des sujets chrétiens, donc modernes, Childebrand, Clovis, saint Louis, Jeanne d’Arc : le plus ancien est pris aux contins de l’antiquité romaine et des temps chrétiens, l’Alaric de Scudéry. […] Voilà où en est Scudéry, et où ils en sont tous, et cette idée éclose dans les écoles philosophiques de la Grèce, pieusement recueillie par les chrétiens pour absoudre les chefs-d’œuvre parfois embarrassants de l’épopée païenne, sera consacrée par le docte père Le Bossu dans un inepte traité que Boileau estimera.
Le premier qui donna l’exemple de cette sorte de guerre, est un ancien poëte Grec appellé Hipponax, qui vivoit 540 ans avant l’ère chrétienne. […] C’est ainsi que cet auteur, qui posséde si bien son art, mais que son art n’aveugle point, sçait réunir les intérêts de l’homme de lettres, du philosophe & du chrétien. […] En France, ils sont excommuniés, & la sépulture chrétienne leur est refusée, s’ils n’ont pas, avant la mort, renoncé à leur profession.
Victor Hugo est tout cela) trouve des beautés inaccoutumées de sentiment et d’expression dans la résignation du chrétien, ces strophes resteront comme celles de Malherbe sur la mort de la fille de Desperriers et les derniers vers de Gilbert. […] Hugo est aussi corrompue et perdue que sa conscience de chrétien. […] C’est ce génie qui, de nature, nous appartient à nous autres, chrétiens, gens du passe, intelligences historiques, et qui en nous trahissant s’est encore plus trahi que nous ; c’est cette imagination heureusement indomptable, quoiqu’on lui ait mis des caparaçons bien étranges et des caveçons presque honteux, qui n’a pas voulu rester ce que Dieu l’avait faite pour sa gloire et la sienne, et qui s’est transformée en contemptrice aveugle de ce passé qui lui donne son talent encore, lorsqu’elle le peint en le ravalant !
Il reste un chrétien de sentiment dans Chateaubriand ; chez Flaubert il n’y a plus qu’un artiste. […] Les de Goncourt, par des procédés plastiques différents, ont peint l’intoxication dévote d’une honnête femme par la Rome catholique et chrétienne. […] Qu’elle est loin des frivolités féminines, cette vierge pure comme Cymodocée, tourmentée comme Velléda, chrétienne comme la fiancée de Chactas ! […] Son amie eut la joie de l’en remercier avant de quitter ce monde en chrétienne pieuse. […] Gentilhomme amoureux, catholique dilettante, Chateaubriand a eu, selon le mot de Louis Veuillot, qui s’y connaissait, « la sensation chrétienne et non le sens chrétien », le sens chrétien ne lui est venu, comme à madame de Beaumont, qu’au moment de mourir.
On savait que l’un d’eux seulement était chrétien ; mais Marius, sûr d’être délivré en arrivant à Rome, laissa partir son ami et resta aux mains des soldats. […] Voyez, par exemple, la supériorité des premiers dogmes chrétiens sur ceux que la scolastique a essayé d’y joindre. Voyez combien toute tentative d’explication de ces dogmes chrétiens a eu pour effet de les rendre moins forts. […] Balfour, le déisme, sous la forme particulière de la doctrine chrétienne. […] Si vague est sa doctrine qu’à peine on serait capable de dire s’il est socialiste, anarchiste, ou fataliste, ou simplement chrétien.
Il y a un autre écrit où on l’appelle Citoyen vertueux, et où l’on affirme qu’il est meilleur chrétien que Bossuet. […] Et enfin l’auteur de Dom Juan converti en chrétien, et en chrétien plus parfait que Bossuet, c’est un peu fort ! […] Les prédicateurs chrétiens ont eu un certain sens de l’égalité chrétienne, virtuellement et en puissance, ils l’ont eu même très grand, mais cette égalité virtuelle et en puissance n’a pas d’effets immédiats et directs, à moins que ce ne soit par la bonne direction de conscience, dans le monde réel. […] — Boileau, je m’empresse de vous le dire, est aussi bon chrétien que La Bruyère. […] Le serf, à son tour, écrasé sous tant de mépris, trouvait encore dans sa condition de chrétien de quoi dédaigner le juif, qu’il appelait « canaille » et qu’il brûlait.
Ce n’étoit pas là, dit-on, l’esprit d’une histoire universelle ; mais c’étoit du moins l’esprit que devoit avoir un Prélat chrétien, qui travailloit à l’instruction d’un Prince chrétien, (le grand Dauphin.) […] Vous ne pourrez vous dispenser de parcourir le savant ouvrage de M. de Tillemont, intitulé : Histoire des Empereurs & des autres Princes qui ont regné durant les six premiers siécles de l’Eglise, des persécutions qu’ils ont faites aux Chrétiens, de leurs guerres contre les Juifs, des Ecrivains prophanes & des personnes les plus illustres de leur tems, justifiée par les citations des auteurs originaux, avec des notes pour éclaircir les principales difficultés de l’histoire, en 6. vol. […] Vous pourrez prendre une idée de l’histoire de ce tems-là dans l’Abrégé chronologique de l’histoire générale d’Italie, depuis la chute de l’Empire Romain en Occident, c’est-à-dire, depuis l’an 476. de l’Ere chrétienne, jusqu’au traité d’Aix-la-Chapelle en 1748. par M. de St. […] Je ne sçais, ajoute-t’il, s’il a fait de ce Prince un bon chrétien, mais assurément il n’en a pas fait un héros, & Charles XII. seroit ignoré, s’il n’étoit connu que par Norberg.
La philosophie allemande moderne est le comble de l’absurdité ; les religions chrétiennes sont abominables aux esprits justes et aux amis de l’humanité.
On ne s’expliquerait donc pas l’emploi qu’ils firent des vérités de la foi, si l’on n’admettait pas l’influence de la Comedia. » Evidemment ; car la religion chrétienne étant absolument inconnue en France au dix-septième siècle, si Corneille a ignoré les Mystères, il n’a pu prendre idées et sentiments chrétiens que dans les drames espagnols. […] le voilà qui devient socialiste… ou chrétien… Oh ! […] Nous appelons cela aujourd’hui la réhabilitation, et toutes les écoles socialistes de notre siècle cherchent un idéal renouvelé de l’idéalisme chrétien. […] Il y aurait à faire le même travail, mais non en rhéteur, non en sophiste, en toute probité intellectuelle, sur les parties chrétiennes du théâtre de Corneille. […] C’est comme le leitmotiv du christianisme que cette histoire terrible et touchante ; et par ainsi, avec son flair merveilleux, Racine a été tout droit au drame de terreur et de pitié, au drame essentiellement fait pour des chrétiens, et le drame chrétien était pour la seconde fois rencontré et atteint.
Sceptiques, résignés ou mystiques, ils l’ont tous entrevu ou imaginé, depuis Gœthe jusqu’à Beethoven, depuis Schiller jusqu’à Heine ; ils y sont montés pour remuer à pleines mains l’essaim de leurs grands rêves ; ils ne se sont point consolés d’en tomber, ils y ont pensé du plus profond de leurs chutes ; ils ont habité d’instinct, comme leurs devanciers alexandrins et chrétiens, ce magnifique monde invisible où dorment dans une paix idéale les essences et les puissances créatrices, et « la véhémente aspiration de leur cœur a attiré hors de leur sphère ces esprits élémentaires, créatures de flamme, qui, mêlés aux choses dans les flots de la vie, dans la tempête de l’action, travaillent sur le métier bruissant de la durée et tissent la robe vivante de la Divinité1137. » Ainsi s’élève l’homme moderne, agité de deux sentiments, l’un démocratique, l’autre philosophique. […] Il croyait avoir « toutes les assurances possibles1173 » d’une vie future, et maintes fois, à côté d’une satire bouffonne, on trouve chez lui des stances pleines de repentir humble, de ferveur confiante ou de résignation chrétienne. Ce sont là, si vous voulez, les contradictions d’un poëte, mais ce sont aussi les divinations d’un poëte ; sous ces variations apparentes, il y a un idéal nouveau qui se lève ; les vieilles morales étroites vont faire place à la large sympathie de l’homme moderne qui aime le beau partout où le beau se rencontre, et qui, refusant de mutiler la nature humaine, se trouve à la fois païen et chrétien. […] Croyez-m’en, croyez-en un homme qui, ayant joui de ce privilége pendant quelques années, en a été privé pendant un nombre d’années plus grand encore, et qui n’a point l’espérance de jamais le recouvrer. » Et ailleurs : « On peut représenter le cœur d’un chrétien comme dans l’affliction et pourtant dans la joie, percé d’épines et pourtant couronné de roses. […] Voilà le pressentiment et l’aspiration qui soulèvent toute la poésie moderne, tantôt en méditations chrétiennes, comme chez Campbell et Wordsworth, tantôt en visions païennes, comme chez Keats et Shelley.
Il était, s’il est permis de traduire ainsi les cœurs, il était de ceux qui, en ces heures mémorables où il fallut faire acte de sacrifice, retrouvèrent la foi catholique par l’honneur même, et qui, se relevant des fragilités de leur passé, redevinrent véritablement chrétiens à force d’être honnêtes gens. […] Heureux pourtant et favorisé jusqu’à la fin, puisqu’il lui fut donné, par ses derniers sacrifices, de pouvoir racheter et expier en quelque sorte les mollesses de ses débuts, de confesser une religion de pauvreté par un coin d’adversité salutaire, et de prouver qu’il y avait en lui, sous ces formes tour à tour aimables et dignes, un fonds sincère de générosité humaine et chrétienne !
Ici il analyse finement l’ennui, dans un esprit de psychologie délicate et restée chrétienne : L’homme inoccupé, c’est-à-dire l’homme livré à la seule considération de son être personnel, éprouve deux sentiments habituels, également tristes : l’un est le sentiment de son infortune, il a le désir d’un bonheur vague qui le suit ; l’autre est le sentiment de sa bassesse, il voudrait être grand et important, il se trouve petit et méprisable. […] Il y mourut avec courage et en chrétien en 1732, à l’âge de quarante-neuf ans, moins d’un an après La Motte.
» Le matin, au balcon, Mlle Newton lisait de l’anglais, Le Lay du dernier ménestrel de Walter Scott, alors sous sa première forme de poète et avant le roman ; Le Voyage du pèlerin de Bunyan, « ce livre que ma mère m’a donné, et qu’elle aimait tant, qui présente une ingénieuse allégorie des progrès que peut faire un pèlerin chrétien à travers les misères humaines ; et plus on le relit, mieux on le comprend. » Elle lisait et relisait Shakespeare, c’était son livre de chaise de poste : « Bientôt je le saurai tout entier par cœur. […] Juste pensée du chrétien, pour qui le vieillard, quand il est saint, n’est qu’un épi plus mûr !
Un homme de mérite qui s’est occupé des anciens poètes chrétiens, au point de vue de la musique et de la littérature, M. […] [NdA] Voir Les Poètes chrétiens depuis le ive siècle jusqu’au xve , par M.
Doué d’ailleurs des talents littéraires les plus éminents, il n’en avait tiré nul parti, n’avait entrepris aucun ouvrage, avait projeté toujours et s’était répandu, et véritablement épuisé, comme un Coleridge ou un Diderot chrétien l’eût pu faire, dans les charmes et les fatigues d’une conversation multiple qu’on lui demandait sans cesse et à laquelle il ne savait pas résister. Or, en mourant, en redevenant de plus en plus un chrétien fidèle et contrit à ses dernières heures, en offrant à Dieu le sacrifice de tout, il eut pourtant un dernier regret, une tentation suprême, et cette tentation, comme il l’appelait en effet, est d’un ordre trop élevé et trop épuré, d’une qualité trop subtile, elle fait trop d’honneur et à lui et à notre littérature en particulier, pour ne pas être connue et racontée, si singulière qu’elle nous puisse paraître.
Luther était en train de remuer l’Allemagne, de l’arracher à la domination du saint-siège ; ils n’étaient pas Luthériens, ils ne voulaient pas rompre l’unité chrétienne ; mais ils ne pensaient point avoir de raison d’exclure de leur étude les textes qui sont la base de la foi. […] Elle ne voyait pas de mal à ce qu’un chrétien lût l’Écriture ou priât en sa langue, mais elle n’avait pas de doctrine ; elle s’accommodait de Calvin comme de Briçonnet.
Défenseur du devoir, de la vieille morale chrétienne, avocat de la femme à qui la société, l’homme rendent la vertu difficile et lourde, amateur de combinaisons romanesques, arrangeur d’accidents tragiques, Feuillet est précieux par son expérience du monde : certaines parties aristocratiques de notre société n’ont été vues et bien rendues que par lui. […] Détaché de toute croyance religieuse, il n’essaie pas de colorer en sentiment chrétien son incurable pessimisme de sensuel mélancolique : il sent l’être, en lui, hors de lui, s’écouler incessamment dans les phénomènes, et il poursuit la jouissance passagère de la sensation attachée aux apparences ; mais il savoure, dans le moment même où il jouit, l’amertume de l’inévitable anéantissement de l’apparence hors de lui, de la sensation en lui.
Phèdre a des remords de chrétienne, Andromaque des délicatesses et des coquetteries de princesse habituée à la vie de cour ; Junie se fait vestale, comme une fille noble, ayant perdu son fiancé, entre en religion ; Mithridate expire aussi majestueusement que mourra Louis XIV. […] Bossuet sème ses discours chrétiens de latinismes, et quand il résume à l’usage de son royal élève l’histoire de l’humanité, c’est le peuple romain qu’il comprend le mieux et admire le plus.
Mademoiselle imagine donc, en une prairie, près d’une forêt, en vue de la mer, une société des deux sexes, toute composée de gens aimables et parfaits, délicats et simples, qui gardent les moutons les jours de soleil et pour leur plaisir, qui se visitent le reste du temps d’un ermitage à l’autre, en chaise, en calèche, en carrosse ; qui jouent du luth et du clavecin, lisent les vers et les ouvrages nouveaux ; qui unissent les avantages de la vie civilisée et les facilités de la vie champêtre, sans oublier les vertus de la vie chrétienne ; qui, tous célibataires ou veufs, polis sans galanterie ou du moins sans amour, vivent honnêtement entre eux, et n’ont nul besoin de recourir au remède vulgaire du mariage. […] Mme de Motteville, en répondant à Mademoiselle avec toutes sortes de compliments et en l’appelant tour à tour illustre princesse et belle Amelinte, la raille finement sur cet article d’interdiction matrimoniale qui était le grand point du nouveau code de bergerie, et elle essaie d’insinuer un peu de réalité, un peu de bon sens, dans la peinture de cette république à la fois galante, platonique et chrétienne.
M. de Maistre, profondément chrétien de doctrine, et qui sait qu’il est bien des sortes de coupables, même parmi ceux qui s’appellent honnêtes gens, n’est pas si prompt à désespérer, et il croit découvrir des avertissements ou des châtiments salutaires, des signes de retour au bien jusque dans les spectacles les plus désastreux et les moins consolants. […] C’est toujours le même homme d’esprit, le même gentilhomme chrétien que nous connaissons, avec son timbre vibrant, sa parole aiguë qui part, qui éclate, qui du premier jet va plus loin qu’il ne semblerait nécessaire à la froide raison, mais qu’on serait fâché de trouver plus retenue et plus circonspecte ; car elle porte avec elle bien des vérités, et s’il semble qu’il y ait souvent colère en elle, lors même qu’il s’agit des amis, écoutez et sachez bien distinguer : c’est la colère de l’amour.
Il semble qu’une fois chrétien, sa nature inquiète et variable lui fit éprouver un peu de la tristesse des anciens renégats juifs, invinciblement ramenés à la synagogue, sans que la peine des relaps pût contenir leur nostalgie. […] « Pour moi, écrit-il dans son livre contre Bœrne, en 1840, les mots juif et chrétien sont synonymes et me servent à désigner non des croyances, mais des humeurs semblables ; je les oppose au mot hellène, par lequel non plus je n’entends un peuple mais une tendance, une façon de penser, innée ou acquise.