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831. (1867) Nouveaux lundis. Tome IX « Réminiscences, par M. Coulmann. Ancien Maître des requêtes, ancien Député. »

Voici pourtant une page des Mémoires, sur les invasions étrangères, qui me semble aussi bien pensée que bien écrite. […] Benjamin Constant lui-même n’est point sans énergie ; les élections promettent, les ultra se taisent… Oui, mais les étrangers sont là, mais le Comité européen tient ses séances à Paris… » Vous aurez remarqué ces mots : Benjamin Constant lui-même … Ce grand citoyen avait fort à faire pour se relever dans l’opinion de sa palinodie des Cent Jours.

832. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Mémoires de Malouet (suite.) »

Il se fit conduire chez moi : c’était un jour d’assemblée ; nous avions alors une escadre hollandaise en rade, commandée par l’amiral Kinsbergen, homme d’un rare mérite ; nous avions de plus un vaisseau de guerre suédois : tour, ces étrangers et plusieurs officiers de la marine française se trouvaient à l’intendance, lorsqu’on annonça l’abbé Raynal, que personne n’attendait. […] Le Musée britannique possède la lettre autographe qu’il écrivit à cette occasion à l’abbé Raynal, et qui est datée d’Ajaccio, l’an 1er de la liberté (1790) : « Monsieur, il vous sera difficile de vous ressouvenir, parmi le grand nombre d’étrangers qui vous importunent de leur admiration, d’une personne à laquelle vous avez bien voulu faire des honnêtetés.

833. (1869) Nouveaux lundis. Tome XI « Œuvres inédites de F. de La Mennais »

Pierre de La Mennais s’était signalé par ses services pendant la guerre d’Amérique et depuis, par le zèle et l’habileté de ses entreprises, en fournissant au port de Saint-Malo les matières requises pour la construction et l’armement des navires, en pourvoyant avec la plus grande diligence aux transports nécessaires à l’armée de Rochambeau, et enfin en faisant venir de l’étranger, dans les disettes de 1782 et de 1786, une quantité considérable de blés et de fourrages qu’il avait généreusement livrés au commissaire royal et fait vendre au-dessous du prix courant. […] Pourquoi donc sacrifierions-nous cette sorte de devoir réciproque et tout ensemble notre bonheur à des considérations étrangères ?

834. (1872) Nouveaux lundis. Tome XIII « Le général Jomini. [III] »

Une ouverture avait déjà été faite de ce côté auprès de Jomini en 1807, pour qu’il entrât au service de la Russie, qui croyait avoir besoin à ce moment d’officiers de mérite, et qui a toujours été accueillante pour les étrangers. […] J’en avais doublement le droit comme étranger… Si j’ai persisté, c’est qu’il est de ces circonstances où un homme de cœur ne peut reculer.

835. (1871) Portraits contemporains. Tome V (4e éd.) « UN DERNIER MOT sur BENJAMIN CONSTANT. » pp. 275-299

Dans cette voie si périlleuse de la biographie contemporaine, il a su éviter les écueils de plus d’un genre, et atteindre le but qu’il s’était proposé : de la loyauté, de l’indépendance, aucune passion dénigrante, de bonnes informations, la vie publique racontée avec intelligence et avec bon sens, la vie privée touchée avec tact, ce sont là des mérites dont il a eu l’occasion de faire preuve bien des fois en les appliquant à une si grande variété de noms célèbres tant en France qu’à l’étranger ; cela compense ce que sa manière laisse à désirer peut-être au point de vue purement littéraire, et ce qui doit manquer aussi à ses jugements en qualité originale, car l’étendue même de son cadre lui impose un éclectisme mitigé. […] Je suis, grâce à mon bavardage sur moi-même, tellement décrié que je n’ai pas besoin de l’être plus ; et si mes lettres, qui nagent dans vos appartements, échouaient en quelques mains étrangères, cela donnerait le coup de grâce à ma mourante réputation… » Je n’avais pas jugé utile dans le premier travail de faire entrer ce fragment, qui en dit plus que nous ne voulons, qui en dit trop, car certainement Benjamin Constant valait infiniment mieux que la réputation qu’il s’était faite alors ; mais enfin il se l’était faite, comme lui-même il en convient : étais-je donc si en erreur et si loin du compte quand j’insistais sur certains traits avec précaution, avec discrétion ?

836. (1887) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Troisième série «  Paul Bourget  »

Il ne veut pas qu’il soit dit qu’aucune affection mentale de son temps lui ait été étrangère ou lui soit restée incomprise. […] Il a un faible très marqué pour les belles étrangères qui passent l’hiver à Paris.

837. (1890) La fin d’un art. Conclusions esthétiques sur le théâtre pp. 7-26

Non point, car nous ne considérons pas le public comme une foule étrangère à amuser ; comme un but, principal ou accessoire. […] Lagneau, certains économistes conseillent d’insuffler quelques sangs étrangers dans nos veines appauvries, d’autres cosmopolites convaincus promettent, par la transfusion du théâtre exotique, la convalescence du nôtre : le malheur est qu’on ne veut pas comprendre les traductions, et que les adaptations ne servent à rien. — Notre esthétique est d’une triste exactitude, si la prévision négative suggérée par le séparatisme contemporain se réalise aussi juste.

838. (1887) Discours et conférences « Réponse au discours de M. Louis Pasteur »

La fermentation vous mène aux maladies, qui sont en quelque sorte la fermentation de l’être vivant ; de la cristallographie vous êtes conduit à la médecine ; vous arrivez à voir que les maladies transmissibles tiennent le plus souvent à des développements irréguliers d’êtres étrangers à l’organisme, qui le troublent ou le détruisent. […] Rien ne leur restait étranger.

839. (1889) Le théâtre contemporain. Émile Augier, Alexandre Dumas fils « Alexandre Dumas fils — Chapitre XII »

M. de Ryons devine, par des procédés analogues, que madame de Simerose est d’origine étrangère et qu’elle est une honnête femme, quoique séparée de son mari, par un accident qui échappe à sa seconde vue. […] Ce secret, que Jane avoue à cet étranger, inconnu la veille, une fille oserait à peine le balbutier à sa mère, entre deux sanglots.

840. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Lettres de Mlle de Lespinasse. » pp. 121-142

dit-elle encore, que la passion m’est naturelle, et que la raison m’est étrangère ! […] Au milieu de cette passion qui dévore et qui semble ne souffrir rien d’étranger, ne croyez pas que la correspondance ne laisse point voir l’esprit charmant qui s’unissait à ce noble cœur.

841. (1857) Causeries du lundi. Tome II (3e éd.) « Madame Geoffrin. » pp. 309-329

Un jour, un étranger demanda à Mme Geoffrin ce qu’était devenu ce vieux monsieur qui assistait autrefois régulièrement aux dîners et qu’on ne voyait plus ? […] Pas un étranger de distinction ne vivait ou ne passait à Paris sans aspirer à être admis chez Mme Geoffrin.

842. (1857) Causeries du lundi. Tome IV (3e éd.) « Jasmin. (Troisième volume de ses Poésies.) (1851.) » pp. 309-329

c’en est une, étrangère. […] Il eut à se défaire lui-même de ses premières habitudes, à débarrasser la superficie de la pierre, comme il dit, de ces couches étrangères qu’y avaient appliquées deux siècles civilisateurs.

843. (1865) Causeries du lundi. Tome VI (3e éd.) « Le maréchal Marmont, duc de Raguse. — I. » pp. 1-22

Ce malheur, noblement porté durant les vingt et une années d’exil qu’il passa à l’étranger, donnait à sa physionomie une expression à part entre toutes celles de ses compagnons d’armes, dont plusieurs avaient été si durs pour lui. […] Les vicissitudes extrêmes de cette rapide campagne ont amené Marmont avec Mortier auprès de Paris, dont Napoléon est éloigné, et que les armées étrangères atteignent et pressent déjà.

844. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Grimm. — I. » pp. 287-307

 » Une seule petite incorrection : « à commencer de Molière », au lieu de « commencer par Molière… » laissait entrevoir la trace d’une plume étrangère. […] En général, un étranger de bon esprit, et qui fait un séjour suffisant chez une nation voisine, est plus apte à prononcer sur elle que ne le peut faire quelqu’un qui est de cette nation, et qui par conséquent en est trop près.

845. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « M. Necker. — I. » pp. 329-349

Parmi les étrangers célèbres qui se naturalisèrent en France au xviiie  siècle, aucun n’eut plus d’influence, et une influence plus directe sur nos destinées, que M.  […] Il y a des exceptions cependant, mais fort rares, et c’est alors un grand honneur réservé ou aux princes du sang, ou aux femmes étrangères de la première distinction, ou aux généraux qui viennent de gagner une bataille, ou à un ministre en crédit, à la condition cependant pour celui-ci, qu’il soit assez considéré pour laisser en doute si ce n’est pas à son mérite seul qu’on rend hommage.

846. (1865) Causeries du lundi. Tome VII (3e éd.) « Monsieur Arnault, de l’Institut. » pp. 496-517

Sans amis, comme sans famille, Ici-bas vivre en étranger ; Se retirer dans sa coquille Au signal du moindre danger ; S’aimer d’une amitié sans bornes ; De soi seul emplir sa maison ; En sortir, suivant la saison, Pour faire à son prochain les cornes ; Signaler ses pas destructeurs Par les traces les plus impures ; Outrager les plus tendres fleurs Par ses baisers ou ses morsures ; Enfin, chez soi, comme en prison, Vieillir de jour en jour plus triste, C’est l’histoire de l’égoïste Et celle du Colimaçon. […] Parlant de l’honorable historien Lémontey qui, en petit comité, sous la Restauration, avait tout son courage libéral et tout son trait, mais qui, à la seule vue d’un étranger, rentrait aussitôt dans sa circonspection et s’y renfermait : « Une goutte d’eau, disait Arnault, suffisait pour mouiller toute sa poudre. » Pour lui, c’était tout le contraire ; sa poudre partait par tous les temps.

847. (1885) Les œuvres et les hommes. Les critiques, ou les juges jugés. VI. « Rivarol » pp. 245-272

Il émigra devant un gouvernement tombé bien plus bas qu’en quenouille… M. de Lescure, dans sa biographie, dit quelque part, pour grandir peut-être l’émigration de Rivarol, qu’il croyait mieux servir sa cause à l’étranger et qu’un moment il y noua des relations avec Pitt. […] Cet Alcibiade du Royalisme, par sa puissance de séduction et par sa beauté, mourut à l’étranger, comme Alcibiade chez les Perses.

848. (1876) Chroniques parisiennes (1843-1845) « XXVI » pp. 100-108

Quelqu’un qui l’a bien connu disait : « M. de Genoûde m’est insupportable ; ce prêtre gras me dégoûte ; sa grosse face exprime sa logique béate ; sa mauvaise foi, à la longue, a l’air d’être devenue une conviction, absolument comme un corps étranger qui, à force de séjourner dans l’estomac, s’introduirait dans l’organisation et irait se loger entre cuir et chair : … et fibris increvit opimum Pingue… a dit Juvénal. » 24.

849. (1864) Portraits littéraires. Tome III (nouv. éd.) « Sur l’École française d’Athènes »

Ceux-ci en général (le grand Coray à part), se sentant après tout les fils de la vraie race, ont trop négligé l’érudition proprement dite ; ils se sont trop conduits comme les descendants d’une grande famille ruinée, mais qui, fiers de parler la langue de leur nourrice, la langue de leur maison, s’y tiennent et négligent les autres sources d’instruction et les autres moyens d’éclaircissement comme n’étant proprement qu’à l’usage des étrangers.

850. (1874) Premiers lundis. Tome I « Deux révolutions — I. De la France en 1789 et de la France en 1830 »

Une haine seule, une haine profonde, invétérée, une passion instinctive, débris vivace de toutes les autres passions politiques, remuait au cœur du peuple : c’était la haine des Bourbons, du drapeau blanc ramené par l’étranger, des jésuites.

851. (1902) L’observation médicale chez les écrivains naturalistes « Chapitre V »

 »92 … « Rien ne se fane plus vite dans une langue que les mots sans racine vivante : ils sont des corps étrangers que l’organisme rejette, chaque fois qu’il en a le pouvoir, à moins qu’il ne parvienne à se les assimiler… Déjà les médecins qui ont de l’esprit n’osent plus guère appeler carpe le poignet, ni décrire une écorchure au pouce en termes destinés sans doute à rehausser l’état de duelliste, mais aussi à ridiculiser l’état de chirurgien. »93 ⁂ L’outrance de la terminologie technique est d’ailleurs aussi néfaste à la littérature médicale qu’opposée aux tendances d’impersonnalité chères aux naturalistes.

852. (1796) De l’influence des passions sur le bonheur des individus et des nations « Section II. Des sentiments qui sont l’intermédiaire entre les passions, et les ressources qu’on trouve en soi. — Chapitre III. De la tendresse filiale, paternelle et conjugale. »

La tendresse des enfants pour leurs parents se compose, pour ainsi dire, de tous les événements de leur vie ; il n’est point d’attachement dans lequel il entre plus de causes étrangères à l’attrait du cœur, il n’en est donc point dont la jouissance soit plus incertaine.

853. (1895) Histoire de la littérature française « Cinquième partie. Le dix-huitième siècle — Livre IV. Les tempéraments et les idées (suite) — Chapitre III. Buffon »

Il ne fait intervenir dans la science aucune influence étrangère.

854. (1892) Les contemporains. Études et portraits littéraires. Cinquième série « Contre une légende »

Bref, il entre dans l’image que la foule se forme de lui nombre de traits aussi étrangers que possible à sa véritable physionomie, et il lui est arrivé d’être loué pour des choses dont il a toujours eu profondément horreur.

855. (1903) Le mouvement poétique français de 1867 à 1900. [2] Dictionnaire « Dictionnaire bibliographique et critique des principaux poètes français du XIXe siècle — M — Mallarmé, Stéphane (1842-1898) »

Le Romantisme, né d’influences étrangères comme la Pléiade autrefois, avait enrichi la Poésie d’une multitude de couleurs et de formes, d’une harmonie plus sonore et d’une émotion nouvelle.

856. (1920) La mêlée symboliste. I. 1870-1890 « Laurent Tailhade à l’hôpital » pp. 168-177

Aucune formule ne lui est restée étrangère.

857. (1920) La mêlée symboliste. II. 1890-1900 « L’état de la société parisienne à l’époque du symbolisme » pp. 117-124

Lorsque la princesse vous avait permis de s’inquiéter de sa santé ou de ses proches, il était courant d’en recevoir une réponse de ce genre. « Je suis, pour l’heure, assez contente de Messaline, mais Nana me donne de graves soucis. » Un étranger eût pu croire qu’il s’agissait de ses filles.

858. (1781) Les trois siecles de la littérature françoise, ou tableau de l’esprit de nos écrivains depuis François I, jusqu’en 1781. Tome III « Les trois siècle de la littérature françoise. — L — article » pp. 39-51

Linguet est un plat Ecrivain, un homme ignorant, étranger à la Littérature, un Ecolier qui n’a aucun principe de critiques ; qu’il s’y justifie, comme il pourra, de s’être revêtu des dépouilles de cet Ecolier ennemi, après avoir causé sa disgrace.

859. (1888) La critique scientifique « Appendice — Plan d’une étude complète d’esthopsychologie »

(Étranger, 1830-1888) Insuccès et inintelligence généraux, sauf en Angleterre, où un disciple, Swinburne, et en Italie.

860. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — Les inscriptions des monumens publics de France doivent-elles être écrites en Latin ou en François. » pp. 98-109

Enfin Horace & Virgile ont composé dans leur langue ; Homère & Anacréon ont écrit en Grec, & non pas en Hébreu ou en Égyptien : un François doit écrire en François, & non pas dans une langue étrangère à tant de monde.

861. (1761) Querelles littéraires, ou Mémoires pour servir à l’histoire des révolutions de la république des lettres, depuis Homère jusqu’à nos jours. Tome II « Querelles générales, ou querelles sur de grands sujets. — Première Partie. Des Langues Françoise et Latine. — De la langue Latine. » pp. 147-158

On voit encore, à Basle, dans un cabinet qui excite la curiosité des étrangers, son anneau, son cacher, son épée, son couteau, son poinçon, son testament écrit de sa propre main, son portrait par le célèbre Holben, avec une épigramme de Théodore de Beze.

862. (1906) La nouvelle littérature, 1895-1905 « Deuxième partie. L’évolution des genres — Chapitre VI. Conclusions » pp. 232-240

Nous repousserons les philtres de la sirène étrangère, et nous n’imiterons pas l’imprudent Ulysse, qui but dans la coupe de l’enchanteresse l’oubli de la patrie et du foyer domestique… Nous prendrons pour modèle l’humble effort de l’arbre qui, tout entier concentré dans l’élaboration des sèves, envoie ses racines les plus profondes comme ses branches les plus hautes à la poursuite de toutes les nourritures qui fructifieront sous son écorce.

863. (1827) Génie du christianisme. Seconde et troisième parties « Troisième partie. Beaux-arts et littérature. — Livre second. Philosophie. — Chapitre VI. Suite des Moralistes. »

Comment se fait-il que notre prodigieux amour de la patrie aille toujours chercher ses mots dans un dictionnaire étranger ?

864. (1782) Essai sur les règnes de Claude et de Néron et sur la vie et les écrits de Sénèque pour servir d’introduction à la lecture de ce philosophe (1778-1782) « A Monsieur Naigeon » pp. 9-14

Une expérience que je proposerais volontiers à l’homme de soixante-cinq ou six ans, qui jugerait les miennes ou trop longues, ou trop fréquentes, ou trop étrangères au sujet10, ce serait d’emporter avec lui, dans la retraite, Tacite, Suétone et Sénèque ; de jeter négligemment sur le papier les choses qui l’intéresseraient, les idées qu’elles réveilleraient dans son esprit, les pensées de ces auteurs qu’il voudrait retenir, les sentiments qu’il éprouverait, n’ayant d’autre dessein que celui de s’instruire sans se fatiguer : et je suis presque sûr que, s’arrêtant aux endroits où je me suis arrêté, comparant son siècle aux siècles passés, et tirant des circonstances et des caractères les mêmes conjectures sur ce que le présent nous annonce, sur ce qu’on peut espérer ou craindre de l’avenir, il referait cet ouvrage à peu près tel qu’il est.

865. (1733) Réflexions critiques sur la poésie et la peinture « Seconde partie — Section 30, objection tirée des bons ouvrages que le public a paru désapprouver, comme des mauvais qu’il a loüez, et réponse à cette objection » pp. 409-421

Quand la pucelle de Chapelain parut, elle avoit pour elle les suffrages des gens de lettre étrangers et françois.

866. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Renan — III »

Aucun des ouvrages de l’auteur de la Vie de Jésus ne me semble aussi parfaitement étranger au sentiment catholique, voire au sentiment religieux, que cette correspondance où éclate d’ailleurs une admirable passion de l’étude.‌

867. (1900) Taine et Renan. Pages perdues recueillies et commentées par Victor Giraud « Taine — VII »

Sa voix était très prenante : une voix comme teintée d’accent étranger.

868. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Les nièces de Mazarin et son dernier petit-neveu le duc de Nivernais. Les Nièces de Mazarin, études de mœurs et de caractères au xviie  siècle, par Amédée Renée, 2e éd. revue et augmentée de documents inédits. Paris, Firmin Didot, 1856. » pp. 376-411

Le duc de Nivernais était, en effet, plus propre que personne à servir d’exemple ; à une époque où l’on se piquait avant tout d’être, non pas féroce, mais ce qu’on appelait un homme aimable et même un petit-maître, et en l’étant lui-même, il n’avait rien négligé de ce qui orne intérieurement l’esprit, il se préparait à devenir insensiblement raisonnable ; il savait toutes les langues vivantes, il lisait les auteurs étrangers et en tirait des imitations faciles ; il ne songeait qu’à embellir, à égayer honorablement une grande et magnifique existence, et, sans le savoir, il ménageait à son âme des consolations imprévues pour son extrême vieillesse, dans la plus violente crise sociale qui ait assailli les hommes civilisés. […] Il n’est qu’un étranger, homme d’esprit, pour marquer ainsi nettement et mettre en relief les choses que, de près, quand on les veut exprimer, on efface dans une politesse trop uniforme. […] Mais sa personne est aimée et justement aimée, et l’on a fort applaudi ces vers de duc et d’amateur. » Il ne passait pas à Paris un souverain étranger, un prince Henri de Prusse, une grande-duchesse de Russie, que le duc de Nivernais ne les fêtât par quelques couplets impromptus, ou même par quelque opéra de sa façon.

869. (1875) Premiers lundis. Tome III « De la liberté de l’enseignement »

J’en viens au fait peut-être le plus grave du rapport et qui s’y est introduit subsidiairement, bien qu’il soit étranger à la pétition. […] Cousin, doctrine spécieuse, œuvre d’éloquence et de talent, mais en grande partie artificielle, abstraite, étrangère à toute recherche scientifique exacte. […] J’aime la liberté invoquée comme principe, mais je ne me paye pas de mots, et j’aime encore mieux la civilisation qui est le but ; je désire pour la jeunesse française, dans l’ordre des sciences, en présence des jeunesses étrangères, émules et rivales, le plus ferme, le plus sain et le plus viril enseignement.

870. (1862) Cours familier de littérature. XIV « LXXXIIe entretien. Socrate et Platon. Philosophie grecque. Deuxième partie. » pp. 225-303

Une seule chose l’embarrasse dans cette théologie, c’est l’existence de la matière ; il ne veut pas la reconnaître divine, et cependant il ne veut pas reconnaître que Dieu ait pu créer, lui esprit, une substance si étrangère à sa perfection ; il fait donc coexister la matière avec Dieu. […] Pire qu’un troupeau, car dans le troupeau le petit tète, connaît et caresse sa mère ; mais le petit de l’homme et de la femme sucera le sein de l’étranger et ne connaîtra que le lait vénal de la nourrice mercenaire payée par l’État. […] Y a-t-il rien de plus contraire à l’instinct de tendresse, de pitié, de sollicitude privilégiée, qui attendrit et qui affectionne les mères, les pères, les étrangers même, à proportion des infirmités et des faiblesses des êtres moins favorisés de la nature ?

871. (1907) Propos littéraires. Quatrième série

Gambetta, je crois bien que je le mettrai aux Étrangères. […] « Le livre à sa pensée étranger désormais » ne l’invite plus à de nouvelles triturations. C’est sur du papier étranger et banal que maintenant il est écrit. […] Avoir toujours les yeux fixés sur l’étranger, quoi que nous fassions, même en politique tout intérieure. Au fond, la vérité en politique est ceci : il n’y a que de la politique étrangère.

872. (1914) L’évolution des genres dans l’histoire de la littérature. Leçons professées à l’École normale supérieure

Breitinger, professeur de littératures étrangères à Zurich, et qui semble, je ne sais comment, avoir passé chez nous presque inaperçue. […] Représentez-vous, de nos jours, quel serait l’embarras, l’embarras des Anglais ou généralement des étrangers, si, dans nos histoires de la littérature, nous mettions constamment l’auteur du Glorieux ou celui du Légataire au-dessus de l’auteur de Tartufe ! […] Elle implique encore une confiance dans l’autorité des règles tout à fait étrangère à l’esprit de la véritable critique. […] Mais Mme de Staël insinue qu’il pourrait y avoir dans une littérature étrangère des « beautés » que nous fussions incapables d’abord de sentir ; qui n’en seraient pas moins des « beautés » ; et qu’il nous faut donc nous apprendre à comprendre. […] C’est pour cela que l’influence de la littérature nationale sur les littératures étrangères n’y tenait pas moins de place.

873. (1904) En lisant Nietzsche pp. 1-362

Il la tient pour amoureuse d’uniformité, de médiocrité et de laideur, comme tout ce qu’il y a au monde de plus étranger à la vie, de plus hostile à la vie, et de plus destructeur de la vie. […] La conscience d’un changement en nous sans que nous l’ayons voulu exige une volonté étrangère. […] À tous les points de vue, elle aussi est une étrangère, une intruse importune et un obstacle. […] Un peu plus tard, Schopenhauer, lui aussi, y assistait… Et qu’est-ce qui séduisit, au fond, les étrangers, qu’est-ce qui fit qu’ils ne se comportèrent point comme Goethe et Schopenhauer, ou simplement qu’ils ne regardèrent point ailleurs ? […] Il y a des morales pour l’étranger et contre l’étranger.

874. (1890) Causeries littéraires (1872-1888)

Ainsi lui, méridional, peint le Midi comme un étranger qui y viendrait pour première fois. […] Voilà les raisons invoquées, et d’autres encore du même genre, mais toujours raisons en dehors de la littérature, qui est étrangère à l’événement. […] Un étranger s’interpose entre eux, un étranger pour qui la veuve a des regards plus tendres qu’autrefois pour son mari. […] Il n’est plus dans la maison maternelle qu’un étranger. […] Il devient la providence de cette maison où il n’est qu’un inconnu, un étranger.

875. (1884) La légende du Parnasse contemporain

— pour un riche étranger qui venait visiter la capitale ou pour quelque général péruvien curieux d’étudier en France les progrès des armements européens. […] Or, parmi les visions qui me charment, il en est une que je veux vous dire : Dans une dizaine d’années, — mettons quinze, mais pas plus, — s’il arrive à un étranger curieux de visiter les environs de Paris, de se trouver, par une belle matinée de printemps, sur le bord de l’étang de Ville-d’Avray, cet étranger aura devant les yeux un spectacle vraiment éblouissant ! […] Sans nul doute l’étranger restera stupéfait et songeur devant un si admirable domaine ! […] Alors, certainement, en levant les bras au ciel, l’étranger s’écriera : « Oh ! […] s’écriera l’étranger, homme aussi étonnant par tes innombrables richesses que par la douceur de ta parole ? 

876. (1890) Le massacre des amazones pp. 2-265

Tant que l’homme n’a pas compris l’étranger, il le considère comme un barbare. […] Elle laisse ses yeux jouir de l’aspect nouveau, et le sourire de son esprit caresse l’étranger, comme sa main caresse l’animal mystérieux et familier. […] Malgré l’applaudissement des Quarante, je croirais pousser loin la naïveté si je relevais chez cette étrangère impropriétés et incorrections. […] Il y a plaisir à lire ses études superficielles et élégantes, d’un talent lent et calme sur les littératures et les mœurs étrangères. […] — qu’à conter cette histoire étrangère.

877. (1924) Intérieurs : Baudelaire, Fromentin, Amiel

Amiel, lui, c’est l’étranger. Comme la province commence au quai de l’Horloge, l’étranger commence après la douane de Bellegarde, et la mémoire de Rousseau en a su quelque chose. […] L’histoire de l’art constitue au contraire, en France comme à l’étranger, un genre abondant, vigoureux, où travail et résultat ont été considérables. […] C’est Maine de Biran le barbare et l’étranger. […] Le point de vue de ce Parisien ne saurait rester, pour la critique, étranger à l’être d’Amiel).

878. (1929) Amiel ou la part du rêve

Bernard Bouvier remarque que, dans de nombreuses langues étrangères, ce sont presque toujours des femmes qui ont traduit le Journal. […] Les barrières de caste qui à Genève empêchaient Amiel de pénétrer dans certains milieux genevois, tombent à l’étranger. […] Il était étranger aux partis politiques. […] À l’étranger renvoyons ses défis ! […] Par Malagnou et Grange-Canal, il atteint Jargonant, alors pleine campagne, passe chez les dames qui tiennent la pension de jeunes étrangères où il donne des leçons, où une nouvelle Héloïse fût, paraît-il, volontiers, comme tant d’autres, devenue sa femme.

879. (1895) Journal des Goncourt. Tome VIII (1889-1891) « Année 1891 » pp. 197-291

Jean Lorrain qui vient après Huysmans, et qui connaît le Château-Rouge et ses habitués, rabaisse les scélérats de l’endroit, et affirme que ce sont des cabotins, des criminels de parade, que font voir les agents de police aux étrangers. […] Ce soir, au Théâtre-Libre, le Canard sauvage d’Ibsen… Vraiment, les étrangers, la distance les sert trop… Ah ! […] Je m’élevais, avec une espèce de colère, contre ce mangement de l’esprit français, à l’heure actuelle, par l’esprit étranger, contre l’ironie présente du livre qui n’est plus de l’ironie à la Chamfort, mais de l’ironie à la Swift, contre cette critique devenue helvetienne, allemande, écossaise, contre cette religion des romans russes, des pièces danoises, déclarant qu’autrefois, si Corneille avait emprunté à l’Espagne, il a imposé le cachet français à ses emprunts, tandis qu’aujourd’hui les emprunts que nous faisons dans notre servile admiration : c’est une vraie dénaturalisation de notre littérature. […] Dimanche 31 mai Au Grenier, la conversation revient encore aujourd’hui, sur la conquête de la littérature française par la littérature étrangère. […] À l’humiliation que Daudet et moi, éprouvons à voir notre littérature, allemanisée, russifiée, américanisée, Rodenbach oppose la théorie, qu’au fond les emprunts sont bons, que c’est de la nutrition avec laquelle s’alimente une littérature, et qu’au bout de quelque temps, quand la digestion sera faite, les éléments étrangers qui auront grandi notre pensée, disparaîtront dans une fusion générale.

880. (1894) Études littéraires : seizième siècle

Il faut remarquer, à propos de ce « genre éminemment français », que peut-être en effet les étrangers (à en excepter les Italiens) n’y ont pas réussi du tout ; mais aussi que le nombre est très petit des Français qui y ont fait bonne figure. […] Mais le véritable secret de Rabelais n’est pas encore là, le secret de son succès, de sa gloire, de l’immense, dirai-je influence, de l’immense retentissement de son œuvre à travers les esprits tant français qu’étrangers, les plus différents du reste. […] Si Rabelais l’a attaqué si joliment, c’est d’abord parce qu’il s’amuse et que tous les ridicules sont de sa juridiction ; c’est ensuite parce qu’il est, sinon très patriote, du moins très national, de bonne souche gauloise et que l’importation soit étrangère, soit antique, n’est point du tout son fait. […] Ce qui avait des chances de succès à Genève après la période héroïque de cette cité, c’était donc un despotisme qui ne vînt pas d’une puissance étrangère, qui ne fût pas catholique, qui ne fût pas aristocratique et qui fût très rude. […] Elle était absolument étrangère à l’antiquité.

881. (1910) Variations sur la vie et les livres pp. 5-314

La langue d’oïl fut également en honneur parmi les étrangers. […] — Tu es insensé, lui répond l’impitoyable Cyclope, ô étranger, ou tu viens de bien loin, toi qui me parles des dieux et de leur colère. […] On était mieux traité chez le vieux maréchal Schulembourg, un étranger que la République avait mis à la tête de ses troupes. […] Je veux dire les romantiques étrangers, surtout les allemands ; car pour les romantiques français, ils ne jouèrent en l’occurrence qu’un rôle très effacé. […] Il disait que « c’est rendre service à l’esprit humain, de l’orner ainsi des richesses des pays étrangers ».

882. (1869) Causeries du lundi. Tome IX (3e éd.) « Marivaux. — I. » pp. 342-363

L’absence complète d’imagination chez La Motte semble une qualité et un mérite de plus à Marivaux : « La composition de M. de La Motte tient de l’esprit pur, dit-il ; c’est un travail du bon sens et de la droite raison ; ce sont des idées d’après une réflexion fine et délicate, réflexion qui fatigue plus son esprit que son imagination. » Il le félicite d’être parfaitement étranger à l’enthousiasme, de ne se laisser jamais emporter, comme quelques autres, à un train d’idées ordinaires et communes, montées sur un char magnifique ; il lui accorde une vivacité toute spirituelle, d’une espèce unique et si fine qu’il est donné à peu de gens de la goûter. […] Comme l’émotion, la verve, l’inspiration et tout ce qui y ressemble lui étaient choses complètement étrangères, il n’a pas su les voir en autrui ; il n’a rendu les armes de près ni de loin à cette puissance créatrice qui porte au premier rang un petit nombre d’hommes, et on pourrait le définir, au milieu de tous les éloges qu’il mérite pour l’originalité de ses vues, pour la variété et la gentillesse de ses œuvres, « celui qui n’a senti ni Homère ni Molière ».

883. (1870) Causeries du lundi. Tome XIII (3e éd.) « Histoire du règne de Henri IV, par M. Poirson » pp. 210-230

Lui et les chefs rebelles n’hésitèrent plus dès lors à faire appel ouvertement à l’étranger. […] Mais en toutes les autres choses, aux affaires de la justice, aux affaires des finances, aux négociations étrangères, aux dépêches, à la police de l’État, reconnaissant bien que ce n’est pas là où en ce temps il s’applique tout, il croit entièrement ceux des siens qu’il voit s’y être occupés et y avoir bien pensé… Henri IV ne sera pas toujours ainsi ; mais à cette heure il laisse encore beaucoup faire et s’en remet de bien des choses d’État à ses serviteurs, notamment à du Plessis ; il est capitaine avant tout et ne se pique d’honneur que dans cette partie.

884. (1865) Nouveaux lundis. Tome IV « Histoire de la Restauration par M. Louis de Viel-Castel. Tomes IV et V. (suite et fin) »

Cette doctrine particulière, qu’il étudia et analysa avec une fermeté ingénieuse, ne fut jamais chez lui que secondaire et subordonnée à des principes religieux et moraux supérieurs ; il ne poussa jamais l’examen à ses dernières limites, et les aventures, les constructions de système de ceux qui affectaient en toute occasion de se proclamer ses disciples, par un sentiment de reconnaissance et de déférence sans doute, mais aussi pour se couvrir au besoin de lui, lui restèrent choses extérieures et presque étrangères. […] Il eut plus qu’eux aussi, plus que tous ces hommes distingués et raisonneurs du premier et du second groupe doctrinaire, le sentiment patriotique proprement dit, celui même qui animait le noble duc de Richelieu, et qui fait qu’on souffre tout naturellement et qu’on a le cœur qui saigne à voir l’étranger fouler le sol de la patrie.

885. (1866) Nouveaux lundis. Tome V « Don Carlos et Philippe II par M. Gachard Don Carlos et Philippe II par M. Charles de Mouy »

Tous les jugements des ambassadeurs et résidents étrangers concourent et s’accordent à ce sujet. […] Philippe sentit qu’il devait sans retard, et pour en bien fixer le caractère, informer de cet événement les principales autorités de son royaume et les souverains ses alliés, à l’étranger ; des lettres furent écrites en ce sens pendant les jours suivants.

886. (1867) Nouveaux lundis. Tome VII « Anthologie grecque traduite pour la première fois en français et de la question des Anciens et des Modernes »

Il savait se montrer plein d’accueil et avec les étrangers et avec ses concitoyens. […] Moi je n’ai rien, mais chez eux de plus amples provisions vous attendent. » Il avait connu l’exil et les misères chez l’étranger, et, bornant ses vœux au plus strict nécessaire, il s’écriait dans un ton bien éloigné de lHoc erat in votis d’Horace, et qui rappelle plutôt le Moretum de Virgile : « Ne te consume point, ô Homme !

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